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N° 2715

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 juillet 2010.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête
relative au financement des partis politiques,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Messieurs

François de RUGY, Yves COCHET et Noël MAMÈRE,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis 1988 notre pays s’est doté de règles précisées à plusieurs reprises, relatives au financement des partis politiques : interdiction de dons émanant des personnes morales, plafonnement des contributions de personnes physiques, instauration d’un financement public assis sur les résultats électoraux et le nombre de parlementaires élus, contrôles effectués par la commission des comptes de campagnes, constituent les principes de base d’une architecture législative destinée à clarifier la situation et à maintenir l’indispensable lien de confiance entre les citoyens et leurs représentants.

Les partis politiques, dont l’existence et la fonction sont reconnus par notre Constitution dans son article quatre, trouvent ainsi un cadre sécurisé pour financer leurs activités dans la transparence.

Au delà des développements médiatiques liés à de récurrentes révélations concernant des soupçons de financements illégaux de campagnes ou de mouvements politiques sur lesquels la justice aura à enquêter et à se prononcer, un certain nombre d’interrogations légitimes naissent dans l’opinion sur les conditions dans lesquelles la législation actuelle est appliquée. Notre assemblée, qui a fait de l’évaluation régulière de l’application des lois et de leur conformité aux intentions initiales du législateur, un des axes de son activité, ne saurait se soustraire à un examen précis et attentif des modes de financements des activités politiques en France.

Ce travail d’évaluation et de contrôle est d’autant plus nécessaire qu’un certain nombre de failles existent dans la législation, failles qui permettent manifestement à certaines personnes de contourner l’esprit de la loi.

Dans son rapport 2008, la commission nationale des comptes de campagne recense 283 mouvements ou partis politiques, ce qui marque une forte inflation depuis l’application de la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Il est à noter qu’il n’y a que 62 partis ou mouvements ayant bénéficié d’une fraction du financement public des partis selon les règles fixées par la loi (nombre minimal de candidats présentés aux élections législatives ayant obtenu un pourcentage minimum des suffrages exprimés).

Cette inflation de mouvements d’origines diverses pose question : ne permet-elle pas de tolérer, voire d’organiser un contournement de la volonté initiale du législateur de limitation des dons de personnes physiques, en démultipliant les structures bénéficiaires des contributions des mêmes bienfaiteurs ?

Les reversements opérés par des partis ou mouvements politiques bénéficiant d’un financement public, au profit d’autres mouvements « satellites », à l’objet très limité voire à des comités de soutien personnel entièrement dévolus à l’accompagnement et à la promotion d’acteurs politiques individuels, ne génèrent-il pas des conflits d’intérêts spécifiques ?

Quelle est l’utilisation des fonds collectés par ces « associations de soutien » à l’action de telle ou telle personnalité politique ? Pourquoi existe-t-il des mouvements de fonds entre ces « associations de soutien » – au bénéfice de celles-ci – et des partis représentés à l’Assemblée nationale, et bénéficiant par là-même du financement public des partis ?

L’apport de bénéfices tirés de l’organisation de colloques ou manifestations, en partie financés dans le cadre de partenariats avec des entreprises ou des collectivités, ne constitue-t-il pas un détournement de fait de l’interdiction faite aux personnes morales de participer au financement de notre vie publique ?

Bien plus que l’expression de questions légitimes, ou que la mise sur la place publique de pratiques supposées qui demandent à être confirmées, c’est le silence et l’opacité qui nourrissent les populismes et sapent les fondements de notre démocratie. La seule réponse valable et durable est la transparence totale sur la réalité du fonctionnement actuel.

La commission d’enquête que l’Assemblée nationale pourrait décider de créer aurait ainsi la double mission de faire toute la lumière sur le fonctionnement actuel de la législation sur le financement des partis politique et de formuler un certain nombre de propositions pour remédier aux éventuels dysfonctionnements et failles juridiques existants.

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, d’adopter la proposition de résolution suivante.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

En application des articles 140 et suivants du Règlement, est créée une commission d’enquête de trente membres relative au financement des partis politiques en France.

Elle devra notamment faire le point sur :

– Les différentes sources de financement et les dépenses des multiples partis ou mouvements politiques recensés à ce jour par la commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques.

– Les liens financiers éventuels entre certains de ces partis ou mouvements politiques.

Elle formulera des propositions pour remédier aux éventuels dysfonctionnements et failles juridiques qui remettraient en cause l’esprit et la lettre de la législation sur le financement des partis politiques.


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