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N° 2873

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2010.

PROPOSITION DE LOI

visant à encadrer la mise à prix
des adjudications judiciaires et protéger le débiteur,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Alain MOYNE-BRESSAND,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le surendettement des ménages français est un problème récurrent et la mise aux enchères des biens saisis est une conséquence extrême mais bien réelle.

La procédure de saisie immobilière et la vente sont encadrées de façon importante par les articles 2191 à 2213 du code civil, ainsi que par la loi du 9 juillet 1991, le décret du 31 juillet 1992, l’ordonnance du 21 avril 2006 et les décrets du 27 juillet 2006 et du 23 décembre 2006.

Nonobstant la législation et la réglementation en l’espèce, la pratique est souvent cruelle pour le particulier débiteur.

La situation amenant la saisie-vente ne saurait être remise en cause et les conséquences omises. Pour autant, il semble nécessaire de faire preuve de plus de justesse sans léser le créancier.

À ce titre, deux facteurs peuvent être l’objet de modifications permettant ainsi une approche plus équilibrée dans la dualité d’intérêts débiteur/créancier.

Il s’agit toujours de permettre au créancier de recouvrir sa créance dûment déclarée et ordonnée, tout en permettant au débiteur d’obtenir un prix raisonnable des biens saisis.

Le premier facteur susceptible d’apporter cet équilibre est la durée durant laquelle une vente amiable est possible, si le juge la permet lors de l’audience d’orientation.

En effet, l’article 49 du décret du 27 juillet 2006 rappelle que le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

L’article 54 du même décret précise que le jugement ordonnant la vente amiable fixe le montant du prix minimum en deçà duquel le bien ne pourra être vendu, taxe les frais de poursuite à la demande du créancier poursuivant, et fixe surtout la date d’audience à laquelle l’affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder 4 mois.

À l’audience de rappel, le juge ne peut accorder un délai supplémentaire que si le demandeur justifie d’un engagement écrit d’acquisition et qu’à fin de permettre la rédaction et la conclusion de l’acte authentique de vente. Ce délai ne peut excéder 3 mois.

La première période de 4 mois pour prospecter, négocier et concrétiser une vente autorisée est, dans un cadre normal, courte et ne permet certainement pas une efficacité totale.

Il serait souhaitable de le porter à 6 mois.

Le délai supplémentaire facultatif à fin de rédaction et de conclusion de l’acte authentique ne peut excéder 3 mois, temps moyen de ladite conclusion dans un contexte normal.

Ce délai ne laisse pas de place à des contretemps indépendants des contractants qui sauraient être ignorés dans le cadre d’une vente amiable faisant suite à une procédure de saisie.

Il serait souhaitable de porter ce délai facultatif à 4 mois.

Le deuxième facteur d’équilibre d’intérêts est sans nul doute le prix retiré d’une vente forcée intervenant en cas de non sollicitation par le débiteur de la vente amiable ou du défaut de réalisation de la vente amiable.

La priorité est tout naturellement le recouvrement des créances. Mais pour le débiteur, il ressort fréquemment un sentiment de s’être fait léser du fait d’un prix bien inférieur à la valeur réelle du bien immobilier vendu par adjudication.

L’article 2206 du code civil dispose que le montant de la mise à prix est fixé par le créancier poursuivant. À défaut d’enchère, celui-ci est déclaré adjudicataire d’office à ce montant, ce qui n’est pas sans poser le problème d’une éventuelle entente entre enchérisseurs afin de se partager différents biens mis à prix à des prix bas.

Il existe bien la possibilité, à l’alinéa 2 du même article, pour le débiteur de contester le montant de la mise à prix manifestement insuffisante et de saisir ainsi le juge pour voir fixer une mise à prix en rapport avec la valeur vénale de l’immeuble et les conditions du marché.

La difficulté ici présente est justement l’absence de rapport et de l’obligation de le respecter.

Cette absence permet encore au poursuivant d’acquérir le bien pour la mise à prix initiale à défaut d’enchérisseurs au prix fixé suite à contestation du débiteur.

C’est ce vide que propose de combler cette proposition de loi en fixant un minimum pour la mise à prix équivalent à 60 % de la valeur estimée du bien par un expert.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Le premier alinéa de l’article 2206 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce montant ne pourra être inférieur à 60 % de la valeur estimée par un expert immobilier désigné compte tenu de la situation du bien et des conditions économiques au jour de l’estimation. »


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