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le 20 novembre 2008


N° 1222

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 octobre 2008.

PROPOSITION DE LOI

relative à la publicité en faveur du vin, du champagne
et
autres boissons alcoolisées,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Richard MALLIÉ, Jean-Paul GARRAUD, Jacques REMILLER, Élie ABOUD, Nicole AMELINE, Brigitte BARÈGES, Patrick BEAUDOUIN, Jean-Claude BEAULIEU, Thierry BENOIT, Étienne BLANC, Roland BLUM, Jean-Yves BONY, Jean-Claude BOUCHET, Chantal BOURRAGUÉ, Philippe BRIAND, François CALVET, Bernard CARAYON, Jean-François CHOSSY, Dino CINIERI, Philippe COCHET, Olivier DASSAULT, Laure de LA RAUDIÈRE, Patrice DEBRAY, Jean-Pierre DECOOL, Bernard DEFLESSELLES, Lucien DEGAUCHY, Sophie DELONG, Vincent DESCOEUR, Nicolas DHUICQ, Éric DIARD, Michel DIEFENBACHER, Dominique DORD, Jean-Pierre DUPONT, Raymond DURAND, Jean-Michel FERRAND, Alain FERRY, Jean-Claude FLORY, Marie-Louise FORT, Claude GATIGNOL, Bernard GÉRARD, Georges GINESTA, Jean-Pierre GRAND, Claude GREFF, Jean GRENET, Arlette GROSSKOST, Louis GUÉDON, Jean-Claude GUIBAL, Françoise HOSTALIER, Paul JEANNETEAU, Yvan LACHAUD, Jacques LE NAY, Robert LECOU, Michel LEJEUNE, Geneviève LEVY, François LOOS, Daniel MACH, Thierry MARIANI, Hervé MARITON, Philippe Armand MARTIN, Patrice MARTIN-LALANDE, Jean-Claude MATHIS, Christian PATRIA, Bernard PERRUT, Henri PLAGNOL, Jean-Frédéric POISSON, Josette PONS, Christophe PRIOU, Jean-Luc REITZER, Franck REYNIER, Marie-Josée ROIG, Jean-Marc ROUBAUD, Francis SAINT-LÉGER, Bruno SANDRAS, Jean-Pierre SCHOSTECK, Éric STRAUMANN, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Guy TEISSIER, Michel TERROT, Dominique TIAN, Jean UEBERSCHLAG, Christian VANNESTE, Patrice VERCHÈRE, Jean-Sébastien VIALATTE, Philippe VIGIER, Gérard VOISIN et André WOJCIECHOWSKI,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Si le vin disparaissait de la production humaine, il se ferait dans la santé et dans l’intelligence un vide, une absence plus affreuse que tous les excès dont on le rend coupable. » Baudelaire

Le vin et le champagne sont des produits phares de notre patrimoine qui valorisent nos terroirs et qui contribuent au rayonnement international de notre culture.

Ceci étant, l’actualité juridique récente vient de mettre en avant des problèmes posés par le code de la santé publique les concernant. En effet, en février 2006, le négociant champenois Moët & Chandon a été condamné à 30 000 euros de dommages et intérêts pour avoir diffusé un slogan « La nuit est rose » considéré de publicité « suggestive ». Dans son arrêt, la cour a estimé que ce slogan avait pour effet « de créer une association d’idées entre la consommation de ce champagne rosé et le fait de voir la vie en rose, ce qui dans le langage commun signifie avoir une approche euphorique de la vie ».

Par ailleurs, le tribunal de grande instance de Paris a condamné, le 20 décembre 2007, le journal Le Parisien à verser 5 000 euros de dommages et intérêt, après la publication d’une série de reportages consacrés au champagne. Dans son reportage intitulé « Le triomphe du champagne », le quotidien examinait plusieurs marques, indiquant les coordonnées et lieux de vente. Le juge a estimé que ces publications pouvaient exercer sur le lecteur « une action psychologique de nature à l’inciter à la consommation » et que les articles incriminés « constituaient des publicités sans pour autant que soit exigé un achat effectif d’espaces publicitaires... ». Le reportage aurait donc dû respecter le code de la santé publique et être assorti du message sanitaire prescrit par la loi en précisant que « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé », et ce même s’il a été démontré que ces articles n’avaient donné lieu à aucune contrepartie financière ou achat d’espace publicitaire.

Ces décisions ont donc mis en lumière le point faible de la loi Evin qui reste la non-distinction entre la publicité et l’information. En effet, cette loi a été votée afin de lutter contre l’alcoolisme et le tabagisme en réglementant notamment la publicité sur les boissons alcoolisées. Elle prévoit que le message publicitaire mentionne le degré d’alcool, le nom du fabricant, les terroirs de production et les caractéristiques du produit.

Il est malheureusement revenu aux juges, au cours des quinze dernières années, d’en préciser les contours et dans l’arrêt du 3 novembre 2004, la Cour de cassation donne une définition très extensive de la notion de publicité : «  (...) on entend par publicité illicite (ou indirecte dans le code actuel) au sens des articles L. 3323-2, L. 3323-3 et L 3351-7 du code de santé publique, tout acte en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article ayant pour effet, quelle qu’en soit la finalité, de rappeler une boisson alcoolique sans satisfaire aux exigences de l’article L. 3323-4 du même code. »

Cette notion de publicité illicite ou indirecte est dangereuse pour la liberté d’expression et le droit à l’information. Une telle définition est un manque de bon sens puisqu’un article du Monde sur la production et le succès économique de champagne ou le fait d’évoquer à la télévision la recette du coq au vin peuvent désormais être condamnés pour publicité illicite ou indirecte. Mais comment aborder un vin ou un champagne sans mettre en avant ses qualités ? Le cas échéant, comment ne pas être condamné pour publicité indirecte ? Est-il possible d’évoquer un vin sans que l’objectif in fine soit d’informer le lecteur que ce produit est meilleur qu’un autre et qu’il faille le goûter ?  Il nous faut donc revenir sur cette notion imprécise et dangereuse.

Par ailleurs, il est nécessaire de faire la distinction entre l’information et la publicité et d’en délimiter ainsi les contours. Un contenu publicitaire est caractérisé par deux éléments : la promotion du produit (la limite étant de ne pas inciter à l’abus d’alcool), et l’achat d’espaces publicitaires. Il n’y a pas de publicité sans une prestation de services qui, par nature, revêt un caractère commercial, onéreux et délibéré, qu’elle soit directe ou indirecte.

Afin de pouvoir évoquer librement la production du vin ou du champagne sous des aspects purement informationnels ou éditoriaux, il est nécessaire de clarifier le droit existant. Nous proposons de compléter l’article L. 3323-3 du code de la santé publique par un alinéa précisant qu’un article de presse ne constitue pas une publicité ou une propagande sous la double condition qu’il ne fasse l’objet d’aucune contrepartie financière et qu’il n’incite à l’abus d’alcool.

Au pays des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, il nous faut préserver notre terroir et nos traditions tout en continuant notre combat dans la lutte contre l’abus d’alcool.

Tel est l’objet de la présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le premier alinéa de l’article L. 3323-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« La propagande ou la publicité en faveur des boissons alcooliques, dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites, sont autorisées exclusivement : »

Article 2

L’article L. 3323-3 du code de la santé publique est ainsi rédigé:

« Art. L. 3323-3. – Est considérée comme propagande ou publicité, la propagande ou publicité en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article autre qu’une boisson alcoolique qui, par son graphisme, sa présentation, l’utilisation d’une dénomination, d’une marque, d’un emblème publicitaire ou d’un autre signe distinctif, rappelle une boisson alcoolique.

« Toutefois, les articles de presse traitant d’une activité ou d’un produit qui rappellent une boisson alcoolique ne sont ni propagande ni publicité, à condition qu’ils ne fassent l’objet d’aucun paiement ou contrepartie financière et n’incitent directement à l’abus d’alcool.

« Ces dispositions ne sont pas applicables à la propagande ou à la publicité en faveur d’un produit autre qu’une boisson alcoolique qui a été mis sur le marché avant le 1er janvier 1990 par une entreprise juridiquement ou financièrement distincte de toute entreprise qui fabrique, importe ou commercialise une boisson alcoolique. »


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