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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 2517

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 mai 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE, SUR LE PROJET DE LOI , ADOPTÉ PAR LE SÉNAT (N° 951), portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale,

PAR M. Thierry MARIANI,

Député.

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Voir les numéros :

Sénat : 308, 326 et T.A. 107 (2009-2010).

Assemblée nationale : 1828.

INTRODUCTION 7

I. LE NÉCESSAIRE PROLONGEMENT DE L’ADAPTATION DE NOTRE LÉGISLATION PÉNALE À L’INSTAURATION DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE 10

A. L’INSTAURATION DE LA CPI REND NÉCESSAIRE L’ADAPTATION DE NOTRE LÉGISLATION PÉNALE 10

1. La mise en place de la Cour pénale internationale… 10

a) Une compétence limitée aux crimes les plus graves touchant l’ensemble de la communauté internationale 10

b) Le principe de complémentarité 12

c) Un premier bilan de l’activité de la Cour : un symbole ou un luxe ? 12

2. … rend nécessaire l’adaptation des législations nationales 13

B. SI LA COOPÉRATION DE LA FRANCE AVEC LA CPI EST ASSURÉE DEPUIS 2002, L’ADAPTATION DE NOTRE DROIT PÉNAL RESTE À ACCOMPLIR 14

1. La loi du 26 février 2002 a mis en place une procédure de coopération judiciaire entre les autorités françaises et la CPI 14

a) L’exécution des demandes d’entraide judiciaire et les conditions de l’arrestation et de la remise des personnes réclamées par la Cour 14

b) Les conditions de l’exécution des peines et des mesures de réparation prononcées par la Cour 16

2. Les adaptations de fond de notre droit pénal restent à effectuer 16

a) L’absence de définition des crimes de guerre en droit interne 17

b) Des qualifications en droit pénal français qui ne correspondent que partiellement aux définitions contenues dans le Statut de Rome 17

c) La question du respect des stipulations de l’article 70 du Statut de Rome relatif aux atteintes à l’administration de la justice commises au préjudice de la CPI par un ressortissant français ou sur le territoire national 17

II. LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI ONT ÉTÉ CONFORTÉES ET ENRICHIES PAR LE SÉNAT 18

A. LE PROJET DE LOI PERMET LA MISE EN PLACE D’INSTRUMENTS DE RÉPRESSION DES CRIMES INTERNATIONAUX 19

1. Des incriminations créées, précisées ou complétées 19

2. Les conditions de mise en cause de la responsabilité pénale 20

3. Des délais de prescription allongés 20

B. LE PROJET DE LOI A ÉTÉ PRÉCISÉ ET ENRICHI PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE 21

1. D’utiles précisions ont été apportées s’agissant des crimes de guerre 21

2. Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale ont été rapprochées des prescriptions du Statut de Rome 21

3. Une réflexion approfondie sur la question de la compétence universelle a conduit le Sénat à instaurer une compétence extraterritoriale encadrée des juridictions françaises pour les crimes relevant de la compétence de la CPI 22

C. L’AVIS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE NOTRE ASSEMBLÉE 26

DISCUSSION GÉNÉRALE 27

EXAMEN DES ARTICLES 42

Chapitre I er - Dispositions modifiant le code pénal 42

Avant l’article 1er 42

Article 1er (art. 211-2 [nouveau] du code pénal) : Incrimination de l’incitation publique et directe à commettre un génocide 42

Article 2 (art. 212-1 du code pénal) : Définition élargie des autres crimes contre l’humanité 45

Après l’article 2 50

Article 3 (art. 213-4-1 [nouveau] du code pénal) : Responsabilité pénale du supérieur hiérarchique dans le cas d’un crime contre l’humanité commis par un subordonné 51

Article 4 (art. 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal) : Atteintes à l’administration de la justice de la CPI : aggravation des peines encourues par les auteurs de violences contre un membre ou un agent de la Cour ou un témoin ou une victime ayant déposé devant elle 54

Article 5 (art 434-4-2 [nouveau] du code pénal) : Atteintes à l’administration de la justice de la CPI : entraves à la saisine de la justice 56

Article 6 (art. 434-23-1 [nouveau] du code pénal) : Atteintes à l’administration de la justice de la CPI : entraves à l’exercice de la justice 56

Article 7 (art. 461-1 à 461-31 [nouveaux] et 462-1 à 462-11 [nouveaux] du code pénal) : Définition des crimes et délits de guerre 57

Livre IV bis - Des crimes et des délits de guerre 58

Chapitre I er - Des différents crimes et délits de guerre 58

Section 1 - De la définition des crimes et délits de guerre 58

Article 461-1 [nouveau] du code pénal : Définition des infractions commises pendant un conflit armé 58

Section 2 - Des crimes et délits de guerre communs aux conflits armés internationaux et non internationaux 59

Sous-section 1 - Des atteintes à la personne humaine perpétrées lors d’un conflit armé international ou non international 60

Paragraphe 1 - Des atteintes à la vie et à l’intégrité physique ou psychique 60

Article 461-2 à 461-5 [nouveaux] du code pénal : Atteintes à la vie et à l’intégrité des personnes 60

Paragraphe 2 - Des atteintes à la liberté individuelle 62

Article 461-6 [nouveau] du code pénal : Atteintes à la liberté individuelle de personnes protégées par le droit international des conflits armés 62

Paragraphe 3 - Des atteintes aux droits des mineurs dans les conflits armés 63

Article 461-7 [nouveau] du code pénal : Participation des mineurs au conflit armé 63

Sous-section 2 - Des crimes et délits de guerre liés à la conduite des hostilités 64

Paragraphe 1 -Des moyens et méthodes de combat prohibés 64

Article 461-8 à 461-14 [nouveaux] du code pénal : Méthodes de combat interdites 64

Paragraphe 2 - Des atteintes aux biens dans les conflits armés 66

Articles 461-15 à 461-17 [nouveaux] du code pénal : Atteintes aux biens 66

Sous-section 3 - Des groupements formés ou des ententes établies en vue de préparer des crimes ou des délits de guerre 67

Article 461-18 [nouveau] du code pénal : Groupements formés ou ententes établies en vue de préparer des crimes ou des délits de guerre 67

Section 3 - Des crimes et des délits de guerre propres aux conflits armés internationaux 67

Sous-section 1 - Des atteintes à la liberté et aux droits des personnes dans les conflits armés internationaux 68

Articles 461-19 à 461-22 [nouveaux] du code pénal : Atteintes aux droits des personnes 68

Sous-section 2 : Des moyens et méthodes de combat prohibés dans un conflit armé international 69

Articles 461-23 à 461-29 [nouveaux] du code pénal : Méthodes de combat interdites 69

Section 4 -Des crimes et délits de guerre propres aux conflits armés non internationaux 70

Article 461-30 [nouveau] du code pénal : Déplacement des personnes 71

Article 461-31 [nouveau] du code pénal : Condamnations arbitraires 71

Chapitre II - Dispositions particulières 71

Article 462-1 [nouveau] du code pénal : Régime d’aggravation des peines encourues pour crime ou délit de guerre 71

Article 462-2 [nouveau] du code pénal : Application de la période de sûreté aux crimes et délits de guerre punis de dix ans d’emprisonnement 72

Article 462-3 [nouveau] du code pénal : Peines complémentaires applicables aux personnes physiques reconnues coupables de crime ou délit de guerre 73

Article 462-4 [nouveau] du code pénal : Interdiction du territoire français encourue à titre de peine complémentaire 74

Article 462-5 [nouveau] du code pénal : Responsabilité pénale des personnes morales 74

Article 462-6 [nouveau] du code pénal : Peine complémentaire de confiscation 76

Article 462-7 [nouveau] du code pénal : Responsabilité pénale du supérieur hiérarchique dans le cas d’un crime ou d’un délit de guerre 76

Article 462-8 [nouveau] du code pénal : Responsabilité pénale du fait d’un acte prescrit par la loi, le règlement ou l’autorité légitime 76

Article 462-9 [nouveau] du code pénal : Excuse de légitime défense 77

Article 462-10 [nouveau] du code pénal : Délai de prescription des crimes et délits de guerre 78

Article 462-11 [nouveau] du code pénal : Droit de légitime défense pour la France 80

Chapitre Ier bis (nouveau) - Dispositions modifiant le code de procédure pénale 81

Article 7 bis (art. 689-11 [nouveau] du code de procédure pénale) : Une compétence extraterritoriale encadrée des juridictions françaises pour les crimes relevant de la compétence de la CPI 81

Chapitre II - Dispositions finales 89

Article 8 (art. L. 311-1 et L. 322-4 du code de justice militaire ; art. 213-1 du code pénal) : Coordinations 89

Article 9 : Application de la loi outre-mer 89

TABLEAU COMPARATIF 91

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 112

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 117

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR 130

ANNEXE : EXTRAITS DU STATUT DE ROME DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE 132

«Affirmant que les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ne sauraient rester impunis et que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale… »

« Rappelant qu’il est du devoir de chaque État de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables de crimes internationaux… ».

Extraits du Préambule du Statut de Rome

MESDAMES, MESSIEURS,

L’instauration d’une justice pénale internationale destinée à mettre fin à l’impunité des auteurs des crimes de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre est une ambition ancienne, qui n’a cependant été pleinement consacrée qu’en 1998, par la signature de la Convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale (1), soit plus d’un demi-siècle après l’instauration des premières juridictions pénales internationales de Nuremberg et Tokyo, chargées de juger les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis par les forces armées et les responsables politiques allemands et japonais durant la Seconde Guerre mondiale. Le projet de statut pour l’établissement d’une cour pénale internationale, établi par l’Assemblée Générale de l’ONU en 1953 pour répondre aux critiques formulées sur le fonctionnement de ces deux tribunaux, parfois assimilés à une « justice des vainqueurs », n’avait pu être mené à son terme dans le contexte de la Guerre Froide.

La création en 1993 du Tribunal pénal international appelé à juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit humanitaire sur le territoire de l’ex-Yougoslavie (TPIY), puis la mise en place en 1994 du Tribunal pénal international pour le Rwanda, deux juridictions spécialisées et temporaires créées par des résolutions (2) du Conseil de sécurité de l’ONU fondées sur le chapitre VII de la Charte des Nations unies (3), ont contribué à accélérer les réflexions et les négociations sur la création d’une juridiction pénale internationale permanente et à compétence planétaire reposant sur l’adhésion des États, aboutissant à la signature du traité de Rome en juillet 1998 et à l’entrée en fonction de la Cour de La Haye le 1er juillet 2002. Pour la première fois ainsi, la juridiction pénale internationale préexiste aux crimes qu’elle sera amenée à juger.

La création de la Cour pénale internationale (CPI) a rendu nécessaire l’adaptation du système pénal de chaque État partie.

En France, cette adaptation s’est faite en trois étapes : tout d’abord, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 22 janvier 1999 (4), la Constitution a été révisée le 28 juin 1999 par l’introduction d’un nouvel article 53-2 aux termes duquel « la République peut reconnaître la juridiction de la Cour pénale internationale dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998 »  (5). Cette révision a ouvert la voie à la ratification du traité par la France, intervenue le 9 juin 2000 (6).

Seconde étape, la loi n° 2002-268 du 26 février 2002 a permis à la France de pleinement coopérer avec la CPI pour l’exercice des poursuites, l’exécution de ses décisions et l’indemnisation des victimes.

Cinq ans après cette première loi, a été déposé sur le bureau du Sénat le présent projet de loi, qui a été adopté par le Sénat le 10 juin 2008. Constituant le troisième volet de l’adaptation de notre droit à l’instauration de la CPI, ce texte « marque la pleine participation de la France à la justice pénale internationale et adapte notre droit aux infractions qui en relèvent » ainsi que l’avait déclaré le Garde des Sceaux lors de l’examen du projet de loi par le Sénat.

L’incorporation dans notre droit pénal des infractions prévues par le Statut de Rome constitue le nécessaire corollaire du principe de complémentarité posé par l’article 1er de la Convention de Rome, en vertu duquel il incombe au premier chef aux États parties de juger des crimes relevant de ce statut, dans le cadre des procédures propres à chaque État, tandis que la CPI n’exerce sa compétence que dans le cas où les États ne veulent ou ne peuvent poursuivre les auteurs de telles infractions, afin de mettre fin à toute impunité. Dès lors, toute carence dans la législation interne induit nécessairement la compétence de la CPI.

Votre rapporteur ajoute que la mise en place d’un système pénal international efficace suppose le concours de toutes les justices nationales et que notre pays, qui a joué un rôle majeur dans les négociations du statut de la Cour, se doit d’être exemplaire en la matière. Votre rapporteur souhaite donc que le projet de loi puisse être examiné très prochainement par votre assemblée, afin que la France ait adapté son droit interne avant que s’ouvre la Conférence de révision du Statut de Rome qui doit se réunir du 31 mai au 11 juin prochains à Kampala, en Ouganda. Cette conférence doit permettre de trouver les moyens d’une amélioration du fonctionnement de la Cour, qui souffre d’une grande lourdeur de ses procédures. Comme M. Bruno Cotte, Président de la deuxième chambre de jugement de la Cour, l’a expliqué à votre rapporteur lors de son audition, l’agglomération de règles de common law et de civil law rend, en effet, mal aisée la mise en œuvre de la procédure devant la CPI.

À la veille de l’ouverture de cette importante conférence qui doit répondre aux défis d’une juridiction pénale internationale efficace, la France se doit d’adapter son droit interne. Le présent projet de loi vise, pour l’essentiel, à compléter les incriminations prévues par notre code pénal :

—  en sanctionnant l’incitation directe et publique à commettre un génocide ;

—  en introduisant dans ce code un nouveau livre consacré aux crimes de guerre ;

—  en précisant la définition du crime contre l’humanité ;

—  en permettant la mise en cause de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire ou civil du fait de sa complicité passive à l’égard d’un crime contre l’humanité ou d’un crime de guerre commis par un subordonné ;

—  en portant de dix à trente ans le délai de prescription pour les crimes de guerre, réservant l’imprescriptibilité au seul crime contre l’humanité.

Lors de son examen du projet de loi, le Sénat, estimant que le texte était fidèle pour l’essentiel à l’esprit de la Convention de Rome, a adopté des amendements tendant à rapprocher encore davantage la définition de certains crimes de guerre introduits dans le code pénal des termes de la Convention. Il a même, à l’initiative de M. Patrice Gélard, rapporteur au nom de sa commission des Lois, souhaité que le texte aille au-delà des exigences de la Convention de Rome en portant de 15 à 18 ans l’âge à partir duquel peut être organisée la conscription ou l’enrôlement dans les forces armées.

Un important débat s’est également tenu devant le Sénat s’agissant de la compétence universelle qui pourrait être reconnue aux juridictions françaises, afin de leur permettre de poursuivre et juger l’auteur d’un crime international, même si les faits se sont déroulés hors du territoire national et même si tant le responsable que la victime sont étrangers. Le Sénat n’a pas choisi de reconnaître une telle compétence mais a adopté un amendement, devenu l’article 7 bis, qui reconnaît aux juridictions françaises une compétence extraterritoriale leur permettant, sous certaines conditions strictes, de poursuivre et de juger toute personne résidant habituellement en France et qui se serait rendue coupable à l’étranger d’un crime relevant de la compétence de la CPI.

I. LE NÉCESSAIRE PROLONGEMENT DE L’ADAPTATION DE NOTRE LÉGISLATION PÉNALE À L’INSTAURATION DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE

Le présent projet de loi constitue le second volet de l’adaptation de notre législation pénale rendue nécessaire par l’entrée en vigueur le 1er juillet 2002 de la Convention portant statut de la CPI, signée à Rome le 17 juillet 1998.

A. L’INSTAURATION DE LA CPI REND NÉCESSAIRE L’ADAPTATION DE NOTRE LÉGISLATION PÉNALE

1. La mise en place de la Cour pénale internationale…

La Convention de Rome de 1998, acte constitutif de la CPI, comprend plus de 120 articles décrivant avec précision l’organisation de la Cour et la procédure applicable devant cette juridiction internationale dont le champ de compétence est limité aux crimes les plus graves et qui n’a vocation à se substituer aux juridictions nationales qu’en cas de défaillance de celles-ci.

a) Une compétence limitée aux crimes les plus graves touchant l’ensemble de la communauté internationale

Il est stipulé dans le Préambule du Statut de Rome qu’est instaurée une cour « permanente et indépendante reliée au système des Nations unies, ayant compétence à l’égard des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ». L’article 5 du statut précise que ces crimes sont le crime de génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, ainsi que le crime d’agression (7). Ces crimes ne se prescrivent pas. Il est, en outre, précisé que la Cour est compétente pour les seuls crimes commis après le 1er juillet 2002, date d’entrée en vigueur de la convention.

La Cour, saisie par un État partie, le Conseil de sécurité des Nations unies ou de sa propre initiative, exerce sa compétence – sous réserve de l’application du principe de complémentarité (cf. infra) – dès lors qu’un État concerné par un tel crime, l’État de la nationalité des auteurs présumés de ce crime ou l’État sur le territoire duquel le crime a eu lieu est partie à la convention ou a donné son accord exprès. Ces conditions ne s’appliquent pas si la Cour est saisie par le Conseil de sécurité des Nations unies dont les résolutions ont force obligatoire à l’égard de tous les membres de l’ONU ou si un État fait une déclaration acceptant la compétence de la Cour.

Organisation de la Cour pénale internationale

La Cour est composée de dix-huit juges élus pour neuf ans, répartis en trois sections : la section préliminaire, la section de première instance et la section des appels.

Le bureau du procureur reçoit les communications et tout renseignement dûment étayé concernant les crimes relevant de la compétence de la Cour ; il les examine, conduit les enquêtes et soutient l’accusation devant la Cour. Le procureur est élu au scrutin secret par l’Assemblée des États parties à la majorité absolue des membres de celle-ci. Depuis 2003, il s’agit de l’Argentin Luis Moreno-Ocampo.

La procédure suivie devant la Cour pénale internationale comprend trois phases :

—  Première phase : l’enquête. La décision d’ouvrir une enquête est prise, sous le contrôle de la chambre préliminaire, par le procureur, qui enquête tant à charge qu’à décharge. Son activité est ensuite encore contrôlée par la chambre préliminaire, qui est notamment compétente pour délivrer les mandats nécessaires aux fins d’une enquête ou pour autoriser le procureur à prendre certaines mesures d’enquête sur le territoire d’un État partie sans s’être assuré de la coopération de cet État lorsque celui-ci est défaillant ;

—  Deuxième phase : la confirmation des charges. Aux termes de l’article 61 du statut de la Cour, « dans un délai raisonnable après la remise de la personne à la Cour ou sa comparution volontaire devant celle-ci, la chambre préliminaire tient une audience pour confirmer les charges sur lesquelles le Procureur entend se fonder pour requérir le renvoi en jugement ». À l’issue de cette audience, la chambre préliminaire peut soit confirmer les charges et renvoyer la personne devant une chambre de première instance pour y être jugée, soit ne pas confirmer les charges, ou bien encore ajourner l’audience en demandant au procureur d’apporter des éléments de preuve supplémentaires ou de modifier une charge ;

—  Troisième phase : le procès. Il se déroule publiquement devant une chambre de première instance en présence de l’accusé. La chambre peut prononcer le huis clos, notamment dans le but de protéger la sécurité des victimes et des témoins. L’accusé a la possibilité de plaider coupable. La Cour le reconnaît alors coupable, si elle est convaincue que l’accusé comprend la nature et les conséquences de l’aveu. Dans le cas contraire, elle ordonne que le procès se poursuive.

Il n’existe aucun régime d’immunité devant la Cour : la qualité de chef d’État, de membre du Gouvernement ou du Parlement n’exonère en rien de la responsabilité pénale et n’empêche pas l’engagement des poursuites. En revanche, le Conseil de sécurité de l’ONU peut voter une résolution demandant à la Cour de n’engager aucune enquête ou de ne mener aucune poursuite pendant une période renouvelable de douze mois, permettant que puissent, par exemple, s’engager des négociations pour l’arrêt d’un conflit armé.

Les victimes se sont vues reconnaître le droit de participer à la procédure tout au long de celle-ci et de demander une réparation dont le financement, fait inédit pour une juridiction pénale internationale, est assuré par un fonds spécial pour les victimes.

L’article 74 du statut précise que les juges s’efforcent de prendre leur décision à l’unanimité, faute de quoi ils la prennent à la majorité. La décision est présentée par écrit et comprend l’exposé complet des constatations de la chambre de première instance. S’il n’y a pas unanimité, la décision contient les vues de la minorité.

b) Le principe de complémentarité

En vertu du principe de complémentarité défini à l’article 1er du Statut de Rome, la Cour n’exerce sa compétence que dans les cas où l’État concerné soit ne peut pas, soit ne veut pas poursuivre les auteurs des infractions. Ainsi, les enquêtes et poursuites pour les crimes de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre relèvent de la responsabilité première des juridictions nationales. Si un État se soustrait à son obligation d’adapter son droit pénal, la Cour peut exercer sa compétence, sous certaines conditions (cf. art. 17 du Statut de Rome).

Si les États ont la possibilité de contester la compétence de la Cour, celle-ci n’en conserve pas moins la décision finale de sa compétence et de la recevabilité des affaires qui lui sont soumises.

La procédure suivie est distincte de celle qui avait été retenue lors de la création des tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, dont les statuts posaient le principe de la primauté de ces juridictions sur les juridictions nationales et organisaient une procédure de dessaisissement de ces dernières. L’organisation ainsi instaurée fait une large place au principe de subsidiarité, sans que la CPI ne soit placée au sommet d’une hiérarchie judiciaire.

c) Un premier bilan de l’activité de la Cour : un symbole ou un luxe ?

Le bilan de l’activité de la CPI demeure encore modeste sur un plan quantitatif : saisie par trois États parties (la République démocratique du Congo, l’Ouganda et la République centrafricaine), une fois par le Conseil de sécurité des Nations unies (au sujet du Darfour (8)) et une fois par le procureur (au sujet du Kenya) pour des dossiers concentrés principalement dans la région des Grands Lacs en Afrique, elle n’a encore abouti qu’à une confirmation de charges par la chambre préliminaire dans une de ces affaires (celle touchant la République centrafricaine) et à l’ouverture de deux procès en janvier et novembre 2009 (République démocratique du Congo). Aucun arrêt définitif n’a été rendu à ce jour. Ce maigre bilan après huit ans d’existence est à l’origine de critiques sceptiques sur l’efficacité de la Cour.

M. Bruno Cotte, Président de la deuxième chambre de jugement de la Cour pénale internationale, a rappelé que la procédure suivie devant la Cour est par essence longue ; le nombre de témoins est élevé et il est nécessaire le plus souvent d’assurer leur protection.

Ce bilan s’explique aussi par l’hostilité de certains États : rappelons que ni les États-Unis, ni la Russie, ni la Chine, ni l’Inde, ni de nombreux pays arabes ne sont parties au Traité, par peur que certains de leurs ressortissants ne puissent être poursuivis pour crimes de guerre.

À cela s’ajoute la faible lisibilité de l’action de la Cour, qui ne traite que les affaires les plus graves et, au sein de ces affaires, opère une sélection des accusés les plus emblématiques et des crimes les plus graves pour lesquels ils sont poursuivis.

La crédibilité de la Cour dépend, en outre, des moyens dont elle dispose pour faire respecter les décisions qu’elle prend, notamment pour faire appliquer ses mandats d’arrêt, ce qui dépend de la coopération des États pour le fonctionnement de l’enquête, la protection des victimes et des témoins et l’exécution des décisions (amende, emprisonnement). Or la CPI n’a aucun moyen pour contraindre les États parties à exécuter ses décisions. Seul le Conseil de sécurité de l’ONU, saisi par la Cour, pourrait contraindre un État à coopérer avec la Cour.

À ces questions s’ajoute celle du coût, très élevé, de la justice pénale internationale (de l’ordre de 100 millions d’euros par an (9)), d’autant que le budget de la CPI est appelé à s’accroître au fur et à mesure de l’augmentation du nombre d’affaires dont elle sera saisie. Les personnes entendues par votre rapporteur ont souligné l’importance des coûts liés à la défense et à l’aide juridictionnelle, aux multiples déplacements à organiser sur le terrain et à la protection des témoins. Au total, les coûts liés à un procès sont évalués à 9 millions d’euros par an et par procès.

M. Jean-Luc Florent, directeur-adjoint des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, a indiqué à votre rapporteur que le niveau des contributions des différents États parties est fixé par référence au barème établi par les Nations unies sur la base réduite aux parties à la convention. Dès lors, compte tenu de l’absence de gros contributeurs onusiens à la Convention de Rome, la part de la France est plus importante et s’élève à environ 9 % du budget de la Cour (9 millions d’euros en 2009 et 10 millions d’euros en 2010).

Votre rapporteur estime que l’importance des enjeux soulevés en matière de génocides, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre, justifie que des moyens importants soient apportés dans la lutte contre ces crimes, à la condition cependant que les actions engagées soient suivies de condamnations effectives, ce qui n’est à ce jour pas le cas.

2. … rend nécessaire l’adaptation des législations nationales

Si la CPI ne peut fonctionner sans la coopération des États parties, à qui elle peut demander de produire des éléments de preuve et qui sont chargés d’exécuter les peines qu’elle prononce, ce n’est pas la Convention de Rome qui fixe les modalités de cette coopération, mais la loi nationale de chaque État partie.

La convention n’oblige pas les États parties à prévoir dans leur droit interne l’incrimination des infractions qui relèvent de la compétence de la Cour. Les États ont toutefois tout intérêt à adapter leur droit national, pour donner toute sa portée au principe de complémentarité posé par la convention et éviter ainsi que la carence de la législation nationale n’entraîne la compétence automatique de la CPI.

B. SI LA COOPÉRATION DE LA FRANCE AVEC LA CPI EST ASSURÉE DEPUIS 2002, L’ADAPTATION DE NOTRE DROIT PÉNAL RESTE À ACCOMPLIR

L’application en droit interne du Statut de Rome nécessite deux séries d’adaptations :

—  les modalités pratiques de la coopération avec la CPI, d’une part ;

—  des modifications de fond du droit pénal français, notamment dans la définition des crimes relevant de la compétence de la Cour, d’autre part.

La première série a fait l’objet d’une première loi, qui date de février 2002. La deuxième reste à accomplir.

1. La loi du 26 février 2002 a mis en place une procédure de coopération judiciaire entre les autorités françaises et la CPI

Les adaptations pratiques étant les plus urgentes, car indispensables au bon fonctionnement de la Cour, elles ont été prises dès avant l’entrée en vigueur de la Convention de Rome. C’est la loi n° 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, issue d’une proposition de loi du sénateur Robert Badinter (10), qui a défini les conditions de la coopération de la France avec la CPI, non seulement s’agissant de l’arrestation et de la remise des personnes réclamées par la Cour, mais également en ce qui concerne l’exécution des peines et des mesures de réparation prononcées par la Cour. Son contenu était directement inspiré des règles définies en 1995 et 1996 pour la coopération avec le TPIY et le Tribunal international pour le Rwanda.

a) L’exécution des demandes d’entraide judiciaire et les conditions de l’arrestation et de la remise des personnes réclamées par la Cour

La loi de février 2002 a inséré dans le livre IV du code de procédure pénale un nouveau titre relatif à la « coopération avec la cour pénale internationale » décrivant la procédure suivie pour l’application du statut de la Cour.

Les demandes d’entraide judiciaire adressées à notre pays doivent suivre la voie diplomatique avant d’être transmises au procureur de la République de Paris, qui centralise toutes les demandes. Elles sont exécutées, selon les cas, par ce magistrat ou par un juge d’instruction, qui peut agir sur l’ensemble du territoire national, en présence, le cas échéant, d’un représentant de la Cour. La centralisation à Paris, également prévue pour les demandes d’entraide émanant des tribunaux pénaux internationaux, est un gage d’efficacité et de rapidité dans le traitement des demandes. Un projet de loi a été récemment présenté par le Garde des Sceaux qui conforte cette spécialisation du contentieux pénal international (11) : va ainsi être créé à Paris un pôle judiciaire unique pour les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre, également compétent dès lors que les juridictions nationales sont compétentes en application d’une clause de compétence universelle.

S’agissant des demandes d’arrestation aux fins de remise, les articles 627-4 à 627-13 du code de procédure pénale prévoient une compétence des procureurs de la République locaux, suivie d’une saisine de la juridiction parisienne ; la personne arrêtée bénéficie tout au long de la procédure des droits garantis par le statut de la Cour, qui correspondent à ceux prévus par le code de procédure pénale (notification des droits et des charges, présence d’un avocat dès le premier interrogatoire, recours à un interprète…). Après vérification de son identité par le procureur de la République, la personne est incarcérée en maison d’arrêt en attendant son transfert à celle du ressort de la cour d’appel de Paris, qui doit avoir lieu dans un délai maximum de cinq jours – porté à quinze jours si la personne est arrêtée dans une collectivité ultra-marine.

La décision de remise est ensuite prise par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris qui n’exerce cependant qu’un contrôle formel : elle doit ordonner la remise de la personne arrêtée à la Cour dès lors qu’elle constatera qu’il n’y a pas d’erreur évidente, les questions de fond relevant de la seule Cour elle-même. La personne réclamée, conformément à la loi de 1927 sur l’extradition, doit être remise dans le mois suivant la date à laquelle la décision est devenue définitive. L’arrêt de la chambre de l’instruction est susceptible de pourvoi en cassation.

Conformément au statut de la Cour, qui prévoit la possibilité pour celle-ci de demander, en cas d’urgence, l’arrestation provisoire d’une personne avant l’envoi d’une demande formelle de remise, le code prévoit qu’une personne peut être remise, si elle y consent, avant que les autorités françaises aient été saisies d’une demande formelle en ce sens.

b) Les conditions de l’exécution des peines et des mesures de réparation prononcées par la Cour

Le statut de la Cour prévoit que les peines prononcées sont exécutées par les États parties. En ce qui concerne les peines d’emprisonnement, la Cour peut proposer aux États parties d’accueillir sur leur territoire des condamnés pour qu’ils y purgent tout ou partie de leur peine.

La loi de février 2002 a précisé que l’exécution des peines d’amende ou de confiscation, ainsi que les mesures de réparation en faveur des victimes, doivent être autorisées par le tribunal correctionnel de Paris. S’agissant de l’exécution de peines d’emprisonnement sur le territoire français, le condamné est présenté devant le procureur de la République du lieu de détention, qui ordonne l’incarcération.

Conformément au statut de la Cour, le juge français ne peut accorder aucune mesure d’aménagement de peine à une personne condamnée par la Cour pénale internationale sans l’accord de celle-ci, qui reste seule compétente pour prendre de telles décisions. En revanche, en cas de décision négative de la Cour sur une demande d’aménagement de peine, le Gouvernement français indique à la Cour s’il accepte de garder la personne condamnée sur le territoire de la République ou s’il entend demander son transfert dans un autre État.

2. Les adaptations de fond de notre droit pénal restent à effectuer

Dès le vote de la loi de février 2002, il est clairement apparu qu’elle ne serait pas suffisante pour permettre la pleine application du statut de la CPI. « Certaines incriminations de notre droit pénal devront vraisemblablement être modifiées pour tenir compte des définitions retenues dans le statut de la cour pénale » écrivait le sénateur Patrice Gélard(12). De la même manière, notre collègue Alain Vidalies, rapporteur de la proposition de loi en 2002 (13), avait souligné que les aménagements de fond, pourtant nécessaires, devaient être différés pour des questions tenant au calendrier d’examen du texte : il n’était pas possible d’engager une modification du droit pénal de fond à quelques jours de la suspension des travaux parlementaires en fin de législature. L’objet de la première loi a donc été limité aux conditions essentielles de la coopération de la France à la CPI.

a) L’absence de définition des crimes de guerre en droit interne

Notre droit pénal en vigueur ne reconnaît pas les crimes de guerre en tant que tels. Il ne permet que de réprimer des actes individuels isolés, tels des actes de torture ou de viol, sans prendre en compte le contexte spécifique dans lequel ces actes ont été commis. Seuls les crimes contre l’humanité commis en temps de guerre font l’objet d’une disposition spécifique : l’article 212-2 du code pénal punit de la réclusion criminelle à perpétuité les crimes contre l’humanité commis en temps de guerre en exécution d’un plan concerté.

Prenant acte de cette lacune de notre droit, la France s’est prévalue des dispositions de l’article 124 du Statut de Rome qui permet aux États parties de déclarer que, pour une période de sept ans à partir de l’entrée en vigueur du statut – soit jusqu’au 1er juillet 2009 –, ils n’accepteront pas la compétence de la Cour à l’égard des crimes de guerre lorsque de tels crimes ont été commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants. Pendant cette durée, la France a ainsi refusé de reconnaître la compétence de la CPI pour ces crimes.

Dès lors que le présent projet de loi définit les crimes et délits de guerre, le Gouvernement français, conformément à ses engagements et aux souhaits exprimés tant par les organisations non gouvernementales que la Commission nationale consultative des droits de l’homme, a retiré sa déclaration par anticipation le 15 juin 2008 : depuis cette date, la France reconnaît ainsi la compétence de la CPI pour juger des crimes de guerre. Il est donc désormais nécessaire d’adopter et de promulguer rapidement la modification de notre législation pénale.

b) Des qualifications en droit pénal français qui ne correspondent que partiellement aux définitions contenues dans le Statut de Rome

Il n’existe aucune disposition dans le Statut de Rome qui obligerait les États parties à harmoniser la définition en droit interne des crimes relevant de la compétence de la Cour. Pour autant, en raison du principe de complémentarité, une telle harmonisation est souhaitable.

Or, les qualifications retenues par notre droit pénal ne correspondent que partiellement aux définitions contenues dans le Statut de Rome. Ainsi, la définition donnée par l’actuel article 212-1 du code pénal des crimes contre l’humanité est plus restrictive que celle figurant à l’article 7 du statut, qui établit une liste d’actes incriminés beaucoup plus détaillée.

c) La question du respect des stipulations de l’article 70 du Statut de Rome relatif aux atteintes à l’administration de la justice commises au préjudice de la CPI par un ressortissant français ou sur le territoire national

L’application de l’article 70, paragraphe 4 a, du Statut de Rome, impose aux États parties de prévoir dans leur législation nationale des incriminations sanctionnant les atteintes à l’administration de la justice rendue par la Cour (telles que le faux témoignage, la subornation de témoin ou l’intimidation d’un membre de la Cour) (14).

De telles dispositions sont aujourd’hui absentes de notre code pénal. Il est donc nécessaire d’étendre les dispositions de ce code sanctionnant les atteintes à l’action de la justice, qui ne s’appliquent, en l’état actuel du droit, qu’à l’action de la justice française.

II. LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI ONT ÉTÉ CONFORTÉES ET ENRICHIES PAR LE SÉNAT

Le présent projet de loi adapte notre droit pénal au statut de la CPI : il faut ici préciser qu’il s’agit non pas d’une transposition du Statut de Rome mais seulement de l’adaptation de notre droit à ce statut. La nuance est importante, comme l’a souligné lors de son audition par votre rapporteur Mme Edwige Belliard, directrice des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères : l’adaptation autorise en effet une certaine souplesse d’interprétation du statut, d’autant que la terminologie anglo-saxonne de ce texte est parfois bien éloignée de la nôtre et que certains concepts juridiques contenus dans le statut sont même inconnus de notre droit. Ainsi, il n’est nullement demandé au législateur d’adopter un texte en conformité stricte aux terminologies retenues par le Statut de Rome.

En outre, le Statut de Rome définit des infractions sans les assortir des peines correspondantes ; il revient donc à chaque État de fixer le régime de sanctions applicables. C’est ce qui explique que, conformément à notre échelle des peines, le projet de loi distingue entre crimes et délits de guerre.

Il résulte de ce qui précède que votre rapporteur ne peut souscrire aux objections formulées lors des auditions tant par les représentants de la Coalition française pour la CPI que par ceux de la Commission nationale consultative des droits de l’homme(15) qui ont regretté que le projet de loi ne respecte pas une stricte conformité entre les définitions des incriminations du droit français et les définitions du droit international.

A. LE PROJET DE LOI PERMET LA MISE EN PLACE D’INSTRUMENTS DE RÉPRESSION DES CRIMES INTERNATIONAUX

1. Des incriminations créées, précisées ou complétées

Le projet de loi précise et complète certaines incriminations existantes, afin de les rapprocher des stipulations de la Convention de Rome :

—  il ouvre explicitement la possibilité de poursuivre l’auteur d’une incitation directe et publique à commettre un génocide (article 1er) ;

—  il précise, en outre, la définition des crimes contre l’humanité en énumérant les différents comportements susceptibles de tomber sous le coup de cette incrimination (article 2).

Ce dernier article élargit la définition de ces crimes à des actes qui n’étaient pas visés jusqu’ici dans la catégorie des crimes contre l’humanité –exactions de nature sexuelle, ségrégation raciale – et supprime la condition liée au mobile – « motifs politiques, philosophies, raciaux ou religieux » –, jugée trop restrictive.

Le projet de loi insère, par ailleurs, dans le code pénal quarante-deux nouveaux articles au sein d’un nouveau livre relatif aux crimes et délits de guerre (article 7). Il s’agit d’intégrer à notre corpus législatif les stipulations contenues à l’article 8 de la Convention de Rome.

La plupart des actes visés par cet article peuvent, d’ores et déjà, être poursuivis sur la base des dispositions de droit commun de notre code pénal, telles celles punissant l’assassinat, les actes de torture, les prises d’otages, les violences sexuelles ou les destructions. Le code de justice militaire contient lui aussi plusieurs articles permettant de poursuivre les crimes de guerre : l’article L. 311-1 prévoit la « répression pénale des faits qui constituent des crimes ou délits de droit commun, et notamment de ceux qui sont contraires aux lois et coutumes de guerre et aux conventions internationales » ; les articles L. 322-4 et L. 322-5 de ce même code visent expressément les pillages, l’article L. 322-6 les destructions et l’article L. 324-1 prévoit que toute violation d’une consigne générale donnée à la troupe en temps de guerre peut donner lieu à une condamnation à une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de cinq ans. La répression assurée par ce dernier article peut néanmoins sembler insuffisante au regard de la gravité des infractions relevant des crimes de guerre.

Ces disposions éparses ne permettent cependant pas de prendre en compte la spécificité des infractions liées à un conflit armé et leur particulière gravité compte tenu, notamment, de la situation de plus grande vulnérabilité des populations civiles.

Les nouveaux articles introduits par le projet de loi comblent cette lacune et permettent, en outre, d’incriminer spécifiquement d’autres actes, tels l’enrôlement de mineurs dans un conflit armé, la prise de population civile pour otages ou boucliers humains, ou tous les actes de guerre déloyaux ou disproportionnés.

2. Les conditions de mise en cause de la responsabilité pénale

Le projet de loi ouvre la possibilité de mettre en cause la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire ou civil du fait de sa complicité passive à l’égard de la commission par un de ses subordonnés d’un crime contre l’humanité (article 3) ou d’un crime de guerre (article 8), sans pour autant que les subordonnés ne puissent s’affranchir de leur propre responsabilité au seul motif qu’ils ont exécuté un ordre.

Par ailleurs, conformément à la déclaration interprétative faite par la France lors du dépôt de son instrument de ratification afférent à la Convention de Rome, il est précisé que l’utilisation par la France, en état de légitime défense, de l’arme nucléaire ou de toute autre arme dont l’utilisation n’est pas prohibée par une convention internationale à laquelle la France est partie ne constitue pas un crime de guerre (article 7).

3. Des délais de prescription allongés

L’article 29 de la Convention de Rome pose le principe de l’imprescriptibilité des crimes relevant du champ de compétence de la CPI.

En droit français, les crimes contre l’humanité sont, d’ores et déjà, imprescriptibles (article 213-5 du code pénal). Il s’agit des seules infractions pour lesquelles l’imprescriptibilité soit admise par notre droit interne, en raison de leur exceptionnelle gravité. Ces crimes sont « d’essence » différente, comme l’a très justement exprimé devant le Sénat M. Robert Badinter, justifiant que l’imprescriptibilité leur soit réservée. Suivant ce raisonnement, le Sénat n’a pas fait droit aux revendications de certaines organisations qui plaidaient pour la reconnaissance de l’imprescriptibilité des crimes de guerre. Il a maintenu les dispositions du projet de loi qui proposent d’allonger substantiellement les délais par rapport au droit commun des crimes et des délits, portant de 10 à 30 ans le délai de prescription de l’action publique pour les crimes de guerre et de 3 à 20 ans pour les délits de guerre, et portant de 20 ans à 30 ans le délai de prescription de la peine en matière criminelle et de 5 à 20 ans en matière délictuelle.

B. LE PROJET DE LOI A ÉTÉ PRÉCISÉ ET ENRICHI PAR LE SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE

La commission des Lois du Sénat et son rapporteur, M. Patrice Gélard, ont jugé le projet de loi fidèle, pour l’essentiel, à l’esprit de la Convention de Rome mais ont souhaité, par amendements, « conforter » cette fidélité. Le Sénat a ainsi adopté des amendements tendant à rapprocher encore davantage les définitions introduites dans notre code pénal des termes de la Convention de Rome.

1. D’utiles précisions ont été apportées s’agissant des crimes de guerre

S’agissant des crimes de guerre (article 7), le Sénat a adopté plusieurs amendements tendant à :

—  incriminer le pillage, même si celui-ci n’est pas commis en bande (article 461-15 du code pénal) ;

—  interdire l’enrôlement forcé de toutes les personnes protégées – et non uniquement de celles appartenant à la partie adverse (article 461-20 du code pénal) ;

—  autoriser la mise en cause de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil dans le cas où celui-ci aurait délibérément négligé de tenir compte d’informations indiquant clairement que le subordonné allait commettre un crime de guerre (article 462-7 du code pénal) ;

—  encadrer les conditions dans lesquelles l’auteur d’un crime de guerre pourrait être exonéré de responsabilité pénale en cas de légitime défense (article 462-9 du code pénal).

Le Sénat a, en outre, souhaité aller au-delà des exigences de la Convention de Rome en portant de quinze à dix-huit ans l’âge à partir duquel il peut être procédé à la conscription ou à l’enrôlement dans les forces armées (article 461-7 du code pénal).

Le Sénat a enfin aligné le régime des interdictions applicables aux auteurs de crime contre l’humanité sur celui, plus sévère, prévu par le projet de loi pour les crimes de guerre (article 8).

2. Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale ont été rapprochées des prescriptions du Statut de Rome

Le projet de loi prévoyait dans sa version initiale que, contrairement à ce que prévoit le Statut de Rome, la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil pour crime de guerre commis par un subordonné ne pourrait pas être engagée dans l’hypothèse où il aurait délibérément négligé de tenir compte d’informations indiquant clairement que le subordonné allait commettre un tel crime. Le Sénat a adopté un amendement ouvrant une telle possibilité.

S’agissant des limites posées par le projet de loi à la mise en cause de la responsabilité pénale de l’auteur d’un crime de guerre agissant en état de légitime défense, le Sénat a, à l’invitation de sa commission des Lois, adopté un amendement rapprochant les conditions justifiant la situation de légitime défense de celles prévues par le Statut de Rome. Le projet de loi posait en la matière une définition moins stricte que celle retenue par la Convention : outre les conditions tenant au fait que la personne a accompli un acte de défense pour « sauvegarder des biens essentiels à sa survie ou à celle d’autrui ou essentiels à l’accomplissement d’une mission militaire », le Statut de Rome ajoute deux autres critères : la personne doit avoir « agi raisonnablement », « contre un recours imminent et illicite à la force ». En outre, le « fait qu’une personne ait participé à une opération défensive menée par des forces armées ne constitue pas en soi un motif d’exonération pénale ».

3. Une réflexion approfondie sur la question de la compétence universelle a conduit le Sénat à instaurer une compétence extraterritoriale encadrée des juridictions françaises pour les crimes relevant de la compétence de la CPI

Le principe dit de la « compétence universelle » permet aux juridictions d’un État de poursuivre les auteurs de crimes, quel que soit le lieu de commission de l’infraction et quelle que soit la nationalité de l’auteur ou celle de la victime.

La compétence universelle constitue ainsi une dérogation aux règles habituelles de compétence de nos juridictions nationales fondées sur trois critères alternatifs :

—  Le critère territorial : l’infraction a été commise sur le territoire de la République ;

—  Le critère de la compétence personnelle active : l’auteur a la nationalité française.

—  Le critère de la compétence personnelle passive : la victime a la nationalité française.

Le Sénat a longuement débattu de l’éventuelle reconnaissance aux juridictions françaises d’une compétence universelle leur permettant de poursuivre et juger l’auteur d’un crime international, même si les faits se sont déroulés hors du territoire de la République et que le responsable et la victime sont étrangers.

Il convient de rappeler que la compétence universelle des juridictions françaises en certains domaines ne procède que de conventions internationales et ne vaut que pour les infractions désignées par celles-ci. Elle est, en outre, subordonnée, selon une exigence commune à l’ensemble des conventions intervenues à ce jour, au fait que la personne coupable ait été trouvée en France – la procédure par défaut étant exclue.

Notre droit pénal actuel ne reconnaît la compétence universelle des juridictions françaises que pour certaines catégories d’infractions limitativement énumérées, en vertu des conventions internationales suivantes :

—  Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée à New York le 10 décembre 1984 (article 689-2 du code de procédure pénale) ;

—  Convention européenne pour la répression du terrorisme signée à Strasbourg le 27 janvier 1977, et accord entre les États membres des Communautés européennes concernant l’application de la Convention européenne pour la répression du terrorisme fait à Dublin le 4 décembre 1979 (article 689-3 du code de procédure pénale) ;

—  Convention sur la protection physique des matières nucléaires, ouverte à la signature à Vienne et New York le 3 mars 1980 (article 689-4 du code de procédure pénale) ;

—  Convention pour la répression d’actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime et pour l’application du protocole pour la répression d’actes illicites contre la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental, faits à Rome le 10 mars 1988 (article 689-5 du code de procédure pénale) ;

—  Convention sur la répression de la capture illicite d’aéronefs signée à La Haye le 16 décembre 1970 et convention pour la répression d’actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, signée à Montréal le 23 septembre 1971 (article 689-6 du code de procédure pénale) ;

—  Protocole pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à l’aviation civile internationale, fait à Montréal le 24 février 1988 (article 689-7 du code de procédure pénale) ;

—  Protocole à la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes fait à Dublin le 27 septembre 1996 et convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires de la Communauté européenne ou des fonctionnaires des États membres de l’Union européenne faite à Bruxelles le 26 mai 1997 (article 689-8 du code de procédure pénale) ;

—  Convention internationale pour la répression des attentats terroristes faite à New York le 12 janvier 1998 (article 689-9 du code de procédure pénale) ;

—  Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, ouverte à la signature à New York le 10 janvier 2000 (article 689-10 du code de procédure pénale).

Il est à noter que la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 20 décembre 2006 et ratifiée par la France en juillet 2008 (16), devrait être prochainement ajoutée à cette liste afin que la compétence universelle de la France soit reconnue pour le crime de disparition forcée tel que défini par ladite Convention.

Nombreuses sont les organisations qui plaident pour l’instauration d’une compétence universelle des juridictions françaises pour les crimes relevant du Statut de Rome. Dans son avis adopté le 29 juin 2006, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a ainsi estimé que la « généralisation de la compétence universelle pour les incriminations du Statut de Rome » était « la condition essentielle pour éviter tout espace d’impunité ».

La reconnaissance de la compétence universelle des juridictions françaises présenterait l’avantage d’exercer un important effet dissuasif à l’encontre des auteurs de crimes internationaux qui, dans aucun de leurs déplacements, ne pourraient jamais compter sur quelque impunité que ce soit.

Pour autant, votre rapporteur rappelle que la Convention de Rome n’impose nullement une telle reconnaissance : il n’est en effet pas possible de tirer du seul préambule de la convention (qui rappelle qu’il est « du devoir de chaque État de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables de crimes internationaux ») une obligation conventionnelle dans la mesure où le devoir de juger les responsables de crimes internationaux qu’il mentionne n’est précisé, ni même repris, par aucune des stipulations de la convention.

Or, l’application de la compétence universelle en droit français soulèverait plusieurs incertitudes, comme l’a souligné le sénateur Gélard dans son rapport (17) :

—  La question du lien de rattachement de l’auteur du crime avec la France, tout d’abord.

La référence à une compétence universelle est sans doute excessive car cette compétence est toujours subordonnée à un lien entre la personne présumée coupable et le pays exerçant la compétence dite « universelle ». L’article 689-1 du code de procédure pénale prévoit que la personne doit « se trouver en France ».

—  La question du champ géographique d’application de la compétence universelle, ensuite.

Une telle compétence peut-elle s’exercer à l’encontre de ressortissants de pays qui ne sont pas partie à une convention autorisant l’exercice d’une compétence universelle ? Cette question est actuellement examinée par la Cour internationale de justice de La Haye dans une affaire pendante opposant le Congo à la France au sujet d’une procédure pour crimes contre l’humanité et tortures engagée par une juridiction française contre un ministre congolais de l’Intérieur, les autorités congolaises contestant que la France s’arroge une compétence universelle en matière pénale alors même que le Congo n’était à l’époque des faits pas partie à la convention contre la torture.

Il apparaît donc plus prudent d’attendre la décision de la Cour internationale de justice avant d’élargir de nouveau le domaine d’application de la compétence universelle.

—  Les difficultés pratiques, enfin, pour une juridiction française à mener une instruction sur une affaire qui s’est déroulée hors du territoire national et qui met en cause des étrangers.

Votre rapporteur note d’ailleurs que la Belgique, après avoir conféré à ses tribunaux une compétence universelle, a dû faire marche arrière, en raison de telles difficultés (cf. infra).

La commission des Lois du Sénat a estimé que l’instauration d’une Cour pénale internationale a précisément permis d’éviter, s’agissant des crimes internationaux, toute impunité et rendu sans doute inutile l’extension de la compétence territoriale des juridictions françaises. Historiquement, la compétence universelle a été conçue pour surmonter les situations d’impunité auxquelles peut aboutir l’application des règles traditionnelles de compétence des juridictions nationales. Les hypothèses de compétence universelle actuellement prévues par le code de procédure pénale demeurent, en revanche, justifiées du fait qu’il n’existe à ce jour aucune juridiction compétente pour juger des infractions visées par les articles 689-2 et suivants du code de procédure pénale. Ce n’est pas aux États parties mais à la CPI de se substituer à l’État défaillant qui aurait été normalement compétent pour juger l’auteur d’un crime international.

Le Sénat a adopté un amendement portant article additionnel, devenu l’article 7 bis, visant à accorder aux juridictions françaises une compétence extraterritoriale dans des cas bien précis. Si cet article ne reconnaît pas une compétence universelle aux juridictions françaises, les sénateurs ont, en revanche, estimé que l’importance des infractions couvertes par la Convention de Rome justifiait une dérogation au régime de droit commun de la compétence des juridictions nationales.

Le nouvel article permet aux juridictions françaises de poursuivre et de juger toute personne qui réside habituellement sur le territoire de la République et qui s’est rendue coupable à l’étranger de l’un des crimes relevant de la compétence de la CPI si les faits sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou si l’État dont elle a la nationalité est partie à la Convention de Rome. Le dispositif adopté par le Sénat suppose que quatre conditions soient cumulativement remplies :

—  la personne « réside habituellement » sur le territoire de la République ;

—  les faits qui lui sont reprochés sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou cet État ou l’État dont elle a la nationalité est partie au Statut de Rome (critère de la double incrimination) ;

—  la poursuite de ces crimes ne peut être exercée qu’à la requête du ministère public, qui dispose en la matière d’un monopole ;

—  aucune juridiction nationale ou internationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne et la CPI décline sa compétence (principe de subsidiarité).

C. L’AVIS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE NOTRE ASSEMBLÉE

La commission des Affaires étrangères de notre Assemblée, saisie pour avis du projet de loi, a, lors de sa réunion du 8 juillet 2009, adopté neuf amendements à l’initiative de sa rapporteure, Mme Nicole Ameline.

Ces amendements visent pour l’essentiel :

—  à supprimer la condition de l’existence d’un plan concerté dans la définition tant du génocide que des autres crimes contre l’humanité, estimant que cette exigence est absente du Statut de Rome (article additionnel avant l’article 1er et article 2) et qu’elle rend plus difficile l’établissement de ces crimes ;

—  à mentionner expressément le viol et l’esclavage sexuel parmi les faits susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité (article 2) ou des crimes de guerre (article 7) selon le contexte dans lequel ils ont été commis ;

—  à élargir le cadre adopté par le Sénat pour l’exercice d’une compétence extraterritoriale de la France en matière de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre (article 7 bis) Dans cette perspective, la Commission a estimé qu’une condition de simple présence sur le territoire devait se substituer au critère de résidence habituelle retenu par le Sénat. Elle a considéré que la condition de la double incrimination devait être abandonnée dès lors qu’il s’agit de combattre l’impunité dans le cas des crimes les plus graves. Elle a, en outre, estimé non justifié de réserver au ministère public le monopole de l’exercice des poursuites, au détriment du droit des victimes de se porter parties civiles. Enfin, elle a proposé que la France puisse se saisir d’une affaire dès lors qu’elle n’est l’objet d’aucune procédure devant la Cour, sans que celle-ci ait à décliner sa compétence.

DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 19 mai 2010.

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. La France a signé la Convention de Rome portant statut de la Cour pénale internationale (CPI) le 18 juillet 1998. Le projet de loi qui vous est soumis, dont le but est d’adapter notre droit pénal à l’institution de cette juridiction, a été adopté à l’unanimité par le Sénat le 10 juin 2008.

La justice française et la CPI ont l’une et l’autre pour objectif de poursuivre, juger et sanctionner les responsables de génocides, crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Elles ont l’une et l’autre l’ambition de protéger le droit, pour les victimes, de voir leurs bourreaux poursuivis et condamnés, mais aussi le droit, pour des sociétés meurtries, de parvenir à la réconciliation, ainsi que le droit, pour l’humanité tout entière, de refuser l’oubli et l’impunité.

C’est pourquoi ce projet instaure une complémentarité effective entre les juridictions internes et la CPI, en permettant l’articulation entre les juridictions et en favorisant une application équilibrée du droit international humanitaire.

Tout d’abord, ce texte vise à articuler l’intervention de la justice française et celle de la CPI. À cet effet, il complète notre législation en matière de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes et délits de guerre.

En matière de génocide, les responsabilités sont clarifiées. Outre les auteurs de génocide, les personnes incitant publiquement à commettre un génocide pourront désormais être expressément poursuivies et sanctionnées.

La notion de crime contre l’humanité est précisée. Certains actes sont désormais expressément qualifiés de crimes contre l’humanité dès lors qu’ils sont commis « en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique », ce qui est conforme à la Convention de Rome.

Le projet tend également à renforcer notre arsenal législatif contre les crimes et délits de guerre. D’une part, il reprend les incriminations prévues par la Convention de Rome, en allant au-delà de celle-ci puisqu’il considère que les crimes et délits de guerre pourront être le fait de personnes morales aussi bien que de personnes physiques. D’autre part, les règles de prescription de l’action publique sont portées à trente ans pour les crimes et à vingt ans pour les délits.

Bien entendu, l’imprescriptibilité des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité est maintenue. La hiérarchie des sanctions est préservée, la banalisation est évitée.

J’en viens aux équilibres que la complémentarité des juridictions impose de respecter.

La mise en œuvre de nos engagements ne saurait conduire à limiter l’efficacité du traitement par la justice des crimes visés par la Convention de Rome. À cet égard, les amendements adoptés au Sénat ont conforté les équilibres du texte.

S’agissant tout d’abord des notions juridiques retenues, il était important de n’introduire de précisions nouvelles qu’en cas d’insuffisance des dispositions existantes. Nos catégories juridiques nous permettent en effet de lutter contre un grand nombre de faits visés par la Convention. Dans certains cas, le recours à des notions issues du droit de common law peut être éclairant. Je pense à la notion de « plan concerté » dans la définition du génocide. Il peut aussi être redondant ou équivoque. C’est le cas de la notion d’« esclavage sexuel », puisque notre droit comporte les incriminations de viol, agressions sexuelles, proxénétisme et traite des êtres humains.

Un équilibre est également trouvé dans la mise en œuvre de la compétence universelle. Le Gouvernement est déterminé à élargir les possibilités de poursuite des auteurs de génocide et de crime contre l’humanité ou de criminels de guerre, quelle que soit leur nationalité. Néanmoins, il est nécessaire d’empêcher l’instrumentalisation de la justice pénale française à des fins politiciennes ou idéologiques. Par ailleurs, il faut rechercher l’efficacité, et par conséquent éviter l’ouverture de procédures pour lesquelles une enquête serait, en pratique, impossible à réaliser.

Enfin, l’exigence de complémentarité nous invite à réduire le risque de concurrence entre la juridiction interne et la CPI. Le principe de la compétence universelle, donc, doit être admis en droit français, sous les réserves prévues par le Sénat.

La Convention de Rome a été signée en 1998. Il est donc plus que temps d’en tirer toutes les conséquences. Je souhaite que l’Assemblée nationale exprime sur ce texte la même unanimité que le Sénat, en montrant ainsi sa volonté de concilier la hauteur des ambitions et le réalisme des moyens. C’est ainsi que la France peut continuer à porter son message de justice et de paix.

M. Thierry Mariani, rapporteur. Ce projet a été adopté par le Sénat il y a près de deux ans, le 10 juin 2008, et a fait l’objet d’un avis de la commission des Affaires étrangères de notre assemblée en juillet 2009.

La signature du traité de Rome en juillet 1998 a marqué une étape majeure dans la longue marche pour l’établissement d’une justice pénale internationale avec la création de la CPI, première juridiction pénale internationale permanente, qui est entrée en fonction le 1er juillet 2002. Sa compétence est limitée aux crimes les plus graves touchant l’ensemble de la communauté internationale : crimes de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre, auxquels s’ajouteront sans doute prochainement les crimes d’agression.

La création de la CPI a déjà conduit notre pays à adapter son droit interne : à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 22 janvier 1999, la Constitution a été révisée le 28 juin 1999. Aux termes du nouvel article 53-2 – non modifié par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 –, « la République peut reconnaître la juridiction de la CPI dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998 ». Cette révision a ouvert la voie à la ratification du traité par la France, intervenue le 9 juin 2000.

Seconde étape de l’adaptation de notre droit, la loi procédurale du 26 février 2002, adoptée avant même l’entrée en fonction de la CPI, a défini les conditions de la coopération de la France avec la CPI, non seulement au sujet de l’arrestation et de la remise des personnes réclamées par la Cour, mais également en matière d’exécution des peines prononcées par elle.

Le présent projet constitue le troisième volet de l’adaptation de notre droit à l’instauration de la CPI. Cette fois, il s’agit d’une adaptation de fond, consistant à incorporer dans notre droit pénal les infractions prévues par le Statut de Rome et qui font encore défaut en droit interne.

Ainsi, notre droit pénal ne reconnaît pas aujourd’hui en tant que tels les crimes de guerre. La plupart des actes relevant de cette définition peuvent, d’ores et déjà, être poursuivis sur la base des dispositions de droit commun de notre code pénal, telles celles punissant l’assassinat, les actes de torture, les prises d’otages, les violences sexuelles ou les destructions. Mais ces dispositions ne permettent pas de prendre en compte la spécificité des infractions liées à un conflit armé et leur particulière gravité compte tenu, notamment, de la situation de plus grande vulnérabilité des populations civiles.

Seuls les crimes contre l’humanité commis en temps de guerre font l’objet d’une disposition spécifique : l’article 212-2 du code pénal punit de la réclusion criminelle à perpétuité les crimes contre l’humanité commis en temps de guerre en exécution d’un plan concerté.

Prenant acte de cette lacune de notre droit, la France s’est d’ailleurs prévalue des dispositions de l’article 124 du Statut de Rome qui permet aux États parties de déclarer que, pour une période de sept ans à partir de l’entrée en vigueur du statut – soit jusqu’au 1er juillet 2009 –, ils n’accepteront pas la compétence de la Cour à l’égard des crimes de guerre lorsqu’ils ont été commis sur leur territoire ou par leurs ressortissants. Le Gouvernement français a cependant, par anticipation sur le vote de la loi, retiré sa déclaration dès le 15 juin 2008 ; depuis cette date, la France reconnaît ainsi la compétence de la CPI pour juger des crimes de guerre.

Aucune disposition du Statut de Rome n’oblige les États parties à procéder à une harmonisation de la définition en droit interne des crimes relevant de la compétence de la Cour. Cependant l’adaptation de notre droit pénal interne est rendue nécessaire par l’application du principe de complémentarité, posé par l’article 1er de la Convention de Rome, en vertu duquel il incombe au premier chef aux États parties de juger des crimes relevant de ce statut, dans le cadre des procédures propres à chaque État, la CPI n’exerçant sa compétence que dans le cas où les États ne veulent pas ou ne peuvent pas poursuivre. Dès lors, toute carence dans la législation interne induit nécessairement la compétence de la CPI.

Derrière cette raison juridique, il y a aussi des raisons plus politiques : la mise en place d’un système pénal international efficace suppose le concours de toutes les justices nationales ; notre pays, qui a joué un rôle majeur dans les négociations du statut de la Cour, se doit d’être exemplaire.

Il est important que nous examinions ce projet – et j’espère qu’il sera très prochainement inscrit à l’ordre du jour de la séance publique –, afin que la France ait adapté son droit interne avant la Conférence de révision du Statut de Rome, qui doit s’ouvrir à la fin de ce mois à Kampala, en Ouganda. Cette conférence doit rechercher les moyens d’améliorer le fonctionnement de la Cour, qui souffre de la grande lourdeur de ses procédures, comme l’a souligné lors de son audition M. Bruno Cotte, président de la deuxième chambre de jugement de la Cour.

Les différents articles de ce projet ont pour objet, pour l’essentiel, de compléter les incriminations prévues par notre code pénal. L’article 1er vise à sanctionner l’incitation directe et publique à commettre un génocide. L’article 2 précise la définition du crime contre l’humanité. Les articles 3 et 8 permettent la mise en cause de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire ou civil du fait de sa complicité passive dans un crime contre l’humanité ou un crime de guerre commis par un subordonné, sans pour autant que ce dernier puisse s’affranchir de sa propre responsabilité au seul motif qu’il a exécuté un ordre. L’important article 7 introduit dans le code pénal un nouveau livre, relatif aux crimes et délits de guerre.

Il faut souligner que ce texte vise à adapter notre droit pénal au statut de la CPI, non à transposer le Statut de Rome. La nuance est importante : l’adaptation autorise une certaine souplesse dans l’interprétation du statut, d’autant que la terminologie anglo-saxonne est parfois bien éloignée de la nôtre et que certains concepts juridiques contenus dans le statut sont même inconnus de notre droit. J’insiste sur ce point : il ne nous est nullement demandé d’adopter un texte en conformité stricte avec les terminologies retenues par le Statut de Rome.

De plus, ce statut définissant des infractions sans les assortir des peines correspondantes, et laissant donc à chaque État le soin de fixer le régime de sanctions applicables, le projet, conformément à notre échelle des peines, fait la distinction entre les crimes et les délits de guerre, alors que la convention ne traite que des « crimes de guerre ».

Le Sénat a souhaité rapprocher davantage de la Convention de Rome la définition de certaines infractions.

S’agissant des crimes de guerre – article 7 –, il a adopté plusieurs amendements, tendant à incriminer le pillage, même si celui-ci n’est pas commis en bande ; à interdire l’enrôlement forcé de toutes les personnes protégées – et non uniquement de celles appartenant à la partie adverse ; à autoriser la mise en cause de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil dans le cas où celui-ci aurait délibérément négligé de tenir compte d’informations indiquant clairement que le subordonné allait commettre un crime de guerre ; à encadrer les conditions dans lesquelles l’auteur d’un crime de guerre pourrait être exonéré de responsabilité pénale en cas de légitime défense.

À l’initiative de M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des Lois, le Sénat a même voulu aller au-delà des exigences de la Convention de Rome en portant de quinze à dix-huit ans l’âge à partir duquel il est possible d’organiser la conscription ou l’enrôlement dans les forces armées.

Un important débat a également eu lieu au Sénat sur la compétence universelle qui pourrait être reconnue aux juridictions françaises afin de leur permettre de poursuivre et juger l’auteur d’un crime international, même si les faits se sont déroulés hors du territoire national et même si tant le responsable que la victime sont étrangers.

La compétence universelle déroge aux règles habituelles de compétence de nos juridictions nationales. Celles-ci sont fondées sur trois critères alternatifs : le critère territorial – l’infraction a été commise sur le territoire de la République – ; le critère de la compétence personnelle active – l’auteur a la nationalité française - ; le critère de la compétence personnelle passive – la victime a la nationalité française.

Le Sénat n’a pas choisi de reconnaître une compétence universelle mais il a adopté un amendement, devenu l’article 7 bis, qui reconnaît aux juridictions françaises une compétence extraterritoriale leur permettant, sous certaines conditions strictes, de poursuivre et de juger toute personne résidant habituellement en France et qui se serait rendue coupable à l’étranger d’un crime relevant de la compétence de la CPI.

Le dispositif adopté par le Sénat suppose que quatre conditions soient cumulativement remplies : la personne « réside habituellement » sur le territoire de la République ; les faits qui lui sont reprochés sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis, ou cet État ou celui dont elle a la nationalité est partie au Statut de Rome – critère de la double incrimination – ; la poursuite de ces crimes ne peut être exercée qu’à la requête du ministère public, qui dispose en la matière d’un monopole ; aucune juridiction nationale ou internationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne et la CPI décline sa compétence – principe de subsidiarité.

Des amendements ont été déposés pour supprimer ces quatre conditions. Pour ma part, je ne crois pas qu’il faille aller au-delà du dispositif adopté par le Sénat. La compétence universelle des juridictions françaises reconnue en certains domaines, notamment le terrorisme, ne procède que de conventions internationales et ne vaut que pour les infractions désignées par celles-ci. La Convention de Rome n’impose nullement la reconnaissance d’une telle compétence, qui poserait de lourdes questions.

Sur le plan juridique, tout d’abord. Le problème du champ géographique d’application n’est pas tranché. Une telle compétence peut-elle s’exercer à l’encontre de ressortissants de pays qui ne sont pas partie à une convention autorisant l’exercice d’une compétence universelle ? La question est actuellement examinée par la Cour internationale de justice dans une affaire opposant le Congo à la France, relative à une procédure pour crimes contre l’humanité et tortures engagée par une juridiction française contre un ministre congolais de l’intérieur ; les autorités congolaises contestent que la France s’arroge une compétence universelle en matière pénale alors même que le Congo, à l’époque des faits, n’était pas partie à la convention contre la torture. Il m’apparaît plus prudent d’attendre la décision de la Cour internationale de justice avant d’élargir de nouveau le domaine d’application de la compétence universelle.

Il y aurait d’autre part des difficultés pratiques, pour une juridiction française, à mener une instruction sur une affaire qui s’est déroulée hors du territoire national et qui met en cause des étrangers.

La Belgique, après avoir conféré à ses tribunaux une compétence universelle en 1993, a dû faire marche arrière en 2003, en raison des difficultés soulevées par le dispositif. L’exposé des motifs de la loi d’août 2003 dénonçait « l’utilisation politique manifestement abusive » des dispositions de la loi de 1993, qui permettait aux juridictions belges d’engager des poursuites dans un champ très large, d’engager des poursuites in absentia et de mettre en mouvement l’action publique par la voie d’une constitution de partie civile. La loi de 2003 a donc exigé l’existence d’un lien avec la Belgique et instauré dans la plupart des cas le monopole du procureur fédéral pour l’engagement des poursuites. Ne tombons pas, par excès de bons sentiments, dans les errements qu’ont connus les Belges, ainsi que les Espagnols, qui comptent eux aussi revenir prochainement sur leur loi.

Historiquement, la compétence universelle a été conçue pour surmonter les situations d’impunité auxquelles peut aboutir l’application des règles traditionnelles de compétence des juridictions nationales. Il en est bien ainsi dans les cas actuels de compétence universelle. Dans le système du Statut de Rome, en revanche, il ne revient pas aux États parties, mais à la CPI, de se substituer à l’État défaillant qui aurait été normalement compétent pour juger l’auteur d’un crime international.

Pour toutes ces raisons, chers collègues, je vous invite à adopter sans modification le texte qui nous vient du Sénat, où il a été adopté à l’unanimité des groupes politiques.

M. Jean-Jacques Urvoas. Je me réjouis que la commission des Lois examine ce texte, que nous attendions depuis très longtemps puisque notre rapporteur a été désigné le 25 juin 2008. Préalablement, le projet avait été déposé en juillet 2006 sur le bureau de l’Assemblée nationale, puis retiré en 2007 en raison des élections législatives, puis redéposé au Sénat, pour y être adopté l 10 juin 2008, dans la nuit, donc de façon assez inaperçue, ce qui est dommage.

Le fait que notre Commission puisse en débattre aujourd’hui n’est peut-être pas totalement étranger à la lettre adressée par le président Jean-Marc Ayrault au Président de l’Assemblée nationale pour s’inquiéter de l’avenir de ce dossier, pendant depuis une dizaine d’années, voire à notre intervention du 4 mai dernier à l’occasion des questions au Gouvernement. Mais sans doute la première conférence de révision du statut, prévue à Kampala du 31 mai au 11 juin, y est-elle aussi pour beaucoup.

En l’état, ce texte soulève quatre questions, auxquelles notre Commission aura à répondre en débattant des amendements.

Première question : l’adaptation du droit pénal national est-elle ou non obligatoire ?

De fait, comme l’a indiqué le rapporteur, le Statut n’a pas prévu explicitement d’obligation d’adaptation – mais s’il l’avait fait, il aurait évité nombre de débats dans les États parties. Dès lors, le législateur a une marge de manœuvre conséquente, d’autant plus que la doctrine elle-même est assez divisée sur le sujet : les professeurs Mireille Delmas-Marty et Xavier Philippe, tous deux spécialistes de cette question, estiment que l’effet induit par le principe de complémentarité est bel et bien la nécessité effective d’adapter le droit pénal national au Statut ; en revanche, le conseiller juridique du procureur de la CPI, M. Darryl Robinson, et l’expert des Nations unies sur cette question, M. Roy Lee, estiment qu’il n’y a pas d’obligation. Quant aux juges français à la CPI, que ce soit l’actuel, M. Bruno Cotte, ou le précédent, M. Claude Jorda, leur conception est celle d’un devoir des États en la matière, mais d’ordre moral.

Pour notre part, nous retenons que la France a signé et ratifié le traité de Rome, que l’article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 dispose que « tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi » et que la France est tenue par cette règle du jeu en vertu non seulement du droit international, mais aussi de certains principes constitutionnels qui lui sont propres – l’article 53-2 de la Constitution disposant que « La République peut reconnaître la juridiction de la CPI dans les conditions prévues par le traité signé le 18 juillet 1998 ». Dès lors, nos exigences d’adaptation découlent d’une obligation tant conventionnelle que constitutionnelle.

Deuxième question : le texte adopté par le Sénat correspond-il à la transcription des exigences du statut dans notre droit interne ?

La réponse, n’en déplaise au rapporteur, est clairement négative. C’est la raison pour laquelle la commission des Affaires étrangères, sur le rapport – dont je salue la qualité – de Mme Nicole Ameline, a adopté des amendements à l’unanimité – unanimité qui n’est donc pas, monsieur le rapporteur, réservée au Sénat. Par ailleurs, élément également omis par notre rapporteur, une Coalition française pour la CPI, rassemblant quarante-cinq organisations dont certaines sont peu coutumières de ce type de regroupement – je pense notamment au Barreau de Paris ou à Amnesty International – estime que le texte du Sénat est en deçà des exigences. Quant à la Commission nationale consultative des droits de l’homme, elle a formulé le 6 novembre dernier, à l’occasion de son assemblée plénière, des recommandations à l’attention du législateur. Je pourrais également évoquer la position du Comité international de la Croix-Rouge. Il ne nous paraît donc pas possible d’adopter conforme ce texte, comme nous y invite le rapporteur.

Troisième interrogation : faut-il élargir la compétence territoriale des tribunaux français, afin de permettre la poursuite et le jugement des auteurs de génocides, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis à l’étranger ?

Le projet de loi initial du Gouvernement rejetait expressément toute attribution aux juridictions françaises d’une compétence universelle. Cela pouvait paraître surprenant, voire choquant, mais ce n’était pas illogique, dans la mesure où aucune obligation de poursuivre et de punir au titre de la compétence universelle ne figure dans le corps du traité. Le Sénat s’en est justement ému et a introduit ce principe ; mais il l’a en même temps vidé de son contenu, puisqu’il a soumis cette compétence universelle à quatre conditions cumulatives qui rendent sa mise en œuvre impossible. Aucun autre système juridique en Europe n’accumule autant d’obstacles à la poursuite de criminels internationaux.

Dans notre droit pénal actuel, en vertu de diverses conventions internationales, nous reconnaissons, d’ores et déjà, le principe de la compétence universelle de nos juridictions pour les actes de torture – article 689-2 du code de procédure pénale –, pour les actes de terrorisme – article 689-3 du même code – et pour les actes de corruption – article 689-8. C’est aussi le cas pour les infractions commises lors des conflits en ex-Yougoslavie ou dans le génocide rwandais. La France ne peut donc pas se permettre d’adopter dans ce domaine une position minimale ; elle doit faire preuve de cohérence avec les positions qu’elle prend régulièrement au niveau international en faveur de la justice internationale. Elle ne doit pas donner l’impression qu’elle se défausse de ses responsabilités sur la CPI, quand les autres pays européens ont accepté d’assumer les leurs.

La commission des Affaires étrangères a ouvert la voie en proposant la suppression des verrous posés par le Sénat. Il serait normal que la commission des Lois transforme l’essai.

Quatrième et dernière question : faut-il rendre les crimes de guerre imprescriptibles ?

L’article 29 du Statut de Rome dispose que « Les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas ». Pourtant, le texte voté par le Sénat prévoit un délai de prescription de trente ans pour les crimes de guerre et de vingt ans pour les délits. Pourquoi n’avoir pas simplement transposé en droit interne le principe international ? Là encore, il y a un débat juridique. Je ne doute pas que vous allez nous citer l’avis du 29 février 1996 du Conseil d’État – il vous arrive de vous appuyer sur ses avis –, selon lequel la règle de l’imprescriptibilité est contraire à la Constitution. Mais le Conseil constitutionnel, dans une décision du 22 janvier 1999, a dit exactement le contraire, en considérant « qu’aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, n’interdit l’imprescriptibilité des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ». Au demeurant, notre code de justice militaire prévoit, d’ores et déjà, l’imprescriptibilité de certains crimes de désertion.

L’argumentation qui a emporté l’adhésion des sénateurs est que l’imprescriptibilité doit être réservée aux seuls génocides et crimes contre l’humanité, afin de marquer leur spécificité. Mais ce n’est qu’une barrière de papier : rien n’empêche un juge français, au nom de la hiérarchie des normes, de s’affranchir de la loi pour appliquer le traité – qui, lui, prévoit l’imprescriptibilité des crimes de guerre. Voilà pourquoi il est logique de pencher pour la simplicité. Il ne saurait exister une hiérarchie juridique de l’horreur. Un texte portant « adaptation du droit pénal à l’institution de la CPI » doit avoir pour ambition de correspondre au plus près aux exigences du traité international que la France a librement signé.

M. Noël Mamère. Il y a déjà dix ans que la France a ratifié le Statut de Rome. Sur un sujet aussi essentiel que la poursuite de criminels contre l’humanité ou de criminels de guerre, nous aurions pu faire preuve d’un peu plus d’empressement…

La commission des Lois du Sénat, dans un premier temps, avait voté à l’unanimité la clause de compétence universelle, mais celle-ci a été aussitôt remise en cause par le rapporteur, soutenu par le Gouvernement. Quatre conditions, qui sont autant d’obstacles, ont ainsi été posées à sa mise en œuvre. Notre collègue Nicole Ameline, qui appartient au parti majoritaire, a défendu ce principe de compétence universelle devant la commission des Affaires étrangères, qui l’a suivie.

Il ne s’agit pas de proposer une juridiction mondiale, mais de construire un ordre juridique international en matière pénale. Pour cela, il convient d’avoir l’interprétation la plus large possible du Statut de Rome, afin de poursuivre, y compris sur notre territoire, les auteurs de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre.

C’est pourquoi nous avons déposé des amendements tendant à lever les quatre verrous posés par le Sénat. C’est le souhait exprimé aussi bien par la Coalition française pour la CPI qui, comme l’a indiqué notre collègue Urvoas, regroupe quarante-cinq organisations, que par Amnesty International ou par le Conseil national des Barreaux. Il serait irresponsable de ne pas entendre tous ceux qui s’accordent ainsi à réclamer la clause de compétence universelle.

J’ajoute que, eu égard notamment à ce qui se passe en Louisiane, nous serions bien avisés d’élargir les compétences de la CPI en reconnaissant la notion de crime écologique. Les juges français se sont d’ailleurs engagés dans cette voie à l’occasion de l’affaire Erika, en reconnaissant la notion de préjudice écologique.

Les quatre verrous posés par le Sénat feraient de la France, qui se présente comme la patrie des droits de l’homme, le pays qui en Europe aurait l’interprétation la plus restrictive du Statut de Rome, et où un criminel contre l’humanité ou un criminel de guerre pourrait vivre tranquille.

Tout d’abord, le texte adopté par le Sénat ne permet de juger les suspects de crimes internationaux que s’ils résident habituellement sur le territoire français, ce qui assure l’impunité à tous ceux qui viendraient en France sans y installer leur résidence habituelle.

Autrement dit, tandis qu’un « simple tortionnaire » peut être arrêté et poursuivi à l’occasion de son passage en France, en vertu de l’actuel article 689-2 du code de procédure pénale, l’auteur présumé de crime de guerre, crime contre l’humanité ou génocide pourrait circuler librement sur le territoire français dès lors qu’il ne s’y installerait pas durablement. Rien ne justifie un critère aussi restrictif, alors que le critère de simple présence, tel qu’interprété dans la jurisprudence de la Cour de cassation, est d’ores et déjà en vigueur dans notre droit positif pour les crimes internationaux commis en ex-Yougoslavie ou au Rwanda – lois des 2 janvier 1995 et 22 mai 1996 – ou encore pour tous les crimes énumérés aux articles 689-2 à 689-10 du code de procédure pénale.

En second lieu, le texte adopté par le Sénat introduit une condition de double incrimination, en vertu de laquelle ces crimes ne seraient poursuivis en France qu’à condition d’être incriminés par la loi pénale du pays où ils ont été commis.

Alors que le Statut ne prévoit pas cette exigence, le projet de loi subordonne la compétence des juridictions françaises à la condition que les crimes soient punissables dans leur pays d’origine. Par définition, les crimes internationaux constituent la violation de valeurs universelles reconnues par la communauté internationale et jusqu’à ce jour ardemment défendues par la France. Sur le plan symbolique, entériner cette condition de double incrimination reviendrait à remettre en cause l’universalité des droits de l’homme. Sur le plan pratique, ce serait créer des obstacles réels aux poursuites, dès lors que les gouvernants des pays commettant de tels crimes n’auraient probablement guère de peine à adapter leurs propres lois pour se mettre à l’abri des poursuites.

En troisième lieu, le texte adopté par le Sénat confie le monopole des poursuites au ministère public et empêche les victimes de déclencher l’action publique en se constituant parties civiles, ce qui constitue une rupture radicale avec la tradition française.

Cela paraît d’autant plus incohérent que la France s’est battue avec succès, lors des négociations du Statut de Rome, pour qu’il reconnaisse aux victimes une place et un rôle dans la procédure devant la CPI. Il serait choquant et contraire au principe constitutionnel d’égalité des citoyens devant la loi que le droit de déclencher une poursuite pénale par plainte avec constitution de partie civile, ouvert pour le moindre délit de droit commun, soit retiré aux seules victimes des crimes les plus graves – alors que, de surcroît, les seuls procès pénaux d’importance engagés à l’encontre d’auteurs présumés de crimes internationaux l’ont été, en France, sur plainte avec constitution de partie civile.

À titre d’exemple, le ministère public n’a jamais engagé de poursuites de son propre chef contre des Rwandais suspects de participation au génocide de 1994 et trouvés sur le territoire français, préférant systématiquement attendre que des victimes déposent plainte avec constitution de partie civile.

Enfin, le projet tel qu’amendé par le Sénat inverse le principe de complémentarité défini par le statut de la CPI, en subordonnant les poursuites en France à la condition que la Cour ait expressément décliné sa compétence. L’article 17 du Statut prévoit que la Cour ne peut se saisir qu’après avoir constaté la défaillance des juridictions internes ; elle n’a ainsi qu’une compétence complémentaire de celle des juridictions pénales nationales. Au contraire, le texte adopté par le Sénat prévoit que les juridictions françaises ne pourront pas être saisies sans que la CPI ait expressément décliné sa compétence, ce qui va à l’encontre de la compétence de principe des États énoncé dans le Statut et constituerait, dans la pratique, une difficulté supplémentaire à l’exercice des poursuites en France, dès lors qu’il faudrait d’abord obtenir de la CPI un déclinatoire que son statut ne lui permettrait vraisemblablement pas de donner.

Pour ces raisons, nous avons déposé des amendements visant à appliquer le Statut de Rome conformément à l’esprit qui a présidé à son élaboration et à sa ratification par la France.

M. Michel Hunault. Je me réjouis que notre Commission examine ce projet, étape indispensable dans la mise en œuvre du traité instituant la CPI. C’est un grand pas sur le chemin de la constitution d’un véritable ordre juridique international en matière pénale.

Le Statut de Rome crée une cour mondiale, et surtout un mécanisme de coopération judiciaire internationale. Il repose sur les deux piliers complémentaires que sont la CPI, saisie en cas de défaillance des justices nationales, et les juridictions internes des États parties au Statut, auxquels revient au premier chef la responsabilité de juger les auteurs de crimes internationaux.

Je salue l’action de la Coalition française pour la CPI, qui s’est employée à faire en sorte que ce texte vienne en discussion. Elle avait manifesté ses préoccupations au sujet des amendements qui ont été votés par le Sénat : le rapporteur vient d’y répondre point par point. Je souhaite que nous exprimions maintenant un vote conforme, faute de quoi l’adoption de ce texte serait reportée sine die.

M. François Vannson. Beaucoup de spécialistes du droit international sont d’accord sur le fait que les quatre conditions posées par le Sénat à l’article 7 bis rendront difficile la répression par la France des crimes internationaux.

La première est l’exigence de résidence habituelle sur le territoire français. Or la nécessité de prouver la résidence habituelle en France d’un suspect peut avoir pour effet de mettre à l’abri des poursuites des auteurs et complices de crimes internationaux, qui éviteront d’installer en France leurs attaches professionnelles ou familiales et se contenteront d’y effectuer des séjours plus ou moins longs.

Le texte pose ensuite une condition de double incrimination. Or par définition, les crimes internationaux constituent la violation de valeurs universelles reconnues par la communauté internationale. Cette condition revient donc à remettre en cause cette universalité et peut conduire à conférer l’immunité à des auteurs de génocide.

En troisième lieu, l’amendement voté par le Sénat confie le monopole des poursuites au parquet, ce qui est dérogatoire au droit commun et à la tradition pénale française.

Enfin, le texte du Sénat renverse le principe de complémentarité prévu par le statut de la CPI, en subordonnant les poursuites en France à la condition que la CPI ait décliné expressément sa compétence. Or il apparaît que cette disposition est contraire au Statut, dont les articles 17 et 18 prévoient que la Cour ne peut agir qu’en cas de défaillance des juridictions nationales.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il est temps de mettre en œuvre ce traité que la France a signé. Le dispositif retenu par le Sénat, qui préserve les capacités d’agir tant des juridictions nationales que de la CPI, me paraît pouvoir être adopté par notre assemblée.

Pour prolonger ce qui a été indiqué par notre collègue Urvoas, monsieur le président, j’exprime le vœu que ce projet, notamment s’il doit faire l’objet d’un vote conforme de l’Assemblée nationale, ne soit pas examiné en pleine nuit, afin qu’il soit fait état de la position du Parlement français sur une question qui, je le dis également comme maire de Drancy, n’est pas indifférente à notre pays. 

M. Dominique Perben. J’appelle l’attention de mes collègues sur le fait que, lorsqu’on mène une instruction, l’objectif est d’arriver à un résultat. Si, depuis longtemps dans notre droit, des règles de prescription et de compétence territoriale ont été fixées, c’est bien dans ce but. Engager une action qui ne débouche sur rien est pire que de n’avoir rien fait. C’est pourquoi la position du Sénat sur la compétence universelle est sage. Le fait d’engager des actions concernant des pays ou des territoires où il est très difficile de mener des enquêtes, et parfois même de se rendre, n’a d’autre signification que politique, mais la justice risque de ne pas s’y retrouver.

Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis de la commission des Affaires étrangères. La France est toujours dans son rôle lorsqu’elle fait progresser le droit international. C’est à l’unanimité que la commission des Affaires étrangères s’est prononcée sur ce texte.

La CPI est une innovation majeure : pour la première fois, un tribunal international préexiste aux crimes qu’il a pour fonction de réprimer. C’est donc un instrument de dissuasion autant que de répression.

Nous avons salué le travail effectué par le Sénat, qui, en introduisant l’article 7 bis, a bouleversé l’économie générale du texte présenté par le Gouvernement – sans cependant aller jusqu’au bout de sa logique.

Sur la question de la compétence universelle, on peut prendre exemple sur le cas de la Convention contre la torture ou sur celui de la Convention sur le terrorisme : on ne saurait ici, alors qu’il s’agit de crimes plus graves, considérer que nos responsabilités sont moindres.

Dans la définition du génocide comme dans celle du crime contre l’humanité, notre Commission a supprimé la référence à un plan concerté, les critères retenus dans le cadre du Statut de Rome – l’intention et le résultat – lui paraissant suffisants.

À l’article 7 bis, elle s’est interrogée sur les quatre « verrous » que le Sénat a introduits à l’issue d’une très longue discussion.

Elle souhaite que le critère de résidence habituelle soit remplacé par celui de présence sur le territoire – tel qu’il existe pour l’application de la Convention sur la torture et tel qu’il a été interprété par la Cour de cassation.

Le fait de confier au ministère public le monopole des poursuites est l’un des points sur lesquels j’étais restée très ouverte, considérant qu’il pouvait être utile d’apprécier l’opportunité des poursuites selon divers critères. Néanmoins la France est très engagée aux Nations unies sur le sujet du statut des victimes, dont nous considérons qu’elles ont un droit à réparation. Notre Commission s’est donc prononcée pour la suppression de ce monopole.

La condition de double incrimination, en troisième lieu, nous paraît difficile à accepter.

Enfin, nous considérons que le fait de demander que la CPI ait expressément décliné sa compétence n’est pas une juste interprétation du Statut de Rome. Nous préconisons seulement que les poursuites ne soient possibles qu’après vérification qu’aucune procédure n’est en cours devant la CPI ou devant une autre juridiction nationale ou internationale.

Notre position est guidée par la volonté de ne pas interpréter le Statut de Rome de manière restrictive et par le vœu que la France, sur ce sujet comme sur d’autres, exerce une autorité morale. Bien que je souhaite voir adopter ce projet le plus rapidement possible, je plaide aujourd’hui pour qu’il soit amélioré.

M. Dominique Raimbourg. Je partage avec M. Perben le souci de l’efficacité, mais les verrous posés par le Sénat me paraissent justement risquer d’entraîner l’inefficacité. La condition de résidence nous empêchera de poursuivre ceux qui sont seulement présents sur notre territoire. La condition de double incrimination restreint formidablement le champ d’application du texte. Le fait de réserver le monopole des poursuites au ministère public écartera des dossiers sur lesquels la pugnacité des victimes peut être bien utile. Au demeurant, il est parfois bien commode de s’abriter derrière les victimes pour éviter d’avoir à justifier d’État à État les poursuites que l’on engage contre un ressortissant étranger… Enfin, la nécessité d’obtenir de la CPI un déclinatoire de compétence risque de ralentir considérablement les poursuites, alors que, comme Mme Ameline vient de l’indiquer, il suffit de vérifier qu’il n’y a pas de procédure pendante devant une autre juridiction.

Mme George Pau-Langevin. Ce n’est pas parce que nous avons attendu très longtemps ce texte que nous ne devons pas assurer son efficacité. Les conditions restrictives qui ont été introduites sont contraires à ce que nous souhaitons.

On ne peut pas dire, comme l’a fait notre collègue Perben, qu’il ne faut engager de poursuites que si l’on est sûr de leur issue : souvenez-vous des affaires Papon et Touvier.

Oui, il faut que ce projet soit voté, mais pas dans une forme édulcorée ! Mieux vaut prendre le temps d’une nouvelle navette avec le Sénat, si cela nous permet d’adopter un texte satisfaisant.

Mme la ministre d’État. Je n’ai aucune susceptibilité d’auteur sur ce texte, n’ayant pas été à son origine, mais j’ai le souci de le faire aboutir dans les meilleurs délais. Je ne me poserai pas en arbitre entre Socialistes et Verts du Sénat et de l’Assemblée nationale ; je constate seulement que vos collègues sénateurs ont approuvé à l’unanimité le texte qui vous est soumis.

À MM. Urvoas, Mamère et Vannson, je veux préciser que la Grande-Bretagne, l’Italie, la Belgique ont institué des limitations à la compétence universelle, portant notamment sur la résidence.

Je rejoins M. Perben sur l’idée qu’il faut pouvoir aboutir. Il n’y a, en effet, rien de pire qu’une procédure lancée avec une certaine publicité et n’aboutissant à rien. Cela retentit sur l’image de la justice elle-même.

En matière de torture, madame Ameline, la compétence universelle se justifie par l’absence de cour internationale.

En ce qui concerne la prescription, monsieur Urvoas, je vous indique que depuis juin 2006, l’imprescriptibilité n’existe plus en matière de désertion. Il n’y a donc plus d’infraction imprescriptible en droit pénal militaire.

Comme M. Hunault, comme M. Lagarde, je pense qu’il faut savoir ce que l’on veut. Si vous acceptez le texte tel qu’il est issu des travaux du Sénat, il sera possible à l’Assemblée nationale de le voter conforme. Dans le cas contraire, il faudrait prolonger la navette mais, compte tenu de l’encombrement du calendrier parlementaire, je ne sais pas quand l’adoption de ce texte, qui a déjà beaucoup tardé, pourrait intervenir.

La Commission passe ensuite à l’examen des articles du projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Chapitre Ier

Dispositions modifiant le code pénal

Avant l’article 1er

La Commission est saisie des amendements identiques CL 1 de la commission des Affaires étrangères, CL 10 de M. Noël Mamère, CL 31 de M. François Vannson et CL 70 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il s’agit de la suppression de l’exigence d’un plan concerté dans la définition du génocide.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Cela entraînerait un trop grand élargissement de l’incrimination, au risque de sa banalisation.

M. Jean-Jacques Urvoas. Au Rwanda, il n’y a pas eu de plan concerté. Maintenir cette notion – qu’au demeurant l’article 6 du traité de Rome ne prévoit pas –, c’est entraver les poursuites.

La Commission rejette ces amendements.

Article 1er

(art. 211-2 [nouveau] du code pénal)


Incrimination de l’incitation publique et directe à commettre un génocide

Cet article, qui a été adopté sans modification par le Sénat, crée une incrimination nouvelle d’incitation publique et directe à commettre un génocide, qui, contrairement au génocide lui-même, n’existe pas aujourd’hui dans notre droit pénal interne.

Il insère à cette fin dans le code pénal un nouvel article 211-2 définissant l’incrimination nouvelle, reprenant dans notre droit une incrimination prévue par l’article 25, paragraphe 3 e), de la Convention de Rome. Ce dernier article dispose que, « aux termes du présent Statut, une personne est pénalement responsable et peut être punie pour un crime relevant de la compétence de la Cour si (…), s’agissant du crime de génocide, elle incite directement et publiquement autrui à le commettre ».

L’incrimination d’incitation à la commission d’un génocide existe en droit international depuis le procès de Nuremberg. L’article 3 de la Convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée le 9 décembre 1948, précise que doit être puni non seulement le génocide lui-même, mais aussi la complicité dans le génocide, la tentative de génocide, l’entente en vue de commettre un génocide et « l’incitation directe et publique à commettre un génocide ». Cette incrimination figure également dans les statuts des tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda.

En l’état actuel du droit, l’article 211-1 du code pénal punit l’auteur de génocide de la réclusion criminelle à perpétuité, le génocide étant défini comme : « le fait, en exécution d’un plan concerté tendant à la destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux, ou d’un groupe déterminé à partir de tout autre critère arbitraire, de commettre ou de faire commettre, à l’encontre de membres de ce groupe, l’un des actes suivants :

—  atteinte volontaire à la vie ;

—  atteinte grave à l’intégrité physique ou psychique ;

—  soumission à des conditions d’existence de nature à entraîner la destruction totale ou partielle du groupe ;

—  mesures visant à entraver les naissances ;

—  transfert forcé d’enfants. »

Si notre droit pénal ne reconnaît pas en tant que telle l’incrimination d’incitation à la commission d’un génocide, il faut cependant souligner qu’en l’état actuel de notre droit, les auteurs de provocation directe et publique au génocide peuvent être poursuivis sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse : l’article 23 de cette loi prévoit, en effet, que toute personne ayant provoqué directement, par voie de presse ou tout autre moyen de publication, un crime ou un délit, si cette publication est suivie d’effet, sera considérée comme complice de l’auteur de l’infraction et passible pour ce motif des mêmes peines que celui-ci. L’article 24 de la même loi précise que l’auteur d’une provocation à commettre des atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité physique ou d’une apologie des crimes contre l’humanité qui ne serait pas suivie d’effet, sera passible d’une peine de cinq ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Le nouvel article 211-2 introduit par le présent article incrimine spécifiquement la provocation publique et directe, commise « par tous moyens », à commettre un génocide. Notons que l’exigence du caractère « public et direct » de l’incitation figure tant dans la loi de 1881 que dans l’article 25 de la Convention de Rome.

Tout comme la loi de 1881, le présent article distingue deux cas de figure :

—  Si la provocation a été suivie d’effet, la qualification criminelle est retenue. L’auteur encourt alors la réclusion criminelle à perpétuité, c’est-à-dire la même peine que l’auteur du génocide lui-même. Il est assimilé à un complice, comme sous l’empire de la loi de 1881. Dans ce cas donc, l’introduction de l’incrimination spécifique visée par le nouvel article 211-2 du code pénal ne modifie pas la peine encourue par l’auteur des faits ;

—  Si la provocation n’a pas été suivie d’effet, la qualification retenue est délictuelle : l’auteur des faits encourt une peine de 7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende, ce qui constitue un relèvement de la peine encourue aujourd’hui, l’article 24 de la loi de 1881 ne prévoyant qu’une peine de 5 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Cette distinction a été critiquée par certaines des personnes entendues par votre rapporteur. Or, si le Statut de Rome ne prévoit pas une telle distinction, il ne l’interdit en rien et votre rapporteur estime qu’elle cohérente avec les principes régissant notre droit pénal et l’échelle des peines prévues en matière de provocation à la commission d’une infraction.

*

* *

La Commission est saisie des amendements CL 71 de M. Jean-Jacques Urvoas et CL 11 de M. Noël Mamère, pouvant être soumis à discussion commune.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il est clair que certains amendements ont été rédigés par des lobbies. Certains quantums de peine ne sont même pas précisés et il est mentionné que la durée de la peine est « laissée à l’appréciation du législateur » ! Je déplore que les collègues à qui ils ont été transmis n’aient même pas pris la peine d’en vérifier la forme.

M. Noël Mamère. Amnesty International, le Conseil national des Barreaux, les syndicats ne sont pas des lobbies ! Ne confondez pas ceux qui défendent leurs intérêts privés et ceux qui défendent l’intérêt général et les valeurs universelles ! Nous avons le droit, en tant que représentants du peuple, de relayer les propositions des seconds.

M. Jean-Jacques Urvoas. Votre remarque ne visait pas mon amendement, monsieur le président, mais je m’associe aux propos de M. Mamère. Je ne crois pas inconvenant que, sur un sujet qui est pendant depuis dix ans, des parlementaires s’informent auprès de ceux qui suivent le dossier depuis longtemps.

Dans cet amendement comme dans tous ceux que nous défendons, et que naturellement nous redéposerons au nom du groupe SRC pour le débat en séance publique, nous visons la transposition plutôt que l’adaptation. En l’espèce, la jurisprudence pénale internationale prévoit que l’incitation à commettre un génocide est constitutive d’un crime, qu’elle soit ou non suivie d’effet ; elle ne saurait donc relever du champ correctionnel. C’est pourquoi nous proposons de rédiger ainsi l’alinéa 3 : « Si la provocation n’a pas été suivie d’effet, les faits sont punis de trente ans de réclusion criminelle ».

M. le rapporteur. Avis défavorable pour deux raisons. D’une part, le Statut de Rome, contrairement à notre droit pénal, ne fait pas la distinction entre crimes et délits. C’est au législateur de chaque pays de définir le niveau d’incrimination qu’il souhaite pour chaque infraction. D’autre part, la tradition pénale française a toujours opéré une distinction selon qu’une incitation à commettre une infraction a été ou non suivie d’effet, je vous renvoie à la loi de 1881.

La Commission rejette successivement les deux amendements. Puis elle adopte l’article 1er sans modification.

Article 2

(art. 212-1 du code pénal)


Définition élargie des autres crimes contre l’humanité

Le présent article réécrit le premier alinéa de l’article 212-1 du code pénal qui définit les crimes contre l’humanité, autres que le crime de génocide. Il étend la définition actuelle pour englober certains actes visés à l’article 7 du Statut de Rome et qui, en l’état actuel de notre droit interne, ne sont pas expressément qualifiés de crimes contre l’humanité.

1. La définition actuelle des crimes contre l’humanité autres que le génocide

Le premier alinéa de l’actuel article 212-1 du code pénal punit de la réclusion criminelle à perpétuité « la déportation, la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains, inspirées par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisées en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile ».

Cette incrimination comporte ainsi trois éléments :

—  une liste d’actes : la déportation, la réduction en esclavage, la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains ;

—  des motifs spécifiques : ces actes sont commis pour des motifs « politiques, philosophiques, raciaux ou religieux » ;

—  l’exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile qui justifie la commission de ces actes.

2. L’élargissement de la définition de ces crimes proposé par le présent article

Le présent article remplace l’actuel premier alinéa de l’article 212-1 du code pénal par douze alinéas qui reprennent les prescriptions de l’article 7 de la Convention de Rome s’agissant de la définition des crimes contre l’humanité. Cette définition associe une liste de crimes et des circonstances particulières entourant la commission de ceux-ci.

a) Une liste détaillée de crimes

L’article 7 de la Convention de Rome comporte une définition extrêmement précise des crimes contre l’humanité, autres que le génocide, établissant une liste d’actes incriminés beaucoup plus détaillée que celle qui figure aujourd’hui à l’article 212-1 du code pénal.

Sont visés par cet article :

—  le meurtre ;

—  l’extermination ;

—  la réduction en esclavage ;

—  la déportation ou le transfert forcé de population ;

—  l’emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;

—  la torture ;

—  le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

—  la persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel religieux ou sexiste ;

—  les disparitions forcées de personnes ;

—  le crime d’apartheid ;

—  les « autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale ».

Le présent article vise à inclure ces différents comportements au sein de l’article 212-2 du code pénal, tout en adaptant certaines dénominations à notre droit pénal. Ainsi, au 1°, « l’atteinte volontaire à la vie » remplace le meurtre, le 9° vise, selon une terminologie propre à notre droit, les disparitions forcées des personnes, le 10° recouvre la notion, inconnue en droit interne, d’apartheid et le 11° reprend la notion d’« actes inhumains de caractère analogue », ce qui permet d’éviter de cantonner la définition à la liste fournie par l’article.

Certains paragraphes appellent de votre rapporteur des commentaires supplémentaires :

—  Certaines personnes entendues par votre rapporteur ont regretté que le ne fasse pas mention de l’« esclavage sexuel » pourtant expressément visé par la Convention de Rome ; la commission des Affaires étrangères, saisie pour avis, a d’ailleurs adopté un amendement en ce sens. Votre rapporteur estime qu’on doit considérer que la notion est redondante avec les incriminations de réduction en esclavage (3°) et celles visant toute forme de violences sexuelles d’une particulière gravité (5°). Votre rapporteur note, en outre, que le principe de légalité des peines impose de définir précisément les infractions ; or notre droit ne connaît pas la notion d’« esclavage sexuel ».

—  Au , le Sénat a précisé la notion de « disparitions forcées » en adoptant un amendement de Mme Boumediene-Thiery reprenant les termes de la Convention des Nations unies contre les disparitions forcées de février 2007 qui prévoit que la disparition forcée s’entend de « l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi ».

—  S’agissant du 10°, il a été relevé devant le Sénat qu’aurait pu être mentionné expressément le terme « apartheid ». Votre rapporteur estime que la définition donnée des actes de ségrégation incriminés, qui s’inspire d’ailleurs de la rédaction de l’article II de la Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid du 30 novembre 1973 (18), est bien plus satisfaisante.

b) Les circonstances qui accompagnent la commission de ces crimes

La formulation retenue par le présent article, qui s’inspire de l’article 7 de la Convention de Rome, stipulant que la commission d’un des actes qu’il énumère constitue un crime contre l’humanité lorsqu’ils sont commis « dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque », appelle quatre remarques :

—  Elle est plus large que celle figurant à l’actuel article 212-2 du code pénal qui exige une condition cumulative de pratique « massive et systématique » ;

—  Elle est étendue à la déportation et à la réduction en esclavage alors que, dans sa rédaction actuelle, l’article 212-2 ne vise que les actes d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains. On peut cependant estimer que des actes isolés ne pourraient être considérés comme crimes contre l’humanité et que c’est bien leur caractère massif et systématique qui caractérise l’existence de cette incrimination. Comme le fait remarquer M. Patrice Gélard dans son rapport, cette modification permet opportunément de distinguer plus clairement entre l’esclavage, crime contre l’humanité, et la traite des êtres humains visée à l’article 225-4-1 du code pénal, qui peut caractériser des actes isolés ;

—  La formulation retenue par le présent article supprime la condition relative à l’existence de « motifs politiques, philosophiques, sociaux ou religieux » justifiant la commission des actes incriminés ;

—  L’article conserve en revanche la référence à l’existence d’un « plan concerté » en exécution duquel sont commis les faits incriminés, notion qui a fait l’objet de débats au Sénat, au motif d’une part qu’elle n’est pas stricto sensu constitutive de la définition donnée par le Statut de Rome et d’autre part qu’elle est difficile à prouver.

La Commission des Affaires étrangères de votre assemblée a adopté un amendement supprimant l’exigence d’un plan concerté, condition qui à ses yeux trouve son origine dans le statut militaire de Nuremberg mais ne se justifie plus aujourd’hui. Elle a estimé nécessaire de pouvoir poursuivre les auteurs de crimes commis en l’absence de tout plan concerté, qui, lorsqu’il existe, serait en tout état de cause difficile à prouver.

Le maintien de la notion de « plan concerté » se justifie triplement aux yeux de votre rapporteur :

—  Il est, en premier lieu, nécessaire de conserver un caractère restrictif à la définition des crimes contre l’humanité, qui, comme l’a rappelé le Garde des Sceaux devant le Sénat, « s’inscrivent dans une logique d’anéantissement, de négation pure et simple du droit à la vie ou de l’humanité d’une population donnée », et qui doivent être distingués des crimes de guerre, qui constituent la violation des lois et coutumes de la guerre (« jus in bello »). Ouvrir plus encore la définition des crimes contre l’humanité ferait courir le risque de leur banalisation, donc de l’affaiblissement de l’incrimination ;

—  Il faut en outre noter que la notion de « plan concerté » se déduit assez naturellement des termes mêmes du Statut de Rome qui évoque « une attaque généralisée ou systématique » réalisée « en application ou dans la poursuite de la politique d’un État (…) ayant pour but une telle attaque » ;

—  S’agissant enfin de l’élément pratique, il apparaît que la notion se déduira de l’ampleur des faits, sans qu’il soit nécessairement formalisé par écrit. Le plan concerté renvoie à l’élément intentionnel de l’infraction, qui est commise en masse par un groupe d’individus et nécessite des préparatifs dont il pourra être aisé de prouver l’existence.

*

* *

La Commission examine l’amendement CL 72 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit ici de reprendre la définition du crime contre l’humanité énoncée dans le statut de la CPI, celle figurant dans le projet étant plus restrictive.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Le maintien de la notion de « plan concerté » répond à la nécessité de conserver un caractère restrictif à la définition des crimes contre l’humanité. L’ajout de celle d’ « esclavage sexuel » serait redondant avec les incriminations déjà visées. Quant à l’alinéa 12 de cet article, relatif aux actes de ségrégation, il est beaucoup plus précis que la notion d’apartheid, qui renvoie à une situation historique en Afrique du Sud mais qui est étrangère à notre code pénal.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie des amendements identiques CL 2 de la commission des Affaires étrangères, CL 12 de M. Noël Mamère, CL 32 de M. François Vannson et CL 73 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il s’agit à nouveau de supprimer la référence à la notion de plan concerté, s’agissant cette fois de la définition du crime contre l’humanité.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces amendements.

Elle est ensuite saisie des amendements CL 3 de la commission des Affaires étrangères, CL 13 de M. Noël Mamère, CL 33 de M. François Vannson et CL 74 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il s’agit de l’introduction de la notion d’esclavage sexuel.

M. le rapporteur. Cette incrimination serait redondante avec celles de réduction en esclavage et de violences sexuelles d’une particulière gravité : ces amendements sont satisfaits.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l’amendement CL 75 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Je confesse ne pas avoir écrit cet amendement, qui m’a été suggéré par le Comité international de la Croix-Rouge. Il est une réponse à la critique du rapporteur, puisqu’il comporte à la fois la notion d’apartheid et celle de ségrégation.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.

Elle est alors saisie des amendements CL 14 de M. Noël Mamère et CL 34 de M. François Vannson.

M. le président Jean-Luc Warsmann. Il s’agit toujours de la notion d’apartheid.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces amendements.

Puis elle rejette, suivant l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement rédactionnel CL 76 de M. Jean-Jacques Urvoas.

Elle adopte l’article 2 sans modification.

Après l’article 2

La Commission est saisie des amendements identiques CL 15 de M. Noël Mamère, CL 35 de M. François Vannson et CL 77 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le rapporteur. Ces amendements visent à préciser que l’ordre de commettre un génocide ou un crime contre l’humanité est manifestement illégal. Cette affirmation est incontestable, mais elle est dépourvue de toute portée juridique.

M. Jean-Jacques Urvoas. L’introduction de cette disposition dans le Statut de Rome a découlé de la jurisprudence française du procès Papon.

La Commission rejette ces amendements.

Article 3

(art. 213-4-1 [nouveau] du code pénal)


Responsabilité pénale du supérieur hiérarchique dans le cas d’un crime contre l’humanité commis par un subordonné

Cet article, qui a été adopté par le Sénat sans modification, insère au sein du sous-titre du code pénal consacré aux crimes contre l’humanité un nouvel article 213-4-1 définissant les conditions dans lesquelles la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique miliaire – premier alinéa – ou civil – second alinéa – peut être engagée dans les cas où celui-ci aurait pu empêcher ou réprimer l’exécution d’un crime contre l’humanité par un subordonné ou en référer aux autorités compétentes : il s’agit de sanctionner le comportement du supérieur hiérarchique qui reste inactif face aux agissements criminels de ses subordonnés. Une telle mise en jeu de la responsabilité pénale des supérieurs hiérarchiques est prévue par l’article 28 de la Convention de Rome, et doit être distinguée de la mise en jeu de la responsabilité pénale de celui qui « ordonne, sollicite ou encourage » la commission d’un crime, qui est elle prévue par l’article 33 de cette même Convention.

1. Les lacunes de notre droit au regard des stipulations de l’article 28 de la Convention de Rome

Le a) de l’article 28 de la Convention de Rome stipule qu’un chef militaire est pénalement responsable des crimes contre l’humanité commis par des forces placées sous son commandement et son contrôle effectifs, dans le cas :

—  où il savait ou aurait dû savoir que ces forces commettaient ou allaient commettre ces crimes,

—  et où il n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables étant en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites.

Le b) de l’article 28 de la Convention de Rome stipule, quant à lui, qu’un supérieur hiérarchique civil est pénalement responsable des crimes contre l’humanité commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs, dans le cas :

—  où il savait que ses subordonnés commettaient ou allaient commettre ces crimes ou avait délibérément négligé de tenir compte d’informations pertinentes,

—  où ces crimes sont liés à des activités relevant de sa responsabilité et de son contrôle effectifs

—  et où il n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables étant en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites.

L’existence de la deuxième condition rend l’engagement de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil plus restreint, du fait d’un lien hiérarchique avec le subordonné supposé moins fort que dans une organisation militaire.

Notre droit interne, par dérogation au principe général posé par l’article 121-1 du code pénal qui dispose que « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait », prévoit que la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire peut être engagée sur la base de l’article L. 122-4 du code de justice militaire qui assimile à un complice le supérieur hiérarchique qui aurait toléré les agissements criminels de son subordonné. Cet article dispose : « lorsqu’un subordonné est poursuivi comme auteur principal d’une des infractions prévues à l’article L. 122-3 (19) et que ses supérieurs hiérarchiques ne peuvent être recherchés comme coauteurs, ils sont considérés comme complices dans la mesure où ils ont organisé ou toléré les agissements criminels de leur subordonné ». N’est, en revanche, pas mentionnée l’hypothèse où le supérieur hiérarchique aurait dû savoir que ses subordonnés commettaient un crime, contrairement à l’article 28 de la Convention de Rome.

La responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil n’est en revanche pas expressément engagée en cas de passivité et ne peut être engagée que sur le chef général de complicité, visé à l’article 121-7 du code pénal (20).

2. Le présent article précise les conditions d’engagement de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire ou civil en cas de crime contre l’humanité commis par un subordonné

Le premier alinéa du présent article 3 précise les conditions d’engagement de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire. Il reproduit les critères posés par le a) de l’article 28 de la Convention de Rome :

—  le subordonné est placé « sous l’autorité et le contrôle effectifs » du supérieur hiérarchique militaire ;

—  ce dernier « savait ou aurait dû savoir » que ce subordonné commettait ou allait commettre ce crime ;

—  il n’a pas pris « toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites ».

Le second alinéa du présent article précise les conditions d’engagement de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil en cas de crime contre l’humanité commis par un subordonné. Il reproduit les critères posés par le b) de l’article 28 de la Convention de Rome :

—  le subordonné est placé « sous l’autorité et le contrôle effectifs » du supérieur hiérarchique civil ;

—  le crime est « lié à des activités relevant de sa responsabilité ou de son contrôle effectifs » ;

—  le supérieur hiérarchique « savait » que ce subordonné commettait ou allait commettre ce crime ou « a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement » ;

—  il n’a pas pris « toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites ».

Dans ces cas, le présent article précise que le chef hiérarchique, militaire ou civil, est considéré comme complice, ce qui implique qu’il est passible des mêmes peines que l’auteur principal des faits. Il s’agit d’une nouvelle hypothèse de complicité qui s’ajoute, s’agissant des crimes contre l’humanité (21), aux dispositions générales de l’article 121-7 du code pénal (ce qui explique la présence de la formulation : « sans préjudice de l’application des dispositions de l’article 121-7 »).

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La Commission examine les amendements identiques CL 16 de M. Noël Mamère, CL 36 de M. François Vannson et CL 78 de M. Jean-Jacques  Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Le fait d’inscrire que « la qualité officielle de chef d’État ou de chef de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent titre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine » n’enlèvera rien à la portée de textes comme la Convention de Vienne, qui assure la protection diplomatique des chefs d’État et des ministres lors de leurs séjours à l’étranger.

M. Noël Mamère. J’ajoute que dans l’affaire Kadhafi, en mars 2001, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’il pouvait y avoir des exceptions au principe coutumier selon lequel les chefs d’État en exercice ne peuvent faire l’objet de poursuites.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Ces amendements contreviennent aux dispositions constitutionnelles relatives aux immunités du Président de la République et des parlementaires ainsi qu’aux stipulations des conventions internationales, notamment celle de Vienne sur les immunités diplomatiques.

La Commission rejette ces amendements. Puis elle adopte l’article 3 sans modification.

Article 4

(art. 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal)


Atteintes à l’administration de la justice de la CPI : aggravation des peines encourues par les auteurs de violences contre un membre ou un agent de la Cour ou un témoin ou une victime ayant déposé devant elle

Les articles 4 à 6 du projet de loi visent à réprimer les atteintes à l’administration de la justice devant la CPI, conformément à l’article 70 de la Convention de Rome.

Le paragraphe 1 de ce dernier article définit les différentes atteintes au fonctionnement de la CPI, que sont le faux témoignage, la falsification d’éléments de preuve, la subornation de témoin, les intimidations et représailles à l’encontre des membres de la Cour, la corruption de ses membres, notamment.

Le paragraphe 4 de ce même article exige des États qu’ils étendent aux atteintes à l’administration de la justice de la CPI les dispositions de leur droit pénal réprimant les atteintes à l’intégrité de leurs procédures d’enquête ou de leur système judiciaire commises sur leur territoire ou par l’un de leurs ressortissants.

Par exception au principe de complémentarité, la Cour exerce en effet directement sa compétence juridictionnelle en matière d’atteintes à son fonctionnement. Elle peut demander à un État partie de saisir, dès lors qu’il le juge approprié, les autorités compétentes aux fins de poursuites.

L’article 4 du présent projet de loi, qui a été adopté sans modification par le Sénat, prévoit en conséquence l’aggravation des peines encourues par les auteurs de violences sur un membre ou un agent de la CPI ou sur un témoin, une victime ou une partie civile, soit en raison de la dénonciation ou de sa plainte, soit à cause de sa déposition devant la CPI :

—  Le de l’article étend aux membres et agents de la CPI la liste des victimes des crimes et délits visés par les articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal emportant une aggravation de la peine pour l’auteur des faits ;

—  Le de l’article étend cette liste aux témoins, victimes et parties civiles victimes de telles infractions en raison, selon le cas, de leur dénonciation, de leur plainte ou de leur déposition devant la CPI.

L’article 222-3 du code pénal prévoit que le fait de soumettre une personne à des tortures ou des actes de barbarie est puni de vingt ans  – et non de quinze ans – de réclusion criminelle lorsque ce crime est commis avec une circonstance aggravante, dont cet article établit la liste. Le 4° de cet article précise que constitue une circonstance aggravante le fait de commettre un tel crime sur certaines victimes, dont « un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel ». Le 1° du présent article complète cette liste par « un membre ou un agent de la CPI ».

Le 5° de l’article précise que constitue également une circonstance aggravante le fait de commettre un tel crime sur « un témoin, une victime ou une partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ». Le 2° du présent article modifie cette rédaction afin d’introduire le cas d’une déposition devant la CPI.

Le 1° et le 2° du présent article procèdent aux mêmes ajouts aux articles 222-8 (violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, punies de vingt ans de réclusion, et non pas quinze), 222-10 (violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, punies de quinze ans de réclusion, au lieu de dix ans d’emprisonnement), 222-12 (violences ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) de plus de huit jours, punie de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende et non respectivement trois ans et 45 000 euros en l’absence de circonstance aggravante) et 222-13 (violences ayant entraîné une incapacité totale de travail de moins de huit jours ou n’ayant entraîné aucune ITT, punies de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende) du code pénal.

La Commission adopte l’article 4 sans modification.

Article 5

(art 434-4-2 [nouveau] du code pénal)


Atteintes à l’administration de la justice de la CPI : entraves à la saisine de la justice

Cet article insère un nouvel article 434-4-2 dans le code pénal afin d’étendre la répression des actes de falsification ou de destruction de preuve, prévue par notre code pénal à son article 434-4, à de tels actes qui porteraient atteinte à l’administration de la justice de la CPI. Seront désormais applicables à ces actes les dispositions de l’article 434-4 qui punissent de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (22) le fait « en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité,

 1° De modifier l’état des lieux d’un crime ou d’un délit soit par l’altération, la falsification ou l’effacement des traces ou indices, soit par l’apport, le déplacement ou la suppression d’objets quelconques ;

 2° De détruire, soustraire, receler ou altérer un document public ou privé ou un objet de nature à faciliter la découverte d’un crime ou d’un délit, la recherche des preuves ou la condamnation des coupables. (…) »

Le Sénat n’a, hormis un amendement rédactionnel présenté par son rapporteur, pas modifié cet article.

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

Article 6

(art. 434-23-1 [nouveau] du code pénal)


Atteintes à l’administration de la justice de la CPI : entraves à l’exercice de la justice

Cet article insère un nouvel article 434-23-1 au sein du code pénal afin de rendre les incriminations prévues aux articles 434-8, 434-9, 434-13 à 434-15 de ce même code applicables aux actes visés par ces articles lorsque ceux-ci portent atteinte à l’administration de la justice par la CPI. Le Sénat n’a pas modifié cet article, hormis un amendement rédactionnel présenté par son rapporteur.

Les actes visés sont les suivants :

—  Menace et acte d’intimidation envers un magistrat, un arbitre, un juré, un interprète, un expert ou un avocat en vue d’influencer son comportement dans l’exercice de ses fonctions : l’article 434-8 du code pénal dispose qu’une telle infraction est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ;

—  Corruption active ou passive de magistrat, de juré, d’expert : l’article 434-9 du code pénal précise qu’une telle infraction est punie de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende. Lorsque l’infraction (sollicitation ou acceptation de dons ou avantages) est commise par un magistrat au bénéfice ou au détriment d’une personne faisant l’objet de poursuites criminelles, la peine est portée en vertu de ce même article à quinze ans de réclusion criminelle et 225 000 euros d’amende ;

—  Faux témoignage : l’article 434-13 punit de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende « le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d’une commission rogatoire». Le second alinéa de cet article précise cependant que l’auteur d’un faux témoignage sera exempt de peine s’il a spontanément rétracté son témoignage avant la décision mettant fin à la procédure rendue par la juridiction d’instruction ou par la juridiction de jugement.

L’article 434-14 dispose quant à lui que la peine encourue pour faux témoignage est portée à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende dans deux cas : d’une part lorsque le témoignage mensonger est provoqué par la remise d’un don ou d’une récompense quelconque et, d’autre part, lorsque celui contre lequel ou en faveur duquel le témoignage mensonger a été commis est passible d’une peine criminelle ;

—  Subornation de témoin : l’article 434-15 punit de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, que la subornation soit ou non suivie d’effet, « le fait d’user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices au cours d’une procédure ou en vue d’une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s’abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation ».

La Commission adopte l’article 6 sans modification.

Article 7

(art. 461-1 à 461-31 [nouveaux] et 462-1 à 462-11 [nouveaux] du code pénal)


Définition des crimes et délits de guerre

Cet article insère au sein de la partie législative du code pénal un nouveau livre IV bis relatif aux crimes et délits de guerre, comprenant quarante-deux articles répartis en deux chapitres et visant à intégrer dans notre droit pénal les stipulations de l’article 8 de la Convention de Rome relatives aux crimes de guerre.

LIVRE IV bis
DES CRIMES ET DES DÉLITS DE GUERRE

Chapitre I er
Des différents crimes et délits de guerre

Le chapitre Ier du nouveau livre est relatif aux différents crimes et délits de guerre. Il se compose de quatre sections : la première apporte une définition générale des crimes et délits de guerre, la deuxième est relative aux crimes et délits de guerre communs aux conflits armés internationaux et non internationaux, tandis que les deux suivantes distinguent respectivement ces crimes et délits spécifiques aux conflits internationaux et ceux propres aux conflits non internationaux, distinction qui figure dans la Convention de Rome.

Section 1
De la définition des crimes et délits de guerre

Article 461-1 [nouveau] du code pénal
Définition des infractions commises pendant un conflit armé

La définition des crimes et délits de guerre fournie par cet article comprend quatre éléments :

—  une liste d’infractions : celles qui sont définies par le nouveau livre IV bis du code pénal créé par le projet de loi ;

—  les circonstances de l’infraction : ces infractions doivent répondre à une condition de temporalité (elles doivent avoir été commises lors d’un conflit armé, qu’il soit international ou non) et de causalité (elles doivent être en relation avec ce conflit) ;

—  les textes ou coutumes dont les dispositions ont été méconnues : ces infractions doivent avoir été commises en violation des lois et coutumes de la guerre ou des conventions internationales applicables aux conflits armés ;

—  les personnes et biens visés : ces infractions doivent avoir été commises à l’encontre des personnes ou des biens visés au chapitre I er de ce même livre IV bis.

Le présent article distingue entre crimes et délits alors que l’article 8 de la Convention de Rome ne traite que des « crimes » de guerre, le droit international ignorant en effet la distinction du droit français et englobant sous un même vocable des infractions de gravité inégale. Votre rapporteur rappelle qu’il appartient au législateur français, dans cette loi d’adaptation, d’inscrire les nouvelles incriminations dans le cadre des grandes catégories de notre droit pénal, d’autant que le Statut de Rome ne fixe pas d’échelle de peines des différentes incriminations.

Cet article ne définit, en revanche, pas la notion de conflits armés non internationaux, qui, selon la définition donnée à l’article 7, paragraphe 2 f, de la Convention, « opposent de manière prolongée sur le territoire d’un État les autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés organisés ou des groupes organisés entre eux » et ne peuvent pas être assimilés « aux situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ». Il peut, en effet, être délicat dans les faits de distinguer entre un conflit international et un conflit non international, un conflit armé interne pouvant par exemple être internationalisé par l’intervention d’une force armée extérieure.

*

La Commission est saisie des amendements CL 17 de M. Noël Mamère, CL 37 de M. François Vannson et CL 79 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit ici de définir la notion de conflit armé non international, afin d’éviter tout risque juridique.

M. le rapporteur. Cet amendement est inutile, les conflits armés non internationaux étant définis par le deuxième protocole additionnel aux conventions de Genève, ratifié par la France. À défaut de retrait, avis défavorable.

La Commission rejette ces amendements.

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Section 2
Des crimes et délits de guerre communs aux conflits armés internationaux et non internationaux

La section 2, relative aux crimes et délits de guerre communs aux conflits armés internationaux et non internationaux est composée de trois sous-sections : la première relative aux atteintes à la personne humaine, la deuxième aux crimes et délits de guerre liés à la conduite des hostilités et la dernière relative aux groupements formés ou ententes établies en vue de préparer des crimes ou des délits de guerre.

Sous-section 1
Des atteintes à la personne humaine perpétrées lors d’un conflit armé international ou non international

Cette sous-section est organisée en trois paragraphes : le premier relatif aux atteintes à la vie et à l’intégrité physique ou psychique, le deuxième aux atteintes à la liberté individuelle, le dernier aux atteintes aux droits des mineurs dans les conflits armés.

Paragraphe 1
Des atteintes à la vie et à l’intégrité physique ou psychique

Article 461-2 à 461-5 [nouveaux] du code pénal

Atteintes à la vie et à l’intégrité des personnes

L’article 461-2 prévoit l’aggravation des peines – selon l’échelle d’aggravation définie au nouvel article 462, cf. infra – encourues pour les infractions d’atteintes volontaires à la vie, d’atteintes volontaires à l’intégrité physique ou psychique de la personne et d’enlèvement et de séquestration lorsqu’elles ont été commises à l’encontre d’une personne « protégée par le droit international des conflits armés en vertu des lois et coutumes de guerre et du droit international humanitaire ».

Ainsi, l’enlèvement ou la séquestration de moins de sept jours, normalement puni de cinq ans d’emprisonnement (article 224-1 du code pénal) sera puni de sept ans d’emprisonnement s’il est commis sur une personne protégée.

Qui sont les personnes protégées par le droit international des conflits armés ?

Figurent au nombre des personnes bénéficiant d’une protection spéciale les blessés ou malades des forces armées, le personnel sanitaire et religieux attaché aux forces armées ou civil, les prisonniers de guerre, les blessés et malades civils, le personnel des organismes de protection civile, le personnel de secours, les parlementaires, la population civile, les personnes privées de liberté, détenues et internées, la population d’un territoire occupé, les femmes et les enfants, les étrangers, réfugiés et apatrides sur le territoire d’une partie au conflit.

L’article 461-3 incrimine les mutilations et expériences scientifiques ou médicales non justifiées par un intérêt thérapeutique menées sur des personnes d’une partie adverse, lorsqu’elles entraînent la mort ou portent atteinte à l’intégrité physique ou psychique de ces personnes.

Cette nouvelle infraction, qui est la reprise de celle visée par les points 2.b.x et 2.e.xi de l’article 8 de la Convention de Rome, comporte ainsi trois conditions :

—   la motivation des actes  – ou plus précisément l’absence de motivation de ces actes – qui ne doivent être justifiés, ni par des motifs thérapeutiques, ni pratiqués dans l’intérêt de la personne ;

—   les effets de ces actes : ils doivent provoquer la mort ou porter « gravement » (23) atteinte à la santé ou à l’intégrité physique ou psychique ;

—   la qualité des victimes : il doit s’agir de personnes d’une partie adverse.

Cet article fixe également le quantum de la peine encourue, qui est la réclusion criminelle à perpétuité. Ce quantum est à rapprocher de celui fixé par l’article 223–8 du code pénal pour le délit de pratique d’une recherche biomédicale sans avoir recueilli le consentement de la personne ou d’une personne ayant autorité, qui est puni de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Assurément, la circonstance même de conflits armés permet plus aisément d’imposer des expériences médicales sur des ressortissants des parties adverses, l’histoire de l’humanité nous en fournissant des exemples douloureux. Il est donc tout à fait justifié d’en faire un crime puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

L’article 461-4 incrimine quatre types de violences sexuelles, conformément aux points 2.b.xxii et 2.e.vi de l’article 8 de la Convention de Rome : la prostitution forcée, le fait de contraindre une femme à une grossesse non désirée, la stérilisation forcée et « toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable », cette dernière formulation permettant d’éviter l’écueil d’une liste limitative d’infractions. L’article précise que de tels actes sont punis de la réclusion criminelle à perpétuité.

L’article 461-5 incrimine les traitements humiliants et dégradants sur des personnes de la partie adverse, dès lors que ces traitements portent gravement atteinte à leur intégrité physique ou psychique. Il s’agit d’adapter dans notre droit pénal des dispositions des points 2.b.xxi et 2.c.ii de l’article 8 du Statut de Rome.

Cet article précise que de tels actes sont punis d’une peine maximale de 15 ans de réclusion criminelle.

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La Commission est saisie des amendements CL 18 de M. Noël Mamère, CL 38 de M. François Vannson et CL 80 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. J’aimerais comprendre pourquoi l’adverbe « gravement » a été retenu, là où le traité de Rome utilise l’adverbe « sérieusement » – que je propose de lui substituer.

M. le rapporteur. Les termes « grave » et « gravement » sont habituels en droit pénal et font l’objet d’une jurisprudence établie. On peut penser qu’une erreur de traduction de l’anglais a été commise, « serious crime » étant habituellement traduit par « crime grave ».

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle rejette successivement, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements CL 81 de M. Jean-Jacques Urvoas, CL 4 de la commission des Affaires étrangères, CL 82 de M. Jean-Jacques Urvoas, ainsi que les amendements identiques CL 19 de M. Noël Mamère et CL 39 de M. François Vannson.

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Paragraphe 2
Des atteintes à la liberté individuelle

Article 461-6 [nouveau] du code pénal

Atteintes à la liberté individuelle de personnes protégées par le droit international des conflits armés

L’article 432-4 du code pénal punit de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende le fait, pour une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, d’ordonner ou d’accomplir arbitrairement un acte attentatoire à la liberté individuelle, ces peines étant portées à trente ans de réclusion criminelle et 450 000 euros d’amende lorsque l’acte attentatoire consiste en une détention ou une rétention d’une durée de plus de sept jours. Le nouvel article 461-6 applique l’échelle d’aggravation de peine prévue par le nouvel article 462-1 à ces atteintes à la liberté individuelle, dès lors que :

—  ces atteintes sont le fait d’une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public,

—  qui ordonne ou accomplit arbitrairement un acte attentatoire à la liberté individuelle,

—  d’une personne protégée par le droit international,

—  hormis dans les hypothèses où les conventions internationales admettent des atteintes à la liberté individuelle.

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Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL 20 de M. Noël Mamère.

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Paragraphe 3
Des atteintes aux droits des mineurs dans les conflits armés

Article 461-7 [nouveau] du code pénal

Participation des mineurs au conflit armé

Dans sa version initiale, cet article incriminait le fait d’impliquer des mineurs de quinze ans dans un conflit armé, que ce soit en procédant à leur conscription ou leur enrôlement dans les forces armées ou dans les groupes armés, ou en les faisant participer activement aux hostilités.

Le Sénat a, à l’initiative de sa commission des Lois, souhaité étendre cette protection à tous les mineurs, substituant la limite de dix-huit ans à celle de quinze ans, allant donc au-delà des exigences du Statut de Rome (article 8, points 2.b.xxvi et 2.e.vii) qui incriminent le fait de « procéder à la conscription ou l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités ». Il s’agit de se conformer d’une part à l’âge de la majorité retenu dans notre droit mais aussi aux engagements pris par la France dans le cadre du protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés du 25 mai 2000 (24).

Le Sénat a en outre, sur proposition de M. Hugues Portelli, précisé que « ces dispositions ne font pas obstacle à l’enrôlement volontaire des mineurs de plus de 15 ans » : il s’agit de préserver la possibilité pour les jeunes de quinze à dix-huit ans de suivre une formation dans une école militaire ou de s’engager volontairement. Selon les informations transmises à votre rapporteur par le ministère de la Défense, 234 mineurs âgés de 16 à 18 ans étaient engagés volontaires dans l’armée en 2008.

Sous-section 2
Des crimes et délits de guerre liés à la conduite des hostilités

Cette sous-section est subdivisée en deux paragraphes : le premier a trait aux moyens et méthodes de combat prohibés, tandis que le second est relatif aux atteintes aux biens dans les conflits armés.

Paragraphe 1
Des moyens et méthodes de combat prohibés

Article 461-8 à 461-14 [nouveaux] du code pénal

Méthodes de combat interdites

L’article 461-8 punit de la réclusion criminelle à perpétuité le fait, soit d’ordonner qu’il n’y ait pas de survivants, soit d’en menacer l’adversaire. Il va ainsi plus loin que la Convention de Rome qui, à son article 8, points 2.b.xii et 2.e.x, stipule que doit être incriminé le « fait de déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier » et non le fait de prendre une telle décision. La formulation retenue par le projet gouvernemental, non modifiée par le Sénat, reprend en fait les termes de l’article 40 du règlement IV concernant les lois et coutumes de la guerre signé à La Haye le 18 octobre 1907.

L’article 461-9 réprime les attaques délibérément lancées sur des civils ne prenant pas part directement aux hostilités, punies de la réclusion criminelle à perpétuité. Il s’agit de la reprise des articles 8.2.b.i et 8.2.c.i du Statut de Rome.

L’article 461-10 incrimine le fait de causer des blessures ayant porté gravement atteinte l’intégrité physique d’un combattant de la partie adverse qui s’était rendu. Il s’agit de la reprise, quoique plus large – la Convention de Rome ne visant que les conflits internationaux –, de l’article 8.2.b.vi du Statut de Rome qui stipule que doit être incriminé le « fait de tuer ou de blesser un combattant qui, ayant déposé les armes ou n’ayant plus de moyens de se défendre, s’est rendu à discrétion ».

Cet article prévoit une peine de vingt ans de réclusion criminelle, portée à trente ans si les blessures ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ou la mort de la victime sans intention de la donner, et à la réclusion criminelle à perpétuité en cas d’homicide volontaire.

Dans la version initiale du projet de loi, l’article 461-11 incriminait le fait de causer par traîtrise des blessures ayant entraîné une grave atteinte à l’intégrité physique à un individu appartenant à « la nation ou à l’armée adverse ». L’article 8 de la Convention de Rome (2.b.xi et 2.e.ix) visant quant à lui l’ « adversaire combattant », le Sénat a complété la liste des victimes par la mention d’« un combattant de la partie adverse ».

Comme à l’article précédent, il est prévu un régime d’aggravation des peines : la peine de vingt ans de réclusion criminelle est portée à trente ans lorsque le fait a provoqué une mutilation ou une infirmité permanente ou la mort de la victime sans intention de la donner, et à la réclusion criminelle à perpétuité en cas d’homicide volontaire.

L’article 461-12 incrimine les attaques contre le personnel, les bâtiments ou installations, le matériel, les moyens de transport opérant, d’une part, dans le cadre d’une mission sanitaire lorsqu’ils portent les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève ( de l’article), d’autre part, dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de maintien de la paix, conformément à la Charte des Nations unies dès lors qu’ils ont droit, comme le prévoit expressément le Statut de Rome, à « la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil  » ( de l’article).

Cet article reprend ainsi les stipulations de l’article 8 (2.b.iii et 2.e.ii et iii) et prévoit que la peine de vingt ans de réclusion criminelle est portée à trente ans lorsque ces attaques ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente et à la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’elles ont provoqué, de manière intentionnelle ou non, la mort.

L’article 461-13 punit de vingt ans de réclusion criminelle le fait de lancer des attaques délibérées contre des bâtiments à caractère religieux, éducatif, artistique, scientifique, caritatif, des monuments historiques, des hôpitaux ou des lieux où sont rassemblés malades ou blessés dès lors que ces bâtiments ne sont « pas alors utilisés à des fins militaires ».

Il reprend ainsi les stipulations de l’article 8 (2.b.ix et 2.e.ii) mais de manière plus protectrice, la Convention de Rome subordonnant quant à elle l’existence du crime de guerre au fait que ces bâtiments « ne sont pas des objectifs militaires ».

L’article 461-14 punit de quinze ans de réclusion criminelle le fait de lancer des attaques délibérées contre des biens de caractère civil qui ne sont pas des objectifs militaires, reprenant la stipulation de l’article 8 (2.b.v) tout en l’étendant, la Convention de Rome ne mentionnant ce crime que dans le cadre des conflits armés internationaux.

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La Commission est saisie de l’amendement CL 83 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit de compléter la liste des bâtiments mentionnés dans la rédaction proposée pour l’article 461-13 du code pénal.

M. le rapporteur. Cet amendement procède d’une confusion : l’article 461-13 ne transpose pas le point 2, b) v), mais le point 2, b) ix) de l’article 8 du Statut de Rome. Je vous suggère donc de le retirer. À défaut, avis défavorable.

M. Jean-Jacques Urvoas. Je vais vérifier.

M. Jean-Jacques Urvoas retire son amendement.

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Paragraphe 2
Des atteintes aux biens dans les conflits armés

Articles 461-15 à 461-17 [nouveaux] du code pénal

Atteintes aux biens

Dans sa version initiale, l’article 461-15 incriminait le fait de se livrer, en bande, avec des armes ou à force ouverte, au pillage d’une ville ou d’une localité, reprenant partiellement les stipulations de l’article 8 (2.b.xvi et 2.e.v), étant précisé que le Statut de Rome ne prévoit pas que le crime soit commis en bande. Jugeant que ne pouvaient être exclus de l’incrimination nouvelle les cas de pillages de petites localités par un individu isolé, le Sénat a, à l’initiative de sa commission des Lois, adopté un amendement revenant aux termes de la Convention et supprimant la condition liée à la commission de l’infraction en bande. Le Sénat n’a, en revanche, pas modifié le quantum de peine encourue, fixé à quinze ans de réclusion criminelle.

L’article 461-16 prévoit l’aggravation des peines – selon les conditions de l’article 462-1 – pour les vols, les extorsions, les destructions ou dégradations ou recel du produit de l’une de ces infractions, lorsqu’elles sont commises à l’encontre d’une personne protégée par le droit international des conflits armés, hormis le cas où elles sont justifiées par des nécessités militaires.

Ainsi, l’extorsion, normalement punie de sept ans d’emprisonnement (article 312-1 du code pénal) sera punie de dix ans d’emprisonnement, en application de l’article 462-1 du code pénal.

L’article 461-17 prévoit, quant à lui, que la tentative des infractions visées à l’article précédent, à l’exception du recel, est également passible des mêmes causes d’aggravation de peines.

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La Commission est saisie des amendements identiques CL 5 de la commission des Affaires étrangères, CL 21 de M. Noël Mamère, CL 40 de M. François Vannson et CL 84 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le rapporteur. Ces amendements visent à qualifier de crime ou délit de guerre les vols, extorsions, destructions, dégradations et détériorations de biens protégés, même s’ils ne sont pas la propriété de personnes protégées. Avis défavorable, la rédaction actuelle de l’article étant conforme au Statut de Rome qui vise les « biens de l’ennemi » ou les « biens de l’adversaire ».

La Commission rejette ces amendements.

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Sous-section 3
Des groupements formés ou des ententes établies en vue de préparer des crimes ou des délits de guerre

Article 461-18 [nouveau] du code pénal

Groupements formés ou ententes établies en vue de préparer des crimes ou des délits de guerre

Cet article incrimine la participation à un groupement ou à une entente en vue de préparer un crime ou un délit de guerre. Cette infraction est constituée sans qu’il soit nécessaire que le crime ou le délit ait été effectivement commis : il suffit qu’un ou plusieurs faits matériels attestent la préparation de l’infraction, à l’image de l’association de malfaiteurs définie à l’article 450-1 du code pénal. Elle est punie de 10 ans d’emprisonnement et 225 000 euros d’amende.

Cette infraction ne figure pas dans le Statut de Rome ; elle constitue cependant une modalité spécifique d’incrimination du droit pénal français, qui a déjà utilisée pour les crimes et délits d’une particulière gravité :

—  pour les crimes contre l’humanité (article 212-3 du code pénal) ;

—  pour les actes de terrorisme (article 421-5 du code pénal).

Une telle incrimination s’avère particulièrement utile pour prévenir la commission d’une infraction et votre rapporteur juge tout à fait opportun de l’étendre aux crimes de guerre.

Section 3
Des crimes et des délits de guerre propres aux conflits armés internationaux

La section 3, relative aux crimes et délits de guerre propres aux conflits armés internationaux, comprend deux sous-sections, la première relative aux atteintes à la liberté et aux droits des personnes et la seconde aux moyens et méthodes de combat prohibés.

Sous-section 1
Des atteintes à la liberté et aux droits des personnes dans les conflits armés internationaux

Articles 461-19 à 461-22 [nouveaux] du code pénal

Atteintes aux droits des personnes

L’article 461-19 incrimine le fait d’employer une personne protégée par le droit international pour empêcher que certaines zones ou forces militaires ne soient la cible d’opérations militaires (« boucliers humains »). Ce crime sera puni de vingt ans de réclusion criminelle. Il s’agit de la reprise des stipulations de l’article 8 (2.b.xxiii) de la Convention de Rome.

L’article 461-20, reprenant les stipulations de l’article 8 (2.a.v et 2.b.xv) de la Convention de Rome punit de vingt ans de réclusion criminelle le fait :

—  d’une part, de contraindre une personne protégée par le droit international à servir dans les forces armées, le Sénat ayant supprimé la limite posée par le projet initial des personnes de la « partie adverse », jugeant cette précision trop restrictive car interdisant notamment la protection du personnel humanitaire et, qui plus est, contraire à la Convention de Rome qui vise toute « personne protégée » ;

—  d’autre part, de contraindre des nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays même s’ils étaient au service de l’autre puissance avant le commencement de la guerre.

L’article 461-21 incrimine le fait d’empêcher une personne protégée par le droit international des conflits armés d’être jugée régulièrement et impartialement. Il s’agit de la reprise de l’article 8, point 2.a.vi, de la Convention de Rome. La peine alors encourue est de vingt ans de réclusion criminelle, portée à la réclusion criminelle à perpétuité si l’infraction a conduit à l’exécution de la personne.

L’article 461-22 reprend, quant à lui, les stipulations de l’article 8, point 2.b.xiv, de la Convention afin de punir de quinze ans de réclusion criminelle le fait de déclarer irrecevables, forclos ou suspendus les droits ou actions des nationaux de la partie adverse en raison de leur nationalité.

Sous-section 2
Des moyens et méthodes de combat prohibés dans un conflit armé international

Articles 461-23 à 461-29 [nouveaux] du code pénal

Méthodes de combat interdites

L’article 461-23 incrimine l’utilisation de certaines armes prohibées, reprenant les stipulations de divers points de l’article 8 de la Convention de Rome.

Il punit de la réclusion criminelle à perpétuité l’utilisation :

—  de poison ou d’armes empoisonnées () : il s’agit de la reprise du point 2.b.xvii de l’article 8 de la Convention ;

—  de gaz asphyxiants, toxiques ou assimilés (), reprenant le point 2.b.xviii de cet article ;

—  de balles se déformant dans le corps humain (), reprenant le point 2.b.xix de ce même article ;

—  d’armes, projectiles, matériels ou méthodes de combat ayant fait l’objet d’une interdiction générale et ayant été inscrits dans une annexe au statut de la Cour pénale internationale () : il s’agit de la reprise du point 2.b.xx.

L’article 461-24 punit de la réclusion criminelle à perpétuité le fait d’attaquer ou de bombarder des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et ne constituent pas des objectifs militaires, reprenant ainsi les termes de l’article 8 en son point 2.b.v.

L’article 461-25 reprend, quant à lui, les termes du point 2.b.xxv de ce même article incriminant le fait d’affamer des personnes civiles, notamment en empêchant l’acheminement des secours. Il précise que ce crime est passible de la réclusion criminelle à perpétuité.

L’article 461-26 incrimine le fait par une puissance occupante de participer au transfert de population civile soit dans le territoire qu’elle occupe, soit hors de ce territoire (déportation) et le rend passible de la réclusion criminelle à perpétuité. Il s’agit de la reprise de l’article 8, point 2.b.viii, de la Convention de Rome.

L’article 461-27 punit également de la réclusion criminelle à perpétuité le fait de lancer une attaque délibérée dont on sait qu’elle causera incidemment des pertes en vies humaines ou des blessures dans la population civile « manifestement disproportionnées par rapport à l’avantage militaire » attendu de cette attaque, reprenant les stipulations de l’article 8, point 2.b.iv.

L’article 461-28 prohibe le fait de lancer une attaque délibérée en sachant qu’elle causera incidemment des dommages, disproportionnés par rapport à l’avantage militaire attendu, soit aux biens de caractère civil, () soit à l’environnement naturel, ces dommages étant alors qualifiés d’« étendus, durables et graves » (). La peine encourue est de vingt ans de réclusion criminelle, logiquement moins lourde que celle qui sanctionne l’infraction précédente.

Enfin, l’article 461-29 incrimine le fait d’utiliser indûment le pavillon parlementaire – c’est-à-dire le drapeau blanc –, le drapeau ou les insignes militaires et l’uniforme de l’ennemi ou de l’organisation des Nations unies ainsi que les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève et de causer de ce fait à un combattant de la partie adverse des blessures portant gravement atteintes à son intégrité physique. Il s’agit de la reprise de l’article 8, point 2.b.vii, de la Convention de Rome. La peine alors encourue est de vingt ans de réclusion criminelle, portée à trente ans en cas de blessures ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente et à la réclusion criminelle à perpétuité lorsque l’infraction a provoqué la mort de la victime.

*

La Commission examine les amendements identiques CL 22 de M. Noël Mamère, CL 41 de M. François Vannson et CL 85 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Il s’agit ici de reprendre la formulation retenue à l’article 8-2 du Statut de Rome.

M. le rapporteur. Ces amendements visent à supprimer la référence à une annexe au statut de la CPI, s’agissant de la définition des armes, projectiles, matériels ou méthodes de combat interdits et dont l’usage serait constitutif d’un crime de guerre. Or cette annexe, qui n’existe pas encore, devrait être évoquée lors de la conférence de révision. En son absence, la France demeure liée par les engagements internationaux par lesquels elle a renoncé à l’usage des gaz de combat et armes chimiques, des mines antipersonnelles et des armes bactériologiques. En conséquence, avis défavorable.

La Commission rejette ces amendements.

*

Section 4
Des crimes et délits de guerre propres aux conflits armés non internationaux

Cette section relative aux crimes et délits de guerre propres aux conflits armés non internationaux comprend deux articles.

Article 461-30 [nouveau] du code pénal

Déplacement des personnes

Cet article, reprenant les stipulations de l’article 8, point 2.e.viii de la Convention, incrimine le déplacement de population civile pour des raisons ayant trait au conflit, à moins que la sécurité des personnes civiles et des impératifs militaires ne l’exigent, et rend ce crime passible de la réclusion criminelle à perpétuité.

Article 461-31 [nouveau] du code pénal

Condamnations arbitraires

Cet article réprime, quant à lui, le fait de prononcer des condamnations et d’exécuter des peines sans jugement préalable rendu par un tribunal régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires prévues par la Convention de Genève. Il reprend ainsi les termes de l’article 8, point 2.c.iv, de la Convention de Rome.

Il punit ce crime de vingt ans de réclusion criminelle, peine portée à la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’il a conduit à l’exécution de la personne qui a été condamnée.

Chapitre II
Dispositions particulières

Le chapitre II du nouveau livre IV bis de la partie législative du code pénal comprend onze articles.

Article 462-1 [nouveau] du code pénal

Régime d’aggravation des peines encourues pour crime ou délit de guerre

Cet article précise le régime d’aggravation de la peine encourue pour les infractions mentionnées aux articles 461-2 (atteintes volontaires à la vie, atteintes volontaires à l’intégrité physique ou psychique, enlèvement et séquestration), 461-6 (atteintes à la liberté individuelle), 461-16 et 461-17 (certaines atteintes aux biens) lorsque l’infraction constitue un crime ou un délit de guerre, selon une échelle qui figure dans le tableau ci-après :

Peine encourue sans aggravation

Peine encourue quand l’infraction constitue un crime ou un délit de guerre

30 ans de réclusion criminelle

Réclusion criminelle à perpétuité

20 ans de réclusion criminelle

30 ans de réclusion criminelle

15 ans de réclusion criminelle

20 ans de réclusion criminelle

10 ans d’emprisonnement

15 ans de réclusion criminelle

7 ans d’emprisonnement

10 ans d’emprisonnement

5 ans d’emprisonnement

7 ans d’emprisonnement

3 ans d’emprisonnement ou moins

Doublement de la peine

*

La Commission est saisie des amendements identiques CL 23 de M. Noël Mamère et CL 42 de M. François Vannson.

M. le rapporteur. Ces amendements ont un objectif de coordination avec des amendements qui n’ont pas été adoptés. Avis défavorable, donc.

La Commission rejette ces amendements.

*

Article 462-2 [nouveau] du code pénal

Application de la période de sûreté aux crimes et délits de guerre punis de dix ans d’emprisonnement

Cet article rend les deux premiers alinéas de l’article 132-23 du code pénal relatif à la période de sûreté applicables aux crimes de guerre, ainsi qu’aux délits de guerre punis de dix ans d’emprisonnement.

Rappelons que l’article 132-23 du code pénal prévoit qu’en cas de condamnation à une peine privative de liberté, non assortie du sursis, dont la durée est égale ou supérieure à dix ans, prononcée pour les infractions spécialement prévues par la loi – d’où la nécessité de le prévoir ici expressément –, le condamné ne peut bénéficier, pendant une période de sûreté, des dispositions concernant la suspension ou le fractionnement de la peine, le placement à l’extérieur, les permissions de sortir, la semi-liberté et la libération conditionnelle. La durée de la période de sûreté est de la moitié de la peine ou, s’il s’agit d’une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, de dix-huit ans. La cour d’assises ou le tribunal peut toutefois, par décision spéciale, soit porter ces durées jusqu’aux deux tiers de la peine ou, s’il s’agit d’une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, jusqu’à vingt-deux ans, soit décider de réduire ces durées.

Article 462-3 [nouveau] du code pénal

Peines complémentaires applicables aux personnes physiques reconnues coupables de crime ou délit de guerre

Cet article précise que les personnes physiques coupables des infractions définies par le nouveau livre IV bis du code pénal encourent également certaines peines complémentaires. Il s’agit de peines prévues par le code pénal, mais dont la durée maximale est relevée par rapport au droit commun ; il s’agit de :

—  l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, définie à l’article 131-26 du code pénal (25), pour une durée maximale de quinze ans en cas de crime et dix ans en cas de délit de guerre (contre respectivement dix ans et cinq ans en droit commun) ;

—  l’interdiction définitive ou temporaire, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, la durée maximale de l’interdiction temporaire étant portée à dix ans par dérogation au principe général posé par l’article 131-27 du code pénal qui dispose que « lorsqu’elle est encourue à titre de peine complémentaire pour un crime ou un délit, l’interdiction d’exercer une fonction publique ou d’exercer une activité professionnelle ou sociale est soit définitive, soit temporaire ; dans ce dernier cas, elle ne peut excéder une durée de cinq ans » ;

—  l’interdiction de séjour, selon les modalités prévues par l’article 131-31 du code pénal qui dispose que « lorsqu’elle est encourue à titre de peine complémentaire pour un crime ou un délit, l’interdiction d’exercer une fonction publique ou d’exercer une activité professionnelle ou sociale est soit définitive, soit temporaire ». Mais alors que l’article 131-31 prévoit une durée maximale d’interdiction temporaire de cinq ans, le présent article porte cette durée à quinze ans en cas de crime et dix ans en cas de délit de guerre.

Article 462-4 [nouveau] du code pénal

Interdiction du territoire français encourue à titre de peine complémentaire

Cet article prévoit que tout étranger coupable d’un crime ou d’un délit de guerre, tels que définis par le nouveau livre IV bis du code pénal, peut se voir interdit du territoire français, dans les conditions prévues par l’article 131-30 du code pénal (26), soit à titre définitif, soit à titre temporaire, pour une durée maximale de dix ans.

L’interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l’expiration de sa peine d’emprisonnement ou de réclusion. Lorsque l’interdiction du territoire accompagne une peine privative de liberté sans sursis, son application est suspendue pendant le délai d’exécution de la peine. Elle reprend, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.

Article 462-5 [nouveau] du code pénal

Responsabilité pénale des personnes morales

Cet article précise la nature des peines encourues par les personnes morales déclarées pénalement responsables de crimes et délits de guerre. Rappelons que l’article 121-2 du code pénal précise que les « personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement (…) des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants », étant précisé que la responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits.

Le présent article dispose que les personnes morales reconnues pénalement responsables de telles infractions encourent les peines suivantes :

—  l’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38, qui dispose que le taux maximum de celle-ci est égal au quintuple de celui prévu par la loi qui réprime l’infraction pour les personnes physiques et que, dans le cas où il s’agit d’un crime pour lequel aucune peine d’amende n’est prévue à l’encontre des personnes physiques, l’amende encourue par les personnes morales est de 1 000 000 euros ;

—  les peines mentionnées à l’article 131-39 (27), qui sont :

la dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu’il s’agit d’un crime ou d’un délit puni pour les personnes physiques d’au moins trois ans d’emprisonnement, détournée de son objet, pour commettre les faits incriminés ;

l’interdiction, à titre définitif ou temporaire (pour une durée maximale de cinq ans), d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales, le deuxième alinéa du présent article précisant que dans le cadre des crimes et délits de guerre, cette interdiction porte sur l’activité dans l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ;

3° le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;

la fermeture définitive ou temporaire (pour une durée maximale de cinq ans) des établissements ou de l’un ou de plusieurs des établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

l’exclusion des marchés publics à titre définitif ou temporaire (pour une durée maximale de cinq ans) ;

6° l’interdiction, à titre définitif ou temporaire (pour une durée maximale de cinq ans), de faire appel public à l’épargne ;

l’interdiction temporaire (pour une durée maximale de cinq ans), d’émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d’utiliser des cartes de paiement ;

8° la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit ;

l’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique ;

10° la confiscation de l’animal ayant été utilisé pour commettre l’infraction ou à l’encontre duquel l’infraction a été commise ;

11° l’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de détenir un animal.

Article 462-6 [nouveau] du code pénal

Peine complémentaire de confiscation

Cet article précise que les personnes physiques, tout comme les personnes morales reconnues coupables d’un crime ou d’un délit de guerre, encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens.

S’agissant des personnes morales, le renvoi à l’article 131-39 du code pénal, et notablement à son 8°, permet d’ores et déjà de prévoir la confiscation « de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit ».

Article 462-7 [nouveau] du code pénal

Responsabilité pénale du supérieur hiérarchique dans le cas d’un crime ou d’un délit de guerre

Cet article est à rapprocher du nouvel article 213-4-1 du code pénal, introduit par l’article 3 du projet de loi en matière de complicité de crimes contre l’humanité, dont il constitue le pendant s’agissant des crimes et délits de guerre.

Il définit les conditions dans lesquelles la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire ou civil peut être engagée dans le cas où il n’aurait pu empêcher ou réprimer l’exécution d’un crime ou un délit de guerre par un subordonné ou en référer aux autorités compétentes.

Il reprend l’article 28 de la Convention de Rome. Toutefois, dans sa rédaction initiale, l’article omettait une des stipulations de cet article qui prévoyait l’engagement de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil qui aurait « délibérément négligé de tenir compte d’informations » qui indiquaient clairement que ses subordonnés commettaient ou s’apprêtaient à commettre des infractions. Le Sénat, réparant cette omission, a rétabli cette hypothèse de mise en cause de la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique civil.

Article 462-8 [nouveau] du code pénal

Responsabilité pénale du fait d’un acte prescrit par la loi, le règlement ou l’autorité légitime

Cet article précise que, lorsque l’auteur ou le complice d’un crime ou d’un délit de guerre commet cette infraction parce qu’il accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ou un acte commandé par une autorité légitime, sa responsabilité n’est pas de ce fait même écartée, mais que cette circonstance doit être prise en compte par la juridiction de jugement dans la détermination de la peine. Cette disposition est à rapprocher de l’article 213-4 du code pénal relatif aux crimes contre l’humanité et qui pose lui aussi le principe selon lequel l’auteur des faits ne peut être exonéré de sa responsabilité pénale du seul fait qu’il a obéi à un ordre de la loi ou à un ordre hiérarchique.

Le deuxième alinéa de l’article précise que, lorsque l’auteur des faits ou son complice ne sait pas que l’ordre de l’autorité légitime est illégal, il ne peut être déclaré pénalement responsable, à moins que l’ordre ait été manifestement illégal.

Article 462-9 [nouveau] du code pénal

Excuse de légitime défense

Dans sa rédaction initiale, cet article précisait que ne peut pas être déclarée pénalement responsable d’un crime ou d’un délit de guerre la personne qui a accompli un acte de défense « pour sauvegarder des biens essentiels à sa survie ou à celle d’autrui » ou « essentiels à l’accomplissement d’une mission militaire », « sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l’infraction ».

Trois conditions devaient être réunies pour que l’auteur soit exonéré de sa responsabilité pénale :

—  il a accompli un acte de défense ;

—  cet acte de défense est justifié par trois mobiles alternatifs : la sauvegarde des biens essentiels à sa survie, la sauvegarde des biens essentiels à la survie d’autrui, la sauvegarde des biens essentiels à l’accomplissement d’une mission militaire ;

—  cet acte respecte le principe de proportionnalité entre la gravité de l’infraction commise et les moyens de défense employés.

Cette disposition reprenait l’article 31 de la Convention de Rome, en son point 1-c, tout en omettant deux autres conditions posées par ce dernier article pour exonérer l’auteur d’un crime ou d’un délit de guerre de sa responsabilité en cas de légitime défense :

—  le fait que l’auteur ait agi « raisonnablement » ;

—  le fait que l’acte de défense réponde à un « recours imminent et illicite à la force ».

En outre, le texte initial ne reprenait pas la stipulation de l’article 31 de la Convention de Rome selon laquelle le « fait qu’une personne ait participé à une opération défensive menée par des forces armées ne constitue pas en soi un motif d’exonération de la responsabilité pénale ».

Par ailleurs, cet article n’établit pas le lien de proportionnalité entre les moyens de défense employés et la gravité de l’infraction, mais entre les moyens de défense et l’« ampleur du danger » couru.

Prenant la mesure de l’écart existant entre le texte proposé pour le présent article et les dispositions de la Convention de Rome, la commission des Lois du Sénat a, à l’initiative de son rapporteur, adopté un amendement rapprochant la rédaction proposée des stipulations du statut : la rédaction adoptée par le Sénat encadre davantage les conditions dans lesquelles l’auteur d’un crime de guerre peut s’exonérer de sa responsabilité en cas de légitime défense, par l’introduction de l’adverbe « raisonnablement » et de la condition d’un recours imminent et illicite à la force, et exige que les moyens de défense soient proportionnels à la gravité du danger couru.

*

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL 86 de M. Jean-Jacques Urvoas et les amendements identiques CL 6 de la commission des Affaires étrangères, CL 24 de M. Noël Mamère et CL 43 de M. François Vannson.

M. le rapporteur. Ces amendements, relatifs à l’excuse de légitime défense, sont inutiles car le droit général de l’exonération de la responsabilité pénale s’applique. Il convient de ne préciser à cet article que ce qui est spécifique aux crimes et délits de guerre, en l’espèce la protection des biens essentiels à la survie.

La Commission rejette l’amendement CL 86, puis par un seul vote les trois amendements identiques.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement rédactionnel CL 87 de M. Jean-Jacques Urvoas.

Elle rejette également, suivant l’avis défavorable du rapporteur, les amendements identiques CL 25 de M. Noël Mamère et CL 44 de M. François Vannson.

*

Article 462-10 [nouveau] du code pénal

Délai de prescription des crimes et délits de guerre

Cet article précise les délais de prescription de l’action publique et de la peine en matière de crimes et délits de guerre.

Il précise que le délai de prescription de l’action publique, qui fait obstacle à l’exercice de poursuites, à l’égard des crimes de guerre est de trente ans, tandis que celui concernant les délits de guerre est de vingt ans.

La peine prononcée se prescrit quant à elle trente ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive en matière criminelle et vingt ans à compter de cette même date en matière délictuelle. Rappelons que la prescription de la peine éteint les peines restées inexécutées par l’effet de l’écoulement d’une période de temps donnée depuis la décision de condamnation.

Cette disposition permet ainsi l’allongement des délais de prescription tant de l’action publique que de la peine par rapport aux règles de droit commun applicables en matière de crimes et délits : le délai de prescription de l’action publique est de dix ans pour les crimes et de trois ans pour les délits de droit commun ; le délai de prescription de la peine est de vingt ans pour les crimes et cinq ans pour les délits de droit commun (cf. tableau ci-après).

 

Droit existant :
application du droit commun

Projet de loi :
création d’un régime de prescription propre aux crimes et délits de guerre

Prescription de l’action publique à compter de la commission des faits

Crimes

10 ans (28)

(article 7 du code de procédure pénale)

30 ans

Délits

3 ans (29)

(article 8 du code de procédure pénale)

20 ans

Prescription de la peine à compter de la condamnation définitive

Crimes

20 ans

(article 133-2 du code pénal)

30 ans

Délits

5 ans

(article 133-3 du code pénal)

20 ans

De nombreuses voix se sont élevées pour réclamer l’imprescriptibilité des crimes de guerre, à l’image des crimes contre l’humanité (30), se fondant sur l’article 29 du Statut de Rome qui stipule que « les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas ».

Dans son avis du 29 juin 2006, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a recommandé que le principe de l’imprescriptibilité des crimes de guerre soit intégré dans le code pénal (paragraphe 9. de l’avis), rappelant que dans sa décision n° 98-408 DC du 22 janvier 1999, le Conseil constitutionnel a constaté la conformité de l’article 29 du Statut de Rome avec notre Constitution, en relevant « qu’aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle n’interdit l’imprescriptibilité des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ».

Le Sénat n’a pas retenu cette recommandation et réservé l’imprescriptibilité aux seuls crimes contre l’humanité afin d’en marquer le caractère incommensurable avec toute autre infraction.

Dans son avis du 6 novembre 2008, la CNCDH a à nouveau recommandé que le principe d’imprescriptibilité d’applique à tous les crimes relevant de la compétence de la CPI, considérant que le dispositif du projet de loi « va à l’encontre de l’unité du régime applicable à l’ensemble des crimes relevant de la compétence du Statut de Rome ».

Votre rapporteur est favorable au maintien du dispositif adopté par le Sénat, estimant que l’allongement des délais de prescription proposé traduit pleinement la volonté d’un rapprochement avec les principes retenus par la Cour pénale internationale. Il fait remarquer que, passé un délai de trente ans, si les juridictions françaises ne pourront plus engager de poursuites à l’encontre de criminels de guerre français ou présents sur le territoire français, la Cour pénale internationale elle-même restera compétente, en application du principe de complémentarité. Il n’y aura donc aucun déni de justice.

*

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements identiques CL 26 de M. Noël Mamère, CL 45 de M. François Vannson et CL 88 de M. Jean-Jacques Urvoas.

*

Article 462-11 [nouveau] du code pénal

Droit de légitime défense pour la France

Cet article vise à exclure du champ des crimes et délits de guerre le fait pour la France d’user de l’arme nucléaire ou de toute autre arme dont l’utilisation n’est pas prohibée par une convention internationale à laquelle la France est partie, dès lors que cet usage est lié à l’exercice du droit de légitime défense. Figurent, notamment, au titre des armes prohibées : le poison, les armes chimiques, biologiques et bactériologiques, les mines antipersonnel, les armes à laser aveuglantes…

Cette disposition reprend la déclaration interprétative faite par la France lors du dépôt de son instrument de ratification afférent à la Convention de Rome, selon laquelle « les dispositions de l’article 8 du statut [...] concernent exclusivement les armements classiques et ne sauraient ni réglementer ni interdire l’emploi éventuel de l’arme nucléaire ni porter préjudice aux autres règles du droit international applicables à d’autres armes, nécessaires à l’exercice par la France de son droit naturel de légitime défense [...] ».

*

La Commission est saisie des amendements identiques CL 27 de M. Noël Mamère et CL 46 de M. François Vannson.

M. le rapporteur. Je ne vois pas au nom de quoi la France renoncerait unilatéralement à l’usage d’une arme non prohibée par les conventions internationales, qui plus est dans le cadre de la légitime défense…

M. François Vannson retire son amendement.

M. Noël Mamère. Je ne retire pas le mien. Le rapporteur ne semble pas avoir compris.

La Commission rejette l’amendement CL 27.

Elle est alors saisie de l’amendement CL 28 de M. Noël Mamère.

M. le rapporteur. Avis défavorable, cet amendement faisant référence à des règles qui n’existent pas.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie des amendements identiques CL 29 de M. Noël Mamère, CL 47 de M. François Vannson et CL 89 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le rapporteur. Comme précédemment, ces amendements contreviennent, en matière d’immunités, aux dispositions constitutionnelles et aux stipulations des conventions internationales.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle adopte l’article 7 sans modification.

Chapitre Ier bis (nouveau)

Dispositions modifiant le code de procédure pénale

Article 7 bis

(art. 689-11 [nouveau] du code de procédure pénale)


Une compétence extraterritoriale encadrée des juridictions françaises pour les crimes relevant de la compétence de la CPI

Cet article est issu de l’adoption par le Sénat, avec l’avis favorable du Gouvernement, de deux amendements identiques respectivement présentés par MM. Fauchon et Zocchetto portant article additionnel et visant à accorder aux juridictions françaises une compétence extraterritoriale dans des cas bien précis.

Si cet article ne reconnaît pas une compétence universelle aux juridictions françaises, les sénateurs ont, en revanche, estimé que l’importance des infractions couvertes par la Convention de Rome justifiait une dérogation au régime de droit commun de la compétence des juridictions nationales.

Rappelons que les règles habituelles de compétence des juridictions françaises reposent sur trois critères alternatifs :

—  Le rattachement territorial : l’infraction a été commise sur le territoire de la République ;

—  Le critère de la compétence personnelle active : l’auteur a la nationalité française.

—  Le critère de la compétence personnelle passive : la victime a la nationalité française.

Le présent article permet aux juridictions françaises de poursuivre et de juger toute personne qui réside habituellement sur le territoire de la République et qui s’est rendue coupable à l’étranger de l’un des crimes relevant de la compétence de la CPI si les faits sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou si l’État dont elle a la nationalité est partie à la Convention de Rome.

À cette fin, il introduit un nouvel article 689-11 dans le code de procédure pénale qui rend possible la poursuite et le jugement par les juridictions françaises de toute personne qui s’est rendue coupable de l’un des crimes relevant de la compétence de la CPI si quatre conditions sont cumulativement remplies :

—  la personne « réside habituellement » sur le territoire de la République ;

—  les faits qui lui sont reprochés sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou cet État ou l’État dont la personne a la nationalité est partie au Statut de Rome (critère de la double incrimination) ;

—  la poursuite de ces crimes ne peut être exercée qu’à la requête du ministère public, qui dispose ainsi en la matière d’un monopole ;

—  aucune juridiction nationale ou internationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne et la CPI décline sa compétence (principe de subsidiarité).

Lors de leur audition, tant la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la délégation du Comité international de la Croix Rouge en France que la Coalition française pour la CPI ont critiqué le dispositif adopté par le Sénat, le jugeant trop restrictif.

La commission des Affaires étrangères de notre Assemblée, saisie pour avis du projet de loi, a, lors de sa réunion du 8 juillet 2009, adopté trois amendements à l’initiative de la rapporteure pour avis, Mme Nicole Ameline, visant à supprimer les différentes conditions posées par le Sénat afin d’élargir le champ de l’exercice d’une compétence extraterritoriale de la France en matière de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.

Votre rapporteur estime que la question du champ de la compétence extraterritoriale reconnue aux juridictions françaises doit être analysée au regard tant de l’exigence d’efficacité de la justice pénale internationale et de la prévention de toute situation d’impunité, que du souci de ne pas tomber dans les excès qu’ont connus d’autres pays, tels l’Espagne et la Belgique, et d’éviter toute instrumentalisation de notre pays par une multiplication de plaintes contre des personnes ne faisant qu’un bref séjour sur notre sol.

La Belgique, qui s’était doté d’une compétence universelle inconditionnelle en 1993 (31), a adopté en août 2003 une loi qui revient assez largement sur ce dispositif : en effet, la possibilité d’engager des poursuites in absentia, de mettre en mouvement l’action publique par la voie d’une constitution de partie civile auprès du juge d’instruction et l’exclusion des immunités comme obstacle aux poursuites combinées à un champ d’application large, permise par la loi de 1993, ont conduit à une « utilisation politique manifestement abusive » de la loi, ainsi que le dénonce l’exposé des motifs de la loi d’août 2003.

Désormais, la loi du 5 août 2003 relative aux violations graves de droit international humanitaire subordonne l’exercice de la compétence extraterritoriale des juridictions belges pour une infraction grave au droit international humanitaire à l’existence d’un des liens de rattachement suivants :

—  l’infraction est commise par un Belge ou une personne ayant sa résidence principale en Belgique ;

—  l’infraction est commise contre une personne qui, au moment des faits est un ressortissant belge, ou est une personne qui, depuis au moins trois ans, séjourne habituellement, effectivement et légalement en Belgique, ou est un réfugié reconnu en Belgique et y ayant sa résidence habituelle, au sens de la Convention de Genève de 1951 ;

—  une règle de droit international conventionnelle ou coutumière ou une règle de droit dérivé de l’Union européenne liant la Belgique impose, de quelque manière que ce soit, de soumettre l’affaire aux autorités belges compétentes pour l’exercice des poursuites.

Cette même loi prévoit par ailleurs que les poursuites ne peuvent être engagées qu’à la requête du procureur fédéral qui apprécie les plaintes éventuelles. Le mode de saisine par constitution de partie civile a ainsi été abandonné, à l’exception de l’hypothèse où l’auteur présumé de l’infraction est belge ou réside à titre principal en Belgique.

Plusieurs motifs cités dans la loi peuvent justifier un classement sans suite par la chambre des mises en accusation ou le procureur fédéral :

1° la plainte est manifestement non fondée ;

2° les faits relevés dans la plainte ne correspondent pas à une qualification des infractions visées au code pénal ;

3° une action publique recevable ne peut résulter de cette plainte ;

4° il ressort des circonstances concrètes de l’affaire que, dans l’intérêt de la bonne administration de la justice et dans le respect des obligations internationales de la Belgique, cette affaire devrait être portée devant une autre juridiction (soit une juridiction internationale, soit une autre juridiction nationale du lieu où les faits ont été commis ou de l’État dont l’auteur est ressortissant ou encore du lieu où il peut être trouvé) à condition que cette juridiction présente les qualités d’indépendance, d’impartialité et d’équité requises.

À ce jour, quatre affaires relatives au génocide rwandais ont fait l’objet d’un procès devant la cour d’assises de Bruxelles ; une nouvelle affaire sera prochainement portée devant elle, du fait de l’application d’un régime transitoire aux affaires pendantes au moment du vote de la loi de 2003.

De même l’Espagne, qui reconnaît à l’Audience nationale (32) une compétence universelle en matière de crimes contre l’humanité, de génocide et de terrorisme, quelle que soit la nationalité de leurs auteurs et des victimes et même s’ils n’entretiennent aucune relation avec l’Espagne dès lors que le suspect est présent au procès et qu’il n’y a pas de procédure en cours devant la CPI, envisage de revenir sur ce principe après l’adoption le 19 mai 2009 d’une résolution visant à restreindre l’action des juges espagnols aux seuls cas où l’affaire a un lien avec l’Espagne, c’est-à-dire où des Espagnols figurent parmi les victimes ou bien où l’auteur présumé des faits se trouve sur le territoire espagnol.

Votre rapporteur souhaite revenir plus en détail sur les quatre conditions posées par le Sénat :

1. La condition de résidence habituelle

La condition de résidence habituelle est celle qui a fait l’objet de plus de débats au Sénat : un sous-amendement de M. Badinter avait été accepté par la Commission qui remplaçait la stricte condition de résidence par celle de simple présence sur le territoire (« toute personne qui se trouve sur le territoire de la République » mentionnait le sous-amendement), cet élargissement du champ de la compétence extraterritoriale de la France se justifiant pour son auteur par le nécessaire « devoir de juger ». Le Sénat est finalement revenu cette disposition, adoptant une condition de résidence habituelle.

Les opposants à cette condition font valoir qu’elle ne sera jamais remplie si elle est interprétée, comme l’a fait la Cour de cassation en 2005, comme la fixation de manière stable, effective et permanente du centre des attaches familiales et intérêts matériels en France (33). Ils regrettent, en outre, que soit instaurée une différence de traitement entre les auteurs de futurs génocides et ceux qui sont susceptibles d’être jugés dans le cadre des lois applicables au génocide rwandais.

Votre rapporteur estime que cette condition vise à garantir l’existence d’un véritable lien entre la France et la personne poursuivie. Un simple passage sur notre territoire, pendant quelques heures, ne saurait, aux yeux de votre rapporteur, constituer un lien suffisant, d’autant que la condition de résidence habituelle n’est pas aussi exigeante que celle de résidence permanente ou de résidence principale.

Votre rapporteur ajoute que la condition d’une résidence habituelle est déjà prévue par notre code pénal, dont l’article 436-3 dispose : « lorsque les faits mentionnés au présent chapitre (participation d’un mercenaire à un conflit armé) sont commis à l’étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l’article 113-6 et les dispositions de la seconde phrase de l’article 113-8 ne sont pas applicables ».

2. La nécessaire double incrimination

Cette condition exige que les faits reprochés soient punis tant par la législation française que par la législation de l’État où ils ont été commis.

Elle est également très critiquée au motif qu’elle ne s’applique pas dans le régime de la compétence universelle de l’article 689-1 du code de procédure pénale et que le fait de conditionner la poursuite en France des crimes les plus graves à l’existence d’une loi nationale étrangère ou au fait qu’un État tiers soit lui-même partie au Statut de Rome n’est pas acceptable, alors que la France est partie à la convention internationale qui définit et poursuit ces crimes.

Votre rapporteur estime que cette condition est la traduction du principe de légalité des peines et vise à conférer une légitimité juridique à l’intervention de la justice française. Elle ne signifie, en revanche, pas que les faits doivent recevoir une incrimination identique dans les deux États : les faits doivent être effectivement réprimés dans l’autre pays, même s’ils y sont qualifiés différemment et si on leur applique des peines plus ou moins sévères.

3. Le monopole du parquet pour le déclenchement des poursuites

Le ministère public sera le seul à pouvoir déclencher des poursuites contre l’auteur d’un crime relevant de la compétence de la CPI, de même que dans les différentes situations dans lesquelles la justice française peut poursuivre un étranger ayant sa résidence habituelle sur le territoire de la République (tourisme sexuel, clonage reproductif, activité mercenaire, notamment).

Ce monopole est doublement critiqué :

—  Certains ont pu le juger contraire à la tradition pénale française : notre droit pénal permet, en effet, à toute victime d’un crime ou d’un délit, en se constituant partie civile, de mettre en mouvement l’action publique (en application de l’article 1er du code de procédure pénale) alors même que le ministère public n’aurait pas jugé opportun d’engager des poursuites. Si la loi du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale a mis en place un délai de réflexion afin de combattre l’abus de constitution de partie civile, elle l’a fait exclusivement pour les délits, et il est jugé paradoxal de priver du droit de se porter partie civile les victimes des crimes les plus graves.

—  Il a également été critiqué comme constituant une atteinte aux droits des victimes et une violation du principe d’égalité des citoyens devant la loi. La constitutionnalité du dispositif a été contestée en raison de la différence de traitement dont souffriront les victimes de crimes contre l’humanité ou de crimes de guerre par rapport aux victimes d’autres crimes.

Pour autant, votre rapporteur qui note que le monopole du ministère public dans le déclenchement des poursuites existe, d’ores et déjà, dans un certain nombre de législations étrangères (notamment la loi belge du 5 août 2003), craint que la suppression de cette condition ne conduise au dépôt et à l’instruction de très nombreuses plaintes qui engorgeront les juridictions françaises.

4. Le principe de subsidiarité

La rédaction adoptée par le Sénat précise que « le ministère public s’assure auprès de la Cour pénale internationale qu’elle décline expressément sa compétence et vérifie qu’aucune autre juridiction internationale compétente pour juger la personne n’a demandé sa remise et qu’aucun autre État n’a demandé son extradition. »

Nombreuses ont été les personnes entendues par votre rapporteur qui ont regretté que la condition adoptée par le Sénat soit l’inverse de celle posée dans les conventions internationales fondant une compétence universelle qui font d’une demande d’extradition et de son refus par l’État requis la condition de la compétence obligatoire de la justice de ce dernier, le but étant que le suspect soit effectivement jugé. Ici, il s’agit d’asseoir le caractère subsidiaire de la justice française par rapport à celle d’autres États normalement compétents pour juger les auteurs des faits en question et de la justice internationale.

A été contesté devant votre rapporteur ce qui a été qualifié d’« inversion du principe de complémentarité » : exiger de la Cour qu’elle décline expressément sa compétence irait à l’encontre des stipulations du Statut de Rome, qui ne prévoit d’ailleurs pas la possibilité pour un État de solliciter l’avis de la Cour afin que celle-ci se déclare compétente ou pas.

Votre rapporteur rappelle que l’article 1er du Statut de Rome précise que la CPI est seule juge de sa compétence et qu’il lui appartient, le cas échéant, de décliner sa compétence.

Au total, votre rapporteur estime que l’équilibre trouvé au Sénat, qui va au-delà de nos obligations conventionnelles, est satisfaisant et doit être maintenu. Il doit nous prémunir de sombrer dans les errements qu’ont pu connaître certains de nos voisins européens.

Le Statut de Rome fait obligation aux États parties de coopérer avec la CPI, nullement – contrairement à d’autres conventions – d’instaurer une compétence universelle de nos tribunaux appelés à juger des étrangers ayant commis, hors du territoire national, des crimes relevant du champ de compétence de la Cour.

Votre rapporteur craint que l’éventuelle reconnaissance d’une telle compétence à nos juridictions ne fasse courir à notre pays le risque d’être instrumentalisé par les parties d’un conflit armé et ne lui interdise à l’avenir d’organiser une quelconque conférence de paix.

Encadrer la compétence extraterritoriale de la France n’emporte nullement un quelconque déni de justice, la CPI restant compétente in fine.

*

* *

La Commission est saisie des amendements identiques CL 30 de M. Noël Mamère, CL 48 de M. François Vannson et CL 90 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Noël Mamère. Nous proposons ici de supprimer les quatre verrous qui empêchent l’application de la compétence universelle, et dont le maintien ferait de la France l’un des pays d’Europe appliquant le traité de Rome de la manière la plus restrictive.

M. Jean-Jacques Urvoas. Notre objectif est de permettre la poursuite et le jugement des auteurs de génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis à l’étranger. Ces crimes doivent être soumis au même régime procédural que les autres crimes pour lesquels est déjà admise une compétence extraterritoriale des juridictions françaises – c’est-à-dire à une condition de simple présence de l’auteur des faits sur le territoire français.

M. le rapporteur. La Convention de Rome ne prévoit nullement un mécanisme de compétence quasi-universelle. Le dispositif proposé dans ces amendements est contradictoire et inopérant sur le plan juridique.

La Commission rejette ces amendements.

Elle est saisie des amendements identiques CL 7 de la commission des Affaires étrangères et CL 91 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le rapporteur. Je crois indispensable de maintenir la condition de résidence habituelle, celle-ci étant le signe d’un véritable lien entre la France et la personne poursuivie.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle est saisie des amendements identiques CL 8 de la commission des Affaires étrangères et CL 92 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le rapporteur. Avis défavorable. La condition de double incrimination, que cet amendement tend à supprimer, vise à conférer une légitimité juridique à l’intervention des juridictions françaises. Elle est la traduction du principe de légalité des peines.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle examine les amendements identiques CL 9 de la commission des Affaires étrangères et CL 93 de M. Jean-Jacques Urvoas.

M. le rapporteur. Avis défavorable. Il est indispensable que le ministère public soit le seul à pouvoir déclencher des poursuites contre l’auteur d’un crime relevant de la compétence de la CPI. Dans le cas contraire, nos juridictions risqueraient d’être instrumentalisées par des parties à un conflit. S’agissant du principe de subsidiarité, les juridictions françaises n’ont pas vocation à se substituer aux juridictions nationales défaillantes, ce rôle étant dévolu à la CPI.

La Commission rejette ces amendements. Elle adopte l’article 7 bis sans modification.

Chapitre II

Dispositions finales

Article 8

(art. L. 311-1 et L. 322-4 du code de justice militaire ; art. 213-1 du code pénal)


Coordinations

Cet article procède à deux coordinations dans le code de justice militaire rendues nécessaires par l’introduction dans le code pénal des dispositions nouvelles relatives aux crimes de guerre.

1. Modification de l’article L. 311-1 du fait de l’introduction dans le code pénal de dispositions relatives aux crimes et délits de guerre (I)

Dans sa version actuelle, l’article L. 311-1 dispose : « Sans préjudice de la répression pénale des faits qui constituent des crimes ou délits de droit commun, et notamment de ceux qui sont contraires aux lois et coutumes de la guerre et aux conventions internationales, sont punies conformément aux dispositions du présent livre les infractions d’ordre militaire prévues aux articles L. 311-2 à L. 311-14. »

Le présent article vise à remplacer les termes « contraires aux lois et coutumes de la guerre et aux conventions internationales » par la référence aux nouveaux articles 461-1 à 461-31 du code pénal, composant le livre IV bis relatif aux crimes et délits de guerre.

2. Abrogation de l’article L. 322-4 relatif aux pillages (II)

L’article L. 322-4 punit de la réclusion criminelle à perpétuité « tous pillages ou dégâts de denrées, marchandises ou effets commis en bande par des militaires ou par des personnes embarquées, soit avec des armes ou à force ouverte, soit avec bris de portes et clôtures extérieures, soit avec violences envers les personnes. »

Cet article n’a pas à être maintenu dans notre droit compte tenu de l’introduction par l’article 7 du projet de loi, du nouvel article 461-15 du code pénal.

3. Ajout par le Sénat (III)

Le Sénat a, à l’initiative de sa commission des Lois, adopté un amendement de cohérence visant à étendre aux responsables de crimes contre l’humanité le régime plus sévère d’interdictions que prévoit d’instaurer l’article 462-3 nouveau du code pénal pour les auteurs de crimes de guerre.

La Commission adopte l’article 8 sans modification.

Article 9

Application de la loi outre-mer

Cet article précise les conditions d’application de la loi aux collectivités ultramarines.

En vertu du principe d’assimilation législative, les dispositions du présent projet de loi sont de droit applicables dans les départements d’outre-mer.

À l’inverse, en vertu du principe spécialité législative, l’application des dispositions du projet de loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna nécessite une mention expresse dans la loi. Tel n’est en revanche pas le cas des collectivités de Mayotte et des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), les nouveaux statuts applicables depuis le 1er janvier 2008 rendant inutile une telle mention pour ces deux collectivités. C’est pourquoi le Sénat a, à l’initiative de sa commission des Lois, supprimé la référence à ces deux collectivités.

La Commission adopte l’article 9 sans modification.

Elle adopte l’ensemble du projet de loi sans modification.

*

M. le président Jean-Luc Warsmann. J’insisterai auprès du Gouvernement pour que ce texte soit inscrit le plus vite possible à l’ordre de jour de la séance publique.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter le présent projet de loi dans le texte figurant dans le document joint au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

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Texte adopté par le Sénat

___

Texte adopté par la Commission

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Projet de loi portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale.

Projet de loi portant adaptation du droit pénal à l’institution de la Cour pénale internationale.

 

CHAPITRE IER

CHAPITRE IER

 

Dispositions modifiant le code pénal

Dispositions modifiant le code pénal

 

Article 1er

Article 1er

 

Après l’article 211-1 du code pénal, il est inséré un article 211-2 ainsi rédigé :

(Sans modification)

 

« Art. 211-2. – La provocation publique et directe, par tous moyens, à commettre un génocide est punie de la réclusion criminelle à perpétuité, si cette provocation a été suivie d’effet.

 
 

« Si la provocation n’a pas été suivie d’effet, les faits sont punis de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. »

 
 

Article 2

Article 2

Code pénal

Le premier alinéa de l’article 212-1 du même code est remplacé par douze alinéas ainsi rédigés :

(Sans modification)

Art. 212-1. – La déportation, la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d’actes inhumains, inspirées par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisées en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile sont punies de la réclusion criminelle à perpétuité.

« Constitue également un crime contre l’humanité et est puni de la réclusion criminelle à perpétuité l’un des actes ci-après commis en exécution d’un plan concerté à l’encontre d’un groupe de population civile dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique :

 
 

« 1° L’atteinte volontaire à la vie ;

 
 

« 2° L’extermination ;

 
 

« 3° La réduction en esclavage ;

 
 

« 4° La déportation ou le transfert forcé de population ;

 
 

« 5° L’emprisonnement ou toute autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;

 
 

« 6° La torture ;

 
 

« 7° Le viol, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

 
 

« 8° La persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international ;

 
 

« 9° L’arrestation, la détention ou l’enlèvement de personnes, suivis de leur disparition et accompagnés du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort qui leur est réservé ou de l’endroit où elles se trouvent dans l’intention de les soustraire à la protection de la loi pendant une période prolongée ;

 
 

« 10° Les actes de ségrégation commis dans le cadre d’un régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un groupe racial sur tout autre groupe racial ou tous autres groupes raciaux et dans l’intention de maintenir ce régime ;

 
 

« 11° Les autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou psychique. »

 

Les deux premiers alinéas de l’article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux crimes prévus par le présent article.

   
 

Article 3

Article 3

 

Après l’article 213-4 du même code, il est inséré un article 213-4-1 ainsi rédigé :

(Sans modification)

Art. 121-7. – Cf. annexe.

« Art. 213-4-1. – Sans préjudice de l’application des dispositions de l’article 121-7, est considéré comme complice d’un crime visé par le présent sous-titre commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs le chef militaire ou la personne qui en faisait fonction, qui savait ou, en raison des circonstances, aurait dû savoir que ces subordonnés commettaient ou allaient commettre ce crime et qui n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites.

 
 

« Sans préjudice de l’application des dispositions de l’article 121-7, est également considéré comme complice d’un crime visé par le présent sous-titre commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs le supérieur hiérarchique, n’exerçant pas la fonction de chef militaire, qui savait que ces subordonnés commettaient ou allaient commettre ce crime ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement et qui n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites, alors que ce crime était lié à des activités relevant de sa responsabilité ou de son contrôle effectifs. »

 
 

Article 4

Article 4

Art. 222-3. – L’infraction définie à l’article 222-1 est punie de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu’elle est commise :

Les articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du même code sont ainsi modifiés :

(Sans modification)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

4° Sur un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d’immeubles ou de groupes d’immeubles ou un agent exerçant pour le compte d’un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d’habitation en application de l’article L. 127-1 du code de la construction et de l’habitation, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur ;

1° Dans le 4°, après les mots : « un officier public ou ministériel, », sont insérés les mots : « un membre ou un agent de la Cour pénale internationale, » ;

 

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

5° Sur un témoin, une victime ou une partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ;

2° Dans le 5°, les mots : « , de sa plainte ou de sa déposition ; » sont remplacés par les mots : « ou de sa plainte, soit à cause de sa déposition devant une juridiction nationale ou devant la Cour pénale internationale ; ».

 

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 222-8. – L’infraction définie à l’article 222-7 est punie de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu’elle est commise :

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

4° Sur un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d’immeubles ou de groupes d’immeubles ou un agent exerçant pour le compte d’un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d’habitation en application de l’article L. 127-1 du code de la construction et de l’habitation, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

5° Sur un témoin, une victime ou une partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 222-10. – L’infraction définie à l’article 222-9 est punie de quinze ans de réclusion criminelle lorsqu’elle est commise :

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

4° Sur un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d’immeubles ou de groupes d’immeubles ou un agent exerçant pour le compte d’un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d’habitation en application de l’article L. 127-1 du code de la construction et de l’habitation, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

5° Sur un témoin, une victime ou une partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 222-12. – L’infraction définie à l’article 222-11 est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende lorsqu’elle est commise :

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

4° Sur un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d’immeubles ou de groupes d’immeubles ou un agent exerçant pour le compte d’un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d’habitation en application de l’article L. 127-1 du code de la construction et de l’habitation, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

5° Sur un témoin, une victime ou une partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

Art. 222-13. – Les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsqu’elles sont commises :

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

4° Sur un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire de la police nationale, des douanes, de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d’immeubles ou de groupes d’immeubles ou un agent exerçant pour le compte d’un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d’habitation en application de l’article L. 127-1 du code de la construction et de l’habitation, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   

5° Sur un témoin, une victime ou une partie civile, soit pour l’empêcher de dénoncer les faits, de porter plainte ou de déposer en justice, soit en raison de sa dénonciation, de sa plainte ou de sa déposition ;

   

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

   
 

Article 5

Article 5

 

Après l’article 434-4-1 du même code, il est inséré un article 434-4-2 ainsi rédigé :

(Sans modification)

Art. 434-4. – Cf. annexe.

« Art. 434-4-2. – Les dispositions de l’article 434-4 sont applicables aux atteintes à l’administration de la justice par la Cour pénale internationale. »

 
 

Article 6

Article 6

 

Après l’article 434-23 du même code, il est inséré un article 434-23-1 ainsi rédigé :

(Sans modification)

Art. 434-8, 434-9, 434-13 à 434-15. – Cf. annexe.

« Art. 434-23-1. – Les dispositions des articles 434-8, 434-9, 434-13 à 434-15 sont applicables aux atteintes à l’administration de la justice par la Cour pénale internationale. »

 
 

Article 7

Article 7

 

Après le livre IV du même code, il est inséré un livre IV bis ainsi rédigé :

(Sans modification)

 

« Livre IV bis

 
 

« Des crimes et des délits de guerre 

 
 

« Chapitre Ier

 
 

« Des différents crimes et délits de guerre

 
 

« Section 1

 
 

« De la définition des crimes et délits de guerre

 
 

« Art. 461-1. – Constituent des crimes ou des délits de guerre les infractions définies par le présent livre commises, lors d’un conflit armé international ou non international et en relation avec ce conflit, en violation des lois et coutumes de la guerre ou des conventions internationales applicables aux conflits armés, à l’encontre des personnes ou des biens visés aux articles 461-2 à 461-31.

 
 

« Section 2

 
 

« Des crimes et délits de guerre communs aux conflits armés internationaux et non internationaux

 
 

« Sous-section 1

 
 

« Des atteintes à la personne humaine perpétrées lors d’un conflit armé international ou non international

 
 

« Paragraphe 1

 
 

« Des atteintes à la vie et à l’intégrité physique ou psychique

 
 

« Art. 461-2. – Sont passibles des aggravations de peines prévues à l’article 462-1 les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l’intégrité physique ou psychique de la personne ainsi que l’enlèvement et la séquestration, définis par le livre II du présent code et commis à l’encontre d’une personne protégée par le droit international des conflits armés en vertu des lois et coutumes de guerre et du droit international humanitaire.

 
 

« Art. 461-3. – Le fait de soumettre des personnes d’une partie adverse à des mutilations ou à des expériences médicales ou scientifiques, qui ne sont ni justifiées par des raisons thérapeutiques ni pratiquées dans l’intérêt de ces personnes et qui entraînent leur mort ou portent gravement atteinte à leur santé ou à leur intégrité physique ou psychique, est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-4. – Le fait de forcer une personne protégée par le droit international des conflits armés à se prostituer, de la contraindre à une grossesse non désirée, de la stériliser contre sa volonté ou d’exercer à son encontre toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-5. – Le fait de se livrer à des traitements humiliants et dégradants sur des personnes de la partie adverse et qui portent gravement atteinte à leur intégrité physique ou psychique est puni de quinze ans de réclusion criminelle.

 
 

« Paragraphe 2

 
 

« Des atteintes à la liberté individuelle

 

Art. 432-4. – Cf. annexe.

« Art. 461-6. – Sont passibles des aggravations de peines prévues à l’article 462-1 les atteintes à la liberté individuelle définies à l’article 432-4 et commises, à l’encontre d’une personne protégée par le droit international des conflits armés, en dehors des cas admis par les conventions internationales.

 
 

« Paragraphe 3

 
 

« Des atteintes aux droits des mineurs dans les conflits armés

 
 

« Art. 461-7. – Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement de mineurs de dix-huit ans dans les forces armées ou dans des groupes armés, ou de les faire participer activement à des hostilités, est puni de vingt ans de réclusion criminelle. Ces dispositions ne font pas obstacle à l’enrôlement volontaire des mineurs de plus de 15 ans.

 
 

« Sous-section 2

 
 

« Des crimes et délits de guerre liés à la conduite des hostilités

 
 

« Paragraphe 1

 
 

« Des moyens et des méthodes de combat prohibés

 
 

« Art. 461-8. – Le fait d’ordonner qu’il n’y ait pas de survivants ou d’en menacer l’adversaire est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-9. – Le fait de lancer des attaques délibérées contre la population civile en tant que telle ou contre des personnes civiles qui ne prennent pas part directement aux hostilités est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-10. – Le fait de causer des blessures ayant porté gravement atteinte à son intégrité physique à un combattant de la partie adverse qui, ayant déposé les armes ou n’ayant plus de moyens de se défendre, s’est rendu est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« La peine est portée à trente ans de réclusion criminelle si les blessures ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ou la mort de la victime sans intention de la donner.

 
 

« Le fait de lui donner volontairement la mort dans les circonstances définies au premier alinéa est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-11. – Le fait de causer, par traîtrise, à un individu appartenant à la nation ou à l’armée adverse ou à un combattant de la partie adverse, des blessures ayant porté gravement atteinte à son intégrité physique est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« La peine est portée à trente ans de réclusion criminelle si les blessures ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ou la mort de la victime sans intention de la donner.

 
 

« Le fait de lui donner volontairement la mort dans les circonstances définies au premier alinéa est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-12. – Est puni de vingt ans de réclusion criminelle le fait :

 
 

« 1° De lancer des attaques délibérées contre le personnel, les bâtiments, le matériel, les unités et les moyens de transport sanitaires portant, conformément au droit international, les signes distinctifs prévus par les conventions de Genève du 12 août 1949 ou leurs protocoles additionnels ;

 
 

« 2° De lancer des attaques délibérées contre le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les véhicules employés dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations unies, pour autant qu’ils aient droit à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil.

 
 

« Lorsque les infractions décrites aux 1° et 2° ont causé aux personnels susmentionnés des blessures ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, la peine est portée à trente ans de réclusion criminelle.

 
 

« Lorsque ces mêmes infractions ont eu pour conséquence la mort des personnels considérés, la peine est portée à la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-13. – Le fait de lancer des attaques délibérées contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades ou des blessés sont rassemblés, pour autant que ces bâtiments ne soient pas alors utilisés à des fins militaires, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« Art. 461-14. – Le fait de lancer des attaques délibérées contre des biens de caractère civil qui ne sont pas des objectifs militaires est puni de quinze ans de réclusion criminelle.

 
 

« Paragraphe 2

 
 

« Des atteintes aux biens dans les conflits armés

 
 

« Art. 461-15. – Le fait de se livrer, avec des armes ou à force ouverte, au pillage d’une ville ou d’une localité, même prise d’assaut, est puni de quinze ans de réclusion criminelle.

 
 

« Art. 461-16. – À moins qu’elles ne soient justifiées par des nécessités militaires, constituent également des crimes ou des délits de guerre et sont passibles des aggravations de peines prévues à l’article 462-1 les infractions suivantes commises à l’encontre d’une personne protégée par le droit international des conflits armés :

 
 

« 1° Les vols, les extorsions ainsi que les destructions, dégradations et détériorations de biens, définis par le livre III du présent code ;

 
 

« 2° Le recel du produit de l’une des infractions prévues au 1°.

 
 

« Art. 461-17. - La tentative des délits prévus au 1° de l’article 461-16 est passible des mêmes causes d’aggravation des peines.

 
 

« Sous-section 3

 
 

« Des groupements formés ou des ententes établies en vue de préparer des crimes ou des délits de guerre

 
 

« Art. 461-18. – Le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de l’un des crimes ou des délits de guerre définis au présent chapitre est puni de dix ans d’emprisonnement et de 225 000 € d’amende.

 
 

« Section 3

 
 

« Des crimes et délits de guerre
propres aux conflits armés internationaux

 
 

« Sous-section 1

 
 

« Des atteintes à la liberté et aux droits des personnes dans les conflits armés internationaux

 
 

« Art. 461-19. – Le fait d’employer une personne protégée par le droit international des conflits armés pour éviter que certains points, zones ou forces militaires ne soient la cible d’opérations militaires est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« Art. 461-20. – Est puni de vingt ans de réclusion criminelle le fait, pour le compte d’une puissance belligérante :

 
 

« 1° De contraindre une personne protégée par le droit international des conflits armés à servir dans ses forces armées ;

 
 

« 2° De contraindre les nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays, même s’ils étaient au service de la puissance belligérante avant le commencement de la guerre.

 
 

« Art. 461-21. – Le fait de faire obstacle au droit d’une personne protégée par le droit international des conflits armés d’être jugée régulièrement et impartialement, selon les prescriptions des conventions internationales applicables, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« Lorsque l’infraction a conduit à l’exécution de la personne qui a fait l’objet de la condamnation prononcée, la peine est portée à la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-22. – Le fait de déclarer les droits et actions des nationaux de la partie adverse irrecevables en justice, forclos ou suspendus, en raison de la nationalité des requérants, est puni de quinze ans de réclusion criminelle.

 
 

« Sous-section 2

 
 

« Des moyens et méthodes de combat prohibés dans un conflit armé international

 
 

« Art. 461-23. – Est puni de la réclusion criminelle à perpétuité le fait :

 
 

« 1° D’utiliser du poison ou des armes empoisonnées ;

 
 

« 2° D’utiliser des gaz asphyxiants, toxiques ou assimilés et tous liquides, matières ou procédés analogues ;

 
 

« 3° D’utiliser des balles qui se déforment facilement dans le corps humain ;

 
 

« 4° D’employer des armes, des projectiles, des matériels ou des méthodes de combat ayant fait l’objet d’une interdiction générale et ayant été inscrits dans une annexe au statut de la Cour pénale internationale acceptée par la France.

 
 

« Art. 461-24. – Le fait d’attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments, qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires, est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-25. – Le fait d’affamer des personnes civiles, comme méthode de guerre, en les privant délibérément de biens indispensables à leur survie, y compris en empêchant intentionnellement l’envoi des secours prévus par les conventions de Genève du 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels, est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-26. – Le fait de participer soit au transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante, d’une partie de sa population civile dans le territoire qu’elle occupe, soit à la déportation ou au transfert à l’intérieur ou hors du territoire occupé de la totalité ou d’une partie de la population civile de ce territoire est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-27. – Le fait de lancer une attaque délibérée en sachant qu’elle causera incidemment des pertes en vies humaines dans la population civile ou des blessures parmi cette population, qui seraient manifestement disproportionnées par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu de l’ensemble de l’attaque, est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-28. – Est puni de vingt ans de réclusion criminelle le fait de lancer une attaque délibérée en sachant qu’elle causera incidemment :

 
 

« 1° Des dommages aux biens de caractère civil qui seraient manifestement disproportionnés par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu de l’ensemble de l’attaque ;

 
 

« 2° Des dommages étendus, durables et graves à l’environnement naturel qui seraient manifestement disproportionnés par rapport à l’avantage militaire concret et direct attendu de l’ensemble de l’attaque.

 
 

« Art. 461-29. – Le fait d’employer indûment le pavillon parlementaire, le drapeau ou les insignes militaires et l’uniforme de l’ennemi ou de l’Organisation des Nations unies, ainsi que les signes distinctifs prévus par les conventions de Genève du 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels, et, ce faisant, de causer à un combattant de la partie adverse des blessures ayant porté gravement atteinte à son intégrité physique, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« Lorsque l’infraction définie au premier alinéa a eu pour effet de causer audit combattant des blessures ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, la peine est portée à trente ans de réclusion criminelle.

 
 

« Lorsque l’infraction a eu pour conséquence la mort de la victime, la peine est portée à la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Section 4

 
 

« Des crimes et délits de guerre propres aux conflits armés non internationaux

 
 

« Art. 461-30. – À moins que la sécurité des personnes civiles ou des impératifs militaires ne l’exigent, le fait d’ordonner le déplacement de la population civile pour des raisons ayant trait au conflit est puni de la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Art. 461-31. – Le fait de prononcer des condamnations et d’exécuter des peines sans un jugement préalable, rendu par un tribunal régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires prévues par les conventions de Genève du 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.

 
 

« Lorsque l’infraction définie au premier alinéa a conduit à l’exécution de la personne qui a été condamnée, la peine est portée à la réclusion criminelle à perpétuité.

 
 

« Chapitre II

 
 

« Dispositions particulières

 
 

« Art. 462-1. – Le maximum de la peine privative de liberté encourue pour les infractions mentionnées aux articles 461-2, 461-6, 461-16 et 461-17 est relevé ainsi qu’il suit lorsque ces infractions constituent des crimes ou des délits de guerre :

 
 

« 1° Il est porté à la réclusion criminelle à perpétuité lorsque l’infraction est punie de trente ans de réclusion criminelle ;

 
 

« 2° Il est porté à trente ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est punie de vingt ans de réclusion criminelle ;

 
 

« 3° Il est porté à vingt ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est punie de quinze ans de réclusion criminelle ;

 
 

« 4° Il est porté à quinze ans de réclusion criminelle lorsque l’infraction est punie de dix ans d’emprisonnement ;

 
 

« 5° Il est porté à dix ans d’emprisonnement lorsque l’infraction est punie de sept ans d’emprisonnement ;

 
 

« 6° Il est porté à sept ans d’emprisonnement lorsque l’infraction est punie de cinq ans d’emprisonnement ;

 
 

« 7° Il est porté au double lorsque l’infraction est punie de trois ans au plus.

 

Art. 132-23. – Cf. annexe.

« Art. 462-2. – Les deux premiers alinéas de l’article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux crimes, ainsi qu’aux délits punis de dix ans d’emprisonnement, prévus par le présent livre.

 
 

« Art. 462-3. – Les personnes physiques coupables de l’une des infractions prévues par le présent livre encourent également les peines suivantes :

 

Art. 131-26. – Cf. annexe.

« 1° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l’article 131-26. Toutefois, le maximum de la durée de l’interdiction est porté à quinze ans en cas de crime et à dix ans en cas de délit ;

 

Art. 131-27. – Cf. annexe.

« 2° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise. Toutefois, le maximum de la durée de l’interdiction temporaire est porté à dix ans ;

 

Art. 131-31. – Cf. annexe.

« 3° L’interdiction de séjour, suivant les modalités prévues par l’article 131-31. Toutefois, le maximum de la durée de l’interdiction est porté à quinze ans en cas de crime et à dix ans en cas de délit.

 

Art. 131-30. – Cf. annexe.

« Art. 462-4. – L’interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues par l’article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable de l’une des infractions définies au présent livre.

 

Art. 121-2. – Cf. annexe.

Art. 131-38 et 131-39. – Cf. annexe.

« Art. 462-5. – Les peines encourues par les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2, des crimes ou des délits de guerre définis au présent livre sont, outre l’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38, les peines mentionnées à l’article 131-39.

 
 

« L’interdiction mentionnée au 2° de l’article 131-39 porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.

 
 

« Art. 462-6. – Les personnes physiques ou les personnes morales reconnues coupables d’un crime ou d’un délit de guerre visé par le présent livre encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens.

 

Art. 121-7. – Cf. annexe.

« Art. 462-7. – Sans préjudice de l’application des dispositions de l’article 121-7, est considéré comme complice d’un crime ou d’un délit de guerre visé par le présent livre commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs le chef militaire ou la personne qui en faisait fonction qui savait ou, en raison des circonstances, aurait dû savoir que ces subordonnés commettaient ou allaient commettre ce crime ou ce délit et qui n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites.

 
 

« Sans préjudice de l’application des dispositions de l’article 121-7, est également considéré comme complice d’un crime ou d’un délit de guerre visé par le présent livre et commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs le supérieur hiérarchique, n’exerçant pas la fonction de chef militaire, qui savait que ces subordonnés commettaient ou allaient commettre une telle infraction ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement et qui n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites, alors que le crime ou le délit était lié à des activités relevant de sa responsabilité ou de son contrôle effectifs.

 
 

« Art. 462-8. - L’auteur ou le complice d’un crime ou d’un délit de guerre visé par le présent livre ne peut être exonéré de sa responsabilité pénale du seul fait qu’il a accompli un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ou un acte commandé par l’autorité légitime. Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le montant.

 
 

« En outre, l’auteur ou le complice n’est pas pénalement responsable dans le cas où il ne savait pas que l’ordre de l’autorité légitime était illégal et où cet ordre n’était pas manifestement illégal.

 
 

« Art. 462-9. – N’est pas pénalement responsable d’un crime ou d’un délit de guerre visé par le présent livre la personne qui a agi raisonnablement pour sauvegarder des biens essentiels à sa survie ou à celle d’autrui ou essentiels à l’accomplissement d’une mission militaire, contre un recours imminent et illicite à la force, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité du danger couru.

 
 

« Art. 462-10. – L’action publique à l’égard des crimes de guerre définis au présent livre se prescrit par trente ans. La peine prononcée en cas de condamnation pour l’un de ces crimes se prescrit par trente ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive.

 
 

« L’action publique à l’égard des délits de guerre définis au présent livre se prescrit par vingt ans. La peine prononcée en cas de condamnation pour l’un de ces délits se prescrit par vingt ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive.

 
 

« Art. 462-11. – N’est pas constitutif d’une infraction visée par le présent livre le fait, pour accomplir un acte nécessaire à l’exercice par la France de son droit de légitime défense, d’user de l’arme nucléaire ou de toute autre arme dont l’utilisation n’est pas prohibée par une convention internationale à laquelle la France est partie. »

 
 

CHAPITRE IER BIS

CHAPITRE IER BIS

 

Disposition modifiant le code de procédure pénale

Disposition modifiant le code de procédure pénale

 

[Division et intitulé nouveaux]

 
 

Article 7 bis (nouveau)

Article 7 bis

 

Après l’article 689-10 du code de procédure pénale, il est inséré un article 689-11 ainsi rédigé :

(Sans modification)

 

« Art. 689-11. – Peut être poursuivie et jugée par les juridictions françaises toute personne qui réside habituellement sur le territoire de la République et qui s’est rendue coupable à l’étranger de l’un des crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale en application de la convention portant statut de la Cour pénale internationale signée à Rome le 18 juillet 1998, si les faits sont punis par la législation de l’État où ils ont été commis ou si cet État ou l’État dont il a la nationalité est partie à la convention précitée.

 
 

« La poursuite de ces crimes ne peut être exercée qu’à la requête du ministère public si aucune juridiction internationale ou nationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne. À cette fin, le ministère public s’assure auprès de la Cour pénale internationale qu’elle décline expressément sa compétence et vérifie qu’aucune autre juridiction internationale compétente pour juger la personne n’a demandé sa remise et qu’aucun autre État n’a demandé son extradition. »

 
 

CHAPITRE II

CHAPITRE II

 

Dispositions finales

Dispositions finales

Code de justice militaire

Article 8

Article 8

Art. L. 311-1. – Sans préjudice de la répression pénale des faits qui constituent des crimes ou délits de droit commun, et notamment de ceux qui sont contraires aux lois et coutumes de la guerre et aux conventions internationales, sont punies conformément aux dispositions du présent livre les infractions d’ordre militaire prévues aux articles L. 311-2 à L. 311-14.

I. – Dans l’article L. 311-1 du code de justice militaire, les mots : « contraires aux lois et coutumes de la guerre et aux conventions internationales » sont remplacés par les mots : « définis aux articles 461-1 à 461-31 du code pénal ».

(Sans modification)

Code pénal

Art. 461-1 à 461-31. – Cf. supra art. 7.

   

Code de justice militaire

   

Art. L. 322-4. – Sont punis de la réclusion criminelle à perpétuité tous pillages ou dégâts de denrées, marchandises ou effets commis en bande par des militaires ou par des personnes embarquées, soit avec des armes ou à force ouverte, soit avec bris de portes et clôtures extérieures, soit avec violences envers les personnes.

II. – L’article L. 322-4 du même code est abrogé.

 

Le pillage et les dégâts commis en bande sont punis de dix ans d’emprisonnement dans tous les autres cas.

   

Néanmoins, si dans les cas prévus au premier alinéa, il existe parmi les coupables un ou plusieurs instigateurs, un ou plusieurs militaires pourvus de grades, la peine de la réclusion criminelle à perpétuité n’est infligée qu’aux instigateurs et aux militaires les plus élevés en grade. Les autres coupables sont punis de vingt ans de réclusion criminelle.

   

Code pénal

III (nouveau). – L’article 213-1 du code pénal est ainsi modifié :

 

Art. 213-1. – Les personnes physiques coupables des infractions prévues par le présent sous-titre encourent également les peines suivantes :

1° Le 1° est complété par une phrase ainsi rédigée :

 

1° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, selon les modalités prévues par l’article 131-26 ;

« Toutefois, le maximum de l’interdiction est porté à quinze ans ; »

 
 

2° Le 2° est ainsi rédigé :

 

2° L’interdiction d’exercer une fonction publique, selon les modalités prévues par l’article 131-27 ;

« 2° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise. Toutefois, le maximum de l’interdiction temporaire est porté à dix ans ; »

 
 

3° Le 3° est complété par une phrase ainsi rédigée :

 

3° L’interdiction de séjour, selon les modalités prévues par l’article 131-31 ;

« Toutefois, le maximum de l’interdiction est porté à quinze ans ; ».

 

4° La confiscation de tout ou partie de leurs biens ;

   

5° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27, soit d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, soit d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d’exercice peuvent être prononcées cumulativement.

   
 

Article 9

Article 9

 

Les articles 1er à 8 sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

(Sans modification)

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

Code pénal

Art. 121-2. – Les personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de conventions de délégation de service public.

La responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l’article 121-3.

Art. 121-7. – Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation.

Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre.

Art. 131-26. – L’interdiction des droits civiques, civils et de famille porte sur :

1° Le droit de vote ;

2° L’éligibilité ;

3° Le droit d’exercer une fonction juridictionnelle ou d’être expert devant une juridiction, de représenter ou d’assister une partie devant la justice ;

4° Le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations ;

5° Le droit d’être tuteur ou curateur ; cette interdiction n’exclut pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d’être tuteur ou curateur de ses propres enfants.

L’interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

La juridiction peut prononcer l’interdiction de tout ou partie de ces droits.

L’interdiction du droit de vote ou l’inéligibilité prononcées en application du présent article emportent interdiction ou incapacité d’exercer une fonction publique.

Art. 131-27. – Lorsqu’elle est encourue à titre de peine complémentaire pour un crime ou un délit, l’interdiction d’exercer une fonction publique ou d’exercer une activité professionnelle ou sociale est soit définitive, soit temporaire ; dans ce dernier cas, elle ne peut excéder une durée de cinq ans.

L’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale est soit définitive, soit temporaire ; dans ce dernier cas, elle ne peut excéder une durée de dix ans.

Cette interdiction n’est pas applicable à l’exercice d’un mandat électif ou de responsabilités syndicales. Elle n’est pas non plus applicable en matière de délit de presse.

Art. 131-30. – Lorsqu’elle est prévue par la loi, la peine d’interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime ou d’un délit.

L’interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l’expiration de sa peine d’emprisonnement ou de réclusion.

Lorsque l’interdiction du territoire accompagne une peine privative de liberté sans sursis, son application est suspendue pendant le délai d’exécution de la peine. Elle reprend, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin.

L’interdiction du territoire français prononcée en même temps qu’une peine d’emprisonnement ne fait pas obstacle à ce que cette peine fasse l’objet, aux fins de préparation d’une demande en relèvement, de mesures de semi-liberté, de placement à l’extérieur, de placement sous surveillance électronique ou de permissions de sortir.

Art. 131-31. – La peine d’interdiction de séjour emporte défense de paraître dans certains lieux déterminés par la juridiction. Elle comporte, en outre, des mesures de surveillance et d’assistance. La liste des lieux interdits ainsi que les mesures de surveillance et d’assistance peuvent être modifiées par le juge de l’application des peines, dans les conditions fixées par le code de procédure pénale.

L’interdiction de séjour ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

Art. 131-38. – Le taux maximum de l’amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l’infraction.

Lorsqu’il s’agit d’un crime pour lequel aucune peine d’amende n’est prévue à l’encontre des personnes physiques, l’amende encourue par les personnes morales est de 1 000 000 €.

Art. 131-39. – Lorsque la loi le prévoit à l’encontre d’une personne morale, un crime ou un délit peut être sanctionné d’une ou de plusieurs des peines suivantes :

1° La dissolution, lorsque la personne morale a été créée ou, lorsqu’il s’agit d’un crime ou d’un délit puni en ce qui concerne les personnes physiques d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, détournée de son objet pour commettre les faits incriminés ;

2° L’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;

3° Le placement, pour une durée de cinq ans au plus, sous surveillance judiciaire ;

4° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l’un ou de plusieurs des établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

5° L’exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;

6° L’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de procéder à une offre au public de titres financiers ou de faire admettre ses titres financiers aux négociations sur un marché réglementé ;

7° L’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d’émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d’utiliser des cartes de paiement ;

8° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit ;

9° L’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique ;

10° La confiscation de l’animal ayant été utilisé pour commettre l’infraction ou à l’encontre duquel l’infraction a été commise ;

11° L’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, de détenir un animal.

Les peines définies aux 1° et 3° ci-dessus ne sont pas applicables aux personnes morales de droit public dont la responsabilité pénale est susceptible d’être engagée. Elles ne sont pas non plus applicables aux partis ou groupements politiques ni aux syndicats professionnels. La peine définie au 1° n’est pas applicable aux institutions représentatives du personnel.

Art. 132-23. – En cas de condamnation à une peine privative de liberté, non assortie du sursis, dont la durée est égale ou supérieure à dix ans, prononcée pour les infractions spécialement prévues par la loi, le condamné ne peut bénéficier, pendant une période de sûreté, des dispositions concernant la suspension ou le fractionnement de la peine, le placement à l’extérieur, les permissions de sortir, la semi-liberté et la libération conditionnelle.

La durée de la période de sûreté est de la moitié de la peine ou, s’il s’agit d’une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, de dix-huit ans. La cour d’assises ou le tribunal peut toutefois, par décision spéciale, soit porter ces durées jusqu’aux deux tiers de la peine ou, s’il s’agit d’une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, jusqu’à vingt-deux ans, soit décider de réduire ces durées.

Dans les autres cas, lorsqu’elle prononce une peine privative de liberté d’une durée supérieure à cinq ans, non assortie du sursis, la juridiction peut fixer une période de sûreté pendant laquelle le condamné ne peut bénéficier d’aucune des modalités d’exécution de la peine mentionnée au premier alinéa. La durée de cette période de sûreté ne peut excéder les deux tiers de la peine prononcée ou vingt-deux ans en cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité.

Les réductions de peines accordées pendant la période de sûreté ne seront imputées que sur la partie de la peine excédant cette durée.

Art. 432-4. – Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, d’ordonner ou d’accomplir arbitrairement un acte attentatoire à la liberté individuelle est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende.

Lorsque l’acte attentatoire consiste en une détention ou une rétention d’une durée de plus de sept jours, la peine est portée à trente ans de réclusion criminelle et à 450 000 € d’amende.

Art. 434-4. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende le fait, en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité :

1° De modifier l’état des lieux d’un crime ou d’un délit soit par l’altération, la falsification ou l’effacement des traces ou indices, soit par l’apport, le déplacement ou la suppression d’objets quelconques ;

2° De détruire, soustraire, receler ou altérer un document public ou privé ou un objet de nature à faciliter la découverte d’un crime ou d’un délit, la recherche des preuves ou la condamnation des coupables.

Lorsque les faits prévus au présent article sont commis par une personne qui, par ses fonctions, est appelée à concourir à la manifestation de la vérité, la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende.

Art. 434-8. – Toute menace ou tout acte d’intimidation commis envers un magistrat, un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle, un arbitre, un interprète, un expert ou l’avocat d’une partie en vue d’influencer son comportement dans l’exercice de ses fonctions est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

Art. 434-9. – Est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende le fait, par :

1° Un magistrat, un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle ;

2° Un fonctionnaire au greffe d’une juridiction ;

3° Un expert nommé, soit par une juridiction, soit par les parties ;

4° Une personne chargée par l’autorité judiciaire ou par une juridiction administrative d’une mission de conciliation ou de médiation ;

5° Un arbitre exerçant sa mission sous l’empire du droit national sur l’arbitrage,

de solliciter ou d’agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour lui-même ou pour autrui, en vue de l’accomplissement ou de l’abstention d’un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction.

Le fait de céder aux sollicitations d’une personne visée aux 1° à 5°, ou de proposer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, pour elle-même ou pour autrui, afin d’obtenir d’une de ces personnes l’accomplissement ou l’abstention d’un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction est puni des mêmes peines.

Lorsque l’infraction définie aux premier à septième alinéas est commise par un magistrat au bénéfice ou au détriment d’une personne faisant l’objet de poursuites criminelles, la peine est portée à quinze ans de réclusion criminelle et à 225 000 € d’amende.

Art. 434-13. – Le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d’une commission rogatoire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.

Toutefois, le faux témoin est exempt de peine s’il a rétracté spontanément son témoignage avant la décision mettant fin à la procédure rendue par la juridiction d’instruction ou par la juridiction de jugement.

Art. 434-14. – Le témoignage mensonger est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende :

1° Lorsqu’il est provoqué par la remise d’un don ou d’une récompense quelconque ;

2° Lorsque celui contre lequel ou en faveur duquel le témoignage mensonger a été commis est passible d’une peine criminelle.

Art. 434-15. – Le fait d’user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices au cours d’une procédure ou en vue d’une demande ou défense en justice afin de déterminer autrui soit à faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation mensongère, soit à s’abstenir de faire ou délivrer une déposition, une déclaration ou une attestation, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende, même si la subornation n’est pas suivie d’effet.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement CL1 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères, et M. Jean-Paul Lecoq :

Avant l’article 1er

Insérer l’article suivant :

« Dans le premier alinéa de l’article 211-1 du code pénal, les mots : « en exécution d’un plan concerté tendant à » sont remplacés par les mots : « en vue de ». »

Amendement CL2 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères, et M. Jean-Paul Lecoq :

Article 2

À l’alinéa 2, supprimer les mots : « en exécution d’un plan concerté ».

Amendement CL3 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères, et M. Jean-Paul Lecoq :

Article 2

À l’alinéa 9, après le mot : « viol, », insérer les mots : « l’esclavage sexuel, ».

Amendement CL4 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères :

Article 7

Dans l’alinéa 17 de cet article, après les mots : « non désirée », insérer les mots : « ou à de l’esclavage sexuel, de la violer ».

Amendement CL5 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères, et M. Jean-Paul Lecoq :

Article 7

À l’alinéa 47, substituer au mot : « protégée », les mots : « ou d’un bien protégés ».

Amendement CL6 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères, et M. Jean-Paul Lecoq :

Article 7

À l’alinéa 110, après les mots : « qui a agi raisonnablement », insérer les mots : « pour se défendre, pour défendre autrui ou ».

Amendement CL7 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères :

Article 7 bis

À l’alinéa 2, substituer aux mots : « réside habituellement », les mots : « se trouve ».

Amendement CL8 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères :

Article 7 bis

Après la date : « 18 juillet 1998 », supprimer la fin de l’alinéa 2.

Amendement CL9 présenté par Mme Nicole Ameline, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères :

Article 7 bis

Rédiger ainsi l’alinéa 3 de cet article :

« La poursuite de ces crimes peut être exercée si aucune juridiction internationale ou nationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne et si aucune procédure concernant ces crimes n’est en cours devant la Cour pénale internationale. »

Amendement CL10 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Avant l’article 1er

Insérer l’article suivant :

« Dans le premier alinéa de l’article 211-1 du code pénal, les mots : « en exécution d’un plan concerté tendant à » sont remplacés par les mots : « en vue de ». »

Amendement CL11 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« Si la provocation n’a pas été suivie d’effet, les faits sont punis de [durée de la peine laissée à l’appréciation du législateur] de réclusion criminelle. »

Amendement CL12 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

À l’alinéa 2, supprimer les mots : « en exécution d’un plan concerté ».

Amendement CL13 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

À l’alinéa 9, après le mot : « viol, », insérer les mots : « l’esclavage sexuel, ».

Amendement CL14 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 2

Rédiger ainsi le douzième alinéa (10°) de cet article :

« 10° Le crime d’apartheid ; ».

Amendement CL15 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« L’article 213-4 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Aux fins du présent article, l’ordre de commettre un génocide ou un crime contre l’humanité est manifestement illégal. »

Amendement CL16 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 3

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« Art. 213-4-2. – La qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent titre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine. »

Amendement CL17 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Après l’alinéa 8, insérer l’alinéa suivant :

« La notion de conflit armé non international s’applique aux conflits armés qui opposent de manière prolongée sur le territoire d’un État les autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés organisés ou des groupes armés organisés entre eux. Cette notion ne s’applique pas aux situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de nature similaire. »

Amendement CL18 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

À l’alinéa 16, substituer au mot : « gravement » le mot : « sérieusement ».

Amendement CL19 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

À l’alinéa 17, après les mots : « de la contraindre à une grossesse non désirée, » insérer les mots : « ou à de l’esclavage sexuel ».

Amendement CL20 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 21 :

« Art. 461-6. – Sont passibles de [durée de la peine laissée à l’appréciation du législateur] ans de réclusion criminelle les atteintes à la liberté individuelle définies à l’article 432-4 et commises à l’encontre d’une personne protégée par le droit international des conflits armés, en dehors des cas admis par les conventions internationales. »

Amendement CL21 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

À l’alinéa 47, substituer au mot : « protégée », les mots : « ou d’un bien protégés ».

Amendement CL22 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 71 :

« 4° D’employer des armes, des projectiles, des matières et des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation du droit international des conflits armés, à condition que ces armes, projectiles, matières et méthodes de guerre fassent l’objet d’une interdiction générale prévue par le statut de la Cour pénale internationale. »

Amendement CL23 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

À l’alinéa 89, supprimer la référence : « 461-6, ».

Amendement CL24 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

À l’alinéa 110, après les mots : « qui a agi raisonnablement », insérer les mots : « pour se défendre, pour défendre autrui ou ».

Amendement CL25 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Après l’alinéa 110, insérer l’alinéa suivant :

« Le fait qu’une personne ait participé à une opération défensive menée par des forces armées ne constitue pas en soi un motif d’exonération de la responsabilité pénale au titre du présent article. »

Amendement CL26 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 111 :

« Art. 462-10. – L’action publique à l’égard des crimes de guerre définis au présent livre ainsi que les peines prononcées sont imprescriptibles. »

Amendement CL27 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Après le mot : « nucléaire », supprimer la fin de l’alinéa 113.

Amendement CL28 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Après le mot : « nucléaire », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 113 : « dans le respect des règles régissant son utilisation auxquelles la France est liée. »

Amendement CL29 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7

Après l’alinéa 113, insérer l’alinéa suivant :

« Art. 462-12. – La qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent livre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine. »

Amendement CL30 présenté par MM. Noël Mamère, Yves Cochet et François de Rugy :

Article 7 bis

Substituer aux alinéas 2 et 3 les quatre alinéas suivants :

« Art. 689-11. – Pour l’application du statut de la Cour pénale internationale, signé à Rome le 17 juillet 1998, peut être poursuivie et jugée dans les conditions prévues à l’article 689-1 toute personne coupable de l’une des infractions suivantes :

« 1° Crimes contre l’humanité et crimes de génocide définis aux articles 211-1, 211-2, 212-1 à 212-4 du code pénal ;

« 2° Crimes de guerre définis aux articles 461-1 à 461-31 du même code ;

« 3° Infractions graves aux conventions de Genève du 12 août 1949 et au protocole additionnel I du 8 juin 1977. »

Amendement CL31 présenté par M. François Vannson :

Avant l’article 1er

Insérer l’article suivant :

« Dans le premier alinéa de l’article 211-1 du code pénal, les mots : « en exécution d’un plan concerté tendant à » sont remplacés par les mots : « en vue de ». »

Amendement CL32 présenté par M. François Vannson :

Article 2

À l’alinéa 2, supprimer les mots : « en exécution d’un plan concerté ».

Amendement CL33 présenté par M. François Vannson :

Article 2

À l’alinéa 9, après le mot : « viol, », insérer les mots : « l’esclavage sexuel, ».

Amendement CL34 présenté par M. François Vannson :

Article 2

Rédiger ainsi le douzième alinéa de cet article :

« 10° Le crime d’apartheid ; »

Amendement CL35 présenté par M. François Vannson :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« L’article 213-4 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Aux fins du présent article, l’ordre de commettre un génocide ou un crime contre l’humanité est manifestement illégal. »

Amendement CL36 présenté par M. François Vannson :

Article 3

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« Art. 213-4-2. – La qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent titre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine. »

Amendement CL37 présenté par M. François Vannson :

Article 7

Après l’alinéa 8, insérer l’alinéa suivant :

« La notion de conflit armé non international s’applique aux conflits armés qui opposent de manière prolongée sur le territoire d’un État les autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés organisés ou des groupes armés organisés entre eux. Cette notion ne s’applique pas aux situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de nature similaire. »

Amendement CL38 présenté par M. François Vannson :

Article 7

À l’alinéa 16, substituer au mot : « gravement » le mot : « sérieusement ».

Amendement CL39 présenté par M. François Vannson :

Article 7

A l’alinéa 17, après les mots : « de la contraindre à une grossesse non désirée, » insérer les mots : « ou à de l’esclavage sexuel ».

Amendement CL40 présenté par M. François Vannson :

Article 7

À l’alinéa 47, substituer au mot : « protégée », es mots : « ou d’un bien protégés ».

Amendement CL41 présenté par M. François Vannson :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 71 :

« 4° D’employer des armes, des projectiles, des matières et des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation du droit international des conflits armés, à condition que ces armes, projectiles, matières et méthodes de guerre fassent l’objet d’une interdiction générale prévue par le statut de la Cour pénale internationale. »

Amendement CL42 présenté par M. François Vannson :

Article 7

À l’alinéa 89, supprimer la référence : « 461-6, ».

Amendement CL43 présenté par M. François Vannson :

Article 7

À l’alinéa 110, après les mots : « qui a agi raisonnablement », insérer les mots : « pour se défendre, pour défendre autrui ou ».

Amendement CL44 présenté par M. François Vannson :

Article 7

Après l’alinéa 110, insérer l’alinéa suivant :

« Le fait qu’une personne ait participé à une opération défensive menée par des forces armées ne constitue pas en soi un motif d’exonération de la responsabilité pénale au titre du présent article. »

Amendement CL45 présenté par M. François Vannson :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 111 :

« Art. 462-10. – L’action publique à l’égard des crimes de guerre définis au présent livre ainsi que les peines prononcées sont imprescriptibles. »

Amendement CL46 présenté par M. François Vannson :

Article 7

Après le mot : « nucléaire », supprimer la fin de l’alinéa 113.

Amendement CL47 présenté par M. François Vannson :

Article 7

Après l’alinéa 113, insérer l’alinéa suivant :

« Art. 462-12. – La qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent livre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine. »

Amendement CL48 présenté par M. François Vannson :

Article 7 bis

Substituer aux alinéas 2 et 3 les quatre alinéas suivants :

« Art. 689-11. – Pour l’application du statut de la Cour pénale internationale, signé à Rome le 17 juillet 1998, peut être poursuivie et jugée dans les conditions prévues à l’article 689-1 toute personne coupable de l’une des infractions suivantes :

« 1° Crimes contre l’humanité et crimes de génocide définis aux articles 211-1, 211-2, 212-1 à 212-4 du code pénal ;

« 2° Crimes de guerre définis aux articles 461-1 à 461-31 du même code ;

« 3° Infractions graves aux conventions de Genève du 12 août 1949 et au protocole additionnel I du 8 juin 1977. »

Amendement CL70 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Avant l’article 1er

Insérer l’article suivant :

« Dans le premier alinéa de l’article 211-1 du code pénal, les mots : « en exécution d’un plan concerté tendant à » sont remplacés par les mots : « en vue de ». »

Amendement CL71 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« Si la provocation n’a pas été suivie d’effet, les faits sont punis de trente ans de réclusion criminelle. »

Amendement CL72 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 2

Substituer aux alinéas 2 à 13 les alinéas suivants :

« Constitue également un crime contre l’humanité et est puni de la réclusion criminelle à perpétuité l’un quelconque des actes ci-après, commis à l’encontre d’un groupe de population civile dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique :

« 1° Le meurtre ;

« 2° L’extermination ;

« 3° La réduction en esclavage ;

« 4° La déportation ou le transfert forcé de population ;

« 5° L’emprisonnement ou toute autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;

« 6° La torture ;

« 7° Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

« 8° La persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international ;

« 9° Les disparitions forcées de personnes ;

« 10° Le crime d’apartheid ;

« 11° Tout autre acte inhumain de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou psychique. »

Amendement CL73 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 2

À l’alinéa 2, supprimer les mots : « en exécution d’un plan concerté ».

Amendement CL74 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 2

À l’alinéa 9, après le mot : « viol, », insérer les mots : « l’esclavage sexuel, ».

Amendement CL75 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 2

Rédiger comme suit le douzième alinéa (10°) de cet article :

« 10° Le crime d’apartheid, les actes de ségrégation et tout acte inhumain analogue commis dans le cadre d’un régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un groupe racial sur tout autre groupe racial ou tous autres groupes raciaux et dans l’intention de maintenir ce régime ; ».

Amendement CL76 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 2

Dans le dernier alinéa de cet article (11°), substituer aux mots : « Les autres actes inhumains » les mots : « Tout autre acte inhumain ».

Amendement CL77 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Après l’article 2

Insérer l’article suivant :

« L’article 213-4 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Aux fins du présent article, l’ordre de commettre un génocide ou un crime contre l’humanité est manifestement illégal. »

Amendement CL78 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 3

Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :

« Art. 213-4-2. – La qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent titre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine. »

Amendement CL79 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

Après l’alinéa 8, insérer l’alinéa suivant :

« La notion de conflit armé non international s’applique aux conflits armés qui opposent de manière prolongée sur le territoire d’un État les autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés organisés ou des groupes armés organisés entre eux. Cette notion ne s’applique pas aux situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de nature similaire. »

Amendement CL80 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

À l’alinéa 16, substituer au mot : « gravement » le mot : « sérieusement ».

Amendement CL81 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

À l’alinéa 17, remplacer les mots : « Le fait de forcer une personne protégée par le droit international des conflits armés à se prostituer », par les mots : « Le fait de violer une personne protégée par le droit international des conflits armés, de la forcer à se prostituer, de la soumettre à des actes d’esclavage sexuel ».

Amendement CL82 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

À l’alinéa 17, après les mots : « non désirée », insérer les mots : « de la réduire à l’état d’esclavage sexuel, ».

Amendement CL83 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

À l’alinéa 42, après les mots : « pas alors utilisés à des fins militaires », insérer les mots : « ou le fait d’attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires, ».

Amendement CL84 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

À l’alinéa 47, substituer au mot : « protégée », les mots : « ou d’un bien protégés ».

Amendement CL85 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 71 :

« 4° D’employer des armes, des projectiles, des matières et des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation du droit international des conflits armés, à condition que ces armes, projectiles, matières et méthodes de guerre fassent l’objet d’une interdiction générale prévue par le statut de la Cour pénale internationale. »

Amendement CL86 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

Après les mots : « la personne, », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 110 : « qui a agi raisonnablement pour se défendre, pour défendre autrui ou pour défendre des biens essentiels à sa survie, à celle d’autrui ou à l’accomplissement d’une mission militaire, contre un recours imminent et illicite à la force, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l’infraction. Le fait qu’une personne ait participé à une opération défensive menée par des forces armées ne constitue pas en soi un motif d’exonération de la responsabilité pénale au titre du présent article. »

Amendement CL87 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

Après le mot : « force, » rédiger ainsi la fin de l’alinéa 110 : « d’une manière proportionnée à l’ampleur du danger qu’elle courait ou que courait l’autre personne ou les biens protégés. »

Amendement CL88 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

Rédiger ainsi l’alinéa 111 :

« Art. 462-10. – L’action publique à l’égard des crimes de guerre définis au présent livre ainsi que les peines prononcées sont imprescriptibles. »

Amendement CL89 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7

Après l’alinéa 113, insérer l’alinéa suivant :

« Art. 462-12. – La qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent livre, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine. »

Amendement CL90 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7 bis

Substituer aux alinéas 2 et 3 les quatre alinéas suivants :

« Art. 689-11. – Pour l’application du statut de la Cour pénale internationale, signé à Rome le 17 juillet 1998, peut être poursuivie et jugée dans les conditions prévues à l’article 689-1 toute personne coupable de l’une des infractions suivantes :

« 1° Crimes contre l’humanité et crimes de génocide définis aux articles 211-1, 211-2, 212-1 à 212-4 du code pénal ;

« 2° Crimes de guerre définis aux articles 461-1 à 461-31 du même code ;

« 3° Infractions graves aux conventions de Genève du 12 août 1949 et au protocole additionnel I du 8 juin 1977. »

Amendement CL91 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7 bis

À l’alinéa 2, substituer aux mots : « réside habituellement », les mots : « se trouve ».

Amendement CL92 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7 bis

Après la date : « 18 juillet 1998 », supprimer la fin de l’alinéa 2.

Amendement CL93 présenté par M. Jean-Jacques Urvoas :

Article 7 bis

Rédiger comme suit le troisième alinéa de cet article :

« La poursuite de ces crimes peut s’exercer si aucune juridiction internationale ou nationale ne demande la remise ou l’extradition de la personne, et si aucune procédure concernant ces crimes n’est en cours devant la Cour pénale internationale. »

PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR

Ministère des Affaires étrangères

—  Mme Edwige BELLIARD, directrice des Affaires juridiques, accompagnée de M. Jean-Luc FLORENT, directeur adjoint

Ministère de la Défense

—  Mme Monique LIEBERT-CHAMPAGNE, directrice des Affaires juridiques, accompagnée de MM. Fabrice LEGGERI, sous-directeur du droit international et européen, Patrick MAIRE, chef de la division des affaires pénales militaires et Fabien GOUTTEFARDE, chargé d’études

—  M. Jean BERKANI, conseiller pour les affaires juridiques au cabinet du ministre de la Défense

Magistrats

—  M. Bruno COTTE, Président de la Deuxième Chambre de jugement de la Cour pénale internationale

—  M. Christophe REGNARD, président de l’Union syndicale des magistrats et M. Laurent BEDOUET, secrétaire général

—  Mme Odette LUCE-BOUVIER, représentant du Syndicat de la Magistrature auprès de la Coalition française pour la Cour pénale internationale et M. Mathieu BONDUELLE, secrétaire général du Syndicat de la magistrature

—  M. Emmanuel POINAS, Vice-président de la Cour d’Appel d’Aix en Provence, membre du Bureau National de FO Magistrats

Avocats

—  Maître Paul-Albert IWENS, ancien président du Conseil national des Barreaux, ancien président du Barreau pénal international

—  Maître Vincent ASSELINEAU, ancien membre du Conseil de l’Ordre et du Conseil national des Barreaux, vice-président du Barreau pénal international

—  Maître Laurent PETTITI, ancien membre du Conseil national des Barreaux, Commissaire à l’aide judiciaire à la Cour pénale internationale

Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH)

—  M. Yves REPIQUET, président

—  M. Jean-Pierre CABOUAT, président de la commission « Droits et actions humanitaires »

—  M. Antoine BERNARD, directeur exécutif de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)

—  Mme Noémie BIENVENU, chargée de mission

Coalition française pour la Cour pénale internationale

—  M. Jean-Philippe DEDIEU, coordinateur de la Coalition française pour la Cour pénale internationale

—  Mme Clémence BECTARTE, coordinatrice du groupe d’action judiciaire de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)

—  Mme Christine LAROQUE, représentant la Fédération internationale de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT)

Comité international de la Croix-Rouge

—  Mme Ghislaine DOUCET, conseiller juridique de la délégation du CICR en France

ANNEXE : EXTRAITS DU STATUT DE ROME DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE

Préambule

Les États Parties au présent Statut,

Conscients que tous les peuples sont unis par des liens étroits et que leurs cultures forment un patrimoine commun, et soucieux du fait que cette mosaïque délicate puisse être brisée à tout moment,

Ayant à l’esprit qu’au cours de ce siècle, des millions d’enfants, de femmes et d’hommes ont été victimes d’atrocités qui défient l’imagination et heurtent profondément la conscience humaine,

Reconnaissant que des crimes d’une telle gravité menacent la paix, la sécurité et le bien-être du monde,

Affirmant que les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ne sauraient rester impunis et que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale,

Déterminés à mettre un terme à l’impunité des auteurs de ces crimes et à concourir ainsi à la prévention de nouveaux crimes,

Rappelant qu’il est du devoir de chaque État de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables de crimes internationaux,

Réaffirmant les buts et principes de la Charte des Nations unies et, en particulier, que tous les États doivent s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations unies,

Soulignant à cet égard que rien dans le présent Statut ne peut être interprété comme autorisant un État Partie à intervenir dans un conflit armé ou dans les affaires intérieures d’un autre État,

Déterminés, à ces fins et dans l’intérêt des générations présentes et futures, à créer une cour pénale internationale permanente et indépendante reliée au système des Nations unies, ayant compétence à l’égard des crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale,

Soulignant que la cour pénale internationale dont le présent Statut porte création est complémentaire des juridictions pénales nationales,

Résolus à garantir durablement le respect de la justice internationale et sa mise en œuvre,

Sont convenus de ce qui suit :

CHAPITRE PREMIER : INSTITUTION DE LA COUR

Article premier : La Cour

Il est créé une Cour pénale internationale (« la Cour ») en tant qu’institution permanente, qui peut exercer sa compétence à l’égard des personnes pour les crimes les plus graves ayant une portée internationale, au sens du présent Statut. Elle est complémentaire des juridictions pénales nationales. Sa compétence et son fonctionnement sont régis par les dispositions du présent Statut.

(…)

CHAPITRE II : COMPÉTENCE, RECEVABILITÉ ET DROIT APPLICABLE

Article 5 : Crimes relevant de la compétence de la Cour

1. La compétence de la Cour est limitée aux crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. En vertu du présent Statut, la Cour a compétence à l’égard des crimes suivants :

a) Le crime de génocide ;

b) Les crimes contre l’humanité ;

c) Les crimes de guerre ;

d) Le crime d’agression.

2. La Cour exercera sa compétence à l’égard du crime d’agression quand une disposition aura été adoptée conformément aux articles 121 et 123, qui définira ce crime et fixera les conditions de l’exercice de la compétence de la Cour à son égard. Cette disposition devra être compatible avec les dispositions pertinentes de la Charte des Nations unies.

Article 6 : Crime de génocide

Aux fins du présent Statut, on entend par crime de génocide l’un quelconque des actes ci-après commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :

a) Meurtre de membres du groupe ;

b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe ;

c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;

d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ;

e) Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.

Article 7 : Crimes contre l’humanité

1. Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l’humanité l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque :

a) Meurtre ;

b) Extermination ;

c) Réduction en esclavage ;

d) Déportation ou transfert forcé de population ;

e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ;

f) Torture ;

g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;

h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ;

i) Disparitions forcées de personnes ;

j) Crime d’apartheid ;

k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

2. Aux fins du paragraphe 1 :

a) Par « attaque lancée contre une population civile », on entend le comportement qui consiste en la commission multiple d’actes visés au paragraphe 1 à l’encontre d’une population civile quelconque, en application ou dans la poursuite de la politique d’un État ou d’une organisation ayant pour but une telle attaque ;

b) Par « extermination », on entend notamment le fait d’imposer intentionnellement des conditions de vie, telles que la privation d’accès à la nourriture et aux médicaments, calculées pour entraîner la destruction d’une partie de la population ;

c) Par « réduction en esclavage », on entend le fait d’exercer sur une personne l’un quelconque ou l’ensemble des pouvoirs liés au droit de propriété, y compris dans le cadre de la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants ;

d) Par « déportation ou transfert forcé de population », on entend le fait de déplacer de force des personnes, en les expulsant ou par d’autres moyens coercitifs, de la région où elles se trouvent légalement, sans motifs admis en droit international ;

e) Par « torture », on entend le fait d’infliger intentionnellement une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, à une personne se trouvant sous sa garde ou sous son contrôle ; l’acception de ce terme ne s’étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légales, inhérentes à ces sanctions ou occasionnées par elles ;

f) Par « grossesse forcée », on entend la détention illégale d’une femme mise enceinte de force, dans l’intention de modifier la composition ethnique d’une population ou de commettre d’autres violations graves du droit international. Cette définition ne peut en aucune manière s’interpréter comme ayant une incidence sur les lois nationales relatives à la grossesse ;

g) Par « persécution », on entend le déni intentionnel et grave de droits fondamentaux en violation du droit international, pour des motifs liés à l’identité du groupe ou de la collectivité qui en fait l’objet ;

h) Par « crime d’apartheid », on entend des actes inhumains analogues à ceux que vise le paragraphe 1, commis dans le cadre d’un régime institutionnalisé d’oppression systématique et de domination d’un groupe racial sur tout autre groupe racial ou tous autres groupes raciaux et dans l’intention de maintenir ce régime ;

i) Par « disparitions forcées de personnes », on entend les cas où des personnes sont arrêtées, détenues ou enlevées par un État ou une organisation politique ou avec l’autorisation, l’appui ou l’assentiment de cet État ou de cette organisation, qui refuse ensuite d’admettre que ces personnes sont privées de liberté ou de révéler le sort qui leur est réservé ou l’endroit où elles se trouvent, dans l’intention de les soustraire à la protection de la loi pendant une période prolongée.

3. Aux fins du présent Statut, le terme « sexe » s’entend de l’un et l’autre sexes, masculin et féminin, suivant le contexte de la société. Il n’implique aucun autre sens.

Article 8 : Crimes de guerre

1. La Cour a compétence à l’égard des crimes de guerre, en particulier lorsque ces crimes s’inscrivent dans le cadre d’un plan ou d’une politique ou lorsqu’ils font partie d’une série de crimes analogues commis sur une grande échelle.

2. Aux fins du Statut, on entend par « crimes de guerre » :

a) Les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’ils visent des personnes ou des biens protégés par les dispositions des Conventions de Genève :

i) L’homicide intentionnel ;

ii) La torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences biologiques ;

iii) Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter gravement atteinte à l’intégrité physique ou à la santé ;

iv) La destruction et l’appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire ;

v) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou une personne protégée à servir dans les forces d’une puissance ennemie ;

vi) Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de guerre ou toute autre personne protégée de son droit d’être jugé régulièrement et impartialement ;

vii) La déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale ;

viii) La prise d’otages ;

b) Les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux dans le cadre établi du droit international, à savoir, l’un quelconque des actes ci-après :

i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des civils qui ne participent pas directement part aux hostilités ;

ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des biens de caractère civil, c’est-à-dire des biens qui ne sont pas des objectifs militaires ;

iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les véhicules employés dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations unies, pour autant qu’ils aient droit à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil ;

iv) Le fait de diriger intentionnellement une attaque en sachant qu’elle causera incidemment des pertes en vies humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des dommages aux biens de caractère civil ou des dommages étendus, durables et graves à l’environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l’ensemble de l’avantage militaire concret et direct attendu ;

v) Le fait d’attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages, habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires ;

vi) Le fait de tuer ou de blesser un combattant qui, ayant déposé les armes ou n’ayant plus de moyens de se défendre, s’est rendu à discrétion ;

vii) Le fait d’utiliser indûment le pavillon parlementaire, le drapeau ou les insignes militaires et l’uniforme de l’ennemi ou de l’Organisation des Nations unies, ainsi que les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève, et, ce faisant, de causer la perte de vies humaines ou des blessures graves ;

viii) Le transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d’une partie de sa population civile, dans le territoire qu’elle occupe, ou la déportation ou le transfert à l’intérieur ou hors du territoire occupé de la totalité ou d’une partie de la population de ce territoire ;

ix) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades ou des blessés sont rassemblés, à condition qu’ils ne soient pas des objectifs militaires ;

x) Le fait de soumettre des personnes d’une partie adverse tombées en son pouvoir à des mutilations ou à des expériences médicales ou scientifiques quelles qu’elles soient qui ne sont ni motivées par un traitement médical, dentaire ou hospitalier, ni effectuées dans l’intérêt de ces personnes, et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en danger leur santé ;

xi) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise des individus appartenant à la nation ou à l’armée ennemie ;

xii) Le fait de déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier ;

xiii) Le fait de détruire ou de saisir les biens de l’ennemi, sauf dans les cas où ces destructions ou saisies seraient impérieusement commandées par les nécessités de la guerre ;

xiv) Le fait de déclarer éteints, suspendus ou non recevables en justice les droits et actions des nationaux de la partie adverse ;

xv) Le fait pour un belligérant de contraindre les nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays, même s’ils étaient au service de ce belligérant avant le commencement de la guerre ;

xvi) Le pillage d’une ville ou d’une localité, même prise d’assaut ;

xvii) Le fait d’employer du poison ou des armes empoisonnées ;

xviii) Le fait d’employer des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues ;

xix) Le fait d’utiliser des balles qui s’épanouissent ou s’aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont l’enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est percée d’entailles ;

xx) Le fait d’employer les armes, projectiles, matières et méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en violation du droit international des conflits armés, à condition que ces armes, projectiles, matières et méthodes de guerre fassent l’objet d’une interdiction générale et qu’ils soient inscrits dans une annexe au présent Statut, par voie d’amendement adopté selon les dispositions des articles 121 et 123 ;

xxi) Les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants ;

xxii) Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, telle que définie à l’article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle constituant une infraction grave aux Conventions de Genève ;

xxiii) Le fait d’utiliser la présence d’un civil ou d’une autre personne protégée pour éviter que certains points, zones ou forces militaires ne soient la cible d’opérations militaires ;

xxiv) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre les bâtiments, le matériel, les unités et les moyens de transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au droit international, les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève ;

xxv) Le fait d’affamer délibérément des civils comme méthode de guerre, en les privant de biens indispensables à leur survie, y compris en empêchant intentionnellement l’envoi des secours prévus par les Conventions de Genève ;

xxvi) Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités ;

c) En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international, les violations graves de l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l’un quelconque des actes ci-après commis à l’encontre de personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention ou par toute autre cause :

i) Les atteintes à la vie et à l’intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels et la torture ;

ii) Les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants ;

iii) Les prises d’otages ;

iv) Les condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un jugement préalable, rendu par un tribunal régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires généralement reconnues comme indispensables ;

d) L’alinéa c) du paragraphe 2 s’applique aux conflits armés ne présentant pas un caractère international et ne s’applique donc pas aux situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de nature similaire ;

e) Les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés ne présentant pas un caractère international, dans le cadre établi du droit international, à savoir l’un quelconque des actes ci-après :

i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle ou contre des personnes civiles qui ne participent pas directement aux hostilités ;

ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre les bâtiments, le matériel, les unités et les moyens de transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au droit international, les signes distinctifs des Conventions de Genève ;

iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre le personnel, les installations, le matériel, les unités ou les véhicules employés dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations unies, pour autant qu’ils aient droit à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de caractère civil ;

iv) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades et des blessés sont rassemblés, pour autant que ces bâtiments ne soient pas des objectifs militaires ;

v) Le pillage d’une ville ou d’une localité, même prise d’assaut ;

vi) Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, telle que définie à l’article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation forcée, ou toute autre forme de violence sexuelle constituant une violation grave de l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève ;

vii) Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les forces armées ou dans des groupes armés ou de les faire participer activement à des hostilités ;

viii) Le fait d’ordonner le déplacement de la population civile pour des raisons ayant trait au conflit, sauf dans les cas où la sécurité des civils ou des impératifs militaires l’exigent ;

ix) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise un adversaire combattant ;

x) Le fait de déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier ;

xi) Le fait de soumettre des personnes d’une autre partie au conflit tombées en son pouvoir à des mutilations ou à des expériences médicales ou scientifiques quelles qu’elles soient qui ne sont ni motivées par un traitement médical, dentaire ou hospitalier, ni effectuées dans l’intérêt de ces personnes, et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en danger leur santé ;

xii) Le fait de détruire ou de saisir les biens d’un adversaire, sauf si ces destructions ou saisies sont impérieusement commandées par les nécessités du conflit ;

f) L’alinéa e) du paragraphe 2 s’applique aux conflits armés ne présentant pas un caractère international et ne s’applique donc pas aux situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de nature similaire. Il s’applique aux conflits armés qui opposent de manière prolongée sur le territoire d’un État les autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés organisés ou des groupes armés organisés entre eux.

3. Rien dans le paragraphe 2, alinéas c) et e), n’affecte la responsabilité d’un gouvernement de maintenir ou rétablir l’ordre public dans l’État ou de défendre l’unité et l’intégrité territoriale de l’État par tous les moyens légitimes.

(…)

Article 17 : Questions relatives à la recevabilité

1. Eu égard au dixième alinéa du préambule et à l’article premier, une affaire est jugée irrecevable par la Cour lorsque :

a) L’affaire fait l’objet d’une enquête ou de poursuites de la part d’un État ayant compétence en l’espèce, à moins que cet État n’ait pas la volonté ou soit dans l’incapacité de mener véritablement à bien l’enquête ou les poursuites ;

b) L’affaire a fait l’objet d’une enquête de la part d’un État ayant compétence en l’espèce et que cet État a décidé de ne pas poursuivre la personne concernée, à moins que cette décision ne soit l’effet du manque de volonté ou de l’incapacité de l’État de mener véritablement à bien des poursuites ;

c) La personne concernée a déjà été jugée pour le comportement faisant l’objet de la plainte, et qu’elle ne peut être jugée par la Cour en vertu de l’article 20, paragraphe 3 ;

d) L’affaire n’est pas suffisamment grave pour que la Cour y donne suite.

2. Pour déterminer s’il y a manque de volonté de l’État dans un cas d’espèce, la Cour considère l’existence, eu égard aux garanties d’un procès équitable reconnues par le droit international, de l’une ou de plusieurs des circonstances suivantes :

a) La procédure a été ou est engagée ou la décision de l’État a été prise dans le dessein de soustraire la personne concernée à sa responsabilité pénale pour les crimes relevant de la compétence de la Cour visés à l’article 5 ;

b) La procédure a subi un retard injustifié qui, dans les circonstances, est incompatible avec l’intention de traduire en justice la personne concernée ;

c) La procédure n’a pas été ou n’est pas menée de manière indépendante ou impartiale mais d’une manière qui, dans les circonstances, est incompatible avec l’intention de traduire en justice la personne concernée.

3. Pour déterminer s’il y a incapacité de l’État dans un cas d’espèce, la Cour considère si l’État est incapable, en raison de l’effondrement de la totalité ou d’une partie substantielle de son propre appareil judiciaire ou de l’indisponibilité de celui-ci, de se saisir de l’accusé, de réunir les éléments de preuve et les témoignages nécessaires ou de mener autrement à bien la procédure.

Article 18 : Décision préliminaire sur la recevabilité

1. Lorsqu’une situation a été déférée à la Cour comme le prévoit l’article 13, alinéa a), et que le Procureur a déterminé qu’il y aurait une base raisonnable pour ouvrir une enquête, ou lorsque le Procureur a ouvert une enquête au titre des articles 13, paragraphe c), et 15, le Procureur le notifie à tous les États Parties et aux États qui, selon les renseignements disponibles, auraient normalement compétence à l’égard des crimes dont il s’agit. Il peut le faire à titre confidentiel et, quand il juge que cela est nécessaire pour protéger des personnes, prévenir la destruction d’éléments de preuve ou empêcher la fuite de personnes, il peut restreindre l’étendue des renseignements qu’il communique aux États.

2. Dans le mois qui suit la réception de cette notification, un État peut informer la Cour qu’il ouvre ou a ouvert une enquête sur ses ressortissants ou d’autres personnes sous sa juridiction pour des actes criminels qui pourraient être constitutifs des crimes visés à l’article 5 et qui ont un rapport avec les renseignements notifiés aux États. Si l’État le lui demande, le Procureur lui défère le soin de l’enquête sur ces personnes, à moins que la Chambre préliminaire ne l’autorise, sur sa demande, à faire enquête lui-même.

3. Ce sursis à enquêter peut être réexaminé par le Procureur six mois après avoir été décidé, ou à tout moment où il se sera produit un changement notable de circonstances découlant du manque de volonté ou de l’incapacité de l’État de mener véritablement à bien l’enquête modifie sensiblement les circonstances.

4. L’État intéressé ou le Procureur peut relever appel devant la Chambre d’appel de la décision de la Chambre préliminaire, comme le prévoit l’article 82. Cet appel peut être examiné selon une procédure accélérée.

5. Lorsqu’il sursoit à enquêter comme prévu au paragraphe 2, le Procureur peut demander à l’État concerné de lui rendre régulièrement compte des progrès de son enquête et, le cas échéant, des poursuites engagées par la suite. Les États Parties répondent à ces demandes sans retard injustifié.

6. En attendant la décision de la Chambre préliminaire, ou à tout moment après avoir décidé de surseoir à son enquête comme le prévoit le présent article, le Procureur peut, à titre exceptionnel, demander à la Chambre préliminaire l’autorisation de prendre les mesures d’enquête nécessaires pour préserver des éléments de preuve dans le cas où l’occasion de recueillir des éléments de preuve importants ne se représentera pas ou s’il y a un risque appréciable que ces éléments de preuve ne soient plus disponibles par la suite.

7. L’État qui a contesté une décision de la Chambre préliminaire en vertu du présent article peut contester la recevabilité d’une affaire au regard de l’article 19 en invoquant des faits nouveaux ou un changement de circonstances notables.

(…)

CHAPITRE III : PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT PÉNAL

(…)

Article 25 : Responsabilité pénale individuelle

1. La Cour est compétente à l’égard des personnes physiques en vertu du présent Statut.

2. Quiconque commet un crime relevant de la compétence de la Cour est individuellement responsable et peut être puni conformément au présent Statut.

3. Aux termes du présent Statut, une personne est pénalement responsable et peut être punie pour un crime relevant de la compétence de la Cour si :

a) Elle commet un tel crime, que ce soit individuellement, conjointement avec une autre personne ou par l’intermédiaire d’une autre personne, que cette autre personne soit ou non pénalement responsable ;

b) Elle ordonne, sollicite ou encourage la commission d’un tel crime, dès lors qu’il y a commission ou tentative de commission de ce crime ;

c) En vue de faciliter la commission d’un tel crime, elle apporte son aide, son concours ou toute autre forme d’assistance à la commission ou à la tentative de commission de ce crime, y compris en fournissant les moyens de cette commission ;

d) Elle contribue de toute autre manière à la commission ou à la tentative de commission d’un tel crime par un groupe de personnes agissant de concert. Cette contribution doit être intentionnelle et, selon le cas :

i) Viser à faciliter l’activité criminelle ou le dessein criminel du groupe, si cette activité ou ce dessein comporte l’exécution d’un crime relevant de la compétence de la Cour ; ou

ii) Être faite en pleine connaissance de l’intention du groupe de commettre ce crime ;

e) S’agissant du crime de génocide, elle incite directement et publiquement autrui à le commettre ;

f) Elle tente de commettre un tel crime par des actes qui, par leur caractère substantiel, constituent un commencement d’exécution mais sans que le crime soit accompli en raison de circonstances indépendantes de sa volonté. Toutefois, la personne qui abandonne l’effort tendant à commettre le crime ou en empêche de quelque autre façon l’achèvement ne peut être punie en vertu du présent Statut pour sa tentative si elle a complètement et volontairement renoncé au dessein criminel.

4. Aucune disposition du présent Statut relative à la responsabilité pénale des individus n’affecte la responsabilité des États en droit international.

(…)

Article 27 : Défaut de pertinence de la qualité officielle

1. Le présent Statut s’applique à tous de manière égale, sans aucune distinction fondée sur la qualité officielle. En particulier, la qualité officielle de chef d’État ou de gouvernement, de membre d’un gouvernement ou d’un parlement, de représentant élu ou d’agent d’un État, n’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent Statut, pas plus qu’elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine.

2. Les immunités ou règles de procédure spéciales qui peuvent s’attacher à la qualité officielle d’une personne, en vertu du droit interne ou du droit international, n’empêchent pas la Cour d’exercer sa compétence à l’égard de cette personne.

Article 28 : Responsabilité des chefs militaires et autres supérieurs hiérarchiques

Outre les autres motifs de responsabilité pénale au regard du présent Statut pour des crimes relevant de la compétence de la Cour :

a) Un chef militaire ou une personne faisant effectivement fonction de chef militaire est pénalement responsable des crimes relevant de la compétence de la Cour commis par des forces placées sous son commandement et son contrôle effectifs, ou sous son autorité et son contrôle effectifs, selon le cas, lorsqu’il ou elle n’a pas exercé le contrôle qui convenait sur ces forces dans les cas où :

i) Ce chef militaire ou cette personne savait, ou, en raison des circonstances, aurait dû savoir, que ces forces commettaient ou allaient commettre ces crimes ; et

ii) Ce chef militaire ou cette personne n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites ;

b) En ce qui concerne les relations entre supérieur hiérarchique et subordonnés non décrites au paragraphe a), le supérieur hiérarchique est pénalement responsable des crimes relevant de la compétence de la Cour commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs, lorsqu’il ou elle n’a pas exercé le contrôle qui convenait sur ces subordonnés dans les cas où :

i) Le supérieur hiérarchique savait que ces subordonnés commettaient ou allaient commettre ces crimes ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement ;

ii) Ces crimes étaient liés à des activités relevant de sa responsabilité et de son contrôle effectifs ; et

iii) Le supérieur hiérarchique n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites.

Article 29 : Imprescriptibilité

Les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas.

(…)

Article 31 : Motifs d’exonération de la responsabilité pénale

1. Outre les autres motifs d’exonération de la responsabilité pénale prévus par le présent Statut, une personne n’est pas responsable pénalement si, au moment du comportement en cause :

a) Elle souffrait d’une maladie ou d’une déficience mentale qui la privait de la faculté de comprendre le caractère délictueux ou la nature de son comportement, ou de maîtriser celui-ci pour le conformer aux exigences de la loi ;

b) Elle était dans un état d’intoxication qui la privait de la faculté de comprendre le caractère délictueux ou la nature de son comportement, ou de maîtriser celui-ci pour le conformer aux exigences de la loi, à moins qu’elle ne se soit volontairement intoxiquée dans des circonstances telles qu’elle savait que, du fait de son intoxication, elle risquait d’adopter un comportement constituant un crime relevant de la compétence de la Cour, ou qu’elle n’ait tenu aucun compte de ce risque ;

c) Elle a agi raisonnablement pour se défendre, pour défendre autrui ou, dans le cas des crimes de guerre, pour défendre des biens essentiels à sa survie ou à celle d’autrui ou essentiels à l’accomplissement d’une mission militaire, contre un recours imminent et illicite à la force, d’une manière proportionnée à l’ampleur du danger qu’elle courait ou que couraient l’autre personne ou les biens protégés. Le fait qu’une personne ait participé à une opération défensive menée par des forces armées ne constitue pas en soi un motif d’exonération de la responsabilité pénale au titre du présent alinéa ;

d) Le comportement dont il est allégué qu’il constitue un crime relevant de la compétence de la Cour a été adopté sous la contrainte résultant d’une menace de mort imminente ou d’une atteinte grave, continue ou imminente à sa propre intégrité physique ou à celle d’autrui, et si elle a agi par nécessité et de façon raisonnable pour écarter cette menace, à condition qu’elle n’ait pas eu l’intention de causer un dommage plus grand que celui qu’elle cherchait à éviter. Cette menace peut être :

i) Soit exercée par d’autres personnes ;

ii) Soit constituée par d’autres circonstances indépendantes de sa volonté.

2. La Cour se prononce sur la question de savoir si les motifs d’exonération de la responsabilité pénale prévus dans le présent Statut sont applicables au cas dont elle est saisie.

3. Lors du procès, la Cour peut prendre en considération un motif d’exonération autre que ceux qui sont prévus au paragraphe 1, si ce motif découle du droit applicable indiqué à l’article 21. La procédure d’examen de ce motif d’exonération est fixée dans le Règlement de procédure et de preuve.

(…)

Article 33 : Ordre hiérarchique et ordre de la loi

1. Le fait qu’un crime relevant de la compétence de la Cour a été commis sur ordre d’un gouvernement ou d’un supérieur, militaire ou civil, n’exonère pas la personne qui l’a commis de sa responsabilité pénale, à moins que :

a) Cette personne n’ait eu l’obligation légale d’obéir aux ordres du gouvernement ou du supérieur en question ;

b) Cette personne n’ait pas su que l’ordre était illégal ; et

c) L’ordre n’ait pas été manifestement illégal.

2. Aux fins du présent article, l’ordre de commettre un génocide ou un crime contre l’humanité est manifestement illégal.

(…)

CHAPITRE VI : LE PROCÈS

(…)

Article 70 : Atteintes à l’administration de la justice

1. La Cour a compétence pour connaître des atteintes suivantes à son administration de la justice lorsqu’elles sont commises intentionnellement :

a) Faux témoignage d’une personne qui a pris l’engagement de dire la vérité en application de l’article 69, paragraphe 1 ;

b) Production d’éléments de preuve faux ou falsifiés en connaissance de cause ;

c) Subornation de témoin, manœuvres visant à empêcher un témoin de comparaître ou de déposer librement, représailles exercées contre un témoin en raison de sa déposition, destruction ou falsification d’éléments de preuve, ou entrave au rassemblement de tels éléments ;

d) Intimidation d’un membre ou agent de la Cour, entrave à son action ou trafic d’influence afin de l’amener, par la contrainte ou la persuasion, à ne pas exercer ses fonctions ou à ne pas les exercer comme il convient ;

e) Représailles contre un membre ou un agent de la Cour en raison des fonctions exercées par celui-ci ou par un autre membre ou agent ;

f) Sollicitation ou acceptation d’une rétribution illégale par un membre ou un agent de la Cour dans le cadre de ses fonctions officielles.

2. Les principes et les procédures régissant l’exercice par la Cour de sa compétence à l’égard des atteintes à l’administration de la justice en vertu du présent article sont énoncés dans le Règlement de procédure et de preuve. Les modalités de la coopération internationale avec la Cour dans la mise en œuvre des dispositions du présent article sont régies par la législation nationale de l’État requis.

3. En cas de condamnation, la Cour peut imposer une peine d’emprisonnement ne pouvant excéder cinq années, ou une amende prévue dans le Règlement de procédure et de preuve, ou les deux.

4. a) Les États Parties étendent les dispositions de leur droit pénal qui répriment les atteintes à l’intégrité de leurs procédures d’enquête ou de leur système judiciaire aux atteintes à l’administration de la justice en vertu du présent article commises sur leur territoire, ou par l’un de leurs ressortissants ;

b) À la demande de la Cour, un État Partie saisit ses autorités compétentes aux fins de poursuites chaque fois qu’il le juge approprié. Ces autorités traitent les dossiers dont il s’agit avec diligence, en y consacrant les moyens nécessaires à une action efficace.

© Assemblée nationale

1 () Convention adoptée le 17 juillet 1998 par 120 États de la Conférence diplomatique des plénipotentiaires des Nations unies.

2 () Résolutions des Nations unies du 22 mai 1993 et du 8 novembre 1994

3 () Ce chapitre confère au Conseil de sécurité des pouvoirs « en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte d’agression » : il peut alors décider « quelles mesures seront prises (...) pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales ».

4 () Dans sa décision n° 98-408 DC du 22 janvier 1999, le Conseil constitutionnel avait jugé que l’autorisation de ratifier le traité portant statut de la Cour pénale internationale exigeait une révision de la Constitution pour un certain nombre de motifs, parmi lesquels figurent les immunités dont bénéficient en droit interne les parlementaires et le Président de la République, la compétence de la Cour de Justice de la République pour juger des crimes et délits commis par des membres du Gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions, la question de la compétence de la Cour pour des faits amnistiés ou prescrits en France et le fait que le procureur puisse procéder à certains actes d’enquête sur le territoire national, hors la présence des autorités judiciaires françaises compétentes.

5 () Cet article n’a pas été modifié par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008.

6 () A ce jour, 139 États ont signé le Traité et 110 l’ont ratifié, dont récemment le Japon et le Mexique. Avec une ratification prévue au 1er juin 2010, le Bangladesh deviendra le premier Etat partie d’Asie du Sud. La compétence de la Cour s’étend dès lors à environ un cinquième de la population mondiale. Nombre d’États importants, cependant, hostiles depuis l’origine à l’idée d’une juridiction internationale susceptible d’être utilisée à des fins politiques, ne sont pas parties au Statut de Rome, parmi lesquels les États-unis, la Russie, la Chine, Israël, l’Inde, le Pakistan et la plupart des États d’Asie et du Moyen-Orient.

7 () Dans un premier temps, la Cour n’exerce pas ses compétences en matière d’agression, qui n’est pas définie dans la Statut de Rome mais doit l’être au cours de la conférence de révision de Kampala. Les négociations en cours laissent apparaître toute la difficulté à définir des crimes dont la connotation politique est forte, comme l’a indiqué à votre rapporteur Mme Edwige Belliard, directrice des affaires juridiques du ministère des Affaires Étrangères.

8 () Pour la première fois avec cette affaire, la Cour a pu exercer sa compétence alors que les infractions jugées n’ont pas été commises sur le territoire d’un État partie ou par un ressortissant d’un tel État.

9 () Le budget de la CPI était de 90 millions d’euros en 2007 et 2008 et 101 millions d’euros en 2009. Pour 2010, il est évalué à 103 millions d’euros.

10 () Proposition de loi de M. Robert Badinter relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, n°163 (2001-2002).

11 () Il s’agit du projet de loi relatif à la répartition des contentieux et à l’allègement de certaines procédures juridictionnelles, déposé au Sénat le 3 mars 2010, n° 344 (2009-2010), dont l’article 16 est relatif au contentieux des crimes et délits relevant du champ de compétence de la CPI.

12 () Rapport sur la proposition de loi de M. Robert Badinter relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, n° 205 (2001-2002), 6 février 2002.

13 () Rapport sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, n° 3598, 13 février 2002.

14 () « Les États Parties étendent les dispositions de leur droit pénal qui répriment les atteintes à l’intégrité de leurs procédures d’enquête ou de leur système judiciaire aux atteintes à l’administration de la justice en vertu du présent article commises sur leur territoire ou par l’un de leurs ressortissants ».

15 () Voir aussi l’avis de la Commission nationale consultative des droits de l’homme adopté par l’assemblée plénière du 21 juin 2006.

16 () Loi n° 2008-704 du 17 juillet 2008.

17 () Voir pp. 23 et suivantes.

18 () Cet article stipule que l’expression « crime d’apartheid », qui « englobe les politiques et pratiques semblables de ségrégation et de discrimination raciales, telles qu’elles sont pratiquées en Afrique australe », « désigne (un certain nombre d’) actes inhumains, commis en vue d’instituer ou d’entretenir la domination d’un groupe racial d’êtres humains sur n’importe quel autre groupe racial d’êtres humains et d’opprimer systématiquement celui-ci »

19 () Il s’agit des crimes ou délits commis en temps de guerre.

20 () Cet article dispose : « Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation.

Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre. »

21 () L’article 462-7 du code pénal, introduit par l’article 7 du projet de loi, procède de même pour les crimes de guerre.

22 () Ces peines sont portées respectivement à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis par une personne qui, par ses fonctions, est appelée à concourir à la manifestation de la vérité.

23 () Le terme « gravement » traditionnellement employée par le code pénal ayant été substitué au mot « sérieusement » figurant dans le Statut de Rome.

24 () À laquelle la France est partie depuis le 5 février 2003.

25 () « L’interdiction des droits civiques, civils et de famille porte sur 1° le droit de vote, 2° l’éligibilité, 3° le droit d’exercer une fonction juridictionnelle ou d’être expert devant une juridiction, de représenter ou d’assister une partie devant la justice, 4° le droit de témoigner en justice autrement que pour y faire de simples déclarations, 5° le droit d’être tuteur ou curateur ; cette interdiction n’exclut pas le droit, après avis conforme du juge des tutelles, le conseil de famille entendu, d’être tuteur ou curateur de ses propres enfants.

L’interdiction des droits civiques, civils et de famille ne peut excéder une durée de dix ans en cas de condamnation pour crime et une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit.

La juridiction peut prononcer l’interdiction de tout ou partie de ces droits.

L’interdiction du droit de vote ou l’inéligibilité prononcées en application du présent article emportent interdiction ou incapacité d’exercer une fonction publique. »

26 () Le premier alinéa de cet article précise que « Lorsqu’elle est prévue par la loi, la peine d’interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime ou d’un délit. »

27 () La personne morale peut être condamnée à une ou plusieurs de ces peines pour une infraction donnée.

28 () Sauf le cas particulier des crimes mentionnés à l’article 706-47 du code de procédure pénale commis sur mineurs, pour lesquels la prescription est de 20 ans à compter de la majorité des victimes.

29 () Sauf le cas particulier des délits mentionnés à l’article 706-47 du code de procédure pénale commis sur mineurs, pour lesquels la prescription est de 10 ans à compter de la majorité des victimes.

30 () Pour ces crimes, l’action publique comme les peines sont imprescriptibles en vertu de l’article 213-5 du code pénal, introduit par la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité.

31 () Loi du 16 juin 1993 relative à la répression des violations graves de droit international humanitaire.

32 () Juridiction compétente à l’échelle nationale, notamment en matière de crimes relevant du champ de compétence de la CPI.

33 () Cass. 1ère ch civ., 14 décembre 2005.