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N° 1825

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 juillet 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à reconnaître la profession d’optométriste,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Élie ABOUD,

député.


EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Aujourd’hui, en 2009, la santé oculaire des habitants de ce pays est devenue un problème majeur. Les ophtalmologistes français sont parmi les meilleurs mais leur nombre est tout simplement insuffisant pour couvrir les besoins de la population dans ce domaine.

Dans certaines régions, il n’est pas rare qu’un patient attende jusqu’à 6 mois pour une simple consultation.

Une situation proprement intenable pour un pays ou la santé est à juste titre la préoccupation première de ses habitants.

La population française réclame des soins à la fois plus nombreux et plus spécifiques qu’auparavant.

Sans parler de l’allongement du temps de la vie et de l’augmentation des pathologies oculaires (diabète, glaucome, dégénérescence maculaire) souvent liées à l’âge.

Concernant la prévention des états oculaires anormaux, notons à titre d’exemple que la moitié des diabétiques seulement a accès à un examen oculaire annuel, que 50 % des dépistages de glaucomes sont effectués trop tardivement et qu’un million et demi de français présentent des difficultés ou une incapacité à lire du fait d’une dégénérescence maculaire liée à l’âge.

En France, seuls les ophtalmologistes sont habilités à s’occuper d’une population en constante extension tandis que dans le même temps le nombre de spécialistes chute lui, dangereusement.

En 2000, un Français sur deux réclamait des soins ophtalmologiques, soit 34,6 millions. En 2020, selon une « hypothèse basse », ces mêmes patients passeront à 41,2 millions.

Pour endiguer cette pénurie de spécialistes, il faudrait tripler les effectifs, mais pour les années à venir, il est déjà trop tard.

Une réponse simple, logique et adaptée: l’optométrie.

Si simple qu’elle a été adoptée ou pratiquée de facto dans pratiquement tous les pays européens eux aussi confrontés à cette pénurie de spécialistes.

Cette réponse passe par une reconnaissance juste de cette profession.

La majorité des pays européens s’est donné les moyens de pallier son manque d’ophtalmologistes et d’assurer correctement les besoins de la population en soins en confiant la prescription de lunettes correctrices et de lentilles de contact aux optométristes.

Au sein de l’union européenne, seuls la France et le Portugal se refusent encore à recourir à cette solution de bon sens.

En France, le diplôme national qui depuis 1991 était la maitrise d’optométrie (bac+4) est devenu en 2004 un Master de sciences de la vision (bac+5) sur les préconisations du ministère de l’éducation nationale et à des fins d’harmonisation européenne.

Le diplôme français d’optométrie est d’ailleurs reconnu dans plusieurs pays européens, Suisse comprise.

Dans ce contexte d’une santé oculaire publique menacée à court terme, la seule option préconisée et retenue jusqu’à présent est celle défendue par le syndicat national des ophtalmologistes : orthoptiste assistant ophtalmologistes.

Cette solution coûteuse va générer une multiplication des actes codifiés par la sécurité sociale.

Déjà on en voit les effets pervers qui sont de plusieurs types :

– augmentation très importante des actes codifiés de l’orthoptiste donnant lieu à un remboursement par la CPAM ;

– les orthoptistes ne font plus le travail pour lequel ils ont été formés et font à la place un travail pour lequel ils ont reçu une formation très insuffisante. Les erreurs se multiplieront au détriment du patient ;

– augmentation du nombre de consultations des ophtalmologistes également remboursées par la CPAM (sans parler des dérives inquiétantes sur les tarifs réellement pratiqués).

La seule solution est celle d’un auxiliaire de santé indépendant, bien formé et responsable de ses actes. Les ophtalmologistes, débarrassés de la partie optique pourraient ainsi se consacrer à la composante médicale et chirurgicale pour laquelle 11 ans d’études sont nécessaires. (C’était d’ailleurs en 2003 la conclusion du rapport sur la chirurgie en France des Professeurs Domergue et Guidicelli.)

Avec la désertification médicale des régions qui s’annonce, L’optométriste a un rôle important à jouer.

Une grande partie des diplômés en optométrie viennent justement de départements ou on enregistre un manque d’ophtalmologistes. C’est d’ailleurs cette pénurie qui a poussé ces opticiens à la base à se perfectionner en réfraction et en contactologie.

En cas de reconnaissance, les optométristes sont déjà uniformément répartis sur le territoire et pourraient rapidement prendre en charge les besoins en prescription de lunettes et adaptation de lentilles de contact qu’attendent les français de province.

L’optométrie correctement encadrée par une législation ne laissant aucune place à de possibles dérives, peut répondre avec efficacité et célérité au grave problème de santé publique auquel nous sommes confrontés. Dans presque tout les pays du monde, la solution de l’optométrie s’est imposée dans la confiance et le respect des prérogatives de chaque profession.

Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est proposé d’adopter cette proposition de loi.


PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le titre VI du livre III de la quatrième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Dans l’intitulé du titre VI, le mot : « et » est supprimé et sont ajoutés les mots : « et d’optométriste » ;

2° Il est ajouté un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Optométriste

« Art. L. 4365-1. – I. – Est considérée comme exerçant la profession d’optométriste toute personne qui exécute habituellement des actes professionnels d’optométrie, définis par décret en Conseil d’État pris après avis de l’Académie nationale de médecine.

« II.- Les optométristes peuvent prescrire des verres correcteurs ainsi que des lentilles oculaires de contact et effectuer tout examen nécessaire à la prescription, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, sauf pour les personnes âgées de moins de seize ans ainsi que pour la première correction d’un trouble de la vision.

« Art. L. 4365-2. – Peuvent exercer la profession d’optométriste et porter le titre d’optométriste accompagné ou non d’un qualificatif :

« – les personnes titulaires d’un diplôme de maîtrise ou de master en sciences de la vision et remplissant les conditions requises pour l’exercice de la profession d’opticien-lunetier ou d’orthoptiste ;

« – les ressortissants d’un État membre de la Communauté européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, titulaires d’un ou plusieurs diplômes, certificats ou autres titres permettant l’exercice de la profession d’optométriste dans un de ces États, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 4365-3.  Les optométristes sont tenus de faire enregistrer sans frais leurs diplômes, certificats ou titres auprès du service de l’État compétent ou l’organisme désigné à cette fin. En cas de changement de situation professionnelle, ils en informent ce service ou cet organisme.

« Les optométristes ne peuvent exercer leur profession que si leurs diplômes, certificats ou titres ont été enregistrés conformément au premier alinéa.

« Il est établi, pour chaque département, par le service de l’État compétent ou l’organisme désigné à cette fin, une liste des optométristes exerçant dans le département, portée à la connaissance du public. Un optométriste ne peut être inscrit que dans un seul département. » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 4363-2, après les mots : « d’opticien-lunetier, », sont insérés les mots : «  d’optométriste, » ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 4363-3, après les mots : « d’opticien-lunetier, », sont insérés les mots : « d’optométriste, ».


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