Accueil > Documents parlementaires > Propositions de loi
La version en format HTML, à la différence de celle en PDF, ne comprend pas la numérotation des alinéas.
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

Document
mis en distribution

le 3 décembre 2008


N° 1285

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 novembre 2008.

PROPOSITION DE LOI

relative à l’implantation des antennes relais de radiotéléphonie mobile,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, de l’environnement
et du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉE

par M. Michel BOUVARD,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le développement de la radiotéléphonie mobile vise à satisfaire une demande croissante de télécommunications de la population française : on dénombre actuellement près de 45 millions d’utilisateurs de téléphones portables et le marché n’est pas encore saturé. Pour répondre à cette demande et pour défendre leurs parts de marché, les opérateurs de télécommunications ont été et sont amenés à implanter des dizaines de milliers d’antennes relais de radiotéléphonie mobile sur l’ensemble du territoire, sur tout type d’immeuble public ou privé.

Ce déploiement d’infrastructures est perçu par les riverains comme une source de risques pour leur santé et pour l’environnement. Les diverses études disponibles sur les effets des rayonnements émis par les antennes relais ne permettent pas d’apporter de réponse susceptible d’apaiser leurs inquiétudes. Faute d’étude épidémiologique sur le danger réel ou supposé des radiations émises par les antennes relais et dans l’attente des conclusions – dont la publication a déjà été décalée – de l’étude mondiale sur le sujet coordonnée par l’Organisation mondiale de la santé, on en est réduit aux hypothèses. En France, le rapport du professeur Zmirou avait conclu à leur innocuité, tout en préconisant la mise en place de mesures de précaution. Le rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques arrive aux mêmes conclusions. Mais d’autres études les contestent.

En tout état de cause, les ondes électromagnétiques constituent un phénomène réel et mesurable. Selon certains scientifiques, le danger des antennes de radiotéléphonie mobile serait lié aux basses fréquences engendrées par le mode de fonctionnement numérique des portables et des antennes relais. Avant d’être transmises sous forme de données, les conversations sont numérisées puis compressées, l’envoi s’effectuant sous la forme de salves d’ondes de courte durée permettant à plusieurs téléphones portables d’utiliser le même canal simultanément. Ce sont ces salves qui induisent les très basses fréquences que l’on ne retrouve pas dans le cas des radios FM ou des émissions télévisées et qui sont susceptibles d’être nocives pour la santé.

L’éventualité d’un risque de santé publique lié aux installations de radiotéléphonie mobile est d’ailleurs prise en compte par les textes. Ainsi, dans la directive 1999/5/CE du 9 mars 1999, le Parlement et le Conseil de l’Union européenne ont rangé la santé et la sécurité de toute personne parmi les exigences essentielles applicables notamment aux installations de radiotéléphonie mobile. Le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 pris en application de l’article L. 32 du code des postes et télécommunications fixe par ailleurs des valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques émis par les équipements utilisés dans les réseaux de télécommunications ou par les installations radioélectriques.

Quoi qu’il en soit, les pouvoirs publics sont actuellement confrontés à l’inquiétude légitime des citoyens qui réclament en la matière l’application du principe de précaution selon lequel l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommage grave. L’évolution de la jurisprudence va de plus en plus dans le sens du principe de précaution. Ainsi, le Conseil constitutionnel a jugé dans sa décision du 19 juin 2008 relative à la loi OGM qu’en application du principe de précaution une autorité publique en charge d’une activité potentiellement à risque pouvait l’autoriser, dans la mesure où elle avertit des « dangers » identifiés « en l’état des connaissances et techniques ». De même, le Conseil d’État a reconnu dans une décision du 26 septembre 2008 la pleine valeur constitutionnelle de la Charte de l’environnement. Il appartient au législateur de tirer les conséquences des craintes de la population et la jurisprudence et d’assurer enfin l’application de ce principe de précaution aux activités de télécommunications.

Par ailleurs, le besoin de sécurité des populations concernées passe par la transparence quant aux modalités d’installation des antennes relais de téléphonie mobile et donc par une information des habitants et plus largement des riverains. La présente proposition de loi prévoit en conséquence une procédure de déclaration préalable en mairie pour pallier l’insuffisance de la réglementation qui n’impose une déclaration de travaux que pour les installations dont la hauteur excède 12 mètres. Cette procédure se doublera d’un affichage sur place et d’une information écrite des locataires d’un immeuble par le propriétaire ayant signé une convention d’implantation d’antenne relais avec un opérateur de téléphonie mobile.

Les collectivités locales d’implantation doivent également assurer leur part de responsabilité dans cette nécessaire transparence et dresser un inventaire des lieux d’implantation. Elles travailleront, pour ce faire, notamment à partir de dossiers transmis par les opérateurs.

Enfin, il apparaît fondamental d’encadrer et de maîtriser le développement des installations afin d’en limiter la prolifération anarchique : l’établissement d’un schéma départemental d’implantation poursuit cet objectif. Ce schéma serait obligatoire et opposable aux opérateurs.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, mesdames, messieurs, de bien vouloir adopter cette présente proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le chapitre III bis du titre III du livre III du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 1333-21 devient l’article L. 1333-23 ;

2° Sont insérés deux articles L. 1333-21 et L. 1333-22 ainsi rédigés :

« Art. L. 1333-21. – Le principe de précaution, défini à l’article L. 110-1 du code de l’environnement, est applicable aux activités de communications électroniques visées à l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques.

« Art. L. 1333-22. – Toute implantation d’antennes relais de radiotéléphonie mobile est soumise à une procédure de déclaration en mairie, quelle que soit sa superficie hors œuvre brute ou sa hauteur au-dessus du sol.

« Des panneaux d’affichage installés pendant un mois sur le lieu d’implantation de ces antennes, mentionnent la possibilité pour les riverains d’obtenir des informations en mairie, notamment sur les risques potentiels constitués par cette installation.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. » ;

Au début de l’article L. 1333-23 tel qu’il résulte du 1°, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« Chaque année, les communes dressent un inventaire des lieux d’implantation et des valeurs d’exposition aux champs électromagnétiques des antennes relais de radiotéléphonie mobile situées sur leur territoire. Ces informations font l’objet d’une publicité par voie d’affichage en mairie. » ;

3° Après le même article L. 1333-23, sont insérés deux articles L. 1333-24 et L. 1333-25 ainsi rédigés :

« Art. L. 1333-24. – Les locataires d’un immeuble sont avertis par le propriétaire par lettre avec accusé de réception de la conclusion d’une convention d’implantation d’antennes relais de téléphonie mobile.

« Art. L. 1333-25. – Les services départementaux de l’État établissent, après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et après consultation de l’Agence française des fréquences, des communes et du département concernés ainsi que des associations et des opérateurs de télécommunications concernés, un schéma départemental d’implantation des antennes relais de radiotéléphonie mobile. Ce schéma prend en compte les exigences de la protection de la santé et de la sécurité des personnes et de l’environnement ainsi que les nécessités d’urbanisme, d’architecture et d’aménagement du territoire. En cas d’implantations d’antennes relais de téléphonie mobile non conformes à ce schéma, les dispositions du titre III du livre IV du code de l’urbanisme sont applicables.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »

Article 2

L’article L. 45-1 du code des postes et des communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les opérateurs transmettent aux communes d’implantation un dossier annuel sur chaque site existant ainsi qu’un dossier sur chaque projet d’implantation d’antennes relais de radiotéléphonie mobile. Ces dossiers comprennent notamment les valeurs d’exposition du public aux champs électromagnétiques. »


© Assemblée nationale