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N
° 486

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2007.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI, adoptée par le Sénat, relative aux tarifs réglementés d’électricité et de gaz naturel (n° 238),

PAR M. JEAN-CLAUDE LENOIR,

Député.

——

Voir les numéros :

Sénat : 1ère lecture : 369, 427, 466 (2006-2007) et T.A. 1 (2007-2008).

Assemblée nationale : 1ère lecture : 238.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

LES LACUNES DU DROIT ACTUEL 7

A.— LA FIXATION DES TARIFS RÉGLEMENTÉS 7

1. La détermination des tarifs d’électricité 7

2. La détermination des tarifs de gaz naturel 9

B.— LES BÉNÉFICIAIRES DES TARIFS : UNE SITUATION TROP ALÉATOIRE 10

1. La volonté exprimée par le législateur lors des débats sur le projet de loi relatif au secteur de l’énergie en 2006 10

2. Les raisons de la censure par le Conseil constitutionnel (30 novembre 2006) 11

C.— UN VÉRITABLE IMBROGLIO JURIDIQUE 12

1. Un système incohérent et injuste 12

2. La nécessité de tenir compte des procédures initiées par la Commission européenne contre la France 13

EXAMEN EN COMMISSION 15

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 15

II.— EXAMEN DES ARTICLES 21

Avant l’article 1er 21

Article 1er : Possibilité pour les ménages et les petites entreprises de retourner au tarif réglementé d’électricité à l’occasion d’un déménagement 21

Article 2 : Possibilité pour les ménages de retourner au tarif réglementé de gaz naturel à l’occasion d’un déménagement 23

Après l’article 2 23

Article 3 : Bénéfice des tarifs réglementés de gaz naturel pour les consommateurs domestiques occupant un nouveau site 24

Après l’article 3 24

TABLEAU COMPARATIF 27

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 31

MESDAMES, MESSIEURS,

Le pouvoir d’achat est la première préoccupation des Français. C’est en conséquence la priorité de la majorité.

En 2006, les ménages auront dépensé 3,7 milliards d’euros pour l’eau, 8,4 milliards d’euros pour le gaz, 17,9 milliards d’euros pour l’électricité, et 35 milliards d’euros pour les carburants routiers. Rappelons qu’en 2005, l’électricité représentait 3,8 % des dépenses totales de consommation des ménages (éclairage et chauffage compris), et 1,6 % de leur revenu disponible.

Dans ce contexte, l’évolution des prix de l’énergie est inquiétante.

Le prix du pétrole brut a plus que doublé en trois ans ; il a même été multiplié en dollars par plus de cinq depuis 1998. En moyenne annuelle, le prix de gros du gaz sur le marché spot a progressé de 76 % de 2004 à 2006. De 2003 à 2006, le prix du gaz a augmenté de 48 % pour les professionnels, et de 21,5 % pour les ménages. L’interconnexion entre les pays européens aboutit à aligner les prix instantanés de l’électricité sur le coût de production de la centrale la moins performante, qui assure alors l’équilibre offre/demande. Ce sont généralement des centrales au charbon ou au gaz. De ce fait, les prix spot de l’électricité suivent ceux du gaz. Les entreprises qui s’approvisionnent sur le marché libre ont vu le coût de leur électricité augmenter de 6 à 9 % par an depuis 2004. Dans le même temps, les tarifs réglementés pour les ménages, et pour les entreprises n’ayant pas exercé leur éligibilité n’ont augmenté que de 0,6 % par an en moyenne.

Le maintien des tarifs réglementés est perçu à juste titre par nos concitoyens comme une protection importante. C’est pourquoi la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie a redéfini le cadre législatif de ces tarifs. Les directives 2003/54/CE et 2003/55/CE prévoyant l’ouverture complète à la concurrence des marchés intérieurs de l’électricité et du gaz, étaient pour partie directement applicables. En l’absence de transposition, c’est tout notre dispositif tarifaire qui aurait pu être remis en cause en cas de contentieux.

Toutefois, le Conseil constitutionnel ayant censuré partiellement les dispositions relatives aux tarifs, la loi promulguée pose deux problèmes principaux :

- le sort des nouveaux sites de consommation n’est pas clair ;

- des consommateurs peuvent se voir privés du bénéfice des tarifs du fait de la décision prise par quelqu’un d’autre.

Après l’adoption d’un amendement à la loi de mars 2007 instituant un droit au logement opposable, réglant la première difficulté pour l’électricité, la proposition de loi qui vous est soumise vise à apporter une solution précise au second problème. Elle fait la synthèse de quatre propositions de loi.

Trois propositions sénatoriales :

- la proposition de loi n° 369 tendant à autoriser les consommateurs particuliers à retourner au tarif réglementé d’électricité, présentée par M. Ladislas Poniatiowski et 81 sénateurs ;

- la proposition de loi n° 427 tendant à autoriser la réversibilité de l’exercice des droits relatifs à l’éligibilité pour l’achat d’énergie électrique, présentée par M. Xavier Pintat ;

- la proposition de loi n° 462 tendant à préserver le pouvoir d’achat des ménages en maintenant les tarifs réglementés de vente d’électricité et de gaz naturel, présentée par M. Daniel Raoul et les membres du groupe socialiste et apparentés ;

La proposition de loi n° 149 tendant à autoriser le retour aux tarifs réglementés d’électricité pour les consommateurs particuliers et les petits professionnels, présentée par MM. Patrick Ollier, Serge Poignant, Jean-Claude Lenoir, Jean-Pierre Nicolas et François-Michel Gonnot.

LES LACUNES DU DROIT ACTUEL

A.— LA FIXATION DES TARIFS RÉGLEMENTÉS

1. La détermination des tarifs d’électricité

C’est l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité qui fixe le cadre des tarifs réglementés de vente d'électricité.

Le prix acquitté par les clients finals comprend un tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE), fixé par décision ministérielle sur proposition de la commission de régulation de l’énergie (CRE). Son montant est acquitté par le client au fournisseur, qui le reverse au gestionnaire de réseau. S’y ajoute une contribution tarifaire d’acheminement (CTA) fixée par arrêté ministériel. Le TURPE et la CTA ne dépendent pas du fournisseur, mais de la catégorie de client. La CRE soumet aux ministres chargés de l'économie et de l'énergie ses propositions motivées d'évolution des tarifs d'utilisation des réseaux publics (TURP). La décision ministérielle sur ces propositions est réputée favorable, sauf opposition de l'un des ministres dans un délai de deux mois suivant leur réception.

C’est la partie fourniture qui varie, selon que le client a choisi le tarif réglementé ou le prix de marché. Le tarif de fourniture doit couvrir les coûts de production et d’approvisionnement et les coûts commerciaux des opérateurs historiques (EDF et les DNN), y compris les dépenses de développement du service public pour les usagers. Il dépend de la catégorie de client. Les ministres de l'économie et de l'énergie arrêtent le niveau des tarifs, ainsi que leurs évolutions, sur avis simple de la CRE.

S’ajoutent au prix de détail hors taxes, des taxes locales et départementales, variables selon la puissance souscrite, la contribution aux charges de service public de l’électricité (CSPE) et la TVA.

Les offres tarifaires faites par EDF ou les DNN sont des offres intégrées qui comprennent à la fois l'abonnement, la fourniture et l'acheminement.

Les principales catégories de tarifs réglementés d’électricité dépendent de la puissance souscrite et de la tension de raccordement :

- le tarif bleu, pour une puissance souscrite comprise entre 3 et 36 kilovoltampères (kVA) dont bénéficient les ménages et les petits consommateurs professionnels ;

- le tarif jaune (puissance souscrite comprise entre 36 et 250 kVA) ;

- le tarif vert (puissance souscrite supérieure à 250 kVA), ces deux offres étant souscrites par les plus gros consommateurs professionnels.

Le cas particulier du TaRTAM

En outre, à l’initiative du Président Patrick Ollier et de votre rapporteur, le Parlement a adopté un amendement à la loi relative au secteur de l’énergie instituant un tarif réglementé transitoire d’ajustement du marché pour la fourniture d’électricité ainsi qu’un autre amendement des mêmes auteurs créant une compensation des fournisseurs supportant une charge du fait de ce tarif. Il fallait proposer une solution à la hausse insupportable des prix de l’électricité affectant les entreprises qui avaient exercé leur éligibilité, hausse qui a pu atteindre plus de 85 %, en permettant un retour transitoire à un nouveau tarif réglementé, dans le respect des engagements communautaires de la France.

Le bénéfice du TaRTAM est ouvert à tout consommateur final d'électricité ayant exercé son éligibilité qui en a fait la demande à son fournisseur avant le 1er juillet 2007. Ce tarif s'applique de plein droit aux contrats en cours à compter de la date à laquelle la demande est formulée. Il s'applique également aux contrats conclus postérieurement à cette demande écrite, y compris avec un autre fournisseur. Dans tous les cas, la durée de fourniture au niveau du TaRTAM est limitée à deux ans à compter de la date de la première demande d'accès à ce tarif.

La loi ayant précisé que le niveau du TaRTAM ne pouvait excéder de 25 % le niveau du tarif réglementé de vente hors taxes applicable à un site de consommation présentant les mêmes caractéristiques, l'arrêté du 3 janvier 2007 a fixé les taux de majoration dans une fourchette allant de 10 à 23 % par rapport aux « tarifs classiques ». Il en résulte un prix de vente de l'électricité se situant à mi-chemin entre les tarifs réglementés et les prix de marché.

Pour l'application de ce mécanisme, les fournisseurs qui alimentent leurs clients au niveau du TaRTAM et qui établissent qu'ils ne peuvent produire ou acquérir les quantités d'électricité correspondantes à un prix inférieur à la part correspondant à la fourniture de ces tarifs bénéficient d'une compensation couvrant la différence entre le coût de revient de leur production ou le prix auquel ils se fournissent et les recettes correspondant à la fourniture de ces tarifs. Cette compensation est financée par :

- une contribution (qui ne peut excéder 1,3 euro par MWh) prélevée sur les producteurs d'électricité exploitant des installations d'une puissance installée totale de plus de 2 000 MW et assise sur le volume de leur production d'électricité d'origine nucléaire et hydraulique (en pratique EDF et Suez) au cours de l'année précédente ;

- le mécanisme de la contribution aux charges du service public de l'électricité (CSPE).

2. La détermination des tarifs de gaz naturel

Les règles relatives à la fixation des tarifs de gaz naturel sont quant à elles déterminées par l’article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie.

Les modalités de fixation des tarifs d'utilisation des réseaux de transport et de distribution sont identiques à celles valables pour l'électricité. Couvrant les coûts, ils font l'objet d'une péréquation à l'intérieur de la zone de desserte de chaque gestionnaire.

La part « fourniture » des tarifs de gaz naturel est définie « en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures », couvre également l'ensemble de ces coûts et fait l’objet d’une harmonisation «dans les zones de desserte respectives des différents distributeurs », les différences de tarifs ne devant pas excéder les « différences relatives aux coûts de raccordement des distributions au réseau de transport de gaz naturel à haute pression ».

La seule taxe appliquée aux prix de détail hors taxes du gaz est la TVA.

Aucune fréquence d’évolution des tarifs en distribution publique de Gaz de France n’est plus fixée. Cette évolution dépend essentiellement de l’évolution des coûts d'approvisionnement en gaz (indexés pour GDF sur les variations du prix des produits pétroliers et du taux de change euro/dollar), et de celle des charges internes des fournisseurs, hors coût d'approvisionnement en gaz. On distingue deux grandes formules tarifaires pour la vente de gaz naturel.

Les tarifs à souscription s'appliquent aux clients raccordés au réseau de transport et aux clients raccordés au réseau de distribution et consommant plus de 4 gigawattheures (GWh) par an. Les fournisseurs historiques qui proposent des tarifs à souscription sont Gaz de France, TEGAZ et certaines entreprises locales de distribution (ELD), en particulier Gaz de Strasbourg, Gaz de Grenoble et Gaz de Bordeaux.

Les tarifs en distribution publique concernent l'ensemble des clients raccordés au réseau de distribution et consommant moins de 4 GWh par an.

Les fournisseurs historiques qui proposent des tarifs en distribution publique sont GDF et 23 ELD dans leurs zones de desserte. Les tarifs en distribution publique de GDF représentent environ 96 % des ventes totales en distribution publique, et ceux des ELD environ 4 %.

Les évolutions des tarifs en distribution publique sont demandées par les opérateurs et sont applicables directement, dès lors que les ministres chargés de l’économie et de l’énergie, après avoir recueilli l'avis de la CRE, ne s'y opposent pas.

B.— LES BÉNÉFICIAIRES DES TARIFS : UNE SITUATION TROP ALÉATOIRE

1. La volonté exprimée par le législateur lors des débats sur le projet de loi relatif au secteur de l’énergie en 2006

La loi relative au secteur de l’énergie visait notamment à répondre à la question du devenir des tarifs réglementés, alors explicitement définis comme les tarifs de vente aux consommateurs non éligibles. Les directives, sur ce point, d’application directe, imposaient de rendre tous les consommateurs éligibles au 1er juillet 2007 et donc de faire disparaître la catégorie des clients non éligibles.

Sur le fond, votre rapporteur avait constaté la divergence des analyses des différents acteurs du secteur énergétique sur la question du devenir de ces tarifs dans le cadre de la consultation sur l’ouverture des marchés de l’énergie au 1er juillet 2007 qu’il avait organisée dans le cadre du Conseil supérieur de l’électricité et du gaz, à la demande du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

Pour certains opérateurs et le régulateur, l’ouverture des marchés emportait à terme la disparition des tarifs réglementés. D’autres acteurs, dont les consommateurs et les organisations syndicales, estimaient, au contraire, que l’ouverture des marchés ne doit pas entraîner la suppression des tarifs réglementés.

Le projet de loi proposait d’assurer la pérennité de ces tarifs pour les consommateurs domestiques et de les mettre en extinction pour les consommateurs professionnels, en privant de leur bénéfice, à compter du 1er janvier 2008, les nouveaux sites de consommation professionnelle.

Pour votre commission, l’éligibilité est et doit rester une faculté que nul ne peut être contraint d’exercer. Cette position de principe est renforcée par le fait qu’un autre système serait, dans l’hypothèse où les prix resteraient durablement supérieurs aux tarifs comme c’est aujourd’hui le cas, fortement pénalisant pour le développement d’activités nouvelles. Reprenant une solution conçue lors de la consultation animée par votre rapporteur dans le cadre du Conseil supérieur de l’électricité et du gaz, le projet de loi proposait, sans modifier le système (irréversibilité) s’agissant des consommateurs non domestiques, d’organiser l’éligibilité des ménages sur la base du couple site/personne, ouvrant le bénéfice des tarifs à tout consommateur n’ayant pas lui-même exercé son éligibilité sur un site.

Votre rapporteur avait déjà mis en garde à l’époque contre les dangers d’un autre système. Il fallait éviter de distinguer, éventuellement en affectant leur valeur si l’écart entre les prix et les tarifs devait se maintenir, les logements pour lesquels l’éligibilité a été exercée de ceux pour lesquels elle ne l’a pas été, et symétriquement, l’inconvénient d’un dispositif attaché à la personne qui aurait supposé la constitution d’un fichier nominatif exhaustif des consommateurs et qui aurait interdit tout « droit à l’erreur ».

Votre commission avait proposé en outre de tirer des conclusions de l’expérience d’éligibilité des consommateurs professionnels dont il apparaît qu’ils ont souvent exercé cette faculté sans être conscients de son caractère irrévocable. À ce titre, le Parlement avait renforcé l’information des petits consommateurs quant à la nature des offres commerciales qu’ils reçoivent, avec, sur les offres contractuelles et les contrats, une mention obligatoire du caractère réglementé ou non des clauses tarifaires proposées et une information sur l’irrévocabilité de l’exercice de l’éligibilité.

Etait également imposé aux opérateurs historiques, déjà tenus d’offrir le tarif réglementé aux clients pouvant y avoir droit le demandant, de leur proposer systématiquement une offre à ce tarif, y compris, pour ce qui concerne l’énergie qu’ils distribuent au tarif (donc l’électricité pour EDF et le gaz naturel pour Gaz de France), lorsqu’ils proposent des offres concernant les deux énergies. Le consommateur devait ainsi renoncer explicitement au bénéfice du tarif et sans démarche expresse de sa part, toute offre commerciale qu’il aurait acceptée se verrait appliquer les conditions tarifaires du tarif réglementé.

2. Les raisons de la censure par le Conseil constitutionnel (30 novembre 2006)

Saisi par les députés et sénateurs socialistes et communistes de la conformité à la constitution de la privatisation de Gaz de France, le Conseil constitutionnel a examiné d’office l’article 17 relatif aux tarifs réglementés. Appliquant une jurisprudence de 2004, il a considéré qu’il lui appartenait de veiller à la bonne transposition des directives communautaires, ce contrôle étant soumis à une double limite : la transposition d'une directive ne saurait aller à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France, sauf à ce que le constituant y ait consenti. D’autre part, le Conseil constitutionnel ne peut saisir la Cour de justice des Communautés européennes d’une question préjudicielle et ne saurait en conséquence déclarer non conforme à la Constitution qu'une disposition législative manifestement incompatible avec la directive qu'elle a pour objet de transposer.

Citant le 1 des articles 3 des directives susvisées, en vertu duquel les États membres doivent veiller à ce que les entreprises d'électricité ou de gaz naturel « soient exploitées en vue de réaliser un marché concurrentiel » ; qu'ils doivent s'abstenir de toute discrimination pour ce qui est des droits et des obligations de ces entreprises ; que, si le 2 des mêmes articles prévoit que les États membres peuvent imposer des obligations à ces entreprises dans l'intérêt économique général, notamment en matière tarifaire, ces obligations doivent se rattacher clairement à un objectif de service public, être non discriminatoires et garantir un égal accès aux consommateurs nationaux, le Conseil constitutionnel a estimé que :

- les tarifs réglementés se distinguent des tarifs spéciaux institués à des fins sociales et sont étrangers à la poursuite d’objectifs de service public ;

- les dispositions censurées ne se bornent pas à appliquer les tarifs réglementés aux contrats en cours mais créent des obligations tarifaires permanentes générales ;

- ces obligations pèsent sur les seuls opérateurs historiques.

Pour ces raisons, il considère que les dispositions censurées méconnaissent manifestement l’objectif d’ouverture des marchés concurrentiels de l’électricité et du gaz naturel fixé par les directives. Le commentaire de la décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006 paru le même jour aux Cahiers indiquait que le but poursuivi par le Conseil est de promouvoir, par la solution juridique retenue, l’extinction progressive du nombre de clients bénéficiant d’un tarif réglementé afin de favoriser la concurrence et l’apparition d’opérateurs alternatifs.

Le dispositif promulgué dans la loi du 7 décembre 2006 prévoit donc le bénéfice du tarif réglementé pour les ménages comme les entreprises qui n’exercent pas leur éligibilité, si personne pour un site donné, n’a exercé auparavant son éligibilité.

C.— UN VÉRITABLE IMBROGLIO JURIDIQUE

1. Un système incohérent et injuste

La censure du dispositif « site/personne » empêche quiconque ayant exercé son éligibilité pour un site de bénéficier à nouveau du tarif réglementé à l’occasion d’un déménagement, mais impose aussi à un consommateur n’ayant jamais renoncé de lui-même au tarif de subir la décision d'un autre ménage, dont il reprend le logement, de choisir une alimentation énergétique au prix de marché. Si le nombre de cas est encore infime, il est appelé à augmenter au fur et à mesure que des clients choisiront des offres de marché et que plus de 800 000 mutations immobilières de logements anciens sont enregistrées chaque année.

En revanche, le ménage qui aura pris la décision de faire perdre à un logement le bénéfice du tarif pourra retrouver un contrat réglementé s'il déménage dans un logement dans lequel aucun occupant n'aura jamais fait le choix de la concurrence. Il y a donc là une injustice choquante.

Résultant d’une censure effectuée au nom du contrôle de la conformité d’une loi à l’objectif des directives européennes, cette situation est pourtant contraire à l'esprit des directives qui ont toujours fait de l'exercice de l'éligibilité une faculté et en aucun cas une obligation.

Elle porte en outre atteinte au droit de propriété, inscrit dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et garanti par la Constitution.

Rien ne permet en effet d’associer le propriétaire d’un logement au choix du locataire si ce dernier souhaite exercer son éligibilité. Ce serait d’ailleurs sans doute contraire aux directives européennes qui font de l'exercice de l'éligibilité un droit personnel. En outre, les clauses interdisant aux locataires de renoncer à leur contrat au tarif sans l'accord du propriétaire seraient sans doute considérées comme abusives à l'occasion d'un contentieux. Pourtant, l’irréversibilité d’une telle décision influe nécessairement sur la valeur du bien immobilier.

On peut craindre alors un dédoublement du marché immobilier : celui des logements pouvant bénéficier des tarifs et celui des logements qui en sont privés.

Enfin, alors que les diagnostics sur l’état des logements sont nombreux, rien n'est prévu pour informer les candidats à la location ou à l'acquisition d'un bien de la situation du logement au regard du droit au tarif réglementé.

2. La nécessité de tenir compte des procédures initiées par la Commission européenne contre la France

Si rien dans le texte des directives ne s’oppose au maintien des tarifs réglementés, de nombreuses voix s’élèvent à Bruxelles pour demander la suppression progressive des tarifs réglementés.

La Commission européenne a enclenché en avril 2006 une procédure en manquement pour transposition incorrecte des directives. Dans sa lettre de mise en demeure, la Commission estime qu’un « mode de fixation étatique des prix ayant un tel caractère de généralité, de permanence et de rigidité, dénué de transparence dans son mode d’attribution (…) ne peut être présumé indispensable dans un système ou le libre jeu de la concurrence entraîne en principe la fixation de prix compétitifs ». Le Gouvernement français a répondu que le système tarifaire n’est pas contraire à la directive et que le niveau des tarifs est calculé de manière à couvrir tous les coûts de production et fourniture. Cette procédure ne vise que les tarifs des professionnels mais on ne peut exclure le risque d’un élargissement de la procédure aux tarifs des particuliers, depuis que ces derniers sont éligibles.

Une seconde procédure est en cours depuis juin 2007, au titre du contrôle des aides d’État. La Commission européenne vise cette fois les tarifs réglementés dont bénéficient les entreprises (tarifs jaune et vert) et le TaRTAM, et leur niveau « artificiellement bas, financé directement ou indirectement par l’État ». Il s’agit d’une menace particulièrement grave, puisque les entreprises concernées risquent de devoir rembourser la différence entre le niveau des tarifs et celui des prix de marché.

EXAMEN EN COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du mercredi 5 décembre 2007, la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire a examiné, sur le rapport de M. Jean-Claude Lenoir, la proposition de loi, adoptée par le Sénat en première lecture, relative aux tarifs réglementés d’électricité et de gaz naturel (n° 238).

En introduction, le président Patrick Ollier a rappelé que les travaux menés depuis plusieurs mois avec le rapporteur, et MM. Serge Poignant, Jean-Pierre Nicolas et François-Michel Gonnot avaient abouti au dépôt d’une proposition de loi à l’Assemblée nationale en juillet, pour laisser aux consommateurs et aux petites entreprises la possibilité de rester, ou de revenir dans certains cas, aux tarifs réglementés d’électricité, mais que des propositions avaient été déposées en parallèle au Sénat et plus vite inscrites à l’ordre du jour. C’est la raison pour laquelle l’Assemblée nationale examine le texte adopté par le Sénat.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a rappelé que la question des tarifs de l’énergie est très sensible, car le coût de l’énergie a beaucoup augmenté, en raison des hausses du prix du baril de pétrole. Ainsi, les prix proposés ont-ils également fortement augmenté, tant pour l’électricité que pour le gaz. Le tarif réglementé par le ministre de l’Économie apparaît donc à juste titre aux consommateurs comme très protecteur, à l’inverse du prix déterminé librement par le marché.

Le Parlement français, après plusieurs semaines de débat en 2006, a transposé les directives communautaires prévoyant l’ouverture complète du marché à la concurrence à compter du 1er juillet 2007. Cela étant, la question de la réversibilité, c'est-à-dire la possibilité pour un consommateur de revenir au tarif après y avoir renoncé, est pendante dans l’ensemble de l’Union européenne. Cette réversibilité est d’ailleurs possible dans une douzaine d’États membres de l’Union.

En outre, la France est dans une situation particulière depuis des décennies, puisqu’elle dispose d’un système intégré d’entreprises publiques, EDF et Gaz de France. Nos concitoyens ont donc pris l’habitude de voir le tarif de l’énergie fixé par le Gouvernement.

Il faut souligner qu’aucune directive n’indique aujourd’hui que les tarifs réglementés doivent disparaître. Le « troisième paquet » de libéralisation du marché intérieur de l’énergie présenté le 19 septembre par la Commission européenne ne mentionne cette question que très indirectement. Cependant, de nombreux discours, y compris de M. Andris Piebalgs, commissaire européen chargé de l’énergie, annoncent avec obsession la mort des tarifs.

Le rapporteur a rappelé son attachement, ainsi que celui du Président de la Commission, et de l’ensemble du groupe UMP, aux tarifs réglementés. Ce soutien est d’ailleurs partagé sur l’ensemble des bancs de l’Assemblée nationale. Il revient au pouvoir politique de décider de leur maintien.

En 2006, le législateur a pris des précautions afin de garantir le maintien des tarifs, et articulé son dispositif autour du « couple site/personne », conformément aux recommandations du Conseil supérieur de l’énergie, qui avait mené des travaux préparatoires. Cependant, cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel.

Le texte définitif, après censure, était donc bancal sur deux points. Tout d’abord, il fallait régler le sort des clients s’installant sur un nouveau site à compter du 1er juillet 2007 : à la lecture de la loi relative au secteur de l’énergie, de mauvais esprits pouvaient penser qu’ils n’avaient plus droit aux tarifs. Cela a été fait grâce à un amendement de la commission des affaires économiques, adopté à l’unanimité, à la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses dispositions en faveur de la cohésion sociale. La loi « DALO » prévoit ainsi un droit au tarif régulé jusqu’au 1er juillet 2010. Cette limite temporelle est importante car la France fait actuellement l’objet de deux procédures pour non-respect du droit de la concurrence, en raison du maintien de certains tarifs. En outre, l’une des raisons pour lesquelles le Conseil constitutionnel a censuré le dispositif de la loi relative au secteur de l’énergie était précisément son absence de limitation dans le temps.

Le deuxième point resté bancal à la suite de la décision du juge constitutionnel concerne la réversibilité : est-il possible pour un nouvel occupant de revenir au tarif en cas de déménagement ? Pas toujours, et cela reste incompréhensible pour les consommateurs.

Actuellement, pour l’électricité, seuls 6 100 sites résidentiels ont quitté les tarifs, et se voient appliquer une offre de marché, dont 5 100 chez des fournisseurs alternatifs, et 1 000 chez l’opérateur historique. Ces chiffres s’élèvent à 13 300 pour le gaz, dont 6 200 chez des fournisseurs alternatifs, et 7 100 chez l’opérateur historique. Cela représente donc une part infime du marché. En outre, 3 600 entreprises bénéficient du tarif réglementé transitoire d’ajustement du marché (TaRTAM) créé par la loi du 7 décembre 2006, sur un total de 795 000 sites, ce qui est peu en nombre, mais qui représente 72 % de la consommation des clients en offre de marché. Le TaRTAM est valable pour une durée de 2 ans. Ces éléments s’inscrivent dans un contexte de flambée des prix de l’électricité qui ont augmenté de 60 à 70 % pour les entreprises qui avaient choisi de sortir du marché réglementé, en raison de la hausse des prix du pétrole.

Dès juillet 2007, le rapporteur s’est saisi de la question de la réversibilité des tarifs, et a déposé avec le président Patrick Ollier, Serge Poignant, Jean-Pierre Nicolas et François-Michel Gonnot, une proposition de loi, afin de permettre aux clients domestiques de revenir au tarif réglementé de l’électricité, en cas de déménagement avant le 1er juillet 2010.

La commission des affaires économiques du Sénat était saisie de trois propositions différentes, dont l’une présentée par son rapporteur, M. Ladislas Poniatowski. Elle a retenu un dispositif médian, étendu au gaz et limité dans le temps. Ce dispositif a été adopté par le Sénat et convient aux cosignataires de la proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale. Si le présent texte est adopté sans modification, tout client qui déménage avant le 1er juillet 2010 aura la possibilité d’un retour au tarif réglementé. Cela pourra également concerner les petits professionnels, qui consomment moins de 36 kVA en électricité.

C’est pourquoi l’orateur a émis un avis défavorable à l’ensemble des amendements déposés sur le texte.

Le président Patrick Ollier a souligné que la proposition de loi discutée ne requérait aucun décret d’application. Par conséquent, si l’Assemblée nationale la votait dans les mêmes termes que le Sénat, elle entrerait en application sans délai. Il apparaît en effet nécessaire de ne pas perdre de temps au risque de pénaliser les consommateurs. Les députés auteurs de la proposition de loi déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale ont ainsi pris l’attache des sénateurs afin de leur signaler les améliorations souhaitables à leur propre proposition de loi, ceci dans l’objectif de permettre aux deux chambres de s’accorder le plus rapidement possible sur un texte identique.

M. François Brottes a estimé au nom du groupe SRC, que la situation actuelle porte atteinte à la fois à la liberté des consommateurs et au droit de propriété. Elle résulte de la volonté du Gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin qui, en 2002, avait souhaité que la France mette rapidement en œuvre les objectifs européens d’ouverture du marché de l’énergie. De plus, l’engagement pris par M. Nicolas Sarkozy en 2004 de conserver un actionnariat public à EDF et GDF n’a pas été tenu. C’est très logiquement que le Conseil constitutionnel a considéré que le maintien des tarifs réglementés et la privatisation des opérateurs publics ne pouvaient aller de concert. Il y a fort à parier qu’il aura la même position lorsqu’il sera saisi à nouveau : l’État et la majorité sont schizophrènes en la matière.

Il est regrettable qu’on doive s’y prendre à plusieurs fois pour aboutir à un résultat qui était accessible à travers les amendements présentés par le groupe socialiste sur la loi portant droit au logement opposable. Pendant ce temps d’hésitation, des individus ont subi l’incohérence du droit positif.

Les mesures proposées sont souhaitables et soutenues par les députés du groupe SRC, mais la présence d’une date butoir au dispositif proposé laisse sceptique car elle ne laissera qu’un bien court répit. De même, le TaRTAM appartiendra bientôt au passé. Les tarifs réglementés ne sont pas la meilleure garantie pour les consommateurs, qui jouiraient d’une meilleure protection si les entreprises publiques restaient publiques. Or le Gouvernement ne cesse de ponctionner (près de un milliard d’euros cette année) des dividendes en leur sein et il a hier encore procédé à une vente d’une partie du capital d’EDF avec, d’ailleurs, un succès tout relatif. De plus, le contrat de service public conclu entre l’État et EDF stipule que le niveau des tarifs doit s’approcher à terme des prix du marché. Que signifie alors le mécanisme discuté aujourd’hui ? C’est un leurre. Le Gouvernement va augmenter les tarifs pour augmenter les dividendes des actionnaires. Cet élément demande réflexion et il comptera pour beaucoup dans la décision de déférer ou non ce texte au Conseil constitutionnel. Il ne faut pas duper nos concitoyens avec des dispositifs de protection en trompe l’œil.

Le président Patrick Ollier a rappelé aux députés les risques inhérents à une transmission de la proposition de loi examinée au Conseil constitutionnel. Un tel geste devrait être sérieusement expliqué aux consommateurs.

M. Daniel Paul s’exprimant au nom du groupe GDR, s’est étonné de la présence dans le texte en discussion de la date butoir du 1er juillet 2010. L’on peut comprendre les contraintes juridiques, constitutionnelles et communautaires, mais inscrire une telle date dans la loi génère le risque fatal d’une disparition de la procédure de réversibilité et des tarifs réglementés dans un avenir très proche. Ces tarifs n’ont pas empêché le cours des actions EDF de presque tripler depuis l’introduction en bourse. Le souci de ces cours boursiers va conduire à une nouvelle hausse des tarifs dans les prochains jours, afin de faciliter la fusion de Gaz de France avec Suez. Ils ont permis aux entreprises publiques d’assumer toutes leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement, y compris depuis peu la rémunération des actionnaires.

Si le dispositif proposé ne fait pas état d’une date limite, l’intérêt supérieur des consommateurs permet de le voter malgré la menace de privatisation planant sur les entreprises publiques. En revanche, si elle est maintenue, la loi fera de facto le jeu des fournisseurs indépendants d’énergie – qui lui sont d’ailleurs favorables – en leur permettant de capter une clientèle plus facilement. Le groupe GDR, alors, n’approuverait pas la proposition de loi.

M. Jean-Claude Lenoir, rapporteur, a fait observer que le débat sur la privatisation de GDF n’avait pas à être relancé dans la mesure où le Parlement s’était déjà prononcé sur ce point, après examen de 137 742 amendements. Il ne s’agit ici que d’une mesure précise pour protéger les consommateurs. Les arguments du groupe SRC sont contradictoires : il faut se souvenir que la censure du Conseil constitutionnel se justifiait précisément par l’absence de date limite à la possibilité d’un retour au tarif réglementé. Le groupe socialiste doit être conscient des risques que susciterait une nouvelle saisine.

Pour l’heure, le petit nombre de clients ayant choisi de sortir du cadre tarifaire réglementé a permis d’éviter qu’un consommateur n’emménage dans un appartement où le droit d’option aurait déjà été exercé. L’absence d’une possibilité de retour n’a donc produit pour l’heure aucune conséquence.

M. François Brottes a déclaré que l’opposition garde le droit d’amender ou de ne pas amender, comme elle conserve celui de déférer ou non une loi au Conseil constitutionnel. Par ailleurs, il ne fait pas de doute que si la référence à une date butoir dans le texte de la loi était supprimée, il ne serait plus nécessaire de réfléchir à une saisine.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

Avant l’article 1er

La commission, suivant l’avis défavorable du rapporteur, a rejeté un amendement de M. Daniel Paul enjoignant au Gouvernement de solliciter des autorités communautaires un moratoire sur les directives européennes relatives au marché de l’énergie.

Article 1er

Possibilité pour les ménages et les petites entreprises de retourner
au tarif réglementé d’électricité à l’occasion d’un déménagement

Cet article complète par deux paragraphes IV et V (les numéros II et III correspondent à des paragraphes censurés par le Conseil constitutionnel) l’article 66 de la loi n°2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, qui détermine les conditions dans lesquelles les consommateurs finals peuvent bénéficier des tarifs réglementés d’électricité.

Le paragraphe IV permet à un consommateur final d’électricité de bénéficier des tarifs réglementés de vente d’électricité, pour la consommation d’un site, à condition de ne pas avoir fait lui-même pour ce site, le choix d’une offre aux prix de marché.

Est ainsi rétabli le couple « site/personne », pour les particuliers.

Alors que les dépenses des ménages consacrées au chauffage et à l'éclairage ont augmenté de 6,5 % en 2005 et de 5,7 % en 2006, et que cette tendance va se poursuivre, compte tenu de la hausse du prix des énergies fossiles et du développement attendu des usages de l'électricité, votre rapporteur réaffirme l’attachement de la commission au maintien d'un droit au tarif réglementé d’électricité.

Une condition est toutefois posée : le consommateur doit, pour bénéficier du tarif, en faire la demande avant le 1er juillet 2010.

Cette condition est conforme à la proposition de loi n° 149 déposée cet été par le président Patrick Ollier, votre rapporteur et plusieurs commissaires. Elle est également conforme à l’amendement à la loi instituant un droit au logement opposable, portant sur la consommation d’électricité des nouveaux sites, qui avait été adopté à l’unanimité par la commission.

L’absence de limite temporelle au dispositif voté dans la loi relative au secteur de l’énergie a été l’une des raisons principales justifiant la censure du Conseil constitutionnel.

Que se passera-t-il au 1er juillet 2010 ? En tout état de cause, les tarifs ne disparaîtront pas à cette date, qui propose un rendez-vous, sans constituer une date butoir. S’il l’estime nécessaire, le législateur pourra intervenir pour maintenir les dispositions qui vous sont proposées ici, ou pour les modifier en profondeur. À défaut, la situation sera celle qui prévalait en décembre 2006, à la promulgation de la loi censurée. Entre-temps, plusieurs échéances auront permis d’établir un bilan, notamment un rapport du Gouvernement au Parlement dressant le bilan du TaRTAM, ou les travaux de l’Assemblée et du Sénat de suivi des négociations sur le 3ème paquet. Surtout, ce délai devrait permettre de convaincre la Commission européenne de la conformité des tarifs réglementés français au droit communautaire, et d’aborder la question des règles tarifaires dans un cadre juridique stabilisé.

Le paragraphe V étend aux entreprises ayant une faible consommation d’électricité les possibilités offertes aux ménages par le paragraphe IV.

Le seuil retenu est la puissance électrique souscrite, inférieure ou égale à 36 kVA.

Cette disposition ne figurait pas dans les propositions de loi examinées par le Sénat. Elle était en revanche prévue dans la proposition de loi n° 149 de l’Assemblée nationale. Comme le rapporteur du Sénat, M. Ladislas Poniatowski, l’a indiqué en séance, les sénateurs l’ont adoptée avec la volonté de parvenir à la meilleure synthèse possible des différentes propositions de loi. Votre rapporteur voit là une marque de cohérence avec l’extension aux petits professionnels (artisans, commerçants et professions libérales, etc.) des mesures d’information et de protection des consommateurs prévue par la loi du 7 décembre 2006.

*

* *

Rejetant préalablement un amendement de M. Daniel Paul visant à supprimer la mention d’une date limite pour le retour au tarif réglementé, de même qu’un amendement de M. Michel Piron instaurant la réversibilité totale du choix du fournisseur d’électricité, la commission a adopté cet article sans modification, comme l’y invitait le rapporteur.

Article 2

Possibilité pour les ménages de retourner au tarif réglementé de gaz naturel
à l’occasion d’un déménagement

L’article 2 de la proposition de loi étend à leur consommation de gaz naturel la possibilité pour les particuliers de bénéficier des tarifs réglementés pour la consommation d’un site, à condition de ne pas avoir fait eux-mêmes pour ce site, le choix d’une offre aux prix de marché.

Aucune des propositions de loi déposées par les parlementaires des groupes UMP de l’Assemblée nationale et du Sénat ne prévoyait cette possibilité. En effet, l'enjeu économique pour les ménages français est nettement moindre que pour l'électricité.

Les prix du gaz naturel pour les particuliers ont connu des hausses importantes au cours des dernières années, avec une hausse de 6,8 % en 2005 et de 12,7 % en 2006, passant en moyenne d'environ 38 euros le MWh en 2005 à 48,4 euros en 2007. Cette évolution dépend de celle des coûts d'approvisionnement et des charges des fournisseurs.

Toutefois, le gaz naturel n’est pas un bien insubstituable comme l’électricité. Tous les ménages n’en consomment d’ailleurs pas. On compte 11 millions de clients particuliers de gaz, contre plus de 26 millions pour l'électricité. D’autre part, l’écart entre les tarifs réglementés et les prix de marché est largement inférieur pour le gaz naturel à celui que l’on peut observer pour l’électricité.

Les sénateurs ont finalement opté pour un parallélisme des règles tarifaires relatives au gaz naturel et à l’électricité, pour les particuliers et pour les sites existants. Ils ont estimé qu’à défaut le dispositif serait incompréhensible pour les consommateurs. Votre rapporteur souscrit à cet objectif de clarté et de simplicité.

*

* *

Rejetant préalablement un amendement de M. Daniel Paul visant à supprimer la mention d’une date limite pour le retour au tarif réglementé, la commission a adopté cet article sans modification.

Après l’article 2

La commission a rejeté un amendement de M. Daniel Paul obligeant l’État à conclure des contrats de service public avec les producteurs d’électricité exploitant des installations d’une puissance installée de plus de 2 000 mégawatts.

Article 3

Bénéfice des tarifs réglementés de gaz naturel pour les consommateurs domestiques occupant un nouveau site

De la censure de la loi relative au secteur de l’énergie par le Conseil constitutionnel résultait une ambiguïté rendant incertaine la possibilité pour les occupants d’un nouveau site de bénéficier des tarifs. Un amendement au projet de loi instituant le droit au logement opposable (DALO), présenté par le président Ollier, le rapporteur, Jérôme Bignon, et cosigné par François-Michel Gonnot, Serge Poignant et votre rapporteur a permis de régler le cas des nouveaux sites pour leur consommation d’électricité.

Adopté par l’Assemblée nationale à l’unanimité il accorde aux nouveaux sites de consommation, raccordés au réseau de distribution ou de transport avant le 1er juillet 2010, le droit de bénéficier des tarifs réglementés. La portée transitoire du dispositif visait à permettre son ajustement compte tenu de l’évolution du marché, et d’attendre une clarification par la CJCE de la portée des directives.

L’article 3 de la présente proposition de loi propose d’étendre cette mesure aux nouveaux sites de consommation de gaz naturel, pour les particuliers.

*

* *

Rejetant préalablement un amendement de M. Daniel Paul autorisant les sites de consommation raccordés aux réseaux de transport ou de distribution d’électricité et de gaz naturel à bénéficier de tarifs réglementés sans limite dans le temps, la commission a adopté cet article sans modification.

Après l’article 3 

La commission a rejeté un amendement de M. Daniel Paul supprimant la date limite de 2010 déjà inscrite dans la loi pour le bénéfice des tarifs réglementés d’électricité pour les nouveaux sites.

*

* *

M. François Brottes a affirmé que ces mesures limitées au 1er juillet 2010 n’étaient guère plus qu’un rideau de fumée et que, de plus, rien ne garantit le maintien des tarifs réglementés à un niveau de prix acceptable et compatible avec les problèmes actuels de pouvoir d’achat. Seuls les concurrents d’EDF et de GDF bénéficieront de l’évolution actuelle des tarifs. Dans l’attente de précisions sur ces divers points, le groupe SRC s’abstiendra.

M. Daniel Paul a rappelé les propos tenus au sein de la commission Roulet selon lesquels la conclusion logique de toutes les modifications du cadre réglementaire ne pourrait être que l’alignement des tarifs de l’énergie sur le coût du gaz. Ainsi, la hausse du tarif réglementé du gaz est naturelle dans l’optique de la privatisation prochaine de Gaz de France : la mariée sera parée de ses plus beaux atours. La mention du 1er juillet 2010 doit être purement et simplement retirée. A défaut, ce texte ne peut pas être approuvé.

La commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire a adopté l’ensemble de la proposition de loi sans modification, les groupes SRC et GDR s’abstenant.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

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Texte
de la proposition de loi

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Texte adopté
par le Sénat
en première lecture

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Propositions
de la Commission

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Loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique

     

Titre IV : L'équilibre et la qualité des réseaux de transport et de distribution de l'électricité.

Article 1er

Article 1er

Article 1er

Art. 66. - I. - Un consommateur final d'électricité bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés au premier alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée pour la consommation d'un site pour lequel il n'use pas de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi, à la condition qu'il n'ait pas été fait précédemment usage de cette faculté, pour ce site, par ce consommateur ou par une autre personne.

………………………………

L'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

L’article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est complété par un IV et un V ainsi rédigés :

(Sans modification)

 

« IV. – Un consommateur final domestique d'électricité qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité pour la consommation d'un site, à condition qu'il n'ait pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue au I de l'article 22 précité. »

« IV. – Un consommateur final domestique d’électricité qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéficie des tarifs réglementés de vente d’électricité pour la consommation d’un site, à condition qu’il n’ait pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue au I de l’article 22 précité.

 
   

« V (nouveau). – Le IV du présent article est applicable aux consommateurs finals non domestiques souscrivant une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kVA. »

 
 

Article 2

Article 2

Article 2

Art. 66-1. - I. - Un consommateur final de gaz naturel bénéficie des tarifs réglementés de vente de gaz naturel mentionnés à l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie pour la consommation d'un site pour lequel il n'use pas de la faculté prévue à l'article 3 de la même loi, à la condition qu'il n'ait pas été fait précédemment usage de cette faculté, pour ce site, par ce consommateur ou par une autre personne.

………………………………

L'article 66-1 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

L’article 66-1 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée est complété par un IV ainsi rédigé :

(Sans modification)

 

« IV. – Un consommateur final domestique de gaz naturel qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéficie des tarifs réglementés de vente de gaz naturel pour la consommation d'un site, à condition qu'il n'ait pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue à l'article 3 précité. »

« IV. – Un consommateur final domestique de gaz naturel qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéficie des tarifs réglementés de vente de gaz naturel pour la consommation d’un site, à condition qu’il n’ait pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue à l’article 3 précité. »

 
   

Article 3 (nouveau)

Article 3

Art. 66-2.- L'article 66 est également applicable aux nouveaux sites de consommation raccordés aux réseaux de distribution ou de transport avant le 1er juillet 2010.

 

Après l’article 66-2 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée, il est inséré un article 66-3 ainsi rédigé :

(Sans modification)

   

« Art. 66-3. – L’article 66-1 est également applicable, pour les consommateurs finals domestiques, aux nouveaux sites de consommation raccordés aux réseaux de distribution avant le 1er juillet 2010. »

 
       

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article additionnel avant l’article premier

Amendement présenté par M. Daniel Paul :

Dans l’attente d’un bilan sur les effets de l’ouverture à la concurrence du secteur énergétique en termes d’emplois, d’efficacité économique et de tarifications, la France, par l’intermédiaire du ministre chargé de l’énergie, demande, auprès des institutions européennes, un moratoire sur les directives européennes.

Article premier

Amendement présenté par M. Daniel Paul :

Dans l’alinéa 2 de cet article, supprimer les mots : « qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 ».

Amendement présenté par M. Michel Piron :

Après les mots : « pour la consommation d’un site », supprimer la fin de l’alinéa 2 de cet article.

Article 2

Amendement présenté par M. Daniel Paul :

Dans l’alinéa 2 de cet article, supprimer les mots : « qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 ».

Article additionnel après l’article 2

Amendement présenté par M. Daniel Paul :

Après le quatorzième alinéa de l’article 1er de la loi n° 2004-803 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« De tels contrats comportant des obligations de service public sont également conclus entre l’État et tout producteur d’électricité exploitant des installations d’une puissance installée de plus de 2 000 mégawatts. »

Article 3

Amendement présenté par M. Daniel Paul :

Rédiger ainsi cet article :

« L’article 66-2 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est ainsi rédigé :

« Art. 66-2. – Les articles 66 et 66-1 sont également applicables aux nouveaux sites de consommation raccordés aux réseaux de distribution ou de transport. »

Article additionnel après l’article 3

Amendement présenté par M. Daniel Paul :

A la fin de l’article 66-2 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, les mots : « avant le 1er juillet 2010 » sont supprimés.

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