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N° 1941

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 septembre 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à instaurer un Fonds de garantie
pour les victimes d’
atteintes à l’environnement,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Claude GUIBAL, Jérôme BIGNON, Jean-Yves COUSIN, Christophe GUILLOTEAU, André WOJCIECHOWSKI, Jean-Marc NESME, Jean-Pierre DECOOL, Louis GUÉDON, Jean-Pierre GIRAN, Jean-Pierre MARCON, Jean-Marc ROUBAUD, Françoise HOSTALIER, Loïc BOUVARD, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Thierry MARIANI, Jean-Claude BOUCHET, Brigitte BARÈGES, Daniel SPAGNOU, Guy GEOFFROY, Gilles D’ETTORE, Patrick LABAUNE, Marc BERNIER, Jacques REMILLER, Dominique DORD, Michel HEINRICH, Alfred ALMONT, Jean-Sébastien VIALATTE, Joëlle CECCALDI-RAYNAUD, Françoise BRANGET, Charles-Ange GINESY, Patrice MARTIN-LALANDE, Pierre LASBORDES, Martine AURILLAC, Jean-François CHOSSY, Alain MOYNE-BRESSAND, Lionnel LUCA, Alfred TRASSY-PAILLOGUES, André FLAJOLET, René COUANAU, Bernard BROCHAND, Damien MESLOT, Francis SAINT-LÉGER, Marc LE FUR, François CORNUT-GENTILLE, Élie ABOUD et Jean-Claude MATHIS,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les risques pour les personnes d’être victimes de dommages causés à l’environnement du fait de l’activité d’un exploitant sont aujourd’hui de plus en plus importants.

Ces risques peuvent notamment résulter d’expositions à des composants chimiques, à la pollution des sols, de l’eau ou de l’air, à la déstabilisation de milieux naturels entrainant des inondations ou des éboulements, ou encore à l’utilisation de technologies sensibles. Certains peuvent avoir des effets différés sur la santé, dont les conséquences nous sont encore inconnues.

Nos concitoyens sont, légitimement, de plus en plus sensibilisés à ces problèmes et la société se doit par ailleurs d’apporter une attention plus grande aux victimes des agressions environnementales.

Face à une législation de plus en plus rigoureuse qui tend vers une responsabilité sans faute, un grand nombre d’entreprises se trouve aujourd’hui concerné par les risques environnementaux. Malgré les efforts réalisés en matière de mesure et de prévention des risques et de conditions et moyens d’appropriation de ceux-ci par les différents acteurs concernés, les aléas sont toujours présents.

La mise en jeu systématique du principe de précaution ne peut constituer une réponse adéquate lorsqu’elle consiste à freiner la recherche et le développement en faisant en sorte de dissuader les entrepreneurs et les industriels de prendre des risques.

D’autre part, à l’heure actuelle, les mécanismes d’assurance ne suffisent pas à réparer le préjudice que peuvent subir en la matière les victimes et leurs ayants droit. Il est nécessaire de prévoir un dispositif spécifique pour ce qui n’est pas couvert par un mécanisme assuranciel. Il s’agit donc de compléter l’indemnisation du fait des assurances, en créant un fonds d’indemnisation des victimes de la pollution qui permettrait la réparation intégrale des préjudices qu’elles subissent.

Ce système, basé sur la socialisation du risque et le principe « pollueur/payeur », serait similaire au système mis en place par d’autres fonds d’indemnisation, tels que le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante ou le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme. Il s’agirait ainsi de créer un établissement public national à caractère administratif, doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, placé sous la tutelle des ministres chargés de l’environnement et du budget.

La présente proposition de loi vise à mettre en place un tel fonds, et à définir les notions d’« exploitant » et de « pollutions » (article 1er), à imposer la souscription d’une police d’assurance aux personnes physiques ou morales dont la responsabilité civile peut être engagée du fait de préjudices subis par des tiers suite à des dommages causés à l’environnement (article 2), à déterminer le champ d’action du fonds d’indemnisation des victimes de la pollution (article 3), à préciser les modalités du versement des indemnités par le fonds d’indemnisation (article 4), enfin à mettre en place une taxe additionnelle alimentant ce fonds de garantie (article 5).


PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I. – Les personnes qui ont subi un préjudice résultant de dommages causés à l’environnement par l’activité d’un exploitant, ainsi que leurs ayants droit, peuvent en obtenir la réparation intégrale.

L’exploitant s’entend de toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui exerce ou contrôle effectivement, à titre professionnel, une activité économique lucrative ou non lucrative mentionnée aux articles 266 octies et 266 nonies du code des douanes.

Constituent des dommages causés à l’environnement, dits « pollutions », au sens de la présente loi, les détériorations directes ou indirectes mesurables de l’environnement créatrices d’atteinte grave à la santé humaine du fait :

1° de la contamination des sols résultant de l’introduction directe ou indirecte, en surface ou dans le sol, de substances, préparations, organismes ou micro-organismes ;

2° d’atteintes graves portées à l’état écologique, chimique ou quantitatif ou au potentiel écologique des eaux, à l’exception des cas prévus au VII de l’article L. 212-1 du code de l’environnement ;

3° d’altération de la pureté de l’air, par une ou plusieurs substances ou particules présentes à des concentrations et durant des temps suffisants pour créer un effet toxique ou écotoxique.

II. – Il est créé, sous le nom de « fonds d’indemnisation des victimes de la pollution », un établissement public national à caractère administratif, doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, placé sous la tutelle des ministres chargés de l’environnement et du budget.

Cet établissement a pour mission d’indemniser les préjudices définis au I du présent article. À cette fin, il a compétence pour apprécier de la gravité desdits préjudices mentionnés au premier alinéa du I ci-dessus, ainsi que du montant des indemnités à verser à la victime ou ses ayants droit.

Il est administré par un conseil d’administration dont la composition est déterminée par un décret en Conseil d’État.

Article 2

Toute personne physique ou toute personne morale, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de préjudices subis par des tiers résultant d’atteintes aux personnes ou aux biens dans la réalisation desquels une activité mentionnée au deuxième alinéa de l’article précédent est impliquée, doit, pour exercer ladite activité, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État pris après avis du Conseil national des assurances.

Ces contrats doivent être souscrits auprès d’une entreprise d’assurance agréée pour pratiquer les opérations d’assurance contre les préjudices résultant de l’exercice d’une activité mentionnée au deuxième alinéa de l’article précédent.

Article 3

Lorsque le responsable des dommages demeure inconnu ou n’est pas assuré, sauf par l’effet d’une dérogation légale à l’obligation d’assurance, ou lorsque son assurance est totalement ou partiellement insolvable, le fonds d’indemnisation des victimes de la pollution indemnise les victimes des préjudices résultant d’une activité mentionnée au deuxième alinéa de l’article premier de la présente loi. Le fonds paie les indemnités qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre, allouées aux victimes et à leurs ayants droit, lorsque le préjudice ouvre droit à réparation.

Les versements effectués au profit des victimes ou de leurs ayants droit et qui ne peuvent pas donner lieu à une action récursoire contre le responsable des dommages ne sont pas considérés comme une indemnisation à un autre titre.

Les indemnités doivent résulter soit d’une décision judiciaire exécutoire, soit d’une transaction ayant reçu l’assentiment du fonds de garantie.

Article 4

Le fonds de garantie est subrogé dans les droits que possède un créancier de l’indemnité contre la personne responsable du préjudice ou son assureur. Il a droit, en outre, à des intérêts calculés au taux légal en matière civile et à des frais de recouvrement.

Les délais prévus à l’article 3 de la loi n° 75-619 du 11 juillet 1975 relative au taux de l’intérêt légal ne courent à l’encontre du fonds d’indemnisation qu’à compter du jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention.

Lorsque le fonds de garantie transige avec la victime, cette transaction est opposable à l’auteur du préjudice, sauf le droit pour celui-ci de contester devant le juge le montant des sommes qui lui sont réclamées du fait de cette transaction.

Article 5

Le fonds de garantie est alimenté par une taxe additionnelle aux droits visés à l’article 266 sexies du code des douanes.


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