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mis en distribution

le 20 février 2008


N° 657

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 janvier 2008.

PROPOSITION DE LOI
CONSTITUTIONNELLE

tendant à la reconnaissance des langues régionales,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR M. Victorin LUREL, Mmes Marylise LEBRANCHU, Françoise OLIVIER-COUPEAU, MM. Jean-Marc AYRAULT, Paul GIACOBBI, Simon RENUCCI, Jean-Jacques URVOAS, Mme Patricia ADAM, MM. Jean-Paul BACQUET, Jean-Pierre BALLIGAND, Gérard BAPT, Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Mmes Chantal BERTHELOT, Gisèle BIEMOURET, MM. Daniel BOISSERIE, Jean-Michel BOUCHERON, Mme Danielle BOUSQUET, M. Thierry CARCENAC, Mme Martine CARRILLON-COUVREUR, M. Jean-Michel CLÉMENT, Mme Marie-Françoise CLERGEAU, MM. Gilles COCQUEMPOT, Pierre COHEN, Mmes Pascale CROZON, Claude DARCIAUX, MM. Michel DEBET, Pascal DEGUILHEM, Mme Michèle DELAUNAY, MM. Guy DELCOURT, Michel DELEBARRE, Bernard DEROSIER, René DOSIÈRE, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Jean-Paul DUPRÉ, Mme Odette DURIEZ, MM. Olivier DUSSOPT, Christian ECKERT, Mme Corinne ERHEL, M. Albert FACON, Mmes  Martine FAURE, Aurélie FILIPPETTI, MM. Jean-Claude FRUTEAU, Jean-Louis GAGNAIRE, Mme Geneviève GAILLARD, MM. Jean GAUBERT, Jean-Patrick GILLE, Mme Annick GIRARDIN, MM. Joël GIRAUD, Jean GLAVANY, Daniel GOLDBERG, Marc GOUA, Jean GRELLIER, Mmes Danièle HOFFMAN-RISPAL, Monique IBORRA, M. Jean-Louis IDIART, Mme Françoise IMBERT, MM. Michel ISSINDOU, Éric JALTON, Serge JANQUIN, Henri JIBRAYEL, Régis JUANICO, Armand JUNG, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jean-Pierre KUCHEIDA, Jérôme LAMBERT, François LAMY, Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Gilbert LE BRIS, Jean-Yves LE DÉAUT, Jean-Marie LE GUEN, Mme Annick LE LOCH, MM. Bruno LE ROUX, Patrick LEBRETON, Patrick LEMASLE, Mme Catherine LEMORTON, MM. Bernard LESTERLIN, Serge LETCHIMY, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. Albert LIKUVALU, Louis-Joseph MANSCOUR, Mme Marie-Lou MARCEL, M. Jean-René MARSAC, Mme Martine MARTINEL, Frédérique MASSAT, M. Gilbert MATHON, Mme Sandrine MAZETIER, MM. Michel MÉNARD, Kléber MESQUIDA, Henri NAYROU, Alain NÉRI, Mmes Marie-Renée OGET, George PAU-LANGEVIN, MM. Christian PAUL, Jean-Luc PÉRAT, Jean-Claude PEREZ, Philippe PLISSON, François PUPPONI, Mme Catherine QUÉRÉ, MM. Jean-Jack QUEYRANNE, Dominique RAIMBOURG, Mmes Marie-Line REYNAUD, Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. Alain RODET, Marcel ROGEMONT, Bernard ROMAN, Alain ROUSSET, Patrick ROY, Michel SAINTE-MARIE, Pascal TERRASSE, Philippe TOURTELIER, Manuel VALLS, Michel VAUZELLE, Michel VERGNIER, André VÉZINHET et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche(1) et apparentés (2),

députés.

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(1)  Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Mme Delphine Batho, M. Jean-Louis Bianco, Mme Gisèle Biemouret, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Mme Marie-Odile Bouillé,

M. Christophe Bouillon, Mme Monique Boulestin, M. Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Catherine Coutelle, Pascale Crozon, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, MM. Michel Debet, Pascal Deguilhem, Mme Michèle Delaunay, MM. Guy Delcourt, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli,

Mme Corinne Erhel, MM. Laurent Fabius, Albert Facon, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mmes Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, M. Pierre Forgues, Mme Valérie Fourneyron, MM. Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Mme Geneviève Gaillard, MM. Guillaume Garot, Jean Gaubert, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Mme Pascale Got, MM. Marc Goua, Jean Grellier, Mme Élisabeth Guigou, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. François Hollande, Mmes Sandrine Hurel, Monique Iborra, M. Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Mme Annick Le Loch, M. Patrick Lemasle, Mmes Catherine Lemorton, Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Mmes Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, MM. Jean-René Marsac, Philippe Martin, Mmes Martine Martinel, Frédérique Massat, MM. Gilbert Mathon, Didier Mathus, Mme Sandrine Mazetier, MM. Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Mmes Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, M. Michel Pajon, Mme George Pau-Langevin, MM. Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, MM. Philippe Plisson, François Pupponi, Mme Catherine Quéré, MM. Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Mme Marie-Line Reynaud, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Mme Odile Saugues, MM. Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Mme Marisol Touraine, MM. Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.

(2)  Mme Chantal Berthelot, MM. Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Mme Annick Girardin, MM. Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Mmes Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Martine Pinville, M. Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont et Mme Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

On ne saurait lutter contre les inégalités sans tenir compte de la diversité.

Il ne s’agit en aucun cas d’une diversité « ethnique » qui nous renverrait bientôt à des considérations raciales que la morale républicaine réprouve et que la science réfute, mais à la diversité des origines et des cultures. Reconnaître cette diversité culturelle plutôt que de la nier nous paraît aujourd’hui le plus sûr moyen de préserver l’identité républicaine. Car seule la reconnaissance du multiple peut garantir notre unité. Seule la reconnaissance du multiple peut favoriser l’égalité. À condition toutefois qu’il ne s’agisse pas d’une reconnaissance de la diversité de groupes mais d’une prise de conscience des variétés culturelles propres à chaque citoyen. Si nous voulons être tous égaux, commençons par admettre que nous sommes aussi tous différents.

Dès lors, notre diversité doit-elle être reconnue et valorisée par des mesures législatives permettant de lutter concrètement contre les discriminations et les fragmentations de la société française.

Mais reconnaître l’originalité de chaque citoyen, c’est d’abord lui donner la possibilité, s’il le souhaite, de pratiquer et de valoriser la langue ou les langues de sa culture, de son terroir, de ses aïeux, lorsqu’elles sont partie intégrante du patrimoine français, sans pour autant oublier que le français reste la langue officielle de la République.

En 1999, le professeur Bernard Cerquiglini, membre de la direction de la délégation générale à la langue française et aux langues de France, a répertorié plus de 75 langues régionales ou minoritaires parlées sur le territoire national. Des artistes régionaux, à présent reconnus, ont rouvert le livre de l’histoire locale, drainant derrière eux les hommes et les femmes, chaque jour plus nombreux, qui sont attachés à leur terroir. Des dispositions ont été prises un peu partout dans l’Hexagone en faveur des langues régionales : conventions entre l’État et les écoles bilingues alsaciennes, basques, béarnaises ou bretonnes pour la prise en charge des enseignants, signalisation routière bilingue, validations dans certaines banques des chèques libellés en langue régionale, émissions diffusées par le service public audiovisuel en catalan, alsacien, occitan, corse, breton ou basque ou créole. Mais cela n’est pas suffisant car la situation des langues minoritaires et régionales se révèle préoccupante, faute d’une reconnaissance publique.

Pourtant, les langues régionales sont une richesse et font partie de notre patrimoine au même titre qu’un monument historique, un paysage ou une œuvre d’art. Il faut non seulement les protéger mais encore les faire vivre car la protection d’une langue va de pair avec sa transmission entre générations. Il en va du devoir de la mémoire de notre patrimoine parlé et écrit, de la nécessité de le transmettre, le faire vivre et le régénérer. Pour parodier Stendhal, le génie d’un peuple, ce sont ses langues, dans la richesse de leur diversité et de leur dialogue.

La protection de ce patrimoine ne saurait être considérée comme étant indigne du régime juridique qu’offrent les normes de l’Union Européenne. Or, pour des raisons constitutionnelles tenant à la rédaction actuelle de l’article 2 de notre Constitution, la Charte européenne en faveur des langues régionales ou minoritaires n’a toujours pas pu être ratifiée en France.

Cet article, initialement destiné à préserver la langue française face à la langue anglaise, a en effet fait obstacle à l’usage et au développement des langues régionales. Cette nouvelle rédaction de l’article 2 de la Constitution permettra de lever bien des obstacles administratifs et réglementaires à l’utilisation, l’enseignement et à la diffusion des langues régionales. Il sera un signe fort en faveur de la diversité et de la richesse culturelle de notre pays. C’est enfin un préalable juridique nécessaire à la ratification par la France de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution est complété par les mots : « dans le respect des langues régionales qui font partie de notre patrimoine ».


© Assemblée nationale