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N
° 778

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 avril 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 299, autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République arabe syrienne en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu,

par M. François LONCLE,

Député

INTRODUCTION 5

I – LA DÉGRADATION DES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LA SYRIE 7

A – DES RELATIONS ÉCONOMIQUES EN NET RALENTISSEMENT 7

B – UN CONTEXTE POLITIQUE DÉFAVORABLE 8

II – LES STIPULATIONS DE LA CONVENTION DE 1998 11

CONCLUSION 17

EXAMEN EN COMMISSION 19

Mesdames, Messieurs,

Signée entre la France et la Syrie le 17 juillet 1998, complétée par un échange de lettres datant de 2004, la convention, dont le présent projet de loi demande l’approbation, vise à éviter la double imposition, en France et en Syrie, de revenus générés sur l’un des deux territoires. En contrepartie, des mesures sont prises afin d’éviter que les mécanismes ainsi créés ne créent des opportunités d’évasion fiscale.

Sur le plan fiscal, la France et la Syrie ne sont actuellement liées que par des dispositions relatives à des secteurs bien spécifiques – activités culturelles, transports aériens – la conclusion d’un accord fiscal global n’ayant pas abouti par deux fois.

Cette convention a été élaborée, comme la plupart de celles déjà signées par la France sur ce même sujet, à partir du modèle conçu par l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE).

Par ailleurs, l’examen de ce texte ne peut être conduit sans référence aux relations politiques existant avec la Syrie. La France a passé des accords visant à éviter la double imposition et l’évasion fiscale avec la presque totalité des pays du Proche- et du Moyen-Orient, comme la Jordanie, le Liban, la Libye et Israël, par exemple. Normalisant les relations fiscales entre la France et la Syrie, la convention de 1998 conduit à évoquer plus généralement les rapports entre nos deux pays.

I – LA DÉGRADATION DES RELATIONS ENTRE
LA FRANCE ET LA SYRIE

Disposant d’une situation géographique et stratégique très particulière, la Syrie est un acteur politique essentiel au sein d’une des régions les plus instables de la planète. Pourtant, les relations politiques de la France avec cet Etat se sont récemment détériorées, emportant des conséquences importantes en matière économique.

A – Des relations économiques en net ralentissement

Entre 2006 et 2007, la balance commerciale entre la France et la Syrie est passée d’un net excédent (environ 90 millions d’euros) à un déficit important (265,8 millions d’euros). Cette évolution se double d’une baisse en volume des échanges entre la France et la Syrie, de 924,2 millions d’euros à 878,6 millions d’euros. En un an, l’excédent d’environ 1 % a disparu, remplacé par un déficit proche de 30 %, plaçant la Syrie au trente-troisième rang des déficits commerciaux de la France.

Ce changement s’explique, en premier lieu, par une forte baisse des exportations françaises à destination de la Syrie. Après avoir atteint 507,8 millions d’euros en 2006, ces dernières ont fortement décru, de près de 40 %, et représentent 310,9 millions d’euros en 2007, un niveau inférieur à celui de 2002 (en euros courants). Les principaux postes à l’exportation vers la Syrie, à savoir les produits pétroliers raffinés et les produits alimentaires, ont connu des baisses moyennes de plus de 60 % pour le premier, et de 49 % pour le deuxième. Seul le maintien du niveau des exportations de produits chimiques, et la possibilité nouvellement offerte en Syrie de vendre des médicaments non produits localement, ont permis d’éviter une diminution plus considérable des exportations françaises.

En second lieu, l’augmentation importante du prix du pétrole a largement contribué à renchérir les importations en provenance de Syrie. Celles-ci sont désormais de l’ordre de 567 millions d’euros, en hausse de plus de 36 % par rapport à 2006. En 2006, la baisse des réserves avait provoqué une chute importante de la production nationale syrienne, et réduit d’autant la valeur des produits importés par la France depuis ce pays, de 7 % par rapport à 2005.

Une telle situation est d’autant plus regrettable que la France devrait profiter de l’ouverture progressive du marché syrien au commerce international. Entamée au début des années 2000 avec l’arrivée au pouvoir de Bachar Al Assad, celle-ci est allée de pair avec un développement du secteur privé et de la concurrence, offrant de nouvelles opportunités aux entreprises étrangères sur un marché que le haut niveau du prix du pétrole contribue largement à développer.

Avec plus d’une dizaine d’entreprises représentées localement, la France dispose pourtant d’une implantation variée, qui devrait lui permettre d’améliorer l’état de sa balance commerciale vis-à-vis de la Syrie. Total a ainsi investi des sommes importantes depuis sa première implantation, il y a vingt ans. De même, les fromageries BEL se sont imposées dans leur secteur, sur le marché syrien mais également, depuis leur établissement local, sur les marchés voisins du Liban et de Jordanie. Par ailleurs, des sociétés françaises sont présentes dans le secteur des télécommunications, des assurances et de la banque. Mais, malgré une présence non négligeable dans des domaines très divers, les investissements français vers la Syrie restent d’ampleur très modeste, le bureau des investissements syriens évaluant leur part à moins de 0,5 %, contre 4 % pour les investissements en provenance d’Allemagne.

L’affaiblissement de la position française vis-à-vis de la Syrie procède donc de deux types de facteurs. En effet, si la hausse du prix des importations en explique une partie, la frilosité du marché syrien à l’égard des produits français apporte une contribution tout aussi négative à l’évolution des relations économiques entre les deux pays. Les causes de cette situation sont de plusieurs ordres.

B – Un contexte politique défavorable

L’évolution des échanges entre la France et la Syrie s’explique en effet par des éléments divers, qui mêlent des considérations purement économiques et des décisions politiques.

Ainsi, les autorités syriennes ont récemment affirmé leur volonté d’accroître la capacité nationale de raffinage, en la multipliant par deux d’ici huit ans. Explicitement conçue comme un moyen de réduire la dépendance du pays vis-à-vis de l’étranger, une telle orientation a pour conséquence naturelle de diminuer le volume des échanges entre la Syrie et le reste du monde, sur ce poste particulier. Dès lors, la baisse significative des exportations françaises de produits pétroliers raffinés trouve une première explication.

Le renforcement de la position de la France sur le marché syrien passe donc par une diversification des échanges dans divers domaines, incluant les biens de consommation, les biens intermédiaires, voire les services. Toutefois, ceci sera d’autant plus difficile que la Syrie tend actuellement à privilégier les relations commerciales qu’elle entretient avec les pays arabes, dans le cadre de l’accord créant la Grande zone arabe de libre échange (dit GAFTA pour Greater arab free trade area). En l’absence de ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la République arabe syrienne, l’ouverture que représente l’accord GAFTA n’a en effet pas d’équivalent.

Au-delà des considérations relatives à l’état général du marché syrien, la position commerciale de la France souffre également de la dégradation des relations politiques qu’elle entretient avec ce pays. Celle-ci a fait suite, notamment, à la déclaration du Président de la République, en décembre 2007, qui liait l’état des relations franco-syriennes à l’élection d’un Président au Liban. L’échec du processus électoral libanais a conduit à limiter fortement les contacts officiels entre les deux Etats.

Les conséquences économiques d’une telle évolution ont été importantes. D’abord, elle a réduit l’appétence syrienne à l’égard des produits français, renforçant ainsi la position d’autres exportateurs, en particulier russes, ukrainiens, issus de quelques Etats européens dont l’Italie et l’Allemagne, mais également asiatiques. En second lieu, la dégradation des relations franco-syriennes a conduit les entreprises françaises à nourrir des doutes nouveaux sur l’opportunité d’une présence accrue sur le marché syrien.

L’approbation d’une convention visant à éviter la double imposition et à prévenir l’évasion fiscale n’a pas vocation à provoquer la reprise d’un dialogue entre deux Etats. Un tel texte vise simplement à offrir un cadre juridique plus global et plus stable aux relations économiques entre les deux parties. Il viendrait combler un manque, les accords franco-syriens existant dans cette matière n’ayant qu’un champ d’application limité, alors même qu’environ trois mille Français exercent une activité économique sur le territoire syrien.

II – LES STIPULATIONS DE LA CONVENTION DE 1998

Seuls trois accords comportant des dispositions fiscales ont été conclus avec la Syrie. Le premier, signé le 2 juillet 1970, concerne la coopération technique. Un accord du 16 septembre 1971, et un autre du 29 janvier 1973, comportent respectivement des stipulations en matière d’activités culturelles et de revenus provenant des transports internationaux aériens.

La volonté commune, à la France et à la Syrie, de signer une convention fiscale globale, est désormais ancienne. Les deux parties ont été proches, par deux fois, de la conclusion d’un tel texte, d’abord en 1965, puis en 1978. Reprises au cours des années 1990, les discussions ont abouti, au bout de deux tours de négociation, la signature d’un texte final le 17 juillet 1998. Suite à une demande syrienne, le texte initial a été complété par un échange de lettres signé à Damas le 16 décembre 2004. Ce dernier introduit une stipulation particulière relative aux redevances.

La convention du 17 juillet 1998 est largement conforme au modèle élaboré au sein de l’Organisation pour la coopération et le développement économique. Les rares différences sont souvent liées à la volonté de la France de voir respectées certaines particularités du droit français.

Le modèle OCDE vise à éliminer la double imposition et à prévenir l’évasion et la fraude fiscales, et repose sur un principe simple : un revenu généré sur le territoire de l’une des deux parties à l’accord ne peut, sauf exceptions explicitement énumérées, être imposé par l’autre Etat. Flexible, le modèle initial prévoit diverses méthodes permettant d’éliminer la double imposition, et recommande dans le même temps d’adopter une série de stipulations permettant d’éviter que les procédures ainsi créées ne soient utilisées à des fins d’évasion ou de fraude fiscales.

Les premiers articles sont, comme dans le modèle OCDE, voués à la définition des termes clés utilisés dans le reste de la convention. L’article premier rappelle ainsi que cette dernière concerne les résidents de l’un, l’autre ou des deux Etats, et l’article trois explicite certains termes utilisés dans le reste du texte, notamment les mots « personne », « société », « entreprise d’un Etat contractant ».
Il indique également les autorités compétentes pour l’application de la convention. L’article quatre définit la « résidence » 
(1), en précisant que cette notion s’applique à l’Etat, aux collectivités locales ainsi qu’à leurs établissements publics. Enfin, l’article cinq indique ce qu’il convient d’entendre par l’expression « établissement stable », qui inclut tous types d’infrastructures industrielles ou commerciales, et les chantiers de plus de six mois. Ne sont pas considérés comme des établissements stables les installations utilisées à des fins de stockage ou de livraison.

Le deuxième article de la convention dresse la liste des impôts auxquels cette dernière s’applique. Il s’agit, en France, de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les sociétés et de la taxe sur les salaires. Cinq impôts syriens sont mentionnés.

L’équilibre de ces cinq articles est le même que celui prévu par le modèle OCDE. L’introduction d’une référence à l’Etat, aux collectivités locales et à leurs établissements dans le champ de la notion de résidence, est une modification demandée par la France, alors que celle liée à la durée minimale d’un chantier pour être assimilé à un établissement stable (six mois au lieu de douze) résulte d’une exigence syrienne.

La plupart des principes interdisant la double imposition sont conformes au modèle OCDE. L’article 6 de la convention franco-syrienne prévoit ainsi que les revenus tirés des biens immobiliers sont imposés dans l’Etat où ces biens sont situés. L’article 7 stipule que les bénéfices d’une entreprise d’un Etat contractant exerçant ses activités sur le territoire de l’autre Etat contractant n’y sont imposables qu’à la condition que l’entreprise y exerce son activité par l’intermédiaire d’un établissement stable. L’article 8 reprend la règle d’imposition des bénéfices tirés de l’exploitation de navires et d’aéronefs par l’Etat où le siège de direction effective de l’entreprise est situé.

Ces trois articles ont été légèrement modifiés, par rapport au modèle de l’OCDE, à la demande de la France. Ainsi, l’article 6 comporte un paragraphe prévoyant d’imposer de la même manière les immeubles détenus par une personne physique et ceux qu’elle détient au travers de sociétés, permettant d’appliquer la législation française relative aux sociétés immobilières. De même, l’article 7 ne comporte pas de paragraphe, prévu par le modèle OCDE, rappelant les diverses méthodes d’imputation de bénéfices à un établissement stable en répartissant les bénéfices totaux de l’entreprise. Un tel retrait a été demandé par la France afin de respecter au mieux le principe de pleine concurrence. Enfin, l’article 8 porte mention de l’accord franco-syrien du 29 janvier 1973, qui prévoyait déjà l’imposition des bénéfices de sociétés exploitant des navires et des aéronefs dans l’Etat où se trouve leur résidence effective.

Exemple de mesures visant à éviter que la convention ne porte atteinte au principe de libre concurrence, l’article 9 concerne l’imposition des entreprises associées, soit que l’une participe à la direction de l’autre, soit que les mêmes personnes participent à la direction ou au capital de ces entreprises. Dans ce cas, il est prévu que les Etats puissent imposer les bénéfices des entreprises à partir du montant qu’ils auraient atteint si les deux entreprises avaient été indépendantes, et pas liées par des conditions particulières, rendues possibles par leur association.

Les articles 10 et 11 posent le principe d’imposition des dividendes et des intérêts d’emprunt dans l’Etat de résidence du bénéficiaire des revenus. Toutefois, l’Etat de la source peut imposer les dividendes à un taux n’excédant pas 15 %, et les intérêts dans la limite de 10 % de leur montant brut. Ces deux articles comportent des stipulations ne figurant pas dans le modèle OCDE. Ainsi, les dividendes sont imposés dans le seul Etat de résidence du bénéficiaire effectif si ce dernier est une société détenant 10 % au moins du capital de la société distributrice. De plus, les intérêts ne sont pas imposables dans l’Etat de résidence du bénéficiaire lorsqu’ils sont versés par les Etats, les collectivités locales ou leurs établissements publics.

Introduit par l’échange de lettres du 16 décembre 2004, l’article 11A précise que les redevances sont imposables dans l’Etat de résidence du bénéficiaire. Néanmoins, l’Etat de la source peut les imposer à hauteur de 15 %.

L’article 12 prévoit que les gains en capital sont imposables sur le territoire de résidence du bénéficiaire de ces gains, sauf en cas de gains liés des opérations sur des biens immobiliers, sur des valeurs mobilières en lien avec une société ou fiducie dont les actifs sont en majorité composés de biens immobiliers, sur des navires et aéronefs ou sur des biens mobiliers faisant partie de l’actif d’un établissement stable d’une société résidente d’un Etat contractant sur le territoire de l’autre. L’exception liée aux cessions d’actions ou de droits dans des sociétés à prépondérance immobilière a été introduite à la demande de la France, afin de faire respecter les particularités du droit relatif aux sociétés immobilières.

L’article 13 rappelle le principe, fixé par le modèle OCDE, d’imposition des revenus des professions indépendantes dans l’Etat de résidence du bénéficiaire.

L’article 14 fixe les règles relatives aux revenus des professions dépendantes. Là encore, il est en grande partie conforme au modèle OCDE, en ce qu’il retient l’imposition des revenus dans l’Etat de résidence du bénéficiaire, sauf pour les revenus tirés d’une activité exercée sur le territoire de l’autre Etat et qui implique une durée de séjour supérieure à 183 jours au cours de l’année considérée.

Les articles 15 à 20 concernent diverses catégories de revenus. L’article 15 rappelle que les jetons de présence sont imposés dans l’Etat de résidence de la société qui les verse. L’article 16 rappelle la règle générale selon laquelle des artistes et sportifs résidents d’un Etat contractant sont imposables dans l’autre à raison des revenus tirés d’une activité qu’ils y ont exercée. Suite à une proposition française, cette règle n’a pas été retenue dans le cas d’activités de sportifs ou d’artistes rémunérés principalement sur fonds publics. Ces derniers seront imposés par l’Etat qui les finance.

L’article 17 indique que les pensions sont imposées dans l’Etat de résidence, sauf lorsqu’elles sont versées en application de la législation sur la sécurité sociale de l’autre Etat contractant, exception introduite à la demande de la France. L’article 18 prévoit que les rémunérations publiques sont imposées par l’Etat contractant qui les verse, ce qui correspond à la pratique française en la matière. L’article 19 exonère les revenus des étudiants et des stagiaires de toute imposition. L’article 20, enfin, prévoit que tous les revenus non explicitement visés par la convention sont imposés dans l’Etat de résidence du bénéficiaire.

Elément central du dispositif juridique porté par la convention, l’article 21 indique les méthodes retenues par chaque Etat pour supprimer les doubles impositions. La France utilise alternativement les deux méthodes proposées par le modèle OCDE, en prévoyant de n’exempter que les revenus exemptés de l’impôt sur les sociétés au titre de la législation interne française, et en ouvrant aux bénéficiaires d’autres types de revenus la possibilité de bénéficier d’un crédit d’impôt, égal au montant de l’impôt payé en Syrie dans la limite du montant de l’impôt français correspondant à ces revenus. Une telle stipulation concerne les bénéfices d’entreprises, des gains en capital liés à des opérations immobilières, aux dividendes et intérêts perçus, aux revenus tirés d’une activité menée sur un navire ou un aéronef, aux jetons de présence, aux pensions et aux revenus des artistes et sportifs.

Dans les autres cas, le crédit est égal au montant de l’impôt français. Il convient de noter que, en cas d’application du mécanisme du crédit d’impôt, les revenus perçus sont pris en compte pour le calcul de l’impôt éventuellement dû en France. De plus, le paragraphe 1.ii de l’article 21 prévoit explicitement la non contrariété de la convention avec le régime fiscal français particulier, appelé bénéfice mondial consolidé, qui permet d’intégrer les bénéfices et les pertes de toutes les filiales d’un groupe pour le calcul de l’impôt sur les sociétés.

En Syrie, la double imposition est évitée en appliquant systématiquement un crédit d’impôts égal au montant de l’impôt payé en France, déduction qui ne peut être supérieure à la fraction de l’impôt syrien qui se rapporte aux revenus qui sont imposables en France. Toutefois, la Syrie se réserve le droit de tenir compte, pour le calcul de l’impôt syrien, des revenus exonérés d’impôt en Syrie au titre de la convention.

L’article 22 fixe les modalités d’application du principe de non discrimination aux diverses stipulations de la convention. Ainsi, aucune obligation particulière ne peut être supportée du fait qu’un résident d’un Etat contractant possède la nationalité de l’autre Etat contractant (2). De la même manière, les entreprises ne peuvent se voir opposées des règles fiscales plus défavorables au seul motif qu’elles sont résidentes de l’autre Etat contractant, ou détenues par des résidents de cet autre Etat.

Le principe de non discrimination trouve également à s’appliquer en matière de régimes de retraite, à la demande de la France. L’article 22 indiquant ainsi que les cotisations versées par un résident d’un Etat contractant doivent être traitées fiscalement par l’autre Etat contractant comme des cotisations payées à un régime de retraite de cet Etat.

Au titre du même article 22, les parties se réservent la possibilité d’appliquer à l’autre Etat contractant, ses collectivités locales et leurs établissements, les mêmes régimes dérogatoires pour les activités n’ayant pas de caractère industriel ou commercial. Une telle stipulation a été demandée, et obtenue, par la France.

Enfin, le dernier paragraphe de l’article 22 prévoit que le principe de non discrimination contenu dans cette convention est seul applicable, en matière fiscale, aux relations franco-syriennes, à l’exclusion de toute autre stipulation, notamment les articles 3 et 4 de la convention signée le 28 novembre 1977 entre la France et la Syrie.

L’article 23 prévoit que les autorités compétentes privilégient le recours à des procédures amiables pour régler tant les requêtes de particuliers que les difficultés d’application de la convention. La France a demandé que soit ouverte la possibilité pour un Etat de subordonner l’application à un résident des stipulations de la convention à la production par ce dernier d’un certificat de résidence précisant la valeur des revenus ou de la fortune concernés, certifié par l’autre Etat contractant.

Egalement conforme au modèle de l’OCDE, l’article 24 prévoit que les autorités compétentes procèdent aux échanges de renseignements nécessaires à l’application de la convention. Les Etats appliquent, aux informations qui leur sont transmises, les dispositions de leur législation interne concernant le caractère confidentiel de tels renseignements.

L’article 25 rappelle que la convention franco-syrienne ne saurait porter atteinte aux privilèges fiscaux des fonctionnaires diplomatiques, consulaires et internationaux. A fin d’imposition, les personnels de missions diplomatiques, de postes consulaires ou de délégations permanentes sont considérés comme résidents de l’Etat accréditant.

L’article 26 réserve l’entrée en vigueur de la présente convention au deuxième mois suivant la réception des instruments de ratification, et stipule que cette entrée en vigueur emportera l’abrogation des accords de 1970 et 1971, déjà évoqués. Enfin, l’article 27 fixe les modalités d’une éventuelle dénonciation, possible au bout de cinq années de mise en œuvre de la convention, sous réserve de préavis notifié six moins avant la fin de l’année civile en cours.

Signé le même jour que la convention, un protocole précise certains points, notamment la définition de la taxe sur les salaires et de l’expression « biens immobiliers », comprenant les options et droits semblables existant sur des biens immobiliers. De même, l’article 7 est complété, de façon à ce que le principe d’imposition des bénéfices d’une entreprise dans l’Etat d’exercice de son activité, en cas de présence d’un établissement stable, ne concerne que les revenus tirés strictement de l’activité exercée sur le territoire de cet Etat.

De plus, il y est rappelé que l’article 20 ne s’applique pas aux intérêts et aux dividendes, imposés selon les principes fixés aux articles 10 et 11. Enfin, le protocole indique qu’aucune stipulation de la convention ne saurait faire obstacle à l’application de la législation française relative à la sous-capitalisation.

CONCLUSION

La convention du 17 juillet 1998, complétée par l’échange de lettres du 16 décembre 2004, vise à renforcer la sécurité juridique des activités économiques associant la France et la Syrie. A l’heure où les échanges entre ces deux pays sont marqués par un net recul, où la position commerciale de la France en Syrie est victime d’une dégradation importante, l’approbation d’un tel accord serait sans doute un facteur bienvenu d’amélioration des liens industriels et commerciaux entre nos deux pays.

L’analyse de cette convention ne saurait toutefois s’exonérer d’une réflexion plus large sur les relations politiques existant aujourd’hui entre la France et la Syrie. D’abord, parce que leur détérioration a été reconnue comme facteur aggravant du déficit commercial que connaît la France vis-à-vis de la Syrie.

Surtout, parce que la reprise d’un dialogue franco-syrien apparaît comme une nécessité, du fait du rôle majeur joué par la République arabe syrienne dans l’évolution de la situation au Proche-Orient.

Une telle relation doit s’accompagner d’une extrême vigilance à l’égard de la politique menée par la Syrie à l’extérieur de ses frontières. Elle n’en est pas moins indispensable, si la France persiste à croire en la possibilité d’un accord de paix dans la région, et continue d’agir dans ce sens.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 2 avril 2008.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a eu lieu.

M. Jean-Jacques Guillet a rappelé que les relations avec la Syrie avaient toujours été compliquées, bien qu’elles soient importantes, et très étroites notamment dans le domaine culturel, comme le prouve l’importance de l’usage du français. Si le Parlement français fait un geste en direction de ce pays, le Parlement syrien a-t-il également prévu de ratifier la convention visant à l’élimination de la double imposition et à éviter l’évasion fiscale ?

M. François Loncle, rapporteur, a indiqué que l’entrée en vigueur des accords internationaux ne donnait pas toujours lieu à une procédure parlementaire. S’agissant de la convention franco-syrienne, le Président Bachar El-Assad a promulgué le 24 mai 2005 la loi, votée par l’Assemblée du peuple, ratifiant l'accord du 17 juillet 1998 et l'échange de lettres de 2004.

M. Jacques Myard a affirmé que le pouvoir exécutif avait sans doute raison de desserrer quelque peu les liens entre la France et la Syrie, au vu de l’attitude adoptée par cette dernière et de la nécessité de préserver une certaine stabilité au Liban. Toutefois, les députés bénéficiant d’une totale liberté de parole, l’envoi en Syrie d’une délégation parlementaire devrait être envisagée en vue d’une reprise du dialogue. Une telle décision serait conforme à la volonté française de garantir la paix dans la région. Elle irait également dans le sens des intérêts de la France, puisque l’enseignement du français dès le primaire a été réintroduit en Syrie.

Le Président Axel Poniatowski a indiqué qu’il partageait l’idée d’une reprise de dialogue avec la Syrie et a pris acte de la demande de M. Myard.

M. François Loncle, rapporteur, a précisé que le président syrien Bachar El-Assad menait des actions vigoureuses contre les extrémistes islamistes. Au-delà des relations avec les autorités, il convient surtout de raffermir les liens avec le peuple syrien, dont les valeurs ne sont pas si éloignées des nôtres.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (no 299).

*

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 299).

© Assemblée nationale

1 () Une personne est déclarée résidente si elle est imposable dans cet Etat. Si elle est résidente des deux Etats, est prise en considération la possession ou non d’un foyer d’habitation permanent. Si cette condition est remplie dans les deux Etats, cette personne sera considérée comme un résident de l’Etat avec lequel elle a les liens économiques les plus étroits.

2 () Il convient de noter que cette stipulation ne reprend pas la rédaction du modèle OCDE, qui étend le principe de non discrimination à toutes les nationalités. Une telle précision est rendue nécessaire par la jurisprudence, qui, en supprimant résidence et nationalité des sociétés, aurait interdit, au titre des conventions fiscales, de traiter différemment les sociétés quelle que soit leur Etat de résidence. Voir à ce sujet la décision de la Cour de Cassation « SA Royal » du 21 décembre 1990.