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N
° 2997

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er décembre 2010

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION DE M. Alain BOCQUET ET PLUSIEURS DE SES COLLÈGUES, tendant à la création d’une commission d’enquête sur la situation de l’industrie ferroviaire française : production de matériels roulants « voyageurs » et fret (n° 2978).

PAR M. Daniel PAUL,

Député.

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Voir le numéro 2978.

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

I.— LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION 9

II.— UNE COMMISSION D’ENQUÊTE DONT L’AMBITION EST DE PÉRENNISER LA FILIÈRE INDUSTRIELLE FERROVIAIRE FRANCAISE 10

A.— UNE FILIÈRE RICHE D’ATOUTS EXCEPTIONNELS 10

1. Des commandes à foison 10

2. Des résultats financiers en progression constante 11

B.— UNE FILIÈRE FRAGILISÉE PAR DES CHOIX STRATÉGIQUES CONTESTABLES 12

1. Des conséquences sociales lourdes 12

2. L’exemple du Nord Pas-de-Calais 13

3. De l’enchère inversée au déréférencement : des pratiques intolérables 15

C.— LE FRET, UN ENJEU MAJEUR 17

1. Une situation critique 17

2. Pour la constitution d’un pôle industriel ferroviaire du fret 20

CONCLUSION 22

EXAMEN EN COMMISSION 23

TEXTE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION 27

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION 28

MESDAMES, MESSIEURS,

Au début de l’année, les Etats généraux de l’industrie ont confirmé l’urgence d’une véritable politique industrielle nationale et de la mobilisation du crédit bancaire au service de la recherche et de l’innovation, de la création d’activité et d’emploi, ou encore de la montée en puissance des PME-PMI, appelées à atteindre la taille critique d’ETI – entreprises de taille intermédiaire – selon le modèle allemand. Comme le soulignait le 1er mars dernier le Président de la Fédération des industries ferroviaires (FIF) dans une interview au quotidien économique la Tribune, l’Allemagne est en effet le « numéro un mondial du ferroviaire ».

Las, toutes ces orientations d’intérêt majeur font aujourd’hui défaut dans notre pays. Mises en redressement ou en liquidation judiciaires, fermetures de sites, délocalisations de la production, fuites ou pertes de savoir-faire cumulent leurs effets néfastes et l’emploi industriel est en chute libre.

Le 4 octobre dernier, le temps d’un bref passage dans le bassin valenciennois, le Ministre de l’industrie avait feint de s’en indigner : « Pendant trente ans, on a eu une pensée unique qui disait que l’avenir n’était pas dans l’industrie mais dans les services (…) La France a perdu 550 000 emplois industriels (…) ». La « pensée unique » était surtout la pensée dominante car, faut-il le rappeler, les députés communistes, hier comme aujourd’hui, ont toujours défendu l’exigence du maintien de l’emploi industriel et du « produire français », contre le discours libéral et les choix du Medef. Alors, depuis trente ans, que de temps et d’occasions perdus ! Que de gâchis économiques, financiers, sociaux et humains au seul nom de la course au profit. Et de tels gâchis se poursuivent aujourd’hui encore avec une crise bancaire et boursière née de la spéculation, puis étendue à l’ensemble de l’économie réelle pour toucher à présent la quasi-totalité des secteurs.

Dans une contre-enquête sur le sauvetage du « made in France », le Monde du 18 septembre 2010 « enfonce le clou » en rappelant que, désormais, les pays émergents « sophistiquent leurs productions (…) bénéficient d’une main-d’œuvre éduquée peu chère et des transferts de technologies que les Etats développés, la France entre autres, leur ont concédés pour obtenir des contrats à l’exportation ». On cherche en vain, dans les discours gouvernementaux actuels et dans les initiatives de la France aux plans européen et mondial, les signes d’une mise en cause de ces dérives au profit d’orientations favorables à l’emploi industriel.

L’industrie ferroviaire française n’échappe pas au mal profond qui sape l’économie nationale, entraîne l’explosion du chômage et de la précarité, frappe le monde du travail et fait obstacle à l’insertion des jeunes par l’emploi. Elle a pourtant vocation à s’affirmer en tant que pilier de la transition écologique et sociale de la France. C’est d’elle que dépendent le déploiement des transports publics sur rail et le transfert de la route au fer, qu’il s’agisse des personnes ou des marchandises. Moins chère et largement plus écologique, elle est l’industrie clé de la réalisation des objectifs de réduction des gaz à effet de serre.

Notre industrie ferroviaire est aujourd’hui confrontée à un paradoxe qui la déstructure et menace de détruire à jamais les conditions de son essor, de même que les chances d’engager la transition écologique des transports français, pourtant très attendue. Dominée par la recherche du profit, elle se heurte en effet au refus délibéré des principaux constructeurs et donneurs d’ordres implantés sur notre territoire de raisonner en termes de filière industrielle et d’agir en conséquence. L’attentisme de l’Etat et son suivisme vis-à-vis des politiques conduites par la SNCF en matière de fret ferroviaire accentuent les difficultés endurées par la France et par ses salariés. Le malaise est profond et si rien ne change, la situation va encore empirer et se traduire par un intolérable gâchis supplémentaire de compétences et de richesses.

Comment comprendre, autrement, les positions exprimées par les dirigeants des premiers constructeurs ferroviaires mondiaux que sont Alstom et Bombardier ? Dans une interview accordée en octobre 2009 à la revue « Ville, Rail et Transports », André Navarri, président de Bombardier Transport, ne fait pas mystère de la volonté du groupe de « passer la vitesse supérieure » et prend l’exemple du marché chinois : « Nous investissons pour être un acteur local. Dans le site de BIT (joint-venture de Bombardier pour la grande vitesse implantée à Qingdao), il y a des activités importantes d’ingénierie, et pas seulement de production. L’ingénierie du Zefiro (train à grande vitesse dont Bombardier vient de vendre 80 exemplaires à la Chine pour un montant de 2,7 milliards d’euros) est fournie pour moitié en Europe et pour moitié en Chine. Il en va de même pour les métros (…). Je n’exclus pas que des centres de décision importants soient transférés en Chine. Plus de la moitié des métros du monde, à venir, se feront en Asie. Faut-il garder tous nos outils de décision en Europe ? Je n’en suis pas convaincu ». Et d’ajouter : « les métros sont plus exportables que les trains de grande ligne. Ainsi, cela peut se faire depuis la Chine ou depuis l’Inde. Nous avons remporté la première commande d’exportation à partir de notre joint-venture CBRC (joint-venture chinoise de Bombardier pour les métros) pour le métro de Singapour. C’est un des clients les plus exigeants au monde. Ceci montre le niveau de technologie que nous avons atteint dans nos filiales chinoises, où nous sommes au top de Bombardier ». Et c’est la même chose en Inde !

Cette stratégie qui consiste à dresser les continents, les Etats et les salariés les uns contre les autres, on en trouve aussi la trace chez Alstom, comme en témoigne l’information parue dans la Voix du Nord du 17 décembre 2009 : « Deux trams-trains vont sortir des chaînes d’Alstom chaque mois, soit une voiture tous les deux jours et demi. Les trente-neuf premières voitures seront assemblées à Valenciennes. Et après ? Pour les éventuelles levées d’options ou d’autres contrats, on se laisse l’opportunité d’un éventuel transfert sur le site Alstom de Katowice en Pologne », explique Romain Bruniaux, directeur adjoint du site.

Une information reprise en septembre 2010 par Business Wire illustre ces stratégies puisqu’elle fait état de la signature, en présence du Secrétaire d’Etat chargé des transports, d’un protocole d’entente entre Alstom et « deux sociétés chinoises (CNR et SEC) pour former un partenariat stratégique et développer conjointement de nouveaux marchés pour des produits de transport collectif (…). Selon les dispositions de l’accord, Alstom, en collaboration avec CNR et SEC, développera les capacités et la compétitivité de ses deux joint-ventures existantes, Shanghaï Alstom Transport Co.ltd (« SATCO ») et Shanghaï Alstom Transport Electrical Equipement Co.ltd (« SATEE »). La collaboration permettra aux parties d’accélérer le développement de solutions complètes de matériel roulant et de systèmes de traction ferroviaires par les deux joint-ventures pour les projets de transport collectif. Le but à long terme du partenariat est d’offrir à SATCO et à SATEE la capacité de concevoir, construire et commercialiser de nouveaux produits de transport urbains pour le marché chinois ainsi que pour les marchés à l’exportation ».

Tel est donc clairement revendiqué le projet industriel des grands constructeurs ferroviaires présents en France. Notre pays va-t-il, dans les années qui viennent, devoir importer son matériel ferroviaire ? Au vu des logiques et des choix actuels, il n’est manifestement pas prématuré de poser la question. Au plan écologique, il serait en outre parfaitement absurde d’importer notre matériel, au prix d’une augmentation conséquente des gaz à effet de serre.

Dans une brochure parue début 2008 et intitulée « L’industrie ferroviaire française : les voies de l’excellence », la Fédération des industries ferroviaires se félicite que « la France s’impose aujourd’hui comme la deuxième puissance ferroviaire européenne ». (…) «Avec un chiffre d’affaires de 3,3 milliards d’euros en 2006, un marché intérieur record (2,2 milliards d’euros) et de bonnes performances à l’exportation (1,1 milliard d’euros), l’industrie ferroviaire française affiche une belle santé. Grâce au retour en force des tramways, au renouvellement des trains régionaux et à l’essor de la grande vitesse, le monde ferroviaire en France a connu au cours de ces dernières années, une accélération qui a profité à la quasi totalité du secteur ».

Jusqu’à quand, est-on tenté d’ajouter, si l’Etat, les régions, les syndicats de transports et les sociétés nationales commanditaires comme la SNCF ou la RATP demeurent l’arme au pied et se montrent aussi inattentifs aux conditions de réalisation des marchés publics qu’ils octroient à ces grands groupes que peu soucieux de faire en sorte que toute la filière ferroviaire française tire bénéfice de la situation, en termes de chiffre d’affaires comme d’emploi ?

Nous sommes à la croisée des chemins. Si l’on veut qu’en matière de production ferroviaire la France demeure une puissance exportatrice de matériels roulants – plus d’un milliard d’euros en 2006 et le tiers de son chiffre d’affaires total – ; si l’on veut que l’industrie ferroviaire nationale contribue au redressement de l’économie française, pérennise et développe ses sites, ses outils de construction et ses savoir-faire, crée des emplois – beaucoup d’emplois ! – et soit l’un des piliers industriels de la transition écologique du pays, alors il faut y regarder de près…

I.— LA RECEVABILITÉ JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

La procédure particulière d’inscription à l’ordre du jour d’un débat sur la création d’une commission d’enquête, dans le cadre du « droit de tirage » prévu par l’article 141-2 du Règlement, n’est pas exclusive du respect des règles habituelles d’examen des propositions de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête puisque cet article dispose que sont inscrites à l’ordre du jour les propositions de résolution « satisfaisant aux conditions fixées par les articles 137 à 139 » du Règlement. À ce titre, elles doivent :

– déterminer précisément les faits devant donner lieu à enquête ou les services ou entreprises publics dont la commission doit examiner la gestion (article 137 du Règlement) ;

– ne pas avoir le même objet qu’une commission d’enquête (ou qu’une mission d’information bénéficiant des prérogatives d’une commission d’enquête) qui a rendu ses travaux dans les douze mois qui précèdent (article 138 du Règlement) ;

– ne pas porter sur des faits pour lesquels des poursuites judiciaires sont en cours (article 139 du Règlement).

Ces principes se conjuguent avec les objectifs que doivent poursuivre les commissions d’enquête en vertu de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. Elles sont formées pour recueillir des éléments d’information sur :

– des faits déterminés ;

– ou la gestion des services publics ou des entreprises nationales.

La présente proposition de résolution porte à l’évidence sur des faits déterminés puisqu’elle tend, d’une part, à établir un diagnostic précis de l’état de santé de la filière industrielle ferroviaire française et, d’autre part, à proposer un traitement de fond pour améliorer son état général. Son objectif satisfait donc aux exigences posées par l’article 137 du Règlement de l’Assemblée.

Ensuite, la proposition de résolution remplit les conditions posées par l’article 138 du Règlement, puisqu’aucune commission d’enquête ou aucune mission effectuée dans les conditions prévues à l’article 145-1 n’a effectué des travaux sur ce même sujet depuis douze mois.

Enfin, la dernière condition de recevabilité d’une proposition de résolution concerne la mise en œuvre du principe de séparation entre le pouvoir législatif et l’autorité judiciaire, lequel interdit aux assemblées parlementaires d’enquêter sur des faits ayant donné lieu à des poursuites judiciaires aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. Cette condition est satisfaite puisque aucune procédure en cours n’entre dans le champ d’étude proposé, ainsi que l’a indiqué par courrier le 2 décembre 2010 M. le Garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, au Président de l’Assemblée nationale.

II.— UNE COMMISSION D’ENQUÊTE DONT L’AMBITION EST DE PÉRENNISER LA FILIÈRE INDUSTRIELLE FERROVIAIRE FRANCAISE

A.— UNE FILIÈRE RICHE D’ATOUTS EXCEPTIONNELS

1. Des commandes à foison

Bien loin de manquer, les commandes affluent du monde entier à un rythme soutenu et le marché intérieur français n’est pas en reste. C’est en dizaines et centaines de millions d’euros que les grandes agglomérations françaises, l’ensemble des régions, la SNCF, la RATP achètent de nouveaux matériels et renouvellent leurs parcs. Il y a du reste tout lieu de s’en féliciter car cela favorise l’accessibilité sociale et le développement écologique des transports.

Il en est ainsi de l’agglomération lyonnaise qui, en dix ans, s’est portée acquéreuse de 57 rames de tramways auprès d’Alstom jusqu’à détenir « l’un des plus grands parcs de Citadis au monde ». C’est aussi la RATP qui, entre 2000 et 2007, a fait l’acquisition de près d’une centaine de tramways T2 (Alstom).

C’est la SNCF qui, associée aux Chemins de fer luxembourgeois, confie à un consortium Alstom Transport – Bombardier Transport un marché de 82 millions d’euros destiné pour partie aux régions Pays de la Loire et Haute-Normandie. Rendue publique en janvier 2009, cette annonce rappelait que 168 rames de matériels TER étaient déjà en service dans les régions précitées ainsi que dans celles de Lorraine, du Centre, du Nord – Pas-de-Calais, de Picardie, de Rhône-Alpes et de Provence-Alpes-Côte d’Azur.

C’est le contrat d’un montant de 224 millions d’euros signé en juillet 2004 par la SNCF avec Alstom, pour la livraison de 160 locomotives, complétée le 2 octobre 2008 par 15 locomotives supplémentaires.

Au cours de l’exercice 2007-2008, Alstom Transport a enregistré un chiffre d’affaires de 5,5 milliards d’euros et des commandes en hausse de 39 % par rapport à l’exercice précédent.

C’est aussi la confirmation officielle, en mai 2009, de la commande de 60 rames passée par la RATP au consortium Alstom-Bombardier pour le RER A de l’Ile-de-France, le montant de ce programme s’élevant à environ 842 millions d’euros.

C’est, toujours en mai 2009, la livraison par Alstom à la RATP de la première des 49 rames automatiques sur pneumatiques MP 05, qui remplaceront à terme les rames MP 89 avec cabine de conduite en vue de l’automatisation complète de la ligne 1 du métro parisien (Château de Vincennes – La Défense), à l’horizon 2012.

C’est la décision, à l’automne 2009, des communautés d’agglomération de Brest et de Dijon de choisir Alstom pour la fourniture de 52 rames de tramways Citadis, pour un montant de plus de 100 millions d’euros ».

C’est la rénovation du métro sur pneus de l’agglomération lilloise, aboutie en 2009 et confiée à Alstom et Safra pour 11 millions d’euros.

Le 27 octobre 2009, la Fédération des industries ferroviaires publiait un communiqué précisant que « la SNCF attribue à Asltom le marché de la nouvelle génération de trains régionaux à un niveau, destiné à moderniser et accroître le parc français sur la période 2013-2021. Le contrat comporte une tranche ferme d’un montant de 800 millions d’euros pour la livraison de 100 trains Coradia Polyvalent à huit régions françaises. Les intentions de levée d’options déjà exprimées pour 35 rames supplémentaires, pourraient rapidement porter le montant à un milliard d’euros. A terme, le volume total pourra atteindre 1000 Coradia Polyvalent, pour un montant de plus de sept milliards d’euros. Les premières livraisons sont prévues dès 2013 et s’échelonneront jusqu’à mi-2015 ».

En France, conclut la FIF, « Avec une progression annuelle de l’ordre de 6 %, le transport régional a enregistré depuis fin 2002 une hausse de fréquentation de 40 %. Chaque jour, 5 700 trains permettent de réaliser 800 000 voyages sur 260 lignes. Et sur la base de sa progression actuelle, le transport régional quadruplera à l’horizon de 2030 ».

La liste de ces excellents résultats n’est pas close et il ne se passe pas un trimestre sans que les grands constructeurs Alstom et Bombardier n’enregistrent des commandes dont les montants, quelquefois vertigineux, témoignent des perspectives ouvertes à l’industrie ferroviaire française.

Preuve en est l’annonce, début octobre 2010, de l’attribution à Alstom d’un marché de 17 millions d’euros par le Syndicat intercommunal des transports urbains de Valenciennes, pour la fourniture de sept tramways supplémentaires ; ou la confirmation de fabrication de 21 rames du modèle Citadis (73,2 millions d’euros HT) pour l’agglomération de Tours.

2. Des résultats financiers en progression constante

L’Usine nouvelle du 2 avril 2010 indique que « si Bombardier est « plombé » par ses avions d’affaires, les ventes de la division ferroviaire progressent de 2 % pour s’établir à dix milliards d’euros. La marge opérationnelle passe de 5 % à 6,2 % et le carnet de commandes augmente de 24,7 milliards de dollars américains à 27,1 milliards ».

A cette même date, Pierre Beaudoin, Président Chef de la direction Bombardier Inc., commente en ces termes les résultats financiers pour le quatrième trimestre et l’exercice clos le 31 janvier 2010 : « Le marché du rail est demeuré résilient. Bombardier Transport a accru ses revenus et sa rentabilité. Le groupe a affiché une marge BA II de 6,2 % dépassant la cible de 6 % établie il y a quatre ans. Le niveau d’activité dans les marchés traditionnels est demeuré robuste, et nous avons remporté des contrats marquants tels que la commande de 80 trains à très grande vitesse Zefiro en Chine et, plus récemment, une entente cadre intervenue avec la SNCF, d’une valeur de 11 milliards de dollars US, pour des trains régionaux ». Et il ajoute : « Les revenus de Bombardier Transport ont totalisé 10 milliards de dollars US, comparativement à 9,8 milliards l’exercice précédent ».

Alstom n’est pas en reste et obtient d’excellents résultats opérationnels sur l’exercice 2009-2010, puisque entre le 1er avril 2009 et le 31 mars 2010, le groupe a enregistré un chiffre d’affaires (19,7 milliards d’euros) et un résultat opérationnel (1,8 milliard d’euros) records, en hausse respectivement de 5 % et 16 % ; le résultat net de 1,2 milliard d’euros marque une hausse de 10 %.

Le groupe n’est d’ailleurs avare ni de chiffres ni de perspectives : « les fonds propres ont progressé de 2 884 millions d’euros au 31 mars 2009 à 4 001 millions d’euros au 31 mars 2010, en raison du profit élevé enregistré sur la période ».

S’agissant des dividendes, le conseil d’administration a décidé de proposer à l’Assemblée générale la distribution d’un dividende de 1,24 euro par action, soit une hausse de 11 % par rapport à celui de 1,12 euro payé au titre de l’année précédente.

B.— UNE FILIÈRE FRAGILISÉE PAR DES CHOIX STRATÉGIQUES CONTESTABLES

1. Des conséquences sociales lourdes

A l’évidence, la crise n’est pas la même pour tous ! Et, là encore, Alstom et Bombardier se rejoignent pour prôner la réduction des coûts face aux « difficultés des marchés »…

«Nous avons profité de la récession pour peaufiner nos activités d’exploitation, en vue d’une meilleure exécution et de réduire les coûts de manière judicieuse » explique Pierre Beaudoin pour Bombardier qui, avec ses implantations chinoises et indiennes, vise aussi « l’optimisation » de son empreinte géographique pour accroître la marge. C’est la mondialisation des productions au service exclusif du profit.

Même « souci » chez Alstom, dont les effectifs ont été « ajustés » avec une baisse de 5 000 employés au cours de l’exercice, qui s’est faite par des départs naturels, par le non renouvellement de certains contrats à durée déterminée et par des restructurations sur plusieurs sites.

Début octobre 2010, de nouvelles vagues de suppressions d’emplois (4 000 postes) ont été annoncées au sein du groupe, d’ici mars 2012. Et si les informations publiées indiquent que le secteur ferroviaire ne serait pas concerné, les syndicats redoutent cependant que les choix privilégiant le profit contre l’emploi ne s’étendent à l’ensemble de l’entreprise.

Preuve en donne l’interview accordée le 5 novembre 2010 au quotidien Le Monde par le Président directeur général d’Alstom, Patrick Kron, qui, à une question sur les menaces de suppressions d’emplois, répond : « Sur le transport ferroviaire, tout dépendra de la demande (…) D’une façon générale, quelles que soient les activités – transport, transmission et génération d’électricité -, nous ne procéderons à des ajustements que là où ils pourraient être nécessaires ».

2. L’exemple du Nord Pas-de-Calais

On touche là au cœur du problème. Un problème dont on mesure en France les effets considérables: chômage, précarité, difficultés sociales accrues dans nos bassins d’emploi, difficultés croissantes et trop souvent irrémédiables pour nombre de PME. S’y ajoute, pour les PME, la menace de suppression du dispositif Cap Plus, système gouvernemental d’assurance-crédit des entreprises, pourtant largement utilisé pour faire face à la faiblesse des niveaux de trésorerie et de commandes, laquelle incite les assureurs de crédit professionnels à refuser de couvrir les risques auxquels ces PME sont exposées.

La situation du Nord Pas-de-Calais démontre s’il en était besoin que ces entreprises, leurs salariés et les réseaux sous-traitants sont victimes de la vague sur laquelle surfent les grands constructeurs.

Cela est d’autant plus inacceptable que, dans cette région comme dans plusieurs autres, des politiques en faveur du rail avaient été initiées au tournant des années 1990 et 2000. Ainsi, sous la présidence Verte de Marie-Christine Blandin, de 1992 à 1998, le choix du Conseil régional Nord Pas-de-Calais de privilégier le rail avait abouti à la conclusion de conventions exigeantes avec la SNCF, notamment pour ce qui concernait le refus des fermetures de lignes, ainsi qu’à des commandes ambitieuses de matériel. L’emploi, le service public et l’évitement de la pollution étaient au cœur de ces choix.

Le Nord Pas-de-Calais est la première région industrielle ferroviaire française, avec 30 % de l’activité nationale, trois constructeurs (Alstom, Bombardier et Arbel Fauvet Rail), 150 équipementiers, des centaines de fournisseurs et sous-traitants, 10 000 emplois et environ un milliard d’euros de chiffre d’affaires.

Dans la région, le bassin valenciennois concentre à lui seul deux constructeurs et 60 % des effectifs de la construction de matériel ferroviaire, plus d’une quarantaine d’équipementiers employant 6 000 salariés, le premier organisme certificateur ferroviaire français (CERTIFER), l’Agence ferroviaire européenne, le Centre d’essais ferroviaire (CEF) avec trois boucles d’essais, le siège de l’Association des industries ferroviaires (AIF) qui fédère 90 entreprises du Nord Pas-de-Calais, un pôle de recherche Transports avec l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) – implanté à Villeneuve d’Ascq – , ainsi que l’université de Valenciennes, qui propose un Master ferroviaire.

Depuis 2005, le Valenciennois accueille enfin le pôle de compétitivité à vocation mondiale I-Trans, pour répondre aux enjeux internationaux des transports innovants. Le pôle s’est fixé une dizaine d’objectifs, comme la création de 1 500 emplois ou l’implantation d’une vingtaine d’entreprises, qui devront être atteints avant 2015.

A ces atouts incontestables s’ajoutent des projets ambitieux bénéficiant d’engagements financiers publics conséquents : la création d’un technopôle universitaire où se retrouveraient tous les chercheurs travaillant dans le domaine des transports et un projet de développement d’une zone ferroviaire autour d’Alstom Raismes / Petite-Forêt et du Centre d’essais ferroviaire.

Ainsi que le déclarait Alain Bocquet le 11 mai dernier à l’Assemblée nationale, « Avec de telles structures et de tels atouts, nos territoires pourraient voir venir. Pourtant, l’inquiétude s’installe chez les salariés, de l’ouvrier au cadre, d’Alstom ou de Bombardier (…) et chez les sous-traitants ».

Le 10 mai 2010, sous le titre « Ferroviaire : marché porteur et pourtant… », le quotidien La Voix du Nord rendait témoignage des fortes préoccupations des sous-traitants du ferroviaire. Des préoccupations qui n’auraient pas lieu d’être alors que développement durable, objectifs de réduction des émissions de CO2, évolution du « marché » voyageurs, rythme et niveau des commandes françaises, européennes et mondiales, situation financière et profits des groupes constructeurs représentent autant de gages de l’essor possible et nécessaire de l’industrie ferroviaire française.

Chacun se doit aujourd’hui de constater la bonne santé économique de la filière et du réseau des PME qui la font vivre. Il serait juste de saluer également l’évolution favorable de la création d’emplois stables et justement rémunérés. A titre prospectif, comment ne pas admettre que la conversion écologique de l’économie ne peut qu’en tirer avantage et se traduire par une réorientation des sous-traitants de l’industrie automobile, notamment vers les métiers voisins des équipementiers du ferroviaire ? Ce gisement doit donc être pérennisé.

La France reste le premier pays européen en termes de trafic de passagers par voie ferrée, juste devant l’Allemagne. « C’est donc bien pour notre pays qu’Alstom et Bombardier travaillent » commente Daniel Cappelle, président de l’AIF, qui relève pourtant qu’il « n’est pas du tout sûr que les prochains trains d’Alstom aient des roues Valdunes », alors même que ces trains « vont rouler en France et qu’on contribue à les payer ».

« Quand Alstom et Bombardier ont des programmes sur dix ans, pourquoi les équipementiers, eux, n’ont-ils des commandes que pour un an ? Il faut leur donner de la lisibilité ».

3. De l’enchère inversée au déréférencement : des pratiques intolérables

C’est un premier problème. Il met en cause le fait que si jusqu’à présent l’essentiel des commandes d’Alstom ou Bombardier avait été réalisé dans des usines françaises, la tendance s’est inversée depuis quelques années. En effet, si la sous-traitance a été confiée dans un premier temps à des PME locales, ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui et, si rien ne change, cela le sera encore moins demain pour ce qui concerne les contrats signés en 2009.

« On n’a pas joué la solidarité entre grands donneurs d’ordres et PME », a dû reconnaître le 4 octobre le Ministre de l’industrie, devant les salariés de l’entreprise du Valenciennois, Valdunes, équipementier du ferroviaire.

Outre l’absence de législation et de réglementation contraignantes, également reconnue par le Ministre, l’introduction par ces grands groupes de nouvelles méthodes est également à mettre en cause : en particulier la priorité donnée à la recherche systématique de baisse des coûts via des pratiques variées et contestables, s’agissant notamment – mais cela n’est pas exclusif – de marchés publics.

Ces pratiques étranglent désormais toute la filière, notamment parce que les constructeurs envoient directement une partie de leur production dans des usines implantées dans des « low labour countries » (LLC).

La tendance générale est à la fabrication des commandes de l’Etat ou des régions, par les usines-sœurs des grands constructeurs, situées en Europe de l’Est. Préjudiciables à l’industrie nationale et régionale, ces positionnements sont désormais fréquents et acceptés, y compris par les maîtres d’ouvrage publics qui passent les commandes sans poser trop de questions.

Il conviendrait pourtant qu’à l’échelle de l’ensemble des régions s’exprime l’exigence que la sous-traitance française soit associée à la réalisation de ces productions. Cela pourrait faire l’objet de clauses explicites de ces marchés, dans le respect de la réglementation européenne. Tel n’est pas le cas aujourd’hui et cela nuit considérablement à la vitalité de notre économie comme à la lutte pour l’emploi.

Les régions françaises doivent faire front commun pour que l’industrie ferroviaire française, constructeurs et sous-traitants, bénéficie directement de leurs investissements.

A l’origine de ces dérives, il y a environ six ans, lorsqu’il s’est agi d’externaliser – voire de délocaliser – des prestations pour les nouvelles phases de TER, la SNCF s’est inquiétée des risques induits de non-qualité. Las, progressivement, ce type d’interrogation s’est dilué, au point que désormais, le site d’Alstom Petite-Forêt est devenu un « atelier premier train », soit une usine-test de prototypes. Or la boucle d’essais ferroviaire, projet qui sera réalisé en grande partie grâce à la mobilisation de fonds publics, ne permettra pas de stopper cette logique ni, a fortiori, de l’inverser.

Le développement de la politique du « premier train » pose également problème : études et prototypes sont réalisés en France, les sous-traitants fabriquent les pièces pour les premières rames, ils essuient les plâtres – avec, à la clé, des indemnités parfois vertigineuses pour non-conformité –, puis les fabrications des séries et la sous-traitance sont délocalisées ! Les commandes voyagent jusqu’en Europe de l’Est ou sont vendues en Chine avec la technologie associée.

Il en résulte très peu de travail et de visibilité pour la sous-traitance française, mise de fait dans l’impossibilité d’être soutenue par les banques pour investir, innover et recruter – et pas même pour amortir ses investissements lorsqu’elle est encore capable d’en engager.

Résultat, les sous-traitants sont conduits à chercher à augmenter la productivité et à diminuer la part des emplois ouvriers, notamment en automatisant la production au maximum. Cependant que les constructeurs embauchent ingénieurs et cadres, les PME doivent « dégraisser » les personnels ouvriers spécialisés.

Lorsqu’une série est tout de même réalisée en France, c’est de toute façon d’assemblage qu’il s’agit. La majeure partie de la production est sous-traitée, là aussi bien souvent dans des « low labour countries ».

Autre pratique que dénonce la sous-traitance, l’obligation faite aux acheteurs des constructeurs de réaliser 40 % à 50 % de leurs achats dans des LLC. Héritée de l’industrie automobile, cette pratique induit le découpage des commandes et elle est immanquablement assortie d’objectifs chiffrés, comme en témoignent par exemple d’anciens cadres d’Alstom.

Les glissements qui se cumulent conduisent les constructeurs à demander aux sous-traitants de développer des unités de production dans des pays à bas coût ou de faire sous-traiter à leur tour une partie des pièces dans ces LLC. On a relevé plusieurs cas d’alliances locales montées en France, y compris en partenariat avec les constructeurs, mais finalement cassées pour traitement des commandes à l’étranger.

La sous-traitance française subit également un handicap majeur lié aux frais de stockage engendrés par la politique du « juste à temps ». Des entreprises ont vu leurs stocks multipliés par neuf en deux ans ou ont dû produire des séries de 20 pièces pour « sortir un prix » accepté par le constructeur, quitte à ce que celui-ci n’en commande finalement que deux…

La politique de l’enchère inversée, qui consiste en ce que l’acheteur prenne l’initiative en diffusant son cahier des charges vers une cible de fournisseurs contraints de faire des propositions de prix compétitives, se généralise. Cette logique du moins-disant intégral tire tous les prix vers le bas et ne permet que rarement de dégager au final une marge acceptable.

Enfin, et cela soulève un obstacle majeur, le déréférencement est devenu la règle, au point par exemple que pour le porteur haute densité (PHD) ou TER à deux niveaux, nombre de sous-traitants ne sont même pas consultés.

Cela n’est pas tolérable car, au lieu d’être attribuée à la Tchéquie, la production annoncée de 40 voitures par mois permettrait de faire vivre l’ensemble de l’industrie ferroviaire sous-traitante du Nord de la France.

Les acteurs de la filière ferroviaire font valoir que ce projet de 8 milliards d’euros, qui répond aux commandes des régions françaises, commandes publiques financées par le contribuable, s’est monté sur le prix et sur les capacités de réponse de l’Europe de l’Est. Vendu trop bas par Bombardier, le projet PHD contribue ainsi à cautionner l’ensemble des pratiques ici dénoncées et constatées quotidiennement sur le terrain.

Autre illustration des conséquences de ces dérives, la situation du Parc industriel fournisseurs implanté près le site de Bombardier Crespin, qui atteste du ralentissement de la sous-traitance confiée par le constructeur canadien. A l’origine, en janvier 2007, il s’agissait d’un projet extrêmement ambitieux : 60.000 mètres carrés de bâtiments, 40 millions d’investissements et 500 emplois nouveaux annoncés. Trois ans plus tard, seules trois sociétés s’y sont installées. D’autres devraient suivre mais comment en être sûr ?

C. — LE FRET, UN ENJEU MAJEUR

1. Une situation critique

Le 28 juin 2005, à l’Assemblée nationale, le député communiste du Nord Georges Hage interrogeait le Gouvernement sur les conséquences de l’ouverture à la concurrence en France du transport international de fret ferroviaire. Refusant de s’écarter de cette « voie dangereuse » dénoncée par Georges Hage, le gouvernement répondait alors : « Cette procédure s’inscrit dans le cadre de l’ouverture du marché du transport ferroviaire du fret, voulue par la Commission européenne et affirmée dans son livre blanc : « la politique européenne des transports à l’horizon 2010 : l’heure des choix », afin que ce mode de transport retrouve un niveau de compétitivité lui permettant de rester l’un des acteurs majeurs du système des transports dans une Europe élargie, notamment vis-à-vis de la concurrence du mode routier ».

Cinq ans plus tard, le bilan est accablant et le rapport du sénateur Grignon publié fin octobre 2010 ne peut que le reconnaître ! Quant à la nouvelle politique du fret avalisée par le Gouvernement et que la SNCF veut imposer, elle fait l’unanimité contre elle. Les cheminots, les élus territoriaux, les entreprises et les opérateurs dénoncent le choix d’abandonner le wagon isolé, les fermetures de sites, les suppressions de milliers d’emplois cheminots en résultant et les conséquences pour l’environnement qui relèguent d’ores et déjà le « Grenelle de l’environnement » au grenier des engagements « oubliés ».

Dans sa réponse à une question d’Alain Bocquet sur l’abandon du fret SNCF par l’entreprise Ardam Electrolux de Revin, dans les Ardennes, le ministère de l’Economie répondait en août 2008 : « S’agissant des moyens de transport de marchandises, le directeur d’Electrolux insiste sur le fait que la SNCF a arrêté le service par wagons isolés de sa propre initiative ». Mais qu’ont fait les pouvoirs publics pour permettre de revenir sur cet abandon ?

Des centaines d’exemples semblables peuvent être relevés. D’autres le seront encore, de plus en plus si rien ne change et si rien n’est fait pour rompre avec le suivisme de l’Etat vis-à-vis de l’entreprise nationale. Qui ne dit mot consent ! Et l’on attend encore les suites données par le Gouvernement à l’engagement pris par le Ministre de l’industrie le 29 avril 2010, en réponse à l’interpellation de Jean-Jacques Candelier, député du Nord, concernant le sauvetage et le développement du constructeur douaisien de wagons marchandises Arbel Fauvet Rail (AFR) et la gare de triage de Somain (400 emplois), dont les cheminots mènent depuis l’été 2009 une lutte unitaire pour maintenir et développer l’activité de triage : « Je suis prêt à examiner la possibilité de développer une filière de wagons fret qui nous permette de démontrer que, dans ce bassin d’emploi, il y a une vraie viabilité pour cette activité ».

Dans ce bassin d’emploi, mais aussi sur l’ensemble du territoire national et au-delà en Europe.

Le 18 février dernier, à Zürich, sept grandes entreprises européennes de fret ferroviaire ont conclu officiellement l’Alliance Xrail en vue de « rendre plus performantes et attractives pour le client, les offres de transport international par wagons isolés ». Leur déclaration commune s’appuie sur le fait que le transport par wagons isolés « représente environ 50 % du fret ferroviaire européen et, selon des études réalisées, présente un potentiel de croissance important au niveau international ».

La Tchéquie, le Luxembourg, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark, la Suède, la Norvège, l’Autriche, la Hongrie, la Suisse et la Belgique en seront bénéficiaires. Mais pas la France ! SNCF et Gouvernement restent à l’écart de la démarche, pourtant initiée par la SNCF ( !) et qu’approuvent les syndicats cheminots.

Le 19 mars 2010, les principales organisations syndicales de cheminots et plusieurs associations environnementales ont adopté une déclaration commune revendiquant un débat public sur ces enjeux. On peut y lire notamment : « Le fret ferroviaire de proximité, cette technique du wagon isolé, est stratégique pour relever le défi de la lutte contre le changement climatique et celui de l’aménagement du territoire. S’en désengager pour un opérateur public, comme la SNCF, est absurde et cela constitue une faute lourde pour la France. L’Europe l’a compris, sept des grands opérateurs ferroviaires s’unissent pour construire un projet de nouveau modèle économique dans ce domaine, la SNCF s’y refuse. Cette coopération – nommée X Rail – va être influente dans onze pays. La France, avec la SNCF, aurait-elle raison contre tous en restant à l’écart ? C’est impensable ! » (…) « Nous réaffirmons que les effets bénéfiques à long terme du plan ferroviaire d’avenir – combiné, autoroute ferroviaire – ne doivent pas être anéantis par l’abandon du fret de proximité. Il y a deux choses différentes. Seule l’addition plan fret d’avenir et wagon isolé en proximité peut permettre de relever le défi du report modal. L’option, cautionnée par le gouvernement, sur laquelle s’obstine la SNCF, provoquera d’ici à 2020 une émission supplémentaire de 3 millions de tonnes équivalent CO2, et encore sous réserve que le plan d’avenir réussisse. Ce n’est pas acceptable ! La France, qui sur la scène internationale prétend devenir la meilleure élève en matière d’environnement, ne peut pas continuer dans cette voie. »

Le 3 juin dernier, plusieurs centaines de personnalités – parlementaires et anciens ministres, responsables syndicaux, dirigeants d’ONG de défense de l’environnement – et trois anciens ministres des transports ont rendu public un appel national pour que le plan fret SNCF soit revu d’urgence.

Début juillet, les organisations représentatives des principaux chargeurs ont dénoncé avec virulence la restructuration du fret et demandé la médiation du Gouvernement. L’Association française des wagons particuliers, la Confédération française pour l’habitat, l’urbanisme et l’aménagement du territoire, la Fédération française de l’acier, l’Union des industries chimiques, le Groupe des fédérations industrielles et bien d’autres avec eux ont affirmé que la réorganisation du fret SNCF dénommée « multi-lots, multi-clients », « [n’était] pas une réponse aux besoins des chargeurs ».

A cause des tergiversations actuelles, les contraintes pesant sur les sous-traitants et les PME de cette branche de l’industrie ferroviaire entraînent des situations et des décisions dramatiques, comme la liquidation de l’entreprise amandinoise Delos (50 emplois), cependant que dans le bassin valenciennois et dans la seule région Nord – Pas-de-Calais, nombre d’autres PME sont menacées : AFR, qui vient d’arracher une décision favorable du Tribunal de commerce de Paris, peut repartir avec seulement 80 emplois sauvegardés sur 226 ; Mécastamp à Hénin-Beaumont (140 salariés), Amesco à Vieux-Condé (15 salariés), les Forges de Fresnes (58 salariés), la SAEP à Saint-Amand-les-Eaux (120 salariés), dont les responsables syndicaux écrivaient fin mars 2010 au représentant de l’Etat dans le bassin valenciennois : « Nous sommes essentiellement sous-traitants dans le domaine ferroviaire qui représente 70 % de notre chiffre d’affaires annuel. Nous n’avons aucune prévision de commandes pour le ferroviaire en 2011, et étant donné la valeur que cela représente, nous sommes voués à une mort certaine. Nous avons appris récemment qu’une grosse partie des contrats chez Alstom et Bombardier, partent vers les pays de l’Est. Nous sommes très inquiets sur le devenir de notre société et de tous les autres sous-traitants régionaux. Notre souhait est de trouver au plus vite un appui politique qui nous aidera certainement dans notre combat contre la délocalisation du travail en France. Nous ne pouvons pas accepter que ces trains destinés au réseau ferroviaire français soient fabriqués en dehors de la France. Nous estimons que les sociétés Bombardier et Alstom qui ont obtenu de l’Etat français des contrats et des aides financières pour Alstom, n’ont pas à délocaliser ce travail au détriment des travailleurs français. C’est notre technicité et notre savoir-faire que l’on est en train de tuer. Que vont devenir tous ces travailleurs de la métallurgie française ? Sommes-nous voués à nous expatrier afin d’assurer à nos familles le minimum vital ».

L’érosion se poursuit début octobre 2010, puisque les syndicats cheminots annoncent la suppression à terme de 70 postes sur 100 affectés au fret à Aulnoye-Aymeries, au détriment d’autant de familles et de l’économie du bassin de la Sambre.

En septembre 2009, le gouvernement a promis un engagement national pour le fret ferroviaire de sept milliards d’euros d’ici à 2020, la SNCF mobilise un milliard d’euros d’ici 2015. Un an plus tard, du fait de la lenteur de l’activation de ces dispositifs et du cap maintenu sur les options de casse retenues par la SNCF, rien ne vient sur le terrain, où toutes les entreprises accusent un chiffre d’affaires en baisse de 30 % par rapport à 2008 et où ne subsistent qu’environ 1400 emplois au plan national, dont la moitié en Nord – Pas-de-Calais.

Inscrites dans les logiques antérieures, les dispositions prévues apparaissent comme menaçantes et elles ne feront que renforcer, ou pire, aggraver, le constat que l’on peut dresser aujourd’hui. En 2000, l’objectif du gouvernement était de doubler la part du fret ferroviaire à l’horizon 2010 : au final, elle a diminué, passant de 14 % en 2003 à 11,4 % en 2008…

2. Pour la constitution d’un pôle industriel ferroviaire du fret

Dans un contexte critique pour la filière, le mouvement syndical propose de constituer un pôle industriel ferroviaire, national ou régional, du fret.

Il s’agit de bâtir une offre globale dans l’étude, la construction ferroviaire, la maintenance de tous types de wagons – citernes, containers, trémies pour céréales et agrégats, etc., dont les entreprises partenaires auraient vocation à devenir ou redevenir des sous-traitants de la fabrication du matériel pour l’activité ferroviaire « voyageurs ». Alstom et Bombardier doivent être sollicités dans cette perspective.

L’actualité des dernières semaines montre qu’il est possible d’inciter très fortement ces groupes à prendre en compte ces enjeux. C’est d’abord l’annonce – arrachée par la mobilisation des salariés – de leur participation financière, à hauteur d’un million d’euros chacun, au sauvetage de la PME sous-traitante ferroviaire Sofranor (158 salariés), dont les responsables syndicaux ont rappelé l’exigence de contrats mutuellement avantageux entre équipementiers et donneurs d’ordres, afin de pérenniser activité, savoir-faire et emplois.

C’est ensuite la publication par Alstom, sur demande des élus territoriaux auteurs d’une commande publique, de la liste des sous-traitants français impliqués dans la production des rames achetées : « Alstom livre le nom de ses sites et de ses sous-traitants » / « Alstom a été retenu pour l’attribution de sept rames fermes pour la ligne 2 du tram dans le Valenciennois. Francis Berkmans a demandé des garanties quant à la fabrication française du produit. Dans son communiqué de presse adressé hier, Alstom précise que les rames Citadis seront « conçues et assemblées dans les sites Alstom Transport en France, à savoir à Petite-Forêt (gestion du projet), La Rochelle (construction des rames), Ornan (fabrication des moteurs), Le Creusot (fabrication des bogies) et Villeurbanne (fabrication de l’électronique embarquée). Pour la première fois, Alstom précise le nom des entreprises du Nord-Pas-Calais qui contribueront à la production des rames : Valdunes, Faiveley et Almet. » [La Voix du Nord du 6 octobre 2010]

Pourquoi ne pas transformer cet acquis en obligation systématique de transparence dans les choix ?

Double preuve est ainsi apportée qu’il est possible d’obtenir des avancées. L’évolution de la législation devrait – et c’est d’abord de la responsabilité de l’État – y contribuer enfin.

CONCLUSION

L’industrie ferroviaire française est en crise. Dotée d’atouts exceptionnels, présente sur le marché français et à l’international, appuyée sur des outils technologiques et des sites de production de haut niveau, bénéficiant de salariés et cadres aux savoir-faire considérables, elle dispose des moyens nécessaires pour passer le cap.

Sous le couvert de la mondialisation, invoquée à l’envi par les groupes de constructeurs présents sur notre territoire, elle se heurte aujourd’hui à des pratiques qu’il convient d’inventorier, pour faire la clarté sur les causes des difficultés de la sous-traitance et déterminer les moyens d’y remédier – clauses de « production locale » intégrées aux marchés publics et mettant l’accent sur l’emploi sur place ; intégration dans les marchés de clauses écologiques et de développement durable ; bilan carbone ; hygiène, santé et sécurité des travailleurs ; séquençage des appels d’offres en lots limitant l’espace ouvert aux pays à bas coût…

Il est urgent de faire en sorte que le réseau de sous-traitants soit associé aux marchés publics obtenus par ces groupes car l’argent public ne peut pas continuer de contribuer à la casse d’entreprises ou à la liquidation de milliers d’emplois industriels.

L’extrême fragilité de la situation du fret ferroviaire et l’opposition très large au plan fret SNCF commandent que l’Assemblée nationale investisse ce champ d’activité industrielle et soit source de propositions pour défendre l’emploi et répondre aux besoins des bassins d’emploi, des entreprises clientes et des sous-traitants du secteur ferroviaire, ainsi qu’aux enjeux écologiques.

Enfin, la création d’une commission d’enquête parlementaire sur ces enjeux vise à permettre de débattre des initiatives qu’il appartient au Gouvernement de prendre au plan européen pour coordonner et impulser les activités industrielles ferroviaires, ainsi que pour lutter contre le dumping social, fiscal et environnemental que favorise l’absence d’harmonisation par le haut des réglementations et des fiscalités des différents Etats-membres de l’Union européenne.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires économiques examine, sur le rapport de M. Daniel Paul, la proposition de résolution de M. Alain Bocquet et plusieurs de ses collègues tendant à la création d’une commission d’enquête sur la situation de l’industrie ferroviaire française : production de matériels roulants « voyageurs » et fret (n° 2978) au cours de sa séance du 1er décembre 2010.

——fpfp——

M. le Président Serge Poignant. Nous examinons, sur le rapport de notre collègue Daniel Paul, la proposition de résolution n° 2978 de M. Alain Bocquet – que nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui – et plusieurs de ses collègues du groupe GDR tendant à la création d’une commission d’enquête de trente membres sur la situation de l’industrie ferroviaire française : production de matériels roulants « voyageurs » et fret.

Cette proposition devant examinée en séance publique mercredi prochain, 8 décembre, notre Commission est amenée, conformément à l’article 140 du Règlement, à se prononcer sur son opportunité et je laisse donc la parole au Rapporteur pour vous la présenter .

M. Daniel Paul, rapporteur. Notre collègue Alain Bocquet a déposé une proposition de création d'une commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française.

En 2008, la France est devenue la deuxième puissance ferroviaire européenne, avec un chiffre d'affaire de 3,3 milliards d'euros, dont 2,2 milliards sur le marché intérieur et 1 milliard au titre des exportations, grâce, notamment, au retour en force des tramways, au renouvellement des trains régionaux et à l'essor de la grande vitesse.

Pourtant, la situation est aujourd'hui particulièrement préoccupante. Dans un reportage du journal Le Monde du 18 septembre dernier sur le sauvetage du «made in France », on peut ainsi lire que les pays émergents «sophistiquent leur production (...) bénéficient d'une main d'œuvre éduquée, peu chère et des transferts de technologies que les États développés, la France entre autres, leur ont concédés pour obtenir des contrats à l'exportation ». Le secteur ferroviaire n'est pas épargné par ce mouvement.

Dans une interview récente accordée à la revue Ville, Rail et Transports, le Président de Bombardier Transports, M. André Navarri, ne cachait pas sa volonté de devenir un acteur local du marché chinois, notamment pour des activités importantes d'ingénierie, n'excluant pas le transfert d'importants centres de décision.

Alstom, pour sa part, aurait signé, selon une information publiée par Business Wire en septembre dernier, un protocole d'accord avec deux entreprises chinoises (CNR et SEC), en vue de former un partenariat stratégique et de développer conjointement de nouveaux marchés pour des produits de transports collectifs.

Or ces constructeurs se portent particulièrement bien. Ils reçoivent de très nombreuses commandes, venant aussi bien de l'international que du marché intérieur. Les résultats financiers de Bombardier et Alstom, en constante progression depuis plusieurs années, attestent de ce formidable essor.

Malheureusement, cette embellie profite certes aux actionnaires mais pas à l'emploi et aux salariés : Bombardier avoue avoir profité de la récession pour peaufiner ses activités d'exploitation, en vue d'une meilleure exécution et d'une réduction des coûts. Alstom n'est pas en reste, avec une réduction de ses effectifs (- 5000) au cours de l'exercice – départs naturels, non renouvellement de contrats à durée déterminée et restructurations de plusieurs sites.

Le Nord Pas-de-Calais est la première région industrielle ferroviaire française, avec 30 % de l'activité nationale, trois constructeurs (Alstom, Bombardier et Arbel Fauvet Rail), 150 équipementiers, des centaines de fournisseurs et sous-traitants, 10 000 emplois et environ un milliard d'euros de chiffre d'affaires. C'est dire si cette région est en première ligne !

Or, la tendance générale est à la fabrication des commandes de l'État ou des régions par les usines des grands constructeurs situées en Europe de l'Est. Préjudiciables à l'industrie nationale et régionale, ces pratiques sont désormais fréquentes et acceptées, y compris par les maîtres d'ouvrage publics qui passent les commandes « sans trop poser de questions »...

L'État et la SNCF ont leur part de responsabilité, avec la politique menée en matière de fret ferroviaire. En septembre 2009, le Gouvernement a promis un engagement national pour le fret ferroviaire de 7 milliards d'euros d'ici à 2020, la SNCF mobilisant pour sa part un milliard d'euros d'ici 2015. Un an plus tard, du fait de la lenteur de l'activation de ces dispositifs et du cap maintenu sur les options de la SNCF, toutes les entreprises accusent un chiffre d’affaires en baisse de 30 % par rapport à 2008. En 2000, l'objectif du Gouvernement était de doubler la part du fret ferroviaire à l'horizon 2010 : au final, elle a diminué, passant de 14 % en 2003 à 11,4 % en 2008. Le fret représente pourtant un enjeu majeur de la transition écologique nécessaire et attendue.

Dans ce contexte, il est important de rappeler la proposition du mouvement syndical de constituer un « pôle industriel ferroviaire, national ou régional » du fret. L'objectif est de bâtir une offre globale intégrant les études, la construction ferroviaire, la maintenance de tous les types de wagons – citernes, containers, trémies pour céréales et agrégats, etc., les entreprises partenaires ayant vocation à devenir – ou redevenir – des sous-traitants de la fabrication de ces matériels. Alstom et Bombardier pourront être sollicités dans cette perspective.

C'est maintenant qu'il faut réagir et tel est l'objet de la présente proposition de création d'une commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française, portant sur le matériel roulant « voyageurs » et fret.

Rien ne s'oppose juridiquement à l'examen de ce texte par notre Assemblée. Il porte en effet sur des faits déterminés, puisqu'il tend, d'une part, à établir un diagnostic précis de l'état de santé de la filière industrielle ferroviaire française et, d'autre part, à proposer un traitement de fond pour améliorer son état général. Son objectif satisfait donc aux exigences posées par l'article 137 du Règlement de l'Assemblée nationale.

En outre, aucune commission d'enquête ou mission mise en place dans les conditions prévues à l'article 145-1 du Règlement n'a effectué de travaux sur ce même sujet depuis douze mois.

Enfin, aucune procédure judicaire n'est en cours ou n'entre dans le champ d'étude proposé, M. le Garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, ayant été sollicité par courrier à ce sujet par M. le Président de l'Assemblée nationale.

La situation du fret ferroviaire commande que nous investissions ce champ d'activité industrielle en vue de présenter des propositions pour défendre l'emploi et répondre aux besoins des bassins d'emploi, des entreprises clientes et des sous-traitants, ainsi qu'aux enjeux écologiques.

La création d'une commission d'enquête parlementaire sur ces enjeux vise aussi à définir les initiatives que le Gouvernement pourrait porter au plan européen pour coordonner et impulser les activités industrielles ferroviaires, ainsi que pour lutter contre le dumping social, fiscal et environnemental que favorise l'absence d'harmonisation par le haut des réglementations et des fiscalités des différents États-membres de l'Union Européenne.

Au bénéfice de ces considérations, je vous propose, Monsieur le Président, mes chers collègues, d’adopter la proposition de résolution de M. Alain Bocquet.

La Commission examine l’amendement CE 1 du Rapporteur.

M. Daniel Paul, rapporteur. L’amendement vise à corriger une erreur de référence dans les articles du Règlement et à simplifier la rédaction de la résolution.

La Commission adopte l’amendement CE 1 et la proposition de résolution est ainsi rédigée.

Mme Laure de La Raudière. Le groupe UMP se soucie au premier chef de l’état de santé de notre industrie ferroviaire, comme, du reste, de l’ensemble des autres filières industrielles. Le Gouvernement n’est pas resté inerte puisque les Etats généraux de l’industrie ont accouché de 23 mesures ciblées concernant la plupart des filières, cependant que le Ministre de l’industrie précédent créait plusieurs comités de filières en vue de renforcer leur compétitivité, sur le marché intérieur comme à l’international. En outre, un Médiateur de la sous-traitance a été nommé et je suis persuadée qu’il pourrait se pencher utilement sur les problèmes soulevés par les auteurs de la résolution.

Nous ne sommes pas hostiles par principe à la création de la commission d’enquête mais la rédaction de la proposition de résolution ne nous satisfait pas en ce qu’elle semble préjuger de certaines conclusions, notamment pour ce qui concerne la sous-traitance. C’est pourquoi le groupe UMP s’abstiendra.

M. François Brottes. La désindustrialisation de notre pays a atteint, au cours des dernières années, un stade critique et force est d’admettre que, quelles que soient les initiatives des uns et des autres, l’industrie française régresse.

Le support de la commission d’enquête proposé par nos collègues est-il le mieux adapté alors qu’une mission d’information eût pu suffire ? Il ne nous appartient pas d’en décider et nous comprenons, à l’heure où les droits de l’opposition ne sont pas toujours reconnus, que le groupe GDR use pour la première fois de cette faculté. En outre, les commissions d’enquête disposent de pouvoirs étendus, et, au vu de la gravité de la situation de l’industrie ferroviaire, il pourra en être fait usage à bon escient.

Le groupe SRC votera la proposition de résolution, en espérant que les questions de confidentialité industrielle et commerciale ne feront pas obstacle aux travaux de la commission d’enquête.

La Commission adopte la proposition de résolution n° 2978.

TEXTE DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

ADOPTÉE PAR LA COMMISSION

Titre

Proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur la situation de l’industrie ferroviaire française : production de matériels roulants « voyageurs » et fret

Article unique

Conformément aux articles 137 et suivants du Règlement, il est créé une commission d’enquête de trente membres sur la situation de l’industrie ferroviaire française, les pratiques pénalisant la sous-traitance, les moyens de pallier ces difficultés, les solutions à mettre en œuvre pour pérenniser cette industrie – y compris dans le secteur du fret –, développer l’emploi et améliorer les conditions de travail dans la filière.

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION

Amendement n° CE 1 présenté par M. Daniel Paul, rapporteur

Article unique

Rédiger ainsi l’article unique :

« Conformément aux articles 137 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête de trente membres sur la situation de l’industrie ferroviaire française, les pratiques pénalisant la sous-traitance, les moyens de pallier ces difficultés, les solutions à mettre en œuvre pour pérenniser cette industrie – y compris dans le secteur du fret – , développer l’emploi et améliorer les conditions de travail dans la filière. »

© Assemblée nationale