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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 3305

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 avril 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI tendant à encadrer le financement public des plans sociaux,

PAR M. Francis VERCAMER,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 2964.

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 7

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 7

II.- EXAMEN DE L’ARTICLE UNIQUE 15

TABLEAU COMPARATIF 29

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 31

ANNEXE : RÉPONSE REÇUE EN APPLICATION DU PROTOCOLE ORGANISANT LA CONSULTATION DES PARTENAIRES SOCIAUX 33

introduction

Lorsque les partenaires sociaux ont inventé la notion de « plan social », il y a plus de trente ans, ils ont clairement affirmé, pour la première fois, la responsabilité sociale des entreprises vis-à-vis des salariés dont elles étaient amenées à se séparer. Le législateur a ensuite repris la notion à son compte, l’a renommée « plan de sauvegarde de l’emploi » et lui a donné un contenu exigeant : le plan de sauvegarde de l’emploi doit comporter des mesures concrètes, précises et proportionnées aux moyens de l’entreprise pour reclasser ou du moins aider à reclasser les salariés. On compte communément, en année « normale », plus de 1 000 plans sociaux dans notre pays, dont chacun correspond à au moins dix suppressions d’emploi dans une entreprise d’au moins cinquante salariés.

Alors que le chômage s’installait et que les restructurations se multipliaient, les pouvoirs publics se sont mis à accompagner financièrement les mesures mises en place par les entreprises dans le cadre des plans de sauvegarde : préretraites, cellules de reclassement, formations, etc. Même s’ils ont reculé ces dernières années, du fait notamment de la remise en cause du principe des préretraites, les financements publics des plans sociaux restent importants : plusieurs centaines de millions d’euros par an. Ces aides sont attribuées et modulées par l’administration en prenant en compte différents critères : situation économique de l’entreprise, taille, capacité contributive, qualité du plan, situation du bassin d’emploi… Ces critères apparaissent légitimes. Pourtant, il arrive que des aides soient attribuées à des entreprises qui ne rencontrent pas de réelles difficultés, qui engrangent de solides bénéfices et dont les restructurations répondent surtout à une logique de délocalisation. Ces cas de figure sont choquants.

Le groupe Nouveau Centre ne conteste pas l’inéluctabilité de certaines restructurations, ni la nécessité d’une politique active de reclassement des salariés, y compris à l’aide de fonds publics. Mais les pratiques doivent être moralisées et les abus réprimés. L’argent public n’a pas pour vocation d’accompagner socialement les délocalisations !

Dans cette optique de moralisation, le groupe Nouveau Centre s’honore d’avoir été à l’initiative de la loi n° 2010-499 du 18 mai 2010 visant à garantir de justes conditions de rémunération aux salariés concernés par une procédure de reclassement. Cette loi, défendue par notre collègue Philippe Folliot, a mis fin à la pratique détestable (résultant d’une interprétation de la législation préexistante) qui conduisait de grandes entreprises à « proposer » à leurs salariés licenciés en France des emplois de reclassement dans leurs filiales des pays à bas coût de la main d’œuvre, offres qui étaient assorties de salaires de misère.

Dans la même optique, la présente proposition de loi, rédigée par Jean-Christophe Lagarde, tend à encadrer le financement public potentiel des plans sociaux. Il ne s’agit pas d’imposer à l’administration de refuser toute aide dans telle ou telle situation, car une adaptation au cas par cas est nécessaire. Mais en posant l’obligation de prendre en compte, dans les décisions de subvention, certains critères essentiels, à commencer par la situation économique de l’entreprise, le législateur peut espérer limiter les abus, car les autorités administratives trouveront dans les termes de la loi des arguments pour résister aux pressions qui s’exercent inévitablement lorsqu’une restructuration va priver d’emploi de nombreux salariés.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine la présente proposition de loi au cours de sa séance du mardi 5 avril 2011.

M. Francis Vercamer, rapporteur. La présente proposition de loi a pour objet de donner à l’État, par le biais de nouvelles dispositions du code du travail, les moyens de s’opposer au financement des plans sociaux lorsque l’entreprise qui licencie annonce dans le même temps des résultats excédentaires. En 2009, 2 245 plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) ont été recensés, et 1 191 ont été engagés en 2010. L’actualité sociale de ces deux années, du fait de la crise, a été rythmée par des polémiques largement médiatisées, engendrées par les abus de ces sociétés qui, bien qu’affichant des bénéfices records, opèrent des restructurations entraînant fermetures d’usines et licenciements massifs. Dans nombre de cas, ces opérations s’accompagnent d’un plan de sauvegarde de l’emploi auquel l’État est amené à participer.

Au groupe Nouveau Centre, nous avons la conviction que l’État n’a pas à prendre en charge les plans de sauvegarde de l’emploi des entreprises qui ont largement les moyens de les financer. C’est la raison pour laquelle notre collègue Jean-Christophe Lagarde nous invite aujourd’hui à encadrer de façon plus précise les modalités de financement de ces plans.

Les dispositions de ce texte visent à reconnaître à l’administration, en l’occurrence aux services déconcentrés du ministère du travail, la possibilité de refuser l’attribution des aides de l’État si la situation économique de l’entreprise est bénéficiaire et lui permet de supporter seule la charge des mesures figurant dans ce plan. Le premier objectif de cette proposition de loi est donc de moraliser le recours aux aides publiques en faisant en sorte que celles-ci ne soient plus sollicitées de manière abusive.

Ce texte prévoit par ailleurs que la décision de l’administration sera communiquée à l’employeur et au comité d’entreprise avant la dernière réunion de celui-ci ; en l’absence de représentants du personnel, elle sera communiquée aux salariés par voie d’affichage. Les représentants des salariés pourront ainsi disposer de l’ensemble des informations nécessaires pour apprécier les capacités de l’entreprise à prendre les mesures d’accompagnement propres à tout PSE et pour demander d’éventuelles améliorations.

La proposition de loi apporte en outre la garantie que les modalités de financement du plan social seront connues avant le terme de la procédure.

Je vous proposerai toutefois un amendement destiné à éviter que la rédaction proposée ne conduise à ouvrir des voies de recours aux entreprises.

Ce texte rappelle que l’État a la possibilité de financer les plans sociaux mais qu’il n’est pas tenu de le faire. Il permettra surtout aux partenaires sociaux de savoir si le plan social arrêté par le comité d’entreprise est bien financé par l’État. Nous, élus, sommes en effet souvent sollicités par des représentants du personnel qui nous demandent d’intervenir auprès de l’État, de la région ou de tel ou tel financeur pour obtenir l’application de décisions prises dans le cadre d’un plan social.

M. le président Pierre Méhaignerie. Dans le courrier qu’il m’a adressé, le syndicat Force ouvrière se dit surpris de constater que la proposition de loi semble partir du postulat que le bénéfice du fonds national de l’emploi (FNE) est automatique et que les services de l’État n’ont aucun pouvoir de contrôle. Car, en réalité, ils ont un pouvoir de contrôle permanent.

Le syndicat ajoute que le fait d’être habilité ne signifie pas être obligé, que les textes prévoient que les institutions représentatives du personnel de l’entreprise sont consultées sur le projet de convention, et que l’autorité administrative a la possibilité d’obtenir des informations financières sur la situation de l’entreprise.

Chers collègues, si notre mission est de voter de nouveaux textes législatifs, ils ne doivent pas se surajouter aux textes existants. Je vous demande de veiller à une certaine stabilité, d’autant que le plan de sauvegarde de l’emploi n’est pas un exercice facile.

M. Michel Liebgott. Vous avez sans doute raison, monsieur le président, mais n’oublions pas qu’à une autre époque, en particulier dans les régions industrielles comme la Lorraine, dont je suis un élu, pour éviter les licenciements, nous avons nationalisé les pertes, que l’État a couvertes pour permettre aux entreprises de survivre. Puis, lorsque leur situation s’est améliorée, on a privatisé les profits, ce qui a permis de distribuer aux actionnaires des dividendes importants.

C’est encore vrai aujourd’hui dans cette région puisqu’en 2000, l’usine de Gandrange a fermé ses portes alors même que le groupe Arcelor-Mittal réalisait de substantiels profits. Le code du travail, notamment dans son article L. 1233-57, contient certes des dispositions qui autorisent l’autorité administrative à compléter ou modifier le plan de sauvegarde de l’emploi en tenant compte de la situation économique de l’entreprise, mais il arrive que cette autorité administrative reçoive des pouvoirs publics – et du pouvoir politique en particulier – l’injonction de mettre en œuvre ces obligations ou d’éviter d’exercer une pression trop forte sur une entreprise multinationale dont on attend par ailleurs des investissements… Il règne donc sur le sujet une certaine confusion que l’on peut attribuer à l’hésitation du politique.

M. Lagarde a peut-être raison de vouloir préciser les choses, en particulier en permettant à l’autorité administrative de refuser de signer. Mais dans ce cas, quels moyens seront concrètement mis en œuvre pour que les salariés licenciés obtiennent les indemnités qu’ils sont en droit d’attendre – et qui devraient être proportionnelles aux dividendes distribués aux actionnaires ?

Ce texte, s’il procède de bonnes intentions, n’est ni opérationnel ni très efficace pour les salariés licenciés. Nous serons peut-être amenés à l’amender en vue de donner à l’expertise syndicale les moyens d’anticiper pour éviter d’en venir à un plan de licenciements.

Dans les années qui viennent, nous devrons sans doute engager de façon plus volontariste des négociations régulières pour parvenir à une meilleure gestion des emplois et des compétences – ce qui n’existe pas actuellement, pas plus dans les petites entreprises que dans les grands groupes. Notre groupe réserve donc pour l’instant sa position, mais nous étudierons attentivement les amendements que vous nous proposerez.

M. Paul Jeanneteau. En tant que président du comité d’expansion économique du Maine-et-Loire, j’ai participé à la mise en place de quelques plans de sauvegarde de l’emploi et, en fonction de cette expérience, je m’interroge sur cette proposition de loi : n’est-elle pas de nature à régler seulement de rares cas particuliers, alors que la loi doit être générale ?

Je signale aussi à Francis Vercamer que l’État ne prend pas systématiquement en charge les PSE – je l’ai constaté à plusieurs reprises dans mon département. Or cette proposition de loi, qui encadre l’action des services déconcentrés du ministère du travail, suppose que les aides sont attribuées à tout coup. Ce n’est pas la réalité, je le répète : elles sont versées au cas par cas. En outre, est-il nécessaire de codifier des pratiques administratives ?

À titre personnel, je ne m’opposerai pas à l’adoption de ce texte, mais je partage l’opinion du président de notre commission : cette proposition participe à l’inflation des textes législatifs.

M. Roland Muzeau. C’est l’exemple scandaleux de Molex qui a incité nos collègues du Nouveau Centre à déposer cette proposition de loi, dont je souligne le bon sens et la générosité. Les Français sont en droit d’attendre que l’argent public ne serve pas à supprimer des emplois et à fermer des entreprises.

Cela étant, les députés de la Gauche démocrate et républicaine regrettent que les députés du Nouveau Centre ne soient pas à leurs côtés lorsqu’ils défendent une proposition de loi visant à interdire les licenciements boursiers ou spéculatifs. L’exemple de Molex nécessite de prendre des dispositions qui ne soient pas que d’affichage. Le Gouvernement et la majorité, de l’UMP au Nouveau Centre, sont-ils prêts à renforcer le droit du travail pour interdire les pratiques des patrons voyous ?

L’article unique de la proposition de loi, en tout cas, n’interdit pas les licenciements et n’en renchérit pas le coût, par exemple en exigeant le remboursement des aides publiques perçues au cours des années précédentes par les entreprises concernées. Il se borne à ouvrir à l’autorité administrative la possibilité de refuser de signer la convention dans le cadre de licenciements économiques. Ce droit de regard existe déjà car les services déconcentrés apprécient l’opportunité de la demande de convention au regard de critères comme le nombre de salariés concernés et la capacité de l’entreprise à financer seule leur reclassement.

L’aide de l’État doit naturellement être attribuée en fonction de la situation de l’entreprise et de ses capacités contributives. La proposition de loi, pour être utile aux salariés, devrait poser l’impossibilité pour l’autorité administrative de signer une convention avec les entreprises qui présentent un plan social uniquement dans le but d’améliorer leur productivité.

M. Dominique Dord. Nous ne pouvons que souscrire à l’idée de moraliser l’attribution des aides publiques mais, comme le précise d’ailleurs l’exposé des motifs de la proposition de loi, ce n’est qu’« un certain nombre » des mesures figurant dans le plan de sauvegarde de l’emploi qui « peuvent donner lieu à l’attribution des aides du FNE qui sont négociées avec la direction départementale du travail… » : l’autorité administrative dispose donc déjà des moyens juridiques pour, au cours de la négociation, moduler les aides, voire les refuser. Le critère de bonne santé de l’entreprise pèse naturellement dans son jugement. L’objectif de moralisation est donc largement atteint.

Par ailleurs, ce texte laisse penser que le PSE se déroule en plusieurs étapes bien distinctes, entre l’élaboration du plan et la négociation avec les services déconcentrés. Or, dans la réalité, ces services n’interviennent pas uniquement à la fin de la négociation. Si cette proposition de loi devait être adoptée, je me demande si elle ne finirait pas par se retourner contre les salariés eux-mêmes car les entreprises signeraient des plans de sauvegarde de l’emploi qui seraient moins généreux pour les salariés, parce que négociés différemment.

Les plans de sauvegarde de l’emploi reposent sur un équilibre entre l’intérêt des salariés, celui de l’entreprise et l’intérêt général. Et, même s’il arrive que le balancier penche d’un côté plus que de l’autre, il faut rappeler que tout plan social est le fruit d’une négociation. Il n’est pas sûr que cette proposition en rende l’issue plus avantageuse pour les salariés.

M. Gérard Cherpion. Avouez que l’appellation « plan de sauvegarde de l’emploi », issue de la loi de 2002, est assez mal choisie… J’ajoute que la procédure, extrêmement longue et complexe, peut être préjudiciable à certaines entreprises.

Parmi les différents types d’aides, les AS-FNE, allocations spéciales du FNE versées aux salariés qui bénéficient d’une préretraite, ont considérablement évolué et sont déjà prises en charge presque totalement par l’entreprise – à moins que celle-ci ne se trouve en situation de liquidation judiciaire, auquel cas elles sont prises en charge par la solidarité nationale, ce qui est parfaitement normal.

La situation est différente pour le reste selon que les entreprises comptent plus ou moins de 1 000 salariés. Dans les premières, le congé de reclassement, qui se substitue pendant une période définie aux autres mesures, est financé par l’entreprise. Le préfet est aussi en droit d’exiger la signature d’une convention de revitalisation, qui comporte une participation importante de l’entreprise, située entre deux et quatre SMIC par emploi supprimé, et qui permet de développer des emplois de reclassement. S’agissant des entreprises de moins de 1 000 salariés, ce recours est seulement possible mais nous disposons, vous en conviendrez, d’un arsenal étendu et complexe, d’autant que l’administration reçoit communication du PSE et peut présenter des observations ou demander des améliorations.

Cette proposition de loi a le mérite d’appeler notre attention sur un point important pour le préservation de l’emploi mais le plus important est de garantir le financement du plan social, ce à quoi contribueront peut-être mieux les amendements du rapporteur.

Mme Martine Billard. Je salue les bonnes intentions dont témoigne ce texte. Le fait que les entreprises qui réalisent d’importants profits se voient refuser l’attribution des aides du FNE ne me choque pas, au contraire, mais cela ne change pas grand-chose pour les salariés alors que notre premier souci, dans ces cas, est de faire en sorte qu’ils ne puissent être licenciés.

Cette proposition de loi ne s’applique d’ailleurs pas à toutes les situations. En effet, trop d’entreprises organisent frauduleusement leur faillite ou se mettent volontairement dans une situation financière difficile. Les 132 salariés de Plysorol, par exemple, risquent de ne percevoir aucune indemnité : de rachat en rachat, les fonds de pension – qui n’ont qu’un objectif, récupérer le marché mais pas les salariés – ont liquidé l’entreprise de manière frauduleuse en transférant les avoirs sous une autre marque. Votre proposition de loi concerne en définitive très peu de cas et n’a de surcroît aucun effet sur la situation des salariés.

M. Michel Issindou. Nous ne pouvons que souscrire au souci de moralisation du droit du travail à l’origine de ce texte, qui pourrait éventuellement faire hésiter les entreprises à engager un plan social sachant qu’elles auront à leur charge l’intégralité du coût des licenciements. En revanche, je ne vois pas l’intérêt d’une proposition de loi qui ne ferait que rappeler une règle existante. Le rapporteur, s’il veut que nous allions plus loin, devra se montrer plus convaincant.

Je m’associe aux propos de Dominique Dord s’agissant du risque pour les salariés. Car si la totalité du plan est à la charge des entreprises, il est à craindre qu’elles ne le définissent au plus juste.

Des économies pourraient être réalisées sur les plans de revitalisation. L’entreprise Caterpillar, qui se trouve dans ma circonscription, a mis en œuvre un tel plan il y a deux ans. En dépit de l’apport financier de l’État, il n’a donné que de piètres résultats compte tenu de l’impossibilité de recréer dans le bassin d’emploi de Grenoble le même type d’emplois dans l’industrie mécanique. Nous avons cependant versé 900 000 euros en trois ans à des cabinets chargés de nous présenter un bilan de formation semestriel qui est régulièrement décevant. L’argent de l’entreprise aurait été mieux utilisé s’il avait été versé directement aux salariés.

Cette proposition de loi ne me paraît pas très utile, mais les amendements permettront peut-être de l’améliorer…

M. Jean Mallot. Qu’est-ce exactement que la moralisation dans les rapports de force sociaux et comment se traduit-elle sur le plan juridique ?

Nous sommes très attachés à ce que les projets de loi soient assortis d’études d’impact. Les partenaires sociaux ont-ils été consultés pour la rédaction de cette proposition de loi ? Si oui, qu’ont-ils dit ?

M. Régis Juanico. Le département de la Loire a connu ces dernières années des plans sociaux très lourds. Si les PME ont résisté et réagi avec souplesse à la crise économique, un certain nombre de grands groupes internationaux, européens ou américains, n’ont pas hésité à supprimer d’un trait de plume des sites industriels au nom de la « rationalisation ». En engageant alors des plans sociaux extrêmement lourds – de 300 à 600 suppressions d’emplois –, ils espèrent réaliser des économies d’échelle à l’horizon de deux ou trois ans et sont donc disposés à consacrer beaucoup d’argent aux plans de sauvegarde de l’emploi.

Notre débat doit par conséquent être essentiellement centré sur la qualité des PSE. Dans ma circonscription, l’entreprise Jean Caby, qui fait partie du groupe espagnol Campofrio spécialisé dans la production de charcuteries, a fait l’objet d’un plan de sauvegarde. Rares sont les ouvriers, pour la plupart âgés de plus de 40 ans, qui ont accepté la mutation dans le Nord-Pas-de-Calais, où cette entreprise est également implantée. La mobilité géographique n’est pas une solution. Nous devons donc mettre l’accent sur les conventions de revitalisation industrielle, non seulement sur le territoire avoisinant le site mais sur le site lui-même, pour y recréer si possible de l’emploi industriel. Or si les aides à l’emploi se sont révélées utiles pour créer des emplois dans des PME, ce ne sont pas des emplois relevant des mêmes qualifications.

Lorsque plusieurs plans de sauvegarde de l’emploi surviennent sur un même territoire, l’État doit mutualiser les moyens en engageant des fonds communs destinés à recréer de l’activité.

Enfin, il faut proposer des formations de longue durée pour donner aux salariés les moins qualifiés des chances de reconversion professionnelle, ce qui exige parfois plus de deux ou trois ans.

Mme Marie-Christine Dalloz. J’ai étudié avec intérêt la proposition de loi de nos collègues du groupe Nouveau Centre et je comprends leur inquiétude face au coût important que représente pour l’État le financement des plans de sauvegarde de l’emploi.

Cela dit, les dispositifs existants permettent de répondre à leurs préoccupations. Il incombe au représentant de l’État dans les territoires d’apprécier les besoins générés par un plan de sauvegarde de l’emploi. Mais le coût de formations qui durent plusieurs années ne saurait être supporté par le plan de sauvegarde, celui-ci n’ayant pas vocation à financer la reconversion professionnelle mais l’accompagnement vers le retour à l’emploi.

Les conventions de revitalisation sont un excellent outil, et les maisons de l’emploi de remarquables leviers d’accompagnement. Dans le Haut-Jura, une très importante entreprise de jouets a été mise en liquidation fin 2007, entraînant le licenciement de plus de 500 salariés. La maison de l’emploi du Jura a suivi très efficacement le plan de sauvegarde de l’emploi mis en œuvre conjointement par l’État et par l’entreprise.

Dans ces conditions, je ne vois pas très bien l’intérêt d’une proposition qui reprend ce qui existe déjà dans la loi.

Mme Catherine Génisson. Je me félicite d’entendre la majorité saluer les conventions de revitalisation issues de la loi de modernisation sociale, adoptées sous le gouvernement Jospin…

Il vaudrait la peine de s’intéresser aux fameux cabinets de reclassement, dont les coûts sont prohibitifs pour l’entreprise – donc pour les salariés – car leurs personnels, qui se contentent fréquemment de répéter ce qu’ils ont glané dans l’entreprise ou auprès des chambres de commerce, des élus et des intercommunalités, n’apportent souvent strictement rien à l’élaboration des plans de reclassement.

Contrairement à ma collègue Marie-Christine Dalloz, je pense que les plans de formation, même ceux excédant une durée de deux ans, doivent être intégrés dans les PSE. C’est une nécessité dont les dégâts sociaux de bon nombre de plans appliqués dans la région Nord-Pas-de-Calais devrait suffire à nous convaincre.

M. le rapporteur. M. Lagarde n’avait pas pour ambition de révolutionner le dispositif du plan de sauvegarde de l’emploi, mais de l’encadrer et de permettre aux acteurs de l’entreprise de connaître, dès avant sa signature, la nature de la participation de l’État. Nous avons tous ici été sollicités par des délégués syndicaux nous demandant de quémander auprès des pouvoirs publics le financement de plans sociaux auxquels les employeurs ne pouvaient subvenir. De telles situations ne sont pas acceptables quand les entreprises sont bénéficiaires ou disposent d’une trésorerie pléthorique.

Comme plusieurs l’ont relevé, on a peut-être trop tendance en France à ne parler que des cas qui posent problème, comme celui de Molex. Toujours est-il que l’objet de cette proposition de loi est d’empêcher que de telles situations ne se reproduisent, car c’est légitimement que les Français ont été choqués de voir une entreprise refuser de financer un plan social qu’elle avait pourtant signé.

Je vous proposerai deux amendements. L’article 1233-57 – que vous avez cité, monsieur Liebgott – dispose que l’autorité administrative peut intervenir, mais il ne dit pas de quelle manière. La proposition de loi vient le compléter en prévoyant que cette même autorité peut refuser de signer les conventions permettant l’attribution des aides du FNE pour la mise en œuvre du PSE. Toutefois, l’emploi du verbe « refuser » présente l’inconvénient d’ouvrir un droit de recours, ce qui pourrait aboutir à l’inverse de l’effet recherché. Les entreprises qui n’obtiennent pas le financement de l’État pourraient en effet intenter un recours, alors même que ce financement est facultatif – l’État vient abonder le PSE pour améliorer la situation des salariés dans les entreprises en difficulté, non pour se substituer à elles. Aussi vous proposerai-je de modifier cette disposition.

M. le président Pierre Méhaignerie. Je suis loin de partager toutes les observations qui ont été faites. Le PSE est une procédure lourde, longue, difficile, qui fait peur aux entreprises. Rappelez-vous le propos du président de Nestlé, nous disant qu’il mettait tellement de temps pour fermer une entreprise en France qu’il n’avait plus celui d’en ouvrir de nouvelles… Prenons donc garde, cher rapporteur : les meilleures intentions peuvent avoir des effets dramatiques. Contrairement à ce que l’on se plaît à dire, les investissements internationaux en France ne sont pas si nombreux : ils consistent pour une bonne part dans des rachats de PME dont les sièges sociaux ou les services administratifs ne tardent en général pas à être délocalisés. Notre pays est tout de même l’un de ceux qui ont perdu le plus d’emplois industriels dans les vingt dernières années. Notre législation y est sans doute pour quelque chose. Je veux donc bien que l’on vote des textes, mais laissons à l’administration assez de souplesse pour s’adapter à chaque situation !

Je rappelle d’autre part à M. Muzeau que si on peut saliver sur les dividendes, les bonnes intentions ne font pas toujours de bonnes politiques. Entre 1983 et 1988, la part du travail dans la valeur ajoutée a baissé de huit points ; c’est entre 1974 et 1978 qu’elle a été la plus importante ; et aujourd’hui, la France se situe encore au-dessus de la moyenne européenne.

Une fois encore, prenons garde : les excès de rigidité peuvent jouer contre les salariés. S’il est légitime d’agir contre les « patrons voyous », n’oublions pas que dans 90 % des cas, les entreprises ne recourent pas au PSE par plaisir, mais bien parce qu’elles doivent s’adapter au marché. Quant aux ouvriers, ce qu’ils veulent, c’est d’abord le plein emploi et la concurrence, pour pouvoir passer d’une entreprise à une autre en fonction de leurs aspirations.

II.- EXAMEN DE L’ARTICLE UNIQUE

Avant de présenter la teneur de la présente proposition de loi, qui vise à encadrer les aides de l’État accordées aux entreprises dans le cadre de leurs plans sociaux, il est nécessaire d’en rappeler les enjeux : combien de plans sociaux en France ? Quels financements publics en cause ?

1. Le cadre juridique des plans de sauvegarde de l’emploi

Le « plan de sauvegarde de l’emploi », également connu sous son ancien nom, resté générique, de « plan social » ou sous le sigle PSE, est un dispositif visant à limiter les conséquences des licenciements collectifs.

La notion de plan social remonte à un accord des partenaires sociaux, l’avenant du 21 novembre 1974 à l’accord national interprofessionnel du 10 février 1969. La loi n° 89-549 du 2 août 1989 modifiant le code du travail et relative à la prévention du licenciement économique et au droit à la conversion, dite loi « Soisson », a ensuite donné une base légale au plan social, puis la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d’ordre social en a précisé le contenu et la portée juridique. Enfin, il a été rebaptisé « plan de sauvegarde de l’emploi » par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale.

Selon le droit en vigueur aujourd’hui, les entreprises d’au moins cinquante salariés qui envisagent de licencier pour motif économique au moins dix salariés dans une même période de trente jours (1) doivent établir un tel plan (articles L. 1233-61 et suivants du code du travail).

Ce document doit regrouper un ensemble de mesures destinées à limiter le nombre des licenciements et à favoriser le reclassement des salariés dont le licenciement est inévitable. Il « prévoit [obligatoirement] des mesures telles que » : actions de reclassement interne, création d’activités nouvelles par l’entreprise, actions de réactivation du bassin d’emploi, aides à la création/reprise d’entreprise par les salariés, actions de formation, réduction du temps de travail. Une jurisprudence exigeante a été développé quant au contenu du plan : les mesures proposées doivent être concrètes, précises et proportionnées aux moyens de l’entreprise (2) ; notamment, le nombre, la nature et la localisation des postes proposés en reclassement interne doivent être indiqués ; l’entreprise ne peut pas se contenter d’envisager un ou deux types de mesures dans la panoplie disponible… L’absence de plan de sauvegarde de l’emploi, mais aussi la nullité de celui-ci faute de mesures suffisantes et précises, entraîne la nullité de la procédure de licenciement collectif pour motif économique (3), ce qui ouvre aux salariés la perspective d’une indemnisation favorable (au moins douze mois de salaire), voire d’une réintégration, si celle-ci n’est pas devenue impossible.

Le PSE est inclus dans la procédure obligatoire de consultation des représentants du personnel sur les licenciements économiques (article L. 1233-32 du même code).

Le PSE doit par ailleurs être communiqué à l’administration chargée de l’application du droit du travail (4), et ce particulièrement dans les entreprises dépourvues de représentants du personnel (articles L. 1233-48 et L. 1233-49 du même code). L’administration est chargée de vérifier la présence d’un PSE quand la loi l’impose, le respect des procédures de consultations, mais aussi la mise en œuvre effective des mesures du PSE (article L. 1233-53 du même code). Elle peut aussi « présenter toute proposition pour compléter ou modifier » le PSE, « en tenant compte de la situation économique de l’entreprise » (article L. 1233-57 du même code).

2. La réalité prégnante des plans de sauvegarde de l’emploi

De nombreuses entreprises ont développé, au fil des années, des méthodes de gestion de leurs ressources humaines qui visent à limiter le nombre des licenciements économiques et, partant, des plans de sauvegarde de l’emploi. Ces méthodes sont évidemment plus ou moins louables : elles vont de la mise en place d’une gestion prévisionnelle de l’emploi au recours accru à la main d’œuvre temporaire, dont on se sépare facilement puisqu’il suffit de ne pas renouveler les contrats, en passant par la modulation du temps de travail pour s’adapter aux fluctuations de la demande et par la recherche de formes alternatives de rupture des contrats à durée indéterminée – ruptures négociées, en particulier dans le cadre juridique de la « rupture conventionnelle », licenciements pour cause personnelle, voire démissions suscitées par des formes de harcèlement moral…

Le fait est qu’en janvier 2011, selon les statistiques du ministère chargé du travail, plus de 145 000 personnes se sont inscrites à Pôle emploi suite à la fin d’un contrat à durée déterminée ou d’une mission d’intérim – ce qui représente presque 30 % des inscriptions du mois – contre moins de 15 000 suite à un licenciement économique – soit 3 % seulement des inscriptions à Pôle emploi. Ce même mois, 59 000 inscriptions ont été consécutives à un licenciement non économique ou à une démission (12 % des inscriptions), tandis que 20 000 ruptures conventionnelles étaient homologuées par l’administration, ce qui montre le succès de cette procédure qui n’a que deux ans et demi d’ancienneté.

Cette relative marginalisation (ou contournement) du classique licenciement économique collectif ne doit pourtant pas conduire le législateur à s’en désintéresser, car il reste bien présent. En 2010, 1 195 plans de sauvegarde de l’emploi ont encore été recensés. C’est certes deux fois moins qu’en 2009, où l’apogée de la crise financière s’était traduit par 2 245 plans, mais cela représente toujours un nombre supérieur à ceux constatés au cours des années immédiatement précédentes : 957 plans en 2007.

Évolution du nombre de plans de sauvegarde de l’emploi notifiés à l’administration

Champ : France métropolitaine.

Source : ministère du travail.

Or, les actions inscrites dans leurs plans de sauvegarde de l’emploi par les entreprises bénéficient de financements publics importants à travers de nombreux dispositifs, dont l’articulation n’est pas toujours très claire. Dans le cadre de l’avis qu’il a produit au nom de la Commission des affaires sociales sur les crédits de l’emploi pour l’exercice 2009 (5), notre collègue Gérard Cherpion relevait au demeurant que « le droit du reclassement constitue aujourd’hui une véritable arborescence juridique, ce qui suscite des problèmes en pratique. En effet l’articulation des dispositifs de reclassement en faveur des salariés licenciés pour motif économique est devenue une tâche ardue pour tous les acteurs du système ».

3. Les multiples dispositifs publics susceptibles de concourir au financement des plans de sauvegarde de l’emploi

Il est assez difficile d’identifier, parmi les dispositifs d’accompagnement des restructurations ou d’aide aux demandeurs d’emploi qui sont financés par l’État, ceux qui correspondent au cofinancement des plans de sauvegarde de l’emploi des entreprises. Certains de ces dispositifs ont un objet de prévention des licenciements, par exemple en soutenant la démarche de gestion prévisionnelle de l’emploi dans les entreprises ou en indemnisant le chômage partiel, et ne doivent donc pas être pris en compte. De même, les mesures destinées à l’ensemble des chômeurs, comme les aides à la création d’entreprise, ont une portée qui va bien au-delà de la seule problématique des PSE. Il faut également signaler l’existence d’un dispositif de préretraites qui bénéficie d’un financement de l’État, mais dont la finalité n’est pas l’accompagnement des restructurations, la cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (CAATA), laquelle est prise en charge par le fonds du même nom (le FCAATA).

Le tableau ci-dessous s’efforce donc de récapituler les seuls financements budgétaires afférents aux mesures d’accompagnement des licenciements économiques, lesquelles viennent, de fait, largement en appui des mesures des plans de sauvegarde de l’emploi, même si tous ces licenciements ne s’inscrivent pas nécessairement dans un tel plan. Y sont présentés les résultats du dernier exercice connu, 2009, et les prévisions pour 2011. Il convient en outre de rappeler qu’outre les financements de l’État, d’autres financements publics interviennent au bénéfice des licenciés économiques, à commencer par l’assurance chômage.

Récapitulation des crédits budgétaires d’accompagnement des licenciements économiques

(en millions d’euros)

 

Dépenses effectives de l’État en 2009 (crédits de paiement consommés)

Projet de loi de finances pour 2011

Mesures d’âge, dont :

271,95

122,2

– Allocations spéciales du fonds national de l’emploi (ASFNE)

151,09

76,35

– Préretraites progressives

38,13

9

– Conventions de cessation d’activité de certains travailleurs salariés (CATS)

82,73

36,85

Conventions de reclassement personnalisé (CRP) et contrats de transition professionnelle (CTP)

35,5

133,7 *

Allocations temporaires dégressives (ATD)

9,49

11

Cellules de reclassement

22,25

15

FNE formation/conventions de formation et d’adaptation

20,94

16,5

Congés de conversion

0,06

-

Aides au passage à temps partiel

0,07

-

Fonds national de revitalisation des territoires

3

-

Exonération de cotisations sociales dans les bassins d’emploi à redynamiser

8,95

6,29

Total

372,21

304,69

* Y compris 50 millions d’euros prélevés sur le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels.

Source : documents budgétaires.

a) Les mesures d’âge

Fortement critiqué, car allant à l’encontre de l’objectif d’élever le taux d’activité des seniors, le financement budgétaire des mesures d’âge, ou « préretraites », est en recul régulier depuis plusieurs années, mais reste significatif, puisqu’il a encore représenté 272 millions d’euros en 2009 sur le budget de l’Emploi.

Hormis la cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, trois dispositifs différents mobilisent encore des crédits budgétaires.

● Les allocations spéciales du fonds national de l’emploi

Les allocations spéciales du fonds national de l’emploi (AS-FNE) sont mobilisées dans le cadre d’une procédure de licenciement économique, sur la base de conventions entre l’État et les entreprises. Elles assurent une préretraite à des salariés de 57 ans au moins dont l’emploi est supprimé, jusqu’à ce qu’ils aient pu faire valoir leurs droits à la retraite ; le revenu ainsi apporté est égal à 65 % de leur salaire brut dans la limite du plafond retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale et à 50 % de celui-ci pour la part comprise entre une et deux fois ce plafond.

D’après des éléments communiqués par le ministère chargé de l’emploi, la participation financière de l’entreprise au dispositif est modulée en fonction de la qualité de son plan de sauvegarde de l’emploi, de sa taille et de sa capacité contributive ; cette modulation est effectuée à partir de taux de base fixés en fonction de l’effectif (22,5 % pour les entreprises de moins de 500 salariés, 38 % pour celles de 500 à 2 000 salariés et 48 % au-delà). En pratique, les contributions des entreprises semblent pourtant très faibles : en 2009, 0,84 million d’euros seulement, contre 151 millions provenant de l’État et 25 millions provenant de l’assurance chômage.

Selon la même source, ce dispositif concerne essentiellement des PME et des entreprises en très grandes difficultés, notamment dans des bassins d’emploi sinistrés. Afin de restreindre les conditions d’accès au dispositif, toute demande portant sur un effectif de bénéficiaires potentiels de cinq salariés et plus doit faire l’objet, depuis 2008, d’un avis préalable favorable de l’administration centrale du ministère en charge de l’emploi.

Une analyse (6) des services statistiques du ministère du travail montre que le dispositif AS-FNE est plutôt tourné vers le monde ouvrier et l’industrie : au 31 décembre 2008, 43 % des bénéficiaires en cours étaient d’anciens ouvriers (qualifiés ou non) et 37 % d’anciens employés ; ils provenaient à 60 % de l’industrie et 65 % étaient des hommes.

Le tableau ci-dessous montre l’évolution du recours à ce dispositif, certes en recul, mais avec un léger ressaut en 2009, lié à la crise.

Evolution du recours aux préretraites AS-FNE

 

Nombre de conventions signées

Entrées de salariés

« Stock » de bénéficiaires en fin d’année

2002

2 036

6 803

36 705

2003

2 191

7 071

32 301

2004

1 913

4 855

25 883

2005

1 628

4 048

20 940

2006

1 452

3 631

16 626

2007

1 064

3 400

14 200

2008

666

1 892

11 352

2009

818

1 766

9 200

2010

n.d.

1 197

7 044

Sources : questionnaires budgétaires au Gouvernement, « Analyses » de la DARES n° 062 de septembre 2010, tableau de bord des politiques de l’emploi pour 2010.

● Les préretraites progressives

Le dispositif des préretraites progressives, créé au début des années 1980, a été fermé au 1er janvier 2005. Depuis cette date, il n’est plus possible de signer de convention de préretraite progressive.

D’après la note précitée des services statistiques du ministère du travail, ce dispositif a surtout été utilisé dans les activités de service (69 % des bénéficiaires en cours au 31 décembre 2008 en étaient issus), au bénéfice d’anciens employés (51 % des bénéficiaires à la même date, contre 20 % seulement d’anciens ouvriers).

Evolution du recours aux préretraites progressives

 

Nombre de conventions signées

Entrées de salariés

« Stock » de bénéficiaires

2002

3 690

15 102

43 897

2003

2 689

15 940

48 657

2004

2 085

7 725

44 742

2005

-

5 096

36 604

2006

-

-

26 753

2007

-

-

15 949

2008

-

-

8 114

2009

-

-

3 525

Juin 2010

-

-

1 685

Source : questionnaires budgétaires au Gouvernement.

● La cessation anticipée d’activité de certains travailleurs salariés (CATS)

Le dispositif de cessation anticipée d’activité de certains travailleurs salariés (CATS) est destiné à des salariés ayant travaillé en équipes successives, ou à la chaîne, ou de nuit, pendant quinze ans au moins, ou handicapés.

La mise en place de la mesure, cofinancée par l’État, n’est possible que si un accord de branche le prévoit. Quant aux entreprises, pour en bénéficier, elles doivent avoir préalablement signé avec leurs organisations syndicales un accord de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences, portant en particulier sur les mesures destinées à assurer l’adaptation des compétences des salariés âgés dans l’entreprise.

De nombreux accords de branche ont été conclus à partir de 1999 dans des activités diverses : la métallurgie, la chimie, l’agro-alimentaire, le papier-carton, les instruments à écrire, les carrières et matériaux, la presse, la banque, la plasturgie, le bâtiment et les travaux publics, le textile, l’industrie du verre, l’imprimerie graphique, le caoutchouc, les tuiles et briques, les industries laitières, les centres d’insémination animale, les bureaux d’étude et sociétés de conseil, la production des eaux et boissons sans alcools, les cristalleries, les industries charcutières, la chaussure, la boucherie… Au total, depuis la création du dispositif jusqu’à mi-2006, ce sont une quarantaine d’accords de branche et environ 670 conventions qui ont été conclues.

D’après la note précitée des services statistiques du ministère du travail, le dispositif CATS est très ciblé sur le monde ouvrier, lequel représentait, au 31 décembre 2008, 74 % des bénéficiaires en cours ; il est également très masculin (85 % d’hommes à la même date).

Le dispositif CATS est en extinction. Depuis 2005, il n’est plus possible d’étendre le dispositif à de nouvelles branches par accord à ce niveau. En 2010, un seul accord de branche continuait à produire des effets en termes d’adhésions possibles, l’ensemble des autres accords étant arrivés à leur terme. Le projet de loi de finances pour 2011 évaluait à environ 3 500 le « stock » résiduel de bénéficiaires.

Évolution du recours au dispositif CATS

 

Entrées de salariés

« Stock » de bénéficiaires en fin d’année

2002

10 098

18 070

2003

16 526

31 213

2004

15 292

39 747

2005

9 615

40 431

2006

2 851

31 501

2007

982

20 867

2008

413

12 302

2009

175

6 298

Source : « analyses » de la DARES n° 062 de septembre 2010.

b) Le financement des cellules de reclassement

Ce dispositif, créé en 1989, est réservé aux entreprises de moins de 1 000 salariés (et n’appartenant pas à un groupe de plus de 1 000 salariés ou à un groupe soumis à l’obligation de constitution d’un comité d’entreprise européen) confrontées à une restructuration. Le critère de taille n’est pas opposable aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaire.

Le dispositif a pour objet le financement de cellules de reclassement des salariés, lesquelles peuvent être « interentreprises ». Dans la limite de 2 000 euros par bénéficiaire, la participation de l’État est modulable – jusqu’à 50 % du budget prévisionnel de la cellule, voire 75 % en cas de cellule interentreprises –, en fonction notamment de la qualité du plan de sauvegarde de l’emploi et de la structuration de reclassement mis en œuvre, ainsi que de la taille de l’entreprise et de sa situation économique. Les entreprises dans l’incapacité d’assumer la charge financière de leur contribution peuvent être totalement exonérées : plus de 80 % des conventions signées correspondent à ce cas de figure.

D’après des éléments transmis par les services du ministère chargé de l’emploi, la part des ouvriers qualifiés parmi les bénéficiaires des cellules de reclassement dépasserait 35 %. Ce public serait plutôt masculin (37 % de femmes seulement) et âgé.

Le tableau ci-dessous montre l’évolution du dispositif depuis une décennie.

Évolution du recours aux cellules de reclassement et de leur financement public

 

Nombre de conventions signées

Nombre de bénéficiaires potentiels

Coût total pour l’État

(en millions d’euros)

1999

538

22 623

12,42

2000

472

19 105

13,55

2001

474

22 761

15,25

2002

646

33 567

20,16

2003

917

44 288

30,37

2004

844

33 056

33,57

2005

747

24 642

30,93

2006

633

23 045

22,95

2007

546

19 902

22,48

2008

386

14 573

19,8

2009

717

29 330

22,24

2010

n.d.

16 622

22,7

Source : ministère du travail, notamment questionnaires budgétaires.

On relève que le nombre de conventions de cellules de reclassement a augmenté au cours de l’année 2009 sous l’effet de la crise économique. En 2010, toutefois, on est revenu à un niveau d’entrées dans le dispositif plus modéré.

Le fait est aussi que ce dispositif coexiste avec d’autres mesures d’accompagnement qui bénéficient également de financements publics et peuvent concerner les mêmes personnes, comme la convention de reclassement personnalisé (CRP) et le contrat de transition professionnelle (CTP, voir infra).

Dans le cadre de son avis précité sur les crédits de l’emploi pour l’exercice 2009, notre collègue Gérard Cherpion avait tracé un « bilan en demi-teinte » des cellules de reclassement, notant en particulier des résultats en termes de retour à l’emploi des bénéficiaires qui étaient souvent en deçà de ceux obtenus notamment dans le cadre des contrats de transition professionnelle, ainsi qu’un accès limité des intéressés à des actions de formation. Une étude postérieure du Conseil économique, social et environnemental (7) s’inscrit dans la même optique, relevant pêle-mêle une « évaluation lacunaire », une « méthodologie de reclassement plutôt hétérogène », des « difficultés liées à la coordination et à la mobilisation des acteurs », un « dispositif faiblement contrôlé », une « articulation délicate avec un droit du reclassement complexe et peu lisible »…

D’après une réponse à un questionnaire budgétaire au Gouvernement, la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) mène une réflexion sur un recentrage des cellules de reclassement :

– sur des publics tels que les intérimaires et salariés en fin de contrat à durée déterminée (lesquels, n’étant pas licenciés pour motif économique, se retrouvent généralement pour l’heure en dehors de tous les dispositifs),

– sur certaines missions, par exemple la transition entre l’accompagnement collectif des salariés licenciés pour motif économique et leur accompagnement individuel mis en œuvre dans le cadre de la CRP ou du CTP.

c) Les allocations temporaires dégressives

Les allocations temporaires dégressives (ATD), créées en 1990, visent à favoriser le reclassement externe des salariés licenciés pour motif économique, à travers une compensation financière, partielle ou totale, de la perte de salaire qu’ils subissent en acceptant un nouvel emploi moins bien rémunéré dans l’année suivant leur licenciement. Cette compensation est versée pour deux ans maximum et est dégressive.

Le financement de la mesure est en principe partagé entre l’État et l’entreprise. L’aide de l’État est alors plafonnée à 75 % du montant de l’allocation et à 200 euros par mois. Cette aide peut toutefois couvrir la totalité des coûts et être portée à 300 euros dans le cas d’entreprises dans l’incapacité de contribuer au financement du dispositif ou situées dans des bassins d’emploi sinistrés, sur décision conjointe du ministre chargé de l’emploi et du ministre chargé du budget (par délégation, du préfet de département et du trésorier payeur général).

Évolution du recours aux allocations temporaires dégressives et de leur financement

 

Nombre d’adhésions

Coût total pour l’État

(en millions d’euros)

1999

2 501

10,83

2000

3 012

14,92

2001

3 095

13,87

2002

2 963

11,3

2003

3 630

10,82

2004

5 414

13

2005

3 765

13,9

2006

4 057

10,7

2007

3 927

8,3

2008

4 476

9,09

2009

5 152

9,49

2010

4 678

9,8

Source : ministère du travail, notamment questionnaires budgétaires.

d) Le « FNE formation »

Les conventions d’adaptation et de formation du FNE, d’une durée d’un an, ont pour objectif de faciliter la continuité de l’activité et de favoriser l’adaptation à de nouveaux emplois des salariés dont les entreprises sont affectées par la crise économique et financière. La vocation première de cet outil est de favoriser le maintien dans l’emploi en interne, mais l’aide du FNE peut, sous certaines conditions, faciliter les reclassements externes des salariés. Ce dispositif doit donc être décrit parmi ceux qui sont susceptibles d’être sollicités dans le cadre de restructurations, même s’il n’est probablement pas mobilisé principalement dans le cadre de plans de sauvegarde de l’emploi.

Évolution du recours au « FNE formation » et de son financement

 

Nombre de

conventions signées

Nombre de

bénéficiaires potentiels

Coût total pour l’État

(en millions d’euros)

1999

175

5 383

8,48

2000

131

3 203

6,05

2001

168

2 092

7,59

2002

105

2 500

6,59

2003

73

2 397

5,74

2004

67

1 297

4,98

2005

60

1 259

4,12

2006

51

1 263

9,56

2007

70

1 747

6,94

2008

48

1 319

3,17

2009

252

8 078

20,94

2010

n.d.

18 129

34,8

Source : ministère du travail, notamment questionnaires budgétaires.

La mesure est mise en œuvre en priorité (mais pas exclusivement) au sein des entreprises de moins de 250 salariés, au bénéfice des plus exposés à la perte de leur emploi et des moins qualifiés. Le taux de financement par l’État varie entre 25 % et 80 % selon trois critères (type de formation, taille de l’entreprise et public concerné). Les entreprises en procédure judiciaire (sauvegarde, redressement ou liquidation) sont toutefois exclues du dispositif.

e) Les dispositifs de droit commun pour les licenciés économiques

Enfin, l’Etat apporte, en complément de l’assurance chômage, des moyens afin que les licenciés économiques bénéficient d’un accompagnement renforcé par rapport aux autres demandeurs d’emploi.

● La convention de reclassement personnalisé (CRP)

Depuis 2005, la convention de reclassement personnalisé (CRP) est la mesure de droit commun pour les salariés dont le contrat à durée indéterminée est rompu pour motif économique, sous réserve que leur entreprise ait moins de 1 000 salariés (et n’appartienne pas à un groupe de plus de 1 000 salariés ou à un groupe soumis à l’obligation de constitution d’un comité d’entreprise européen). Outre un accompagnement personnalisé, la CRP comporte, depuis son amélioration en 2009, une indemnisation à hauteur de 80 % du salaire brut pendant douze mois (au plus) sous réserve que les bénéficiaires aient au moins deux ans d’ancienneté, et ce à compter de la fin du contrat de travail (sans délai de carence). Les intéressés peuvent aussi percevoir une indemnité différentielle de reclassement s’ils acceptent un nouvel emploi moins bien rémunéré.

On a décompté 140 000 adhésions à la CRP en 2009 et 118 000 en 2010.

● Le contrat de transition professionnelle (CTP)

Le contrat de transition professionnelle (CTP) a été expérimenté de 2006 à fin 2010 dans certains bassins d’emploi, au bénéfice des salariés de ces bassins concernés par une rupture pour motif économique de leur contrat à durée indéterminée. Lancé initialement dans sept bassins d’emploi, le CTP a progressivement été étendu pour être finalement applicable dans 32 bassins. Les partenaires sociaux discutent présentement du dispositif unique qui devrait succéder à la fois à la CRP et au CTP.

Le CTP présente une indemnisation équivalente à celle offerte par la CRP, mais est plus avantageux pour les salariés sur plusieurs plans :

– aucune condition d’ancienneté dans l’entreprise ou de droits ouverts aux allocations d’assurance chômage n’est exigée pour en bénéficier ;

– l’accompagnement est renforcé (un référent pour 30 bénéficiaires) ;

– l’accès à la formation est facilité (plus de 75 % des adhérents ont pu bénéficier d’une formation) ;

– il est possible d’insérer dans le CTP des périodes de travail en entreprise, sous forme de contrat à durée déterminée ;

– le retour à l’emploi est encouragé par la faculté de « capitaliser » sous forme de prime une partie des droits résiduels à allocation en cas de reprise d’emploi avant le terme du contrat, ainsi que par l’aménagement d’un droit au retour en CTP en cas d’échec du reclassement.

On a décompté 17 000 adhésions au CTP en 2009 et 20 000 en 2010.

4. L’objet de la proposition de loi : encadrer le financement public des plans de sauvegarde de l’emploi

Les plans de sauvegarde de l’emploi, ou plus communément « plans sociaux », restent nombreux, comme on l’a dit, et sont particulièrement ressentis par nos concitoyens. Ils donnent lieu à des abus et il est légitime de chercher à les moraliser.

En particulier, au regard des masses importantes de fonds publics dont les mesures des plans sociaux peuvent bénéficier, il apparaît légitime d’encadrer ces fonds, car il est choquant d’apprendre régulièrement que telle entreprise fortement bénéficiaire a pourtant obtenu un concours de l’État dans le cadre d’une opération de restructuration.

À cette fin, l’alinéa 1 du présent article unique complète par un nouvel article L. 1233-57-1 la sous-section du code du travail intitulée « Information et intervention de l’autorité administrative », qui est elle-même une sous partie de la section consacrée aux « grands » (8) licenciements économiques collectifs.

L’alinéa 2 affirme la prérogative qu’a l’« autorité administrative » – en pratique les services déconcentrés du ministère du travail, DIRECCTE au niveau régional et « unités territoriales » au niveau départemental – de refuser l’attribution des aides de l’État dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

Pour justifier ce refus, il est proposé de se référer à la notion de « situation économique de l’entreprise », car celle-ci est déjà présente dans le code du travail, notamment à l’article L. 1233-57 qui habilite l’administration à proposer toute modification du plan de sauvegarde de l’emploi « en tenant compte » de cette situation. L’administration du travail, destinataire de tous les éléments relatifs au plan de sauvegarde de l’entreprise, est à même d’apprécier la situation économique de l’entreprise.

Enfin, il convient de souligner que ces aides, qu’elles transitent financièrement par l’entreprise (c’est le cas par exemple des cellules de reclassement) ou qu’elle soient attribuées directement aux salariés (c’est le cas de l’allocation temporaire d’activité), bénéficient in fine aux salariés. L’absence de concours de l’État impliquera donc nécessairement que l’entreprise finance elle-même l’intégralité des dispositifs du PSE. La dernière phrase de l’alinéa apporte cette garantie.

Les alinéas 3 et 4 permettent une information des salariés sur les aides publiques dont bénéficiera ou non l’entreprise au titre du PSE : la décision de l’administration devra être communiquée aux représentants du personnel ou, à défaut de ceux-ci, affichée dans l’entreprise. Cette décision devra avoir été prise avant la dernière réunion du comité d’entreprise – étant rappelé que le code du travail impose deux réunions au moins de celui-ci sur les projets de grands licenciements collectifs, voire trois s’il y a recours à l’assistance d’un expert-comptable, et ce sans compter les réunions tenues sur le volet économique du plan de compression des effectifs. De la sorte, la position du comité d’entreprise pourra prendre en compte les aides publiques éventuellement accordées, ce qui donnera aux représentants des salariés plus d’opportunités pour obtenir des améliorations du PSE : on rappelle que le chef d’entreprise est tenu de « mettre à l’étude » les « suggestions » du comité d’entreprise et de leur donner une « réponse motivée » (article L. 1233-33 du code du travail).

*

Article unique : Encadrement des aides de l’État dans le cadre des plans de sauvegarde de l’emploi

La Commission est saisie de l’amendement AS 1 du rapporteur.

M. le rapporteur. Pour répondre à Jean Mallot, Jean-Christophe Lagarde, auteur de la proposition de loi, a rencontré un certain nombre de partenaires sociaux.

Mon premier amendement vise à modifier l’alinéa 2 de l’article unique. Je l’ai dit tout à l’heure, l’emploi du verbe « refuser » pose en effet problème. Tout d’abord, il a une connotation négative qui peut dérouter dans un texte tel que celui-ci. Ensuite, il ouvre un doit de recours contre la décision, ce qui débouchera vraisemblablement sur l’élaboration d’une jurisprudence réduisant à néant le pouvoir discrétionnaire de l’administration. Il m’a donc semblé préférable de remplacer le verbe « refuser » par le verbe « attribuer ». Vous remarquerez que je conserve le verbe « pouvoir » afin de maintenir ce pouvoir discrétionnaire, et donc la souplesse que le président Méhaignerie souhaite préserver.

Outre la « situation économique » de l’entreprise, je propose d’autre part de prendre également en compte ses moyens. Beaucoup d’entreprises bénéficiaires n’ont en effet pas la trésorerie suffisante pour financer un plan social. Laissons donc l’administration apprécier dans chaque cas si elles ont les moyens d’y faire face.

Enfin, cet amendement vise non seulement l’entreprise, mais aussi le groupe auquel elle appartient, afin que celui-ci ne puisse s’exonérer de ses responsabilités.

M. Michel Liebgott. Cet amendement ne tient-il pas du repli stratégique ? Nombre d’entre nous ont évoqué les conventions de revitalisation, qui jouent souvent un rôle positif. Je partage certes les remarques qui ont été faites sur la rémunération des cabinets, mais certains ont su mettre en œuvre des conventions d’ancrage territorial en allant au-delà des conventions de revitalisation. Contrairement à ce qui a pu être dit, il existe donc des marges de manœuvre, que les entreprises savent utiliser pour peu qu’on le leur demande.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel AS 2 du rapporteur, puis l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

En conséquence, la Commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la Commission

___

Proposition de loi tendant à encadrer le financement public des plans

sociaux

Proposition de loi tendant à encadrer le financement public des plans

sociaux

Article unique

 

Après l’article L. 1233-57 du code du travail, il est inséré un article L. 1233-57-1 ainsi rédigé :

 

« Art. L. 1233-57-1. – L’autorité administrative peut, au vu de la situation économique de l’entreprise, refuser de signer les conventions permettant l’attribution des aides du fonds national de l’emploi pour la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’emploi. Dans ce cas, le financement de ce dernier est à la seule charge de l’entreprise.

 
   

« Cette décision est rendue avant la dernière réunion du comité d’entre-prise. Elle est communiquée à l’em-ployeur et au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.

« La décision de l’autorité administrative est notifiée à l’employeur et communiquée au comité d’entreprise, avant sa dernière réunion, ou, à défaut, aux délégués du personnel. »

Amendement AS 2

   

« En l’absence de représentants du personnel, cette décision est portée à la connaissance des salariés par voie d’affichage sur les lieux de travail. »

 
   

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AS 1 présenté par M. Francis Vercamer, rapporteur

Article unique

Rédiger ainsi l’alinéa 2 :

« Art. L. 1233-57-1. – L’autorité administrative peut attribuer des aides du fonds national de l’emploi pour la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’emploi, au vu, notamment, de la situation économique et des moyens de l’entreprise et, le cas échéant, de l’unité économique et sociale ou du groupe auxquels elle appartient. À défaut de ces aides, le financement de ce plan est à la seule charge de l’entreprise. »

Amendement n° AS 2 présenté par M. Francis Vercamer, rapporteur

Article unique

Rédiger ainsi l’alinéa 3 :

« La décision de l’autorité administrative est notifiée à l’employeur et communiquée au comité d’entreprise, avant sa dernière réunion, ou, à défaut, aux délégués du personnel. »

annexe : RÉPONSE REÇUE EN APPLICATION DU PROTOCOLE ORGANISANT LA CONSULTATION DES PARTENAIRES SOCIAUX

Le 16 février 2010, la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale a adopté un protocole relatif à la consultation des partenaires sociaux sur les propositions de lois à caractère social relevant du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle. Dans ce cadre, le président de la commission des affaires sociales a sollicité les huit organisations de salariés et d’employeurs reconnues représentatives au plan national et interprofessionnel. À la date de finalisation du présent rapport, seule la réponse du syndicat Force ouvrière avait été reçue.

© Assemblée nationale

1 () Cette obligation concerne aussi les entreprises qui ont procédé à plus de dix licenciements économiques sur trois mois consécutifs, ou plus de dix-huit sur la dernière année civile, et souhaitent procéder à de nouveaux licenciements.

2 () La Cour de cassation l’a rappelé dans plusieurs arrêts depuis l’arrêt fondateur « Everite » du 17 mai 1995.

3 () Jurisprudence « La Samaritaine » de la Cour de cassation, 13 février 1997.

4 () Il s’agissait traditionnellement des directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP), mais, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), celles-ci ont été fusionnées avec d’autres services sous l’égide des nouvelles directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE). La présence locale des services de l’inspection du travail est désormais assurée par des « unités territoriales ».

5 () Assemblée nationale, XIIIe législature, avis n° 1199, tome XIII.

6 () DARES, Analyses n° 062, septembre 2010.

7 () Présentée en 2010 par Mme Marcelle Ramonet.

8 () Concernant dix salariés et plus sur une période de trente jours.