Accueil > Documents parlementaires > Propositions de loi
La version en format HTML, à la différence de celle en PDF, ne comprend pas la numérotation des alinéas.
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

Document

mis en distribution

le 17 avril 2008


N° 763

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 mars 2008.

PROPOSITION DE LOI

tendant à améliorer l’information du Parlement par la promotion d’études de genre afin de lutter contre les inégalités entre les femmes et les hommes,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

PAR Mmes Catherine COUTELLE, Pascale CROZON, M. Jean-Marc AYRAULT, Mmes Catherine GÉNISSON, Marie-Odile BOUILLÉ, Danielle BOUSQUET, Martine CARRILLON-COUVREUR, Marie-Françoise CLERGEAU, Claude DARCIAUX, Odette DURIEZ, Martine MARTINEL, Catherine QUÉRÉ, MM. Bruno LE ROUX, Philippe NAUCHE, Mmes Patricia ADAM, Sylvie ANDRIEUX, MM. Jean-Paul BACQUET, Dominique BAERT, Gérard BAPT, Claude BARTOLONE, Mmes Delphine BATHO, Gisèle BIEMOURET, MM. Patrick BLOCHE, Daniel BOISSERIE, Maxime BONO, Christophe BOUILLON, Mme Monique BOULESTIN, MM. Pierre BOURGUIGNON, François BROTTES, Guy CHAMBEFORT, Gérard CHARASSE, Alain CLAEYS, Pierre COHEN, Pascal DEGUILHEM, Mme Michèle DELAUNAY, MM. Guy DELCOURT, Michel DELEBARRE, Bernard DEROSIER, Michel DESTOT, Marc DOLEZ, Julien DRAY, Tony DREYFUS, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Mme Laurence DUMONT, MM. Yves DURAND, Philippe DURON, Olivier DUSSOPT, Christian ECKERT, Mme Corinne ERHEL, M. Albert FACON, Mme Martine FAURE, M. Hervé FÉRON, Mmes Aurélie FILIPPETTI, Geneviève FIORASO, Valérie FOURNEYRON, MM. Michel FRANÇAIX, Jean-Louis GAGNAIRE, Guillaume GAROT, Jean GAUBERT, Jean-Patrick GILLE, Joël GIRAUD, Daniel GOLDBERG, Marc GOUA, Mmes Élisabeth GUIGOU, Danièle HOFFMAN-RISPAL, M. Christian HUTIN, Mme Monique IBORRA, M. Jean-Louis IDIART, Mme  Françoise IMBERT, MM. Michel ISSINDOU, Serge JANQUIN, Henri JIBRAYEL, Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, M. Jean-Pierre KUCHEIDA, Mmes Conchita LACUEY, Colette LANGLADE, MM. François LAMY, Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Jean-Yves LE DÉAUT, Mme  Marylise LEBRANCHU, M. Patrick LEMASLE, Mme Catherine LEMORTON, MM. Bernard LESTERLIN, Michel LIEBGOTT, Albert LIKUVALU, Louis-Joseph MANSCOUR, Mmes Marie-Lou MARCEL, Jacqueline MAQUET, Jeanny MARC, M. Jean-René MARSAC, Mme  Frédérique MASSAT, MM. Gilbert MATHON, Michel MÉNARD, Didier MIGAUD, Pierre-Alain MUET, Henri NAYROU, Alain NÉRI, Mmes Marie-Renée OGET, Françoise OLIVIER-COUPEAU, Dominique ORLIAC, MM. Michel PAJON, Jean-Luc PÉRAT, Jean-Claude PEREZ, Mmes Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Sylvia PINEL, MM. Philippe PLISSON, Dominique RAIMBOURG, Simon RENUCCI, Mme Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. René ROUQUET, Michel SAINTE-MARIE, Mme Odile SAUGUES, M. Christophe SIRUGUE, Mme Marisol TOURAINE, MM. Philippe TOURTELIER, Jean-Jacques URVOAS, André VALLINI, Michel VERGNIER, André VÉZINHET, Jean-Michel VILLAUMÉ, Jean-Claude VIOLLET, Alain VIDALIES, et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche(1) et apparentés(2),

députés.

____________________________

(1)  Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Mme Delphine Batho, M. Jean-Louis Bianco, Mme Gisèle Biemouret, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Jean-Michel Boucheron, Mme Marie-Odile Bouillé,

M. Christophe Bouillon, Mme Monique Boulestin, M. Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Alain Cacheux, Jérôme Cahuzac, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Bernard Cazeneuve, Jean-Paul Chanteguet, Alain Claeys, Jean-Michel Clément, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mmes Catherine Coutelle, Pascale Crozon, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, M. Pascal Deguilhem, Mme Michèle Delaunay, MM. Guy Delcourt, Michel Delebarre, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, Julien Dray, Tony Dreyfus, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Louis Dumont, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Philippe Duron, Olivier Dussopt, Christian Eckert, Henri Emmanuelli, Mme Corinne Erhel, MM. Laurent Fabius, Albert Facon, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mmes Aurélie Filippetti, Geneviève Fioraso, M. Pierre Forgues, Mme Valérie Fourneyron, MM. Michel Françaix, Jean-Claude Fruteau, Jean-Louis Gagnaire, Mme Geneviève Gaillard, MM. Guillaume Garot, Jean Gaubert, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Patrick Gille, Jean Glavany, Daniel Goldberg, Gaëtan Gorce, Mme Pascale Got, MM. Marc Goua, Jean Grellier, Mme Élisabeth Guigou, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. François Hollande, Mmes Sandrine Hurel, Monique Iborra, M. Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Michel Issindou, Éric Jalton, Serge Janquin, Henri Jibrayel, Régis Juanico, Armand Jung, Mme Marietta Karamanli, M. Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Mme Colette Langlade, MM. Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Patrick Lebreton, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Michel Lefait, Jean-Marie Le Guen, Mme Annick Le Loch, M. Patrick Lemasle, Mmes Catherine Lemorton, Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Bernard Lesterlin, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Jean Mallot, Louis-Joseph Manscour, Mmes Jacqueline Maquet, Marie-Lou Marcel, MM. Jean-René Marsac, Philippe Martin, Mmes Martine Martinel, Frédérique Massat, MM. Gilbert Mathon, Didier Mathus, Mme Sandrine Mazetier, MM. Michel Ménard, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Arnaud Montebourg, Pierre Moscovici, Pierre-Alain Muet, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Mmes Marie-Renée Oget, Françoise Olivier-Coupeau, M. Michel Pajon, Mme George Pau-Langevin, MM. Christian Paul, Germinal Peiro, Jean-Luc Pérat, Jean-Claude Perez, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, MM. Philippe Plisson, François Pupponi, Mme Catherine Quéré, MM. Jean-Jack Queyranne, Dominique Raimbourg, Mme Marie-Line Reynaud, MM. Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Alain Rousset, Patrick Roy, Michel Sainte-Marie, Michel Sapin, Mme Odile Saugues, MM. Christophe Sirugue, Pascal Terrasse, Jean-Louis Touraine, Mme Marisol Touraine, MM. Philippe Tourtelier, Jean-Jacques Urvoas, Daniel Vaillant, Jacques Valax, Mme Françoise Vallet, MM. André Vallini, Manuel Valls, Michel Vauzelle, Michel Vergnier, André Vézinhet, Alain Vidalies, Jean-Michel Villaumé, Jean-Claude Viollet et Philippe Vuilque.

(2)  Mme Chantal Berthelot, MM. Guy Chambefort, Gérard Charasse, René Dosière, Paul Giacobbi, Mme Annick Girardin, MM. Joël Giraud, Christian Hutin, Serge Letchimy, Albert Likuvalu, Mmes Jeanny Marc, Dominique Orliac, Sylvia Pinel, Martine Pinville, M. Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont et Mme Christiane Taubira.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

On constate une importante évolution de la situation des femmes en France depuis trente ans. En 1975, le taux d’activité des femmes était de 51,5 %. Il est monté à 63,4 % en 2003 (hommes : 74,6 %). Analysés en regard de la réalité européenne des Quinze, où le taux d’emploi des hommes était de 72,5 %, contre 56 % pour celui des femmes, ces statistiques semblent montrer une France plutôt mieux placée que ses voisins dans le domaine de la reconnaissance du rôle des femmes dans la société.

Pourtant, une analyse plus fine montre que les disparités restent énormes et que la législation qui n’a cessé de croître n’a pas d’effet suffisant. Plusieurs faits expriment cette situation :

– un écart de salaires en moyenne de 19,8 % – mais allant de 9,9 % chez les employés à 23,9 % chez les cadres – se répercutant sur les retraites : en 2003, les retraites des femmes sont 34,6 % inférieures à celles des hommes (950 € pour les femmes en 2001 contre 1 372 euros pour les hommes) ;

– le risque de la partiellisation et de la flexibilisation du temps de travail accru du fait de la surreprésentation des femmes dans les métiers de services, qui sont les métiers les plus sujets au temps partiel contraint (les femmes occupent 61,5 % des CDD, 56,2 % des stages) ;

– l’existence d’une forme de « tolérance sociale au chômage des femmes », issue d’une conception selon laquelle le travail des femmes est considéré comme secondaire qui conduit à penser le chômage des femmes comme moins inquiétant que celui des hommes ;

– la persistance du phénomène dit du « mur de verre » : la surreprésentation dans certains secteurs entraîne une sous-représentation par ailleurs. Des métiers sont encore perçus comme d’abord féminins ou comme d’abord masculins et les orientations scolaires sont en partie responsables de ce phénomène. Par exemple, 31,5 % des femmes travaillent dans le secteur public contre 20 % des hommes. La réussite aux concours explique cela mais aussi le choix des femmes de s’orienter vers le secteur public qui offre de meilleures possibilités de conciliation temps de travail/temps de vie.

Les études de genre peuvent constituer des éléments pour étayer les réponses aux discriminations à caractère à la fois sexuel et social dans les différents domaines qui composent les quotidiens des personnes. Elles mettent en avant les différences de traitement social entre les femmes et les hommes.

La lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes ne peut se contenter de condamnations légales des pouvoirs publics. Elle doit aussi être constituée d’actions ciblées - résultant d’une évaluation – pour établir l’égalité réelle. Un tel engagement des pouvoirs publics passe préalablement et nécessairement par la connaissance et l’analyse des données, notamment sociologiques, objectives.

Ainsi, avant toute mesure législative, il apparaît souhaitable de recourir systématiquement à des études de genres, pratique courante dans les pays nordiques. Ce type de démarche a prouvé toute son utilité en mettant à jour les différences de traitement dont font l’objet hommes et femmes et cela dans n’importe quel domaine (famille, école, travail, santé, protection sociale, tâches domestiques, loisirs, vie publique, etc.).

Ces analyses – qui s’inscrivent dans une nouvelle génération de travaux – ne se réduisent pas à opposer hommes et femmes, mais plutôt à mettre en exergue la construction sociale des rapports de genre féminin/masculin. Dans cette perspective, il est important de ne pas substituer la notion de sexe à celle de genre. L’analyse des genres souligne la construction sociale de la différence des sexes alors que le sexe ne renvoie qu’à l’aspect anatomique et biologique de celle-ci. Au concept de genre, s’adjoignent les attributs psychologiques, les activités, les rôles et statuts sociaux culturellement assignés à chacune des catégories sexuelles et établissant de ce fait, un système de croyances reposant sur une détermination biologique. Nous pouvons ainsi prendre en compte les dimensions sociale et symbolique cachées, implicites voire invisibles.

L’utilisation du genre se rapporte à l’exigence d’égalité des sexes dans toutes les politiques de développement et, a fortiori, dans tous les domaines qui composent les existences des personnes quel que soit leur sexe. Ainsi, on fait appel à une analyse comparative et sexuée des rôles, des situations et des besoins des individus afin de comprendre la construction et la reproduction des inégalités sexuelles qu’il faut combattre. Les études de genres ont donc le mérite de rompre avec l’idée qu’il convient d’appréhender les hommes et les femmes comme des sujets « neutres » d’un point de vue sexué.

Les faits l’ont montré, notamment dans les pays du nord de l’Europe qui les pratiquent, les études de genre constituent un outil fiable de mise au jour des complexités et des subtilités parfois invisibles de la discrimination sous toutes ses formes. Les conclusions de ces études permettraient en particulier au législateur d’orienter son travail vers plus d’efficience en matière de discrimination. La prise en compte du genre dans la mise en œuvre des politiques économiques et sociales est l’une des multiples conditions d’efficacité.

La présente proposition de loi engage le Parlement à adopter la démarche des études de genre en s’appuyant sur la délégation parlementaire aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes pour améliorer l’information du Parlement lors de l’examen des projets et propositions de loi.

D’une part, cette pratique, devenant obligatoire, permettrait de procéder à une campagne de sensibilisation envers un public – population et dirigeants – peu averti des causes et des conséquences des inégalités aussi bien sociales qu’entre les sexes.

D’autre part, le Parlement pourrait ainsi rejoindre une pratique déjà habituelle dans les pays du nord de l’Europe, incitant à une harmonisation européenne des modalités de prise en compte de la question des inégalités hommes/femmes.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après le premier alinéa du III de l’article 6 septies de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Les délégations parlementaires aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes réalisent une étude de genre sur chaque projet ou proposition de loi dès son inscription à l’ordre du jour des travaux du Parlement.

« Cette étude est présentée lors des débats en séance publique.

« Elle porte sur les effets de la législation proposée sur chaque genre et présente les propositions en vue de lutter contre les discriminations relevées. »


© Assemblée nationale