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N
° 4417

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 février 2012.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque relatif à la coopération en matière administrative,

par M. Jean-Paul  LECOQ

Député

___

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Voir les numéros  :

Sénat : 137, 722, 723 et T.A. 184 (2010-2011).

Assemblée nationale : 3660.

INTRODUCTION 5

I – UN APERÇU DES RELATIONS FRANCO-SLOVAQUES 7

A – DEUX PAYS LIÉS PAR DES RELATIONS ÉTROITES 7

1) La volonté de développer des partenariats étroits 7

2) Les échanges bilatéraux franco-slovaques 7

3) Une dimension culturelle importante 8

B – LE PARTENARIAT STRATÉGIQUE FRANCO-SLOVAQUE DE 2008 9

1) L’ambition du partenariat stratégique 9

2) Les déclinaisons du partenariat 10

II – LA COOPÉRATION ADMINISTRATIVE BILATERALE 13

A – L’ADMINISTRATION PUBLIQUE SLOVAQUE 13

1) Une organisation administrative fortement décentralisée 13

2) Une administration publique qui a besoin d’être soutenue 14

B – L’ACCORD DE COOPÉRATION ADMINISTRATIVE DE 2009 15

1) L’ambition et le contenu de l’accord 15

2) La modestie de la mise en œuvre 16

a) Un texte appliqué avant d’être ratifié 16

b) Une coopération à l’étiage 17

CONCLUSION 19

EXAMEN EN COMMISSION 21

_____

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 23

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi qui est aujourd’hui soumis à l’examen de la commission des affaires étrangères porte sur l’accord relatif à la coopération administrative signé entre la France et la République slovaque le 21 avril 2009.

Après vous avoir donné un aperçu des relations bilatérales franco-slovaques, marquées par une volonté commune d’intensifier les relations, votre Rapporteur vous présentera le contenu de l’accord et l’état de la coopération administrative.

I – UN APERÇU DES RELATIONS FRANCO-SLOVAQUES

A – Deux pays liés par des relations étroites

1) La volonté de développer des partenariats étroits

La France a été l’un des premiers pays à établir des relations diplomatiques avec la Slovaquie, après la proclamation de son indépendance, le 1er janvier 1993, trois ans après la « Révolution de velours ». Traditionnellement bonnes et ancrées dans l’histoire, les relations bilatérales ont depuis lors été denses, tout particulièrement au cours de la dernière décennie et marquées d’une volonté réciproque de les renforcer.

En octobre 2007, la rencontre du Premier ministre slovaque, Robert Fico, avec le Président de la République, a permis de confirmer la continuité des choix européens du pays et a mis en évidence la convergence entre les deux pays sur de nombreux sujets communautaires.

Le Président de la République avait alors évoqué sa volonté d’établir un partenariat solide avec tous les pays d’Europe centrale, en particulier la Slovaquie. C’est ainsi qu’un accord de Partenariat stratégique franco-slovaque a été signé à Paris le 17 septembre 2008, sous la forme d’une déclaration politique assortie d’un plan d’action opérationnel déclinant divers volets de coopération : politique, économique, énergie, défense, administration publique, éducation. Votre Rapporteur le présentera plus loin.

Indépendamment de ce cadre, les relations entre les deux pays sont denses, tant sur le plan économique que culturel. La place du français, notamment, est loin d’y être négligeable.

2) Les échanges bilatéraux franco-slovaques

Ces dernières années, les échanges commerciaux franco-slovaques se sont accélérés grâce notamment aux investissements de PSA Peugeot-Citroën, qui a développé une capacité de production de 300 000 véhicules. Dans les environs de Bratislava, le groupe fabrique depuis fin 2006 la Peugeot 207 et la Citroën C3 Picasso. Cette implantation dans un pays qui est devenu le 1er producteur mondial d’automobiles par habitant a facilité l’arrivée d’une trentaine d’équipementiers français - Valeo, Faurecia, Total produits dérivés, Plastic Omnium etc. -, qui représentent quelque 6 000 emplois indirects. Les marques françaises détiennent aujourd’hui 20 % des parts de marché des véhicules neufs en Slovaquie, au deuxième rang derrière Volkswagen/Skoda.

D’une manière générale, la France est désormais le deuxième investisseur étranger hors secteur bancaire après l’Allemagne. Le capital cumulé des entreprises à participation française est supérieur à 5 milliards d’euros, réparti entre 390 filiales pour un effectif d’environ 35 000 personnes. Les plus grands investissements français sont ceux effectués par Gaz de France (1,4 milliard d’euros), France Télécom/Orange (1,1 milliard) et PSA (1 milliard).

S’agissant des échanges bilatéraux, leur volume atteint aujourd’hui 4,3 milliards d’euros, la France étant le troisième partenaire commercial de la Slovaquie. Précisément, notre pays est le troisième client du pays, derrière l’Allemagne et la République tchèque, et son septième fournisseur, derrière l’Allemagne, la République tchèque, la Russie, la Hongrie, la Pologne, la Corée et la Chine. La France représente 4,7 % des importations et 7,8 % des exportations slovaques. Parmi les perspectives importantes, on relève dans le domaine nucléaire un projet d’extension de la centrale de Bohunice qui intéresse les entreprises françaises. Aucun calendrier n’a encore été fixé, mais la décision des autorités slovaques pourrait intervenir courant 2012 pour une mise en service prévue en 2020.

3) Une dimension culturelle importante

La coopération française s’appuie sur l’Institut français de Bratislava et sur deux Alliances françaises, à Banská Bystrica et à Košice, deuxième ville de Slovaquie, qui a par ailleurs été désignée avec Marseille capitale européenne de la culture en 2013. La diffusion du français est en progrès à la faveur notamment d’une hausse de l’implication française : une école française a été ouverte en 2003 à Bratislava et l’on relève en outre cinq sections bilingues de lycées, cinq filières universitaires partiellement bilingues dans les domaines de la gestion et de l’économie, grâce à l’ouverture en septembre 2011 d’un Institut universitaire franco-slovaque. Dans l’enseignement général, on constate que l’enseignement du français se renforce, avec aujourd’hui près de 10 % des élèves concernés.

La politique de promotion du français s’appuie également sur l’offre de formation universitaire, la France étant la sixième destination des étudiants slovaques, après la République tchèque, la Hongrie, l’Allemagne, l’Autriche et les Etats-Unis, et la deuxième destination de boursiers du système Erasmus après l’Allemagne : 400 étudiants slovaques sont en France à ce titre.

Il existe par ailleurs depuis 1991 une section franco-slovaque au sein du lycée Camille Jullian de Bordeaux, qui scolarise des jeunes slovaques. Enfin, la Slovaquie est devenue membre observateur de la Francophonie lors du Sommet de Beyrouth en 2002. Notons enfin que l’ambassade de France disposait en 2011 d’un peu plus de 1,1 million d’euros pour sa programmation culturelle, scientifique et technique.

B – Le partenariat stratégique franco-slovaque de 2008

1) L’ambition du partenariat stratégique

Le partenariat stratégique se traduit par deux documents complémentaires : une déclaration politique et un plan d’action, tous deux signés le 17 septembre 2008.

La déclaration politique souligne que les deux Parties souhaitent amplifier la dynamique créée par l’adhésion de la Slovaquie à l’Union européenne et enrichir le dynamisme des sociétés civiles des deux pays, de leurs entreprises ainsi que la coopération décentralisée « multiforme et vivante ».

En conséquence, cinq axes sont définis qui portent sur le dialogue politique bilatéral dans le cadre de l’Union européenne, les deux pays partageant la même vision d’une Europe forte et solidaire, fondée sur des valeurs communes. Pour ce dialogue renforcé, la France et la Slovaquie conviennent de consultations conjointes sur leurs positions et d’initiatives communes dans le cadre de rencontres et de consultations annuelles sur toutes les questions d’intérêt stratégique de l’Union. Elles réaffirment leur attachement à la politique de voisinage, aux bonnes relations avec la Russie, et s’engagent à renforcer leur combat commun pour la diversité culturelle et le multilinguisme.

Le dialogue sera notamment renforcé sur les questions politico militaires, dans la mesure où les deux Parties, membres de l’OTAN, ont des intérêts communs de sécurité. Dans ce cadre, des consultations sont prévues sur les aspects sécuritaires, y compris en matière de prévention de terrorisme, afin d’harmoniser les positions et de travailler sur des objectifs ambitieux pour une coopération bilatérale en matière d’interopérabilité et d’armement.

Le domaine énergétique est un autre aspect important du partenariat stratégique, qui porte notamment sur le nucléaire et la maîtrise de l’énergie. A cet effet, les deux Parties soutiennent la mise en place d’une politique européenne ambitieuse, autour d’un marché intérieur de l’énergie et du renforcement du volet extérieur de la politique européenne. La France et la Slovaquie s’engagent à développer leur coopération industrielle, scientifique et technique dans le domaine nucléaire civil.

Les parties souhaitent également renforcer leurs échanges économiques et commerciaux, d'ores et déjà bons, comme en témoignent la place de la France parmi les investisseurs en Slovaquie que votre Rapporteur a soulignée. Des synergies sont à rechercher et à développer, dans le cadre du marché intérieur. La promotion des PME, la préparation de l’entrée de la Slovaquie dans la zone euro, effective depuis le 1er janvier 2009, le développement du secteur agroalimentaire, la PAC, ainsi que les transports et projets d’infrastructures, sont signalés comme devant faire l’objet d’une « attention particulièrement soutenue » dans ce cadre.

Enfin, la « coopération administrative et dans le cadre de l’espace Schengen » est le dernier volet que prévoit de développer le partenariat stratégique. L’intensification des liens entre différents ministères est prévue, qui met notamment l’accent sur les actions à engager en matière de protection de droits de l’homme, d’administration publique, de formation des magistrats, « en ayant notamment à l’esprit la prééminence du droit romain et la place du français dans les institutions juridiques européennes. » Enfin, la coopération opérationnelle en matière de surveillance des frontières, de lutte contre l’immigration clandestine, de formation de policiers et de douaniers est aussi envisagée.

2) Les déclinaisons du partenariat

Le plan d’action joint à la déclaration politique du partenariat en détaille la mise en œuvre. Il précise les thématiques des consultations politiques, destinées notamment à favoriser les convergences sur les dossiers prioritaires de la présidence française de l’Union européenne alors à venir. Des échanges de fonctionnaires, diplomates et autres, sont notamment prévus et la dimension culturelle et linguistique est mise en exergue, la France s’engageant à promouvoir l’enseignement du slovaque en France, cependant que des filières bilingues et autres programmes d’échanges et de rencontres seront développés de part et d’autre.

Des détails sont également apportés sur la dimension politico-militaire, de défense et d’armement de l’accord, qui prévoit la réalisation de manœuvres conjointes, un programme de coopération en matière de défense nucléaire, biologique et chimique et l’étude de nouvelles opportunités en matière d’armements.

S’agissant du volet énergétique et environnemental du partenariat, des positions communes seront recherchées sur les mesures législatives européennes, - marché intérieur de l’électricité et du gaz, paquet énergie-climat -, et la coopération dans le secteur nucléaire se verra renforcée. Un accord spécifique sera signé, les positions seront harmonisées au sein des enceintes communautaires, la coopération scientifique sera renforcée et des actions de formation d’ingénieurs, notamment en ce qui concerne les aspects sécuritaires de la filière, seront entreprises. D’autres aspects seront développés en parallèle dans le but de maintenir un parc de production énergétique diversifié dans les deux pays, sur les aspects nucléaire, thermique et hydraulique. La dimension environnementale privilégiera la coopération en matière de promotion des énergies non émettrices de CO2.

En matière économique, il est prévu de favoriser la poursuite du développement de la coopération entre les deux pays. Des échanges d’expériences en matière de commerce extérieur sont envisagés, des manifestations communes seront conduites pour renforcer la présence des entreprises des deux partenaires sur leurs territoires respectifs. Le secteur des PME est une cible privilégiée de la coordination des approches faites en matière d’innovation. La promotion des IDE sera orientée vers les industries de technologies avancées. Le partenariat sur les matières agricoles sera renforcé. Enfin, les questions touchant aux infrastructures transeuropéennes font également l’objet de développements dans le partenariat, avec notamment une réflexion sur un axe ferroviaire Paris-Strasbourg-Vienne-Bratislava.

Pierre angulaire de la relation bilatérale, l’accord de partenariat stratégique a été ensuite décliné en sept accords sectoriels, qui sont devenus les cadres de notre coopération quotidienne.

On peut ainsi mentionner un accord en matière nucléaire signé dès le 17 septembre 2008, ainsi que des accords intervenus dans le domaine militaire (mise en place d’un conseiller militaire technique), de l’éducation (arrangement en matière éducative, arrangement relatif au fonctionnement des sections bilingues franco-slovaques), ou encore un accord relatif à l’échange et à la protection réciproque des informations classifiées.

Il est enfin prévu de renforcer la coopération administrative. Un protocole de coopération bilatérale pour 2008-2013 est annoncé dans le plan d’action qui devrait impliquer sept ministères et deux institutions d’Etat. Sont particulièrement concernés les domaines de l’informatisation de l’administration publique, le suivi conjoint des réglementations qui relèvent du domaine de l’administration et le renforcement de la coopération en matière d’échanges et de protection des informations et matériels classifiés. Les secteurs de la protection des droits de l’homme, de la formation des magistrats, des fonctionnaires, notamment en matière linguistique, les domaines de la prévention et de la maîtrise des risques d’incendies et le renforcement des capacités d’intervention en situation d’urgence sont également abordés. En ce qui concerne la question de la surveillance des frontières, la formation des agents, l’échange d’expériences, de personnels et une coopération opérationnelle en matière d’immigration clandestine, de lutte contre les trafics, le blanchiment et le terrorisme sont notamment prévus.

L’accord de coopération administrative signé le 21 avril 2009 à Bratislava, objet du projet de loi qui est aujourd’hui soumis à l’examen de la représentation nationale est directement issu de cette volonté. Il est finalement un peu plus large que ce que le plan d’action envisageait puisqu’il implique huit ministères slovaques et plusieurs institutions publiques, dans des domaines aussi variés que la justice, les affaires intérieures, la santé, le travail et les affaires sociales, l’agriculture, l’économie et les finances.

Avant de vous en détailler le contenu, votre Rapporteur vous propose quelques aperçus sur l’administration publique de ce pays et ses besoins en matière de coopération.

II – LA COOPÉRATION ADMINISTRATIVE BILATERALE

A – L’administration publique slovaque

1) Une organisation administrative fortement décentralisée

Limites de région (8 régions)

Limites de district (79 districts)

Avant même son indépendance, la Slovaquie avait engagé un certain nombre de réformes importantes (1). Elles touchaient son organisation administrative, ainsi qu’à des aspects tenant à la transition d’une économie planifiée vers une économie de marché. En conséquence, de nombreux secteurs de l’économie ont très tôt été privatisés, tandis que, en parallèle, les structures de base de la République slovaque indépendante étaient posées et que le pays s’engageait dans un processus d’intégration régionale rapide qui la conduirait en une décennie, voire moins, à adhérer à l’OCDE, à l’Union européenne et à l’OTAN.

Dans ce contexte particulier de changements multiples et rapides, la décentralisation a été l’option privilégiée, d’ailleurs dès avant l’indépendance, puisque la renaissance des communes en tant que collectivités territoriales était acquise en 1990. Le consensus s’est en tout cas fait très vite sur la nécessité de quitter un système centralisé pour s’orienter vers un système hautement décentralisé. Le caractère de l'Etat en a été profondément modifié et un rééquilibrage des pouvoirs, une ré-articulation des rôles des diverses instances administratives en ont résulté.

Le processus de décentralisation s’est traduit par le transfert et la délégation de compétences très importantes aux communes et aux régions « auto-administratives ». Il a été complété par une décentralisation fiscale, étroitement liée à un paquet d’autres actions de modernisation et de réforme de l’État, puisque les réformes également engagées dans le système de santé, le système social et celui du marché de travail, dans le système des retraites, de l’enseignement public et de la réforme budgétaire, ont eu des effets et répercussions sur les collectivités territoriales.

Il s’agit donc d’un processus global et intégral de réforme de l'Etat, qui se déconcentre et se décentralise profondément, au point que les transferts de compétences du centre vers les niveaux décentralisés sont très importants, - quelque 400 compétences ont été transférées, dans les domaines de la planification territoriale et des constructions, des écoles primaires et secondaires, de la santé, de l’aide sociale, des routes, du réseau ferré, de la protection de la nature, de la protection civile, etc. Ils se sont aussi accompagnés du transfert des moyens correspondants : une grande partie des personnels gérée par les collectivités territoriales, auxquelles revient la quasi-totalité des recettes de l’impôt sur le revenu : plus de 70 % aux communes et près du quart aux régions. De sorte qu’un peu plus de 6 % seulement de l’IRPP revient à l'Etat.

2) Une administration publique qui a besoin d’être soutenue

Pour avoir été profondément réformée en quelques années, l’administration slovaque n’en présente pas moins aujourd’hui un certain nombre de points faibles. On signale ainsi, la faiblesse et la diminution constante des budgets des administrations, les sous-effectifs et la faible rémunération des personnels. Comme le souligne le plan d’action du partenariat, des problèmes de formation restent importants, que ce soit en matière de formation initiale des fonctionnaires ou de formation des magistrats, pour lesquelles des actions sont prévues. Selon des informations que votre Rapporteur a pu recueillir, subsistent encore des recrutements plus politiques que basés sur des critères de compétence, ainsi que, d’une manière générale, une situation d’ensemble qui conduit à une rotation élevée des personnels, au demeurant sous statut souvent précaire.

Cela étant, l’esprit modernisateur anime l’encadrement, souvent jeune et motivé. C’est notamment le cas dans les administrations de l'Etat et dans le système judiciaire, ce qui est jugé comme ouvrant de véritables perspectives de coopération, compte tenu de l’importance des améliorations à apporter au système judiciaire et dans les administrations publiques. En outre, l’intérêt est marqué pour notre système administratif et judiciaire en tant que modèle différent des modèles germanique et anglo-saxon.

B – L’accord de coopération administrative de 2009

1) L’ambition et le contenu de l’accord

L’accord se distingue par deux volets et il faut noter l’importance de ses annexes.

L’ensemble du dispositif proprement dit décline le renforcement de la coopération administrative auquel prétendent les parties, conformément à ce qui a été décidé dans le Partenariat stratégique et notamment dans le plan d’action. Comme le précise également son article 1er, il prévoit les domaines prioritaires de la coopération ainsi que les activités qui seront conduites dans ce cadre entre 2009 et 2013.

L’annexe de l’accord énumère les ministères et autres institutions slovaques qui bénéficieront de la coopération. Sans surprise, compte tenu de ce qui était prévu dans le partenariat stratégique, l’essentiel des activités prévues se résume à des actions de formations, des stages professionnels, des échanges d’experts, l’organisation de séminaires et autres rencontres.

Ce sont les ministères de la justice, de l’agriculture, du travail, des affaires sociales et de la famille, de la santé publique, de l’économie, des finances, de l’intérieur et de la culture qui sont concernés. Un certain nombre d’autres institutions sont également bénéficiaires de cette coopération administrative. Selon la liste figurant en annexe, ce sont le bureau du Gouvernement de la République slovaque, section des droits de l’Homme et des minorités, pour une part, et section de la gestion et de la mise en oeuvre de l’aide financière étrangère, d’autre part, ainsi que l’office de géodésie, de cartographie et du cadastre, l’office de normalisation, de métrologie et d’essais, l’office du représentant de la République slovaque auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme et la Banque nationale slovaque.

Comme le reprend l’exposé des motifs, il est prévu que le vice-premier ministre, ministre de la justice slovaque, effectue une visite de travail en France ; ce premier axe sera complété par des sessions de formation et l’organisation de stages professionnels en France pour des magistrats slovaques, ainsi que par des échanges d’experts.

Un schéma similaire de visites de travail et de stages sera repris en ce qui concerne les différents ministères concernés, l’annexe énumérant les thématiques précises qui feront l’objet de ces opérations.

Pour le reste, le dispositif de l’accord prévoit les modalités d’application. L’article 3 prévoit que le programme de coopération est complété en janvier de chaque année par de nouvelles activités. L’article 5 précise que l’objectif du programme est d’assurer un équilibre des activités communes dans le domaine des échanges de personnel, cependant que l’article 6 règle la question du financement, partagé dans la limite des disponibilités budgétaires des deux Parties, chacune couvrant les frais liés au voyage de son personnel et à ses honoraires. Les frais de séjour des participants (logement et restauration), sont à la charge de la puissance invitante.

Une commission d’évaluation commune est instituée, qui se réunit au moins une fois par an, aux termes de l’article 7 qui en précise le rôle et l’organisation. Elle a notamment pour mission d’élaborer des rapports sur la mise en oeuvre du programme de coopération et d’en fixer les orientations politiques.

L’article 8 indique que tout différend relatif à l’interprétation ou l’exécution de l’accord est réglé par la négociation entre les Parties.

L’accord est conclu pour une durée de six ans, selon l’article 9, qui précise que sa validité et son effet sont prolongés tacitement de deux ans s’il n’est pas dénoncé par l’une des deux Parties.

2) La modestie de la mise en œuvre

a) Un texte appliqué avant d’être ratifié

Avant toute chose, votre Rapporteur ne peut que regretter le peu de cas qui est fait de l’avis de la représentation nationale qui est saisie bien tardivement. Ainsi qu’il résulte de la lecture du texte, dont l’article 1er indique que « le présent Accord définit notamment les domaines prioritaires de la coopération de deux parties contractantes et les activités y reliées pour les années 2009 à 2013 », cet accord arrivera bientôt à échéance. L’annexe, qui détermine le programme d’activités, reprend évidement la même période et il ne saurait donc y avoir d’ambiguïté.

Cette remarque est d’autant plus pertinente que, selon les informations qui ont été données à votre Rapporteur, la Partie slovaque avait pour sa part indiqué avoir effectué les formalités de ratification dès le mois d’avril 2009. En France, le Premier ministre n’a déposé le projet de loi sur le bureau du Sénat que le 30 novembre 2010.

Cet état de fait est d’autant plus critiquable que, bien que le parlement ne se soit pas encore prononcé, l’accord a néanmoins été appliqué. En effet, il a été indiqué à votre Rapporteur qu’à la date de dépôt un certain nombre d’activités avaient à cette date d’ores et déjà été réalisées, en rapport avec l’annexe 1 de l’accord.

Ainsi, avec l’office du Gouvernement - Section des droits de l’homme et des minorités, des conférences ont-elles été organisées sur les thèmes suivants : « La formation tout au long de la vie comme facteur d’intégration des séniors dans la société », en novembre 2009 ; « La lutte contre l’extrémisme », en mars 2010 ; « Les mécanismes nationaux et internationaux de la protection des droits de l’enfant », en novembre 2010. 

De même, avec le ministère de la Justice, un séminaire « Français juridique » est organisé, à raison de deux sessions annuelles, en avril et en octobre. Une réunion de travail a eu lieu à Bratislava en décembre 2010 pour la préparation de la 2ème édition du lexique de droit. Un séminaire « Gestion des fonds structurels et passation des marchés publics » a été organisé en décembre 2009 avec le ministère des Finances et une conférence sur les maladies cardiovasculaires a eu lieu en novembre 2009 avec le ministère de la Santé.

Même si l’accord est reconductible tacitement, et que par conséquent le parlement ne se prononcera pas qu’en vain, la représentation nationale ne peut que s’étonner de l’attitude du gouvernement en cette occasion.

Certes, l’exposé des motifs rappelle opportunément que la coopération administrative entre les deux pays existe depuis une dizaine d’années et que notre pays y voit, à juste titre, un vecteur d’influence important qui permet une large diffusion de la culture administrative et judiciaire du modèle français. Cet aspect n’est pas contesté ni contestable. Au demeurant, l’article 4 de l’accord en tient compte, qui précise pertinemment que « les activités de coopération en cours entre les administrations des parties ne sont pas affectées par le présent accord qui régit toutes les activités engagées entre les parties à compter de sa date d’entrée en vigueur. Ces activités sont prévues dans des " programmes de coopération bilatérale " annexés tous les six ans au présent accord. Elles sont mises en œuvre par des arrangements administratifs conclus entre les ministres compétents. » En d'autres termes, la coopération administrative pouvait être poursuivie sans que des activités prévues à l’accord soient engagées avant que la représentation nationale se soit prononcée.

b) Une coopération à l’étiage

Cela étant, la coopération administrative bilatérale n’est pas parmi les plus importantes. Selon les éléments d’information qui ont été communiqués à votre Rapporteur, les budgets consacrés tant par la Slovaquie que la France à cette coopération sont particulièrement modestes. En outre, ils sont en baisse constante. Au vu de ce que notre pays dépense chaque année, on peut difficilement soutenir que ces actions soient prioritaires :

 

2008

2009

2010

2011

2012

Bourses de stages

68 080

48 760

16 560

11 470

11 280

Missions –Invitations

58 440

25 620

18 860

7 630

6 500

Soutien aux actions

10 000

8 000

2 000

4 000

2 500

Total

136 520

82 380

37 420

23 100

20 280


Coopération administrative bilatérale, éléments budgétaires 2008-2012, en euros ; Source : MAEE

Les raisons qui ont été avancées, tant du côté slovaque que du côté français tiennent à la réduction des budgets : chez notre partenaire, s’y ajoute les sous-effectifs et le faible niveau des rémunérations qui conduisent à une rotation élevée des personnels, préjudiciable au suivi des dossiers.

Côté français, le secteur de la gouvernance est de ceux dont les moyens ont souffert d’une réduction importante, qui a conduit à une concentration des faibles moyens résiduels sur deux thématiques : la justice et les droits de l’Homme. On ne peut manquer de relever cependant que 20 000 euros, même concentrés sur deux secteurs seulement, constituent un budget de coopération qui confine à l’indigence. Rapportée au budget annuel du poste de Bratislava, plus de 1,1 million d’euros en 2011 pour la programmation culturelle, scientifique et technique, comme votre Rapporteur l’a indiqué, cette enveloppe ne met pas la coopération administrative au rang des premières priorités bilatérales.

CONCLUSION

Pour modeste qu’elle soit, cette coopération administrative n’est sans doute pas inutile. Elle est aussi importante compte tenu des relations que les deux Parties ont nouées depuis plusieurs années et de l’ampleur qu’elles ont entendu leur donner sur le long terme avec la signature du Partenariat stratégique, dont les différents volets traduisent l’ambition.

Votre Rapporteur vous recommande en conséquence d’adopter ce projet de loi qui autorise l’approbation de l’accord de coopération administrative. Cela étant, notre commission ne peut rester indifférente et ne pas dénoncer le fait d’être saisie après que le gouvernement ait commencé de la mettre en application.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 28 février 2012.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

Mme Martine Aurillac, présidente. Il est surprenant que cet accord relève du domaine de la loi, mais vous en avez expliqué les raisons, ainsi que celles qui plaident pour sa ratification.

M. Michel Terrot. Je me félicite de la ratification attendue de cet accord qui souligne l’excellence des relations bilatérales entre la France et la Slovaquie. J’aurais néanmoins deux questions. La première concerne l’apprentissage de la langue française. Qu’en est-il, particulièrement dans le secondaire par rapport à l’anglais et l’allemand ? Ma seconde question porte sur nos investissements en Slovaquie. Je sais que notre pays est au deuxième rang depuis plusieurs années, derrière l’Allemagne, mais j’aurais souhaité des précisions sur les domaines dans lesquels nous sommes particulièrement présents et les entreprises implantées, outre Lafarge et PSA Peugeot Citroën.

M. Jean-Claude Guibal. Il s’agit d’un accord de coopération administrative bilatérale. J’ai compris que la France met à disposition des moyens relativement limités, de 20 000 euros. A quelles actions sont-ils affectés ? Symétriquement, quelles actions sont menées par la Slovaquie en direction de la France ?

Jean-Paul Lecoq, rapporteur. Concernant les échanges économiques franco-slovaques, ils se sont accélérés. PSA Peugeot Citroën est effectivement sur place, où elle produit la 207 Peugeot et la Citroën Picasso, de même que Renault et un certain nombre d’équipementiers qui les ont suivis. Il faut également signaler Total, Plastic Omnium et France Telecom/Orange et Gaz de France, qui ont respectivement investis 1,1 et 1,4 milliard d’euros.

Concernant les 20 000 euros, ils sont principalement affectés à des bourses de stage, à hauteur de 11 200 euros. Il faut souligner la baisse des moyens par rapport à 2008 où plus de 68 000 euros étaient consacrés à la coopération administrative. On arrive à la fin de la mise en œuvre de l’accord et une évaluation devra déterminer s’il est utile de faire jouer la clause de tacite reconduction. Car un écart important a sans doute été comblé depuis la sortie de l’« espace soviétique » et la baisse des moyens traduit aussi sans doute une diminution du besoin.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (no 3660).

*

* *

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi dans le texte figurant en annexe du présent rapport.

ANNEXE

TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque relatif à la coopération en matière administrative, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 3660).

© Assemblée nationale

1 () Daniel Pejko, « État et Collectivités territoriales - Décentralisation de l’administration publique en Slovaquie », ENA, février 2006 ; les développements qui suivent s’inspirent des analyses de ce mémoire de master en administration publique