Accueil > Documents parlementaires > Les rapports d'information
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 2565

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale 1er juin 2010

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

en conclusion des travaux d’une mission d’information
constituée le 17 juillet 2007 
(1)

sur le contrôle de l’exécution des crédits de la défense
pour les
exercices 2007 à 2009

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Guy Teissier,

Député.

——

La mission d’information sur le contrôle de l’exécution des crédits de la défense pour les exercices 2007 à 2009 est composée de : M. Guy Teissier, président-rapporteur ; Mme Patricia Adam, MM. Patrick Beaudouin(1), Jean-Louis Bernard, Patrice Calméjane(2), François Cornut-Gentille, Jacques Desallangre, Marc Francina(3), Yves Fromion, Marc Goua(4), Serge Grouard(5), Damien Meslot, Jean Michel, Jean-Pierre Soisson et Philippe Vitel.

(1) À compter du 24 mars 2010.

(2) À compter du 10 mars 2009.

(3) Jusqu’au 21 janvier 2009.

(4) Jusqu’au 13 décembre 2007.

(5) Jusqu’au 30 juin 2009.

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  UNE FIN D’EXÉCUTION DE LA PRÉCÉDENTE PROGRAMMATION PERFECTIBLE 7

A. LES CRÉDITS DISPONIBLES 7

B. UNE CONSOMMATION DES CRÉDITS ENCORE INSUFFISANTE 9

C. LA SITUATION DES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT 10

II. —  LA PREMIÈRE ANNÉE DE LA NOUVELLE PROGRAMMATION 10

A. LES CRÉDITS PRÉVUS EN 2009 S’INSCRIVENT DANS UN CADRE PLURIANNUEL 11

1. Le cadre pluriannuel 11

2. La loi de finances pour 2009 11

B. DES CRÉDITS COMPLÉMENTAIRES EN COURS D’ANNÉE 13

1. Le plan de relance de l’économie 13

2. Les mouvements de crédits 14

C. UNE EXÉCUTION TRÈS POSITIVE 15

III. —  LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER INCITE À UN EFFORT

CONSTANT DE VIGILANCE 15

A. LA RÉFORME DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 15

1. L’impact sur les dépenses de personnel 16

2. L’impact éventuel sur les intérêts moratoires 17

B. LE FINANCEMENT DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES 17

1. Des dépenses en hausse constante 18

2. Un abondement interministériel désormais consacré 20

C. LES RECETTES EXCEPTIONNELLES 21

1. Le schéma initial 21

2. Un retard important en 2009 22

a) La situation de l’immobilier 22

b) Les fréquences 23

D. LA DISPONIBILITÉ DES ÉQUIPEMENTS ET L’ENTRAÎNEMENT DES FORCES 23

EXAMEN EN COMMISSION 25

INTRODUCTION

Depuis 2003, anticipant les dispositions de la loi organique relative aux lois de finances (2), la commission a constitué une mission d’information chargée de veiller aux conditions de l’exécution des crédits du ministère de la défense. Parallèlement, elle s’est saisie pour avis de tous les textes budgétaires ayant un impact conséquent pour la défense.

À ce titre, elle s’est prononcée sur la loi de règlement pour 2007 (3) et sur la loi de finances rectificative pour 2008 (4). Elle a par ailleurs créé une mission d’information pour examiner l’exécution de la programmation militaire 2003-2008 (5). Tous ces travaux consacrant une place importante aux questions budgétaires, et pour éviter les éventuelles répétitions, il a été décidé de reporter la présentation du rapport de la présente mission d’information à l’année 2010.

Pour autant, il n’est possible de comprendre l’exécution budgétaire 2009 qu’en connaissant les conditions dans lesquelles s’est achevée la précédente programmation. Ce rapport s’appuie donc sur les travaux antérieurs pour examiner la mise en œuvre de la première année de la nouvelle programmation.

L’année 2009 semble marquer un tournant, à la fois en ce qui concerne les volumes en jeu et les pratiques. Le niveau d’engagements et de dépenses est exceptionnellement élevé, le ministère ayant procédé à de très nombreuses commandes mais aussi soldé de nombreuses factures. Par ailleurs, il a bénéficié d’un traitement très favorable avec la levée intégrale de sa réserve de précaution, des abondements extérieurs importants et l’autorisation de consommer une part conséquente de ses reports de crédits.

Si l’exécution 2009 apparaît extrêmement positive, il n’en reste pas moins que la dégradation du contexte économique et financier combiné à la mise en œuvre de la réforme du ministère appellent à la prudence et à la vigilance, les résultats devant être consolidés dans les années à venir.

I. —  UNE FIN D’EXÉCUTION DE LA PRÉCÉDENTE PROGRAMMATION PERFECTIBLE

Le rapport de la mission d’information sur le contrôle de l’exécution des crédits de la défense (6) soulignait que l’exécution 2006 était conforme à l’autorisation parlementaire et avait même permis de résorber en partie les reports de crédits. Pour autant, il pointait des difficultés, notamment en matière d’aéromobilité, laissant supposer qu’il serait difficile de respecter au final les engagements de la programmation 2003-2008. Les conditions favorables dont a bénéficié le ministère de la défense en 2007 et 2008 ont permis de respecter globalement l’autorisation parlementaire annuelle mais elles n’ont pas suffi pour couvrir l’ensemble des besoins.

A. LES CRÉDITS DISPONIBLES

Le tableau suivant présente l’évolution des crédits ouverts en loi de finances initiale (LFI) et des crédits disponibles depuis 2006 pour la mission « Défense ».

Évolution des crédits de la mission « Défense » de 2006 à 2008

(en millions d’euros)

   

ouverts en LFI

mouvements en cours d’année

crédits disponibles

écart

 

programmes

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

2006

144

1 793

1 641

30

– 31

1 823

1 610

1,7 %

– 1,9 %

178

21 531

20 825

2 192

1 393

23 724

22 218

10,2 %

6,7 %

146

10 525

10 608

2 804

171

13 329

10 778

26,6 %

1,6 %

212

2 383

2 308

1 025

81

3 409

2 389

43,0 %

3,5 %

total mission

36 232

35 382

16 799

1 614

42 284

36 995

16,7 %

4,6 %

2007

144

1 696

1 661

90

24

1 786

1 686

5,3 %

1,4 %

178

20 852

21 021

2 211

1 076

23 063

22 097

10,6 %

5,1 %

146

10 174

10 405

3 167

1 141

13 342

11 546

31,1 %

11,0 %

212

3 113

3 164

684

5

3 798

3 169

22,0 %

0,1 %

total mission

35 836

36 251

6 152

2 246

41 988

38 497

17,2 %

6,2 %

2008

144

1 687

1 654

82

47

1 769

1 702

4,9 %

2,9 %

178

21 073

21 350

1 632

1 092

22 705

22 442

7,7 %

5,1 %

146

9 855

10 422

1 317

895

11 172

11 317

13,4 %

8,6 %

212

3 462

3 439

287

– 1

3 749

3 438

8,3 %

0,0 %

total mission

36 076

36 866

3 318

2 033

39 394

38 899

9,2 %

5,5 %

Source : direction du budget et ministère de la défense.

Les autorisations d’engagement (AE) de la mission restent à un niveau élevé : du fait des mouvements de gestion, les ressources disponibles diminuent toutefois entre 2006 et 2008, marquant bien la fin d’exécution de la programmation. En effet, durant ces années, le ministère avait besoin de payer ses engagements antérieurs plus que de signer de nouveaux contrats.

Ce constat est confirmé par l’évolution des crédits de paiement (CP). Comme le montre le graphique suivant, les crédits de paiement de la mission Défense ont bénéficié d’une augmentation constante depuis 2006, passant de 35,3 milliards d’euros à 36,9 milliards d’euros. Les crédits de paiement disponibles ont connu la même évolution, avec une augmentation de plus de 5 % en trois ans.

Évolution des crédits de paiement de la mission « Défense »

(en millions d’euros)

Source : direction du budget et ministère de la défense.

Malgré la hausse du montant des crédits de paiement, ils restent inférieurs aux autorisations d’engagement, entretenant une forme de cavalerie : le ministère continue à signer des contrats alors même qu’il se trouve en fin d’exécution, ce qui risque de peser sur la programmation à venir puisque le ministère devra faire face aux dépenses induites par les commandes réalisées entre 2006 et 2008.

B. UNE CONSOMMATION DES CRÉDITS ENCORE INSUFFISANTE

La disponibilité des crédits n’oblige pas le ministère de la défense à utiliser toutes ses ressources, mais le tableau suivant montre que les crédits ont été largement consommés, aussi bien pour les AE que pour les CP.

évolution de la consommation des crédits
de la mission « Défense »

(en millions d’euros)

   

2007

2008

AE

crédits consommés

36 101

37 096

crédits ouverts en LFI

35 836

36 076

taux de consommation des crédits ouverts en LFI

100,74 %

102,83 %

crédits disponibles

41 979

39 394

taux de consommation des crédits disponibles

86,00 %

94,17 %

CP

crédits consommés

36 848

37 615

crédits ouverts LFI

36 251

36 866

taux de consommation des crédits ouverts en LFI

101,65 %

102,03 %

crédits disponibles

38 497

38 899

taux de consommation des crédits disponibles

95,72 %

96,70 %

Source : direction du budget.

En 2007 et 2008, le ministère de la défense a été autorisé à consommer plus que le plafond fixé par la loi de finances initiales, en AE et en CP. Il n’a cependant pas utilisé tous les crédits disponibles, le taux de consommation des AE disponibles n’atteignant que 86 % en 2006.

Le tableau suivant montre que ces niveaux de consommation n’ont permis que de réduire marginalement l’écart entre les AE et les CP.

Évolution des AE et des CP
consommés depuis 2006

(en millions d’euros)

 

AE

CP

écart

2006

36 524,5

35 297,6

- 1 226,9

2007

36 101,0

37 096,0

995,0

2008

36 848,0

37 615,0

767,0

total

109 473,5

110 008,6

535,1

Source : direction du budget et ministère de la défense.

En 2006, les AE sont nettement supérieures aux CP : en milieu de programmation, il est normal que la défense engage encore beaucoup de projets et signe beaucoup de contrats et que, parallèlement, elle n’ait à faire face qu’à un niveau mesuré de dépenses, les livraisons des programmes antérieurs commençant seulement à intervenir. En 2007 et 2008, on constate une inversion de tendance. Ce changement reste toutefois très mesuré puisque, sur ces trois années, les CP n’auront été supérieurs aux AE que d’un demi milliard. De ce fait, comme le soulignait M. Michel Grall dans son avis sur le projet de loi de règlement des comptes pour l’année 2007, cette consommation ne « permet pas de réduire, sinon marginalement, les reports de crédits et […] fait peser de fortes incertitudes sur les dépenses les plus stratégiques, c’est-à-dire les dépenses d’équipement et de fonctionnement du programme 146 » (7).

C. LA SITUATION DES CRÉDITS D’ÉQUIPEMENT

Le rapport de la mission d’information sur le bilan de la LPM 2003-2008 (8) montre que les dépenses d’équipement de la défense n’ont pas été exécutées de façon satisfaisante, à la fois parce que le niveau de consommation est resté inférieur aux prévisions et parce que les CP n’ont pas permis de couvrir tous les engagements.

En 2006, le retard pour les crédits de titre 5 (investissement) de la mission « Défense » atteint près de 3,5 milliards d’euros. Comme le montre le tableau suivant, l’exécution des années 2006 à 2008 aggrave encore le problème, les rapporteurs relevant que « la fin de la programmation n’a donc pas permis de rétablir l’équilibre ni de corriger la sous-consommation des trois premières années » (9).

Consommation des crédits de paiement de titre 5 (investissement) de la mission Défense

(en millions d’euros)

 

2006

2007

2008

total

LFI

10 625,5

10 474,3

10 625,4

31 725,2

consommation

8 631,1

9 064,9

9 831,6

27 527,6

écart

– 1 994,4

– 1 409,4

– 793,8

– 4 197,6

Source : rapports annuels de performances.

Entre 2006 et 2008, l’exécution a été inférieure de plus de 4,2 milliards d’euros aux autorisations budgétaires pour les crédits d’équipement. Ce retard a conduit le Gouvernement à proposer un schéma financier modernisé pour la nouvelle programmation, mettant très nettement l’accent sur les matériels. Il appartient au Parlement de veiller à ce que ce nouveau cadre global soit préservé en cours d’exécution.

II. —  LA PREMIÈRE ANNÉE DE LA NOUVELLE PROGRAMMATION

La loi de programmation militaire 2009-2014 (LPM) (10) inscrit le budget de la défense dans une nouvelle approche financière. Pour la première fois, tous les crédits sont pris en compte, et non plus les seuls crédits d’équipement. Dans le même temps, le ministère s’engage dans une réforme conséquente de ses structures afin de réduire les dépenses de rémunération et de fonctionnement pour dégager des ressources au profit des matériels. La dégradation du contexte économique et financier a néanmoins nécessité d’adapter temporairement le modèle et de compenser certains retards, notamment ceux ayant trait aux recettes exceptionnelles.

A. LES CRÉDITS PRÉVUS EN 2009 S’INSCRIVENT DANS UN CADRE PLURIANNUEL

1. Le cadre pluriannuel

Comme le montre le tableau suivant, le cadre pluriannuel du budget de la défense est déterminé par la loi de programmation des finances publiques (LPFP).

Évolution des crédits de la mission « Défense »

(en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

Autorisations d’engagement

47,74

36,97

37,62

Crédits de paiement

37,34

38,03

38,58

dont contribution au compte d’affectation spéciale "Pensions"

6,98

7,12

7,24

Source : article 6 de la LPFP 2009-2012.

La LPM confirme ces orientations mais elle les complète par des recettes exceptionnelles, provenant essentiellement de cessions et représentant un montant total de 3,7 milliards d’euros. En 2009, le ministère devait bénéficier d’un abondement de près d’un milliard d’euros au titre de la vente des emprises immobilières, dont plus de 700 millions d’euros pour les seuls sites parisiens, ainsi que 600 millions d’euros provenant de la vente de fréquences.

Elle veille également à la répartition des crédits selon la nature des dépenses, une attention particulière étant portée aux crédits d’équipement. Elle prévoit que ces dépenses augmentent progressivement sur toute la période pour atteindre un montant annuel de plus de 18 milliards d’euros en 2014. Parallèlement, les dépenses de rémunération et de fonctionnement doivent baisser pour dégager les marges de manœuvre nécessaires qui seront complétées, à compter de 2012, par une augmentation extérieure des crédits budgétaires.

2. La loi de finances pour 2009

Comme le montre le tableau suivant, la loi de finances initiale pour 2009 a confirmé les orientations de la LPM et de la LPFP : la défense a disposé de 47,8 milliards d’euros en AE et de 37,4 milliards en CP.

Crédits de la mission « Défense »
ouverts en LFI 2009

(en millions d’euros)

 

AE

CP

144

1 856

1 735

146

20 946

12 208

178

22 375

21 822

212

2 567

1 573

TOTAL

47 743

37 339

Source : ministère de la défense.

En ce qui concerne les crédits d’équipement, le tableau ci-après fait apparaître une très forte hausse des AE prévues en LFI.

crédits d’équipements ouverts en LFI 2009
(nomenclature du Livre blanc)

(en millions d’euros)

 

AE

CP

équipements d’accompagnement

1 309,2

1 387,3

dissuasion

3 493,2

3 756,3

EPM (1) et EPP (2) hors dissuasion

3 343,1

2 891,0

programmes d’environnement

1 137,8

830,8

études hors dissuasion

915,6

885,6

infrastructure

1 223,4

208,9

programme à effet majeur

14 220,3

5 355,1

total

25 642,6

15 315,0

(1) EPM : entretien programmé du matériel

(2) EPP : entretien programmé du personnel

Source : ministère de la défense.

Cette augmentation est d’autant plus forte que la LPM a prévu que le ministère procéderait à des commandes globales pour les grands programmes d’armement. En 2009, la défense a ainsi pu commander quelque 60 Rafale pour un montant de 5,3 milliards d’euros en AE (11). Comme le prévoyait la LFI 2009, le ministère a également commandé 332 VBCI pour 937 millions d’euros et trois FREMM pour 2,15 milliards d’euros.

B. DES CRÉDITS COMPLÉMENTAIRES EN COURS D’ANNÉE

La dégradation du contexte économique a conduit le Gouvernement à prendre des mesures pour, d’une part, compenser l’absence de certaines recettes, et, d’autre part, soutenir l’économie et l’emploi en France. Parallèlement à cet effort conjoncturel, la défense a pu consommer l’ensemble des crédits ouverts, voire commencer à résorber son stock de reports.

1. Le plan de relance de l’économie

Sur les 26 milliards d’euros du plan de relance de février 2009 (12), le ministère de la défense bénéficie d’une enveloppe de 2,4 milliards d’euros qui vise à soutenir les industries de défense les plus touchées par la crise, qu’il s’agisse de la filière munitionnaire, de l’industrie automobile ou de la construction navale. Pour ce faire, les programmes prévus par la LPM ont étét accélérés et complétés par de nouvelles commandes. Le tableau ci-après détaille l’impact du plan sur les différents programmes de la mission.

Volet « défense » du plan de relance en 2009

(en millions d’euros)

 

LFI 2009

plan de relance

écart

programmes

AE

CP

AE

CP

AE

CP

144

1 856

1 735

110

110

5,9 %

6,3 %

146

20 946

12 208

1 096

625

5,2 %

5,1 %

178

22 375

21 822

194

194

0,9 %

0,9 %

212

2 567

1 573

220

220

8,6 %

14,0 %

total

47 743

37 339

1 620

1 149

3,4 %

3,1 %

Source : ministère de la défense et projet annuel de performances.

L’essentiel de l’effort concerne les équipements militaires avec un abondement de plus d’un milliard d’euros en AE et de 625 millions d’euros en CP. Ces abondements ont permis d’accélérer le calendrier de livraison de matériels importants avec par exemple 262 petits véhicules protégés supplémentaires en 2009 et 2010. Des commandes ont été par ailleurs avancées, avec notamment celle du troisième bâtiment de projection et de commandement (BPC), pour 439 millions d’euros, ou celle de cinq hélicoptères Caracal, pour 228 millions d’euros. Grâce à ces crédits, les troupes déployées en opérations extérieures ont également reçu plus de moyens avec par exemple des leurres pour hélicoptères, des matériels optroniques ou des groupes électrogènes.

La recherche et les infrastructures bénéficient également du plan. Les 700 millions d’euros déjà accordés à la recherche ont été augmentés de 110 millions d’euros qui financeront des secteurs clés pour l’exportation, comme l’aéronautique ou l’électronique. Par ailleurs, 220 millions d’euros ont été consacrés à la remise en état des infrastructures de la défense, avant de procéder à l’externalisation de leur entretien.

2. Les mouvements de crédits

Indépendamment du plan de relance, la défense a été amenée à modifier l’autorisation budgétaire en cours d’exécution afin d’optimiser sa dépense et pour faire face à des dépenses nouvelles. Il convient de souligner que, comme les années précédentes, la mission n’a subi aucune régulation budgétaire : en d’autres termes, la réserve de précaution initiale à hauteur de 5 % a été levée pour que le ministère puisse utiliser tous ses crédits.

Le système de fongibilité asymétrique n’a pas été utilisé en 2009. Il permet aux gestionnaires de redéployer des crédits de titre 2 (rémunérations et charges sociales) au profit d’autres types de dépenses ; il leur est en revanche impossible de compléter les crédits de titre 2 en cours d’exécution. Le ministère ayant engagé une politique de déflation de ses effectifs, il a en effet besoin de mobiliser toutes ses ressources pour accompagner les départs.

Le tableau suivant présente l’ensemble des modifications intervenues en cours d’année. Il montre notamment que les crédits d’équipement n’ont pas eu à subir d’amputation ; les sommes gagées par les décrets d’avance ont en effet été intégralement couvertes, aussi bien par les transferts que par la loi de finances rectificative.

Mouvements de crédits intervenus en cours d’année 2009

(en millions d’euros)

   

mouvements de gestion

fonds de concours

loi de finances rectificative

total

programme

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

144

Titre 2

13,6

13,6

0,0

0,0

0,0

0,0

13,6

13,6

Hors Titre 2

95,3

47,6

8,6

8,6

8,3

0,0

112,2

56,2

Total

108,9

61,2

8,6

8,6

8,3

0,0

125,8

69,8

146

Titre 2

-6,2

-6,2

0,0

0,0

0,0

0,0

-6,2

-6,2

Hors Titre 2

727,9

331,5

75,6

77,0

119,9

223,0

923,5

631,5

Total

721,8

325,3

75,6

77,0

119,9

223,0

917,3

625,3

178

Titre 2

48,7

48,7

310,3

310,3

0,0

0,0

359,0

359,0

Hors Titre 2

386,4

359,2

316,2

309,7

0,5

0,0

703,0

668,9

Total

435,1

407,9

626,5

620,0

0,5

0,0

1 062,1

1 027,9

212

Titre 2

33,4

33,4

0,0

0,0

0,0

0,0

33,4

33,4

Hors Titre 2

357,3

481,1

2,3

2,3

-4,8

-4,9

354,8

478,5

Total

390,7

514,5

2,3

2,3

-4,8

-4,9

388,2

511,9

mission

Titre 2

89,5

89,5

310,3

310,3

0,0

0,0

399,8

399,8

Hors Titre 2

1 567,0

1 219,4

402,7

397,6

123,9

218,1

2 093,6

1 835,1

Total

1 656,5

1 308,9

713,0

707,9

123,9

218,1

2 493,4

2 234,9

Source : ministère de la défense.

Au final, la défense a bénéficié d’un abondement de près de 2,5 milliards d’euros pour les AE et de 2,23 milliards d’euros pour les CP, ce qui représente une hausse respective de 5,2 % et de 5,99 % des crédits prévus en LFI.

C. UNE EXÉCUTION TRÈS POSITIVE

La défense a disposé d’un volant financier très conséquent en 2009 du fait de l’augmentation des crédits prévus en LFI et des abondements effectués en cours de gestion. Cette situation aurait pu laisser craindre que le ministère n’arrive pas à consommer toutes ses ressources et en perde au final le bénéfice. Or, comme le montre le tableau ci-après, la défense a réussi à engager et à dépenser plus que la LFI, avec un niveau moyen de consommation très positif.

Consommation 2009 des crédits
de la mission « Défense »

(en millions d’euros)

AE

crédits consommés

49 107

crédits ouverts en LFI

47 743

taux de consommation des crédits ouverts en LFI

102,9 %

crédits disponibles

52 361

taux de consommation des crédits disponibles

93,8 %

CP

crédits consommés

40 465

crédits ouverts LFI

37 339

taux de consommation des crédits ouverts en LFI

108,4 %

crédits disponibles

40 834

taux de consommation des crédits disponibles

99,1 %

Source : direction du budget.

Les mouvements de gestion ne suffisent pas à expliquer la consommation des crédits de paiement. La défense a en effet consommé 3,126 milliards d’euros de plus que la LFI et les abondements en cours d’année n’ont atteint que 2,235 milliards d’euros. L’écart a été financé par les reports de crédits qui n’atteignent plus que 360 millions d’euros à la fin de l’année 2009, soit près d’un milliard d’euros de moins qu’en 2008.

III. —  LE CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER INCITE À UN EFFORT CONSTANT DE VIGILANCE

Lors des réunions trimestrielles avec les responsables du ministère de la défense et avec la direction du budget, les membres de la mission ont examiné plus particulièrement les conditions financières de la réforme du ministère, le financement des opérations extérieures et l’état d’avancement des recettes exceptionnelles. Ils ont aussi analysé l’évolution de la disponibilité des équipements et de l’entraînement des forces.

A. LA RÉFORME DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

Pour mettre en œuvre les conclusions du Livre blanc et pour suivre les recommandations de la révision générale des politiques publiques (RGPP), le ministère s’est engagé depuis l’été 2008 dans une réforme d’ampleur, se traduisant par d’importantes réductions de personnels mais aussi par des réorganisations conséquentes. Parallèlement, il a décidé de moderniser sa fonction financière avec le déploiement du nouveau progiciel financier CHORUS. La combinaison de ces mesures a un impact direct sur le budget du ministère, ne serait-ce que parce qu’elles nécessitent des dépenses transitoires importantes avant de générer des économies.

1. L’impact sur les dépenses de personnel

Le ministère s’est engagé à réduire ses effectifs de 54 000 emplois d’ici à 2015, les économies engrangées étant conservées pour être investies au profit des équipements. En 2009, la défense a supprimé 6 003 équivalents temps plein travaillés (ETPT), soit 1 887 ETPT de moins que ce qu’avait prévu la LPM. En effet, anticipant les réductions en 2008, les gestionnaires avaient supprimé 3 052 ETPT de plus que les prévisions. Le ministère a cherché à réduire cette avance en la ramenant à 1 165 ETPT en 2009, limitant ainsi le risque de surdéflation.

Sur le plan financier, la réduction des effectifs n’a pas encore permis de réduire les crédits de titre 2. Comme le montre le graphique suivant, l’amélioration des outils de pilotage a permis d’optimiser la dépense en définissant mieux a priori les besoins du ministère. En 2009, l’écart entre les crédits disponibles et les crédits consommés n’a atteint que 9 millions d’euros, soit 0,05 %.

Évolution des crédits de titre 2 du ministère de la défense

(en milliards d’euros)

Source : ministère de la défense.

Pour autant, la masse salariale continue à augmenter. Ce phénomène est toutefois conjoncturel : pour aider les personnels qui quittent le ministère ou qui changent de poste, il a fallu mettre en place des dispositifs d’accompagnement. En 2009, ils représentent un effort de 122,5 millions d’euros. En revanche, les dépenses de rémunération « en socle » correspondant aux rémunérations brutes, hors tout dispositif d’aide ou d’indemnisation, sont stabilisées, voire en légère diminution par rapport à 2008.

Dans le même temps, le ministère a dû faire face à un surcoût OPEX de 40 millions pour le titre 2, ainsi qu’à une hausse de 25,5 millions d’euros des sommes versées au titre de l’indemnisation des victimes de l’amiante.

Si les résultats pour 2009 sont très positifs et montrent la solidité des hypothèses initiales du ministère, il importe de veiller à ce que les objectifs de la réforme soient scrupuleusement respectés pour préserver son équilibre économique et social.

2. L’impact éventuel sur les intérêts moratoires

Conformément aux dispositions de l’article 27 de LOLF, l’État doit tenir une comptabilité budgétaire ainsi qu’une « comptabilité générale de l’ensemble de ses opérations ». Il est également précisé que « les comptes de l’État doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière ». Pour répondre à cet objectif, le Gouvernement a développé le progiciel financier CHORUS qui doit être progressivement mis en place dans tous les ministères.

Pour la défense, ce déploiement a commencé en 2009 mais devrait prendre toute sa dimension dans le courant de l’année 2010. La complexité et la grande technicité de ce chantier risquent de conduire à des retards, voire à des incidents de paiement. Le ministère dispose certes d’une procédure d’urgence pour éviter que des entreprises ne soient mises en difficulté du fait de ces retards, mais elle reste lourde à mettre en œuvre. Ces solutions alternatives n’empêcheront cependant pas une hausse des intérêts moratoires l’année prochaine.

En 2009, le ministère a réussi à maintenir les intérêts moratoires à 18,67 millions d’euros, c’est-à-dire à un niveau équivalent à celui de 2008, où ils atteignaient 18,47 millions d’euros. Ces montants montrent que le ministère a réussi à limiter le volume des impayés. Toutefois, la tendance constatée en fin d’année 2009 incite à la prudence : jusqu’en novembre, les intérêts moratoires étaient contenus à un niveau inférieur à celui de 2008. En moins d’un mois, cette avance a disparu et le niveau de 2008 a même été dépassé, montrant une dégradation des délais de paiement en fin d’année.

B. LE FINANCEMENT DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES

En 2009, les 870 millions d’euros consacrés aux opérations extérieures ont permis de projeter quelque 9 400 militaires hors du territoire métropolitain. Depuis 2004, le nombre des opérations a fortement augmenté. L’éloignement et la dangerosité ayant fortement augmenté, il a fallu donner aux militaires des moyens plus importants, ce qui a entraîné une hausse de 237,2 millions d’euros entre 2004 et 2009. Le financement de ces dépenses a changé en 2008 avec, pour la première fois, un abondement interministériel qui a été systématisé en 2009.

1. Des dépenses en hausse constante

Comme le montre le graphique ci-après, excepté une baisse en 2005, le surcoût pour les opérations extérieures est en augmentation constante depuis 2004.

Évolution du surcoût OPEX

(en millions d’euros)

Source : ministère de la défense.

Cette évolution s’explique principalement par le poids des nouveaux engagements. Comme l’indique le tableau suivant, le Liban, le Tchad et l’Afghanistan concentrent l’essentiel des dépenses.

Évolution du surcoût par théâtre d’opération

(en millions d’euros)

 

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Bosnie Croatie

58,9

33,2

24,2

18

5,9

2,4

Macédoine Kosovo

146,5

112,9

85,8

84,3

103,8

81,8

Côte d’Ivoire

191,9

191,7

164,2

156,7

112,5

72,7

Afghanistan

99,2

89,7

122,3

169,8

254,6

387,2

Tchad

76,9

80,3

78,5

96,6

94,2

111,9

EUFOR Tchad

0

0

0

8,3

109,8

68

Liban

7,1

6,1

42,5

67,8

81,7

90,3

autres

52,8

39,6

85,8

83,6

88,4

56,1

total

633,3

553,5

603,3

685,1

850,9

870,4

Source : ministère de la défense.

Le changement le plus important concerne l’Afghanistan, qui passe de 99 millions d’euros en 2004 à 387,2 millions d’euros en 2009. Le poids des dépenses engagées au Tchad va en revanche se réduire en 2010 avec le désengagement français d’EUFOR. Les opérations Boali (République Centre Afrique), Furet et Griffon (Gabon), Épervier (Côte-d’Ivoire) et le déploiement dans les Balkans (au Kosovo et en Bosnie) vont également réduire leurs effectifs en 2010. Ces redéploiements sont aujourd’hui indispensables, la France ne pouvant pas continuer à augmenter constamment l’enveloppe consacrée aux OPEX. Le contexte budgétaire permet à ce titre d’opérer une véritable hiérarchisation des priorités : les forces ne pouvant pas répondre à toutes les sollicitations, elles doivent se concentrer sur les théâtres où leurs interventions sont les plus nécessaires.

2. Un abondement interministériel désormais consacré

L’inscription dans la loi de finances initiale d’une dotation initiale pour les opérations extérieures a constitué une avancée très significative, même si la provision n’a jamais suffi à couvrir les besoins annuels. Jusqu’en 2008, il était d’usage de financer l’écart en transférant une partie des crédits alloués à l’équipement des forces. Le graphique suivant présente l’évolution du financement des OPEX depuis 2005.

Financement des OPEX

(en millions d’euros)

(1) abondement de la réserve interministérielle ou loi de finances rectificative.

(2) y compris les remboursements de l’ONU.

Source : ministère de la défense.

La dotation prévue par la loi de finance initiale a constamment augmenté depuis 2005 et la loi de programmation militaire prévoit une hausse continue jusqu’en 2011, où elle atteindra 630 millions d’euros. Dans le même temps, conformément aux dispositions de la LPM, le ministère de la défense a bénéficié d’abondements extérieurs évitant de ponctionner les dépenses d’équipement. Initié en 2008, ce mouvement s’est systématisé en 2009, puisque l’ensemble des sommes gagées par le décret d’avance ont été rétablies en loi de finances rectificative.

Pour autant, le ministère participe toujours activement au financement des OPEX grâce à des crédits dégagés en gestion. En 2009, ils ont permis de couvrir 140 millions d’euros soit près de 40 % du besoin. L’ONU a remboursé quelque 65,1 millions d’euros au titre des missions effectuées par les forces françaises à son profit. L’évolution du cours du pétrole a par ailleurs permis de réaliser 47 millions d’euros d’économies. Grâce à ces deux apports, le manque à couvrir a pu être ramené à environ 220 millions d’euros. Le mécanisme de l’abondement interministériel ne déresponsabilise donc en rien le ministère de la défense, puisqu’il cherche toujours à optimiser ses ressources et qu’il essaie de trouver en interne des moyens avant de solliciter un complément extérieur.

C. LES RECETTES EXCEPTIONNELLES

La LPM prévoit que des recettes exceptionnelles viennent abonder le budget de la défense dès 2009 et jusqu’en 2013. La loi de finances initiale pour 2009 a confirmé cet engagement. L’exécution a cependant montré que le calendrier initial n’était pas respecté.

1. Le schéma initial

L’article 3 de la LPM 2009-2014 (13)prévoit que le ministère de la défense bénéficie de près de 3,7 milliards d’euros de recettes exceptionnelles « provenant notamment de cessions », qu’il s’agisse d’emprises immobilières ou de fréquences. Le tableau ci-après présente l’évolution prévisionnelle de ces crédits.

Crédits exceptionnels prévus par la LPM 2009-2014

(en milliards d’euros 2008)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

1,61

1,22

0,54

0,2

0,1

0

Source : article 3 de la LPM.

En 2009, selon la LFI, les recettes devaient se décomposer en 972 millions d’euros pour l’immobilier et 600 millions d’euros pour les fréquences.

2. Un retard important en 2009

Comme le montre le tableau ci-après, les objectifs de la LFI n’ont pas été atteints, et ce malgré la mobilisation d’importantes mesures palliatives.

Réalisation des recettes exceptionnelles en 2009

(en millions d’euros)

 

LFI

réalisation

écart

Recettes CAS I (1)

972

561

– 42,3 %

Recettes CAS F(2)

600

0

– 100,0 %

Cessions des matériels

15

5

– 66,7 %

Reliquat des gestions précédentes

50

23

– 54,0 %

Total

1 637

589

– 64,0%

(1) compte d’affectation spéciale Immobilier

(2) compte d’affectation spéciale Fréquences

Source : ministère de la défense.

L’exécution apparaît défaillante, avec un manque de plus d’un milliard d’euros, le ministère n’ayant procédé à aucune cession conséquente.

a) La situation de l’immobilier

Pour l’immobilier, la défense a toutefois réussi à engranger 561 millions d’euros provenant de cinq sources différentes :

- 139 millions d’euros au titre des reports de crédits des années antérieures ;

- 136 millions d’euros issus de transferts budgétaires ;

- 221 millions d’euros versés par la société nationale immobilière (SNI) au titre de la renégociation de son contrat ;

- 50 millions d’euros issus de la vente d’emprises régionales ;

- 15 millions d’euros correspondant à la première fraction de la vente du fort d’Issy les Moulineaux.

Le ministère a donc réussi à trouver des solutions permettant d’attendre que les ventes soient effectives. Le retard s’explique en partie par l’abandon de la société de portage qui devait assurer la vente des emprises parisiennes. Les travaux préparatoires faisaient en effet apparaître un écart jugé trop conséquent entre la valeur domaniale des emprises et le prix que la société de portage aurait pu proposer. De ce fait, il appartient au ministère de procéder lui-même aux opérations de cession, ce qui demande plus de temps. Par ailleurs, certains sites, comme l’hôtel de la Marine, ne peuvent pas faire l’objet d’une cession ordinaire, compte tenu des contraintes patrimoniales et contractuelles. Pour ne pas trop fausser le modèle, les recettes tirées d’une valorisation de l’hôtel de la Marine n’y sont donc pas encore intégrées.

Plus globalement, la dégradation du marché immobilier aurait pu conduire le ministère à céder ses biens à un prix inférieur à leur valeur réelle. Dans pareil contexte, il est apparu plus raisonnable de différer temporairement la vente en attendant que le marché se stabilise. Cela ne remet nullement en cause le principe des ventes, il ne s’agit que d’ajustements calendaires.

b) Les fréquences

Aucune recette n’a été enregistrée pour les fréquences, puisque l’autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) souhaite achever la cession de la quatrième licence 3G et de reliquats de bande 2,1 GHz avant d’entamer la procédure de cession des fréquences de la défense (2,6 MHz et 800MHz). Il est toutefois envisageable que les premières recettes puissent être engrangées à la fin de l’année 2010 ou au début de l’année 2011. Les clients potentiels ont d’ailleurs déjà manifesté un certain intérêt pour les fréquences libérées par la défense.

D. LA DISPONIBILITÉ DES ÉQUIPEMENTS ET L’ENTRAÎNEMENT DES FORCES

Les excellentes conditions de l’exécution budgétaire 2009 ont permis d’améliorer la disponibilité des équipements et l’entraînement des militaires. Le tableau ci-après présente l’évolution des principaux indicateurs d’activité.

Évolution des indicateurs d’activité

 

 

PAP 2009

réalisation 2009

taux de réalisation

réalisation 2008

évolution 2008-2009

armée de terre

jours d’activité

150

105

70,0 %

91

&

heures d’hélicoptères

180

170

94,4 %

168

"

armée de l’air

heures de pilote de chasse

180

176

97,8 %

177

"

heures de vol transport

400

250

62,5 %

304

(

heures de vol hélicoptère

200

182

91,0 %

151

&

marine

jours passés à la mer

100

87

87,0 %

87

"

heures de vol pilote de chasse

180

195

108,3 %

170

&

heures de vol hélicoptère

220

188

85,5 %

193

(

heures de vol patrouille maritime

350

324

92,6 %

325

"

Source : ministère de la défense.

La majorité des indicateurs sont positifs, à l’exception notable de l’aéromobilité. Les pilotes de transport n’arrivent à voler que 250 heures par an quand l’objectif était de 400 heures. Ce problème est lié très clairement aux retards de l’A400M. L’armée de l’air a toutefois développé des solutions alternatives et la commande de huit Casa devrait permettre d’assurer une continuité dans la formation et l’entraînement. La situation des hélicoptères est tout aussi préoccupante même si les indicateurs sont plutôt positifs. Leur déploiement en OPEX permet en effet de maintenir un haut niveau d’activité des pilotes mais cela se fait souvent au détriment des parcs déjà vétustes. Les prochains hélicoptères doivent être livrés dans les meilleurs délais pour maintenir cette compétence rare.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission de la défense nationale et des forces armées a examiné le présent rapport d’information au cours de sa réunion du mardi 1er juin 2010.

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.

M. Philippe Nauche. Monsieur le président, vous nous avez fait une présentation optimiste de l’année 2009, mais il faut rappeler que le plan de relance a simplement permis de faire ce qui avait été originellement prévu.

Le problème des recettes exceptionnelles est très grave. Plus personne ne les espère avant 2014, notamment en matière de cessions immobilières. En 2010, les recettes espérées sont de l’ordre de 167 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 80 millions apportés par le budget général ; et en ce qui concerne les cessions de fréquences, même si le dossier avance, on ne peut attendre aucune ressource cette année. Il en va de même pour les options satellitaires.

S’ajoute à cela l’annonce du gel des dépenses publiques pour les trois ans à venir. Par rapport à la progression habituelle du budget de la défense, il entraîne une moins-value estimée à 4,8 milliards d’euros sur la période 2011-2013. Dans ces conditions, les objectifs du Livre blanc et de la loi de programmation militaires ne peuvent pas être tenus. Or la contrepartie de la suppression prévue de 54 000 emplois était l’assurance de la mise en œuvre du Livre blanc et d’une modernisation des forces ; s’il ne reste que les suppressions de postes, les lendemains vont être difficiles.

M. le président Guy Teissier. Je souligne que nous ne sommes pas réunis pour avoir un débat sur les budgets en cours et à venir, mais pour constater ce qui s’est passé en 2009, même si, bien sûr, les deux exercices ne sont pas sans lien.

En ce qui concerne l’immobilier, le ministère avait commencé par retenir la solution de la société de portage qui aurait certainement acheté à un prix très largement inférieur à celui du marché, pour ensuite revendre plus cher à la découpe. Il a finalement été décidé de ne rien vendre, en attendant que le marché reparte ; je pense que c’est un bon choix, d’autant que le ministère a réussi à trouver des solutions palliatives satisfaisantes.

Le plan de relance aura surtout soutenu l’industrie et l’emploi, en remplissant les carnets de commande des entreprises françaises.

Quant au fait que la défense pourrait être privée de 4,8 milliards dans les trois ans qui viennent, j’en suis également très préoccupé. Je souhaite que le ministre de la défense puisse nous préciser quel sera le montant exact du gel ainsi que sa répartition entre les postes budgétaires. Comme vous, sauf à ne plus respecter la loi de programmation et le Livre blanc, je ne vois pas où l’on peut faire porter l’effort. Nous risquons de réduire encore plus les personnels, ce qui serait très problématique : si l’on engage moins de jeunes dans les armées, on va à la fois accroître le nombre de demandeurs d’emploi et déséquilibrer la pyramide des âges de nos armées.

M. Jean-Claude Viollet. Je salue le travail qui nous est présenté aujourd’hui, et plus généralement l’heureuse initiative qui a été prise de suivre, année après année, l’exécution des crédits de la défense.

L’année 2009 a été une bonne année ; les commandes globales sont utiles car elles donnent de la visibilité aux armées et aux industriels.

On ne peut cependant que s’interroger sur ce qu’il va advenir ensuite. Des chiffres circulent sur les restrictions budgétaires qu’il faut préciser au plus vite d’autant que la situation des recettes exceptionnelles pourrait aggraver cette régulation. Il faut à tout le moins que nous soyons très vigilants quant aux choix qui seront faits, sachant que nous allons assister à des suppressions d’unités et à des reconfigurations de sites qui auront de graves conséquences sur les personnels et que, par ailleurs, des crédits de paiement devront être disponibles au moment de la livraison des matériels commandés.

Il me semble qu’il est de notre responsabilité commune, y compris vis-à-vis des forces, d’entendre rapidement le ministre afin d’apprécier la situation et d’émettre un avis sur les choix à venir qui vont toucher tant les effectifs que les équipements.

L’année 2009, première année de la nouvelle loi de programmation militaire, a été bonne ; il nous faut être vigilants pour les suivantes, en faisant valoir que la défense, même si elle est sollicitée pour participer à la réduction des déficits, présente des spécificités. Il ne faut pas oublier les effets de long terme, en matière d’équipements comme de métiers. Si les compétences sont perdues, elles ne pourront pas forcément être retrouvées. Nous avons aujourd’hui une armée de premier rang qui couvre le spectre complet des menaces auxquelles nous pourrions être confrontés ; nous ne pouvons qu’en être fiers, mais tout cela est très fragile.

M. le président Guy Teissier. Merci d’avoir rappelé l’importance de cette mission d’information qui rassemble treize membres de notre commission. Nos réunions trimestrielles ont le grand intérêt de mobiliser tous les états-majors et tous les responsables du ministère, les obligeant à nous rendre régulièrement des comptes. Grâce à notre fonction de contrôle, nous améliorons le pilotage et le suivi de la dépense.

En ce qui concerne les commandes globales, nous disposons d’un peu de marge avant que les livraisons interviennent ; nous n’aurons donc pas de pic de trésorerie immédiatement.

Enfin, je souhaite que le ministre vienne s’exprimer au moins devant le bureau de la commission ; mais il serait sans doute plus judicieux qu’il soit entendu par la commission.

Je vous indique d’ores et déjà que le débat d’orientation budgétaire se tiendra sans doute le 29 juin prochain. Ce sera évidemment l’occasion de parler des réductions de crédits que nous évoquons.

M. Michel Voisin. Je crois que nous partageons tous les mêmes interrogations. Comme je vous l’ai indiqué la semaine dernière, il nous faut agir très en amont : le ministre doit pouvoir nous donner des explications avant que les lettres de cadrage ne soient envoyées pour que nous puissions proposer d’éventuelles inflexions.

M. le président Guy Teissier. Je partage votre préoccupation et j’ai en fait part au cabinet du ministre la semaine dernière. Même si nous devons agir vite, je crois que tous les arbitrages ne sont pas encore finalisés, les chefs d’états-majors n’ayant encore reçu aucune consigne budgétaire.

Lors d’un récent entretien avec le chef d’état-major de l’armée de terre, j’ai pu constater l’ampleur des efforts qui sont demandés à cette armée. Elle recrute chaque année 30 000 personnes pour compenser 30 000 départs, sachant que 30 000 personnels sont déployés chaque année en opérations. C’est dire que la quasi-totalité de l’armée de terre, qui compte 110 000 hommes, est en mouvement permanent. À cela s’ajoutent les déplacements et fermetures qui sont imposés aux régiments. Si se surajoutent des coupes budgétaires, avec leurs effets sur la vie de nos soldats, nous risquons d’être confrontés à des problèmes difficiles.

M. Michel Grall. Les actifs du ministère de la défense ont été évalués, hors patrimoine immobilier, à 110 milliards d’euros au 31 décembre 2009. Sur ce total, 25 milliards d’euros seraient difficilement « auditables » car il s’agit d’actifs extrêmement divers et anciens pour lesquels les systèmes d’information montrent leurs limites.

Avez-vous le sentiment que le ministère s’est engagé dans la voie d’une meilleure connaissance de ces 25 milliards d’euros d’actifs ?

M. le président Guy Teissier. Dans son rapport, la Cour des comptes a reconnu que le ministère avait fait des progrès en la matière, mais elle a considéré qu’ils restaient insuffisants. Le projet CHORUS, qui devait permettre de corriger certains errements, rencontre d’importantes difficultés dans sa mise en œuvre. Je me félicite des progrès accomplis, mais il faut les poursuivre au plus vite. Je crois qu’il serait utile d’interroger le ministre sur ce point lors de sa prochaine audition.

M. Jean Michel. Je suis frappé par le retard accumulé par la précédente loi de programmation militaire. Un manque de 4,2 milliards d’euros de crédits de paiement entre 2006 et 2008, c’est beaucoup !

L’existence d’une mission d’information sur l’exécution des crédits de la défense est évidemment une très bonne chose, surtout dans le contexte d’une certaine cacophonie entre le ministère de la défense et Bercy que j’avais déjà pu observer entre 1997 et 2002, en tant que rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le titre V des projets de loi de finances.

Cette mission nous a notamment donné l’occasion de constater qu’en 2009, le taux de consommation des crédits a été de 94 % pour les autorisations d’engagement et de 99 % pour les crédits de paiement, ce qui ne s’était jamais vu.

Il faut cependant relativiser ces observations. La défense représente environ la moitié du budget d’investissement de l’État, mais celui-ci ne constituait déjà que 10 % du budget général de l’État il y a dix ans, et nous sommes aujourd’hui plus près de 9 %. Les dépenses d’investissement sont pourtant celles qui préparent l’avenir. Quant au budget de la défense, qui a pu représenter jusqu’à 5,6 % du PIB, il est tombé à 2 % et plus vraisemblablement à quelque 1,7 % du PIB.

J’observe que chaque fois que la France a fait un effort conséquent pour sa défense, elle a connu une période de prospérité ; à l’inverse chaque fois qu’elle a baissé la garde dans ce domaine, sa situation économique et sociale s’est détériorée.

Mon inquiétude est donc la même que la vôtre, monsieur le président. Quels vont être les effets de la régulation envisagée pour les trois prochaines années ? Il paraît difficile d’amputer les dépenses de fonctionnement. ; ce sont donc les investissements qui risquent de constituer la variable d’ajustement. Lesquels va-t-on sacrifier ?

Malheureusement, je pense que les plus grandes difficultés sont devant nous. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui ne se rendent pas compte de l’état dans lequel se trouvent le monde et la France ; les mêmes causes produisant les mêmes effets, la crise à laquelle nous assistons en Europe aura à mon avis son écho avant deux ans aux Etats-Unis dont les capacités financières sont beaucoup plus obérées que celles des pays européens. Et je crains fort que l’amputation des crédits de notre défense dépasse de beaucoup 4,8 milliards dans les trois ans à venir.

M. Jean-Pierre Soisson. Serait-il possible que nous ayons un débat en commission avec le ministre de la défense avant le débat d’orientation budgétaire du 29 juin ?

M. le président Guy Teissier. Cela me paraît indispensable.

Je confirme que, comme vient de le dire M. Jean Michel, la mission a rencontré certaines difficultés au départ en raison des différences de présentation entre la défense et le ministère du budget.

Je partage l’idée que la défense, qui est à l’origine de recherches et de développements à vocation souvent duale, peut servir de « passeur de crise ». Ce discours risque malheureusement d’être difficile à défendre dans le contexte actuel. Comment justifier une exception pour la défense quand l’éducation ou la santé vont devoir faire des efforts ?

Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas défendre la place originale de la défense dans le paysage français. Je crois que l’audition du ministre sera un premier signal en ce sens. Il appartiendra également aux rapporteurs budgétaires de défendre cette idée.

Compte tenu de ces éléments, je ne peux m’empêcher de m’interroger sur l’opportunité du projet de regroupement des administrations centrales à Balard. Même si c’est l’opérateur qui devra réaliser l’investissement, cela va représenter une dépense réelle annuelle de plus de 100 millions d’euros en fonctionnement.

M. Christophe Guilloteau. Ne pourrait-on demander à des représentants de Bercy de venir en même temps que le ministre de la défense ?

M. le président Guy Teissier. Cela me paraît difficile.

M. Jean-Pierre Soisson. Cela risquerait de mettre le ministre de la défense en porte-à-faux.

Avant de rejoindre cette commission, je ne me rendais pas compte de l’importance des problèmes rencontrés par la défense. Je suis persuadé que l’ensemble des parlementaires, et a fortiori l’opinion publique, ne sont pas conscients de la gravité de la situation. Nous avons un rôle majeur de pédagogie à remplir.

Quant au ministre de la défense, il nous revient de le soutenir dans la défense de son budget.

M. le président Guy Teissier. Je crois en effet que le ministre de la défense, comme nous, défend la spécificité de son ministère. Il lui faut néanmoins participer à l’effort global ; à nous de rechercher la meilleure façon de le répartir, pour que notre défense souffre le moins possible.

*

* *

La commission a décidé, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

1 () La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

2 () Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

3 () Avis n° 988 du 19 juin 2008 de M. Michel Grall sur le projet de loi (n° 917) de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007.

4 () Avis n° 1290 du 3 décembre 2008 de M. Jacques Lamblin sur le projet de loi de finances rectificative pour 2008 (n° 1266).

5 () Rapport d’information n° 1378 du 14 janvier 2009 de Mme Patricia Adam, MM. Patrick Beaudouin et Yves Fromion sur l’exécution de la loi de programmation militaire pour les années 2003 à 2008.

6 () Rapport d’information n° 3753 du 21 février 2007 présenté par M. Guy Teissier en conclusion des travaux d’une mission d’information sur le contrôle de l’exécution des crédits de la défense pour l’exercice 2006.

7 () Avis n° 988, op. cit.

8 () Rapport d’information n° 1378, op. cit.

9 () Ibid.

10 () Loi n° 2009-928 du 29 juillet 2009 relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense.

11 () Y compris la commande de rechanges et d’équipements de mission initialement prévue après 2009 et qui a été regroupée avec la commande globale des appareils.

12 () Loi n° 2009-122 du 4 février 2009 de finances rectificative pour 2009.

13 () Loi n° 2009-928, op. cit.


© Assemblée nationale