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N
° 253

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2013
(n° 235),

TOME II

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

FORÊT

PAR M. André CHASSAIGNE,

Député.

——

Voir le numéro : 251 (annexe 3)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I.— UN BUDGET QUI ACCUSE UNE FORTE BAISSE 7

A.— LE PROGRAMME 149 7

1. Un cadre financier pour 2013 qui manque d’ambition 7

2. Une baisse des crédits constante depuis dix ans à l’exception de plans d’urgence 9

B.— ACTION 11 : GESTION DES FORÊTS PUBLIQUES ET PROTECTION DE LA FORÊT 10

1. Les missions de l’ONF 10

2. L’ONF, un office en crise sociale 11

a) Une culture de la performance imposée au détriment du service public 11

b) Une perte de repère des agents patrimoniaux 12

3. Le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2012-2016 13

a) Le contexte de la négociation du COP 2012-2016 13

b) Le COP 2012-2016 13

c) Le PLF 2013 assure le quasi respect des engagements du contrat d’objectifs et de performance avec l’ONF 14

C.— ACTION 12 : DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA FILIÈRE ET GESTION DURABLE 15

1. Des crédits en forte baisse en raison notamment du ralentissement programmé du plan Klaus 15

2. Une baisse importante de presque toutes les autres lignes budgétaires 16

II.— L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL EN FORÊT, UNE NÉCESSITÉ POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA FILIERE BOIS 19

A.— LES CARACTÉRISTIQUES DU TRAVAIL EN FORÊT … 19

1. Un métier de vocation et de passion 19

2. Pénibilité et danger du travail en forêt 20

a) Les ouvriers forestiers 20

b) Les scieries 21

3. Des horaires supérieurs à la moyenne 21

4. Des conditions de rémunération insuffisantes 21

B.— …SONT UN FREIN POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA FILIÈRE BOIS 22

1. Un potentiel énorme 22

2. Une filière en difficulté 23

3. Une filière qui peine à attirer et garder ses employés malgré la passion qui les anime 24

a) La structure de l’emploi dans la filière bois 24

b) Une filière qui peine à recruter 25

c) Une filière qui peine à conserver ses travailleurs 25

C.— QUELQUES PISTES D’ÉVOLUTION POUR RENDRE LA FILIÈRE PLUS HUMAINE ET PLUS ATTRACTIVE 27

1. Améliorer les conditions de travail des travailleurs 27

a) Renforcer les règles de sécurité, y compris celles s’appliquant à l’employeur 27

b) Redynamiser les conventions collectives 27

c) Renforcer la mécanisation dans le respect du caractère durable de la forêt 28

d) Encourager la gestion collective 28

2. Améliorer la reconnaissance des accidents de travail et des maladies professionnelles 28

a) Création de comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) interentreprises 28

b) Améliorer la reconnaissance des maladies professionnelles 29

3. Développer les secondes carrières et les cessations anticipées d’activité 29

a) La formation professionnelle 29

b) Le droit à une retraite anticipée 29

TRAVAUX DE LA COMMISSION 31

I.—  AUDITION DE M. STÉPHANE LE FOLL, MINISTRE DE L’AGRICULTURE, DE L’AGROALIMENTAIRE ET DE LA FORÊT 31

II.— EXAMEN DES CRÉDITS 57

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION 58

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 59

MESDAMES, MESSIEURS,

À l’heure où l’on fait grand cas de l’environnement, où l’on promeut l’utilisation du bois dans le bâtiment, le chauffage au bois ou à la biomasse, il serait vraiment dommage que les crédits affectés à la forêt manquent d’ambition. Au regard notamment du déficit de la balance commerciale, qui s’élève à 6,6 Md€ en 2011.

Et pourtant, la poursuite de la politique forestière actuelle ne contribue pas à la diminution du déficit de la balance commerciale. En revanche, elle conduit à une exploitation non maîtrisée de nos forêts publiques et à une sous-valorisation d’une ressource forestière de qualité. Les fonctions écologiques de la forêt sont négligées au profit d’intérêts privés et d’activités concurrentielles.

Les dotations globales du programme 149 pour 2013 s’élèvent à 290,74 millions d’euros en autorisation d’engagement (au lieu de 349,68 millions d’euros en 2012) et à 315,42 millions d’euros en crédits de paiement au lieu de 358,44 millions d’euros en 2012. Cela représente une baisse de 17,2 % en autorisations d’engagement et de 12,3 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances pour 2012.

Cette baisse est en partie le résultat du ralentissement programmé des engagements et des paiements du plan Klaus, à la suite de la tempête de 1999, où l’accent budgétaire avait été mis sur les premières années. Mais même en excluant les crédits affectés au plan Klaus, les crédits de l’action 12, « Développement économique de la filière et gestion durable » sont en baisse de 15 % et ceux de l’ensemble du programme 149 en baisse de 3,3 %.

Certes, l’État respecte en grande partie ses engagements vis-à-vis de l’Office national des forêts (ONF), mais seulement dans le cadre contraint du contrat d’objectif et de performance 2012-2016. Or, il est urgent de mettre en œuvre une réforme d’envergure prenant mieux en compte les multiples enjeux sociaux, écologiques et économiques. Aussi, votre rapporteur propose que ce contrat soit suspendu avec l’arrêt immédiat des suppressions de poste à l’ONF.

L’ONF n’est en effet plus en mesure de faire face à toutes ses missions. Elle est contrainte de les adapter aux moyens dont l’établissement dispose, en contradiction avec le Code forestier qui fixe comme obligation une gestion durable multifonctionnelle avec l’obligation d’une exploitation accrue.

Votre rapporteur propose de mettre en place une politique forestière adaptée à la richesse de la ressource, valorisant un bois de qualité en favorisant les filières locales, voie indispensable pour réduire le déficit de la balance commerciale de la filière. Cette orientation exige un mode de rémunération des missions de service public assurant un financement stable et pérenne. Elle doit s’accompagner d’une politique ambitieuse de préservation de la biodiversité et des paysages forestiers, fondée notamment sur la Trame Verte et Bleue et le développement de corridors écologiques.

Votre rapporteur engage le Gouvernement à organiser un grand débat national fondé sur une réelle concertation, seul à même de réorienter notre politique forestière nationale avec un projet cohérent.

L’augmentation attendue de la production de bois et les nouvelles opportunités de la filière bois en matière de développement durable vont nécessiter un surcroît de main d’œuvre dans le secteur. Les besoins en emplois pérennes et qualifiés sont importants et iront en augmentant afin de répondre aux défis de la valorisation des forêts françaises.

Pourtant, ces besoins en emploi ne pourront pas être satisfaits tant que perdureront les conditions de travail actuelles en forêt. Nous avons en mémoire le suicide de 4 forestiers de terrain à l’été 2011, et plus largement de 20 agents patrimoniaux de l’ONF en 6 ans. Mais il s’agit d’un problème plus vaste qui affecte, au-delà de l’ONF, l’ensemble des travailleurs forestiers au sens large, sylviculteurs, bûcherons, débardeurs, transporteurs de grumes, scieurs.

Votre rapporteur s’attachera à montrer dans ce rapport que l’amélioration des conditions de travail en forêt est un préalable absolument nécessaire au développement de la filière forêt – bois.

Compte tenu des réserves évoquées, votre rapporteur ne peut en conscience donner un avis favorable sur les crédits affectés au programme «Forêt». Cependant, pour ne pas enfermer son avis dans une forme de posture d’opposition stérile, votre rapporteur s’en remet à la sagesse de la Commission des affaires économiques.

I.— UN BUDGET QUI ACCUSE UNE FORTE BAISSE

A.— LE PROGRAMME 149

1. Un cadre financier pour 2013 qui manque d’ambition

Le programme 149 définit la politique nationale en matière de forêt et de filière bois. Sa dotation doit en théorie permettre la réalisation de quatre objectifs : une plus grande production et une meilleure valorisation du bois, une gestion durable de la biodiversité, une adaptation de la forêt française au changement climatique, une meilleure gestion des risques.

Les dotations du programme sont réparties en deux actions :

- l’action 11 « Gestion des forêts publiques et protection de la forêt », où sont recherchées la pérennisation des régime et patrimoine forestiers et la prévention des risques ;

- l’action 12 « Développement économique de la filière et gestion durable », qui vise la compétitivité de la filière bois et la gestion durable de la forêt.

Les dotations globales du programme s’élèvent à 290,74 M€ en AE (au lieu de 349,68 M€ en 2012) et à 315,42 M€ en CP (au lieu de 358,44 M€ en 2012). Cela représente une baisse colossale de 17,2 % en AE et de 12,3 % en CP par rapport à la LFI 2012.

Numéro et intitulé du programme et de l’action

AE

CP

Ouvertes en LFI 2012

Demandées pour 2013

Ouverts en LFI 2012

Demandés pour 2013

149

Forêt

349 687 967

290 748 275

358 447 263

315 421 843

11

Gestion des forêts publiques et protection de la forêt

211 491 350

209 745 847

217 905 638

213 776 631

12

Développement économique de la filière et gestion durable

138 196 617

81 002 428

140 541 625

101 645 212

Autorisations d’engagement Crédits de paiement

Ce programme représente donc seulement 8,7 % des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (3,31 Md€), ce qui parait bien peu au regard des enjeux précédemment évoqués !

L’affectation du produit de la mise aux enchères

des quotas d’émission de gaz à effet de serre à un fonds stratégique forestier

La forêt française souffre de sous-investissement. Le maintien des surfaces boisées occulte les graves difficultés auxquelles est confrontée la filière forestière et qui seront évoquées dans la seconde partie du rapport. Sans soutien, la filière continuera à péricliter alors même que le bois devient incontournable dans les développements des énergies thermiques et que la forêt est un élément essentiel du maintien de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique.

La filière a donc besoin d’un fonds stratégique pour financer des investissements d’avenir. Il faut signaler à cet égard qu’un fonds dédié à la forêt a existé de 1946 à 1999. En effet, après la fin de la seconde guerre mondiale, dans le cadre du Conseil National de la Résistance, il a été décidé de créer un Fonds forestier national (FFN) destiné à accorder des aides aux reboisements aux particuliers et aux communes afin d’augmenter la production de bois pour la reconstruction du pays et l’industrie de la production papetière. Le FFN fut supprimé en 1999, d’une part au regard de la complexité de la perception de ses ressources et parce qu’elles augmentaient les charges des professionnels concernés, mais aussi parce qu’il n’était pas conforme à la réglementation communautaire. Sur ce dernier aspect, il convient de préciser que la France aurait pu demander, et peut-être obtenir, une dérogation, ce qu’elle n’a pas fait1.

Ce nouveau fonds, dont les modalités restent à définir, pourrait bénéficier d’un financement provenant d’une partie du produit de la mise aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre telle que prévue aux article 3 quinquies et 10 de la directive 2003/87 établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61 du Conseil. Il pourrait ainsi financer des projets de développement forestier respectueux de l’environnement.

La filière bois est en effet un acteur majeur de la lutte contre le réchauffement climatique. On estime aujourd’hui que les émissions nationales sont compensées à 22 % par l’impact du secteur sur le bilan carbone de la France : captation et stockage du carbone au moyen de la photosynthèse, stockage à long terme du carbone dans les produits bois et issus du bois, substitution du bois à d’autres matériaux plus énergivores, substitution du bois aux énergies fossiles.

À cet égard, votre rapporteur ne peut que déplorer le choix du Gouvernement d’affecter en totalité le produit de ces quotas, dans la limite de 590 M€ par an, à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) afin de financer son budget d’intervention. Certes, renforcer les moyens consacrés à la qualité et à la performance énergétique, ainsi qu’à l’amélioration des logements des personnes modestes sont des objectifs tout à fait louables et respectables mais les arbitrages auraient pu prévoir par exemple l’affectation des surplus éventuels à un fonds pour la forêt, surtout dans le contexte de la suppression du compte d’affectation spéciale «Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique » (2).

Ce nouveau fonds exige des ressources constantes dans le temps. Pour partie, il peut être alimenté par les surplus du produit de la vente des quotas au-delà du seuil de 590 M€, voire par un Fonds Forestier Stratégique Carbone aux ressources constantes (dans leur « projet forêt-bois pour la France », France Bois Forêt et France Bois Industries Entreprises proposent l’attribution de 25 % des montants annuels de la mise aux enchères des quotas carbones). La forêt a en effet besoin d’une politique de long terme qui exige des dotations financières pérennes.

2. Une baisse des crédits constante depuis dix ans à l’exception de plans d’urgence

Cette baisse s’inscrit dans une logique structurelle si l’on regarde les autorisations d’engagement sur le budget forêt depuis dix ans – les rares budgets en augmentation sont essentiellement dus à la prise en compte des conséquences de la tempête Klaus.

Si l’on exclut les crédits affectés au plan Klaus, la dotation budgétaire de l’action 11 connaît donc une baisse de 15 % par rapport au PLF 2012 ; à l’échelle du programme 149, la baisse est de 3,3 %.

Projet de loi de finances

Autorisations
d’engagement

2003

396 M€

2004

343 M€

2005

312 M€

2006

294 M€

2007

306 M€

2008

305 M€

2009

293 M€

2010

366 M€

2011

360 M€

2012

354 M€

2013

290 M€

B.— ACTION 11 : GESTION DES FORÊTS PUBLIQUES ET PROTECTION DE LA FORÊT

Les crédits de l’action 11 « Gestion des forêts publiques et protection de la forêt » (72 % du programme) s’élèvent en 2013 à 209,74 M€ en AE (211,49 M€ en 2012) et à 213,77 M€ en CP (217,9 M€ en 2012). Ils connaissent donc une baisse limitée de 1,3 % en AE et de 2,3 % en CP.

1. Les missions de l’ONF

Avec plus de 8 % du territoire métropolitain qui lui est confié, l’Office national des forêts (ONF) constitue l’un des principaux acteurs de la gestion des milieux naturels. L’ONF est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) créé par la loi du 23 décembre 1964 pour assurer la gestion des forêts publiques.

Placé sous la tutelle des ministres chargés de la forêt et de l’environnement, l’ONF assure :

– la gestion des forêts domaniales et la gestion des forêts des collectivités soumises au « régime forestier »3. Dans ce cadre, l’ONF gère 4,7 millions d’hectares de forêts et d’espaces boisés en métropole (27 % de la forêt française) dont 1,8 million d’hectares de forêts domaniales et assimilées et 2,9 millions d’hectares de forêts appartenant à des collectivités relevant du régime forestier.

– des missions d’intérêt général. Cette mission de service public doit pouvoir garantir une gestion durable de ce patrimoine forestier et permet de répondre aux attentes de la société, comme la protection de l’environnement et l’accueil du public tout en assurant la pérennité des forêts concernées. Le régime forestier comprend la gestion foncière, la surveillance générale, l’aménagement forestier, le règlement et le marquage des coupes ainsi que leur mise en vente.

– des interventions contractuelles nationales et internationales : l’ONF intervient dans ses domaines de compétences pour différents clients, publics ou privés, en France et à l’étranger, sur la base de conventions. S’agissant des forêts privées, l’article L. 224-6 du code forestier prévoit ainsi que l’ONF peut se charger, en tout ou en partie, de la conservation et de la régie des bois des particuliers, sous réserve que cette intervention se place dans le cadre de contrats d’une durée d’au moins dix ans.

2. L’ONF, un office en crise sociale

a) Une culture de la performance imposée au détriment du service public

• La baisse des effectifs

L’ONF emploie environ 6 600 fonctionnaires (et contractuels assimilés) et près de 3 200 ouvriers forestiers. L’Office a perdu 2200 emplois entre 2001 et 2016.

Il ne compte plus aujourd’hui que 340 unités territoriales. En 2016, selon le directeur de l’ONF, il n’y en aurait plus que 300 à 310.

• Des agents de plus en plus isolés

Les effectifs diminuent, la charge de travail s’alourdit en conséquence. Les agents patrimoniaux, en plus des tâches administratives, doivent gérer, en moyenne, des surfaces de 1 600 hectares, contre 800 auparavant.

• Des agents de moins en moins généralistes

Avec la suppression des chefs de triage, mieux connus sous le nom de « gardes forestiers », dont la mission était de s’occuper d’un ensemble de forêts communales, c’est la proximité et le contact direct avec les élus et les usagers de la forêt qui disparaissent.

Les élus, au premier rang desquels le maire, ne disposent plus de ce conseiller privilégié et disponible, capable aussi d’une vision globale de la gestion forestière.

Avec la spécialisation des métiers au sein de l’ONF, les élus doivent désormais solliciter l’unité territoriale, ce guichet unique, qui opère à une échelle beaucoup plus grande au détriment de la gestion plurifonctionnelle des forêts communales.

• Un nouveau système managérial

Le nouveau système managérial, fondé essentiellement sur la performance économique individuelle a été introduit en 2001 avec « le projet pour l’office » (PPO) en 2001.

À l’instar des entreprises privées, chaque personnel perçoit désormais une partie de sa rémunération sous forme de primes, modulées positivement ou négativement en fonction de la valeur ajoutée qu’il génère annuellement.

Ce système provoque de fortes réactions de rejet. Les salariés de l’ONF peinent à s’identifier à une stratégie fondée sur la primauté du résultat économique à court terme, alors qu’ils ont choisi cette profession par vocation, pour se mettre au service de la préservation d’une ressource naturelle pour les générations futures.

b) Une perte de repère des agents patrimoniaux

Depuis 2005, l’ONF a fait face à 24 suicides : les agents forestiers représentent 75 % des cas. Si l’ensemble des suicides ne peut être imputé aux conditions de travail, le lien entre les deux est inévitable. Plusieurs enquêtes ont montré que des éléments liés aux choix de la hiérarchie ont pu être décisifs dans les passages à l’acte, notamment les difficultés à atteindre les objectifs.

Récemment, le directeur général de l’ONF, M. Pascal Viné, que votre rapporteur a rencontré dans le cadre de l’une de ses auditions, a présenté un plan renforcé sur les risques psychosociaux, établi à la suite d’un audit socio-organisationnel. Mais bien évidement ce plan est encadré par le contrat d’objectifs de l’établissement 2012-2016. Le doublement du nombre d’assistantes sociales et la mise en place d’un numéro vert sont deux mesures annoncées…

Votre rapporteur ne peut que reprendre à son compte une remarque entendue lors des auditions : « ce sont de bonnes mesures mais ça ne change pas le vrai problème qui est le manque de personnel ». Ces mesures se contentent de traiter les conséquences et non les causes du mal-être des employés de l’ONF.

3. Le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2012-2016

a) Le contexte de la négociation du COP 2012-2016

En 2009, une note de la direction générale du Trésor proposant des pistes de réforme pour la politique forestière a provoqué de vives réactions en suggérant notamment la délégation de la gestion des forêts communales à des prestataires privés.

M. Hervé Gaymard a remis en octobre 2010 au Président de la République un rapport sur l’évolution de l’ONF et l’exploitation de la forêt privée dans lequel il formule plusieurs propositions principalement orientées vers le recentrage des missions de l’établissement sur la production. Il estime néanmoins que la stabilité institutionnelle est un préalable et demande une recapitalisation à hauteur de 300 millions d’euros de l’ONF.

b) Le COP 2012-2016

Le contrat a été signé le 20 juillet 2011 entre l’État, l’ONF et la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR). L’équilibre du dispositif repose sur les éléments suivants :

– L’ONF assure sa part propre de responsabilité dans la maîtrise des coûts, et veille à un renforcement de la valeur ajoutée dégagée sur les différentes activités de l’établissement. Cela se traduit par la perte inacceptable de 693 emplois entre 2012 et 2016 et par la nouvelle diminution de nombre d’unités territoriales, qui passera de 340 à 300, ce qui remet en cause le maillage territorial censé être assuré par l’ONF.

– L’évolution des frais de garderie qui traduisent l’engagement financier des communes forestières. Il comprend une contribution à l’hectare de forêt gérée, d’un montant de 2 euros par hectare de forêt gérée en 2013 et un pourcentage de l’ensemble des produits forestiers de l’année n-1 de 10 % pour les forêts situées dans les communes classées en zone de montagne et à 12 % pour les autres communes. La nouvelle taxe de 2 euros est très lourde pour certaines communes et attaque les fondements d’une gestion nationale et d’une péréquation légitime entre forêts riches et forêts pauvres. C’est d’abord à l’État d’assurer le financement de la gestion forestière. En outre, comment justifier cette taxe par hectare de forêt « gérée » quand on sait que l’ONF ne peut plus assurer ses missions en raison de la diminution des personnels ?

– Un versement compensateur de l’État, stabilisé à 120,4M€.

c) Le PLF 2013 assure le quasi respect des engagements du contrat d’objectifs et de performance avec l’ONF

Dans le cadre du COP 2012-2016, le versement compensateur de l’État est maintenu dans le cadre du PLF 2013, comme en 2012, à 120,4 M€.

Par ailleurs, au-delà du versement compensateur, l’État accorde une contribution complémentaire de 43,8M€. Au total, 164,2 M€ sont directement affectés à l’ONF, soit 78,5% des dotations de l’action 11. Cette dotation était de 166 M€ en 2012.

LES COMPTES DE L’ONF EN 2011 ET 2012

En 2011, les comptes de l’ONF prévoyaient 792 M€ de recettes - dont 236 M€ de ventes de bois et 63 M€ d’autres produits du domaine (38 %), 144 M€ de chiffre d’affaires concurrentiel et des missions d’intérêt général (18 %) et 142 M€ de ressources au titre du régime forestier (18 %).

Ils prévoyaient 791M€ de dépenses – dont 474M€ de masse salariale (59 %) et 170M€ de charges externes (22 %) – et 84 M€ d’investissements.

En 2012, la conjoncture économique a été plus difficile que celle prévue lors d’élaboration du budget en raison d’un net ralentissement de la croissance mondiale et de la forte réduction du nombre de mises en logements. Le budget voté à l’équilibre, prévoyait initialement 248 M€ de ventes de bois (+5%), 180 M€ de chiffre d’affaires concurrentiel et mission d’intérêt général (+24%). Au niveau des charges, il prévoyait 484M€ de masse salariale (+2%) et 190M€ de charges externes (+11%).

Des pertes de 50 millions d’euros sont évoquées pour 2012. Selon l’ONF, « des mesures internes de maîtrise des charges ont été engagées ». Elles se traduiront certainement par une pression accrue sur les employés de l’Office pour plus de rentabilité.

C.— ACTION 12 : DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA FILIÈRE ET GESTION DURABLE

1. Des crédits en forte baisse en raison notamment du ralentissement programmé du plan Klaus

Les crédits de l’action 12 « Développement économique de la filière et gestion durable » (27,9 % des moyens du programme) poursuivent deux objectifs : le développement économique de la filière forêt-bois et la gestion durable des forêts.

Les moyens qui y sont consacrés sont de 131,19M€ en AE et 81M€ en CP. Ils connaissent donc une forte baisse de 43 % en AE et de 29,2 % en CP. Une partie de cette baisse s’explique par le ralentissement programmé des engagements du plan Klaus.

La tempête Klaus du 24 janvier 2009 a frappé les régions d’Aquitaine, de Midi-Pyrénées et du Languedoc-Roussillon. Près de 700 000 hectares de forêts ont été touchés à des degrés divers, ce qui correspond à un volume de bois tombé de 42,5 Mm3, dont 37,5 pour le pin maritime, soit l’équivalent de plus de 5 années de récolte. La région Aquitaine a concentré 88 % des dégâts. Le coût économique global de la tempête ayant été évalué à 5 milliards d’euros, la France a pu bénéficier du soutien du fonds de solidarité de l’Union européenne (FSUE) à hauteur de 109 M€, dont plus de la moitié (58 M€) a été attribuée au secteur forêt.

Le Gouvernement a mis en place un plan de solidarité nationale, validé par la Commission européenne le 3 juin 2009. Il est destiné à aider les acteurs de la filière à réparer les dégâts, à valoriser les bois des arbres endommagés et à préparer la reconstitution du massif forestier. Il repose sur deux piliers :

- des subventions consacrées principalement au déblaiement des pistes et routes forestières, au transport et au stockage des bois, ainsi qu’au nettoyage et à la reconstitution des forêts sinistrées,

- des prêts bonifiés destinés à accompagner la filière pour la valorisation des bois. Ces prêts peuvent être garantis par l’État.

Initialement, le plan Klaus avait une durée de huit ans et s’étendait sur la période 2009-2016. Son montant était de 415 M€. Fin 2012, les ouvertures de crédits décidées en loi de finances s’élevaient à 304 M€, l’accent ayant été mis sur les premières années du plan.

ÉCHELONNEMENT DES PAIEMENTS DU PLAN KLAUS

Année

Dotation

2009-2010

110 M€

2011

99,5 M€

2012

94,7 M€

Il restait donc à ouvrir 111 M€ d’AE pour les années 2013 à 2016 soit 28 M€ par an en moyenne. Le Gouvernement a décidé cette année d’attribuer une dotation complémentaire de 12 M€ par an sur cinq ans en raison des besoins exprimées par les professionnels de terrain.

Le niveau de la dotation budgétaire accordé au plan Klaus en 2013 est donc de 44 M€ en AE et de 51,1 M€ en CP.

2. Une baisse importante de presque toutes les autres lignes budgétaires

Si l’on exclut les crédits affectés au plan Klaus, la dotation budgétaire de l’action 11 connaît malgré tout une baisse de 15 % par rapport au PLF 2012. Comme le montre le tableau ci-après, presque toutes les lignes budgétaires de l’action sont en baisse.

Votre rapporteur s’interroge notamment sur les conséquences pour accompagner une politique de relocalisation des productions qui exige l’adaptation de l’outil artisanal et industriel à notre ressource forestière.

Le développement de l’utilisation du bois dans notre pays exige des investissements conséquents.

L’objectif consiste à pouvoir fournir aux activités de seconde transformation des « produits finis ou semi finis » répondant aux exigences des cahiers des charges dressés par les entreprises de transformation. Pour rattraper le retard accumulé, il s’agit de savoir produire non seulement des bois sciés, mais encore séchés, rabotés, usinés, reconstitués (bois massif aboutés contrecollés).

La réponse réside dans la mise en place d’un ensemble d’activités complémentaires en amont et en aval de la scierie. Ces outils, créateurs de richesses et d’emplois favoriseront une optimisation sur place de la valorisation des produits et permettront de limiter ainsi le transport des matières préjudiciable à la fois à l’équilibre économique et environnemental. Cette politique a un coût.

 

PLF 2012

PLF 2013

 

AE

CP

AE

CP

Études et recherche

1 394 265

1 402 915

963 448

965 448

Centre national de la propriété forestière

16 147 436

16 147 436

16 356 379

16 356 379

Arboretum des Barres

284 900

284 900

294 200

294 200

Charges de bonification

0

4 000 000

0

2 000 000

Investissements forestiers

XX

XX

4 814 822

11 329 860

Plan chablis 1999

0

8 352 531

XX

XX

Dessertes forestières

4 601 016

5 504 110

XX

XX

Investissements sylvicoles

1 848 743

1 843 650

XX

XX

Stratégies locales de développement

198 148

423 331

XX

XX

Nettoyage et reconstitution à la suite de la tempête Klaus

84 745 000

83 248 750

44 000 000

51 104 235

Aide aux entreprises d’exploitation et de transformation du bois

XX

XX

3 120 000

5 153 477

Aide à la compétitivité des scieries

4 335 041

5 699 261

XX

XX

Subvention aux micro-entreprises

3 700 000

4 127 800

XX

XX

Animation des filières régionales et appui aux stratégies locales de développement

4 163 588

4 742 431

2 417 639

5 407 673

Institut technologique Forêt cellulose-bois-construction ameublement

7 500 000

7 500 000

7 500 000

7 500 000

Évaluation, prospectives forestières et appuis aux démarches collectives

2 369 741

2 369 741

1 535 940

1 535 940

II.— L’AMÉLIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL EN FORÊT, UNE NÉCESSITÉ POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA FILIERE BOIS

A.— LES CARACTÉRISTIQUES DU TRAVAIL EN FORÊT …

1. Un métier de vocation et de passion

Toutes les personnes auditionnées par votre rapporteur ont réaffirmé que les métiers de la forêt sont des métiers pour lesquels les travailleurs éprouvent une véritable passion. Certaines personnes auditionnées ont même évoqué une sorte « d’entrée dans les ordres » : avant tout, ce sont des travailleurs qui aiment la nature. Souvent issus du milieu rural, ils veulent contribuer à sa préservation par leur action : gestion d’une forêt, entretien des cours d’eau, coupe du bois.

Les représentants syndicaux ont par exemple évoqué à propos de l’ONF l’existence d’une véritable « culture maison » toujours forte, ses agents se reconnaissant à travers des marqueurs sociaux visibles et importants tels l’uniforme ou le logo – ci-dessous.

Ils possèdent surtout une véritable « éthique » par rapport à leur métier, et se sentent investis d’une forme de responsabilité vis-à-vis de la société. La conscience de la contribution à un service public est extrêmement présente. Le métier d’agent patrimonial « consiste à transmettre une forêt à ses successeurs » selon une expression entendue à plusieurs reprises lors des auditions.

Ces éléments expliquent largement que le « garde forestier », pour reprendre l’expression courante, ait un véritable capital sympathie dans l’opinion.

2. Pénibilité et danger du travail en forêt

Les métiers forestiers ont pourtant en commun une forte pénibilité et un caractère fortement « accidentogène ». Cela a été très bien mis en lumière par le récent rapport du Conseil économique, social et environnemental consacré à la valorisation de la forêt française (4).

En effet, ce rapport montre que, dans le champ de compétences de la MSA, les secteurs d’activité présentant les indices de fréquence d’accidents les plus élevés sont l’exploitation des forêts, puis les scieries fixes, avant les métiers hippiques et l’élevage bovin.

Par ailleurs, selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), la filière bois (scierie, menuiserie…) est, après le BTP, le secteur où le nombre d’accidents et de maladies professionnelles est le plus élevé.

À ces chiffres déjà alarmants, il faut rajouter les statistiques suivantes :

– Cette filière déplore un accident par an pour 10 salariés. Parmi les victimes, 1 sur 100 subit des séquelles permanentes.

– Les poussières de bois sont aujourd’hui la deuxième cause de cancers liés au travail.

– Le risque lié aux machines est à l’origine de près de 20 % des accidents et de 40 % des accidents graves.

a) Les ouvriers forestiers

Parmi les ouvriers forestiers (sylviculture, exploitation du bois -bûcherons, débardeurs…), 9 sur 10 sont concernés à des degrés divers par la pénibilité. Celle-ci se définit en fonction de plusieurs facteurs, souvent cumulatifs dans le cas des métiers en forêt :

– travail exposé aux intempéries et à des hautes ou basses températures,

– travail exposé au bruit,

– travail exigeant des efforts importants, des postures contraignantes, ou des ports de charges lourdes,

– travail dangereux.

Ce travail, chacun peut l’imaginer, vieillit prématurément. Encore une fois, les chiffres sont inquiétants. Les interruptions de carrière pour maladie ou accident grave concernent un ouvrier forestier sur deux (5).

b) Les scieries

Les contraintes auxquelles les travailleurs des scieries sont particulièrement exposés sont similaires à celles des ouvriers forestiers, notamment en termes de dangerosité en lien avec les machines. Le travail dangereux concerne ainsi plus de 7 personnes sur 10. Une personne sur trois a connu une interruption de carrière pour maladie ou accident grave (6).

3. Des horaires supérieurs à la moyenne

En forêt, la durée quotidienne et hebdomadaire du travail est généralement longue. Cela s’explique par plusieurs raisons structurelles. En effet, l’éloignement du chantier ou du parterre de coupe, le caractère saisonnier du travail, l’intérêt d’utiliser certaines machines en continu, les conditions climatiques et l’environnement souvent difficiles encouragent à faire de grosses journées, voire de grosses semaines de six jours.

Mais le temps de travail tend aussi à se prolonger pour d’autres raisons. En effet, il existe de fortes incitations au rendement liées à la rémunération ou à la sous-traitance. Des personnes auditionnées par votre rapporteur ont indiqué que le non-respect des horaires légaux était une pratique courante, notamment en raison de la concurrence croissante d’une main d’œuvre étrangère à bas coût.

La durée hebdomadaire du travail dans ce secteur est en conséquence égale ou supérieure à 42 heures, soit largement au-dessus de la moyenne française.

4. Des conditions de rémunération insuffisantes

S’agissant des rémunérations, le secteur forestier est celui où le salaire minimal moyen est le plus faible comparé à toutes les autres branches agricoles. Par exemple, il s’élève à 9,28 euros de l’heure pour un employé forestier contre 9,49 euros de l’heure pour l’équivalent dans une entreprise horticole ou 9,64 euros de l’heure dans une coopérative d’utilisation de matériel agricole (7).

L’une des personnes auditionnées par votre rapporteur indiquait qu’un bon bûcheron travaillant six jours sur sept peinait à atteindre 1 500 euros de rémunération brut mensuelle.

Ce constat est injustifiable au vu des conditions de travail de ces travailleurs forestiers !

B.— …SONT UN FREIN POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA FILIÈRE BOIS

1. Un potentiel énorme

Avec plus de 25 millions d’hectares boisés, dont seize en métropole (28 % du territoire) et neuf dans les régions ultramarines, la France est le troisième pays le plus boisé de l’Union européenne – le quatrième en se limitant à la métropole, derrière la Suède, la Finlande et l’Espagne.

Taux de boisement en France, IFN, 2010

La France dispose donc d’un formidable potentiel, d’autant plus que la forêt joue différents rôles complémentaires, appelés à avoir de plus en plus d’importance.

Elle dispose tout d’abord d’un rôle productif appelé à croître puisque la demande en bois augmente, en particulier pour des besoins énergétiques. Le bois sera notamment davantage sollicité pour atteindre l’objectif de 20 % d’énergie renouvelable en 2020. Mais la forêt a également un important rôle à jouer en matière d’adaptation au changement climatique, de stockage du carbone, de maintien de la biodiversité et de réponse aux nouvelles attentes sociétales.

2. Une filière en difficulté

Malgré ces atouts, la filière forêt - bois française est confrontée à de graves difficultés.

Le chiffre d’affaires de la filière est évalué à 57 milliards d’euros. Les activités qu’elle regroupe ne génèrent que 0,8 % du produit intérieur brut, contre plus de 5 % en Finlande et plus de 3 % en Suède.

En incluant la distribution, la filière emploie près de 450 000 personnes, mais 10 % seulement d’entre elles travaillent en forêt (sylviculture, exploitation forestière…). À titre de comparaison, la production automobile représente actuellement 220 000 emplois en France.

Surtout, cette filière est à l’origine d’un déficit d’environ 6 milliards d’euros pour la balance commerciale française, soit 9 % du déficit total, ce qui en fait le deuxième poste après l’énergie.

Celui-ci s’est fortement accru au cours des dix dernières années, marquées il est vrai par deux graves tempêtes, celle de 1999 (Lothar) et celle de 2009 (Klaus). Les principales activités déficitaires sont la pâte à papier, les cartons et l’ameublement. Mais ces importations concernent aussi le bois scié dont le volume n’a cessé de progresser depuis une vingtaine d’années : en 2006, les importations de bois scié représentaient déjà près de 45 % de la production nationale non exportée au lieu de seulement 26 % en 1995. Pour la seule décennie 1995 - 2005, les importations de bois sciés ont enregistré une augmentation de 73,34 %. Pour la seule année 2011, les exportations de grumes de chêne françaises ont affiché une progression de 25 %, dont une augmentation de 108 % à destination de la Chine.

La France se trouve dans la position paradoxale d’un pays en voie de développement. Elle produit de la matière première qu’elle exporte, et importe des produits transformés de Chine et d’autres régions du monde. La France doit donc reconquérir des parts de marchés au niveau des filières de la transformation du bois. Ces outils industriels étant fortement capitalistiques, il faut notamment y encourager l’investissement.

Cette situation n’est pourtant pas inéluctable. L’Allemagne, par exemple, emploie deux fois plus de salariés dans la filière bois que la France - alors que ce pays dispose d’une plus petite forêt que la forêt française - et surtout a une balance commerciale largement excédentaire, à hauteur de 4,5 milliards d’euros en 2011.

SNPF, septembre 2012

3. Une filière qui peine à attirer et garder ses employés malgré la passion qui les anime

a) La structure de l’emploi dans la filière bois

Les emplois de la filière se répartissent de la manière suivante (8) en y intégrant les fonctions de commercialisation :

- 40 000 pour la gestion et l’exploitation forestière,

- 12 000 pour la première transformation (scieries),

- 230 000 pour la seconde transformation (meubles, papiers, cartons, panneaux…),

- 130 000 pour la construction (charpentes, aménagement intérieur…),

- 30 000 pour l’énergie.

b) Une filière qui peine à recruter

Selon certaines estimations, plusieurs dizaines de milliers d’emplois pourraient être créés si les conditions nécessaires étaient remplies. Par exemple, le rapport de M. Jean-Louis Bianco au Premier Ministre « La forêt : une chance pour la France », avait évalué en 1998 un potentiel de 100 000 emplois supplémentaires dans l’ensemble de la filière forêt-bois.

Alors que les métiers de la nature et de l’environnement connaissent aujourd’hui un succès grandissant auprès des jeunes et que les besoins économiques existent, les conditions de travail expliquent en grande partie des difficultés croissantes de recrutement soient constatées pour la plupart des métiers de l’exploitation forestière et de la transformation du bois (9). Comment la filière bois pourrait-elle se développer et répondre aux défis de demain dans ces conditions ?

Le rapport du Conseil économique, social et environnemental fait à cet égard un constat dramatique : « Cette situation se traduit logiquement par des difficultés de recrutement de salariés bien formés et a pour conséquence de rendre de plus en plus nécessaire le recours à de nouveaux types de main-d’œuvre dans des conditions parfois peu respectueuses de la réglementation du travail : travailleurs indépendants qui n’ont pas toujours les moyens de respecter cette règlementation, contrats CDI à temps très partiel ou encore salariés étrangers, issus ou non d’États-membres de l’UE, sans que cette tendance puisse être précisément chiffrée. »

Il faut sortir de ce cercle vicieux pour développer la filière bois en France. Alors qu’il existe des besoins en emplois, la sylviculture, l’exploitation de bois et les scieries ont ainsi respectivement perdu en dix ans 23 %, 34 % et 30 % de leurs salariés.

c) Une filière qui peine à conserver ses travailleurs

• La difficile reconversion des ouvriers abimés par leur métier

S’agissant des métiers de l’exploitation forestière, on observe une importante proportion de souhaits de reconversion ainsi que des situations d’inaptitude physique pouvant conduire à des licenciements, après seulement quelques années d’ancienneté. Les souhaits de reconversion sont souvent des déchirements pour les travailleurs salariés qui aiment leur métier mais qui ne peuvent faire face à la réalité des conditions de travail et de rémunération et aux faibles perspectives d’évolution de carrière inhérentes à ces activités.

En effet, le taux d’inaptitude définitive pour le secteur forestier est de 1,7 %, contre 0,9 % pour l’ensemble des secteurs relevant de la MSA. De plus, 20 % des ouvriers prennent leur retraite sans avoir acquis les annuités suffisantes pour bénéficier d’une pension à taux plein, compte tenu notamment de la pénibilité de leur travail et des problèmes de santé dont ils souffrent.

Comme si ces éléments ne suffisaient pas à susciter l’indignation, votre rapporteur note, suite aux auditions qu’il a effectué, que les reconversions sont extrêmement difficiles, y compris à l’ONF. Les travailleurs qui aiment la nature, l’extérieur et la forêt sont souvent reclassés dans des activités de bureau avec des emplois qui ne correspondent pas à leurs compétences.

• L’insuffisante reconnaissance des maladies professionnelles

Le nombre de maladies professionnelles, avec ou sans arrêt, a augmenté au cours des dernières années. Il était de 148 en 2004, et est passé à 154 en 2010. Les affections péri-articulaires représentent 69 % des maladies professionnelles. Viennent ensuite les lombalgies liées aux vibrations et à la manutention (8 %), les maladies liées aux tiques (4 %) et les affections liées aux poussières de bois.

Il a été indiqué à votre rapporteur que la reconnaissance des maladies professionnelles relève souvent du parcours du combattant.

L’exemple de la maladie de Lyme est topique. Cette tique engendre à son stade 1 une éruption inflammatoire cutanée. Or, soit parce que les travailleurs forestiers ne consultent pas de médecins, soit parce que les médecins sont insuffisamment sensibilisés à cette maladie, la maladie de Lyme n’est souvent diagnostiquée qu’au stade 2 ou 3 alors même qu’elle engendre à ce niveau des troubles neurologiques qui peuvent être particulièrement handicapants. De plus, les personnes auditionnées par votre rapporteur ont indiqué que si les frais liés aux antibiotiques nécessaires au traitement du stade 1 étaient bien remboursés, les soins palliatifs nécessaires aux stades 2 et 3 ne seraient pas totalement pris en charge.

• Plusieurs cas dramatiques de suicides

Une enquête dite de « climat social », menée en 2005 par Ipsos, a révélé que l’inquiétude des personnels de l’ONF était nettement supérieure à celle d’autres entreprises publiques comme La Poste ou la SNCF. Si l’ensemble des suicides depuis 2005 à l’ONF ne peuvent être imputés aux conditions de travail, le lien entre les deux ne doit pas être exclu, comme l’a indiqué votre rapporteur dans la première partie de son avis. Aussi, il n’est pas acceptable que la direction s’appuie sur la procédure pour bloquer la reconnaissance des certains suicides en accident de service, notamment quand les ayants droits ont omis d’effectuer la déclaration d’un accident du travail. Le retour à des conditions de travail apaisées exige de ne pas s’enfermer dans le déni pour masquer les différentes responsabilités.

C.— QUELQUES PISTES D’ÉVOLUTION POUR RENDRE LA FILIÈRE PLUS HUMAINE ET PLUS ATTRACTIVE

1. Améliorer les conditions de travail des travailleurs

a) Renforcer les règles de sécurité, y compris celles s’appliquant à l’employeur

Les articles L. 4121-1 et suivants du code du travail disposent que l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleur. Le respect des règles de sécurité élevées, le choix et l’entretien des équipements ainsi que la formation des personnels s’avèrent par conséquent essentiels.

Votre rapporteur salue notamment l’adoption de nouvelles règles de sécurité qui actent l’interdiction de travailler seul en forêt et oblige à disposer d’un téléphone portable, notamment pour pouvoir alerter les secours.

Toutefois, pour réduire la fréquence et la gravité des accidents du travail et des maladies professionnelles, il est indispensable d’aller plus loin et de mener des actions de prévention spécifiques concernant le travail en milieu extérieur et les gestes et postures pour prévenir l’apparition de troubles musculo-squelettiques par exemple. Il convient également de sensibiliser les travailleurs indépendants, qui négligent souvent les impératifs de sécurité.

A ce titre, le rôle de prévention des mutuelles et assurances doit être amplifié, en lien avec des actions de formation continue.

b) Redynamiser les conventions collectives

Selon la MSA, il existe 32 conventions collectives (8 départementales, 8 pluri-départementales et 16 régionales) pour les salariés des exploitations forestières et 17 pour ceux des scieries. Cependant, un nombre significatif d’entre elles serait « en sommeil », n’ayant parfois donné lieu à aucune négociation ni avenant depuis plusieurs années.

Votre rapporteur estime qu’il est indispensable de réactiver ces conventions afin de garantir à tous les salariés des conditions de travail satisfaisantes.

c) Renforcer la mécanisation dans le respect du caractère durable de la forêt

La mécanisation maîtrisée, qui fait appel à des engins adaptés et à des techniques appropriées pour ne pas porter atteinte aux milieux naturels et particulièrement aux sols, permet de rendre les travaux moins pénibles. Elle permet en outre de fournir aux salariés des tâches plus valorisantes.

Elle doit cependant s’accompagner d’actions de formation, les accidents du travail liés aux machines restant importants.

d) Encourager la gestion collective

La forêt privée française a la particularité d’être particulièrement éclatée. Ainsi, les parcelles ont en moyenne une superficie d’un demi-hectare et chaque propriétaire possède en moyenne deux hectares.

Au-delà des efforts déjà effectués, il faut développer la vente collective, et de manière générale les mécanismes de gestion collective qui sont, la pratique l’a montré, plus respectueux des conditions de travail des salariés.

2. Améliorer la reconnaissance des accidents de travail et des maladies professionnelles

a) Création de comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) interentreprises

Le CHSCT est une institution représentative du personnel dont la présence est obligatoire pour les entreprises d’au moins 50 salariés. Il joue un rôle important puisqu’il contribue à la protection de la santé ainsi qu’à la sécurité des salariés. De plus, il participe activement à l’amélioration des conditions de travail, et veille à ce que tous les éléments du règlement concernant la sécurité au travail soient respectés. Pour cela, il a à sa charge d’analyser tous les risques que pourraient encourir les employés sur leur lieu de travail, et doit déterminer si un poste ne comporte pas de risques particuliers.

Les entreprises du secteur forestier sont souvent de petites entreprises, qui ne sont donc pas soumises à l’obligation de créer un CHSCT, prévue par l’article L. 4611-1 du code du travail.

La création de CHSCT interentreprises, selon des modalités tenant compte de la spécificité du secteur, permettrait un meilleur suivi de l’amélioration de l’hygiène, de la sécurité et des conditions de travail, notamment en forêt, pour la prévention et la réduction des accidents et maladies professionnelles.

b) Améliorer la reconnaissance des maladies professionnelles

Les personnes auditionnées par votre rapporteur lui ont signalé, comme évoqué précédemment, que la reconnaissance des maladies professionnelles, et leur prise en charge, restait difficile. Elle doit être améliorée.

3. Développer les secondes carrières et les cessations anticipées d’activité

a) La formation professionnelle

De plus, la formation professionnelle continue doit être fortement mobilisée pour accompagner les évolutions des métiers résultant de la mécanisation et de modes de gestion plus durables de la forêt, et permettre aux salariés d’accroître leurs compétences et d’élever leur niveau de qualification, pour pouvoir bénéficier de véritables évolutions de carrière.

La formation professionnelle doit en outre être adaptée au fait que les difficultés pour les salariés interviennent en moyenne vers l’âge de 40 ans.

Des personnes auditionnées par votre rapporteur ont notamment souligné l’importance de développer les épreuves de type pratique dans les concours administratifs afin de valoriser l’expérience acquise par les salariés de terrain et leur offrir ainsi de nouvelles perspectives de reclassement.

b) Le droit à une retraite anticipée

Un dispositif de cessation anticipée d’activité a été mis en place à l’ONF par deux accords nationaux signés en 2004 et 2007. Il permet de reconnaître la pénibilité et la dangerosité des métiers exercés tout en assurant une plus grande efficience dans la réalisation des travaux. La pénibilité et la dangerosité de ces métiers sont reconnues par la mise en place d’un dispositif de cessation progressive d’activité à partir de 57 ans, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur.

Ce droit à la cessation anticipée d’activité doit être généralisé aux autres salariés du secteur.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.—  AUDITION DE M. STÉPHANE LE FOLL, MINISTRE DE L’AGRICULTURE, DE L’AGROALIMENTAIRE ET DE LA FORÊT

Au cours de sa réunion du 23 octobre 2012, la commission a auditionné M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, sur les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

M. le président François Brottes. Mes chers collègues, nous sommes heureux d’accueillir M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, qui vient nous présenter le budget de son ministère, dont les priorités sont l’éducation, la qualité sanitaire, l’installation des jeunes et l’élevage.

M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Contrairement à ce qu’on a pu lire dans la presse, le projet de budget pour 2013 prévoit une baisse des crédits du ministère de l’agriculture de 3 %, et de 5 % hors enseignement. Voilà la réalité.

Mme Marie-Lou Marcel, rapporteure pour avis, pour l’agriculture et l’alimentation. Les crédits alloués à la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » s’élèvent en 2013 à 3,31 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 3,36 milliards en crédits de paiement. Ces chiffres s’entendent hors contribution directe de l’État au compte d’affectation spéciale pensions, et hors crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2012 relatifs à la mesure non mise en œuvre – pour cause d’incompatibilité avec le droit communautaire – d’exonérations de charges sociales pour l’emploi permanent en agriculture.

Il s’agit d’un budget adapté à une situation de crise, qui s’inscrit dans un projet plus vaste, un budget général qui a la double obligation de conjuguer effort et justice. C’est donc un budget qui s’inscrit dans l’action gouvernementale de rétablissement de nos finances publiques et de priorisation des crédits.

La mission agriculture du projet de loi de finances pour 2013 subit, comme la quasi-totalité des missions budgétaires, des gels, voire quelques baisses. C’est notamment le cas pour les budgets des programmes 154, « Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires », et 215, « Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture ». Malgré ce cadre particulièrement contraint, le projet de budget augmente les dotations du programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation ».

Le programme 154 préserve les dispositifs indispensables au maintien des revenus des exploitants de certaines filières : sont ainsi reconduits au même niveau qu’en 2012 les crédits consacrés à la part nationale de la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes, à hauteur de 165 millions d’euros, et les crédits dédiés à l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), pour 248 millions d’euros.

Les montants de la dotation pour l’installation des jeunes agriculteurs correspondent à la possibilité d’accompagner 6 000 installations en 2013. Les montants budgétés sont supérieurs à ce qui a été effectivement engagé en 2011, année où le nombre d’installations a été de 5 040. La diminution de ces lignes de crédits ne correspond pas à une diminution du soutien à l’installation des jeunes agriculteurs, mais au souci d’une budgétisation plus sincère.

Cependant, monsieur le ministre, qu’en est-il du fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture (FICIA) qui connaît une baisse importante ? De manière plus générale, quelle sera votre politique de l’installation ?

La contrainte budgétaire qui porte sur les aides à la modernisation des exploitations agricoles a conduit à privilégier, face au renchérissement de l’énergie, le renforcement de la performance énergétique. La dotation du plan de performance énergétique augmente de 3 millions d’euros, passant de 9 millions en 2012 à 12 millions en 2013. Les enjeux environnementaux ont été pris en compte avec le maintien à 4 millions d’euros de la dotation budgétaire du plan végétal pour l’environnement. Le thème de l’avis budgétaire dont je suis rapporteure sera d’ailleurs consacré à l’impact de la volatilité du prix des matières premières sur la filière de l’élevage et sur les adaptations qui peuvent être envisagées.

Néanmoins, il me semble que le plan de modernisation des bâtiments d’élevage, qui vise à renforcer la compétitivité et la durabilité des exploitations et à maintenir une activité d’élevage respectueuse de l’environnement au travers de la rénovation et de l’adaptation des bâtiments d’élevage, subit une baisse importante en autorisations d’engagement, passant de 48 millions d’euros en 2012 à 31 millions d’euros en 2013. Il est à noter que cette baisse est beaucoup plus réduite pour les crédits de paiement, qui passent de 47 à 46 millions d’euros. Cette tendance pourra-t-elle être réduite par une fongibilité entre les différents plans ? Cette fongibilité pourrait-elle être envisagée entre régions lorsque les enveloppes ne sont pas entièrement consommées ?

Par ailleurs, je déposerai en séance publique un amendement visant à proroger le dispositif du crédit d’impôt pour remplacement, qui a largement fait la preuve de son efficacité, notamment pour les éleveurs. Pouvez-vous nous confirmer votre soutien à cette prorogation, comme vous vous y êtes engagé dans votre communiqué de presse du 18 octobre ?

Je souhaite également vous interroger sur le dispositif de l’article 60 relatif au recentrage sur les bas salaires de l’exonération des cotisations patronales dues pour l’emploi de travailleurs occasionnels agricoles. Cet article exclut également du champ de l’exonération les cotisations accidents du travail et maladie professionnelle, afin de favoriser la prévention en la matière. Ne risque-t-il pas cependant de créer une trappe à bas salaires ?

Je me réjouis enfin de la priorité que vous accordez à l’enseignement technique agricole, dont chacun connaît l’utilité pour l’insertion professionnelle. Les crédits augmentent de 1,7 % et 230 postes vont être créés. Ce point ne relève pas directement du domaine de mon avis, mais je tenais à le souligner, car cette tendance fait suite à des années de désengagement pour cet enseignement d’excellence.

En conclusion, j’émets un avis favorable sur les crédits de la mission agriculture.

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis, pour la forêt. Mes chers collègues, on a trop cru que seules des politiques d’austérité pouvaient réduire les déficits et relancer la croissance. Il en est de la forêt comme de bien d’autres dépenses utiles. Ce que les Français attendent, ce n’est pas que nous nous enfermions sous l’écorce de la rigueur, mais que nous dégagions des perspectives nouvelles, dans le souci de l’intérêt général et d’un réel développement durable.

Ce volontarisme s’impose plus encore, chacun le comprend, s’agissant du programme 149 consacré à la forêt. À l’heure où l’on fait grand cas de l’environnement, où l’on promeut l’utilisation du bois dans le bâtiment, le chauffage au bois et la biomasse, il serait regrettable que les crédits affectés à la forêt traduisent un manque d’ambition, et d’autant plus que le déficit de la balance commerciale de la filière bois s’élève à 6,6 milliards d’euros en 2011, alors que nous avons l’une des plus belles forêts du monde.

Les dotations globales du programme 149 pour 2013 s’élèvent à 290,74 millions d’euros en autorisations d’engagement, au lieu de 349,68 millions en 2012, et à 315,42 millions d’euros en crédits de paiement, au lieu de 358,44 millions en 2012. Cela représente une baisse de 17,2 % en AE et de 12,3 % en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2012.

Certes, cette baisse traduit principalement le ralentissement programmé des engagements et des paiements du plan tempête Klaus de 2009, pour lequel l’accent avait été mis sur les premières années. Mais, même en excluant les crédits affectés à ce plan, les crédits de l’action 12, « Développement économique de la filière et gestion durable », accusent une baisse de 15 %. À l’échelle de l’ensemble du programme 149, cette baisse n’est cependant que de 3,3 %.

Monsieur le ministre, quatre forestiers se sont suicidés à l’été 2011, ce qui porte le nombre de suicides à 20 agents patrimoniaux en six ans. Ce métier a connu de grands bouleversements ces dernières années, passant d’une logique de service public – veiller sur un patrimoine boisé et répondre aux besoins des usagers – à une logique de chiffres consistant à atteindre des objectifs productivistes et financiers. Comment améliorer les conditions de travail des salariés dans ce contexte ?

L’Office national des forêts (ONF) aura perdu 2 200 emplois entre 2001 et 2016, et comptera environ 300 unités territoriales en 2016 contre 340 aujourd’hui. Peut-il encore assurer un véritable maillage territorial dans ces conditions ?

Le système des quotas carbone va permettre de récupérer des droits à polluer en 2013. La directive européenne exige que 50 % des sommes récoltées soient affectées à des actions vertueuses. À ce titre, la séquestration du carbone par la forêt et l’utilisation du bois en substitution des énergies fossiles donneraient une légitimité à la filière pour revendiquer une part des crédits dans le cadre d’un fonds forestier stratégique carbone. Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre ?

Compte tenu des réserves que je viens d’évoquer, je ne puis donner un avis favorable aux crédits affectés au programme « Forêt ». J’en conviens néanmoins : l’État respecte pour l’essentiel ses engagements vis-à-vis de l’ONF. C’est pourquoi, dans le souci d’éviter une opposition stérile, je m’en remets à la sagesse de la Commission.

M. le président François Brottes. Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez mon soutien en ce qui concerne le fonds carbone.

Mle ministre. Je le rappelle : les priorités de ce budget sont l’enseignement et la sécurité sanitaire.

Le Gouvernement est très attaché à garantir la capacité d’installation. Les crédits inscrits au budget 2013 permettront de financer 6 000 installations – 5 000 devraient être enregistrées cette année. Nous compléterons les 7 millions d’euros initialement prévus au FICIA par 4 millions, afin d’atteindre les 11 millions inscrits au budget précédent. Les Assises de l’installation qui se tiendront en janvier permettront de débattre d’un cadre rénové de l’installation dans la perspective de la loi d’avenir. Elles seront l’occasion de repenser les prêts bonifiés, ainsi que les installations hors cadre.

La fongibilité des enveloppes entre les plans et les régions sera possible. Cela permettra d’assurer le financement du plan de modernisation des bâtiments d’élevage, en particulier en faveur des jeunes.

Nous irons jusqu’au bout sur le dossier européen du bien-être animal, en particulier des truies gestantes.

Je vous le confirme : le crédit impôt remplacement sera prolongé pour deux ans.

Les exonérations pour les travailleurs occasionnels ont coûté 610 millions en 2012, alors que 500 millions d’euros ont été budgétés dans le PLF 2012. J’ai pris l’engagement de maintenir ce budget à hauteur de 500 millions pour 2013. Le dispositif intégrera le volet des accidents du travail et sera concentré sur les salaires à hauteur de 1,5 SMIC. Il concernera 91 % des emplois occasionnels. Je ne peux donc pas laisser dire que la capacité des entreprises à employer des travailleurs saisonniers est remise en cause.

L’exonération du travail permanent, gagée sur les taxes sur les boissons sucrées votées par la précédente majorité, avait été inscrite pour un montant de 212 millions en loi de finances initiale 2012 ; or ils n’ont jamais été dépensés. La Commission européenne avait en effet indiqué que, en cas de non-conformité au droit européen, cette exonération devrait être remboursée. Par conséquent, personne n’a rien fait. Je vous indique donc que 140 millions d’euros reviendront à la Mutualité sociale agricole (MSA). C’est d’autant plus important que les exonérations prévues sur le travail saisonnier n’étaient pas remboursées à la MSA. Ainsi, nous rééquilibrons le système au travers des deux mécanismes.

S’agissant des accidents du travail, l’ensemble des syndicats de salariés que nous avons rencontrés ne comprend pas l’existence d’une exonération. Nous sommes donc revenus sur cette spécificité.

Monsieur Chassaigne, la forêt est un sujet qui a été abandonné ces dernières années. Sur les 72 milliards du déficit de la balance commerciale, 6 milliards concernent le bois. Les billes de bois que nous produisons sont sciées en Autriche, et la Chine nous renvoie même des meubles faits avec le bois de nos forêts ! Dans le même ordre d’idées, je signale au passage que nous produisons 18 000 tonnes de miel et en importons 15 000 de Chine : cette situation n’est pas acceptable et je prévois un grand plan sur le miel.

Il faut fixer une stratégie pour la forêt. L’ensemble des syndicats de l’ONF, que j’ai rencontrés ce matin, m’a fait part de son profond malaise. Certes, l’investissement est primordial, monsieur Chassaigne, mais la spirale de l’endettement risque de nous conduire vers davantage de difficultés. Nous devons dégager des marges de manœuvre pour l’avenir. Des groupes de travail réfléchiront au statut de droit privé des salariés de l’ONF, au déficit de l’Office sur un marché du bois en difficulté, aux investissements pour la forêt. En outre, l’Assemblée nationale débattra de ce sujet spécifique de la forêt au printemps, avant la discussion de la loi d’avenir sur la forêt.

Le contrat d’objectifs et de performance (COP) fixe un cadre. Certains auraient souhaité aller plus loin, puisque l’objectif de baisse des effectifs pour les ministères non prioritaires a été fixé à 2,5 %. Il ne sera que de 1,5 %.

Nous devons avoir une ambition pour la forêt, lui donner un deuxième souffle. Dans le cadre de la conférence environnementale, j’ai plaidé pour qu’elle soit partie prenante du futur fonds carbone. Il sera nécessaire de dégager des recettes pour la replantation et la rénovation. Il faudra aussi consentir des investissements pour le sciage et la transformation. Tous ces sujets seront abordés dans le cadre de la loi d’avenir.

M. Antoine Herth. Depuis dix ans que je suis député, je n’avais jamais entendu présenter aussi brièvement les crédits du ministère de l’agriculture. Faut-il s’en féliciter ou, au contraire, vous plaindre d’avoir à défendre un budget aussi étriqué ?

Moins que la diminution budgétaire, ce sont vos arbitrages qui nous surprennent. Ainsi, vous ne renouvelez pas 211 départs à la retraite sur 340 – soit deux départs sur trois, chiffre symbolique qui contraste avec tout ce que vous avez dit pendant des mois. La situation est plus mauvaise encore en dehors du périmètre de votre administration, par exemple pour FranceAgriMer, dont les crédits d’intervention baissent de 15,6 % et où 4,7 % du personnel sera amené à quitter son service. J’ose espérer que vous conserverez au moins la capacité d’expertise de cet organisme.

Les crédits aux agriculteurs en difficulté sont en diminution de 50 %, ceux du fonds d’allègement des charges de 69 %, les crédits pour la promotion internationale baissent de 39 %, ceux affectés au Fonds stratégique d’investissement de 48 %, et les crédits pour la prévention des risques sanitaires liés à l’alimentation chutent de 7 %. En revanche, les crédits pour le loup augmentent de 3,9 % – j’imagine pour faire plaisir à quelques-uns de vos amis écologistes.

Sur l’installation et les crédits pour le remplacement, vous avez reconnu des erreurs d’analyse. Sans doute saviez-vous que les parlementaires allaient se mobiliser sur ces sujets. Si vous voulez faire plaisir à vos amis écologistes, je vous suggère d’abonder les crédits de l’Agence Bio, en baisse de 6 %.

Le compte d’affectation spéciale « Développement agricole et rural » est calibré à 110 millions d’euros en dépenses, alors que les recettes sont évaluées à 115 millions d’euros pour l’année prochaine. Qu’allez-vous faire des 5 millions de recettes supplémentaires ?

Quelle orientation sera prise en matière de réduction des coûts de la main-d’œuvre permanente ? La fin de non-recevoir au niveau européen ne clôt pas le sujet, il faut trouver une solution.

Certes, la politique en matière d’installation est constante, mais elle est adossée à une politique européenne qui est facultative. Je voudrais vous entendre dire que, comme vos prédécesseurs, vous défendrez la politique d’installation dans le cadre de la prochaine politique agricole commune.

La semaine dernière, vous avez affirmé que l’élevage était votre priorité. Comment expliquez-vous la forte diminution du plan de modernisation des bâtiments d’élevage ?

Enfin, vous n’avez visiblement pas su convaincre M. Cahuzac de vous donner les moyens de mener une politique ambitieuse en faveur de l’agriculture. Il vous reste finalement à prendre des décisions courageuses qui ne coûtent rien, par exemple l’allègement des contraintes administratives sur les retenues d’eau ou la mise en œuvre de la directive « Nitrates ».

M. Germinal Peiro. Monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter pour les mesures que vous avez prises depuis quatre mois, et de votre combat pour faire de la PAC un outil plus juste.

Vous avez imaginé une modification du régime des aides parce que, avez-vous expliqué, il est difficile de renoncer au plafonnement ou à la dégressivité. Toutefois, vous défendez auprès d’autres pays européens l’idée d’un doublement de la prime des cinquante premiers hectares, ce qui permettrait de soutenir nombre d’exploitations, notamment celles qui font de la polyculture élevage. Il est anormal d’aider de la même façon ceux qui travaillent quatre à cinq heures par an pour cultiver un hectare de céréales, ceux qui travaillent quarante à cinquante heures par an sur un hectare avec un bovin, et ceux qui travaillent deux cents à deux cent cinquante heures par an en faisant de l’arboriculture ou du maraîchage. Si elle aboutit, votre idée introduira un peu plus de justice dans la PAC.

En outre, vous souhaitez la mise en place de nouvelles techniques culturales, en particulier l’agroécologie, qui constituent également des solutions pour améliorer la compétitivité de l’agriculture française. On peut effectivement faire mieux à la fois sur le plan environnemental et sur le plan économique.

Je tiens à vous dire combien nous avons apprécié votre position sur les OGM, notamment la demande formulée par la France d’une remise à plat des processus avant la mise sur le marché des produits OGM. Ce que l’étude de M. Séralini a montré, c’est l’insuffisance des tests sur quatre-vingt-dix jours, et l’on peut dire que, de ce point de vue, elle a fait progresser la prévention en matière de sécurité alimentaire et sanitaire.

Je tiens également à vous féliciter d’avoir, dès le mois de juin, interdit le Cruiser pour le colza. Cette décision a été très applaudie, il y a dix jours, au congrès européen de l’apiculture. Elle est attendue, maintenant, pour le maïs. Votre action en faveur des abeilles dépasse largement le secteur de l’apiculture et concerne l’agriculture tout entière.

Malgré la situation dont vous avez hérité, monsieur le ministre, vous avez sauvé l’essentiel : l’enseignement agricole, la qualité sanitaire, l’installation et le soutien à l’élevage. L’élevage français est en grand danger : les éleveurs renoncent à leur métier pour se tourner vers la culture de produits végétaux et de céréales, afin de « travailler moins pour gagner plus ».

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, je ne vous ferai pas grief d’un redimensionnement du budget de l’agriculture ; j’essaierai de comprendre les choses avec vous, comme je le fais avec les agriculteurs de ma région, la Bretagne.

J’ai noté votre volonté en matière d’installation, même si les dotations et les prêts aux jeunes agriculteurs sont en baisse. Notre politique agricole définit un cadre d’installation dont le but est de soutenir une agriculture de production, comme l’a dit le Président de la République à Rennes en septembre, afin de « produire mieux et plus ». N’êtes-vous pas inquiet de voir des installations en agriculture s’effectuer hors champ professionnel ? Je n’ai rien contre l’agriculture bucolique ou de loisir, mais, si nous voulons nourrir la planète et faire vivre notre industrie agroalimentaire, il nous faut un cadre professionnel.

En ce qui concerne la compétitivité, j’attire votre attention sur un phénomène croissant en France non seulement dans l’agriculture, mais dans le bâtiment et les travaux publics : il s’agit du dumping social, qui amène dans notre pays de la main-d’œuvre à bas coût. Comptez-vous agir en la matière avec vos homologues européens ?

En outre, j’aimerais connaître vos orientations en matière de cogénération, de méthanisation et de photovoltaïque ? Travaillez-vous avec votre homologue de l’industrie sur la structuration de filières pour faire bénéficier nos agriculteurs de ces leviers écologiques, comme le fait l’Allemagne ?

Enfin, pouvez-vous prendre l’engagement que le Gouvernement ne sera pas plus royaliste que le roi sur les questions d’harmonisation en matière d’environnement ? L’amendement Le Fur sur les installations classées, que j’ai soutenu, était plus rigide que le cadre européen, d’où l’incompréhension de nos agriculteurs puisque nous ne leur donnons pas les mêmes outils que leurs concurrents européens.

M. Joël Giraud. Monsieur le ministre, je vous remercie pour la prorogation des mesures fiscales relatives au remplacement pour congé. Un signe négatif aurait été très mal perçu par le monde agricole.

L’aide à la mise aux normes et à la construction de bâtiments d’élevages, actuellement bloquée, représente 30 % de l’investissement. Ce montant peut-il être réévalué pour les secteurs connaissant des contraintes particulières, notamment ceux de montagne ?

La valorisation de la filière bois pourrait être menée intelligemment en privilégiant l’utilisation du bois local, c’est-à-dire en travaillant avec des filières qui sont déjà en place.

Nombre d’agriculteurs sont victimes d’accidents souvent fatals : dans mon département, cette année, six d’entre eux ont trouvé la mort. Une aide spécifique pour l’achat de matériels adaptés pourrait-elle être mise en place ?

Les chambres d’agriculture ne sont pas égales en termes de ressources et le taux pivot de dotation n’évoluera pas en 2013. Il me semble que le compte d’affectation spécial pour le développement agricole et rural (CAS-DAR) pourrait être plus solidaire des petites structures consulaires de l’agriculture au nom de l’équilibre entre les territoires. Pour des valorisations de filières à l’échelle d’un massif, par exemple, les systèmes de cotisation posent des difficultés financières aux petits départements, comme les Alpes-de-Haute-Provence ou les Hautes-Alpes, face à des départements comme l’Isère ou la Haute-Savoie.

Enfin, dans la nuit de vendredi à samedi, sur avis défavorable du Gouvernement, l’amendement sur les prélèvements effectués en zone de montagne pour l’irrigation gravitaire n’a pas été adopté. Je veux parler des canaux traditionnels gérés de manière collective depuis le Haut Moyen âge et qui, depuis la loi sur l’eau et les milieux aquatiques (LEMA), doivent acquitter une redevance, parfois très importante, à tel point que des filières entières sont abandonnées, ce qui provoque des glissements de terrain. Les associations de bénévoles ne pouvant payer des cotisations de 5 000 à 10 000 euros, le besoin de crédits de restauration des terrains en montagne (RTM) ne cesse de croître. La France est le seul pays d’Europe à ne pas exonérer ce système très vertueux, puisqu’il est le plus économe de la ressource en eau.

Mme Brigitte Allain. Le projet de budget que vous nous proposez est satisfaisant, car il est stable. En dépit d’une baisse de 3 %, la plupart des actions sont maintenues à l’équilibre. Néanmoins, une répartition des crédits et des dépenses autres que celle réalisée par le précédent gouvernement était possible ; je regrette que ce ne soit pas le cas.

Certes, beaucoup de crédits découlent de la PAC, mais il me semble que ce budget aurait pu marquer notre volonté commune de nous orienter vers une agriculture écologiquement, économiquement et socialement soutenable.

On connaît les inégalités engendrées par la PAC – 20 % des agriculteurs reçoivent 80 % des aides. C’est par le levier de la fiscalité que nous pouvons agir, notamment pour contrebalancer les inégalités. On aurait pu valoriser l’emploi et l’agriculture paysanne, biologique, de montagne, ou encore de proximité.

Quelle fiscalité envisagez-vous pour soutenir l’emploi des petites et moyennes exploitations et limiter l’accumulation de capital et d’intrants ? Par exemple, la dotation pour investissements encourage les producteurs à investir davantage dans le renouvellement de machines. Or ce sont souvent les agriculteurs bénéficiaires du soutien de la PAC qui sont les plus mécanisés.

L’augmentation de la redevance pour les pollutions diffuses des produits phytosanitaires, très faible aujourd’hui, permettrait de mieux soutenir les petites fermes, notamment biologiques, et d’encourager la relocalisation des productions par rapport à la consommation locale.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) voit son budget diminuer. La recherche publique française ou européenne n’a pas les moyens d’apporter sa pleine expertise face aux semenciers dans le débat sur les OGM. Comment peut-on exiger d’avoir une recherche indépendante, fiable, sérieuse, si elle n’en a pas les moyens ? Je crois qu’il est urgent d’agir.

Vendredi dernier, en séance publique, le Gouvernement et le rapporteur ont émis un avis défavorable à notre proposition de suppression de la niche fiscale pour les agrocarburants, dont les agréments ont été renouvelés jusqu’en 2015, alors qu’un tiers d’entre eux prendra fin en 2013. S’il avait été adopté, cet amendement aurait permis d’économiser 250 millions d’euros pour la seule année 2013. On ne peut qu’être surpris d’une décision qui contredit la volonté de marquer une pause dont vous avez fait état lors de la conférence environnementale.

Je m’interroge également sur une dépense qui me semble peu maîtrisée : le remboursement partiel de la taxe intérieure sur la consommation du gazole agricole, qui représentera un coût de 2 milliards d’euros en 2013. Est-il possible de plafonner cette remise à l’hectare ou à l’exploitation ?

M. le ministre. Monsieur Herth, 650 emplois ont été supprimés en 2011, et 653 en 2012. Mon budget prévoit la création de 230 emplois et la suppression de 280, soit une baisse de 50 seulement.

En outre, je vous laisse le soin d’expliquer aux agriculteurs dont les moutons sont tués par les loups qu’il faut supprimer les remboursements auxquels ils ont droit ! Je précise que c’est le ministère de l’agriculture qui paie pour les décisions prises par le ministère de l’écologie.

Je le redis : je souhaite soutenir l’installation. Je souscris totalement aux propositions du commissaire européen en faveur d’une politique commune en la matière, même si d’autres pays n’en voient pas l’utilité. Les Assises de l’installation nous donneront l’occasion d’aborder toutes les dimensions de la question.

Si l’on prend en compte les aides de l’Europe, les crédits destinés à l’élevage ne bougent pas, pour s’établir à 5,3 milliards. Cette priorité s’inscrit dans le cadre de la réforme de la politique agricole. Le taux unique risque de nous mettre en difficulté, surtout dans les zones de polyculture élevage et d’élevage laitier. J’ai fait le choix de maintenir la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante (PNSVA), l’ICHN et l’ensemble des mesures couplées.

S’agissant la modernisation des bâtiments d’élevage, la fongibilité est possible, comme je l’ai dit.

Monsieur Peiro, j’essaie d’avancer sur la réforme de la PAC pour convaincre tout le monde. Hier, à Luxembourg, j’ai exposé la position de la France en trois points. Premièrement, la France va sortir des références historiques. Deuxièmement, il n’y aura pas un taux unique à l’hectare en 2019, applicable en 2020, comme le souhaitait la Commission européenne. Troisièmement, j’ai demandé la possibilité de primer les premiers hectares dans le cadre de la réforme.

C’est l’ANSES qui doit évaluer la validité scientifique de l’étude sur les OGM du professeur Séralini. Je précise au passage que je n’ai pas attendu cette publication pour savoir qu’il fallait revoir les protocoles d’autorisation : je l’ai dit au Parlement européen il y a deux ans.

Monsieur Benoit, vous êtes attaché à la professionnalisation, mais nous devons ouvrir l’ensemble des possibilités à l’installation.

La directive européenne « Détachement » permet de rémunérer les travailleurs sur la base des rémunérations de leur pays d’origine. Le problème est donc européen. La question de l’harmonisation sociale se pose également : par exemple, en Allemagne, il n’existe ni salaire minimal ni convention collective pour le secteur agroalimentaire, ce qui explique que le coût du travail y soit beaucoup plus bas. Ce qu’il faut rechercher, ce n’est pas de converger à tout prix, mais d’éviter de continuer à diverger, car tel est bien le problème que nous connaissons depuis une quinzaine d’années.

Je suis favorable à la cogénération. S’agissant de la méthanisation, si le problème des algues vertes n’est pas résolu en Bretagne, nous ne pourrons pas débattre de manière transparente et apaisée de la question de la production. Je suis favorable au développement d’une filière méthanisation, avec trois objectifs : elle doit être menée de manière collective ; dans les zones d’excédents structurels d’azote, nous devons être capables d’utiliser les reliquats de la méthanisation pour faire de la fertilisation et éviter l’achat par la Bretagne d’azote minéral ; il faut trouver des solutions en enrichissement de cellulose. Ce plan global inclura la cogénération et le photovoltaïque.

Avec les normes actuelles, il vaut mieux laisser les vaches laitières en stabulation que de les sortir dans les prairies, alors que l’Europe demande le maintien d’un pourcentage de prairies permanentes ! Le 18 décembre, une grande réunion au Conseil économique, social et environnemental portera sur l’idée de produire autrement. Vous y êtes bien sûr invités. Une dynamique sur les nouveaux modèles doit être enclenchée.

Monsieur Giraud, les chambres d’agriculture sont entrées dans une période d’élection, qui n’est pas idéale pour changer les choses. La proportion de femmes dans les chambres d’agriculture est de 10 %. La réforme prévoit un taux de 30 %, ainsi que la proportionnelle et la pluralité à l’échelle régionale. Le président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture et moi-même sommes convenus d’en discuter après les élections : nous pourrons évoquer l’évolution des représentations, des collèges et des financements.

S’agissant de l’irrigation gravitaire dans les zones de montagne, je tiens à vous informer que nous ouvrirons une mission sur la question générale de l’irrigation – Philippe Martin en sera chargé. Il convient de ne plus associer systématiquement irrigation et maïs. On a besoin d’eau même pour l’herbe ! Pour le sud-est de la France et toutes les zones méditerranéennes notamment, il est nécessaire de réfléchir à cette question de manière apaisée. Si l’eau est une ressource rare qu’il ne faut pas gaspiller, elle n’en reste pas moins nécessaire au maintien des modèles agricoles existants.

Madame Allain, le budget de l’agriculture s’élève à 5 milliards, compte non tenu des 10 milliards d’aides européennes. Sur ces 5 milliards, 34 % vont à l’enseignement agricole, qui est une priorité du Gouvernement, avec pour objectifs, outre la promotion sociale et l’ouverture à l’Europe, l’évolution des modèles de production vers la conciliation de l’économie et de l’écologie et le maintien d’une recherche performante.

La priorité sanitaire demeure, en ce qui concerne notamment les abattoirs. J’ai fixé des objectifs précis dans le domaine de la sécurité alimentaire, où l’État conserve un rôle d’arbitrage.

Nous réformerons la déduction pour investissement – DPI – et la déduction pour aléas – DPA. La DPI profite essentiellement au machinisme agricole. Cela avait encore un sens il y a trente ans, lorsqu’il s’agissait d’achever la modernisation de l’agriculture, mais n’en a plus aujourd’hui, puisque cette étape est terminée. Cette réforme prévoira des déductions au profit des stocks à rotation longue, notamment les fourrages, comme je l’ai annoncé au sommet de l’élevage de Cournon, dans le Massif Central. S’agissant de la DPA, des discussions techniques sont en cours car elle est actuellement trop contraignante. Il faut la faire évoluer pour permettre aux agriculteurs de dégager des réserves en cas d’aléas, notamment économiques.

J’ai été critiqué, par Greenpeace en particulier, sur la question des biocarburants, alors que le gouvernement français a été le premier à se prononcer pour l’arrêt de l’incorporation obligatoire de biocarburants dans les carburants de référence. Le directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture – FAO – a d’ailleurs salué à Rome la position de la France. L’Europe s’est réveillée et propose désormais de faire passer le taux d’incorporation de 10 % à 5 %, mais avant que la directive ne soit publiée, il faudra passer par au moins deux ans et demi de débat. Il n’est du reste pas possible de supprimer du jour au lendemain toutes les défiscalisations et les agréments, car il faut prendre en considération les investissements effectués et les emplois induits. De plus, l’incorporation de biocarburants étant toujours imposée par l’Europe, si nous ne pouvons plus y satisfaire, nous devrons procéder à des importations. Nous en sommes aujourd’hui à la première étape : alerter sur notre refus de substituer la production de carburant à la production alimentaire. Les agréments seront renouvelés jusqu’à l’année 2014 incluse : la filière aura ainsi le temps de s’adapter à la disparition de la défiscalisation. Tel est l’objectif du Gouvernement.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, ne pensez-vous pas être allé trop loin en réduisant le principe de dégressivité des cotisations sociales des travailleurs occasionnels aux salaires compris entre 1,25 et 1,5 SMIC au lieu de 2,5 et 3 SMIC ? Ne serait-il pas possible d’aller jusqu’à 2 SMIC ?

Par ailleurs, quels ont été les arguments de la Commission européenne ayant justifié son refus, en février 2012, du dispositif d’allégement du coût du travail permanent de 1 euro l’heure travaillée, instauré par le précédent gouvernement en mars 2011, alors même que nous avons aujourd’hui un problème de précarisation de la main-d’œuvre ?

Quelle est votre position sur la péréquation des droits à paiement unique – DPU – à la fois en France et entre la France et les autres pays ? Une péréquation totale aboutirait à la destruction de l’élevage.

Enfin, seriez-vous prêt à alimenter le fonds bois-carbone en y affectant une partie de l’excédent du produit de la vente des quotas d’émission de CO2, au-delà des 150 millions d’euros qui vont à l’Agence nationale de l’habitat – ANAH ?

M. Dino Cinieri. Partageant l’inquiétude de mes collègues sur l’article 60 du projet de loi de finances, j’ai déposé un amendement de suppression de cet article contestable et contesté.

Je souhaite, monsieur le ministre, appeler votre attention sur le dispositif « agriculteurs en difficulté » – Agridiff – dont la dotation subit un recul sans précédent. La chambre d’agriculture de la Loire traite actuellement 152 dossiers. Alors que les crédits dévolus au dispositif Agridiff avaient été diminués de moitié en 2008 – passant de 4 millions d’euros à 2 millions –, le budget 2012 avait été reconduit. Cette coupe drastique est d’autant plus dramatique que les filières des fruits et légumes et de l’élevage connaissent une crise sans précédent.

Mme Frédérique Massat. Je vous remercie, monsieur le ministre, de préserver les crédits dédiés au secteur de l’élevage, qui est crucial en zone de montagne – je pense notamment à l’indemnité compensatoire de handicap naturel, à la prime herbagère agroenvironnementale (PHAE) ou à l’aide à l’installation.

Je suis toutefois inquiète en ce qui concerne l’aide à la mécanisation et à la modernisation des bâtiments d’élevage ainsi que l’appui aux associations foncières pastorales, qui jouent un rôle très important en montagne.

Enfin, vous avez rencontré les syndicats de l’ONF. En montagne, les agents sont très inquiets de l’évolution de leurs missions ces dernières années. Allez-vous retravailler sur les missions de service public de l’ONF ? Par ailleurs, l’instauration en 2012 de la taxe sur les communes forestières a-t-elle entraîné certaines d’entre elles à se retirer du statut de communes forestières ?

M. Daniel Fasquelle. En présentant un budget en baisse de 5 % – une baisse inédite –, vous envoyez au monde agricole un très mauvais message : le Gouvernement ne soutient pas l’agriculture française.

L’abaissement du principe de dégressivité des cotisations sociales des travailleurs occasionnels aux salaires inférieurs à 1,5 SMIC se traduira, pour les employeurs, par une hausse de leurs charges de quelque 100 millions d’euros : alors que la crise menace particulièrement l’emploi, cette mesure compromettra la compétitivité de nombreuses entreprises. De plus, elle a été décidée sans concertation, puisque le Haut Conseil du financement de la protection sociale n’a pas été saisi.

M. Hervé Pellois. Le projet de budget de l’agriculture me paraît oublier une priorité : le commerce extérieur. Je m’interroge en effet, monsieur le ministre, sur la baisse de la dotation de FranceAgriMer, qui est le bras armé du ministère de l’agriculture en matière de recherche et développement et d’exportations. Cette baisse traduit-elle le transfert au ministère de l’agriculture des activités de FranceAgriMer ?

M. Kléber Mesquida. Alors que le projet de budget prévoit 1 000 installations supplémentaires, vous avez déclaré vouloir renforcer surtout les installations d’élevage. Il conviendrait de ne pas oublier, lors de la prochaine conférence, l’installation en viticulture, secteur où il est difficile de retrouver des repreneurs. Je rappelle que la viticulture est le premier poste agroalimentaire à l’exportation.

La viticulture a par ailleurs un grand besoin d’irrigation raisonnée, le stress hydrique pénalisant les récoltes.

M. le ministre. L’Europe interdit toute politique sectorielle de baisse des cotisations sociales, qu’elle considère comme une aide sectorielle en contravention avec le droit de la concurrence. C’est pourquoi, plus les exonérations spécifiques sectorielles sont importantes, plus elles courent le risque d’être condamnées par l’Europe. Si nous avions persévéré dans la politique d’exonération de 1 euro l’heure travaillée des salariés permanents, nous risquions de remettre en cause les exonérations touchant les travailleurs saisonniers.

L’abaissement à 1,5 SMIC de la dégressivité des cotisations sociales des travailleurs occasionnels est plus favorable au secteur que le taux adopté sous le gouvernement de François Fillon. Tout en entrant dans le cadre de la contrainte budgétaire, cette mesure permet de concentrer l’aide sur les travailleurs saisonniers de la viticulture ou des fruits et légumes.

Cessez, par ailleurs, de penser que la baisse des cotisations sociales suffirait à conforter la compétitivité de notre économie ! La question est plus complexe. Par exemple, la restauration des droits de plantation sur la vigne, supprimés en 2008 dans le cadre du bilan de santé de la politique agricole commune, serait bien plus efficace pour le secteur viticole que toutes les exonérations de cotisations sociales. Nous sommes également revenus pour assurer une meilleure régulation du marché.

Quant à la baisse du budget de l’agriculture, elle n’est que de 4,5 % dans un contexte de réduction budgétaire qui a touché presque tous les secteurs. Le Président de la République provient, tout comme moi, d’une région agricole. Nous aimons les agriculteurs et l’agriculture, et ils le savent.

La viticulture ne doit pas être oubliée, évidemment, y compris en matière d’irrigation. Ce secteur joue un rôle important dans l’équilibre de la balance commerciale.

Le budget de l’Agridiff passe de 2 millions en 2012 à 1,9 million en 2013 – moins 5 %. La priorité demeure, même si le contexte interdit de faire plus.

S’agissant de FranceAgriMer, il convient, au-delà du plan stratégique, de garantir les crédits d’intervention à la hauteur où ils étaient en 2012. Je ferai tout pour débloquer les moyens supplémentaires nécessaires. Nous devons rester vigilants.

M. Franck Reynier. Monsieur le ministre, le projet de loi de finances ampute le dispositif des exonérations des cotisations sociales sur les emplois saisonniers : les arboriculteurs de ma circonscription m’ont alerté notamment sur la charge supplémentaire, de l’ordre de 3,15 %, que représentera pour eux le versement des cotisations pour les accidents du travail. Cette nouvelle hausse n’est pas la bienvenue dans le contexte actuel.

Vous envisagez également de baisser le plafond de l’application de l’exonération à 1,5 SMIC : c’est une mauvaise mesure, puisqu’elle entraînera une augmentation de 3 euros par heure travaillée. Le risque du développement de la précarité, du travail dissimulé ou du recours à des entreprises étrangères est à craindre. Comment justifier des mesures qui fragilisent l’agriculture française ?

M. le ministre. Je sais que je ne vous convaincrai pas puisque l’exonération des cotisations sociales est votre cheval de bataille.

Je tiens tout d’abord à vous faire remarquer que dans aucun secteur les cotisations pour accidents du travail ne sont incluses dans les exonérations : seule l’agriculture faisait exception.

Du reste, en 2013, le budget consacrera aux exonérations la même somme qu’en 2012, à savoir 500 millions d’euros – vous ne pouvez pas dire le contraire. Nous avons en revanche concentré cette aide sur les salaires égaux ou inférieurs à 1,5 SMIC. D’ailleurs, reconnaissez-le, le dispositif d’exonérations n’a malheureusement jamais permis d’éviter qu’on fasse appel, en France, dans le secteur viticole comme dans celui des fruits et légumes, à des saisonniers polonais dans le cadre de la directive « Détachement » de l’Union européenne, directive sur laquelle il faudra revenir.

Mme Michèle Bonneton. De quels financements sera dotée la recherche agronomique moderne, promouvant une agriculture respectueuse de la santé, de l’environnement et de la biodiversité ? Je pense notamment à la recherche sur les variétés, les sols et les traitements. Dans ma région, l’Institut national de la recherche agronomique – INRA – ne fait plus aucune recherche sur les noyers.

Dans le cadre de la directive « Nitrates », un arrêté sera prochainement publié, visant à définir un nouveau classement des zones sensibles. L’État a-t-il prévu d’accompagner les éleveurs, s’ils sont soumis à de nouvelles contraintes ?

Quelles évolutions prévoyez-vous pour les retraites des agriculteurs, qui sont aujourd’hui minimes ?

Enfin, un plafonnement du remboursement de la taxe sur le gazole agricole est-il prévu ? Le dispositif coûte actuellement 2 milliards d’euros à l’État.

M. Damien Abad. La diminution du budget français de l’agriculture n’entre-t-elle pas en contradiction avec la volonté de la France de maintenir en 2013 le budget européen de la politique agricole commune ? Où en sont nos discussions avec l’Allemagne et l’Espagne sur le sujet ?

Ne conviendrait-il pas de rendre contraignant le fonds de solidarité entre les céréaliers et les éleveurs ? Les éleveurs ont en effet besoin d’une aide à la trésorerie plutôt qu’à la diversification de leurs activités.

La fromagerie Valment à Leymen, qui est située dans l’Ain et qui commercialise de l’emmental, est inquiète pour son avenir en raison de la fin de son contrat de location-gérance avec la société Fromager Savoyard – 200 familles sont touchées. Ce sera avec plaisir, monsieur le ministre, que je vous accueillerai dans ma circonscription du Haut Bugey pour traiter de ce dossier majeur.

Mme Clotilde Valter. Monsieur le ministre, je partage votre ambition pour la forêt. Pouvez-vous nous préciser vos orientations pour développer cette filière abandonnée depuis des années ?

M. le ministre. Le budget de la recherche n’est pas celui de l’agriculture. Nous avons engagé une réflexion sur les nouveaux modèles de production et je vous invite de nouveau à venir participer, le 18 décembre prochain, au Conseil économique, social et environnemental aux tables rondes qui seront consacrées au développement de l’agroécologie. Le « produire autrement » sera l’enjeu central de la loi d’avenir pour l’agriculture.

Il est aujourd’hui d’autant plus difficile de régler les problèmes liés aux excédents de nitrates que des normes sont alignées les unes derrière les autres sans aucune politique d’ensemble. Seule une réflexion sur les nouveaux modèles de production et en particulier sur la méthanisation permettra de trouver des solutions pérennes. La modernisation des bâtiments d’élevage peut régler en partie les contentieux en la matière. Si la définition des nouvelles zones vulnérables peut poser des problèmes à l’élevage, il conviendra toutefois d’assurer à celui-ci des marges importantes.

La question des retraites s’inscrit dans un plan quinquennal. Le Président de la République a fixé des objectifs à mettre en œuvre dans le cadre d’une discussion générale. Les retraites agricoles, qui sont très faibles, doivent être revalorisées.

L’enjeu de la forêt est global. Il concerne aussi bien la production du bois – replantation et renouvellement des forêts – que sa transformation. J’ai voulu que le bois soit intégré dans le plan isolation prévu par Cécile Duflot. Il convient également de mieux organiser la filière du bois énergie. Enfin, il ne faut pas oublier le bois matériau de construction des maisons. Tels seront les trois grands domaines d’intervention de la Banque publique d’investissement. Enfin, la conférence environnementale a annoncé le projet de création d’un fonds bois-carbone : il faut s’en donner les moyens.

Mme Marie-Noëlle Battistel. J’ai noté avec satisfaction votre volonté de soutenir l’élevage.

En Rhône-Alpes, une politique volontariste rassemble les différents acteurs intervenant sur les alpages : agriculture, tourisme, chasse, forêt, environnement. Les plans pastoraux territoriaux élaborent des projets d’aménagement des alpages qui permettent à la fois de garantir la préservation et l’entretien de ces espaces remarquables et d’accompagner le développement durable de ces zones fragiles par le soutien à l’activité pastorale et d’élevage, qui est créatrice d’emplois et de richesses. Cette politique permet de concilier, dans le cadre d’usages multiples des espaces, les enjeux de la biodiversité avec la valorisation des produits. Toutefois, en raison de la forte hausse des céréales, cette politique est remise en cause sur le plan agricole. Il est en effet de plus en plus difficile pour les éleveurs, notamment en secteur de montagne, de financer l’alimentation de leurs troupeaux en période hivernale. Monsieur le ministre, je compte sur vous pour relayer cette préoccupation dans les négociations de la politique agricole : la situation des éleveurs est d’autant plus inquiétante que la valorisation des alpages et de l’activité pastorale est un enjeu majeur. Pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?

M. Frédéric Roig. Les agriculteurs sont aujourd’hui inquiets en raison de l’importation massive, notamment par les grandes surfaces, de produits agroalimentaires – vin, olives, fromages, viande. Il y a d’autant plus intérêt à soutenir la production locale que la question des circuits courts de distribution et la vente directe sont au cœur de la problématique des territoires ruraux. Contre le fast food, il convient de soutenir le slow food. Quel est votre avis en la matière ?

Par ailleurs, est-il prévu de se pencher le 18 décembre sur la permaculture, qui vise à travailler avec la nature et non pas contre elle ? En effet, cette technique du siècle dernier favorise le développement durable. C’est ainsi qu’un agriculteur de l’Hérault, non loin de chez moi, produit des tomates tout l’été presque sans arroser.

M. Philippe Le Ray. Les éleveurs sont désespérés car ils traversent une vraie crise de confiance. Il serait judicieux d’étudier les différents types d’installations françaises. Il est patent que les installations de production reculent. Depuis quinze ans, en Bretagne, l’âge moyen du parc bâtiment a augmenté de dix ans.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour enrayer la fluctuation du prix des matières premières ? Comment peut-on accélérer les processus de regroupements agricoles ? Qu’en sera-t-il demain des amortissements dérogatoires, des déductions d’intérêts et plus généralement de la fiscalité agricole ? Je regrette la suppression du crédit d’impôt pour remplacement temporaire de l’exploitant agricole.

M. le ministre. Il est finalement maintenu.

M. Philippe Le Ray. Pour favoriser les installations, il conviendrait de lever les incertitudes sur l’avenir de la PAC.

Enfin, vous avez parlé de réinventer l’agriculture. Se contenter de la faire évoluer me semblerait plus raisonnable.

M. le ministre. J’ai milité auprès de mes homologues européens pour hisser le budget de la PAC à la hauteur des fonds de cohésion. Mon homologue allemande et moi-même avons signé un communiqué commun qui est toujours sur le site du ministère allemand de l’agriculture.

Pour ne pas être accusés par l’Europe de déguiser une aide publique en fonds de solidarité céréaliers-éleveurs, nous avons fait le choix de la contribution volontaire. Nous faisons tout pour convaincre les organismes stockeurs. Michel Barnier a échoué dans la même tentative. Ce fonds, qui ne peut être rendu obligatoire, doit devenir un des maillons de la chaîne qui relie les céréaliers aux éleveurs.

Le maintien des activités pastorales et agricoles, voire leur développement en moyenne et haute montagne, implique le maintien des aides spécifiques couplées du premier pilier – aides directes – et du second pilier – développement rural.

Je n’aime guère les anglicismes, monsieur Roig. Je préfère parler de « temps du repas », lequel est, à mes yeux, un véritable enjeu. Le risque n’est plus à l’uniformisation de l’alimentation, comme le laissait craindre il y a quelques années le développement des McDonald’s : il réside aujourd’hui dans l’accélération du temps du repas. Dans les instances internationales, les fonctionnaires français sont réputés prendre leur temps pour manger : je les y encourage. Ils doivent donner l’exemple. La France doit porter l’idée du temps du repas, qui n’est pas sans conséquence sur l’agriculture. Le label rouge français, qui garantit une agriculture de qualité sans être toutefois vendu à l’étranger, permet de garantir notre mode de vie en la matière : savez-vous qu’il n’y a plus qu’en France qu’on mange du poulet rôti entier et non découpé ? Les Français prennent encore le temps, notamment le samedi ou le dimanche, de cuisiner un poulet et de le présenter entier sur la table. Je suis certain que tous, ici, vous me rejoindrez, au printemps, aux premières tables rondes rabelaisiennes !

La permaculture, qui est une agriculture de conservation des sols, sera évidemment au cœur de la rencontre du 18 décembre, car elle joue un rôle majeur dans le développement de la biodiversité. Une machine laboure jusqu’à quarante-cinq centimètres quand un lombric descend jusqu’à soixante-dix centimètres : laissons-le travailler, il ne demande que cela !

Je comprends le désespoir des éleveurs, qui doutent de l’avenir de leur profession. Je le répète : l’élevage est une priorité du Gouvernement. Les effets de transferts de l’élevage vers les céréales sont très rapides. Trop de prairies sont aujourd’hui retournées, d’autant que c’est un processus irréversible : on ne revient jamais à l’élevage lorsqu’on l’a quitté. C’est pourquoi je suis opposé au passage précipité à l’aide unique découplée, qui déstabiliserait l’élevage. Cette bataille doit être menée contre ceux qui veulent tout niveler, dans l’espoir que le marché décide des choix des agriculteurs. C’est une erreur conceptuelle à ne pas commettre.

Pour maintenir les installations en production, il convient de régler le problème environnemental, qui est transversal, notamment en Bretagne. Le parc bâtiment a effectivement vieilli, si bien qu’il consomme davantage d’énergie en raison d’une isolation déficiente, ce qui n’est pas sans conséquence sur la compétitivité des installations.

Mme Marie-Hélène Fabre. Monsieur le ministre, le temps du repas est en effet très important, surtout s’il est accompagné d’un bon verre de vin. (Sourires.)

M. le ministre. Je suis tout à fait d’accord avec vous !

M. Jean-Jacques Cottel. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, et à remercier M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l’agroalimentaire, de nous avoir accompagnés dans le drame de la fermeture de l’entreprise Doux. Il convient de réfléchir au devenir de la filière avicole dans le nord de la France.

Le maintien de la production de l’endive dans le Nord-Pas-de-Calais, là où elle est née, n’est pas sans poser des problèmes, car la « Perle du Nord » doit subir la concurrence de la Belgique et de l’Allemagne, où le coût de la production est moindre en raison du recours à la main-d’œuvre étrangère dans le cadre de la directive « Détachement ». La filière de l’endive nous permet d’employer des salariés, surtout des femmes, pour une période relativement longue de l’année. Aussi ai-je été interrogé par les professionnels de l’endive sur l’exonération des cotisations des travailleurs occasionnels. Les cours de l’endive doivent être maintenus, notamment face à la grande distribution qui fait la pluie et le beau temps. Nous rencontrons des difficultés à écouler les produits à leur juste prix.

M. Henri Jibrayel. À quelques jours de la mise en application des emplois d’avenir, pouvez-vous nous confirmer que l’agriculture ne sera pas oubliée ?

M. Alain Marc. L’Aveyron est le premier département français en termes d’installations de jeunes agriculteurs : vous nous avez assuré que nous pourrions l’année prochaine accompagner toutes les nouvelles installations et je m’en réjouis.

Toutefois, le prix des terres agricoles a considérablement augmenté. Envisagez-vous des mesures spécifiques pour les reprises d’exploitation hors cadre familial ?

Procédera-t-on un jour à l’évaluation des politiques de valorisation de la forêt ? La technique du bois rétifié, soumis à très haute température, est-elle en cours de développement ? Son intérêt écologique est de favoriser les circuits courts.

M. le président François Brottes. C’est si vrai que la filière des produits de traitement du bois a tout fait pour empêcher la naissance de la filière du bois rétifié.

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Les indemnités journalières, inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, au bénéfice des agriculteurs en cas de maladie ou d’accident de la vie privée, représentent une avancée indéniable pour la profession. Toutefois, le montant envisagé, entre 20 à 27 euros par jour, est très inférieur au coût réel du remplacement, qui est estimé entre 90 à 130 euros par jour. La mesure pourrait-elle être conditionnée au remplacement effectif sur la ferme ? Cela permettrait d’assurer une indemnisation à la hauteur des besoins.

Mme Pascale Got. Monsieur le ministre, quelles aides précises iront au massif forestier de la Gironde et des Landes, où les chablis et les chips de bois sont attaqués par les scolytes, et où l’on rencontre des difficultés de replantation ?

Par ailleurs, compte tenu de la diversité des territoires agricoles, pouvons-nous envisager une régionalisation de l’économie agricole dans le cadre de l’acte III de la décentralisation ?

Enfin, des maires du Médoc, toutes tendances confondues, souhaiteraient qu’une partie de la fiscalité versée par les grands châteaux viticoles soit reversée aux communes sur lesquelles ils sont situés et qui financent des aménagements importants.

M. le ministre. Le plan chablis Klaus avait pour objet de nettoyer et de régénérer la forêt des Landes après le passage de la tempête. Il était prévu sur huit ans et budgété à hauteur de 415 millions d’euros. Cinq ans de dépenses ont déjà été réalisés pour quelque 300 millions d’euros. Il ne restait donc plus qu’un peu plus de 35 millions d’euros par an pour les trois années restantes. C’est pourquoi je me suis engagé à prolonger ce plan en le dotant sur cinq ans de 60 millions supplémentaires. Ai-je été mal compris ? Apparemment, les professionnels s’attendaient à recevoir 80 millions l’année prochaine, alors qu’en fait, compte tenu de la dotation supplémentaire de 12 millions d’euros sur cinq ans, le montant atteindra l’an prochain les 44 millions. Le ministère fait donc un effort en direction de la forêt landaise, un effort, du reste, que méritent les professionnels du bois, dont la filière est moins rentable que celle du maïs irrigué qui rapporte 15 000 euros l’hectare. Je ne pourrai pas aller jusqu’aux 80 millions mais je revaloriserai encore ce plan pour approcher les 50 millions, voire les 55 millions d’euros l’année prochaine, afin d’assurer l’avenir de la forêt landaise et de garantir les emplois du secteur sylvicole.

L’indemnité journalière représente une avancée, même si, j’en conviens, elle demeure insuffisante. Il faut savoir que toute augmentation de cette indemnité impliquera une augmentation des cotisations. C’est pourquoi l’amélioration du dispositif doit être progressive.

Les difficultés rencontrées par les producteurs d’endive sont liées à l’organisation de la filière, qui a été contestée et remise en cause non tant par l’Europe elle-même que par ceux qui ont saisi ses instances. Une vraie réflexion est à mener sur cette filière qu’il faut aider à la fois en termes de production, de calibrage, de transformation et de distribution.

Le déplacement de Guillaume Garot à Graincourt avait pour objet de montrer l’intérêt que le Gouvernement porte à l’abattoir Doux.

J’ai plaidé pour que la forêt, notamment, profite des emplois d’avenir. Cela permettrait de procurer une formation et un emploi sur trois ans à des jeunes ruraux.

Nous devons avoir pour objectif de conduire une politique d’installations ambitieuse. La France est du reste un des pays européens qui réussit le mieux en la matière. Il faut continuer en ce sens.

Il convient d’approfondir la réflexion sur les économies circulaires, notamment dans le secteur du bois, qui connaît plusieurs systèmes de production : production intensive ; irrégulière, continue et proche de la nature – Pro Silva – ; ou encore à courte rotation, sans oublier la spécificité de la forêt landaise – culture d’une seule espèce. Il convient de concevoir les politiques en la matière à l’échelle de massifs. Je ferai des propositions à ce sujet à l’occasion d’un déplacement en Lorraine.

Mme Corinne Erhel. Concernant l’action 3 « Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires » du programme 206 « Sécurité et qualité sanitaire de l’alimentation », et s’agissant plus précisément de la surveillance de la contamination des denrées et de la gestion des alertes, référence est faite à la crise sanitaire de 2011 liée à la bactérie E. coli qui avait eu des conséquences aussi graves qu’injustifiées sur la production légumière. Il faut donc saluer l’effort consenti dans le budget en matière de prévention des risques et de qualité sanitaire.

Nos partenaires européens renforcent-ils eux aussi leur dispositif de prévention des crises ? Quelles informations avez-vous sur les contrôles effectués par la Commission européenne sur la procédure d’attribution des aides exceptionnelles mise en place en 2011 ? Certains pays avaient reçu des aides considérables, contrairement à la France, qui avait peu demandé à l’époque, ce qui n’avait pas été sans provoquer des remous en Bretagne, dont les producteurs légumiers avaient souffert de la crise liée à la bactérie.

Mme Annick Le Loch. Les éleveurs et producteurs de lait bretons sont très inquiets, en raison notamment de la chute du prix du lait, de l’échec de la contractualisation, du manque d’outil de régulation et de la faiblesse de leurs revenus, qui ne correspondent en rien au travail réalisé : un hectare de lait représente quatre-vingts heures de travail contre quatre heures pour un hectare de culture.

Ne serait-il pas possible de mettre en place un système qui donne envie aux éleveurs de continuer et aux jeunes de s’installer ?

M. Jean Grellier. Que répondez-vous aux organisations professionnelles qui refusent la contractualisation telle que prévu dans la loi de modernisation agricole ?

Par ailleurs, quel est l’avenir de la filière dans le cadre de la PAC 2013 ? La suppression des quotas en 2015 ne risque-t-elle pas de porter le coup de grâce au modèle de production tel qu’il existe dans l’ouest ?

Il existe enfin un effet de ciseau entre l’augmentation très forte des prix de revient à la production avicole et l’incapacité des transformateurs à négocier avec les grandes et moyennes surfaces.

M. Dominique Potier. L’agriculture française pourrait être résumée en trois chiffres : 10 milliards de fonds européens, un budget français à hauteur de 5 milliards et plus de 4 milliards de plus-values sur les matières premières céréalières en 2012. Il convient donc de se concentrer moins sur le volume du budget agricole que sur sa réorientation. Nous serons à vos côtés, monsieur le ministre, pour tenir le cap sur les agrocarburants, qui ont un effet inflationniste sur les matières premières, et pour promouvoir un rééquilibrage massif au profit de l’élevage. Il y va de la survie de nos territoires et des filières qui y sont liées.

Je suis heureux que les crédits dévolus tant à l’enseignement technique – plus 1,7 % – qu’à la recherche fondamentale soient préservés. Qu’en est-il de votre lettre de mission à l’INRA incitant l’institut à s’occuper autant de génie génétique que de systèmes d’exploitation ? Enverrez-vous une lettre de mission aux acteurs de l’enseignement technique, afin que celui-ci participe, dans le cadre du renouvellement des générations, à la révolution culturelle du monde agricole ?

M. Fabrice Verdier. Je suis heureux que le budget permette de faire face à une augmentation de 20 % des installations en 2013. Toutefois, celles-ci demeurent difficiles hors du cadre familial. J’espère que les assises de l’installation se pencheront sur le sujet.

L’accès au foncier reste difficile. Est-il possible d’envisager une meilleure association des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) au travail des établissements publics fonciers (EPF) ? Il est dommage qu’un outil financé par l’impôt refuse de traiter la question agricole.

Les règles permettant aux agriculteurs de construire leurs habitations à côté de leurs exploitations ont été durcies. Aujourd’hui, de jeunes agriculteurs sont trop souvent confrontés au refus de la direction départementale des territoires et de la mer (DTTM) : à moins d’être éleveur, il est désormais impossible de construire son habitation à côté de son exploitation. Il conviendrait d’associer les maires et les chambres d’agriculture à la DDTM pour sélectionner les projets durables et sincères.

M. le président François Brottes. Il existe également un problème pour construire des abris pour animaux sous le prétexte que toute construction est interdite, alors même que le bétail a un besoin vital de ces abris.

M. le ministre. La France a pris ses responsabilités lors de la crise sanitaire de 2011. Nous devons tendre à une harmonisation européenne de la réglementation en la matière. Il est vrai que la France, qui n’a pas été le pays le plus touché – l’Espagne a perdu quelque 60 % de sa production en quelques mois –, a peu demandé par rapport à d’autres.

La Direction générale de l’alimentation (DGAL) travaille à l’échelle européenne, notamment sur le pesticide Cruiser ou des néonicotinoïdes.

La filière lait vit dans le doute permanent compte tenu de son incertitude sur l’évolution des prix. Le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux m’a rendu un rapport sur la contractualisation dans le secteur agricole dont il faudra mettre en œuvre les recommandations, puisque l’organisation des producteurs n’était pas encore en place au début de la contractualisation. Au début du mois de décembre le ministère commencera à valider les organisations de producteurs (OP) agricoles qui lui seront proposées.

Nous ne pourrons pas revenir en arrière, il faut le savoir. Danone a publiquement regretté avoir signé des contrats compte tenu de la baisse du prix du lait. S’il convient de permettre aux producteurs de s’organiser, c’est tout simplement parce que la négociation collective leur sera plus avantageuse que la négociation individuelle. Des négociations sont en cours : je le répète, le ministère validera les contrats et les organisations professionnelles début décembre. Les critères de prix qui sont utilisés pour la fixation des prix contractuels sont, à l’heure actuelle, déterminés au mois le mois, d’après les recommandations nationales du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (CNIEL), qui se réunit tous les trois mois et s’appuie notamment sur l’index compétitivité France-Allemagne. Même s’il leur est nécessaire de s’adapter aux évolutions du marché, je demande aux industriels de ne plus remettre en cause les prix tous les mois afin de mettre un terme à l’insécurité permanente dans laquelle vivent les producteurs laitiers, qui ont droit à une plus grande visibilité. Les coopératives sont aussi concernées que les industriels : c’est une coopérative, SODIAAL, en Sarthe, qui a été la première à baisser les prix. Elle avait même inventé le double prix ! Du reste, le Conseil général de l’alimentation préconise que ses recommandations s’appliquent également aux coopératives, qui refusent aujourd’hui la contractualisation sous le prétexte que chaque agriculteur est coopérateur. Il convient de travailler au lissage des évolutions des prix. L’insécurité pour tous, en premier lieu pour les producteurs, n’est profitable à personne – d’ailleurs, les industriels en conviennent.

La disparition des quotas en 2015 aura des conséquences en termes non pas seulement de régulation mais surtout de territorialisation de la production laitière. Les quotas lient la production à des territoires. Le risque est de voir les industriels quitter les zones de montagne ou de moyenne montagne qui ne sont pas sous le label de qualité « Montagne ». Il faudra parer à ce risque.

J’ai évoqué avec mes homologues européens un autre risque lié à la fin des quotas : celui de la surproduction laitière. Il faut savoir qu’au dernier conseil européen, l’Italie, le Portugal et l’Espagne ont demandé la réactivation des restitutions à l’exportation pour la poudre de lait, alors que ce sont les pays les plus favorables à la suppression des quotas. Quel paradoxe ! Il faudra créer à l’échelle européenne, pour les pays qui dépasseraient une certaine marge, des mécanismes de stabilisation du marché équivalents à ceux que la France a instaurés pour sanctionner les exploitations qui dépassent leurs quotas.

La filière du lait comprend les producteurs et les transformateurs : nous devons toujours veiller à assurer un débouché à la production de lait, comme l’ont montré les difficultés rencontrées par les producteurs du Puy-de-Dôme. Certes, il existe des options différentes, comme les circuits courts ou les appellations d’origine contrôlée (AOC) mais il faut se montrer vigilant à toujours assurer en aval la transformation du lait.

Les assises de l’installation évoqueront la question de l’installation hors cadre familial : de telles installations peuvent être pérennes.

Enfin, s’agissant du foncier agricole, je suis opposé à la disparition des SAFER. Il faut au contraire s’appuyer sur elles. Le foncier sera un des enjeux majeurs de la loi d’avenir.

M. le président François Brottes. Je vous remercie, monsieur le ministre.

II.— EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, au cours de sa réunion du 23 octobre 2012, les crédits pour 2013 de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » sur les rapports de Mme Marie-Lou Marcel (Agriculture et alimentation) et de M. André Chassaigne (Forêt).

Article 46 : État B – Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales »

M. le président François Brottes. Nous avons déjà noté que Mme Marie-Lou Marcel, rapporteure pour avis pour les programmes 154, 206 et 215, a donné un avis favorable à l’adoption de ces crédits, tandis que M. André Chassaigne, rapporteur pour avis pour le programme 149, en a appelé à la sagesse de la Commission.

La Commission examine l’amendement CE 2 de M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. L’amendement est défendu.

Mme Marie-Lou Marcel, rapporteure pour avis. Je vous demande de bien vouloir le retirer puisque M. le ministre a répondu sur le maintien des crédits du Fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture.

Si vous ne le faites pas, j’émettrai un avis défavorable à votre amendement.

M. Antoine Herth. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », tels qu’ils figurent à l’état B annexé à l’article 46.

AMENDEMENT EXAMINÉ PAR LA COMMISSION

Amendement CE 2 présenté par MM. et Mme Antoine Herth, Laure de La Raudière, Dino Cinieri, Philippe Le Ray et Daniel Fasquelle :

Article 46

État B

Mission « Agriculture, Alimentation, Forêt et Affaires rurales »

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

Programmes

+

-

Economie et développement durable de l’agriculture et des territoires

4 000 000

 

Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

 

4 000 000

TOTAUX

4 000 000

4 000 000

SOLDE

0

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail – ARACT Auvergne

– M. Yves Poss, Président du Comité d’organisation

CGT Forêt

– M. Pascal Leclercq, Secrétaire national

– Mme Dominique Lespagnol, membre de la commission exécutive

Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER)

– M. Guy Fradin, Président de la section « Forêt, eaux et territoires »

Fédération nationale agroalimentaire et forestière – FNAF CGT

– Mme Jocelyne Hacquemand, Secrétaire nationale

– M. Roger Perret, membre de l’institut de recherche et d’études sur les salariés agricoles de la Fédération

Fédération nationale des communes forestières

– M. Alain Lesturgez, Directeur

– M. Yves Lessard, Secrétaire général

Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, Direction générale des politiques agricole, agro-alimentaire et territoriale, responsable du programme 149 « forêts »

– M. Éric Allain, Directeur général des politiques agricole, agro-alimentaire et territoriale, responsable du programme 149 « forêts »

– M. Jacques Andrieux, Sous-directeur « forêt et bois »

Office National des Forêts - ONF

– M. Pascal Viné, Directeur général

– M. Patrick Soulé, Secrétaire général

Syndicat national unifié des personnels des forêts et de l’espace naturel – SNUPFEN Solidaires Forêt

– M. Philippe Berger, Secrétaire général

© Assemblée nationale

1 Conseil économique, social et environnemental. Avis de Mme Marie de l’Estoile sur la valorisation de la forêt française, octobre 2012.

2 () Exposé sommaire de l’article 30 du projet de loi de finances pour 2013.

3 Le régime forestier concerne les forêts du domaine privé de l’État (forêt domaniale) et des collectivités. Ces forêts représentent 25 % de la superficie des forêts françaises et contribuent à près de 40 % de la récolte de bois.

4 () Conseil économique, social et environnemental, Marie de l’Estoile, La valorisation de la forêt française, octobre 2012.

5 () Ibid.

6 () Ibid.

7 () Ibid.

8 () Ibid.

9 () Ibid.