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N° 3097

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 janvier 2011.

PROPOSITION DE LOI

relative au financement incitatif de l’élimination des déchets et à la visibilité de l’éco-contribution dans la filière de gestion des déchets dangereux spécifiques,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Gérard CHARASSE, Chantal BERTHELOT, Paul GIACOBBI, Annick GIRARDIN, Joël GIRAUD, Apeleto Albert LIKUVALU, Jeanny MARC, Dominique ORLIAC, Sylvia PINEL et Chantal ROBIN-RODRIGO,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les modes de financement du service public d’élimination des déchets (SPED) n’ont pas évolué depuis plusieurs années, bien que des expérimentations soient en cours.

L’efficacité d’une politique de réduction de la production de déchets domestiques passe nécessairement par la mise en place d’une incitation financière et donc par un nouveau mode de financement du SPED.

C’est pourquoi la loi de programmation du 3 août 2009 relative à la mise en œuvre du Grenelle, dite « Grenelle 1 », a élargi les possibilités du financement en proposant la « tarification incitative », qui devra être mise en place sous cinq ans quel que soit le mode de gestion du SPED choisi. Cette loi prévoit que « la redevance d’enlèvement des ordures ménagères et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères devront intégrer, dans un délai de cinq ans, une part variable incitative devant prendre en compte la nature et le poids et/ou le volume et/ou le nombre d’enlèvements des déchets. »

La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle 2 », a limité la portée du Grenelle 1 en prévoyant seulement la possibilité pour les collectivités territoriales d’instaurer, à titre expérimental durant cinq ans, une part variable sur la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

La présente proposition de loi vise à renforcer la lutte contre la production de déchets et à favoriser l’extension de la tarification incitative en complétant la loi du 12 juillet 2010. Allant dans le sens de la loi Grenelle 1, elle rend obligatoire le passage à la tarification incitative. De plus, elle établit des seuils minimums pour la part variable.

La tarification incitative a pour premier objectif d’inciter financièrement les usagers à participer pleinement au tri sélectif des déchets : tri du verre, du papier, du textile, compostage des déchets fermentescibles, etc. La réduction de la production de déchets apparaît comme un second cap. C’est pourquoi il est proposé deux objectifs : l’un à court terme (5 ans), visant à assurer une part variable représentant au minimum 20 % du financement du SPED et ce afin d’inciter tous les usagers à adopter le tri sélectif ; un objectif à plus long terme (10 ans), visant à assurer une part variable représentant au minimum 50 % du financement du SPED et ce afin d’inciter les usagers à réduire leur production de déchets et donc le coût du SPED pour les collectivités.

À cet effet, l’article 1er établit la part minimum que devra représenter la tarification variable d’ici à la fin du délai de cinq ans. Les différentes auditions menées sur ce sujet, notamment dans le cadre de la mission d’information menée au Sénat par M. Daniel Soulage (rapport d’information du Sénat n° 571 de juin 2010), ont montré que la part de la tarification variable devait représenter au minimum, pour être efficace et véritablement incitative, 20% du financement total du SPED. Instaurer une part minimum est nécessaire afin que tous les gestionnaires du SPED entrent pleinement dans le système.

Après une phase de lancement et d’appropriation du système, la tarification variable a vocation à constituer la part principale du financement des SPED. C’est pourquoi, l’article 2 propose qu’à compter de 10 ans, soit deux fois la durée prévue pour la mise en place de la part variable, celle-ci représente au minimum 50 % du financement du SPED. Porter la part incitative à 50 % nécessite de passer à l’étape postérieure au tri sélectif : il s’agit de réduire globalement la production de déchets via un changement dans les habitudes de consommation et de production des industriels.

La mise en place de la tarification incitative peut s’avérer compliquée, notamment pour certaines petites collectivités ne disposant pas de services d’ingénierie technique développés. L’article 3 vise donc à fixer dans la loi le principe d’un accompagnement technique à la mise en œuvre de la part variable, notamment via l’ADEME. Cette mise en place s’étalant sur plusieurs années, le gouvernement en assurera le suivi annuel.

L’article 4 vise à corriger une incohérence induite par les modalités de calcul de la TEOM. Celle-ci étant calculée sur les bases cadastrales et non sur la production de déchets, il peut résulter une disproportion forte entre la taxe payée et les déchets produits. Ainsi, il arrive fréquemment qu’une personne vivant seule dans une grande habitation paie une TEOM disproportionnée par rapport à sa production de déchets. Dès lors, il est proposé de préciser le dispositif de l’article 1522 du code général des impôts. Ce dispositif permet aux communes, EPCI et syndicats de plafonner « les valeurs locatives de chaque local à usage d’habitation et de chacune de leurs dépendances dans la limite d’un montant qui ne peut être inférieur à deux fois le montant de la valeur locative moyenne communale des locaux d’habitation ».

La présente proposition de loi précise que toutes les collectivités, qu’elles exercent toutes ou seulement une partie des compétences en matière de gestion des déchets, ont la possibilité de réduire de 50 % maximum la TEOM normalement payée sur la base de la valeur cadastrale.

L’article 5 a pour objectif de rendre visible l’éco-contribution pour les déchets ménagers issus de « produits chimiques pouvant présenter un risque significatif pour la santé et l’environnement » mentionnés à l’article L. 541-10-4 du code de l’environnement. La présente loi a pour objet d’appliquer à ces déchets dangereux spécifiques des règles similaires à celles concernant la visibilité de l’éco-contribution prévues à l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement pour les déchets d’équipement électriques et électroniques (DEEE) comme préfiguration de la mise en place d’une filière complète de recyclage des déchets dangereux spécifiques.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

I. – L’article 195 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement est supprimé.

II. – Après l’article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales, est inséré un article L. 2224-18-1 ainsi rédigé :

« Art. L.2224-18-1. – Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l’article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales mettront en place dans les cinq ans à compter de la publication de la présente loi, sur tout leur territoire, une part variable dans le calcul de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ou de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères, calculée en fonction du poids ou du volume des déchets, et représentant au moins 20 % du financement du budget du service public d’enlèvement des déchets.

« Cette part variable peut également tenir compte des caractéristiques de l’habitat ou du nombre des résidents. Dans le cas d’une habitation collective, la personne chargée de sa gestion est considérée comme l’usager du service public des déchets ménagers et procède à la répartition de la part variable entre ses occupants. »

Article 2

Après l’article L. 2224-18-1 code général des collectivités territoriales, est inséré un article L. 2224-18-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 2224-18-2. – Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l’article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales mettront en place dans les dix ans à compter de la publication de la présente loi, sur tout leur territoire, une part variable dans le calcul de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères ou de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères, calculée en fonction du poids ou du volume des déchets et représentant au moins 50 % du financement du budget du service public d’enlèvement des déchets.

« Cette part variable peut également tenir compte des caractéristiques de l’habitat ou du nombre des résidents. Dans le cas d’une habitation collective, la personne chargée de sa gestion est considérée comme l’usager du service public des déchets ménagers et procède à la répartition de la part variable entre ses occupants. »

Article 3

L’État, via l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie notamment, accompagnera techniquement les communes et leurs groupements dans la mise en place de la tarification incitative.

Chaque année, avant le 15 septembre, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en place de la tarification incitative.

Ce rapport évalue notamment : les modalités techniques retenues, les écarts de coûts de collecte et d’élimination constatés, les conséquences sur la réduction de la production de déchets.

Article 4

Au premier alinéa du II de l’article 1522 du code général des impôts, après le mot : « mixtes », sont insérés les mots : « qu’ils exercent toutes ou seulement une partie des compétences relatives au service public d’élimination des déchets, ».

Article 5

Après le premier alinéa de l’article L541-10-4 du code de l’environnement, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2012, lors de la vente des produits mentionnés au premier alinéa au consommateur final, une signalétique particulière inscrite sur le produit informe, par tout moyen prévu à l’article L. 113-3 du code de la consommation, de l’intégration dans le prix final de la prise en charge du coût du recyclage. Au cas où la prise en charge mentionnée au premier alinéa ne serait pas effectuée, une signalétique particulière inscrite sur le produit en informera également le consommateur. »

Article 6

I. – Les pertes de recettes qui pourraient résulter pour les collectivités territoriales de l’application de la présente sont compensées par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement, et corrélativement pour l’État par la création des taxes additionnelles aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour l’État sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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