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N
° 925

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 juin 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant lapprobation de la décision du Conseil relative au système des ressources propres des communautés européennes,

par M. Roland BLUM,

Député

Voir les numéros  :

Sénat : 293, 303 et TA 82 (2007-2008)

Assemblée nationale : 894

INTRODUCTION 5

I – LA DÉCISION DU CONSEIL DU 7 JUIN 2007 AMORCE UNE RÉFORME DU SYSTÈME DES RESSOURCES PROPRES DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES 7

A – LA PROROGATION, DANS SES GRANDES LIGNES, DU SYSTÈME DES « RESSOURCES PROPRES » 7

1) La structure des recettes budgétaires de l’Union européenne 7

a) Les ressources propres dites «  traditionnelles » 8

b) La ressource TVA 9

c) La ressource RNB 9

2) L’évolution des recettes 10

a) La montée en puissance de la ressource PNB/RNB 10

b) La mise en place de mécanismes de correction budgétaire 11

B – DES AJUSTEMENTS JUSTIFIÉS PAR UN OBJECTIF D’ÉQUITÉ 13

1) La remise en cause progressive du « rabais » britannique 13

2) L’abaissement du taux d’appel de TVA 14

3) De nouvelles corrections consenties aux Etats membres fortement contributeurs nets 14

4) L’impact sur la contribution française 15

II – L’AVENIR DU FINANCEMENT DE L’UNION EUROPÉENNE 17

A – LES LIMITES DU MODE DE FINANCEMENT ACTUEL DE L’UNION EUROPÉENNE 17

1) Un système complexe qui exacerbe les égoïsmes nationaux 17

2) Les pistes de réforme proposées par le Parlement européen 19

B – LA CLAUSE DE RÉEXAMEN DES PERSPECTIVES FINANCIÈRES 20

1) Le « prix à payer » de l’accord de 2005 20

2) La consultation lancée par la Commission européenne 20

CONCLUSION 23

EXAMEN EN COMMISSION 25

ANNEXES 27

Annexe 1 - Cadre financier 2007-2013 29

Annexe 2 - Etat des ratifications au 1er juin 2008 31

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi vise à autoriser l’approbation de la décision du Conseil de l’Union européenne relative au système des ressources propres des Communautés européennes, adoptée à Luxembourg le 7 juin 2007.

Dix-huit mois avaient été nécessaires aux chefs d’Etat ou de Gouvernement de l’Union pour parvenir, en décembre 2005, à un compromis sur les « perspectives financières » 2007-2013, lequel a permis l’adoption quelques mois plus tard d’un accord interinstitutionnel entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission.

La présente décision du Conseil du 7 juin 2007,  communément appelée décision « ressources propres », représente la traduction juridique du volet « recettes » de l’accord politique de 2005 qui ouvre la voie à une remise en cause très progressive du « chèque » britannique.

Conformément à l’article 269 du traité instituant la Communauté européenne, cette décision ne peut entrer en vigueur qu’une fois adoptée par les Etats membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. Parce qu’elle contient des dispositions qui engagent les finances de l’Etat, elle est soumise au Parlement en application de l’article 53 de la Constitution.

Cette décision est la sixième du genre depuis l’instauration, en 1970, d’un mécanisme de ressources propres qui distingue les Communautés européennes des autres organisations internationales dont le financement repose sur les contributions des Etats membres. Le mécanisme des ressources propres a en effet substitué aux contributions versées par les Etats membres des recettes de nature fiscale affectées à la Communauté et exigibles de plein droit par celle-ci.

Le financement de l’Union européenne donne lieu à nombre de débats et d’interrogations, au même titre que le niveau et la structure des dépenses communautaires. La décision du Conseil du 7 juin 2007 amorce une réforme du système des ressources propres, sans pour autant bouleverser l’équilibre de la décision précédente adoptée en 2000. Le rendez-vous fixé en 2008-2009 dans le cadre de la clause de réexamen du budget européen devra permettre de poser les bases d’une réforme plus ambitieuse du système de financement de l’Union européenne.

I – LA DÉCISION DU CONSEIL DU 7 JUIN 2007 AMORCE UNE RÉFORME DU SYSTÈME DES RESSOURCES PROPRES
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

L’article 269 du Traité instituant la Communauté européenne prévoit que le budget européen « est, sans préjudice des autres recettes, intégralement financé par des ressources propres ». Si le financement des Communautés européennes a initialement reposé sur un système de contributions acquittées par chaque État membre, un régime de ressources propres a été mis en place par la première décision du Conseil dite « ressources propres », adoptée à l’unanimité le 21 avril 1970.

Depuis cette date, les contributions des Etats membres ont été remplacées par des « ressources propres » qui correspondent à un transfert obligatoire, automatique et définitif de ressources d'origine fiscale vers le budget communautaire. Néanmoins, le terme de « ressources propres » demeure impropre dès lors que ce sont bien les Etats membres qui, en réalité, continuent de financer l’Union.

A – La prorogation, dans ses grandes lignes, du système
des « ressources propres »

La nouvelle décision « ressources propres » du Conseil du 7 juin 2007 traduit en termes juridiques le volet « recettes » de l’accord politique intervenu en décembre 2005 sur les perspectives financières 2007-2013 (1).

1) La structure des recettes budgétaires de l’Union européenne

La nouvelle décision du Conseil s’inscrit dans le prolongement de la précédente décision « ressources propres » adoptée en 2000, dont elle reprend les grands principes. Le système de financement du budget communautaire reste en effet composé des ressources propres traditionnelles – droits de douane et prélèvements agricoles – auxquelles s’ajoutent la ressource TVA et la ressource RNB.

Comme précédemment, l’addition de ces ressources demeure plafonnée à 1,24 % du revenu national brut de l’Union en crédits de paiement et à 1,31 % en crédits d’engagement.

À l’origine des « ressources propres »

La première Communauté européenne, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), créée le 23 juillet 1952, était financée par un véritable système de ressources propres, fondé sur un prélèvement opéré sur chaque tonne d’acier produite, payable directement au budget de la CECA par les sociétés fabriquant du charbon et de l’acier.

Selon le traité de Rome du 25 mars 1957, la Communauté économique européenne ne devait être financée par des contributions nationales que pendant une période de transition, laquelle devait être suivie par le passage à un système de ressources propres. Cette transition est intervenue les 21 et 22 avril 1970, lorsque le Conseil européen de Luxembourg a pris la décision de mettre un terme aux contributions nationales en introduisant un nouveau système de financement fondé sur de véritables ressources propres – les prélèvements agricoles et les droits de douane –, complétées par une troisième ressource assise sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Une quatrième ressource complémentaire, assise sur le PNB, sera créée en 1988.

a) Les ressources propres dites «  traditionnelles »

Les ressources propres dites « traditionnelles » (RPT), sont composées de prélèvements agricoles et de droits de douane perçus dans le cadre des politiques communautaires. Les États membres en assurent le recouvrement et en reversent le montant, en en défalquant 25% correspondant aux frais de perception. En effet, en l’absence d’administration fiscale communautaire, les ressources propres traditionnelles sont perçues par les administrations des Etats membres.

Les droits agricoles sont perçus sur les importations de produits agricoles relevant d’une organisation commune de marché et comprennent les cotisations sucre et isoglucose, prévues dans le cadre de l’organisation commune de marché « sucre ».

Les droits de douane proviennent de l’application du tarif douanier commun à la valeur en douane des marchandises importées depuis des pays tiers (2).

b) La ressource TVA

La ressource TVA a été créée par la décision du Conseil du 21 avril 1970, car les ressources propres traditionnelles ne suffisaient plus pour financer le budget communautaire. Cette décision avait initialement limité le taux d'appel maximal de la TVA à 1% d'une assiette déterminée. La deuxième décision sur les ressources propres du 7 mai 1985 a toutefois augmenté le taux à 1,4% à partir du 1er janvier 1986, coïncidant avec l'élargissement des Communautés européennes à l’Espagne et au Portugal. La quatrième décision sur les ressources propres du 31 octobre 1994 a cependant prévu, pour des raisons d’équité, le retour progressif à la limite à 1% entre 1995 et 1999. La décision de 2000 sur les ressources propres l’a ensuite ramené aux taux d'appel maximal à 0,5%. La nouvelle décision du 7 juin 2007 l’abaisse à 0,30 %.

c) La ressource RNB

Le Conseil a décidé en 1988 de la création d'une quatrième ressource propre basée à l'époque sur le produit national brut (PNB) et chargée de remplacer la TVA en tant que ressource d'équilibre du budget.

Le système de financement antérieur à la réforme de 1988, dont l’élément prédominant était la ressource TVA, était en effet jugé doublement inéquitable :

– d’abord, parce que la ressource TVA désavantage les pays les moins riches. En effet, dans les Etats membres les moins prospères, la part de la consommation dans le PNB est plus importante que dans les Etats les plus riches, ce qui se traduit par une base TVA dans le PNB comparativement plus élevée. A l’inverse, les pays exportateurs nets et à taux d’épargne élevé sont favorisés ;

– ensuite, parce que la prédominance de la ressource TVA a été, avec la répartition de la dépense agricole, à l’origine des déséquilibres budgétaires constatés au détriment du Royaume-Uni.

La création d’une nouvelle ressource PNB a permis de faire reposer le financement du budget sur une assiette reflétant mieux la richesse effective des Etats membres. Le remplacement progressif de la ressource TVA par la ressource PNB a conduit mécaniquement à une plus grande équité des contributions brutes des Etats membres.

La décision du 24 juin 1988 a également fixé un plafond des ressources propres qui ne doivent pas dépasser un pourcentage du PNB, établi à 1,14 % en 1988 puis à 1,27 % en 2000. La notion de produit national brut (PNB) a été remplacée par celle de revenu national brut (RNB). Dans la nouvelle décision, le PNB est donc remplacé par le RNB (3) aux fins des ressources propres.

Afin de maintenir inchangé le montant des ressources financières mises à la disposition des Communautés, le plafond des ressources propres en tant que pourcentage du RNB de l'UE a été adapté en conséquence. Le nouveau plafond équivaut à 1,24 % du RNB de l'Union.

La ressource RNB est obtenue par application d'un taux à fixer chaque année dans le cadre de la procédure budgétaire à une assiette représentant la somme des revenus nationaux bruts au prix du marché. La ressource est calculée par différence entre les dépenses et la somme de toutes les autres ressources budgétaires. Sa charge est répartie entre les États membres au prorata de leur part dans le PNB communautaire.

La ressource RNB ayant pour fonction d'équilibrer le budget communautaire – ce qui était avant 1988 la fonction de la ressource TVA –, son évolution dépend directement du niveau du total des crédits pour paiements ainsi que du rendement de chacune des autres ressources propres. La ressource RNB s'accroît progressivement du fait de la tendance à la hausse des dépenses communautaires et de la diminution relative des ressources propres agricoles et des droits de douane.

2) L’évolution des recettes

Le système des ressources propres a considérablement évolué depuis le premier cadre financier adopté en 1988. Deux faits marquants caractérisent cette évolution : d’une part, la prépondérance prise au fil du temps par la ressources PNB/RNB ; d’autre part, la mise en place de mécanismes de correction budgétaire imaginés au milieu des années 80.

a) La montée en puissance de la ressource PNB/RNB

La diminution de la part des ressources propres dites traditionnelles s’explique par de moindres recettes provenant des droits agricoles et des droits de douane, tandis que les recettes TVA étaient affectées négativement par la faible croissance économique qui caractérisait les années 70 et 80. Au même moment, l’approfondissement des politiques communes et le lancement de nouvelles politiques, la difficile maîtrise des dépenses liées à la politique agricole commune (PAC) et l'augmentation des dépenses associées aux deux élargissements de 1986 (Espagne et Portugal) ont entraîné une insuffisance très nette des ressources. Ceci explique la décision prise en 1988 de recourir à une ressource complémentaire fondée sur le PNB.

À cette date, lors de l’entrée en vigueur du premier cadre financier pluriannuel, la ressource RNB représentait moins de 11 % du financement communautaire, à comparer aux 28 % provenant des droits de douane et des prélèvements agricoles et aux 57 % provenant de la ressource TVA. Or au terme du cadre budgétaire pluriannuel 2007-2013, la ressource RNB représentera 74 % du financement communautaire, à comparer aux 13 % provenant des droits de douane et des prélèvements agricoles et aux 12 % de la ressource TVA. La principale source de financement du budget communautaire correspond ainsi à la contribution fondée sur le revenu national brut des Etats membres.

Evolution de l’origine des ressources propres

(1971-2006)

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

b) La mise en place de mécanismes de correction budgétaire

La recherche d’une répartition équitable de la charge budgétaire communautaire est à la source de débats récurrents sur le niveau de « contribution nette » acceptable par les Etats membres et qui correspond à la différence entre leur contribution brute et les dépenses dont ils bénéficient, notamment au regard de leur richesse nationale.

Si la contribution des États membres se fait pour une large part au prorata de leur PNB, la répartition des dépenses communautaires dépend des caractéristiques de chaque pays et de son éligibilité aux différents fonds. C’est ainsi que certains Etats – les plus riches – sont des contributeurs nets, tandis que d’autres sont bénéficiaires nets. Il devient alors fréquent qu’un pays mesure l’intérêt qu’il porte à telle ou telle politique commune en fonction de son « taux de retour » sur cette politique.

C’est sur la base de ce raisonnement que le Royaume-Uni a obtenu de ses partenaires, sous présidence française lors du Conseil européen de Fontainebleau de 1984, de se voir reverser chaque année un tiers de sa contribution budgétaire brute théorique. Il faut rappeler que le niveau de vie britannique était dans les années 70 inférieur d’environ 30 % à celui de la moyenne de la Communauté ; et en 1984, il était encore de 10 % inférieur. À cette époque, l’essentiel du solde net négatif britannique avait pour origine la politique agricole commune, qui représentait 70 % des dépenses du budget communautaire. Or le Royaume-Uni bénéficiait très peu de cette politique et en contestait fortement le bien fondé.

Par souci d’équité, les chefs d’Etat ou de gouvernement ont alors décidé d’apporter des ajustements au système de financement de l’Union à travers ce qui est devenu le « chèque britannique ». La charge représentée par la correction britannique est répartie entre les autres Etats membres au prorata de leur part dans le RNB total de l’Union. Toutefois, pour tenir compte du niveau de contribution nette de certains Etats membres, le financement de la compensation accordée au Royaume-Uni a été réparti de manière différenciée.

La France est le premier contributeur à la correction britannique. Notre pays assume 1,5 milliard d’euros sur les 5,8 milliards d’euros que représente en 2008 le rabais britannique. Cela représente 26 % du montant total et 8 % de notre contribution au budget de l’Union.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

B – Des ajustements justifiés par un objectif d’équité

La décision du 7 juin 2007 comporte deux changements principaux : l’un concerne la révision des modalités de calcul de la correction britannique, et l’autre est relatif à l’abaissement du taux d’appel de TVA.

1) La remise en cause progressive du « rabais » britannique

Si en 1984, le Royaume-Uni enregistrait le solde net négatif exprimé en pourcentage du PNB de loin le plus élevé au sein de la Communauté, sa situation est aujourd’hui sensiblement différente. Le Royaume-Uni est en effet devenu l’un des pays les plus riches de l’Union avec un PNB par habitant mesuré en parité de pouvoir d’achat de 120 (4) contre 122 pour les Pays-Bas, 116 pour la Suède, 114 pour la France et 109 pour l’Allemagne.

Le niveau élevé de la contribution britannique en 1984 provenait pour une large part d’une assiette TVA supérieure en pourcentage du PNB aux autres pays, à l’époque où la ressource TVA constituait la première source de financement de l’Union européenne. Mais avec l’introduction de la ressource PNB en 1988 et sa montée en puissance, ce problème s’est fortement atténué (5).

Devant la pression de ses partenaires, le Royaume-Uni a ainsi dû se résigner à accepter la remise en cause, du moins partielle, du « rabais » dont il bénéficie depuis plus de vingt ans. La présente décision « ressources propres » met ainsi fin au paradoxe selon lequel le Royaume-Uni, fervent promoteur de l’élargissement et qui figure parmi les États les plus prospères de l’Union, est l’un des États membres qui contribue le moins à son financement.

Le dispositif prévu par la décision « ressources propres » du 7 juin 2007 est le suivant :

– Le mécanisme de correction en faveur du Royaume-Uni est maintenu dans son principe mais ses modalités d’application sont sensiblement revues. Il est ainsi prévu qu’à compter de 2009, le Royaume-Uni prendra sa part aux coûts liés à l’élargissement, à l’exception toutefois des dépenses agricoles de marché. En d’autres termes, cela signifie que le calcul de la correction en faveur du Royaume-Uni se trouve ajusté par l’exclusion progressive des dépenses réparties dans les Etats membres ayant adhéré à l’Union depuis le 1er mai 2004, sauf pour les paiements agricoles directs et les dépenses liées au marché ainsi que la partie des dépenses de développement rural provenant de la section « Garantie » du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA).

– La contribution supplémentaire qui en résulte ne devra toutefois pas dépasser 10,5 milliards d’euros (6) au cours de la période 2007-2013. Au cas où un nouvel élargissement interviendrait avant 2013, ce plafond de 10,5 milliards d’euros serait néanmoins « ajusté à la hausse en conséquence ».

– la répartition de la charge financière de la correction britannique sera assumée par les autres Etats membres. Toutefois, dans un souci d’équité, cette répartition sera ajustée de façon à limiter la contribution financière de certains pays contributeurs nets. Les modalités de financement de la correction britannique restent inchangées par rapport à ce qu’elles étaient jusqu’à présent.  C’est ainsi que l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et la Suède ne paient qu’un quart de leur contribution théorique fondée sur leur part relative dans le RNB communautaire ; les autres Etats membres prennent à leur charge, au prorata de leur RNB, le financement du reste de la correction britannique.

2) L’abaissement du taux d’appel de TVA

La diminution corrélative de la part « ressource TVA » dans le financement du budget de l’Union procède de l’idée qu’elle pénalise les Etats membres moins prospères, dont le niveau de consommation (donc de TVA) tendrait à représenter une part plus élevée du revenu national.

La présente décision du Conseil fait passer de 0,50 % à 0,30 % le taux d’appel de TVA. Cette modification correspond à la différence constatée entre le taux maximal de 0,50 % et la valeur moyenne du taux gelé appliquée dans le passé, de 0,20 %.

Le financement du « manque à gagner » au titre de la ressource propre TVA s’opère au travers de la ressource RNB, ce qui a toutefois pour effet d’accroître mécaniquement le volume du chèque britannique, le Royaume-Uni contribuant davantage au titre de la ressource RNB.

3) De nouvelles corrections consenties aux Etats membres fortement contributeurs nets

Le mécanisme de correction budgétaire ne concerne pas seulement le Royaume-Uni. Au titre de l’équité, la présente décision du Conseil prévoit en effet, pour la période 2007-2013, l’existence d’un abattement annuel de 605 millions d’euros de la contribution des Pays-Bas et de 150 millions d’euros de la contribution de la Suède.

Un régime dérogatoire est également prévu pour quatre pays s’agissant du taux d’appel de la TVA au bénéfice de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Suède et de l’Autriche. Ainsi, au lieu du taux de 0,30 % en vigueur pour les autres Etats membres, un taux réduit de 0,15 % s’appliquera à l’Allemagne (soit une économie de 7,4 milliards d’euros sur la période 2007-2013), de 0,10 % aux Pays-Bas (2,7 milliards d’euros de gain) et à la Suède (1,4 milliard d’euros de gain) et de 0,225 % à l’Autriche (200 millions d’euros de gain).

4) L’impact sur la contribution française

L’application de la nouvelle décision « ressources propres » du 7 juin 2007 se traduit par une contribution française de 135,5 milliards d’euros sur la période 2007-2013.

Il convient de rappeler que, compte tenu du niveau escompté de « retours » sur les différentes politiques de l’Union, le solde net de la France s’est établi en 2007 à – 0,37 % de son RNB.

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

Source : « jaune » annexé au projet de loi de finances pour 2008

II - L’AVENIR DU FINANCEMENT DE L’UNION EUROPÉENNE

Le système des ressources propres fait l’objet de critiques récurrentes. Mais si un consensus paraît se dégager pour dénoncer les limites du mode actuel de financement de l’Union, aucun accord ne se semble en revanche se dessiner, à ce stade, sur un modèle alternatif.

A – Les limites du mode de financement actuel de l’Union européenne

L’évolution du système des ressources propres se caractérise par une complexité croissante qui nuit à la transparence et à la compréhension. Dans une résolution adoptée au printemps 2007, le Parlement européen a souligné les lacunes du mécanisme actuel de financement et formulé des recommandations en vue d’une réforme progressive du système des ressources propres.

1) Un système complexe qui exacerbe les égoïsmes nationaux

Le système actuel des ressources propres de l’Union fait l’objet de critiques récurrentes :

– Les ressources « propres » n’en sont en réalité pas, dès lors que le budget communautaire est essentiellement alimenté par les contributions des Etats membres. Comme le souligne le sénateur Denis Badré dans son rapport (7) sur l’autorisation d’approbation de la présente décision « ressources propres », ceci accrédite auprès des opinions publiques nationales l'idée que l’Union dispose d'un « droit de tirage » sur la richesse nationale. Cela conduit, par ailleurs, à faire voter les recettes et les dépenses par deux autorités politiques différentes, ce qui peut paraître singulier en termes de « démocratie budgétaire ».

– Le calcul des soldes nets conduit à opposer les pays contributeurs au budget communautaire à ceux qui en sont les bénéficiaires. Ceci a pour effet d’exacerber les égoïsmes nationaux et d’encourager les Etats membres à privilégier le financement des politiques dont ils profitent directement. Les Etats membres ont en effet souvent tendance à juger les politiques et les initiatives communautaires en termes de retour sur investissement par rapport à leur contribution nationale. Cette approche exclusivement comptable du « tiroir-caisse » est très partielle et sous-entend, à tort, que les bénéfices de la construction européenne sont uniquement budgétaires.

– Depuis l’accord de Fontainebleau de 1984 selon lequel tout Etat membre supportant une charge budgétaire excessive au regard de sa prospérité relative est susceptible de bénéficier, le moment venu, d’une correction, plusieurs mécanismes de correction permanents ou temporaires ont été mis en place au niveau des recettes. Le plus connu – et le plus contesté – est celui du « rabais britannique », mais d’autres dispositifs concernent l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche et la Suède. La complexité des méthodes de calcul nuit à la lisibilité et à la transparence d’un budget européen devenu incompréhensible pour les citoyens.

2) Les pistes de réforme proposées par le Parlement européen

Le Parlement européen a adopté le 29 mars 2007 une résolution (8) sur l’avenir des ressources propres de l’Union, par laquelle il souligne le caractère aujourd’hui opaque et inégalitaire du budget européen.

A l’issue d’une réflexion à laquelle ils ont souhaité associer les parlements nationaux, les députés européens ont proposé une réforme en deux temps du système des ressources propres.

Il s’agirait tout d’abord d’améliorer transitoirement, jusqu’à la fin des perspectives financières 2007-2013 en vigueur, le système actuel à travers la suppression de la ressource TVA et du rabais britannique au profit d’une seule ressource RNB. Selon le Parlement européen, cela présenterait l’avantage de la simplicité et de la transparence et constituerait une étape possible vers l’établissement ultérieur d’un véritable système de ressources propres de l’Union. La ressource RNB est peu visible pour les citoyens mais elle est plus équitable que les autres dans la mesure où elle lie les contributions au niveau de prospérité général des Etats membres et qu’elle constitue une expression de solidarité entre eux.

Ce ne serait alors que dans un second temps, à partir de 2014, qu’un nouveau système de ressources propres devrait être envisagé et se fonder sur les principes suivants :

– la souveraineté fiscale des Etats membres ;

– la neutralité fiscale, qui signifie que la réforme ne doit pas alourdir les dépenses publiques globales ni la charge fiscale qui pèse sur les citoyens ;

– le maintien de l’ordre de grandeur du budget européen et de son plafond actuellement fixé à 1,24 % du RNB communautaire ;

– la progressivité de la mise en oeuvre d’un nouveau système à partir de 2014 ;

– l’établissement d’un lien politique clair entre une réforme des recettes et une réforme des dépenses.

Le Parlement européen ne propose pas, à ce stade, la création d’un impôt européen. Même à pression fiscale constante, les députés européens constatent qu’il n’existe pas de consensus sur l’instauration d’un tel impôt qui ne pourrait être créé qu’à l’unanimité.

B – La clause de réexamen des perspectives financières

« L’Union n’a pas seulement besoin de nouvelles règles. Elle a besoin d’un minimum de moyens financiers. L’accord obtenu en décembre 2005 sur le budget européen pour les années 2007-2013 prévoit une clause de rendez-vous en 2008-2009. Nous devons saisir cette occasion pour procéder à une réforme ambitieuse du budget européen. »

Nicolas Sarkozy, septembre 2006 (9).

1) Le « prix à payer » de l’accord de 2005

L’accord du Conseil européen de décembre 2005 sur les perspectives financières 2007-2013 n’a pu être obtenu qu’au prix de l’insertion d’une « clause de réexamen », qui fut considérée à l’époque par la Présidence britannique de l’Union comme le point d’équilibre de l’accord.

Cette clause de réexamen est ainsi formulée dans les conclusions du Conseil européen de décembre 2005 : «  L’Union devrait réévaluer l’ensemble du cadre financier, pour ce qui concerne tant les recettes que les dépenses, afin de poursuivre et de renforcer la modernisation de manière continue. Le Conseil européen invite la Commission à entreprendre un réexamen complet et global, couvrant tous les aspects des dépenses de l’Union européenne, y compris la PAC, ainsi que des ressources, y compris la compensation en faveur du Royaume-Uni, et à en faire rapport en 2008-2009. Se fondant sur ce réexamen, le Conseil européen pourra prendre des décisions sur toutes les questions qui y sont traitées. Ce réexamen sera également pris en considération dans le cadre des travaux préparatoires sur les prochaines perspectives financières ». Cette clause de réexamen ne saurait toutefois en aucune manière être assimilée à une négociation sur un nouveau cadre financier pluriannuel.

2) La consultation lancée par la Commission européenne

Dans le prolongement des conclusions du Conseil européen, la Commission européenne a publié le 12 septembre 2007 un « document de consultation en vue du réexamen du budget 2008/2009 (10) », intitulé : « réformer le budget, changer l’Europe ». La période de consultation, qui devait initialement prendre fin le 15 avril dernier, a été prolongée jusqu’au 15 juin 2008. La Commission justifie cette prolongation par l’intérêt suscité par la consultation mais certains font valoir qu’il pourrait surtout s’agir de retarder le début des discussions entre les Etats membres afin d’interférer le moins possible avec le processus en cours de ratification du traité de Lisbonne.

Une partie du document de consultation est consacrée à l’avenir du système des ressources propres de l’Union européenne. La Commission souligne que les sources et mécanismes de financement du budget communautaire doivent être appréciés au regard de principes tels que l’efficacité économique, l’équité, la stabilité, la visibilité, la simplicité, la rentabilité administrative, l’autonomie financière et leur caractère suffisant. Or selon la Commission, aucune des sources de financement du budget communautaire ne satisfait à tous ces principes. Elle en conclut que la composition globale du système de ressources propres de l’Union sera un important élément à prendre en considération dans le cadre du réexamen des perspectives financières. La Commission pose notamment la question de la mobilisation de ressources supplémentaires pour financer le budget européen. La question est également clairement posée de savoir si la correction britannique et les divers mécanismes compensatoires actuellement en vigueur demeurent justifiés.

Dans leur contribution à cette consultation publique, les autorités françaises plaident en faveur de ressources propres plus justes, plus équitables et plus lisibles. La France estime que l’Union doit maintenir un financement reposant, au moins en partie, sur des ressources propres liées aux politiques communes. Si le principe d’une ressource assise sur le PNB doit également être conservé, la question se pose en revanche de la pertinence de la ressource TVA, en raison notamment de la complexité croissante des écrêtements et rabais successifs qui lui sont appliqués. Enfin, la contribution des autorités françaises souligne la nécessité d’ouvrir une véritable réflexion sur de nouveaux mécanismes de financements propres pour l’Union et de sortir de la logique actuelle des rabais et corrections.

Quel rôle jouera la présidence française de l’Union dans le réexamen du cadre financier pluriannuel ? Tout dépendra de la date à laquelle la Commission européenne publiera son rapport sur le résultat de la consultation publique, pour le moment envisagé pour « fin 2008 / début 2009 ». Comme le souligne une récente étude du centre de recherche « Notre Europe (11) », ce manque de précision ne doit rien au hasard, la Commission ayant indiqué à diverses reprises « qu’il était impossible de déterminer précisément quand serait publié le rapport étant donné que ce dernier dépendait de l’issue de la consultation, mais aussi de l’état d’avancement du processus de ratification du traité de Lisbonne ».

L’épée de Damoclès de la ratification du traité de Lisbonne ne devrait pas conduire à éluder les vraies questions telles que le niveau des ressources affectées au budget européen ou l’opportunité de s’engager, à terme, sur la voie de la création, à pression fiscale constante, d’un impôt européen (12).

CONCLUSION

A la date du 1er juin 2008, treize Etats membres avaient notifié au Conseil l’achèvement de leur procédure de ratification. Ces pays sont la Lettonie, la Slovénie, l’Autriche, Chypre, l’Espagne, la Finlande, le Danemark, l’Irlande, l’Italie, Malte, le Royaume-Uni, la République tchèque et la Slovaquie.

L’entrée en vigueur de la décision « ressources propres » du Conseil du 7 juin 2007 est conditionnée à adoption à l’unanimité des Etats membres, selon leurs règles constitutionnelles respectives. Elle s’appliquera alors avec un effet rétroactif au 1er janvier 2007, date d’entrée en vigueur des perspectives financières 2007-2013.

Considérant que cette décision du Conseil oriente le financement de l’Union la voie d’une plus grande équité, votre Rapporteur est favorable à l’adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 4 juin 2008.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a eu lieu.

Le Président Axel Poniatowski a souligné que le financement de l’Union était un sujet à la fois très important et particulièrement complexe. Evoquant le « chèque britannique » d’un montant de 5,8 milliards d’euros en 2008, il a souhaitait connaître la raison pour laquelle d’autres Etats bénéficient également d’un rabais forfaitaire sur leur contribution budgétaire.

Le rapporteur a expliqué que c’est par souci d’équité que les pays les plus fortement contributeurs nets que sont l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et la Suède bénéficiaient d’une réduction de leur contribution.

M. François Rochebloine a demandé des précisions sur la remise en cause du rabais britannique.

Le rapporteur a indiqué que le Royaume-Uni prendra progressivement en charge les coûts liés à l’élargissement, à l’exception toutefois des dépenses agricoles de marché. La contribution supplémentaire britannique qui en résulte est toutefois plafonnée à 10,5 milliards d’euros sur la période 2007-2013.

M. Marc Dolez a déclaré que l’exigence de l’unanimité pour l’entrée en vigueur de la décision « ressources propres » conférait un droit de veto à chaque Etats membre, et en particulier à celui concerné par une réduction de son rabais.

Le rapporteur a rappelé que la présente décision « ressources propres » résultait d’un accord politique conclu en décembre 2005 à l’unanimité des Etats membres. Il a indiqué que le Royaume-Uni faisait partie des treize Etats qui ont achevé leur procédure de ratification.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi (no 894).

*

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de figure en annexe au projet de loi (n° 894).

ANNEXES

Annexe 1

Cadre financier 2007-2013

Annexe 2

Etat des ratifications au 1er juin 2008

Pays

Notification



Autriche

19/12/2007

Belgique

 

Bulgarie

 

Chypre

11/01/2008

République tchèque

25/02/2008

Allemagne

 

Danemark

14/02/2008

Estonie

 

Espagne

24/01/2008

France

 

Royaume-Uni

25/02/2008

Grèce

 

Hongrie

 

Italie

22/02/2008

Irlande

08/04/2008

Lituanie

 

Luxembourg

 

Lettonie

05/11/2007

Malte

29/05/2008

Pays-Bas

 

Portugal

 

Pologne

 

Roumanie

 

Suède

 

Finlande

24/01/2008

Slovénie

27/11/2007

Slovaquie

02/04/2008

© Assemblée nationale

1 () Le tableau récapitulatif des perspectives financières 2007-2013 figure en annexe du présent rapport.

2 () Le tarif douanier est devenu commun en 1968, deux ans plus tôt que prévu initialement. Les droits de douane avaient été inscrits dans le traité de Rome en tant que ressource à attribuer en premier à la Communauté économique européenne (CEE) pour le financement des dépenses. Les droits de douane de la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) sont intégrés à cette ressource depuis 1988.

3 () Le RNB se différencie du PNB en ce qu’il intègre le revenu sur les investissements nets réalisés à l’étranger.

4 () Par rapport à une moyenne de l’UE 25 établie à 100 sur la période 2001-2003.

5 () L’assiette TVA du Royaume-Uni représente toutefois encore 18 % de l’assiette communautaire alors que son PNB ne représente que 17 % du PNB de l’Union.

6 () Aux prix de 2004.

7 () Rapport du Sénat n°303 (Commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation) sur le projet de loi autorisant l’approbation de la décision du Conseil relative au système des ressources propres des Communautés européennes, 29 avril 2008.

8 () Résolution du Parlement européen sur l’avenir des ressources propres de l’Union européenne (2006/2205(INI)) du 29 mars 2007.

9 () Extrait d’un discours prononcé à Bruxelles le 8 septembre 2006 devant les Amis de l'Europe et la Fondation Robert Schuman.

10 () SEC (2007) 1188 final du 12 septembre 2007.

11 () Eulalia Rubio, « Le réexamen du budget de l’UE : poser les questions dérangeantes » , Notre Europe, Policy paper n°32

12 () Voir sur cette question le rapport publié par l’Institut Montaigne en octobre 2003, intitulé « Vers un impôt européen ? »