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TEXTE ADOPTÉ n° 357

« Petite loi »

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

25 octobre 2009

RÉSOLUTION

sur la révision de la directive sur la fiscalité de l’épargne
et la
lutte contre les paradis fiscaux, les centres offshore
et les juridictions non coopératives.

Est considérée comme définitive, en application de l’article 151-7 du Règlement, la résolution dont la teneur suit :

Voir les numéros : 1835.

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2003/48/CE en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiement d’intérêts (COM [2008] 727 final/n° E 4096),

Vu la proposition de directive du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal (COM [2009] 29 final/n° E 4264),

Vu la proposition de directive du Conseil concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures (COM [2009] 28 final/n° E 4267),

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs et modifiant les directives 2004/39/CE et 2009/.../CE (COM [2009] 207 final/n° E 4467),

Vu la recommandation de la Commission au Conseil visant à autoriser la Commission à ouvrir des négociations en vue de la conclusion d’accords entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et la Principauté d’Andorre, la Principauté de Monaco et la République de Saint-Marin, d’autre part, pour lutter contre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte à leurs intérêts financiers et garantir la coopération administrative sous forme d’échange d’informations en matière fiscale et visant à autoriser la Commission à ouvrir des négociations en vue de la conclusion d’un accord entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et la Confédération suisse, d’autre part, pour lutter contre la fraude et l’évasion dans le domaine de la fiscalité directe et garantir la coopération administrative sous forme d’échange d’informations en matière fiscale (SEC [2009] 899 final/n° E 4555),

Vu la résolution législative du Parlement européen, du 24 avril 2009, sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2003/48/CE en matière de fiscalité des revenus de l’épargne sous forme de paiement d’intérêts (COM [2008] 0727 – C6-0464/2008 – 2008/0215 [CNS]),

Vu la déclaration du sommet du G20 de Washington du 15 novembre 2008, sur les marchés financiers et l’économie mondiale,

Vu les déclarations du sommet du G20 de Londres du 2 avril 2009, notamment la déclaration des chefs d’État et de Gouvernement sur le Plan global de relance et de réforme, et la déclaration sur le renforcement du système financier,

Vu les recommandations du groupe de travail de haut niveau sur la supervision financière présidé par M. Jacques de Larosière, ancien directeur général du Fonds monétaire international,

Vu les conclusions du Conseil européen des 19 et 20 mars 2009,

Vu les conclusions du Conseil européen des 18 et 19 juin 2009,

Vu les conclusions du Conseil « Ecofin » du 9 juin 2009,

Vu la communication de la Commission, au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen, du 28 avril 2009, « Encourager la bonne gouvernance dans le domaine fiscal » (COM [2009] 201 final),

Vu la communication de la Commission, du 27 mai 2009, « Surveillance financière européenne » (COM [2009] 252 final),

Vu la communication de la Commission, du 3 juillet 2007, « Rendre les marchés de produits dérivés plus efficaces, plus sûrs et plus solides » (COM [2009] 332 final),

Considérant que les sommets précités du G20 ont permis de jeter les bases de l’indispensable refondation du système financier international, en prévoyant non seulement un renforcement de la régulation et de la supervision financières, mais aussi l’élimination des pratiques dommageables des juridictions non coopératives, y compris les paradis fiscaux et les centres offshore ;

Estimant néanmoins que la crise financière, économique et sociale est loin d’être finie et, par conséquent, qu’une mise en œuvre insuffisante de ces orientations serait désastreuse, notamment si elle cède aux pressions de certains milieux de la finance qui souhaitent que « tout puisse recommencer comme avant » ;

Considérant ainsi que le prochain sommet, qui aura lieu à Pittsburgh, les 24 et 25 septembre 2009 aura une responsabilité d’autant plus immense qu’il devrait aussi, ce qu’il n’a pas fait jusqu’à présent, adopter une approche très large englobant également les questions monétaires, notamment de changes et de déficits des paiements, ainsi que celle d’un juste prix pour les échanges de matières premières ;

Considérant que l’Union européenne et ses États membres doivent avoir, comme lors des deux précédents sommets du G20, un rôle moteur d’initiative et de proposition, en liaison notamment avec leurs principaux partenaires non européens et avec les grandes organisations financières internationales, le Fonds monétaire international et aussi la Banque mondiale ;

1. Considère que le prochain sommet du G20 :

a) Doit prévoir une identification précise, exhaustive et complète des paradis fiscaux, centres offshore et juridictions non coopératives dans le cadre de trois listes, l’une fiscale établie par le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements constitué par l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’autre financière et prudentielle, confiée au conseil de stabilité financière et la troisième relative au blanchiment, établie par le groupe d’action financière ;

b) Doit retenir, pour ces listes, une approche à la fois exhaustive, qui contrôle les pratiques, et pas seulement les intentions et les textes, et différenciée pour tenir compte sans amalgame de la situation de chaque pays ou territoire ;

c) Doit également définir les conditions dans lesquelles ces listes devront être régulièrement mises à jour par des procédures d’évaluations mutuelles par les pairs ;

d) Et surtout doit instituer des sanctions et les faire appliquer ;

2. Estime, s’agissant des questions fiscales :

a) Que l’objectif doit être d’établir une transparence sans frontière la plus large possible et que l’Union européenne peut y apporter à très court terme une importante contribution en adoptant la proposition de révision de la directive « épargne », selon un dispositif renforcé suivant les orientations de la résolution du Parlement européen du 24 avril 2009 précitée, ainsi que les propositions de directive sur la coopération administrative dans le domaine fiscal entre les États membres et sur l’assistance mutuelle au recouvrement ;

b) Que, par conséquent, les règles actuellement prévues au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques doivent être renforcées, d’une part, en relevant le nombre des conventions qui doivent être conclues, celui de douze risquant de s’avérer insuffisant à bref délai, et, d’autre part, en retenant à terme l’échange automatique d’informations comme norme internationale de transparence, plutôt que l’échange de renseignements sur demande prévu par la convention modèle OCDE de 2002 ;

c) Et que la centralisation dans chaque État des bénéficiaires de comptes bancaires comme des bénéficiaires de fondations, trusts, sociétés offshore ou autres entités similaires doit à terme être promue comme norme universelle ;

3. Considère, s’agissant des questions prudentielles et financières :

a) Que les décisions prises par le Conseil européen sur la nouvelle architecture européenne de supervision financière, directement inspirées des recommandations du rapport du groupe de travail présidé par M. de Larosière, constitue un indéniable progrès, à condition qu’elles soient rapidement concrétisées pour entrer en application, comme prévu, dès 2010 ;

b) Que l’Union européenne doit faire valoir dans le cadre du prochain G20 cette réforme de l’architecture de la supervision financière européenne, mais que celle-ci, loin de constituer un aboutissement, doit être considérée comme une première étape en direction d’un véritable système européen de supervision unifié et intégré ;

c) Que l’influence que l’Union européenne est susceptible d’exercer sur les décisions adoptées dans le cadre du G20 ne pourra continuer d’être significative que si l’Union européenne poursuit avec détermination son processus de réformes dans le sens de l’extension du champ de la régulation à l’ensemble des acteurs, marchés et produits susceptibles d’être impliqués dans des risques d’importance systémique ;

d) Qu’à cet égard, il est très préoccupant de constater le retard pris en Europe sur la question de la création de chambres de compensation pour les produits financiers dérivés actuellement négociés de gré à gré ;

e) Que le recours à de telles chambres doit impérativement devenir obligatoire pour tous les produits dérivés normalisés, notamment pour les produits de dérivés de crédits et de dérivés d’actions, et que l’effort préalable de normalisation de tous les produits dérivés doit être poussé le plus loin possible ;

f) Que, pour ce qui concerne les fonds d’investissement alternatifs, le texte de la proposition de directive relative aux gestionnaires de ces fonds précitée n’est pas acceptable en l’état, au moins pour trois raisons : il ne distingue pas suffisamment le cas des fonds spéculatifs des autres fonds alternatifs, notamment des fonds de capital-risque dont le rôle pour le financement des entreprises est important ; il prévoit la possibilité, à l’issue d’un délai de trois ans, d’un « passeport européen » pour les fonds constitués dans les pays tiers, notamment dans les centres offshore ; il renvoie de manière imprudente à l’adoption de mesures d’exécution selon la procédure complexe de comitologie ;

g) Que les exigences de la protection de l’épargne comme des investisseurs professionnels doivent amener l’Union européenne et ses États membres à ouvrir rapidement de nouveaux chantiers législatifs, notamment en ce qui concerne la responsabilité des dépositaires ;

4. Estime enfin que la lutte contre le blanchiment et la criminalité financière exige :

a) Que la transposition de la troisième « directive anti-blanchiment » intervienne sans retard supplémentaire et que la prochaine Commission européenne s’assure que son dispositif correspond bien au plus haut niveau des normes préconisées par les recommandations du groupe d’action financière ;

b) De tirer parti des possibilités offertes par le traité de Lisbonne pour aboutir à un véritable espace judiciaire pénal européen ;

c) Que les autorités françaises jouent pleinement leur rôle d’initiative et de proposition dans la préparation du très prochain programme de Stockholm, notamment par la promotion de la lutte contre le blanchiment et la criminalité financière comme priorité de ce programme, donnent les moyens nécessaires au plan national comme au plan européen aux magistrats spécialisés, notamment aux juges d’instruction, et veillent à ne pas davantage dépénaliser la criminalité et la délinquance financières ;

5. Souhaite enfin que la prochaine Commission européenne soit plus réactive et prenne davantage d’initiatives sur l’ensemble de ces questions et demande ainsi :

a) Au Parlement européen comme aux gouvernements des États membres d’y veiller lors de la désignation du prochain président comme des futurs commissaires ;

b) Aux commissions du Parlement européen d’interroger, lors des auditions préalables à leurs nominations, l’ensemble des personnalités proposées pour être commissaires sur la lutte contre les paradis fiscaux, sur la régulation et la supervision financières, ainsi que sur la lutte contre le blanchiment et la criminalité financière.

À Paris, le 25 octobre 2009.

Le Président,
Signé :
Bernard ACCOYER

ISSN 1840 - 8468

Imprimé par l’Assemblée nationale


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