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N° 435

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 novembre 2007.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à soutenir le pouvoir d’achat des ménages face à la hausse des prix des produits pétroliers et à développer les modes de transport alternatifs (n° 403),

PAR M. Jean LAUNAY,

Rapporteur,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 403

INTRODUCTION 7

EXPOSÉ GÉNÉRAL : LE POUVOIR D’ACHAT ATTAQUÉ DE TOUTES PARTS 9

A.– LE REVENU DISPONIBLE BRUT ET LA CONSOMMATION EN BERNE PAR RAPPORT AUX ANNÉES 1998-2001 10

B.– DES HAUSSES DE PRIX PLUS DOMMAGEABLES QUE NE LE MESURENT LES INDICES SYNTHÉTIQUES 12

C.– UNE ÉVOLUTION DU SALAIRE MINIMUM INSUFFISANTE ET LA HAUSSE DU TAUX DE PAUVRETÉ 13

D.– L’ENDETTEMENT CROISSANT DE TOUTES LES CATÉGORIES SOCIALES DANS UN CONTEXTE DE RENCHÉRISSEMENT DU CRÉDIT 15

LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI 19

I.– REDISTRIBUER LA RENTE DES COMPAGNIES PÉTROLIÈRES (ARTICLE PREMIER) 19

A.– LA LOI DU 10 NOVEMBRE 1997 PORTANT MESURES URGENTES À CARACTÈRE FISCAL ET FINANCIER 19

B.– LES CONTRIBUTIONS DES COMPAGNIES PÉTROLIÈRES EN 2000 ET 2001 20

C.– LA SURTAXE SUR LES BÉNÉFICES DES COMPAGNIES PÉTROLIÈRES DE LA PROPOSITION DE LOI 21

1.– Les propositions de loi des groupes socialistes de l’Assemblée nationale et du Sénat de juin 2006 21

2.– L’article premier de la présente proposition de loi 22

II.– INSTITUER UN NOUVEAU CHÈQUE-TRANSPORT POUR LE POUVOIR D’ACHAT ET L’ENVIRONNEMENT (ARTICLE 3) 24

A.– LES LIMITES DU CHÈQUE-TRANSPORT INSTAURÉ EN JANVIER 2007 24

1.– Les aides au financement des transports publics 24

2.– Le chèque-transport dans sa version de la loi du 30 décembre 2006 sur la participation et l’actionnariat salarié 25

3.– L’échec du chèque-transport dans sa version de 2006 25

B.– LE NOUVEAU CHÈQUE-TRANSPORT 26

1.– Une négociation nationale sur le chèque transport 27

2.– Le rôle du nouveau chèque-transport 27

III.– FAVORISER LA RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DE DIOXYDE DE CARBONE DES TRANSPORTS AÉRIENS (ARTICLE 4) 29

A.– LA SUPPRESSION DE L’EXONÉRATION DE TIPP POUR LES CARBURÉACTEURS, UN SIGNAL DE DÉPART 29

B.– LE SYSTÈME INTERNATIONAL D’ÉCHANGES DE QUOTAS D’ÉMISSION 30

IV.– RENFORCER LA TAXE SUR LES VOITURES PARTICULIÈRES LES PLUS POLLUANTES (ARTICLE 5) 31

A.– LA SUPPRESSION DE LA VIGNETTE AUTOMOBILE POUR LES PARTICULIERS 31

B.– LE RENFORCEMENT DE LA TAXE SUR LES VOITURES PARTICULIÈRES LES PLUS POLLUANTES 32

V.– ÉVITER UN EFFET D’AUBAINE POUR L’ÉTAT AU DÉTRIMENT DES CONSOMMATEURS ET LISSER LES HAUSSES DE PRIX DES CARBURANTS (ARTICLE 2) 34

A.– LA HAUSSE DES PRIX DU PÉTROLE ET DU GAZ NATUREL 34

1.– La structure des prix des carburants à la production 35

2.– Un vrai choc pétrolier étalé dans le temps 36

B.– LA FISCALITÉ SUR LES PRODUITS PÉTROLIERS PÉNALISE LES CONSOMMATEURS FRANÇAIS 37

1.–  La fiscalité sur les produits pétroliers 37

2.– Comparaisons des prix des carburants dans l’Union européenne 38

a) Les prix du super sans plomb 95 38

b) Les prix du gazole 43

c) Les prix du fioul domestique 46

C.– LA STABILISATION DE LA FISCALITÉ PÉTROLIÈRE EN 2000 ET 2001 48

1.– Le contexte des prix du pétrole et du cours du dollar 48

2.– Le mécanisme de stabilisation de la fiscalité pétrolière 50

a) Le mécanisme de stabilisation et la baisse exceptionnelle de la TIPP 50

b) Les autres mesures sur la TIPP 51

3.– Le coût des mesures de stabilisation de la TIPP 52

4.– La suspension et la suppression de la TIPP flottante 53

D.– LES RAPPORTS DE LA COMMISSION INDÉPENDANTE DE TRANSPARENCE SUR LA FISCALITÉ PÉTROLIÈRE 53

1.– La perte de recettes fiscales en 2005 54

2.– La perte de recettes fiscales en 2006 56

3.– La méthodologie des rapports de la commission indépendante de transparence sur la fiscalité pétrolière 58

E.– LE MÉCANISME DE STABILISATION PROPOSÉ 59

1.– La situation de 2007 59

2.– Un mécanisme de stabilisation déclenché dès décembre 2007 60

VI.– COMPENSATION DE PERTES ÉVENTUELLES DE RECETTES POUR L’ÉTAT (ARTICLE 6) 63

CONCLUSION 65

EXAMEN EN COMMISSION 67

INTRODUCTION

La hausse des prix des produits pétroliers et du gaz naturel enregistrée depuis 2004 pèse lourdement sur le budget des ménages.

Il s’agit à la fois d’une charge nouvelle dont la croissance semble ne pas devoir s’arrêter, et d’un révélateur de la baisse du pouvoir d’achat des ménages dont les budgets subissent l’attaque conjuguée de la stagnation des revenus et de la hausse des dépenses incompressibles.

La présente proposition de loi du groupe socialiste constitue le volet énergétique d’un ensemble de propositions qui répondent aux légitimes inquiétudes de nos concitoyens, et qui comprennent la majoration de la prime pour l’emploi, la mise en œuvre d’un bouclier logement et une meilleure régulation des pratiques commerciales.

La volatilité des cours du pétrole, largement due à la spéculation, voit se succéder de nombreuses phases de hausse rapide et des phases plus rares de baisse. La tendance est durablement à la hausse des prix, en raison d’évolutions structurelles majeures tant en ce qui concerne l’offre, insuffisante et de plus en plus difficile à accroître, et la demande, dont l’augmentation suit l’élévation du niveau de vie des grands pays émergents.

Cette évolution des prix des hydrocarbures doit être replacée, bien entendu, dans le contexte de la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. On sait, d’une part, que les transports sont une source importante des émissions de CO2 – 38,4 % en 2005 –, et, d’autre part, que le prix est un signal pour les consommateurs ; on ne peut ignorer son rôle essentiel pour changer leurs comportements.

La présente proposition de loi prévoit en conséquence une approche globale du grave problème posé par l’augmentation des prix du pétrole, en y intégrant la dimension environnementale.

Son fil directeur est d’accélérer le reflux de la consommation de produits pétroliers et le passage à une économie sans pétrole, tout en laissant le temps aux consommateurs de s’adapter à la perspective inéluctable d’un pétrole de plus en plus cher.

L’article premier propose une contribution égale à 40 % de l’impôt sur les sociétés, dès lors que leur bénéfice imposable, au titre de l’année considérée, est supérieur de 20 % au bénéfice de l’année précédente, pour les sociétés dont l’objet principal est d’effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation.

L’article 2 propose une diminution de la taxe intérieure sur la consommation de produits pétroliers à raison de l’augmentation de TVA consécutive à une hausse du prix du pétrole dans les deux mois antérieurs.

L’article 3 prévoit une négociation nationale et interprofessionnelle entre les organisations syndicales représentatives de salariés et d’employeurs en vue de la mise en place obligatoire d’un chèque transport au bénéfice de l’ensemble des salariés et des agents des fonctions publiques.

L’article 4 abroge l’exonération de taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers dont bénéficient les carburéacteurs.

L’article 5 accroît le montant de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules les plus émetteurs de dioxyde de carbone.

L’article 6 précise que les éventuelles pertes de recettes dues à l’application des articles précédents sont compensées à due concurrence par une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs (articles 575 et 575 A du code général des impôts).

EXPOSÉ GÉNÉRAL : LE POUVOIR D’ACHAT ATTAQUÉ DE TOUTES PARTS

Selon le Rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2008, la croissance du revenu disponible brut des ménages, en pouvoir d’achat, devrait ralentir en 2008, avec un taux de 2,5 %, contre 2,8 % en 2007.

On sait que cette prévision repose sur une hypothèse de croissance du PIB comprise entre 2 % et 2,5 %, retenue par le Gouvernement. La croissance du pouvoir d’achat des ménages devrait en conséquence être de 2,5 %.

Pourtant, l’INSEE table sur un taux de croissance du PIB de 1,8 % en 2007, prévoyant une nettement décélération de la croissance au quatrième trimestre.

Les autres moteurs de la croissance ne devant malheureusement pas se rallumer dans les prochains mois, que ce soient les exportations ou l’investissement des entreprises, il est probable que ce ralentissement perdure en 2008.

En vérité, les signaux perçus par nos concitoyens vont tous dans le même sens, sinon d’un affaiblissement de leur pouvoir d’achat, au moins d’un ralentissement de son augmentation. Les statistiques les plus récentes confirment malheureusement cette perception.

La consommation des ménages croît depuis 2002 moins rapidement que sous la législature précédente. L’inflation semble reprendre, indépendamment de la volatilité des prix de certains biens. Les hausses de prix touchent des consommations incompressibles, comme le logement ou les transports. Les faibles revenus ne connaissent pas la hausse rapide qui permettrait de protéger les niveaux de vie. Enfin, l’endettement des ménages s’approfondit et s’étend à de nouvelles catégories de la population, en particulier les ménages âgés, alors que les conditions de crédit pourraient se durcir en raison de la crise financière déclenchée par la crise des crédits hypothécaires à risque aux États-Unis.

Ainsi les chiffres et les perceptions concordent, ce qui justifie les mesures avancées par la présente proposition de loi.

A.– LE REVENU DISPONIBLE BRUT ET LA CONSOMMATION EN BERNE PAR RAPPORT AUX ANNÉES 1998-2001

Sur les six années 1997-2002, le taux de croissance du revenu disponible brut des ménages en pouvoir d’achat s’est élevé à 3,1 % en moyenne.

Sur les quatre années suivantes, de 2003 à 2006, un décrochage important s’est produit, le même indicateur n’atteignant plus que 1,8 % en moyenne sur la période.

Source : INSEE

Une évolution semblable s’est produite pour la consommation des ménages qui connaît aussi, depuis 2002, une phase de croissance inférieure à celle de la période 1998 – 2001.

Source : INSEE

En moyenne, la consommation en volume des ménages progressait annuellement de 3,3 % entre 1998 et 2001.

C’est un point de taux de croissance annuelle qui a été perdu depuis lors, puisque la consommation des ménages n’a plus augmenté que de 2,3 % en moyenne sur la période 2002-2006.

La structure de la consommation a subi, par ailleurs, des modifications sensibles. Certains postes correspondant à des dépenses incompressibles ont subi des hausses de prix importantes (voir tableau ci-après).

Ainsi, le poste logement, chauffage, éclairage, qui ne représentait en 1996 que 23,5 % du total des dépenses de consommation, est passé à 25,2 % du total en 2006. Si ces dépenses ont augmenté en volume de 2,4 % par an en moyenne, les prix ont progressé de 2,6 % en 2004, de 4,2 % en 2005 et de 3,9 % en 2006.

ÉVOLUTION DE LA CONSOMMATION DES MÉNAGES PAR FONCTION

 

Poids dans la valeur de la dépense de consommation (en %)

Évolution annuelle en volume, en %

Évolution annuelle des prix en %

 

1996

2006

2004

2005

2006

2004

2005

2006

Alimentation et boissons non alcoolisées

14,4

13,7

1,5

1,2

0,9

0,3

0,3

1,8

Boissons alcoolisées et tabac

3,4

3,0

-9,5

-0,7

1,6

12,4

0,1

0,4

Articles d’habillement et chaussures

3,4

3,0

1,4

0,4

0,7

0,1

0,3

0,2

Logement, chauffage, éclairage

23,5

25,2

2,7

2,2

2,5

2,6

4,2

3,9

Équipement du logement

6,2

5,9

3,6

2,3

1,6

0,9

0,6

1,0

Santé

3,3

3,4

5,8

4,6

3,9

0,5

0,5

0,3

Transport

15,1

14,7

2,0

1,3

0,0

3,5

4,3

2,9

Communications

1,9

2,8

5,6

6,6

10,2

-1,2

-1,0

-5,6

Loisirs et culture

8,6

9,3

6,6

4,8

5,2

-1,4

-2,0

-1,5

Éducation

0,6

0,7

2,5

3,6

4,0

5,6

4,8

5,6

Hôtels, cafés et restaurants

5,7

6,2

0,6

0,6

1,5

2,7

2,4

2,3

Autres biens et services

12,1

11,2

2,0

2,2

2,3

1,8

0,8

2,8

Correction territoriale

-1

-1

-17,2

-10,8

11,7

1,8

1,8

1,9

Dépenses de consommation des ménages

100

100

2,6

2,2

2,1

1,8

1,8

1,9

Source : INSEE

La part du budget transports a reculé de 15,1 % du total en 1996 à 14,7 % en 2006. La croissance des dépenses en volume correspondantes a fortement ralenti, au point de stagner en 2006. Les prix ont au contraire augmenté de 3,5 % en 2004 par rapport à l’année précédente, de 4,3 % en 2005 et de 2,9 % en 2006.

Quoique pesant d’un poids limité dans le total (0,7 % en 2006), les dépenses d’éducation revêtent une importance symbolique forte. Elles ont subi, ces dernières années, une forte augmentation des prix, soit 5,6 % en 2004, 4,8 % en 2005 et 5,6 % en 2006.

Ainsi, les dépenses de consommation constatées justifient pleinement les inquiétudes des ménages.

Certaines dépenses incompressibles, comme le logement, le chauffage et l’éclairage, croissent en volume. Cette croissance grève d’autant plus les budgets que les prix augmentent rapidement.

Des dépenses comme les dépenses de transport sont maîtrisées en volume sous l’effet des hausses de prix. Mais, concrètement, cela signifie que les ménages sont contraints de renoncer à certains déplacements, que ce soit dans un cadre professionnel ou dans le cadre des loisirs.

Enfin, certains postes comme les services de télécommunications deviennent incompressibles et les baisses des prix observées ne sont pas assez rapides pour compenser les hausses en volume.

La situation semble par ailleurs sur le point de s’aggraver, dans la mesure où la hausse des prix est en nette accélération.

B.– DES HAUSSES DE PRIX PLUS DOMMAGEABLES QUE NE LE MESURENT LES INDICES SYNTHÉTIQUES

Le pouvoir d’achat des ménages est altéré par un ensemble de hausses du prix de certains produits dont la consommation est incompressible. Cette évolution préoccupante n’est que partiellement reflétée par les indices.

L’indice des prix à la consommation de l’INSEE (IPC), calculé pour l’ensemble des ménages et pour la France entière (métropole et DOM), n’a augmenté que de 2 % entre octobre 2006 et octobre 2007.

Pour l’INSEE, l’augmentation pour le poste alimentation, entre les mêmes dates, s’élève à 2,2 %.

Mais, la hausse est de 2,5 % pour les services, et, pour l’énergie, de 5,2 %. Les prix des produits manufacturés sont, pour leur part, quasi stables, avec une augmentation limitée à 0,2 %.

Par ailleurs, les loyers, selon l’indice de référence de l’INSEE, ont enregistré au deuxième trimestre 2007, une hausse de 2,76 % par rapport au deuxième trimestre 2006. Au premier trimestre 2007, leur hausse a atteint 2,92 % en rythme annuel et 3,23 % au dernier trimestre 2007.

La hausse de l’indice du coût de la construction a, pour sa part, atteint 5 % au deuxième trimestre 2007 et 5,5 % au premier trimestre 2007.

Sur un plan général, la hausse des prix à la consommation a renoué en octobre 2007 avec un niveau de 2 % en glissement annuel, contre 1,1 % en octobre 2006.

Source : INSEE

Fait significatif, l’inflation sous-jacente, qui exclut les tarifs publics et les produits dont les prix sont volatils, est en hausse sensible, atteignant 1,6 % en octobre 2007, contre 1,2 % en octobre 2006.

Cette accélération de la hausse des prix intervient alors que parallèlement, les taux du crédit sont également en hausse, à la suite de la crise des crédits hypothécaires à risque aux États-Unis, dans un contexte de croissance économique ralentie.

C.– UNE ÉVOLUTION DU SALAIRE MINIMUM INSUFFISANTE ET LA HAUSSE DU TAUX DE PAUVRETÉ

Un coup de pouce au SMIC, au-delà de la revalorisation fixée par la loi, a été refusé par le Gouvernement en juillet 2007, au motif qu’un accroissement des faibles revenus proviendrait des heures supplémentaires.

Le ralentissement de la croissance économique et les difficultés d’application du nouveau régime des heures supplémentaires soulignent l’erreur d’analyse des pouvoirs publics. L’évolution des faibles rémunérations montre l’ampleur de l’injustice faite aux salariés modestes, alors qu’au même moment des avantages fiscaux considérables étaient accordés aux catégories de population les plus favorisées.

Le récent rapport du conseil de l’Emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC), intitulé la France en transition 1993-2005 montre tout à la fois l’affaiblissement relatif du niveau du SMIC par rapport aux salaires minimums dans les autres États membres de l’Union européenne, l’augmentation, en France, du nombre de personnes recevant le SMIC et l’approfondissement des inégalités salariales.

Comparé à son niveau en France, le salaire minimum est désormais supérieur en Belgique, aux Pays-Bas, au Luxembourg, et, après de fortes revalorisations opérées récemment, au Royaume Uni et en Irlande.

Alors même que son niveau relatif en Europe diminuait, le salaire minimum concerne un nombre croissant de salariés.

NIVEAU DU SALAIRE MINIMUM EN EUROS ET PROPORTION DE SALARIÉS CONCERNÉS

 

Salaire minimum en euros au 1er semestre

Pourcentage de salariés recevant le salaire minimum

 

1999

2005

2006

1999

2004

Belgique

1 074

1 210

1 234

nd

nd

Grèce

505

668

690

nd

nd

Espagne

416

599

631

2,6

0,8

France

1 036

1 197

1 218

12,8

15,6

Irlande

 

1 183

1 293

-

3,1

Luxembourg

1 162

1 467

1 503

16,8

18

Pays-Bas

1 064

1 265

1 273

2,2

2,1

Portugal

357

437

450

7,5

5,5

Royaume-Uni

866

1 197

1 269

2,5

1,4

Source : Eurostat et CERC

Par ailleurs, la France figure parmi le petit nombre de pays de l’Union européenne où la proportion de salariés recevant le salaire minimum est importante et en augmentation. De 15,6 % du total du nombre de salariés en 2004, cette proportion est même passée à 16,8 % dès juillet 2005.

S’agissant de la revalorisation du SMIC, la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi a permis de résorber les différences de revalorisation des rémunérations des salariés des entreprises passées aux 35 heures et des salariés des entreprises restées à 39 heures. En dépit de l’augmentation du pouvoir d’achat des salariés de cette dernière catégorie, il reste que le SMIC en France, au 1er semestre 2006, était inférieur à celui des autres pays de l’Union européenne, la Grèce, l’Espagne et le Portugal mis à part.

Circonstance aggravante, les inégalités de revenus tirés de l’emploi sont élargies par les disparités de durée du travail entre salariés, selon qu’il s’agit d’emplois à temps plein ou à temps partiel d’une durée variable. La durée d’emploi au cours de l’année est également un élément d’approfondissement des inégalités de revenus. D’où les effectifs croissants de la catégorie de travailleurs pauvres. Le CERC évalue à 20 % la part des salariés en dessous du seuil de bas revenu salarial défini comme la moitié du salaire net médian, soit 7 300 euros par an.

Il n’est donc pas surprenant qu’après avoir sensiblement diminué de 1997 à 2002, la pauvreté soit de nouveau en hausse depuis 2004.

Selon l’indicateur de pauvreté publié par l’INSEE, un ménage est considéré comme pauvre lorsque son niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. Dans l’approche en termes relatifs utilisée dans l’Union européenne, ce seuil est déterminé par rapport à la distribution des niveaux de vie de l’ensemble de la population, soit 60 % de la médiane des niveaux de vie.

De 1996 à 2003, ce taux de pauvreté est passé de 13,5 % du nombre total de ménages à 12 %, soit une réduction de 11 %. En 2004, le taux de pauvreté s’est situé à 11,7 %, avant de remonter à 12,1 % en 2005.

Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que le recours à l’endettement soit en augmentation rapide dans notre pays.

D.– L’ENDETTEMENT CROISSANT DE TOUTES LES CATÉGORIES SOCIALES DANS UN CONTEXTE DE RENCHÉRISSEMENT DU CRÉDIT

Selon l’Observatoire de l’endettement des ménages, le recours au crédit sous toutes ses formes s’est amplifié dans les années récentes.

52,6 % des ménages ont eu recours au crédit en 2005. Il s’agit d’une remontée nette du recours à l’endettement : ainsi, en 2003, le taux correspondant était de 49,7 %.

Le recours au crédit a fortement augmenté chez les ménages de moins de trente ans. Alors que 50,6 % des jeunes ménages étaient endettés en 2002, 57,8 % l’étaient à la fin 2005.

L’endettement est également en croissance pour les ménages de plus de 65 ans. À la fin 2005, 24,6 % d’entre eux étaient endettés, contre 22,3 % en 2003.

LE RECOURS DES MÉNAGES AU CRÉDIT, PAR TRANCHE D’ÂGE

(% du nombre total de ménages)

 

Ensemble des ménages

Ménages de moins de 30 ans

Ménages de plus de 65 ans

1999

50,4 %

53,5%

23,2%

2000

51,8%

55,8%

23,4%

2001

52,9%

52,6%

23,3%

2002

51,3%

50,6%

24,3%

2003

49,7%

51%

22,3%

2004

50,2%

55,7%

21,7%

2005

52,6%

57,8%

24,6%

Source : Observatoire de l’endettement des ménages

Parmi les crédits de la vie courante, le recours au découvert bancaire était pratiqué par 24,4 % des ménages à la fin 2005. Par ailleurs, à la même date, 34,5 % des ménages étaient endettés au titre de crédits de trésorerie. La proportion de ménages estimant leur charge d’endettement trop ou beaucoup trop élevée est passée de 12,9 % en 2001 à 14,1 % en 2005.

Compte tenu des projets d’acquisition et de la limitation de la progression des revenus, à la fin 2005, 4,8 % de l’ensemble des ménages envisageaient à la fin 2005 de souscrire un crédit de trésorerie et 6 % un crédit immobilier.

C’est dans ce contexte que s’est amorcée à l’automne une remontée des taux d’intérêt, qui fait suite à la crise des crédits hypothécaires à risque aux États-Unis. Le taux d’intérêt du crédit immobilier à quinze ans, est en effet, au début novembre 2007, supérieur d’un point au taux moyen de 2006.

Source : Meilleurtaux.com

La plupart des baromètres présentés par les sites Internet de comparaison des taux et des offres de crédits font état d’une tendance à la hausse des taux.

Ainsi, pour les offres de prêts personnels, les taux effectifs globaux qui comprennent les frais annexes dont les frais de dossier et les assurances, s’étagent entre 3,5 % et 8,5 %, et sont à la hausse. Il en est de même pour les taux des crédits renouvelables, qui s’étagent pour le moment entre 3,9 % et 20,15 %.

En tout état de cause, la crise des crédits hypothécaires à risque aux États-Unis s’est diffusée à un très grand nombre de banques via le mécanisme de la titrisation et la multiplication des Sicav monétaires dites à haut rendement (1). En l’absence de certitudes sur la santé financière réelle d’un grand nombre d’intervenants, les conditions des prêts de banques à banques semblent durablement durcies. En conséquence, les conditions de revenus et de patrimoine exigées des emprunteurs, ainsi que les taux d’intérêt semblent devoir continuer à être renforcées.

Ainsi, c’est au moment où le recours au crédit devient plus nécessaire qu’il devient plus cher, en raison de la situation du système bancaire international.

Dans ces conditions, le soutien au pouvoir d’achat des ménages est un impératif d’équité qui aura également un effet bénéfique sur la croissance économique.

LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

I.– REDISTRIBUER LA RENTE DES COMPAGNIES PÉTROLIÈRES
(ARTICLE PREMIER)

Le présent article tend à prévoir une nouvelle fois, dès 2008, une taxation supplémentaire de la rente pétrolière, laquelle s’est encore accrue avec la flambée des prix du pétrole intervenue depuis 2004.

La hausse des prix du pétrole pèse lourdement sur le budget des ménages et génère des profits d’aubaine pour les compagnies pétrolières.

La rente des compagnies pétrolières doit être taxée par la puissance publique, de manière à financer les mesures d’allègement du coût des hydrocarbures pour les particuliers et les ménages.

Rappelons que des mesures fiscales temporaires avaient permis en 1997 de réduire le déficit des administrations publiques dans la perspective du lancement de la monnaie unique. Des mesures fiscales temporaires ont, également, été adoptées en 2000 et 2001 pour faire face à la hausse des prix du pétrole.

A.– LA LOI DU 10 NOVEMBRE 1997 PORTANT MESURES URGENTES À CARACTÈRE FISCAL ET FINANCIER

Afin de faire face au creusement du déficit des administrations publiques, le gouvernement de Lionel Jospin avait pris à l’automne 1997 un ensemble de mesures fiscales et financières, rassemblées dans la loi n° 97-1026 du 10 novembre 1997 portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier.

Parmi ces mesures, une surtaxe temporaire avait été instaurée sur le taux de l’impôt sur les sociétés pour les entreprises réalisant plus 50 millions de francs de chiffre d’affaires. Cette surtaxe avait été fixée à 15 % pour 1997 et 1998, et à 10 % en 1999.

Cette mesure a eu pour effet de porter le taux de l’impôt sur les sociétés, pour les années considérées, à 41,66 % puis à 40 % et s’est traduite par l’insertion dans le code général des impôts d’un article 235 ter ZB ainsi rédigé :

« Article 235 ter ZB. – Les personnes morales sont assujetties, dans les conditions prévues aux II à V de l’article 235 ter ZA, à une contribution temporaire égale à une fraction de l’impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés au I de l’article 219.

Cette fraction est égale à 15 % pour les exercices clos ou la période d’imposition arrêtée conformément au deuxième alinéa de l’article 37, entre le 1er janvier 1997 et le 31 décembre 1998 inclus. Elle est réduite à 10 % pour les exercices clos ou la période d’imposition arrêtée entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 1999 inclus.

Sont exonérées les personnes morales ayant effectué un chiffre d’affaires de moins de 50 millions de francs. (…) »

Cette mesure avait porté sur l’ensemble des entreprises, au sein desquelles les compagnies pétrolières avaient apporté une contribution notable.

Cette mesure a été en vigueur pour les exercices 1998, 1999 et 2000. Elle n’est pas traduite par une hausse globale de la pression fiscale. Le taux des prélèvements obligatoires a été de 44,0 % en 1997 et de 44,1 % en 2000.

La mesure n’a plus été en vigueur à partir du 31 mars 2001.

B.– LES CONTRIBUTIONS DES COMPAGNIES PÉTROLIÈRES EN 2000 ET 2001

La loi de finances pour 2001 a introduit un ensemble de mesures visant à alléger le poids de la fiscalité pétrolière pour les particuliers.

Le prix du pétrole avait, en effet, été multiplié par trois, entre janvier 1999 et septembre 2000, passant de 11 à 33 dollars le baril.

À cette occasion, la stabilisation des recettes de la fiscalité pétrolière, souvent désignée sous l’appellation « TIPP flottante », a été mise en place par un mécanisme de diminution de la TIPP en cas de hausse des recettes de TVA sur les produits pétroliers (voir plus loin).

D’autres mesures ont été mises en place, comme la diminution de la TIPP sur le fioul domestique et le remboursement de TIPP aux transporteurs routiers de marchandises et aux transports routiers publics de voyageurs.

C’est notamment afin de compenser la dépense fiscale relative au fioul domestique qu’un prélèvement fiscal supplémentaire a été opéré sur les bénéfices des compagnies pétrolières. Les entreprises pétrolières bénéficiaient de la faculté de pratiquer une provision pour hausse des prix, lorsqu’une hausse des prix supérieure à 10 % était constatée pour un produit stocké. Ce mécanisme de provision a été largement utilisé, en raison de son impact favorable sur les résultats des entreprises.

En contrepartie de cet avantage, et pour assurer le financement de la réduction de 30,4 % de la TIPP sur le fioul domestique, la loi de finances pour 2001 a introduit une taxe exceptionnelle de 25 % assise sur la fraction excédant 100 millions de francs du montant de la provision pour hausse des prix inscrite au bilan des entreprises pétrolières.

Simultanément, la provision pour reconstitution de gisements d’hydrocarbures a été supprimée, sauf pour les gisements exploités en France.

La mesure s’est appliquée aux provisions constituées à compter de 2001 et aux provisions constituées au titre des exercices antérieurs.

C.– LA SURTAXE SUR LES BÉNÉFICES DES COMPAGNIES PÉTROLIÈRES DE LA PROPOSITION DE LOI

La taxation des profits d’aubaine des compagnies pétrolières s’impose, à la fois pour permettre leur redistribution à l’ensemble des ménages et pour financer une politique de réduction de la dépendance pétrolière.

Cette taxation est proposée depuis plusieurs années par les groupes socialistes de l’Assemblée nationale et du Sénat. La flambée actuelle des prix du pétrole la rend encore plus nécessaire.

1.– Les propositions de loi des groupes socialistes de l’Assemblée nationale et du Sénat de juin 2006

Le 13 juin 2006, la proposition de loi n° 3142 visant au soutien du pouvoir d’achat des ménages face à la hausse des prix des produits pétroliers a été déposée sur le Bureau de l’Assemblée nationale par M. Didier Migaud et les membres du groupe socialiste.

Le 30 juin 2006, dans des termes quasiment identiques, la proposition de loi n° 445 (2005-2006) visant au soutien du pouvoir d’achat des ménages face à la hausse des prix des produits pétroliers, était déposée au Sénat par M. Roland Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux propositions de loi présentaient déjà un dispositif prévoyant la taxation des profits d’aubaine des compagnies pétrolières, couplée à l’assujettissement des carburéacteurs à la TIPP et à l’augmentation de la taxe additionnelle à la taxe sur les cartes grises pour les véhicules les plus polluants.

2.– L’article premier de la présente proposition de loi

Le présent article vise à rétablir un article 265 ter ZB du code général des impôts relatif aux bénéfices exceptionnels des sociétés effectuant la première transformation du pétrole brut ou assurant la distribution des carburants issus de cette première transformation.

Une interprétation stricte du champ de la présente proposition conduit à limiter l’imposition des bénéfices exceptionnels aux activités de raffinage et de distribution.

Le tableau suivant précise quelles sont les entreprises impliquées dans des activités de raffinage, parmi les douze raffineries de métropole et la raffinerie du Lamentin de Martinique.

PÉTROLE BRUT DISTILLÉ DANS LES RAFFINERIES EN MÉTROPOLE

2006

Brut raffiné (en millions de tonnes)

Facteur de service %

Total – Feyzin, Grandpuits, Donges, Gonfreville, La Mède, Mardyck, Le Lamentin

45,19

84,8

Shell France – Berre, Petit-Couronne, Reichstett

14,39

81,7

ESSO SAF - Port-Jérôme-Gravenchon, Fos-sur-Mer

15,47

91,7

INEOS - Lavéra

8,39

82,7

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières

S’agissant de la distribution de produits pétroliers, les acteurs concernés sont les compagnies pétrolières elles-mêmes, mais aussi les grandes surfaces dont la part de marché augmente régulièrement, notamment à la faveur de leur implantation croissante sur les autoroutes, ainsi que les distributeurs indépendants.

PARTS DE MARCHÉ DES CATÉGORIES DE DISTRIBUTEURS DE PRODUITS PÉTROLIERS

 

Supercarburants

Gazole

Fioul domestique

Pétroliers

42,5

52

64

Grandes et moyennes surfaces

52,3

35

7

Indépendants

4,6

11

26,9

Divers

0,6

2

2,1

Total

100

100

100

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières

Le présent article introduit, à compter du 1er janvier 2008, une surtaxe des résultats des sociétés de première transformation du pétrole et de distribution des carburants issus de cette première distribution, lorsque leur bénéfice imposable enregistre une augmentation supérieure de 20 % au bénéfice de l’année précédente.

Cette surtaxe est égale à 40 % de l’impôt sur les sociétés, dont le taux est lui-même égal à 33 1/3 %, et à 40 % de l’impôt sur les plus-values imposables, dont le taux est de 16,5 %.

Il s’agit d’une surtaxe incitant, en tout état de cause, les entreprises concernées à modérer la progression de leurs marges, sans obérer leurs capacités d’investissement.

II.– INSTITUER UN NOUVEAU CHÈQUE-TRANSPORT POUR LE POUVOIR D’ACHAT ET L’ENVIRONNEMENT (ARTICLE 3)

L’augmentation du prix du pétrole constitue un prélèvement sur le pouvoir d’achat des ménages, auquel une réponse est d’autant plus indispensable que les dépenses correspondantes sont souvent incompressibles à court ou moyen terme.

Parmi ces dépenses incompressibles, figurent au premier rang les dépenses de transport entre le domicile et le lieu de travail.

Les mesures envisageables pour les réduire doivent intégrer les contraintes de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

La réorientation et la généralisation des chèques transports apparaissent en conséquence comme doublement favorables, d’une part au maintien du pouvoir d’achat, et, d’autre part, au basculement vers les transports collectifs ou alternatifs, lorsqu’ils existent, d’une partie des usagers recourant à des moyens de transport individuels.

A.– LES LIMITES DU CHÈQUE-TRANSPORT INSTAURÉ EN JANVIER 2007

De nombreux dispositifs contribuent au financement des transports publics. La hausse durable des prix du pétrole a entraîné la mise en place début 2007 du chèque-transport, qui, dans sa version actuelle, se révèle un échec.

1.– Les aides au financement des transports publics

La participation des employeurs au financement des transports publics par le versement de transport atteint aujourd’hui 5 milliards d’euros par an.

Il s’agit là d’un financement essentiel au fonctionnement et à l’investissement des transports publics.

Pour accroître la demande de transports publics, la loi n° 82-684 du 4 août 1982 relative à la participation des employeurs au financement des transports publics urbains a permis la mise en place du dispositif de remboursement obligatoire au salarié de la moitié du coût de son abonnement à des transports collectifs dans la région parisienne.

Puis la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », a élargi, au-delà de l’Île-de-France, la possibilité donnée à un employeur de financer tout ou partie de l’abonnement à des transports publics.

Étape supplémentaire, le chèque-transport a été créé par la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social.

2.– Le chèque-transport dans sa version de la loi du 30 décembre 2006 sur la participation et l’actionnariat salarié

Il s’agit d’un dispositif créé sur le modèle des chèques-restaurant, des chèques-vacances et du chèque emploi service universel (CESU).

Ce dispositif présente des caractéristiques qui en limitent fortement la portée.

Tout employeur est autorisé par la loi à préfinancer le chèque-transport, ce qui inclut l’État employeur. Mais ce préfinancement a un caractère facultatif. Par ailleurs, seules les dépenses liées aux déplacements domicile-travail sont concernées. Enfin, les salariés se trouvant dans un périmètre de transports urbains bénéficient du chèque transport à condition d’utiliser les transports collectifs. En dehors d’un tel périmètre, le chèque-transport est attribué pour payer un abonnement à un transport collectif ou le carburant d’un véhicule individuel.

Sur le plan fiscal, le chèque-transport n’est pas inclus dans le revenu imposable du salarié. Sur le plan social, la part contributive de l’employeur dans le chèque-transport est exonérée des cotisations de sécurité sociale, dans la limite de 50 % du prix des abonnements de transport collectif et de 100 euros par an dans le cas de l’achat de carburants.

L’objectif du chèque-transport est d’encourager l’usage des transports collectifs partout où ils existent mais cette intention est fortement limitée par le caractère facultatif du chèque transport.

3.– L’échec du chèque-transport dans sa version de 2006

Le chèque-transport dans sa version actuelle facultative se révèle un échec. Quatre sociétés seulement ont reçu un agrément d’émission. Les entreprises de transport sont réticentes à reconnaître le chèque-transport comme moyen de paiement et ne souhaitent pas prendre en charge les frais de gestion correspondants. Les entreprises sont très peu nombreuses à l’avoir mis en pratique.

En réalité, sur un plan technique, un système du type des chèques-transport nécessite une échelle d’application élevée pour s’imposer face aux autres moyens de paiement. Son caractère facultatif actuel est un frein sérieux à son développement, tant au plan technique de sa gestion que de l’incitation à mettre en place des moyens de transport nouveaux pour un même bassin d’emploi.

B.– LE NOUVEAU CHÈQUE-TRANSPORT

La réduction des consommations de produits pétroliers s’accompagne d’un double dividende : la réduction des dépenses de consommation pour les ménages et de la facture énergétique extérieure pour la collectivité, et la réduction des émissions de dioxyde de carbone.

Pour répondre aux hausses des prix du pétrole intervenues en 2000, le gouvernement de M. Lionel Jospin avait mis en place des allègements importants de la fiscalité pétrolière (voir commentaire de l’article 5 ci-après). Pour préparer le long terme, l’accent avait également été mis sur le développement des énergies renouvelables, susceptibles de contribuer à accroître l’indépendance vis-à-vis des énergies fossiles.

Ainsi, la loi de finances pour 2001, parallèlement à des réductions de taxe intérieure sur la consommation de produits pétroliers, s’était attachée à favoriser le développement des énergies renouvelables, tant pour les entreprises que pour les particuliers. L’amortissement dégressif ouvert aux entreprises pour les équipements économisant l’énergie par les articles 39 AA et 39 AB du code général des impôts avait été élargi aux équipements de production d’énergie renouvelables. Par ailleurs, le crédit d’impôt sur le revenu dont bénéficiaient les ménages pour l’installation d’équipement d’économies d’énergie, selon l’article 200 quater du code général des impôts, avait été étendu aux équipements de production d’énergie utilisant une source d’énergie renouvelable intégrés à l’habitation principale, que celle soit en construction ou déjà réalisée.

Enfin, le volet de développement des énergies renouvelables avait été largement complété par la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité. En instaurant les tarifs de rachat de l’électricité produite à partir des énergies renouvelables, cette loi a donné le véritable coup d’envoi du développement de ces sources d’énergie dans notre pays.

C’est sur ces bases que la présente proposition de loi entend développer la demande de transports collectifs.

Le secteur des transports est aujourd’hui le premier émetteur de CO2 en France, avec 40,6 millions de tonnes de carbone en 2005, soit 38 % du total, ce qui justifie la priorité donnée par la présente proposition de loi.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières

Le moyen retenu est donc le chèque transports, revu dans son champ et ses modalités d’application.

1.– Une négociation nationale sur le chèque transport

Le I du présent article de la proposition de loi prévoit une négociation nationale et interprofessionnelle, engagée avant le 1er janvier 2008, entre les organisations syndicales représentatives de salariés et d’employeurs, pour la mise en place obligatoire d’un chèque-transport bénéficiant à l’ensemble des salariés.

Ainsi sera donnée une dimension nationale et concrète à la fois au maintien du pouvoir d’achat et à la lutte contre l’effet de serre.

Au cours de cette grande négociation, seront déterminées les modes de transports collectifs de voyageurs et les modes alternatifs à la voiture particulière, concernés par le chèque-transport, ainsi que les modalités de son versement.

Le troisième alinéa prévoit également que l’ensemble des agents des différentes fonctions publiques bénéficiera du chèque-transport, à la différence de la situation actuelle.

Il s’agira ainsi d’une négociation nationale de sensibilisation de l’ensemble des salariés et fonctionnaires, débouchant sur des mesures concrètes et non sur des orientations vagues et non financées, comme nombre de celles dégagées par le Grenelle de l’environnement.

2.– Le rôle du nouveau chèque-transport

Au terme de la négociation nationale sur le chèque-transport, les salariés et fonctionnaires français disposeront d’un moyen de réduire leurs frais de transport entre leur domicile et leur lieu de travail et de contribuer individuellement à la lutte contre l’effet de serre.

La négociation débouchera sur une amélioration décisive du système actuel par le caractère obligatoire du chèque-transport. Une inégalité importante existe en effet, actuellement, entre l’Île-de-France où les salariés bénéficient du remboursement obligatoire par l’employeur de la moitié du prix de leur carte orange, et les autres régions où le remboursement est facultatif.

L’inégalité de traitement entre les salariés et les fonctionnaires sera également supprimée, l’avantage du chèque-transport leur étant également attribué.

Enfin, le II du présent article 3 va au-delà des dispositions de la loi SRU qui a permis aux employeurs de financer tout ou partie de l’abonnement à des transports publics.

Il est en effet prévu de faire porter le bénéfice du chèque-transport sur les transports collectifs de voyageurs et sur les modes alternatifs à la voiture particulière.

On entend par transports collectifs et modes alternatifs à la voiture particulière, le ramassage par les entreprises ou les groupes d’entreprises, le ramassage scolaire, le covoiturage.

Le recours à ces modes de transport est encouragé, dans la mesure où le taux d’exonération serait porté de 50 % à 75 % du chèque-transport, l’encadrement de la mesure étant renvoyé par le III à un arrêté du ministre chargé de l’économie et des finances.

Le IV de l’article précise l’exonération des cotisations et contributions sociales pour ce cas d’application des chèques-transports, à l’exception de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).

Le V de l’article prévoit la compensation des pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale par une majoration des droits de consommation des tabacs.

Telles sont les mesures prévues en faveur du chèque-transport.

Sa généralisation permettra un réel soutien au pouvoir d’achat de l’ensemble des employés du secteur privé et du secteur public. La négociation préalable permettra une sensibilisation de la collectivité à la nécessaire modification des comportements.

La souplesse du dispositif quant aux moyens de transports envisageables permettra un foisonnement d’initiatives venues des salariés eux-mêmes, qui pourront prendre ainsi à leur compte les objectifs de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

III.– FAVORISER LA RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DE DIOXYDE DE CARBONE DES TRANSPORTS AÉRIENS (ARTICLE 4)

La contribution des transports aériens à l’effet de serre et au changement climatique est estimée à 2 – 3 % du total des émissions annuelles mondiales, si l’on prend en considération le seul dioxyde de carbone émis par les moteurs d’avion, et plus proche de 4 % du total, si l’on prend en compte les autres gaz à effet de serre comme la vapeur d’eau ou l’ozone.

Dans la perspective de la lutte contre le réchauffement climatique, la question de la réduction des émissions des aéronefs est donc posée.

Certes, leurs émissions de gaz à effet de serre – principalement le dioxyde de carbone et les oxydes d’azote – ont notablement diminué avec la réduction de la consommation de carburants par personne ou par tonne transportée. En réduisant fortement, dans les années récentes, la consommation des moteurs d’avions pour atténuer les effets de la hausse des prix du pétrole, les constructeurs ont œuvré simultanément en faveur de la réduction des émissions des transports aériens.

Néanmoins, de nouveaux progrès sont nécessaires dans la lutte contre l’effet de serre.

Deux grands types de solutions sont envisageables à l’avenir. Le premier consisterait à taxer les carburants utilisés par les compagnies aériennes, dans le cadre de la taxe intérieure sur la consommation de produits pétroliers (TIPP). Le deuxième consisterait à mettre en place un système d’échanges de quotas d’émission dans un cadre global.

Le présent article propose de soumettre les carburéacteurs à la TIPP, dont ils sont à l’heure actuelle exemptés.

A.– LA SUPPRESSION DE L’EXONÉRATION DE TIPP POUR LES CARBURÉACTEURS, UN SIGNAL DE DÉPART

Selon l’article 265 bis-1-b du code général des douanes, les carburéacteurs utilisés à bord des aéronefs sont exemptés de taxe intérieure de consommation de produits pétroliers. Cette exonération date de 1928. La dernière modification substantielle de la mesure date de 2001.

Selon les informations fournies à l’appui du projet de loi de finances pour 2008, cette exonération de TIPP a représenté en 2006 une dépense fiscale de 1 395 millions d’euros. Elle est évaluée pour 2007 à 1 430 millions d’euros.

L’exonération totale découle d’accords internationaux conclus dans le cadre de la Convention de Chicago du 7 décembre 1944 et de l’organisation internationale de l’aviation civile (OACI). L’article 24 de la convention de Chicago interdit en effet la taxation du carburéacteur contenu dans les cuves des avions d’un État contractant à son arrivée dans un autre État contractant, ce carburant étant dit de transit.

Par extension, le carburéacteur n’est pas non plus taxé sur les vols intérieurs. Mais cette disposition ne paraît pas interdite par la convention de Chicago (2).

Le présent article 4 use donc, pour les vols intérieurs, de cette faculté de suppression de l’exonération de TIPP des carburéacteurs.

Si des négociations supplémentaires s’avéraient nécessaires dans le cadre du renouvellement éventuel de la Convention de Chicago, la mesure pourrait être appliquée d’abord aux vols intérieurs et aux vols intracommunautaires.

B.– LE SYSTÈME INTERNATIONAL D’ÉCHANGES DE QUOTAS D’ÉMISSION

L’Organisation internationale de l’aviation civile a émis des recommandations en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’aviation civile.

La question à l’ordre du jour est celle de la mise en place d’un système de droits ou de quotas d’émission pour les transports aériens.

L’Union européenne, de son côté, pourrait inclure, dès 2012, le secteur de l’aviation civile au système européen d’échanges de quotas d’émissions.

Mais une telle option est encore rejetée par les pays émergents, les États-Unis, le Canada et l’Australie.

Le rétablissement de la TIPP permettra à la France d’acquérir une position exemplaire dans le secteur aéronautique et dans les négociations ultérieures sur la mise en place d’un éventuel système de quotas d’émissions des transports aériens.

IV.– RENFORCER LA TAXE SUR LES VOITURES PARTICULIÈRES
LES PLUS POLLUANTES (ARTICLE 5)

Les voitures particulières ont, en 2005, assuré 82,9 % des transports intérieurs de voyageurs contre 10,5 % pour les transports ferroviaires, 5,1 % pour les autobus et les cars et 1,5 % pour les transports aériens.

De 1998 à 2006, les ménages ont alloué 12,3 % de leur budget à l’acquisition d’un véhicule et à son utilisation.

Fidèle à la logique consistant à soutenir le pouvoir d’achat tout en faisant avancer la collectivité vers une meilleure prise en compte des contraintes environnementales, l’article 5 prévoit de décourager l’achat de véhicules à fortes émissions de CO2 par le renforcement de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules.

A.– LA SUPPRESSION DE LA VIGNETTE AUTOMOBILE POUR LES PARTICULIERS

La loi de finances pour 2001 a supprimé la taxe différentielle sur les véhicules à moteur dite vignette automobile, pour les particuliers.

La suppression de cette taxe devait conduire, selon l’évaluation initiale réalisée à l’automne 2000, à un allègement de 12 milliards de francs en année pleine.

L’opportunité de la suppression de la vignette automobile pour les particuliers a été abondamment commentée, parfois critiquée depuis lors.

Il n’est pas inutile toutefois de rappeler les critiques dont, à l’époque, faisait l’objet la vignette automobile. Son mode de perception était particulièrement désuet et coûteux. La variation du montant de la vignette d’un département à un autre en avait fortement altéré la lisibilité pour les usagers.

En fait, l’objectif majeur de la suppression était l’allègement des charges supportées par les automobilistes, en particulier pour les personnes obligées de posséder un véhicule pour se rendre sur leur lieu de travail, qui sont touchées au premier chef par la hausse des prix des carburants.

À ce titre, la suppression de la vignette trouvait sa place dans une politique d’ensemble.

B.– LE RENFORCEMENT DE LA TAXE SUR LES VOITURES PARTICULIÈRES LES PLUS POLLUANTES

Une taxe sur les voitures particulières les plus polluantes a été instituée par la loi de finances pour 2006 et s’est appliquée à compter du 1er juillet 2006 aux véhicules dont la première mise en circulation est intervenue à compter du 1er juin 2004.

Il s’agit d’une taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules, dont le produit est affecté à l’agence de l’Environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME).

Pour les voitures particulières qui ont fait l’objet d’une réception communautaire, au sens de la directive 70/156/CEE du Conseil, du 6 février 1970, cette taxe est assise sur le nombre de grammes de dioxyde de carbone émis par kilomètre. Rappelons que la réception communautaire est la procédure qui conduit les constructeurs à établir un certificat de conformité à la législation de chacun des États membres.

Pour les autres voitures particulières, la taxe est assise sur la puissance administrative du véhicule.

Le présent article 5 vise à renforcer la taxation des véhicules les plus polluants, selon les tableaux ci-après.

TARIFS ACTUEL ET PROPOSÉ DE LA TAXE POUR LES VOITURES PARTICULIÈRES BÉNÉFICIANT D’UNE RÉCEPTION COMMUNAUTAIRE

Taux d’émission de dioxyde de carbone (en grammes par kilomètre)

Tarif applicable par gramme de dioxyde de carbone (en euros)

Article 1635 bis O

Actuel

Article 1635 bis O –

Proposition

N’excédant pas 200

0

0

Fraction supérieure à 200 et inférieure ou égale à 250

2

2

Fraction supérieure à 250

4

6

S’agissant des voitures particulières faisant l’objet d’une réception communautaire, le tarif de la tranche supérieure est augmenté de 50 % par la proposition de loi.

Pour les autres véhicules, une augmentation de 50 % de la taxe est proposée pour les voitures particulières d’une puissance fiscale supérieure ou égale à 15 CV.

TARIFS ACTUEL ET PROPOSÉ DE LA TAXE POUR LES AUTRES VÉHICULES

Puissance fiscale

(en chevaux-vapeur)

Tarif (en euros)

Actuel

Tarif (en euros)

Proposition

Inférieure à 10

0

0

Supérieure ou égale à 10 et inférieure à 15

100

100

Supérieure ou égale à 15

300

450

Les augmentations sont en tout état de cause modérées mais constituent un signal de nature à peser sur la décision d’achat de véhicules de forte cylindrée.

L’augmentation, probablement limitée et temporaire des ressources correspondantes, bénéficiera à l’ADEME.

En 2007, le budget de fonctionnement de l’ADEME devrait s’élever à 85,39 millions d’euros, et son budget d’intervention à 249,0 millions d’euros en crédits de paiement.

Son contrat de plan avec l’État pour la période 2007-2010 lui assigne comme objectifs le renforcement de ses capacités d’expertise et un meilleur ciblage de ses aides et actions.

Dans le domaine de l’animation et du financement de la recherche et de l’innovation, l’Agence concentrera ses efforts sur dix programmes principaux. L’ADEME consolidera la constitution et l’animation de systèmes d’observation, c’est-à-dire de dispositifs d’information fiables permettant aux décideurs locaux et à l’État de choisir en connaissance de cause, et de bénéficier d’un suivi.

Dans le domaine de l’information et de la sensibilisation du public, l’ADEME mettra en œuvre de nouvelles campagnes de grande ampleur pour faire évoluer les mentalités et les comportements. Les professionnels, les administrations ainsi que les collectivités territoriales devront eux aussi être mieux formés. Dans le domaine de l’expertise au service des pouvoirs publics, l’ADEME assistera les pouvoirs publics dans la conception des politiques publiques et assurera un rôle de conseil pour orienter les choix des acteurs socio-économiques.

Dans le domaine de l’aide directe à la concrétisation de projet, l’ADEME assurera à l’occasion du nouveau contrat d’objectifs un pilotage renforcé de son dispositif d’aides à la décision.

V.– ÉVITER UN EFFET D’AUBAINE POUR L’ÉTAT AU DÉTRIMENT DES CONSOMMATEURS ET LISSER LES HAUSSES DE PRIX DES CARBURANTS (ARTICLE 2)

La hausse du prix du pétrole constitue un prélèvement sur la richesse nationale d’une ampleur considérable. La facture énergétique extérieure s’est, en effet, élevée à 46,25 milliards d’euros en 2006, équivalant à 2,6 % du PIB et 43 jours d’exportations, le pétrole représentant 80 % du total

La présente proposition de loi propose en conséquence qu’à l’inévitable, c’est-à-dire l’achat de produits pétroliers sur des marchés internationaux dont l’évolution ne peut être maîtrisée, ne vienne pas s’ajouter une charge fiscale indue résultant d’une fiscalité mal contrôlée.

C’est pourquoi l’article 2 propose le reversement des excédents de TVA sur les produits pétroliers résultant uniquement de l’effet prix.

Pour juger de l’opportunité de cette mesure, il n’est pas inutile de comparer la situation présente avec celle qui prévalait en 2000 et 2001 lorsque le gouvernement de M. Lionel Jospin avait instauré le mécanisme de stabilisation des recettes fiscales de l’État en cas de variations significatives des cours de pétrole, désigné par le raccourci de « TIPP flottante ».

On verra en conséquence que le coût de la TIPP dite flottante de 2000 et de 2001 n’a pas été aussi élevé qu’on a bien voulu le dire, et que le système proposé s’impose encore plus que précédemment compte tenu des niveaux atteints par le prix du pétrole.

A.– LA HAUSSE DES PRIX DU PÉTROLE ET DU GAZ NATUREL

En janvier 2004, le prix du brent était de 31,30 dollars le baril (3), en moyenne mensuelle. En novembre 2007, son prix atteignait 94 dollars, soit une multiplication par trois.

Si la croissance de la demande est un facteur explicatif essentiel, la hausse des prix du pétrole résulte aussi de la quasi-disparition des capacités excédentaires de production tandis que celle des produits pétroliers est également due à l’inadaptation de l’offre à la demande.

1.– La structure des prix des carburants à la production

Les prix des produits pétroliers correspondent à l’empilement de plusieurs coûts ou marges : les coûts de production, les prix de vente du brut, les marges de raffinage, les marges de transport et de distribution (4).

Le coût de production du pétrole varie dans des proportions très grandes selon le gisement : 1 dollar le baril pour les meilleurs gisements, contre 10 à 15 dollars par baril en offshore profond ou en Sibérie orientale.

Trois bruts sont cotés sur les marchés internationaux : le Brent (mer du Nord) coté à Londres, le Dubaï (Moyen Orient) coté à Dubaï, et le WTI (West Texas Intermediate) coté au Nymex de la bourse de New York.

Le prix de vente du brut est formé de deux façons distinctes. Le prix sur le marché spot dépend de la qualité du brut, du volume, de la date et du lieu d’enlèvement. Les contrats de gré à gré portent sur la qualité du brut, la durée de l’engagement, les volumes et l’indexation des prix.

Pour les producteurs, le paramètre important est la marge amont, c’est-à-dire la différence entre le prix de vente du brut et les coûts de production augmentés des impôts à la production. Dans certains pays, la marge amont est fixe et définie avec le pays hôte (5).

À côté des marchés physiques du pétrole, existent les marchés financiers, qui sont des marchés de « pétrole papier » permettant de couvrir les risques. Sur ces marchés, les principaux types de contrat sont les contrats à terme et les produits dérivés et les opérateurs sont les compagnies pétrolières et les grands consommateurs. Le montant des transactions sur ces marchés de couverture est quatre fois supérieur à celui des transactions physiques.

Au prix du pétrole s’ajoutent les marges de raffinage pour calculer le prix de marché des produits pétroliers. La marge de raffinage est de 20 à 30 euros par tonne.

Avant 2000 les marges de raffinage avaient été trop faibles pour garantir un niveau suffisant d’investissement. Les marges ont augmenté depuis le début de la décennie (1999 : 11,30 euros par tonne ; 2004 : 29 euros par tonne), afin de permettre la prise en compte des contraintes réglementaires européennes et des modifications de la demande (hausse de la demande de gazole, qui entraîne des importations de gazole et des exportations de carburant sans plomb). Les capacités de production de gazole sont, en tout état de cause, insuffisantes en France, ce qui conduira les raffineurs à modifier leurs installations.

Les prix de vente des produits pétroliers comprennent aussi les marges de transport et de distribution. Ces marges correspondent aux frais d’acheminement vers les stations service et aux coûts de commercialisation et sont de 0,05 à 0,06 euro par litre. Il faut noter par ailleurs que les grandes surfaces ont, en 2003, réalisé 54 % des ventes de carburants en France. En tout état de cause, les marges de transport et de distribution sont en France inférieures à la moyenne communautaire.

2.– Un vrai choc pétrolier étalé dans le temps

L’évolution du prix du pétrole depuis 2000 correspond à un trend croissant où les phases de baisse se heurtent à un prix plancher lui-même en hausse constante.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières

À ce titre, l’augmentation qui se produit depuis 2000 diffère fortement des deux chocs pétroliers de 1974 et de 1980.

Les prix du pétrole ont, en effet, été multipliés par quatre entre octobre 1973 et janvier 1974. Suite à la guerre du Kippour, le prix du pétrole était passé de 3 dollars par baril en octobre 1973 à 11,65 dollars par baril au 1er janvier 1974. Le phénomène fondamental survenu alors était que le pouvoir de fixation du prix du pétrole échappait désormais au cartel de compagnies pétrolières et revenait désormais au cartel de l’Opep (fondée en 1960). De surcroît, l’emprise de l’Opep fut accentuée par la reprise du contrôle de leurs ressources nationales par plusieurs pays producteurs.

Le deuxième choc pétrolier entre 1978 et 1982 correspond au doublement du prix du pétrole en plusieurs étapes. Ce doublement du prix du pétrole à 35 dollars par baril a accentué le ralentissement de l’économie mondiale. En monnaie 2006, le prix atteint, fin 1979-début 1980, était de l’ordre de 90 dollars par baril, un niveau retrouvé en octobre 2007.

Après le deuxième choc pétrolier, les prix du pétrole ont rapidement baissé à environ 20 dollars par baril, malgré les efforts de l’Opep. Il s’est agi d’un véritable contre-choc en 1998 qui a conduit à des prix très bas, autour de 12 dollars par baril. Ce niveau fut catastrophique pour les pays producteurs, dont les budgets dépendent, pour certains, aux deux tiers des revenus du pétrole.

On mesure mieux la distance parcourue par étapes en novembre 2007, alors que le niveau des prix semble installé au-dessus du niveau de 90 dollars par baril, dans la mesure où tous les constituants du prix sont orientés à la hausse.

B.– LA FISCALITÉ SUR LES PRODUITS PÉTROLIERS PÉNALISE LES CONSOMMATEURS FRANÇAIS

1.–  La fiscalité sur les produits pétroliers

La fiscalité des produits pétroliers se compose, d’une part, de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP), et, d’autre part, de la taxe sur la valeur ajoutée.

La TIPP est perçue sur les volumes et non sur le prix de vente du produit, et s’exprime en euros par litre ou hectolitre de chaque unité mise à la consommation.

La TVA sur les produits pétroliers s’applique sur le prix de base augmenté de la TIPP, conformément aux règles européennes.

Le tableau ci-après présente l’évolution des recettes de TIPP depuis 2002. Les recettes de cette taxe sont partagées entre l’État, les régions qui l’utilisent pour les aides aux entreprises et les départements pour financer le revenu minimum d’insertion (RMI).

Il est important de souligner que les recettes de TIPP ont connu un pic en 2004 à 25,2 milliards d’euros, avant de baisser à respectivement 24,7 milliards d’euros en 2005 et se stabiliser à 24,9 milliards d’euros en 2006.

RECETTES FISCALES LIÉES AUX TRANSPORTS : TAXE INTÉRIEURE SUR LES PRODUITS PÉTROLIERS ET TAXE SPÉCIALE DOM

(en millions d’euros)

   

2002

2003

2004

2005

2006

TIPP

État

23 842

23 621

19 807

18 456

18 403

Régions (aides aux entreprises)

     

454

988

Départements (Revenu minimum d’insertion RMI)

 

391

4 959

5 295

5 029

Taxe spéciale (DOM)

DOM (Fonds d’investissement pour les routes et les transports FIRT)

489

486

477

495

458

Total

 

24 331

24 498

25 243

24 700

24 878

Source : Comptes des transports en 2006 – 44ème rapport de la Commission des comptes des transports de la Nation

C’est la stabilisation des consommations en volume de carburants pétroliers qui explique essentiellement le recul depuis 2004 des recettes.

2.– Comparaisons des prix des carburants dans l’Union européenne

Les comparaisons européennes des prix hors toutes taxes et toutes taxes comprises, c’est-à-dire en incluant la TIPP et la TVA, apportent un éclairage intéressant sur le rôle particulièrement important assigné, dans notre pays, à la fiscalité pétrolière.

a) Les prix du super sans plomb 95

Les prix hors taxes et toutes taxes comprises du super sans plomb 95 au 2 novembre 2007, dans l’ensemble des États membres de l’Union européenne, sont présentés dans le tableau suivant.

PRIX EUROPÉENS DU SUPER SANS PLOMB 95 AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

État membre

Prix hors toutes taxes

Prix toutes taxes comprises

Coefficient multiplicateur

Allemagne

50,39

137,85

2,74

Autriche

52,75

121,40

2,30

Belgique

52,98

139,45

2,63

Chypre

56,13

98,96

1,76

Danemark

56,26

137,91

2,45

Espagne

52,67

108,37

2,06

Estonie

47,76

90,29

1,89

Finlande

49,26

131,82

2,68

France

49,74

131,53

2,64

Grèce

53,95

104,70

1,94

Hongrie

51,24

112,04

2,19

Irlande

49,37

113,30

2,29

Italie

54,57

133,17

2,44

Lettonie

48,29

92,07

1,91

Lituanie

50,50

93,59

1,85

Luxembourg

55,09

116,50

2,11

Malte

60,42

107,85

1,79

Pays-Bas

61,75

152,60

2,47

Pologne

51,78

118,29

2,28

Portugal

51,59

132,96

2,58

République tchèque

50,12

111,88

2,23

Royaume-Uni

49,15

142,73

2,90

Slovaquie

49,76

114,63

2,30

Slovénie

47,43

100,00

2,11

Suède

50,25

131,13

2,61

U.E. 15

51,86

133,18

2,57

U.E. 25

51,77

131,04

2,53

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

Si l’on prend comme critère de classement la modicité du prix toutes taxes comprises du super sans plomb, la France apparaît à la 17ème place du classement européen.

Au 2 novembre 2007, le prix du super sans plomb 95 s’élevait à 1,31 euro par litre contre 0,9029 pour l’Estonie, classée 1ère et 1,52 euro par litre pour les Pays-Bas, classés 25ème.

La moyenne s’établissait à 1,33 euro par litre pour l’Union européenne à 15 et à 1,13 euro par litre pour l’Union européenne à 25.

CLASSEMENT DES ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION DU PRIX
TOUTES TAXES COMPRISES DU SUPER SP 95 AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Prix toutes taxes comprises du super SP 95

1.

Estonie

90,29

2.

Lettonie

92,07

3.

Lituanie

93,59

4.

Chypre

98,96

5.

Slovénie

100

6.

Grèce

104,7

7.

Malte

107,85

8.

Espagne

108,37

9.

République tchèque

111,88

10.

Hongrie

112,04

11.

Irlande

113,3

12.

Slovaquie

114,63

13.

Luxembourg

116,5

14.

Pologne

118,29

15.

Autriche

121,4

16.

Suède

131,13

17.

France

131,53

18.

Finlande

131,82

19.

Portugal

132,96

20.

Italie

133,17

21.

Allemagne

137,85

22.

Danemark

137,91

23.

Belgique

139,45

24.

Royaume-Uni

142,73

25.

Pays-Bas

152,6

 

U.E. 15

133,18

 

U.E. 25

131,04

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

Si l’on prend comme critère de classement la modicité de prix hors toutes taxes du Super SP 95, la France apparaît au septième rang des pays fournissant le super SP 95 le moins coûteux.

Cette situation provient à la fois des bonnes performances de l’outil de raffinage et d’une politique de marge raisonnable des producteurs et des distributeurs.

CLASSEMENT DES GRANDS ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION
DU PRIX HORS TAXES DU SUPER SP 95 AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Prix hors taxes

1.

Slovénie

47,43

2.

Estonie

47,76

3.

Lettonie

48,29

4.

Royaume-Uni

49,15

5.

Finlande

49,26

6.

Irlande

49,37

7.

France

49,74

8.

Slovaquie

49,76

9.

République tchèque

50,12

10.

Suède

50,25

11.

Allemagne

50,39

12.

Lituanie

50,5

13.

Hongrie

51,24

14.

Portugal

51,59

15.

Pologne

51,78

16.

Espagne

52,67

17.

Autriche

52,75

18.

Belgique

52,98

19.

Grèce

53,95

20.

Italie

54,57

21.

Luxembourg

55,09

22.

Chypre

56,13

23.

Danemark

56,26

24.

Malte

60,42

25.

Pays-Bas

61,75

 

U.E. 15

51,86

 

U.E. 25

51,77

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

Un autre classement est intéressant : celui de la pression fiscale sur le super SP 95.

Le coefficient multiplicateur qui permet de passer du prix hors taxes au prix toutes taxes comprises est un indicateur de la pression fiscale pesant sur les produits pétroliers dans l’Union européenne.

CLASSEMENT DES GRANDS ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION
DE LA PRESSION FISCALE SUR LE SUPER SP 95 AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Coefficient multiplicateur

1.

Chypre

1,76

2.

Malte

1,79

3.

Lituanie

1,85

4.

Estonie

1,89

5.

Lettonie

1,91

6.

Grèce

1,94

7.

Espagne

2,06

8.

Slovénie

2,11

9.

Luxembourg

2,11

10.

Hongrie

2,19

11.

République tchèque

2,23

12.

Pologne

2,28

13.

Irlande

2,29

14.

Autriche

2,30

15.

Slovaquie

2,30

16.

Italie

2,44

17.

Danemark

2,45

18.

Pays-Bas

2,47

19.

Portugal

2,58

20.

Suède

2,61

21.

Belgique

2,63

22.

France

2,64

23.

Finlande

2,68

24.

Allemagne

2,74

25.

Royaume-Uni

2,90

 

U.E. 15

2,57

 

U.E. 25

2,53

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

La pression fiscale sur le super SP 95 est supérieure en France à la moyenne européenne. La France, avec un coefficient de 2,64, n’est devancée que par le Royaume-Uni (2,90), l’Allemagne (2,74) et la Finlande (2,68).

Dans tous les autres États membres, la pression fiscale sur le super SP 95 est plus légère.

b) Les prix du gazole

Au 2 novembre 2007, les prix au litre toutes taxes comprises du gazole variaient en Europe entre 0,93 euro en Lituanie et 1,46 euro au Royaume-Uni.

La moyenne du prix du gazole s’établissait à 1,18 euro par litre pour l’Union européenne à 15 et à 1,17 euro par litre pour l’Union européenne à 25.

PRIX EUROPÉENS DU GAZOLE AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Pays

Prix hors toutes taxes

Prix toutes taxes comprises

Coefficient multiplicateur

Allemagne

56,81

123,58

2,18

Autriche

56,55

114,1

2,02

Belgique

57,95

110,47

1,91

Chypre

60,58

97,81

1,61

Danemark

61,25

122,35

2,00

Espagne

57,68

103,03

1,79

Estonie

55,19

94,08

1,70

Finlande

55,55

106,78

1,92

France

54,92

116,61

2,12

Grèce

60,12

104,3

1,73

Hongrie

56,68

109,77

1,94

Irlande

54,35

110,3

2,03

Italie

60,15

122,94

2,04

Lettonie

55,11

94,92

1,72

Lituanie

54,68

93,54

1,71

Luxembourg

58,54

100,7

1,72

Malte

60,93

100,86

1,66

Pays-Bas

65,99

123,8

1,88

Pologne

56,71

109,07

1,92

Portugal

57,11

113,19

1,98

République tchèque

56,42

111,03

1,97

Royaume-Uni

52,56

146,74

2,79

Slovaquie

54,94

117,21

2,13

Slovénie

52,63

99,4

1,89

Suède

58,67

123,57

2,11

U.E. 15

57,17

118,88

2,08

U.E. 25

57,09

117,9

2,07

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

Le tableau suivant indique le classement des États membres de l’Union européenne en fonction de la modicité du prix du gazole toutes taxes comprises.

CLASSEMENT DES ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION
DU PRIX TOUTES TAXES COMPRISES DU GAZOLE AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Prix TTC

1.

Lituanie

93,54

2.

Estonie

94,08

3.

Lettonie

94,92

4.

Chypre

97,81

5.

Slovénie

99,4

6.

Luxembourg

100,7

7.

Malte

100,86

8.

Espagne

103,03

9.

Grèce

104,3

10.

Finlande

106,78

11.

Pologne

109,07

12.

Hongrie

109,77

13.

Irlande

110,3

14.

Belgique

110,47

15.

République tchèque

111,03

16.

Portugal

113,19

17.

Autriche

114,1

18.

France

116,61

19.

Slovaquie

117,21

20.

Danemark

122,35

21.

Italie

122,94

22.

Suède

123,57

23.

Allemagne

123,58

24.

Pays-Bas

123,8

25.

Royaume-Uni

146,74

 

U.E. 15

118,88

 

U.E. 25

117,9

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

Au 2 novembre 2007, La France se situait au 18ème rang, avec un prix toutes taxes comprises du gazole de 1,16 euro par litre.

Par ailleurs, les capacités de raffinage installées dans l’hexagone sont insuffisantes pour couvrir la demande de gazole, ce qui entraîne des importations.

Toutefois, le prix du gazole hors taxes en France est l’un des plus bas de l’Union européenne, comme le montre le tableau ci-après.

CLASSEMENT DES ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION
DU PRIX DU GAZOLE HORS TAXES AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Prix hors taxes

1.

Royaume-Uni

52,56

2.

Slovénie

52,63

3.

Irlande

54,35

4.

Lituanie

54,68

5.

France

54,92

6.

Slovaquie

54,94

7.

Lettonie

55,11

8.

Estonie

55,19

9.

Finlande

55,55

10.

République tchèque

56,42

11.

Autriche

56,55

12.

Hongrie

56,68

13.

Pologne

56,71

14.

Allemagne

56,81

15.

Portugal

57,11

16.

Espagne

57,68

17.

Belgique

57,95

18.

Luxembourg

58,54

19.

Suède

58,67

20.

Grèce

60,12

21.

Italie

60,15

22.

Chypre

60,58

23.

Malte

60,93

24.

Danemark

61,25

25.

Pays-Bas

65,99

 

U.E. 15

57,17

 

U.E. 25

57,09

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

Le tableau suivant présente le classement des États membres de l’Union européenne en fonction de la modicité du coefficient multiplicateur qui permet de passer du prix hors toutes taxes au prix toutes taxes comprises.

Au 2 novembre 2007, la France était classée au 22ème rang du classement des États membres de l’Union européenne, selon le critère de la modicité de la pression fiscale sur le gazole.

CLASSEMENT DES ÉTATS MEMBRES DE L’UE EN FONCTION DE LA MODICITÉ
DE LA PRESSION FISCALE SUR LE GAZOLE AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

Rang

État membre

Coefficient multiplicateur

1.

Chypre

1,61

2.

Malte

1,66

3.

Estonie

1,70

4.

Lituanie

1,71

5.

Luxembourg

1,72

6.

Lettonie

1,72

7.

Grèce

1,73

8.

Espagne

1,79

9.

Pays-Bas

1,88

10.

Slovénie

1,89

11.

Belgique

1,91

12.

Finlande

1,92

13.

Pologne

1,92

14.

Hongrie

1,94

15.

République tchèque

1,97

16.

Portugal

1,98

17.

Danemark

2,00

18.

Autriche

2,02

19.

Irlande

2,03

20.

Italie

2,04

21.

Suède

2,11

22.

France

2,12

23.

Slovaquie

2,13

24.

Allemagne

2,18

25.

Royaume-Uni

2,79

 

U.E. 15

2,08

 

U.E. 25

2,07

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

c) Les prix du fioul domestique

Au 2 novembre 2007, les prix toutes taxes comprises du fioul domestique s’étageaient dans l’Union européenne de 61,5 euros l’hectolitre à Malte à 119,62 euros l’hectolitre en Italie.

La France se situait au 16ème rang, avec un prix toutes taxes de 73,10 euros par hectolitre, en dessous de la moyenne européenne de 74,7 pour l’Union européenne à 15 et 74,73 pour l’Union européenne à 25.

PRIX EUROPÉENS DU FIOUL DOMESTIQUE AU 2 NOVEMBRE 2007

(en centimes d’euros par litre)

 

Prix hors toutes taxes

Prix toutes taxes comprises

Coefficient multiplicateur

Allemagne

52,32

69,57

1,33

Autriche

51,71

75,05

1,45

Belgique

53,07

66,45

1,25

Chypre

58,57

81,73

1,40

Danemark

62,36

113,17

1,81

Espagne

52,3

70,7

1,35

Estonie

51,92

66,47

1,28

Finlande

50,42

70,16

1,39

France

55,46

73,1

1,32

Grèce

54,1

67,9

1,26

Hongrie

56,68

109,77

1,94

Irlande

63,98

78,53

1,23

Italie

59,36

119,62

2,02

Lettonie

55,11

67,55

1,23

Lituanie

54,73

67,08

1,23

Luxembourg

54,09

61,7

1,14

Malte

60,1

61,5

1,02

Pays-Bas

59,05

94,7

1,60

Pologne

52,68

72,08

1,37

Portugal

56,73

78,9

1,39

République tchèque

52,86

72,36

1,37

Royaume-Uni

46,69

66,78

1,43

Slovaquie

52,54

65,13

1,24

Slovénie

49,32

65,6

1,33

Suède

54,58

114,3

2,09

U.E. 15

54,05

74,7

1,38

U.E. 25

53,99

74,73

1,38

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières, Direction des ressources énergétiques et minérales

On peut remarquer que certains pays dissuadent fortement par une taxation élevée, l’utilisation du fioul domestique. C’est notamment le cas du Danemark, où le prix du fioul domestique début novembre 2007 s’élevait à 113,17 euros par hectolitre, avec un coefficient multiplicateur de 1,81 entre le prix hors taxes et le prix toutes taxes comprises. C’est le cas également de la Suède et de l’Italie, qui, toutes deux, pratiquent des prix supérieurs à 114 euros par hectolitre suite à l’application de coefficients multiplicateurs supérieurs à 2.

C.– LA STABILISATION DE LA FISCALITÉ PÉTROLIÈRE EN 2000 ET 2001

La loi de finances pour 2001 a mis en place un ensemble de mesures pour alléger le poids de la facture pétrolière pour les ménages et les entreprises.

Parmi ces mesures, figure au premier plan, par son caractère novateur, la stabilisation du poids de la TIPP par reversement des recettes de TVA additionnelles générées par la hausse des prix des hydrocarbures.

Mais cette mesure a été complétée par des mesures plus classiques, dont le principe a d’ailleurs été repris par la suite.

Une réduction de 30,4 % de la TIPP sur le fioul domestique a été édictée, ainsi que des remboursements de TIPP aux transporteurs routiers de marchandises ou de voyageurs. Par ailleurs, les taux de TIPP ont été gelés pour 2001, alors que des augmentations étaient prévues.

1.– Le contexte des prix du pétrole et du cours du dollar

Les trois années 2000, 2001 et 2002 se sont caractérisées par des évolutions contrastées des prix du pétrole.

En septembre 2000, le prix du baril de Brent s’est établi à 33,14 dollars le baril, contre 25,44 dollars en janvier, soit une hausse de 30,3 % en 8 mois.

Une période de baisse quasi continue s’est opérée de septembre 2000 à décembre 2001 où le cours du baril s’est replié à 18,71 dollars, soit une baisse de 56,5 %. Puis le cours du pétrole s’est de nouveau orienté à la hausse, pour atteindre 28,33 dollars en décembre 2002, soit une hausse de 51,4 %.

Sur le plan monétaire, la période se caractérise par deux années de tendance haussière du dollar par rapport au franc. La hausse du dollar s’est établie, avec entretemps trois phases de baisse, à 13,7 % entre janvier 2000 et décembre 2001.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Après le passage à l’euro, l’évolution monétaire s’est traduite par un renversement de tendance. Après l’affaiblissement du franc au cours des années 2000 et 2001, c’est en effet le dollar qui s’est affaibli par rapport à l’euro, celui-ci passant de 0,88329 dollar en janvier 2002 à 1,01826 dollar en décembre 2002, soit une réévaluation de 15 % en un an.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

C’est dans ce contexte à la fois de fluctuations des prix du pétrole, de tendance baissière du franc et de hausse de l’euro à partir de janvier 2002 que des mécanismes de compensation de la hausse des prix du pétrole ont été mis en place de septembre 2000 à juillet 2002.

2.– Le mécanisme de stabilisation de la fiscalité pétrolière

La majorité socialiste et le gouvernement de M. Lionel Jospin a mis en place un ensemble de dispositions pour atténuer les effets de la hausse des prix des hydrocarbures, la stabilisation des recettes de la fiscalité pétrolière n’en étant qu’un élément.

a) Le mécanisme de stabilisation et la baisse exceptionnelle de la TIPP

La loi de finances pour 2001 a instauré un dispositif de stabilisation des recettes de la fiscalité pétrolière, M. Laurent Fabius étant Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, et M. Didier Migaud, Rapporteur général de la commission des Finances de l’Assemblée nationale.

L’objectif de ce dispositif était de restituer aux consommateurs le surplus de recettes de TVA consécutif à toute hausse du prix des carburants.

Le niveau de la TIPP étant fixé sur les quantités et non sur les prix, une variation des prix des carburants ne modifie pas le produit de la taxe. En revanche, la TVA, qui s’applique au prix hors taxes des carburants auquel s’ajoute la TIPP, voit sa recette augmenter mécaniquement avec le prix de ces carburants.

La loi de finances pour 2001 a donc mis en place un dispositif particulier permettant de restituer aux consommateurs le surplus de recettes de TVA consécutif à toute hausse du prix des carburants. À cet effet, la TIPP est diminuée à hauteur du surcroît de recettes de TVA résultant d’une augmentation du prix du pétrole, lorsqu’il est constaté une hausse de plus de 10 % du cours du brent daté.

Le mécanisme se déclenchait bimestriellement. La baisse de TIPP intervenait, par exemple, au cours du premier bimestre de l’année n, si la hausse était intervenue au dernier bimestre de l’année n-1.

DISPOSITIONS D’APPLICATIONS DE LA STABILISATION DE LA FISCALITÉ PÉTROLIÈRE ARTICLE 12 DE LA LOI DE FINANCES POUR 2001

Date de modification

Période d’application

Période de référence

Taux de variation déclencheur

Cours de référence

1er octobre 2000

1er octobre au 30 novembre 2000

1er au 15 septembre

10 %

Cours moyen de janvier 2000

1er décembre 2000

1er décembre 2000 au 20 janvier 2001

1er octobre au 9 novembre 2000

10 %

Cours moyen de septembre

21 janvier 2001

21 janvier au 20 mars 2001

10 novembre au 31 décembre 2000

10 %

Cours moyen de la période du 1er octobre au 9 novembre 2000

21 du premier mois du bimestre suivant

Bimestre suivant

Bimestre suivant

10 %

Cours moyen du bimestre suivant

Source : Loi de finances initiale pour 2001 – article 265 du code général des douanes – tableau B

En théorie, le mécanisme était susceptible de jouer dans les deux sens. Toutefois, en cas de baisse des prix du pétrole, la TIPP ne pouvait être réduite au-delà d’un taux voté en loi de finances.

Compte tenu de la forte hausse intervenue en début d’année 2000, le mécanisme de stabilisation a été appliqué dès le 1er octobre 2000, l’ajustement étant effectué en fonction de l’évolution des prix du pétrole brut entre janvier et septembre 2000.

En outre, une baisse supplémentaire de la TIPP a été effectuée, complétant celle opérée par le mécanisme de stabilisation, de manière que la fiscalité baisse au total de 20 centimes de francs par litre de Super sans plomb 98 ou de gazole.

LES CONSÉQUENCES DES DISPOSITIONS FISCALES DE LA LOI DE FINANCES POUR 2001

(en francs par litre)

 

Super sans plomb 98

Gazole

 

Septembre 2000

Octobre 2000

Écart

Septembre 2000

Octobre 2000

Écart

Prix hors taxe

2,52

2,52

0

2,55

2,55

0

TVA + IFP

1,27

1,24

-0,03

1,02

0,99

-0,03

TIPP

3,85

3,68

-0,17

2,55

2,38

-0,17

Total

7,64

7,44

-0,20

6,12

5,92

-0,20

Source : Dossier de presse – présentation du projet de loi de finances pour 2001

b) Les autres mesures sur la TIPP

La lutte contre les conséquences de la hausse du prix du pétrole mise en place à l’automne 2000 a compris plusieurs volets.

Outre la stabilisation de la fiscalité pétrolière par le mécanisme du reversement du surplus de TVA, plusieurs autres mesures ont été prises pour protéger le pouvoir d’achat des consommateurs et la compétitivité des entreprises.

• La baisse de la TIPP sur le fioul domestique

Une baisse de 30,4 % de la TIPP sur le fioul domestique a été décidée à compter du 21 septembre 2000, à la fois pour les particuliers et pour les entreprises. Le taux de TIPP est passé en conséquence de 51,73 francs par hectolitre à 36 francs par hectolitre.

Pour une consommation domestique de 3 500 litres de fioul par an, l’économie d’impôt de TIPP et de TVA a représenté 660 francs, soit 100 euros environ

Le montant de la réduction ainsi opérée a été évalué ex ante à 3,5 milliards de francs.

• Le gel des augmentations de TIPP prévues initialement

Le plan de rattrapage de la TIPP sur le gazole par rapport au super sans plomb a par ailleurs été gelé pour 2001. Le gouvernement avait en effet présenté en 1998 un plan de réduction sur sept ans de l’écart de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb, afin de rapprocher la France de l’écart moyen constaté au niveau communautaire. En 1999 et 2000, le plan s’était traduit par une augmentation de 7 centimes par litre du taux de la TIPP applicable au gazole.

Le taux de la TIPP sur le Super sans plomb a également été gelé pour 2001. Le taux avait augmenté de 24 % entre 1993 et 1995 et de 7,56 % entre 1995 et 1998. La TIPP n’a donc évolué ni en 1999, ni en 2000 et ni en 2001.

• Les remboursements de TIPP

Un mécanisme de remboursement de la TIPP comprenant plusieurs volets a également été mis en place.

Les transporteurs routiers pouvaient obtenir un remboursement de la TIPP égal à la différence entre la TIPP sur le gazole exigible, soit 255,18 francs par hectolitre au cours de l’année civile 2000, et la TIPP calculée sur la base d’un taux spécifique de 244,64 francs par hectolitre pour la période du 11 janvier 1999 au 10 janvier 2000.

Par dérogation à ces dispositions, le remboursement a été porté à 35 francs par hectolitre pour le gazole utilisé entre le 11 janvier 2000 et le 20 janvier 2001.

Par ailleurs, le taux spécifique a été, d’une part, baissé à 230,18 francs par hectolitre pour la période du 21 janvier 2001 au 20 janvier 2002 et, d’autre part, relevé à 241,18 francs par hectolitre pour la période du 21 janvier 2002 au 20 janvier 2003.

Enfin, un remboursement partiel de TIPP a été accordé aux entreprises de transport public routier de voyageurs. Le taux de remboursement partiel de la TIPP était identique à celui des transporteurs routiers de marchandises, dans la limite de 15 000 litres par semestre et par véhicule.

3.– Le coût des mesures de stabilisation de la TIPP

Il est difficile de reconstituer le coût des différentes mesures visant à alléger le poids de la hausse des prix du pétrole, et prises par les lois de finances pour 2000, 2001 et 2002. La connaissance des dépenses fiscales est en effet encore très approximative, tant en ce qui concerne le nombre de bénéficiaires qu’en ce qui concerne les moins values de recettes.

Seul, l’impact global des différentes mesures relatives aux allègements de TIPP peut être retracé, sans qu’il soit toutefois possible d’identifier les parts respectives du mécanisme de stabilisation de la TIPP et des réductions de taux pratiquées.

ÉVOLUTION DES RECETTES DE TIPP DE 2000 À 2002

(en millions de francs ou d’euros)

 

Année 2000

(millions de francs)

Année 2001

(millions d’euros)

Année 2002

(millions d’euros)

Recettes prévues

loi de finances initiale (LFI)

167 140

165 989

24 090,00

Recettes prévues

loi de finances rectificative (LFR)

161 969

152 000

24 200,00

Recettes constatées

loi de règlement définitif (LR)

159 204,78

153 552,60

23 962,39

Écart LR - LFI en millions de francs

-7 935,22

-12 436,40

-837,07

Écart LR - LFR en millions de francs

-2 764,22

1 552,60

-1 558,62

Écart LR - LFI en millions d’euros

-1 209,72

-1 895,92

-127,61

Écart LR - LFR en million d’euros

-421,40

236,69

-237,61

Source : lois de finances initiales et lois de règlement

En tout état de cause, la moins value de recettes de TIPP enregistrée en 2000 s’est élevée à 2,764 milliards de francs, soit 421,4 millions d’euros de plus que la prévision de la loi de finances rectificative. La moins-value est de 1,2 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2000.

La diminution du prix du pétrole enregistrée en 2001 ne saurait être tenue pour responsable de la moins-value de 1,9 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2001 et de la plus-value de 236,7 millions d’euros par rapport à la loi de finances rectificative pour 2001.

4.– La suspension et la suppression de la TIPP flottante

En juillet 2002, le gouvernement décidait d’abandonner l’application de la TIPP flottante.

Une requête était déposée le 22 novembre 2002 auprès du Conseil d’État par M. Didier Migaud, en vue de suspendre en urgence la décision d’abandon du dispositif. Le Conseil d’État décidait le 18 décembre de rejeter cette requête.

Par la suite, la loi de finances rectificative pour 2002 supprimait, dans son article 20 bis, le dispositif introduit en 2000.

D.– LES RAPPORTS DE LA COMMISSION INDÉPENDANTE DE TRANSPARENCE SUR LA FISCALITÉ PÉTROLIÈRE

Le 15 octobre 2005, le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et le ministre du budget ont installé une commission indépendante chargée d’évaluer l’impact de la hausse des prix du pétrole sur les finances de l’État en 2005.

Présidée par M. Bruno Durieux, ancien ministre, inspecteur général des finances, cette commission a rassemblé :

– M. Gilles Carrez, député, Rapporteur général de votre commission des Finances ;

– M. Yves Cochet, ancien ministre, député ;

– M. Charles de Courson, député ;

– M. Alain Lambert, ancien ministre, sénateur ;

– M. Philippe Marini, sénateur, Rapporteur général de la commission des Finances du Sénat ;

– M. Hervé Mariton, député ;

– et M. Gérard Miquel, sénateur.

Cette commission a rendu son premier rapport le 13 octobre 2005. Conformément aux souhaits des ministres, la commission a affiné régulièrement ses estimations pour 2005, d’abord en novembre puis en janvier 2006.

1.– La perte de recettes fiscales en 2005

La hausse des prix du pétrole a atteint 27,8 % de janvier à décembre 2005, avec un pic à 43,6 % en août 2005 (voir graphique suivant).

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Simultanément, le cours de l’euro exprimé en dollar a enregistré une baisse sensible, passant de 1,312 à 1,186 dollar de janvier à décembre 2005.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Les prix des carburants automobiles ont augmenté significativement, le prix du super sans plomb 95 ayant subi, entre janvier et décembre, une hausse de 14,6 % et le prix du gazole de 13,2 %. Mais cette hausse a été inférieure à celle du prix du baril, malgré la hausse du dollar.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Anticipant une baisse de la demande de produits pétroliers liée à l’augmentation des prix des carburants, la commission indépendante de transparence sur la fiscalité pétrolière a prévu, dès son premier rapport datant du 13 octobre 2005, une baisse des recettes de l’État de 210 millions d’euros, par rapport à l’évaluation de recettes prévue dans la loi de finances initiale pour 2005.

Le tableau suivant récapitule les évaluations de recettes initiales, les recettes réelles et les écarts enregistrés de recettes, à la fois, pour la taxe intérieure sur les produits pétroliers et pour la taxe sur la valeur ajoutée.

ÉCART DE RECETTES DE LA FISCALITÉ PÉTROLIÈRE EN 2005 PAR RAPPORT AUX PRÉVISIONS DE LA LOI DE FINANCES POUR 2005

(en millions d’euros)

   

Évaluation de la loi de finances initiale

Recettes constatées

Écart

TIPP

2004*

20 883*

20 025*

-858*

2005

25 600

24 763

-837

2006

25 357

24 592

-765

TVA

2004

     

2005

 

6 561

+625

2006

6 425

6 561

+136

Total

2004

     

2005

   

-212

2006

   

-629

Source : Commission indépendante de transparence sur la fiscalité pétrolière ; * lois de finances initiale pour 2004 et loi de règlement.

Selon le rapport de la commission indépendante, la baisse des recettes de TIPP en 2005 provient d’une baisse de 4,2 % de la consommation de super sans plomb et de 3,7 % de celle de gazole.

Le rapport conclut à « l’effet négatif de la hausse des prix du pétrole sur les finances de l’État en matière de recettes ».

2.– La perte de recettes fiscales en 2006

Au cours de l’année 2006, le graphique ci-après montre que le prix du pétrole, de 62,99 dollars par baril en janvier, a connu une augmentation qui l’a porté à 73,23 dollars en août, suivie d’une décrue qui lui a permis de revenir à un niveau légèrement inférieur à son niveau de départ, soit 62,47 dollars.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Simultanément, l’euro s’est renforcé de façon quasiment continue par rapport au dollar, passant de 1,21 dollar en janvier 2006 à 1,32 dollar en décembre 2006.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

L’évolution des prix des carburants au cours de l’année 2006 a connu deux phases. Au cours de la première, de janvier à juillet, les prix du super SP 95 sont passés de 1,22 euro par litre en janvier à 1,33 euro par litre en juillet, soit une augmentation de 9 %. Les prix du gazole sont passés, quant à eux, de 1,06 euro par litre en janvier à 1,12 euro par litre en juillet soit une augmentation de 5,6 %. La phase de décrue ultérieure a permis au prix du super SP 95 de revenir à 1,17 euro par litre et au prix du gazole de revenir à 1,03 euro par litre en décembre.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Le rapport de la commission indépendante de transparence sur la fiscalité pétrolière conclut (voir tableau précédent) pour 2006 à une moins value de recettes fiscales de 629 millions d’euros par rapport aux évaluations de la loi de finances pour 2006.

Selon ses interprétations, la hausse des prix du pétrole au cours du premier semestre 2006 a déclenché une baisse de la consommation de produits pétroliers, qui ne s’est pas interrompue avec la décrue des prix à partir du mois de juillet. Sur l’année, la baisse des recettes de TIPP par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale s’est établie à 765 millions d’euros.

Les recettes constatées pour la TVA au premier semestre sont supérieures aux prévisions, en raison de l’augmentation des prix. Au second semestre, on enregistre une moins value en raison de la baisse des prix. Au total, une plus value est néanmoins dégagée, à hauteur de 136 millions d’euros.

3.– La méthodologie des rapports de la commission indépendante de transparence sur la fiscalité pétrolière

On a vu précédemment que la commission indépendante de transparence sur la fiscalité pétrolière a pour mission de déterminer le coût pour les finances publiques des variations des prix des produits pétroliers.

La base de comparaison est constituée des évaluations de recettes établies par la loi de finances initiale, lesquelles résultent d’un ensemble complexe de paramètres exogènes et endogènes.

Parmi les paramètres exogènes figurent notamment le prix moyen du pétrole au cours de l’année suivante et le cours du dollar. Le tableau ci-après récapitule les valeurs choisies pour 2006, 2007 et 2008 et montre la difficulté de l’exercice.

HYPOTHÈSES RELATIVES AUX COURS DU PÉTROLE ET DU DOLLAR
DES DERNIÈRES LOIS DE FINANCES ET RÉALISATIONS

   

Hypothèse de la loi de finances initiale

Réalisation

Cours du pétrole

1 baril = x US dollars

2005

36,5

54,41

2006

60

65,14

2007 (10 mois)

70

68,59

2008

73

-

Cours du dollar

1 euro = y dollar

2005

1,22

1,24478

2006

1,23

1,25567

2007 (10 mois)

1,28

1,35223

2008

1,37

-

Source : Rapports économiques, sociaux et financiers – loi de finances initiale ; Direction générale de l’énergie et des matières premières

Parmi les paramètres endogènes, figurent par exemple l’élasticité prix de la consommation de carburants automobiles, l’évolution du parc automobile et ses conséquences sur la consommation unitaire de carburant, l’évolution de la répartition modale des transports de voyageurs ou de marchandises.

Les prévisions de recettes de TIPP sont issues des travaux de la direction générale des Douanes et des droits indirects (DGDDI), de la direction du Budget et de la direction de la Prévision. Les différences de prévision résultent essentiellement des différences d’hypothèses de consommation de gazole.

Seules les recettes globales de TVA font l’objet d’une prévision en loi de finances initiale. Les recettes de TVA peuvent néanmoins être obtenues à partir des hypothèses de consommation de la loi de finances initiale et de l’hypothèse d’évolution des prix. Une prévision de recettes nettes de TVA est obtenue en appliquant le taux de 19,6 %, après déduction des remboursements de TVA dus aux professionnels.

E.– LE MÉCANISME DE STABILISATION PROPOSÉ

Se produisant dans un contexte de ralentissement de la croissance du PIB, la hausse actuelle du prix du pétrole est d’autant plus dommageable qu’elle risque de l’amplifier, d’où un risque supplémentaire d’altération des revenus des ménages.

1.– La situation de 2007

L’année 2007 est marquée à la fois par une flambée des cours du pétrole et par un profond affaiblissement du dollar par rapport à l’euro.

La flambée des cours du pétrole est reflétée par la hausse de 53,5 % du cours du Brent exprimé en dollars, de janvier à octobre 2007.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

Simultanément, le cours de l’euro exprimé en dollar a enregistré une hausse de 9,2 % de janvier à octobre 2007.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

La hausse du prix du supercarburant entre janvier et octobre 2007 atteint 10,3 % et celle du gazole 11,9 %.

Source : Direction générale de l’énergie et des matières premières (DGEMP)

2.– Un mécanisme de stabilisation déclenché dès décembre 2007

Selon l’article 2 de la présente proposition de loi, l’élément déclencheur du mécanisme de stabilisation est la variation du cours moyen du brent daté (6) en octobre 2007, comparé au cours moyen de janvier 2005. Si la hausse est supérieure à 10 %, alors la compensation a lieu d’être.

En janvier 2005, le cours moyen du brent daté a été de 44,51 dollars par baril, selon la direction générale de l’Énergie et des matières premières. En octobre 2007, le cours moyen a atteint 82,34 dollars par baril, soit une augmentation de 84,99 % par rapport à janvier 2005. Le mécanisme doit donc être déclenché dès le 1er décembre 2007 et porter sur la période allant du 1er septembre au 31 octobre 2007.

Le mécanisme devra être appliqué pour les périodes ultérieures dès lors que la variation du cours du brent daté au cours des bimestres suivants sera supérieure de 10 % à la moyenne du prix qui a entraîné la modification précédente.

CHAMP D’APPLICATION DE LA COMPENSATION PROPOSÉE À L’ARTICLE 2

 

Indice de référence

Taux de TIPP (euros par hectolitre)

super sans plomb 95

11

60,69

Super sans plomb 98

11 bis

63,96

Gazole

22

42,84

Fioul domestique

20

5,66

Les produits pétroliers auxquels la compensation s’applique sont les carburants super sans plomb 95, super sans plomb 98, le gazole et le fioul domestique.

Les tarifs de la TIPP, indiqués au tableau ci-dessus (article 265 du code des douanes) sont corrigés à la baisse lorsque les recettes correspondantes de TVA ont augmenté à raison de la hausse des prix des carburants.

Le calcul détaillé est le suivant : on calcule la variation de la moyenne des prix hors toutes taxes d’un des produits considérés. On lui applique le taux de 0,16388 qui représente la part de la TVA dans le prix de vente. Le résultat de ce produit est retranché de la TIPP du produit considéré en cas de hausse des prix ou ajouté en cas de baisse des prix.

Ainsi est opérée une stabilisation tant à la hausse qu’à la baisse du prix des produits pétroliers consommés par les ménages.

Exemple d’application de la compensation au super sans plomb 95

• prix de vente toutes taxes comprises du super SP 95 :

- septembre 2007 : 1,28 euro par litre

- octobre 2007 : 1,27 euro par litre

- moyenne du prix sur septembre et octobre : 1,275 euro par litre

- janvier 2005 : 1,03 euro par litre

• variation des prix entre janvier et septembre/octobre = 1,2805 – 1,03 = 0,245 euro par litre ou 24,5 centimes d’euro par litre

• résultat après application du coefficient de 0,16388 : 4 centimes d’euro par litre

• TIPP après correction : 0,6069 – 0,04 = 0,5569 euro par litre, soit une baisse de 7 %

• prix de vente maximal du super sans plomb 95 en décembre après correction : 1,23 euro par litre.

Exemple d’application de la compensation au gazole

• prix de vente toutes taxes comprises du gazole :

- septembre 2007 : 1,1145 euro par litre

- octobre 2007 : 1,1274 euro par litre

- moyenne du prix sur septembre et octobre : 1,1209 euro par litre

- janvier 2005 : 1,0097 euro par litre

• variation des prix entre janvier et septembre/octobre = 1,1209-1,0097 = 0,1112 euro par litre ou centimes d’euro par litre

• résultat après application du coefficient de 0,16388 : 2 centimes d’euro par litre

• TIPP après correction : 0,4284 – 0,02 = 0,4084 euro par litre, soit une baisse de 5 %

• Prix de vente maximal du gazole en décembre après correction : 1,1074  euro par litre.

VI.– COMPENSATION DE PERTES ÉVENTUELLES DE RECETTES POUR L’ÉTAT (ARTICLE 6)

L’article 6 de la proposition de loi prévoit une compensation des pertes de recettes qui pourraient provenir de l’application de celle-ci.

Une augmentation des recettes de l’État résultera de l’article premier (contribution supplémentaire des sociétés effectuant la première transformation du pétrole ou distribuant les carburants issus de cette transformation), de l’article 4 (suppression de l’exonération de TIPP des carburéacteurs) et de l’article 5 (augmentation de la taxe sur les véhicules les plus émetteurs de dioxyde de carbone).

La mise en place, prévue à l’article 2 de la compensation de l’augmentation de la TIPP par le reversement du surcroît de TVA liée à la hausse des prix pourrait conduire à une perte de recettes de l’État. La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’exonération, prévue à l’article 3, de cotisation de sécurité sociale du chèque-transport est compensée par une majoration des droits de consommation du tabac (articles 575 et 575 A du code général des impôts).

L’article 6 prévoit la compensation des pertes de recettes éventuelles pour l’État par la création d’une taxe additionnelle à ces droits de consommation.

CONCLUSION

La présente proposition de loi représente la première initiative marquante de soutien au pouvoir d’achat des ménages, dans le contexte actuel alarmant de hausse des prix des carburants et de ralentissement de la croissance économique.

Cette proposition de loi prévoit des mesures efficaces pour le pouvoir d’achat et réalistes par rapport à la structure actuelle des transports dans notre pays, tout en les inscrivant dans la perspective de la réduction de nos émissions de CO2 et de la lutte contre l’effet de serre.

C’est pourquoi votre Rapporteur est favorable à son adoption.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 27 novembre 2007 à 16 heures 15, votre commission des Finances a procédé, sur le rapport de M. Jean Launay, Rapporteur, à l’examen de la proposition de loi visant à soutenir le pouvoir d’achat des ménages face à la hausse des prix des produits pétroliers et à développer les modes de transport alternatifs (n° 403).

Après l’exposé de M. Jean Launay, rapporteur, M. Gilles Carrez, Rapporteur général, a remarqué que la présentation par celui-ci de l’évolution du pouvoir d’achat ces dernières années s’appuyait sur le rapport piloté par M. Jacques Delors et publié en 2006, La France en transition. Selon ce rapport, le revenu disponible, assez variable d’une année sur l’autre, est corrélé avec l’évolution de la situation de l’emploi sans qu’un lien puisse être établi avec l’orientation politique de tel ou tel Gouvernement.

La question du pouvoir d’achat a été au cœur des élections du printemps 2007. Dès juillet, la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat – TEPA – a été votée afin de répondre à cette préoccupation.

Ce texte comporte un dispositif puissant : la détaxation des heures supplémentaires. À titre d’exemple, un salarié rémunéré au SMIC dans une entreprise de moins de vingt salariés, qui travaille donc 39 heures et non 35, percevra fin 2008 environ 75 % d’un treizième mois grâce aux exonérations de cotisations sociales et de CSG, ainsi qu’à la majoration des heures supplémentaires.

Il est un peu regrettable que le projet de loi TEPA ait été examiné à droit du travail constant. L’un des effets des 35 heures a été de supprimer les heures supplémentaires en raison de l’annualisation du temps de travail. Le budget de l’État a dû compenser le surcoût induit par la réduction de la durée du temps de travail de 39 heures à 35 heures et maintenant il doit financer les mécanismes permettant de travailler plus. Si la loi plafonne à 200 le nombre annuel d’heures supplémentaires, certains accords de branches appliquent un plafond largement inférieur, très rapidement atteint. Une prochaine proposition de loi devra faire l’inventaire des mécanismes bloquants de ce type auxquels il devra être remédié selon les cas par la loi ou par la négociation avec les partenaires sociaux.

Un autre dispositif contenu dans la loi TEPA permet de renforcer le pouvoir d’achat : le revenu de solidarité active, qui sera appliqué dans 30 départements, bien au-delà des 10 évoqués en juillet dernier.

Enfin, le projet de loi de finances pour 2008 prévoit que la moitié des économies réalisées par le non remplacement d’un fonctionnaire sur trois partant à la retraite servira de provision pour le financement de primes dans la fonction publique.

D’autres mesures peuvent être envisagées comme l’augmentation de certaines allocations - ainsi les allocations logement seront revalorisées de 3 % au début de l’année 2008 – mais elles trouvent leurs limites dans la nécessité de tenir compte du déficit budgétaire prévisionnel, fixé à 42 milliards d’euros pour 2008.

Mais le meilleur moyen d’améliorer le pouvoir d’achat reste la baisse du chômage, qui est aujourd’hui revenu à son niveau de 1982.

La proposition de loi défendue par M. Jean Launay est centrée sur la question des coûts énergétiques. Certains des dispositifs proposés ne sont pas nouveaux.

L’article 1er propose de majorer la taxation des bénéfices des sociétés pétrolières dès lors que leur augmentation par rapport à l’année précédente atteint ou dépasse 20  %. L’expérience passée prouve que ce type de disposition n’est pas efficace. Ainsi, il est fort probable que les résultats d’une société comme Total seront inférieurs en 2007 à ce qu’ils ont été en 2006, en raison des moindres marges réalisées sur le raffinage et de l’évolution du dollar à la baisse.

L’article 2 propose de restaurer la TIPP flottante. Lorsqu’elle a été créée, cette mesure a coûté plus de 2 milliards d’euros, pour une diminution des prix à la pompe d’un centime d’euro. En outre, restaurer la TIPP flottante ne serait pas un bon signal au lendemain du Grenelle de l’environnement : le problème de la rareté du pétrole ne doit pas être masqué par des mécanismes fiscaux artificiels et coûteux, mais être traité par une politique de renouvellement des sources d’énergie. La commission Durieux, mise en place en 2005, a bien évalué la situation. Lorsque le prix des carburants augmente, le produit de la TIPP diminue en raison de l’effet-prix car on constate une baisse des quantités consommées. Si la TVA augmente, car elle est liée au prix du baril, les hausses de TVA sont très inférieures aux baisses subies de TIPP.

Concernant l’article 3 qui a trait aux chèques transports, il faut rappeler qu’il existe déjà un dispositif qui s’est révélé décevant. Le système qui existe en Île-de-France fonctionne bien et il pourrait être intéressant d’introduire ce sujet dans les négociations avec les partenaires sociaux tout en veillant à ne pas faire peser de trop lourdes charges sur les entreprises qui acquittent déjà le versement transport.

L’article 4 propose de taxer les carburants utilisés par les avions. Cette proposition se heurte aux accords internationaux, en particulier à la convention de Chicago de 1944.

À propos de l’article 5, il faut rappeler que c’est la majorité qui a créé en 2005, pour la première fois, une taxe environnementale sur les véhicules de société. L’extension de ce type de mesure nécessite une évaluation préalable. 

M. Jérôme Cahuzac a souligné l’intérêt du cadrage général opéré par M. Jean Launay. Les plus hautes autorités devraient prochainement s’exprimer au sujet du pouvoir d’achat. Cela signifie donc que la loi TEPA n’a pas été suffisante. La situation actuelle est particulière : alors même que le chômage diminue, le pouvoir d’achat ne s’améliore pas. La règle habituelle évoquée par le Rapporteur général, selon laquelle le recul du chômage stimule le pouvoir d’achat, est donc contredite par les faits actuels. Le problème du pouvoir d’achat est en partie lié à la facture énergétique ; mais dès lors qu’il est plus large, une série d’amendements a été déposée au nom du groupe SRC. Notre pays connaît depuis peu le développement du phénomène des travailleurs pauvres. Il importe de lutter contre ce phénomène, décourageant pour tous ceux de nos concitoyens qui ne constatent pas que le travail paie et dangereux d’un point de vue institutionnel. En effet, le Président de la République et la majorité ont été élus pour restaurer le pouvoir d’achat. Au-delà d’un slogan qui serait bafoué, ce serait une vision globale de l’utilité du travail qui serait contestée et l’ensemble des partis républicains qui se verrait mis en cause. C’est pourquoi le groupe SRC propose, par des amendements qu’il souhaite voir examinés, une première série de mesures permettant de lutter contre le temps partiel et la précarité, notamment en conditionnant les allègements de charges patronales aux augmentations de salaire.

Le deuxième type d’amendements, tend à augmenter la prime pour l’emploi. Ce mécanisme est probablement plus puissant que la détaxation des heures supplémentaires, dispositif si complexe et décourageant pour les employeurs que la ministre de l’Économie a nommé un « Monsieur heures supplémentaires ».

Le troisième type d’amendements concerne le logement. Il s’agit de bloquer momentanément les prix des loyers afin de permettre aux ménages les plus modestes de stabiliser leur pouvoir d’achat.

Le dernier type d’amendements concerne l’action de groupe. La loi votée à ce sujet l’année dernière a été vidée de son sens dès l’origine puisque tous les thèmes ne peuvent pas être abordés au cours de ce type d’instance, par ailleurs complexe. Une évaluation de ce système devrait faire apparaître qu’il n’a connu aucun succès.

Il importe que les amendements proposés soient discutés, comme les articles auxquels ils se rapportent car ils poursuivent un but certainement commun à tous : lutter contre la désespérance de ceux qui ne peuvent vivre du fruit de leur travail.

M. Jérôme Chartier a souligné que le pouvoir d’achat est devenu la première préoccupation des Français, comme le montrent plusieurs sondages d’opinion récents. Le débat sur le pouvoir d’achat s’est progressivement substitué à celui sur le coût de la vie. Ce changement de vocabulaire représente une première victoire : l’expression « pouvoir d’achat » est volontariste et proactive, tandis que la référence au « coût de la vie » révèle une attitude passive et fataliste. La proposition de loi comprend un article destiné à compenser la perte de recettes pour l’État résultant de ses dispositions par une augmentation des droits sur les tabacs. Au-delà des obligations juridiques relatives à la recevabilité financière, cette disposition répond à un devoir de compensation incontournable, dès lors que l’on se situe dans une logique de désendettement de l’État.

M. Jérôme Chartier a indiqué qu’un groupe de travail, dirigé par son collègue Frédéric Lefebvre et par lui-même, a été mis en place au sein de l’UMP pour formuler des propositions visant à renforcer le pouvoir d’achat, à partir notamment des travaux déjà menés sur ce sujet par M. Gilles Carrez, Rapporteur général, et par le Président Pierre Méhaignerie. Il n’y aura pas de « grand soir » du pouvoir d’achat, mais il existe de nombreux « gisements » de pouvoir d’achat à exploiter. Cette démarche sera plus efficace que les mesures proposées par la présente proposition de loi, telles que le retour à un mécanisme de TIPP flottante ou un chèque transport qui resterait, en réalité, facultatif car subordonné à la négociation. La suppression de l’exonération de TIPP dont bénéficient les carburéacteurs serait en outre dangereuse, car elle inciterait les compagnies aériennes à faire du lieu de l’approvisionnement en carburant un élément de compétitivité, au préjudice de la sécurité aérienne. Les mesures proposées ne constituent pas une réponse satisfaisante aux préoccupations réelles des Français sur leur pouvoir d’achat. Le président de la République formulera prochainement des propositions plus ambitieuses et mieux adaptées. La mise en place d’un dispositif de bonus-malus serait, par exemple, une meilleure réponse.

M. Charles de Courson a indiqué que la surtaxation des compagnies pétrolières ne vise en réalité que Total. Cette société étant assujettie au régime du bénéfice mondial consolidé, la mesure proposée serait en réalité inefficace.

La TIPP flottante n’est plus un dispositif adapté à la situation actuelle. L’élasticité prix est devenue tellement élevée que mêmes les recettes issues de la TVA n’augmentent plus avec la hausse du prix des produits pétroliers : les recettes provenant de la TIPP ont ainsi baissé d’environ 600 à 700 millions d’euros et celles provenant de la TVA sur les carburants d’environ 200 à 250 millions d’euros. La consommation de fioul domestique, par exemple, a baissé de 20 % depuis le début de l’année. La disposition proposée au sujet du chèque transport ne serait pas plus efficace que le dispositif actuel, puisque sa mise en œuvre resterait subordonnée à la négociation.

La France peut uniquement supprimer, en application de la convention de Chicago, la TIPP sur les vols intérieurs. L’impact financier de cette suppression sur le budget de l’État serait faible, et elle conduirait à favoriser des plates-formes étrangères au détriment des plates-formes françaises. Dans ce domaine, la solution consiste plutôt à mettre sous quota les émissions de CO2 de l’aviation civile, dans un cadre européen. Il faudrait également que la recherche sur les moteurs et la carburation progresse.

La mise en place d’un système de bonus-malus pour les véhicules en fonction de leur consommation de carburants serait également plus efficace que les mesures proposées.

M. Charles de Courson a indiqué que c’est pour ces raisons que le Nouveau Centre votera contre la proposition de loi.

En réponse aux divers intervenants, M. Jean Launay, rapporteur, a jugé inquiétant que M. Jérôme Chartier estime que parler du pouvoir d’achat constitue une « victoire du vocabulaire » : le débat sur le pouvoir d’achat s’est engagé parce qu’il constitue l’une des premières préoccupations, au quotidien, des Français. La réalité que vivent nos concitoyens est marquée par la reprise de l’inflation, la hausse de l’endettement et une grande incompréhension s’agissant du mode de fixation des prix, dans le domaine alimentaire notamment.

La proposition de loi conduirait à rendre le chèque transport obligatoire et à sortir d’une logique consistant à adopter des mesures d’affichage.

Il ne s’agit pas de procéder à un rétablissement de la TIPP flottante et le groupe SRC est naturellement très soucieux de limiter l’émission de gaz à effet de serre. L’objectif des mesures proposées est de lisser la hausse du prix des produits pétroliers pour les consommateurs. La TIPP flottante a d’ailleurs produit des effets positifs en son temps.

Soulignant que ce texte s’inscrit dans la problématique plus large du pouvoir d’achat, sur laquelle le parti socialiste a des propositions. M. Jean Launay, Rapporteur a souhaité que la commission procède à l’examen des articles et des amendements.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général, demandant qu’il soit statué sur la poursuite des travaux de la commission, a proposé qu’il ne soit pas présenté de conclusions.

Le rapporteur général a souligné la qualité de la présentation générale du rapporteur Jean Launay, même si des divergences peuvent apparaître sur le fond.

M. Jérôme Cahuzac a alors rappelé le proverbe latin de circonstance : Timeo danaos et dona ferentes – Je crains les Grecs, surtout porteurs de présents.

La commission a alors décidé de ne pas passer à la discussion des articles et, en conséquence, de ne pas présenter de conclusion.

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© Assemblée nationale

1 () Auditions par la commission des Finances de M. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, M. Michel Prada, président de l’Autorité des marchés financiers, M. Jean-Pierre Mustier, directeur général adjoint du groupe Société Générale, M. Richard Hunter, directeur général de l’agence de notation Fitch Ratings, M. Michel Aglietta, économiste, conseiller scientifique du CEPII, M. Henri Bourguinat, économiste, fondateur du laboratoire d’analyse et de recherche économique, sur la crise financière.

2 () Vingt-troisième rapport au Président de la République, Conseil des impôts, Fiscalité et environnement, 2005.

3 () 1 baril = 42 gallons américains = 159 litres.

4 () Voir en particulier les grandes batailles de l’énergie, Jean-Marie Chevalier, 2004.

5 () Environ 2 dollars par baril.

6 () Brent daté : brent livré pour chargement à échéance de 7 à 15 jours.