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N° 2479

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 avril 2010.

PROPOSITION DE LOI

créant un chèque solidarité énergétique,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Jean-Claude FLORY,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les tarifs réglementés de vente de l’électricité par EDF ont été revalorisés cet été de 1,9 % en moyenne pour les particuliers, alors que parallèlement, en application des directives communautaires, s’ouvrait la possibilité pour les ménages de souscrire à des offres d’électricité à des tarifs non conventionnés offertes par les opérateurs historiques comme par de nouveaux opérateurs, engagement réversible si la souscription intervenait dans un certain délai (avant le 1er janvier 2009) ou en cas de déménagement.

La révision de la grille tarifaire de l’opérateur public EDF, en ce qui concerne les tarifs conventionnés, devrait affecter inégalement les ménages en 2010 : selon les estimations de la commission de régulation de l’énergie, les 2,5 millions de clients d’EDF qui sont abonnés au tarif bleu devraient voir leur facture augmenter de 4,65 % en moyenne, oscillant entre des baisses de 11 % et des hausses de 100 % ; il en sera de même des 12 millions de particuliers ayant souscrit à l’offre supérieure, dont la facture devrait augmenter de 3 %. Les gros consommateurs ne devraient constater globalement aucune hausse alors que celle-ci sera ressentie par les petits consommateurs, de même que pour les abonnés de l’option Tempo qui permet de payer un prix différent selon les jours de l’année, et qui connaîtra une hausse moyenne de 4,7 %.

Ces chiffres montrent que l’accès à l’énergie devient de plus en plus cher, et par conséquent qu’une fracture énergétique est en train de se creuser entre la partie de la population qui a accès à l’énergie et celle qui ne peut, faute de moyens, y recourir. Bien qu’il existe chez l’opérateur historique un tarif de première nécessité dédié aux ménages les plus modestes, auquel deux millions de ménages sont désormais éligibles, le risque de fracture énergétique demeure, notamment pour les locataires qui, en fonction de leur contrat de bail, ne paient pas directement leurs charges de chauffage, et pour les personnes qui n’ont pas accès à cette information : actuellement, la moitié des potentiels bénéficiaires des tarifs énergétiques sociaux n’en a pas fait la demande. Pour d’autres encore, cette offre tarifaire qui permet pourtant de bénéficier d’un prix particulièrement avantageux pour la consommation d’électricité constitue un budget encore trop élevé pour leur permettre d’y faire face.

Saisie de cette disparité des tarifs énergétiques, la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi indiquait, en réponse à une question écrite que la nouvelle structure tarifaire proposée par EDF pour 2010 devrait permettre de corriger plus de 80 % des situations tarifaires aberrantes ainsi que de couvrir les coûts de fourniture de l’énergie pour chaque grande catégorie de consommateurs.

Le Gouvernement a par ailleurs engagé d’importantes sommes dans la lutte contre la précarité énergétique : le plan de relance a attribué en 2009 à l’Agence nationale de l’habitat 200 millions d’euros pour mener des travaux à dominante énergétique dont 100 millions ont été consacrés à la réalisation de travaux d’amélioration des performances énergétiques des bâtiments pour les propriétaires occupants et ont permis de rénover 35 000 logements. Des actions nationales et locales sont menées pour permettre aux propriétaires de réaliser des travaux prioritaires dans les logements qu’ils habitent ou qu’ils louent, avec les dispositifs d’écosubvention, d’OPAH énergie, de PIG expérimentaux de précarité énergétique. Des aides aux impayés sont également accordées par la collectivité (État, conseils généraux, caisses d’allocations familiales) ou par des associations, mais elles se fondent sur des critères variables et ne concernent pas toutes les énergies.

Malgré la pertinence de ces mesures, 20 % de ménages risquent de continuer à se trouver en 2010 dans une situation de précarité énergétique, caractérisée dès lors qu’un ménage consacre plus de 10 % de son budget aux factures d’énergie (gaz, électricité, fioul). Cet état résulterait de la conjonction de trois facteurs discriminants : la faiblesse du niveau de revenus, la résidence dans des logements énergivores classés E, F ou G, soit les plus mauvaises catégories du diagnostic de performance énergétique, et d’importants désordres techniques tels l’insalubrité du logement ou la non décence. Aujourd’hui, quelques 3,4 millions de ménages seraient dans cette situation alors que la moyenne des foyers français dépense sur ce poste 5,5 % de ses revenus. Parmi ces exclus de l’énergie, le « noyau dur » des plus précaires rassemblerait 425 000 ménages selon le rapport rédigé par Philippe Pelletier, incapables de faire face à leurs factures, subissant des coupures d’électricité pour impayés ou renonçant à se chauffer pour des motifs financiers. Selon une autre étude commandée par l’Agence nationale de l’habitat, 70 % des ménages en situation de précarité énergétique appartiendraient à la catégorie des 25 % des Français ayant le niveau de vie le moins élevé. Ces personnes seraient pour 87 % d’entre elles locataires du parc privé, âgées en moyenne de 60 ans et plus, habiteraient seules à la campagne dans une maison individuelle chauffée au gaz ou au fioul, avec un taux d’effort de 18 % ou seraient des familles monoparentales logeant en ville dans des appartements d’une soixantaine de mètres carrés et se chauffant à l’électricité avec un taux d’effort de 14 %. Cette situation ne cesserait de se dégrader depuis 2002, les ménages les plus défavorisés n’étant plus les seuls concernés, ceux de la classe moyenne commençant à être touchés.

C’est pourquoi, en complément des dispositifs existants, il vous est proposé de créer un « chèque solidarité énergétique » dont le montant varierait selon le revenu des familles et leurs besoins en chauffage.

Tel est, Mesdames et Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi qu’il vous est proposé de cosigner.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après l’article L. 261-6 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Chèque anti-précarité énergétique

« Art. L. 261-7. – Une allocation destinée à lutter contre la précarité énergétique et dénommée “chèque anti-précarité énergétique” est attribuée au ménage ou à la personne locataire ou propriétaire du logement qu’elle occupe dont les ressources ne dépassent pas un plafond déterminé par décret.

« Le niveau du plafond de ressources varie conformément à l’évolution des prix à la consommation des ménages hors les prix du tabac, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État. Son montant est fixé par décret et revalorisé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et du logement.

« Les conditions d’attribution de cette allocation sont déterminées par décret en Conseil d’État. »

Article 2

Les charges pour l’État qui résulteraient de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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