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N
° 251

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2012.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2013 (n° 235),

PAR M. CHRISTIAN ECKERT,

Rapporteur général,

Député

——

ANNEXE N° 25

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L’ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Dominique LEFEBVRE

Député

____

SYNTHÈSE 5

CHAPITRE I : LE PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT 7

I.– LE DOUBLEMENT DE LA DETTE PUBLIQUE DEPUIS 2002 : UN TRISTE HÉRITAGE, UNE GRANDE RESPONSABILITÉ 7

II.– LA RÉDUCTION DE LA CHARGE DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT EN 2013 : LE PARADOXE LIÉ À LA BAISSE DES TAUX 15

A.– UN BESOIN DE FINANCEMENT TOUJOURS COLOSSAL MALGRÉ UNE BAISSE DE 11,7 MILLIARDS D’EUROS EN 2013 19

1.– Le programme révisé de financement de l’État en 2012 21

2.– Le programme de financement de l’État en 2013 23

B.– LE PARADOXE DE LA CHARGE DE LA DETTE : MALGRÉ LA PROGRESSION DE L’ENCOURS, LA CHARGE DE LA DETTE BAISSE 26

1.– Une baisse de 2 milliards d’euros de la charge de la dette en 2012 28

2.– Une quasi-stabilisation de la charge de la dette en 2013 par rapport au niveau constaté fin 2012 30

C.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT 33

CHAPITRE II : LE PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT : UNE EXPOSITION ENCORE LIMITÉE 39

A.– DES DÉPENSES EN HAUSSE DE PRÈS DE 10 % EN 2013 41

1.– L’action Agriculture et environnement 41

2.– L’action Soutien au domaine social, logement, santé 42

3.– L’action Financement des entreprises et industrie 42

4.– L’action Développement international de l’économie française 44

5.– L’action Autres garanties 47

B.– UN DISPOSITIF DE PERFORMANCE DIFFICILE À INSTAURER 49

CHAPITRE III : LE PROGRAMME ÉPARGNE 50

A.– LES DÉPENSES FISCALES : UNE RÉFORME À VENIR 50

1.– Quatre objectifs principaux 50

2.– Un dispositif défaillant 53

B.– DES DÉPENSES BUDGÉTAIRES EN BAISSE DE 9,7 % EN 2013 APRÈS LE RESSAUT DES PRIMES D’ÉPARGNE LOGEMENT EN 2012 54

CHAPITRE IV : LE PROGRAMME MAJORATION DES RENTES : LA GESTION D’UN DISPOSITIF EN EXTINCTION 59

CHAPITRE V : LE PROGRAMME DOTATION EN CAPITAL DU MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILITÉ (MES) 60

A.– LE MES : UN DISPOSITIF PÉRENNE DE STABILISATION FINANCIÈRE AU SEIN DE LA ZONE EURO 60

B.– CONSÉQUENCES BUDGÉTAIRES ET COMPTABLES DE LA DOTATION EN CAPITAL 61

CHAPITRE VI : LE PROGRAMME AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA BANQUE EUROPÉENNE D’INVESTISSEMENT (BEI) 63

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 30 OCTOBRE À 18 HEURES 65

EXAMEN EN COMMISSION 85

Article 65 : Participation française à l’augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement 87

Article 66 : Octroi de la garantie de l’État au groupe Crédit immobilier de France 92

ANNEXE : AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 111

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Le Rapporteur spécial regrette que le Gouvernement n’ait répondu qu’à 82 % de ses questions, dans le délai imparti.

SYNTHÈSE

● En 2013, la charge de la dette et de trésorerie de l’État s’élève à 46,9 milliards d’euros et constitue le premier poste de dépenses nettes du budget de l’État, hors charges de pensions versées par l’État. Cette dépense représente donc 67 % des recettes nettes de l’impôt sur le revenu attendues en 2013, 2,2 % du PIB en 2013, ou encore 95,6 % des dépenses de fonctionnement de l’État et de ses opérateurs (titre 3).

Après une progression continue de la dette publique depuis 1981 résultant de l’accumulation des déficits publics – sauf durant la période 1999-2001 – la France est entrée dans la crise économique et financière de 2008 dans une situation très dégradée par rapport à ses partenaires européens. En outre, entre 2006 et 2010, le déficit structurel de la France a doublé alors qu’en Allemagne, par exemple, celui-ci s’est réduit. L’ensemble de ces éléments a conduit à un emballement de la dette publique impressionnant entre 2007 et 2012 : + 600 milliards d’euros, la dette publique passant de 64,2 % du PIB à 89,9 % du PIB. L’accroissement de la dette publique française sur cette période se situe ainsi bien au-dessus de celui de la plupart des nos partenaires européens.

Malgré cette augmentation de l’encours, qui atteint 1 830 milliards d’euros en 2012, la charge de la dette a connu une progression nettement plus modérée, principalement sous les effets conjugués de taux d’intérêt bas, de la maîtrise de l’inflation et d’une gestion active de la dette par l’Agence France Trésor performante, liée en particulier à une diversification adéquate des produits et des investisseurs. Toutefois, cette situation paradoxale ne pourra perdurer à long terme. C’est pourquoi le Gouvernement actuel se donne les moyens de réduire le déficit public structurel de la France en 2013 de près de 2 points de PIB afin d’inverser la courbe de la dette dès 2014 et atteindre la cible de 82,9 % du PIB à l’horizon 2017.

● Le programme Appels en garantie de l’État se trouve au cœur du soutien financier en faveur des banques et de la zone euro. Il regroupe l’ensemble des dispositifs pour lesquels l’État a octroyé sa garantie au titre d’accords bien définis. À ce jour, ce programme est essentiellement concentrés sur cinq actions, dont la principale, Développement international de l’économie français, regroupe les crédits consacrés aux garanties à l’exportation, budgétisée à hauteur de 137,6 millions d’euros en 2013 (contre 130,5 millions d’euros en 2012).

● L’essentiel des dépenses budgétaires du programme Épargne est destiné au financement des primes d’épargne logement qui atteindrait 720 millions d’euros en 2013. Les dépenses fiscales rattachées à ce programme, qui sont estimées à 4,2 milliards d’euros, ont quant à elles pour principal objectif de stimuler le développement de l’épargne individuelle à long terme, afin de contribuer au financement des entreprises et à la construction de logement sociaux. Cependant, le bilan coût / avantages insuffisant de ces dépenses fiscales impose une réforme d’envergure comme l’ont notamment montré les travaux de la Cour des comptes en 2012, sur le financement de l’économie et sur l’assurance vie. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a confié le 9 octobre dernier à votre rapporteur spécial ainsi qu’à Mme Karine Berger, une mission sur la réforme de l’épargne financière destinée à favoriser une meilleure allocation de l’épargne financière vers le financement de l’économie en développant l’épargne longue. Ses conclusions seront rendues début 2013.

● Le programme Majoration des rentes est un dispositif en voie d’extinction, doté de 181 millions d’euros en 2013, après 183 millions d’euros en 2012.

● Le programme Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité concerne la garantie de 57 milliards d’euros apportée par l’État français au MES, mécanisme destiné à apporter des financements aux États membres jusqu’à hauteur de 440 milliards d’euros et qui bénéficie à cet effet de garanties apportées par l’ensemble des États membres de la zone euro à proportion de leur quote-part au montant des émissions (soit 21,8 % pour la France).

● Enfin, le programme Augmentation du capital de la banque européenne d’investissement porte sur la participation de la France à l’augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement décidée à l’occasion du Pacte pour la croissance conclu à l’été 2012.

CHAPITRE I : LE PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Avant d’examiner en détail l’évolution de la charge de la dette et du besoin de financement de l’État en 2013, le Rapporteur spécial estime nécessaire de présenter la situation de la dette publique française depuis trente ans et les impératifs qui s’imposent désormais au Gouvernement et à sa nouvelle majorité pour inverser la tendance et ne plus faire supporter aux générations futures le poids des déficits cumulés.

I.– LE DOUBLEMENT DE LA DETTE PUBLIQUE DEPUIS 2002 : UN TRISTE HÉRITAGE, UNE GRANDE RESPONSABILITÉ

Depuis 1980, la dette publique française est passée d’un peu moins de 20 % du PIB à 64,2 % en 2007. Hormis durant la dernière phase de bonne conjoncture entre 1999 et 2001, cette progression a été continue, de sorte que la France est entrée dans la crise économique et financière de 2008 dans une situation des finances publiques très dégradée, en raison de déficits publics persistants.


Source : INSEE, comptes nationaux annuels, base 2005, dette publique brute au sens du traité de Maastricht.

Comme le montre le graphique ci-dessus, l’on peut distinguer six grandes phases d’évolution de la dette publique depuis trente ans en France :

– de 1981 à 1987, la dette a progressé à un rythme de 1,8 point de PIB par an en moyenne, sous l’effet d’une augmentation sensible des dépenses publiques ;

 de 1987 à 1991, la progression de l’endettement public a ralentit (+ 0,9 point de PIB par an en moyenne), à la faveur notamment d’une croissance économique soutenue ;

– entre 1992 et 1996, la troisième phase d’augmentation de la dette a été particulièrement marquée (+ 4,4 points de PIB par an en moyenne) : après deux années de ralentissement de la croissance, la récession de 1993 (1) a porté le déficit public à 6,4 % du PIB ;

– de 1997 à 2001, grâce aux efforts d’assainissement budgétaire et à une forte croissance économique, le taux d’endettement public s’est stabilisé en deçà de la limite « maastrichtienne » de 60 % du PIB et s’est même infléchit en fin de période (– 0,2 point de PIB en moyenne par an). Les années 1999 à 2001 connaissent ainsi une diminution de l’endettement, passé de 59,5 % en 1997 à 57,1 % en 2001 ;

– entre 2002 et 2007, la cinquième phase d’évolution voit la dette publique repartir à la hausse de 1,2 point de PIB en moyenne chaque année sous l’effet d’une politique d’allègement des impôts non justifiée en raison du ralentissement de la croissance. Au demeurant, cette progression moyenne de la dette publique apparemment modérée est trompeuse. Elle intègre en effet la spectaculaire baisse de l’endettement public obtenue en 2006 (– 2,7 points de PIB) par des moyens en grande partie étrangers à l’amélioration de la situation des finances publiques (2;

– depuis 2007, la sixième phase d’évolution est celle d’une augmentation sans précédent de la dette publique, de 4,3 points de PIB en moyenne chaque année, pour atteindre 89,9 % en 2012. Entre 2007 et 2012, la dette a progressé de 25,7 points de PIB et de 600 milliards d’euros en valeur, passant de 64,2 % du PIB à 89,9 % du PIB.

Certes, dans le contexte de crise économique et financière depuis 2008, l’augmentation de la dette publique est loin de constituer une spécificité française. Cependant, comme le montre le premier graphique ci-après, le déficit structurel de la France était bien supérieur au déficit structurel moyen de la zone euro en 2007, la rendant nettement plus vulnérable à la dégradation du déficit budgétaire et à la récession que d’autres partenaires européens, à commencer par l’Allemagne.

En outre, si la plupart des États membres de l’Union européenne ont vu leurs finances publiques se dégrader en raison des diverses mesures de relance budgétaire et, surtout, des pertes de recettes fiscales occasionnées par le repli de l’activité à partir de 2008, l’accroissement de la dette publique française entre 2007 et 2011 (+ 22 points de PIB) s’est situé bien au-dessus de l’accroissement de la dette publique de la plupart des nos partenaires sur la même période, comme en témoigne le second graphique ci-après.

ACCROISSEMENT DE LA DETTE PUBLIQUE DES ÉTATS MEMBRES DE L’UNION EUROPÉENNE ENTRE 2007 ET 2011

(en % du PIB)

Source : Eurostat, calculs du Rapporteur spécial.

Le précédent Gouvernement a pourtant tenté de faire croire que la dégradation des finances publiques françaises, et en particulier l’accroissement du déficit public, était exclusivement liée à la crise économique et financière. Or, l’analyse de la Cour des comptes montre que, entre 2006 et 2010, le déficit structurel de la France a doublé, passant de 2,3 % à 4,8 % du PIB, comme l’illustre le graphique ci-après.

Il importe de rappeler que le solde structurel ainsi calculé ne prend en compte ni les effets de la conjoncture économique – et donc de la crise économique depuis 2008 – ni l’impact du plan de relance(3). Par conséquent, la part des mesures discrétionnaires prises par le précédent Gouvernement explique 67 % du déficit public effectif en 2010 (établit à 7,1 % du PIB).

Il en résulte que l’argument selon lequel la crise économique serait l’unique responsable de l’état des finances publiques apparaît irrecevable : derrière le voile des variations exceptionnelles causées par la récession, les éléments fondamentaux des comptes publics se sont régulièrement dégradés au cours de la dernière législature.

LE DÉFICIT PUBLIC STRUCTUREL DE LA FRANCE ENTRE 2006 ET 2010

(en % de PIB)

Source : Cour des comptes, rapports sur la situation et les perspectives des finances publiques pour 2012 (évaluations pour 2007 à 2011) et pour 2006 (évaluation pour 2006).

En outre, selon les chiffres transmis au précédent rapporteur spécial de la mission Engagements financiers de l’État (4), le montant de dette imputable à la crise économique et financière de 2008 s’élevait à 101,7 milliards d’euros en 2009 (soit 8,7 % de la dette de l’État), 159,8 milliards d’euros en 2010 (soit 12,8 % de la dette de l’État) et 222,9 milliards d’euros en 2011 (soit 16,7 % de la dette de l’État) alors que la dette de l’État a crû de 294 milliards d’euros depuis 2008 (+ 28,3 %). Par ailleurs la part de la dette résultant du plan de soutien en faveur de la Grèce, de l’Irlande et du Portugal a atteint 14,5 milliards d’euros en 2011 (5), ce qui représente 1 % de la dette négociable de l’État.

Par conséquent, la part de la crise financière de 2008 couplée à la part de la crise des dettes souveraines au sein de la zone euro en 2011 dans la dette négociable de l’État n’explique que 80 % de l’augmentation constatée entre 2008 et 2011. Il faut donc en conclure que les mesures discrétionnaires adoptées par le précédent Gouvernement ont à elles seules majoré la dette de l’État de 20 % en quatre ans (+ 44 milliards d’euros).

Compte tenu du poids de la dette publique accumulée depuis ces dix dernières années et plus encore depuis 2007, la hausse de l’endettement public se poursuivrait au même rythme en 2012 (+ 3,9 points) pour atteindre 89,9 % du PIB, compte tenu de l’effet « boule de neige » (6) résultant d’un déficit public trop important (4,5 % du PIB) par rapport au solde stabilisant la dette publique (fixé à - 1,7 % en 2012).

Les contributions à cette hausse de l’écart au solde stabilisant (2,9 points) et des flux de créances (+ 1,0 point) sont proches de celles de l’année passée mais ont des explications différentes. L’écart au solde stabilisant inchangé, malgré un déficit nominal réduit (4,5 % après 5,2 %), est le reflet d’un environnement économique défavorable (croissance du PIB en valeur de seulement 2 % après 3,1 % en 2011). Par ailleurs, les flux de créances (+ 1 point) ont une composition très différente de ceux de 2011, avec une large part liée au soutien financier à la zone euro (+ 1,8 point, comprenant notamment les prêts du Fonds européen de stabilisation financière correspondant au second plan d’aide à la Grèce, et au soutien du Portugal et de l’Irlande, ainsi que la mise en place du mécanisme européen de stabilité) compensée en partie par un reflux du niveau de trésorerie des administrations publiques après la hausse de 2011 (– 0,5 point) et la poursuite de la stratégie de réallocations d’actifs du fonds de réserve des retraites (– 0,1 point).

Toutefois, grâce aux mesures de redressement sans précédent annoncées par le Gouvernement dès la loi de finances rectificative du 16 août 2012 et plus encore dans l’actuel projet de loi de finances pour 2013 pour ramener le déficit public de 4,5 % à 3 % du PIB, le rythme de progression de la dette publique serait de moindre ampleur en 2013 (+ 1,5 point).

Ce ralentissement sera principalement imputable à la baisse du déficit public (passant de 4,5 % du PIB en 2012 à 3,0 % du PIB en 2013) associée à une accélération de l’activité (hausse du PIB en valeur de 2,6 %), permettant de réduire l’écart du solde public au solde stabilisant la dette. Les flux de créances (+ 0,7 point après + 1 point en 2012) contribueraient également à infléchir la trajectoire de dette, avec principalement une moindre contribution du soutien à la zone euro (+ 0,5 point après + 1,8 point).

Le Rapporteur spécial considère donc qu’il est absolument fondamental de respecter les engagements pris au niveau européen pour réduire le déficit public à 3 % en 2013. C’est une condition sine qua non pour que le Gouvernement puisse se donner les moyens d’inverser la courbe de la dette à compter de 2014, comme le prévoit la loi de programmation des finances publiques récemment adoptée par l’Assemblée nationale.

TRAJECTOIRE D’ENDETTEMENT PUBLIC BRUT POUR LES ANNÉES 2012 À 2017

(en % du PIB)

Source : Rapport n° 246 de M. Christian Eckert, Rapporteur général de la commission des Finances, sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2014.

Rappelons que la prévision de dette publique du Gouvernement correspond à une dette brute, consolidée des créances entre administrations publiques. Sa décomposition par sous-secteurs est donc fragile, car elle dépend en outre des évolutions des bilans financiers des diverses administrations publiques. En particulier, les titres de dette de l’État ou de l’ACOSS sont potentiellement des actifs que peuvent acheter les administrations qui présentent un excédent ou disposent de trésorerie, ce qui se fait généralement en fin d’année, en fonction des rendements et de la trésorerie disponible.

La décomposition indiquée ci-après est donc à considérer davantage de manière qualitative (partage de la charge entre sous-secteurs) que quantitative (7) mais elle souligne la responsabilité partagée de l’ensemble des administrations publiques dans la situation actuelle, et par conséquent, le nécessaire engagement de chaque sous-secteur des APU au redressement des comptes publics pour atteindre l’équilibre structurel en 2016.

ENCOURS DE LA DETTE PUBLIQUE AU SENS DE MAASTRICHT ET CONTRIBUTION DES SOUS-SECTEURS EN 2012-2013

 

en % du PIB

en milliards d’euros

 

2012

2013

2012

2013

dette publique

89,9

91,3

1 830

1 908

dont contribution de l’État

70,7

72,3

1 440

1 511

dont contribution des ODAC

0,5

0,4

9

9

dont contribution des APUL

8,3

8,3

169

173

dont contribution des ASSO

10,3

10,3

210

215

Source : Direction du budget, réponse au questionnaire budgétaire.

LA RÉPARTITION DE LA DETTE PUBLIQUE EN 2013 EN %

Le poids de la dette de l’État dans l’endettement public est bien évidemment très largement prépondérant et mérite une attention toute particulière dans le cadre de la mission Engagements financiers de l’État. Toutefois, le Rapporteur spécial estime utile d’insister également sur la nécessité de supprimer au plus vite le déficit des comptes sociaux qui alimente désormais plus de 10 % de la dette publique.

En particulier, l’équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale doit être une priorité : il n’est plus possible de financer des dépenses courantes par un recours accru à la dette publique dans la situation des finances publiques laissée par le précédent Gouvernement. Rappelons en effet qu’alors que les régimes obligatoires de base étaient en situation d’excédent entre 1999 et 2001, le cumul des déficits de la Sécurité sociale – régime général (RG) et fonds de solidarité vieillesse (FSV) – de 2002 à 2012 a atteint 160 milliards d’euros comme le montre le graphique suivant.

L’accumulation de ces déficits s’est évidemment traduite à compter de 2002 par un accroissement de la dette sociale gérée par la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).

SOLDE ANNUEL DU RÉGIME GÉNÉRAL ET DU FSV DEPUIS 1999

En milliards d’euros

Source : Comptes INSEE, base 2005, calculs du Rapporteur spécial.

Créée par l’ordonnance du 24 janvier 1996, la CADES a en effet pour objet d’amortir sur une durée limitée, grâce à des ressources dédiées, les dettes sociales qui lui ont été transférées par la loi et qui s’élèvent au 31 décembre 2012 à 209 milliards d’euros, ce qui représente 11,4 % de la dette publique.

REPRISES DE DETTE PAR LA CADES DEPUIS L’ORIGINE

En milliards d’euros

Si ce mécanisme d’amortissement de la dette sociale a malgré tout permis une diminution de la dette publique de 71,7 milliards d’euros à la fin 2012 (soit près de 4 points de PIB) et devrait conduire à l’extinction de cette dette à l’horizon 2024, l’existence même d’un déficit des régimes de base de la sécurité sociale n’est désormais plus supportable.

En outre, l’extinction de la dette sociale gérée par la CADES à l’horizon 2024 repose sur des hypothèses moyennes d’évolution de ses recettes (+ 3,5 % par an en moyenne), d’inflation (+ 1,75 % par an) et de taux d’intérêt (+ 100 points de base par an). Or, selon l’évolution de la conjoncture et de la situation sur les marchés financiers, cet horizon temporel d’amortissement de la dette sociale reste un pari, comme le montre le graphique ci-après établi par la CADES. Au 31 août 2012, la date de fin de la CADES serait comprise entre 2023 (+ 11 ans) et 2026 (+ 14 ans).

EXEMPLES DE PROFILS D’AMORTISSEMENT DE LA DETTE SOCIALE EN FONCTION DU RISQUE PAR RAPPORT AUX HYPOTHÈSES MOYENNES


En tout état de cause, le traitement des déficits cumulés de la sécurité sociale devient une urgence, car son report, tout simplement, aboutit à faire reposer sur l’ACOSS le poids du portage de la dette alors même que sa vocation est de gérer le découvert infra-annuel et non les déficits cumulés, comme le rappelle de manière insistante et légitime la Cour des comptes.

II.– LA RÉDUCTION DE LA CHARGE DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT EN 2013 : LE PARADOXE LIÉ À LA BAISSE DES TAUX

Le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État est composé de trois actions (Dette négociable, Dette non négociable, Trésorerie de l’État) ; il a pour objet de permettre à l’État d’honorer ses engagements financiers en toutes circonstances, au meilleur coût et dans des conditions de sécurité maximales : couverture du solde budgétaire, remboursement de la dette échue, financement quotidien et gestion de la trésorerie.

Ce programme représente à lui seul 94,5 % des crédits de la mission Engagements financiers de l’État demandés pour 2013 soit 46,895 milliards d’euros contre 48,77 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2012. La prévision pour 2013 serait donc en baisse de 3,9 % alors même que le besoin de financement de l’État reste colossal (171,1 milliards en 2013) et que l’encours de la dette de l’État ne cesse de progresser : il passerait de 1 366 milliards d’euros fin 2012 à 1 431 milliards d’euros fin 2013 (+ 4,75 %).

Ce paradoxe tient essentiellement au fait que, dans un contexte de crise persistante sur les dettes souveraines de certains membres de la zone euro, la France continue toujours de bénéficier des effets positifs associés à son appartenance au groupe des pays disposant du meilleur crédit auprès des investisseurs. Conjuguée aux actions de la Banque centrale européenne, en particulier aux diminutions des taux directeurs intervenues fin 2011 et en juillet 2012, cette confiance s’est traduite par un repli des taux à des niveaux jamais connus : depuis l’été 2012, le taux des bons du trésor et intérêts précomptés (BTF) à 3 mois s’inscrit en négatif et les taux moyens pondérés des dernières émissions de titres à moyen et long terme n’ont jamais été aussi bas. Comme l’an dernier, le scénario de taux retenu pour 2013 repose sur l’hypothèse prudente d’une remontée progressive des taux, en cohérence avec un redémarrage de la croissance qui passerait de 0,3 % à 0,8 % entre 2012 et 2013.

(en milliards d’euros)

PRÉSENTATION DE LA DETTE DE L’ÉTAT EN 2013

I.– HYPOTHÈSES RETENUES

– Déficit à financer (en exercice) :

61,6

(81,8 en PLF 2012 ; 83,6 en révisé)

– Amortissements de titres :

107,9

(100,2 en PLF 2012 ; 97,9 en révisé)

– Émissions nettes à moyen et long terme

170,0

(179 en PLF 2012 ; 178 en révisé)

– Émissions nettes à court terme :

– 0,7

(– 1,1 en PLF 2012 ; – 10 en révisé)

– Taux d’intérêt moyens :

• à 3 mois en 2013 :

0,25 %

(1,4 % en PLF 2012 ; 0,05 % en révisé)

 

• à 10 ans en 2013 :

 2,9 %

(3,7 % en PLF 2012 ; 2,7 % en révisé)

II.– ÉVOLUTIONS ATTENDUES

– Encours nominal de dette négociable fin 2011 :

1 293

(63,5 % du PIB)

– Projections d’encours

• Fin 2012

1 366

(65,4 % du PIB)

 

• Fin 2013

1 431

(65,9 % du PIB)

– Trésorerie (charge nette)

• constatée en 2011 :

474

 
 

• prévue en 2012 :

855

 
 

• prévue en 2013 :

956 (PAP)

 

LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DE LA GESTION DE LA DETTE
ET DE LA TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Au milieu des années 1980, il est apparu que les besoins de financement de l’État devaient s’accroître très fortement et que le Trésor ne pourrait plus recourir à ses moyens traditionnels de financement : principalement l’accès à des ressources non négociables, à bon marché. Le Trésor s’est fait alors l’instigateur et l’acteur principal d’une réforme visant à modifier profondément la nature des titres émis par l’État, ainsi que les conditions de leur mise sur le marché et de leur négociation sur le marché secondaire. Il a impulsé des mutations essentielles pour le financement de l’État. Trois principes structurent la politique d’émission.

1/ La simplicité. La dette négociable de l’État a été réorientée autour de trois composantes standardisées, les « valeurs du Trésor ». Elles se distinguent par leurs échéances, qui couvrent tous les domaines de la courbe des taux :

– les BTF (bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés) couvrent les besoins de trésorerie à court terme : leur durée de vie à l’émission est inférieure à un an. Ils financent les décalages temporaires de trésorerie entre les encaissements et les décaissements. Les BTF sont aussi une variable d’ajustement dans le programme de financement ; ainsi, leur encours peut varier d’une année sur l’autre. Un nouveau type de BTF à très court terme (de 2 à 6 semaines) a été créé en 2006 ;

– les BTAN (bons du Trésor à taux fixe et intérêts annuels) assurent un financement à moyen terme. Chaque année sont émis deux BTAN à 5 ans et un BTAN à 2 ans ;

– les OAT (obligations assimilables du Trésor) sont l’instrument du financement à long terme du Trésor, qui sert d’emprunt de référence au marché obligataire français. Leur durée de vie à l’émission peut aller jusqu’à 50 ans. Deux lignes d’OAT à 10 ans sont émises chaque année, ainsi qu’une OAT plus longue (15 ou 30 ans) suivant la demande. En outre, des obligations indexées sur l’inflation en France (OATi) et sur l’inflation européenne (OAT€i) sont également émises (comme par exemple l'OATi 0,10 % 25 juillet 2021 créée le 18 octobre 2012) et représentent environ 10 % de l’ensemble des émissions.

2/ La transparence. Pour assurer le placement de ses titres, le Trésor a fait le choix d’une procédure assurant l’égalité de tous les investisseurs et leur mise en concurrence : l’adjudication « à prix demandé ». Avant chaque adjudication, le Trésor annonce le volume total de titres qu’il souhaite émettre. Les offres des investisseurs soumissionnaires sont compilées par la Banque de France et présentées au Trésor de façon anonyme, classées selon leur prix. Le Trésor décide du montant des soumissions qu’il retient, dans la limite de la fourchette annoncée auparavant.

Par ailleurs, le Trésor publie en début d’année un calendrier prévisionnel d’émission et s’attache à respecter la régularité des appels au marché. Ainsi, une adjudication d’OAT a lieu le premier jeudi de chaque mois et les BTAN sont adjugés le troisième jeudi de chaque mois (sauf en août et décembre). Les BTF sont adjugés chaque lundi.

La procédure de syndication, qui consiste à pré-placer le montant de l’emprunt auprès d’un syndicat d’établissements financiers chargé d’assurer ensuite son véritable placement auprès des investisseurs, n’est plus utilisée que de façon exceptionnelle. L’État y a recours pour le premier placement de titres aux caractéristiques innovantes.

3/ La liquidité. Attirer les investisseurs vers la dette de l’État supposait que fût rénové par ailleurs, pour le dynamiser, le marché secondaire. Le dynamisme du marché repose en partie sur la liquidité des titres qui peuvent s’y négocier. C’est pourquoi le Trésor a fait le choix d’émettre des titres dits « assimilables », qui peuvent être rattachés à des lignes déjà existantes présentant les mêmes caractéristiques. Les titres nouvellement émis deviennent, dès leur émission, totalement indiscernables des titres anciens composant la ligne. Le gisement total de la ligne peut ainsi devenir important, favorisant la liquidité des échanges. Une quinzaine de lignes ont ainsi un encours de l’ordre de 20 milliards d’euros chacune.

Sur toutes ces questions, afin de répondre au mieux à la demande des acteurs de marché, l’Agence France Trésor (AFT) bénéficie des conseils de 20 spécialistes en valeurs du Trésor (SVT), ensemble de banques et d’institutions spécialisées, françaises ou étrangères, liées à l’État par une charte. Le renouvellement de cette charte et de la liste des SVT devrait intervenir avant la fin de l’année 2012.

 

A.– UN BESOIN DE FINANCEMENT TOUJOURS COLOSSAL MALGRÉ UNE BAISSE DE 11,7 MILLIARDS D’EUROS EN 2013

Avant de s’intéresser à la dépense budgétaire que constitue la charge de la dette, il est indispensable d’examiner les modalités de financement de l’État en 2011 et 2012, la première dépendant très largement des secondes.

Depuis l’entrée en vigueur de la LOLF en 2006, le programme d’emprunt fait l’objet d’un vote du Parlement, qui se prononce sur le tableau de financement figurant à l’article d’équilibre des lois de finances.

En prévision, le programme d’emprunt éclaire l’origine du besoin de financement qui sera supporté par l’État l’année considérée et définit la structure des ressources qui seront utilisées pour le couvrir. En exécution, le tableau de financement retrace les conditions d’exécution des lois de finances, l’effet des éventuels rachats de titres avant échéance et l’évolution effective des ressources à court terme du Trésor (dont certaines, tels que les comptes de dépôt des correspondants, échappent à son contrôle).

Le tableau présenté ci-après rend compte des modalités de financement de l’État au cours de ces douze dernières années et montre que, malgré sa baisse de 11,7 milliards d’euros en 2013 par rapport au révisé 2012 (soit – 6,5 %), le besoin de financement de l’État (171,1 milliards d’euros) reste encore supérieur à celui constaté en 2008 (164 milliards d’euros) au début de la crise économique et financière.

DOUZE ANS DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012 (révisé)

PLF 2013

Déficit en gestion (y. c. FMI et FSC) (b)

39,3

50,2

57,0

46,4

47,3

35,4

34,6

56,4

134,7

149,6

93,1

83,6

61,6

Amortissement des OAT

14,8

14,6

30,3

36,0

33,1

43,2

31,9

39,3

62,8

29,5

48,8

55,5

61,4

Amortissement des BTAN

36,5

44,8

32,2

30,5

32,5

34,4

37,2

58,3

47,4

53,5

46,1

42,4

46,5

Amortissement des dettes reprises par l’État (c)

2,8

0,6

10,3

1,6

4,1

0,6

1,3

1,6

Variation des dépôts de garantie et autres (d)

0,5

– 0,3

– 0,3

0,2

+ 0,1

Total amortissements

51,3

59,4

62,5

66,5

65,6

80,4

69,7

107,9

111,8

87,1

95,5

99,2

109,5

Besoin de financement de l’État

90,6

109,6

119,5

112,9

112,9

115,8

104,8

164,0

246,2

236,9

188,6

182,8

171,1

Émissions brutes d’OAT (e)

51,6

53,9

66,3

76,3

75,5

62,8

62,3

76,1

102,8

122,8

     

Émissions brutes de BTAN (e)

42,0

43,0

52,6

55,2

50,9

58,3

45,3

54,5

75,8

87,9

     

Total Émissions brutes à moyen et long terme

93,6

96,9

118,9

131,5

126,4

121,1

107,6

130,6

178,6

210,7

     

Rachats avant échéance (e)

14,9

10,0

7,4

9,9

16,7

17,0

10,1

2,1

13,7

22,7

     

dont rachat par la CDP (f)

7,8

     

Total Émissions nettes à moyen et long terme

78,7

86,9

111,5

121,6

109,7

104,1

97,6

128,5

164,9

187,6

183,4

178,0

170,0

Annulation de titres d’État par la CDP

+ 7,8

4,0

Variation nette des BTF

+ 9,4

+ 35,7

+ 20,5

– 11,6

– 1,7

– 29,1

+ 12,2

+ 59,8

+ 75,8

– 27,0

– 9,3

– 10,0

 0,7

Variation des dépôts des correspondants du Trésor

– 2,3

+ 5,1

– 14,6

+ 1,7

+ 6,7

+ 5,1

+ 2,6

– 1,6

+ 0,8

+ 43,7

+ 12,4

+ 2,4

 3,6

Variation du compte courant du Trésor

+ 8,0

– 16,4

+ 0,2

– 2,2

– 5,9

+ 25,9

– 8,1

– 25,3

– 0,5

+ 10,6

– 3,9

+ 2,4

 2,5

Autres ressources de trésorerie

– 3,2

– 1,7

+ 1,9

+ 3,4

+ 4,2

+ 1,9

+ 0,5

+ 2,5 

+ 5,3

+ 22,1

+ 6,1

10

3,9

Ressources de financement de l’État

90,6

109,6

119,5

112,9

112,9

115,7

104,8

164,0

246,2

237

188,6

182,8

171,1

(a) En 2006, le déficit indiqué est diminué de l’opération exceptionnelle de régularisation comptable des pensions de décembre 2005 (3,3 milliards d’euros). En 2007, le déficit indiqué est augmenté de l’opération exceptionnelle de cession de titres EDF (3,7 milliards d’euros) destinée à financer l’opération « Campus » en faveur des universités.

(b) Le montant indiqué ne rend compte que des opérations dénouées d’un point de vue bancaire sur le compte du Trésor entre le 1er et le 31 décembre.

(c) Ligne non renseignée avant 2006.

(d) Ligne non renseignée avant 2007.

(e) En valeur nominale. En 2008, cette ligne prend également en compte le bilan net (+ 0,2 milliard d’euros) de l’opération d’échanges de titres du 4 décembre 2008 (voir infra).

(f) CDP : Caisse de la dette publique (ligne créée par la loi de finances initiale pour 2007).

 

1.– Le programme révisé de financement de l’État en 2012

Le tableau ci-après rend compte, en distinguant le programme officiel de financement, publié en loi de finances initiale pour 2012, et celui résultant des diverses lois de finances rectificatives adoptées depuis (8) et du révisé retenu par le projet annuel de performances pour 2013.

LE FINANCEMENT DE L’ÉTAT EN 2012

(en milliards d’euros)

 

LFI 2012

LFR mars

LFR août

Révisé 2012 (PAP 2013)

Écart révisé 2012 / LFI 2012

Déficit en gestion

78,7

84,8

81,1

83,6

+4,9

Amortissement OAT

56,1

55,5

55,5

55,5

– 0,6

Amortissement BTAN

42,8

42,4

42,4

42,4

– 0,4

Amortissement dettes reprises

1,3

1,3

1,3

1,3

 

Variation des dépôts de garantie et autres

         

Total amortissements

100,2

99,2

99,2

99,2

– 1,0

Besoin de financement

178,9

184,0

180,3

182,8

+ 3,9

Annulations par la CDP

4,0

4,0

   

– 4,0

Émissions MLT nettes des rachats et annulations

179,0

178,0

178,0

178,0

– 1,0

Variation nette des BTF

– 4,2

– 4,3

– 7,7

– 10,0

– 5,8

Variation des dépôts des correspondants

– 4,4

– 0,3

– 0,3

2,4

+ 6,8

Variation du compte courant du Trésor

1,0

2,4

2,4

2,4

+ 1,4

Divers

3,5

4,2

7,9

10,0

+ 6,5

Ressources de financement

178,9

184,0

180,3

182,8

+ 3,9

Source : Lois de finances initiale et rectificatives pour 2012 et PAP 2013.

Afin de mieux comprendre l’évolution de chacune des lignes du tableau de financement ci-dessus, le Rapporteur spécial propose d’examiner ces mouvements au fil des différentes lois de finances pour 2012 :

– La loi de finances rectificative du 14 mars 2012 mettant en œuvre la réforme de la « TVA sociale » proposée par le précédent Gouvernement et procédant au premier versement du capital du mécanisme européen de stabilité s’est traduite par une augmentation du déficit budgétaire de 6,5 milliards d’euros. Le besoin de financement de l’État est néanmoins passé de 178,9 milliards d’euros à 184 milliards d’euros (+ 5,1 milliards d’euros), les amortissements de dettes à moyen et long terme ayant été réduits de 1 milliard d’euros grâce aux rachats de titres amortissables en 2012 qui ont été réalisés au cours des derniers mois 2011.

La répartition des ressources de financement de l’État a alors connu une évolution notable grâce à une amélioration manifeste des ressources de trésorerie de l’État. En effet, la variation des dépôts des correspondants est passée de - 4,4 milliards d'euros en loi de finances initiale à – 0,3 milliard d’euros en raison de la poursuite de la politique de mutualisation des trésoreries publiques sur le compte unique du Trésor (en particulier celle d’Oséo). De plus, la contribution de la variation du compte de Trésor a été légèrement ajustée à la hausse, passant de 1 milliard d’euros en loi de finances initiale à 2,4 milliards d’euros, compte tenu des rachats effectués sur les titres arrivant à maturité en début d’année 2013. Enfin, les autres ressources de trésorerie ont été revues à la hausse, passant de 3,5 à 4,2 milliards d'euros, en raison de la constatation des primes et décotes comptabilisées depuis le début de l’année, soit un apport net en trésorerie de 0,7 milliard d’euros.

– La loi de finances rectificative du 16 août 2012 mettant en œuvre les premières réformes fiscales et budgétaires du nouveau Gouvernement a permis de constater une amélioration du déficit budgétaire de 3,7 milliards d’euros (9) par rapport à la première loi de finances rectificative, réduisant d’autant le besoin de financement de l’État. En conséquence, il a été procédé à une révision à la baisse de la contribution des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés (BTF) de 3,4 milliards d’euros par rapport la première loi de finances rectificative (passant ainsi à – 7,7 milliards d’euros). En revanche, les autres ressources de trésorerie ont été revues à la hausse de 3,7 milliards d’euros, sous le double effet, d’une part, de la constatation des primes à l’émission, nettes des pertes sur rachat, enregistrées depuis la précédente loi de finances (+ 3 milliards d’euros) et, d’autre part, au titre de la hausse de la provision d’indexation des obligations indexées sur l’inflation (+ 0,7 milliard d’euros), qui ne pèse pas sur le besoin réel de financement et est donc neutralisée dans le tableau de financement.

Le projet annuel de performance pour 2013 précise néanmoins que sous l’effet d’un déficit budgétaire légèrement plus élevé que celui prévu dans la loi de finances rectificative du 16 août 2012, le besoin de financement en 2012 est revu à la hausse de 2,5 milliards d’euros à 182,8 milliards d’euros. Ce besoin supplémentaire devrait être plus que couvert par l’augmentation des dépôts des correspondants, liée notamment à la révision de l’hypothèse de décollecte des fonds des collectivités territoriales (les collectivités devraient a minima stabiliser leurs encours déposés au Trésor alors qu’une décollecte de 2 milliards d’euros était anticipée en loi de finances initiale), ainsi que par les primes nettes supplémentaires enregistrées depuis l’été lors des émissions de titres à moyen et long terme (leur montant, déduction faite des pertes sur rachats, s’élève à ce jour à 5,6 milliards d’euros, soit 1,9 milliard d’euros de plus que dans la loi de finances rectificative du 16 août 2012). De ce fait, l’encours des BTF devrait diminuer de plus de deux milliards d’euros supplémentaires sur l’année pour atteindre - 10 milliards d’euros contre - 7,7 milliards d’euros inscrits dans la deuxième loi de finances rectificative). Malgré l’ensemble de ces mouvements, le plafond de variation de la dette, fixé à 80,1 milliards d’euros dans la loi de finances initiale, est jusqu’à maintenant resté inchangé.

La dette négociable d’une durée supérieure à un an estimée au 31 décembre 2012 augmenterait in fine de 82,7 milliards d’euros selon le projet annuel de performances. Toutefois, le plafond de variation de la dette fixé par la loi de finances s’apprécie hors coût d'indexation des titres indexés amortis en 2012 (soit 2,6 milliards d’euros). Il s’ensuit que le plafond de 80,1 milliards d’euros fixé pour l’année 2012 devrait être respecté. S’y ajoute en outre une baisse de 10 milliards d’euros de l’encours de la dette de l’État d’une durée inférieure à un an.

En conséquence, l’encours de la dette négociable de l’État passerait de 1 313 milliards d’euros fin 2011 à 1 387 milliards d’euros en 2012 (+ 74 milliards d’euros, soit + 2,3 points de PIB).

2.– Le programme de financement de l’État en 2013

La diminution du besoin de financement annuel de l’État est une condition sine qua non de la maîtrise du volume de notre endettement public, l’État représentant plus de 70 % de la dette publique française. Elle n’est possible que si l’ensemble des administrations publiques contribuent à l’effort de redressement des comptes publics et que l’État parvient à reconstituer le niveau de recettes dont il disposait avant la crise. Elle implique donc de parvenir à réduire notre déficit public, à commencer par le déficit budgétaire de l’État dès 2013, pour atteindre l’équilibre structurel en 2016.

Une première étape sera franchie en 2013, le déficit public devant être réduit de 4,5 % à 3 %. Le déficit de l’État passe quant à lui de 83,6 milliards d’euros en révisé 2012 à 61,6 milliards d’euros en 2013. Grâce à cette diminution de 22 milliards d’euros du déficit budgétaire, et malgré le niveau plus élevé des amortissements de dette à moyen et long terme (107,9 milliards d’euros contre 97,9 milliards d’euros en 2012), le besoin de financement diminuerait donc de 6,5 % en 2013, à 171,1 milliards d’euros.

LE FINANCEMENT DE L’ÉTAT EN 2013

(en milliards d’euros)

 

LFI 2012

Révisé 2012
(PAP 2013)

PLF 2013

Déficit en gestion

78,7

83,6

61,6

Amortissement OAT

56,1

55,5

61,4

Amortissement BTAN

42,8

42,4

46,5

Amortissement dettes reprises

1,3

1,3

1,6

Variation des dépôts de garantie et autres

     

Total amortissements

100,2

99,2

109,5

Besoin de financement

178,9

182,8

171,1

Annulations par la CDP

4,0

 

4,0

Émissions MLT nettes des rachats et annulations

179,0

178,0

170,0

Variation nette des BTF

-4,2

-10,0

-0,7

Variation des dépôts des correspondants

-4,4

2,4

-3,6

Variation du compte courant du Trésor

1,0

2,4

-2,5

Divers

3,5

10,0

3,9

Ressources de financement

178,9

182,8

171,1

Source : PAP 2013.

● L’année 2013 apparaît marquée par une nouvelle augmentation des amortissements de titres négociables venant à échéance qui représente désormais 64 % du besoin de financement (contre 53 % en 2012), soit un niveau comparable à la situation d’avant crise comme le montre le graphique ci-après.

Les amortissements de titres négociables venant à échéance pourront toutefois être revus à la baisse d’ici à la fin de l’année 2012, en fonction des rachats de titres de maturité 2013 qu’aura pu effectuer l’Agence France Trésor dans les prochaines semaines.

STRUCTURE DU BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT (2002-2013)

(en milliards d’euros)

Source : Lois de règlement et PAP 2013, calculs du Rapporteur spécial.

De plus, le remboursement de dettes reprises par l’État augmenterait de 0,3 milliard d’euros pour atteindre 1,6 milliard d’euros en 2013, correspondant à des échéances de dettes du service annexe d’amortissement de la dette de la SNCF (SAAD) pour 1 132 millions d’euros (10) (cette dette ne devrait être totalement remboursée que le 11 août 2023) et de Charbonnages de France pour 500 millions d’euros (11) (l’amortissement complet serait acquis le 25 avril 2013).

● Le besoin de financement de l’État serait presque entièrement couvert par des émissions nettes de moyen long terme nettes de rachat de 170 milliards d’euros, soit un montant en baisse de 8 milliards d’euros par rapport à 2012. Il faut d’ailleurs constater que depuis le deuxième semestre 2011, la crise de la dette souveraine a incité les investisseurs à raccourcir la maturité des titres qu’ils détenaient, et des évolutions de la réglementation des fonds de pension de certains pays du Nord en 2012 ont également créé des incitations à limiter les achats de titre de très long terme (30 ans) au profit d’achat de titres d’une maturité de 15 ans. En conséquence, en 2012, une proportion d’émission à taux fixe de très long terme a été réalisée à un niveau inférieur à celle de 2011 en ligne avec la baisse de la demande (12 % au 30 juin 2012 contre 16 % en 2011) alors qu’un nouveau titre de référence à 15 ans, l’OAT 2,75 % 25 octobre 2027, a été créé avec succès.

Dans ces conditions, compte tenu des amortissements prévus en 2013, l’appel net au marché – c’est-à-dire le plafond de variation de la dette négociable soumis au vote du Parlement – se replierait à 62,1 milliards d’euros contre 80,1 milliards d’euros en 2012.

Les autres ressources de financement, évoluant en sens contraire, se neutraliseraient :

– les dépôts des correspondants enregistreraient une diminution de 3,6 milliards d’euros. Cette estimation prudente représente l’anticipation du décaissement par les organismes bénéficiaires de crédits issus des « investissement d’avenir » sur leurs comptes(12;

– le solde du compte du Trésor enregistrerait un accroissement de 2,5 milliards d’euros afin de couvrir l’augmentation du besoin de financement au début de l’année 2014 liée à un amortissement de dette important ;

– comme cela est d’usage, les provisions pour charge d’indexation des titres indexés, qui participent du déficit budgétaire mais n’ont pas d’impact en trésorerie, sont neutralisées via une prise en compte sur la ligne « autres ressources de trésorerie » à hauteur de 3,9 milliards d’euros et aucune prime ou décote à l’émission n’est, à ce stade, inscrite. Le Rapporteur spécial relève néanmoins que les niveaux de taux prévalant et anticipés rendent très probable l’enregistrement d’un montant significatif de primes l’an prochain, en particulier du fait des ré-abondements de lignes anciennes dont les taux faciaux ont de fortes chances de rester supérieurs aux taux de marché ;

– enfin, la part des bons du trésor à taux fixes et intérêts précomptés (BTF) poursuivrait sa régression en 2013 : elle diminuerait de 0,7 milliard d’euros après une chute de 10 milliards d’euros en 2012 en contrepartie de l’augmentation de l’encours des dépôts des correspondants du Trésor (+ 6,8 milliards d’euros par rapport à la LFI 2012) ainsi que par l’enregistrement des primes à l’émission en septembre 2012 d’un montant de 5,6 milliards d’euros. Il en résulte que l’encours des BTF dans la dette de l’État se situerait autour de 11,5 % en 2013, réduisant d’autant l’exposition de la France à un risque de remontée des taux courts (bien que ceux-ci n’aient jamais été aussi bas que depuis le troisième trimestre 2012 (13)).

PART DE L’ENCOURS DES BTF DANS L’ENCOURS DE DETTE AU 31 DÉCEMBRE

Source : réponse au questionnaire budgétaire, calculs du Rapporteur spécial.

B.– LE PARADOXE DE LA CHARGE DE LA DETTE : MALGRÉ LA PROGRESSION DE L’ENCOURS, LA CHARGE DE LA DETTE BAISSE

Alors que l’encours de la dette de l’État a quasiment doublé entre 2002 et 2013 passant de 746 milliards d’euros à 1 452 milliards d’euros (+ 94,6 %), le poids de la charge de la dette n’a fort heureusement pas suivi la même dérive (+ 23,7 %), comme le montre le tableau suivant.

ÉVOLUTION DE L’ENCOURS ET DE LA CHARGE DE LA DETTE DE L’ÉTAT

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Encours de la dette

746,0

810,0

851,2

898,6

896,2

932,8

1 040,9

1 167,8

1 228,9

1 335,2

1 387,0

1 452,4

Charge de la dette

37,9

37,3

37,8

38,4

38,4

39,3

44,3

37,5

40,1

45,9

46,7

46,9

Source : INSEE, comptes nationaux, base 2005 et documents budgétaires.

La maîtrise de la charge de la dette résulte essentiellement des taux d’intérêt bas et de la maîtrise de l’inflation. Malheureusement, la modération de la charge de la dette observée ces dernières années est de plus en plus remise en cause par le poids croissant de la dette de l’État, et par l’incertitude sur l’évolution des taux d’intérêt dans le contexte actuel de crise des dettes souveraines au sein de l’Union européenne.

En outre, bien qu’évoluant de façon modérée, la charge de la dette ampute de façon majeure les marges de manœuvre de l’État. D’un montant de 46,9 milliards d’euros en 2013, elle représente en effet le premier poste de dépenses du budget de l’État, hors contributions au CAS Pensions, si l’on exclut la mission Remboursements et Dégrèvements. À titre de comparaison, le Rapporteur spécial entend rappeler que cette dépense budgétaire représente 60 % des recettes de l’impôt sur le revenu attendues en 2013, 2,2 % du PIB 2013, ou encore 95,6 % des dépenses de fonctionnement de l’État l’année prochaine.

Comme l’a déjà mentionné le Rapporteur spécial, seul le redressement de nos comptes publics et la réduction du besoin de financement de l’État permettra d’amorcer l’inversion de la courbe de la dette dès 2014. Ceci est d’autant plus indispensable qu’il convient de rassurer les marchés financiers pour continuer à bénéficier du phénomène de « fuite vers la qualité » dont dispose encore notre pays et qui lui permettrait de voir la charge de la dette de l’État réduite de 2 milliards d’euros en 2012 par rapport à la loi de finances initiale.

Si tel n’était pas le cas, la France se trouverait exposée à une remontée des taux d’intérêt qui pourrait conduire à un emballement incontrôlé de la dette publique bien au-delà du seuil de 90 % du PIB traditionnellement retenu comme celui au-delà duquel le taux de croissance annuel médian chuterait de 1 % (14), nous entraînant ainsi dans la récession. Rappelons en effet l’extrême sensibilité de la charge de la dette au risque de taux : un choc de 1 % sur l’ensemble des taux à compter de 2013 se traduirait par une augmentation de la charge de la dette de près de 2 milliards d’euros en 2013 (soit 0,1 point de PIB). Concentrée au départ sur les BTF, elle se diffuserait progressivement à la dette à moyen et long terme, au fur et à mesure du renouvellement du stock, pour atteindre près de 13 milliards d’euros à un horizon de 10 ans comme le montre le graphique suivant.

Source : PAP 2013.

Le tableau ci-après présente le détail de la composition de la charge de la dette prévue dans la loi de finances initiale pour 2012, la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 et dans le présent projet de loi de finances pour 2013.

LA COMPOSITION DE LA CHARGE DE LA DETTE EN 2012 ET 2013

(en millions d’euros)

 

LFI 2012

LFR II 2012

PLF 2013

DETTE NÉGOCIABLE

     

Intérêts des BTF

3 137

1 037

856

Intérêts des BTAN (hors titre indexés)

8 268

8 268

7 052

Intérêts des OAT (hors OAT indexées)

33 431

33 431

33 756

Intérêts des BTAN et OAT indexées

3 638

3 638

3 371

Charge d’indexation du capital des OAT indexées

2 952

3 652

3 089

Frais et commissions

20

20

20

Intérêts sur autres dettes reprises par l’État

237

237

183

Intérêts couverture des risques

45

45

5

Total charge brute de la dette négociable

51 728

50 328

48 332

DETTE NON NÉGOCIABLE

     

Charge d’intérêts

1

1

1

Intérêts sur autres dettes reprises par l’État

Total charge brute de la dette non négociable

1

1

1

GESTION DE LA TRÉSORERIE

     

Trésorerie : comptes de dépôts des correspondants

542

542

336

Trésorerie : fonds non consommables versés par l’État

620

620

670

Total charge brute gestion de la trésorerie

1 162

1 162

1 006

Charge brute de la dette

52 891

51 491

49 339

À déduire : Recettes en atténuation de la charge de la dette (-)

     

Coupons courus des OAT et des BTAN

3 766

3 766

2 389

Couverture des risques

70

70

35

Rémunération compte Trésor à la Banque de France

5

5

2

Rémunération prêts court terme et pensions sur titres

302

302

48

Charge nette de la dette avant swaps

48 773

47 373

46 895

À déduire : solde des opérations de gestion active de la dette (A – B)

– 242

– 242

– 199

A. Recettes :

     

dont Intérêts perçus au titre des swaps

459

459

302

dont Rémunération des appels de marge sur swaps

0

0

0

B. Dépenses :

     

dont Intérêts payés au titre des swaps

207

207

98

dont Intérêts des appels de marge sur swaps

10

10

5

Charge nette de la dette après swaps

48 531

47 131

46 696

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

1.– Une baisse de 2 milliards d’euros de la charge de la dette en 2012

En loi de finances initiale pour 2012, les crédits proposés pour le programme Charge de la dette et trésorerie de l’État atteignaient le record historique de 48,77 milliards d’euros, soit une progression de 3,4 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2011 et de 1,95 milliard d’euros par rapport à la dernière prévision pour 2011.

Cette augmentation de la charge de la dette s’avérait néanmoins inférieure à celle anticipée par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (laquelle était de 50,51 milliards d’euros).

À l'issue des deux lois de finances rectificatives du 14 mars et du 16 août, la charge de la dette pour 2012 a été révisée de – 1,4 milliard d’euros par rapport à la LFI, à 47,4 milliards d’euros. Ce niveau sera revu, comme il est d’usage, dans le cadre du collectif de fin d’année. En l’état actuel des prévisions, et sauf élément imprévu, cette révision devrait conduire, en raison du maintien à un niveau nul ou quasi-nul des taux d’endettements à court terme, à une nouvelle réduction, au moins égale à 0,7 milliard d’euros. De ce fait, la charge de la dette pour 2012 ne devrait pas dépasser 46,7 milliards d’euros, soit une baisse d’environ 2 milliards d’euros par rapport à la prévision initiale.

Sur le champ, largement prépondérant, de la dette négociable (OAT, BTAN et BTF), la quasi-stabilité de la charge de la dette de l’État attendue entre 2011 et 2012 résulterait de la compensation de l’effet « volume » défavorable lié à l’augmentation de l’encours de dette à moyen et long terme (+ 3,4 milliards d’euros), par :

– un effet « taux » très favorable (– 2,1 milliards d’euros) : les taux courts sont devenus légèrement négatifs au deuxième semestre 2012 et les taux de moyen et long terme sont très inférieurs aux taux initialement anticipés (2,7 % contre 3,7 % pour les OAT à 10 ans). Ceci s’explique principalement par l’abondance de liquidités résultant de la décision de la Banque centrale européenne du 5 juillet 2012 d’abaisser les taux de sa facilité de dépôt de 25 points de base à zéro (15) ;

– un effet « inflation » : la hausse des prix en 2012 a été certes plus importante que prévu, mais moindre que celle enregistrée en 2011 (– 1 milliard d’euros) ;

– et un effet « calendaire » : le coût net des émissions à moyen et long terme de l’année, qui dépend essentiellement d’effets calendaire, s’inscrit en retrait en 2012 par rapport à 2011 (– 0,3 milliard d’euros).

S’agissant de la trésorerie en 2012, les montants n’ont pas été revus depuis la LFI mais le seront, comme il est d’usage, dans le cadre du collectif de fin d’année. La rémunération des fonds non consommables destinés au financement des investissements d’avenir et déposés au Trésor comme le solde des autres dépenses et recettes varieront vraisemblablement assez peu par rapport à l’estimation initiale. Toutefois, selon les informations transmises à votre Rapporteur spécial, les composantes de ce dernier solde (recettes et dépenses) devraient en revanche être sensiblement revus à la baisse, chacun à hauteur d’environ 200 millions d’euros, du fait du très faible niveau des taux de court terme.

2.– Une quasi-stabilisation de la charge de la dette en 2013 par rapport au niveau constaté fin 2012

Pour 2013, la charge de la dette de l’État s’élèverait à 46,895 milliards d’euros soit un niveau proche de celui qui devrait être constaté à la fin de l’année 2012 (46,7 milliards d’euros), et ce malgré l’augmentation de l’encours de la dette de l’État qui passerait de 1 387 milliards d’euros à 1 452,4 milliards d’euros. Celle-ci continuerait toutefois de ralentir, et serait pratiquement divisée par deux par rapport au pic enregistré en 2009.

Ce paradoxe résulte de phénomènes assez similaires à ceux exposés précédemment, avec, hors effet « calendaire » résiduel :

– un effet « volume » défavorable (+ 2,0 milliards d’euros), mais moins que les années précédentes, concentré sur la dette à moyen et long terme et lié à la progression de l’encours : l’encours des BTF devrait, quant à lui, rester quasiment stable ;

– un effet « taux » encore favorable (– 0,9 milliard d’euros), mais moins qu’en 2012, le gain supplémentaire attendu sur la dette à moyen et long terme (impact différé des très faibles taux faciaux des titres créés en 2012, en particulier) étant en partie compensé par la remontée des taux courts ;

– un effet « inflation » également favorable (– 0,6 milliard d’euros), sous réserve que l’hypothèse de ralentissement de l’inflation soit confirmée.

Les hypothèses de remontée des taux d’intérêt et d’inflation sont en effet les suivantes :

– Taux courts : après une phase de quasi-stabilité au dernier trimestre de cette année, le taux des BTF à 3 mois remonterait progressivement pour recoller, à l’horizon de la mi-2014, au taux de refinancement actuel de la Banque centrale européenne (soit 0,75 %), supposé inchangé d’ici-là. Le taux à la fin 2013 s’établirait en conséquence à 0,5 % et retrouverait ainsi le niveau de l’automne 2011. Ce rattrapage traduirait la normalisation de la situation prévalant sur les marchés monétaires et financiers, en particulier à travers la réduction de l’excès de liquidité sur le marché monétaire ;

– Taux à moyen et long termes : le scénario repose sur l’hypothèse d’une diminution des tensions sur les dettes souveraines au sein de la zone euro au cours des prochains mois conduisant à un resserrement des spreads. Ce resserrement s’effectuerait via une baisse des taux pour les pays subissant actuellement une forte défiance des marchés et via une augmentation des taux pour les pays comme la France bénéficiant aujourd’hui du phénomène de « fuite vers la qualité ». Une remontée assez sensible des taux à moyen et long termes sur la dette française est ainsi anticipée d’ici la fin de l’année 2013, date à laquelle les taux retrouveraient approximativement leur niveau d’octobre 2011. Ce mouvement de normalisation pourrait être d’autant plus marqué que le repli de ces derniers mois a été important et pourrait atteindre, par rapport aux points bas actuels, près de 125 points de base pour les titres à 2 ans, près de 150 points de base pour ceux à 5 ans et près de 100 points de base pour ceux à 10 ans.

Le Rapporteur spécial estime que ces scénarii de remontée des taux d’intérêt sont prudents. Les anticipations de marché (taux forwards) à horizon d’un an prévalant à la mi-septembre 2012 ressortent aux alentours de 0,26 % pour le taux à 3 mois français et de 2,6 % pour le 10 ans, soit des niveaux inférieurs à ceux ici anticipés au même horizon (respectivement 0,4 % et 3,1 %). Il est également prudent au vu de la tendance retracée dans le consensus forecast, qui recense les prévisions des économistes : en août, le consensus anticipait ainsi un niveau de 3 % pour le taux à 10 ans français à horizon d’un an et ce niveau a été revu à la baisse, à 2,7 %, dans le consensus publié à la mi-septembre.

– Le montant, en 2013, de la provision pour charge d’indexation des titres indexés sur l’inflation est fondé sur le rythme d’inflation tendanciel retenu pour la construction de la programmation à moyen terme 2013-2015, soit 1,75 %. Ce rythme marquerait un léger ralentissement par rapport à l’évolution en 2012 de la référence d’inflation qui sert, précisément, au calcul des provisions (+ 1,9 % pour la France ; + 2,4 % pour la zone euro).

Le Rapporteur spécial rappelle que cette provision est sensible aux variations de l’inflation comme le montre l’exécution 2012 : en effet, la charge d’indexation, estimée à 2 952 millions d’euros en LFI ressort en exécution à 3 638 milliards d’euros en raison d’une augmentation de l’inflation par rapport à la prévision (+ 0,23 % sur l’inflation en France et + 0,68 % sur l’inflation dans la zone euro). Appliqué à l'encours constaté au 25 juillet 2011 (16) (72,8 milliards d’euros pour les titres indexés sur l’inflation française et 88,1 milliards d’euros pour ceux indexés sur l’inflation dans la zone euro), ce surcroît d'inflation se traduit mécaniquement par un surcoût de 765 millions d’euros, ce montant ayant été ramené à 625 millions d’euros après prise en compte des rachats opérés entre le 25 juillet 2011 et le 25 juillet 2012 (17). S'ajoute à cette somme l'impact de ce même surcroît d'inflation sur les émissions réalisées entre le 25 juillet 2011 et le 25 juillet 2012, soit une soixantaine de millions d'euros.

Le Rapporteur spécial en déduit qu’en 2013, en retenant une hypothèse haute d’inflation de 2 %, au lieu de 1,75 %, le montant de la charge de la dette indexée pour 2013 pourrait augmenter d’un peu plus de 400 millions d’euros, auquel s’ajouterait un surcroît d’inflation sur les émissions réalisées entre le 25 juillet 2012 et le 25 juillet 2013 estimée à 21,3 milliards d’euros. Il n’en demeure pas moins que la charge de la dette indexée resterait inférieure à celle constaté en 2011 et 2012, comme le montre le tableau ci-après.

CHARGE DE LA DETTE INDEXÉE SUR L’INFLATION DEPUIS 2002

en milliards d’euros

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Révisé
2012

PLF 2013

Charge brute de la dette indexée

1,2

1,7

2,9

3,5

4,6

4,7

7,9

3,6

5,7

7,4

7,0

6,4

dont paiement des intérêts

0,8

1,2

1,8

2,1

2,5

2,9

3,3

3,5

3,4

3,5

3,4

3,3

dont provisionnement du capital

0,4

0,5

1,1

1,4

2,1

1,8

4,6

0,1

2,3

3,9

3,6

3,1

Coupons reçus (-)

0,2

0,2

0,3

0,1

0,1

0,2

0,2

0,2

0,2

0,1

0,1

0,2

Charge nette de la dette indexée

1,0

1,5

2,6

3,3

4,5

4,5

7,7

3,5

5,5

7,3

6,9

6,2

Part dans la charge de la dette totale

3,2 %

4,5 %

7,6 %

9,0 %

11,8 %

11,8 %

17,4 %

9,2 %

13,5 %

15,7 %

13,0 %

12 %


Source : réponse au questionnaire budgétaire.

En outre, le Rapporteur spécial entend souligner que le risque d’une envolée non maîtrisée de l’inflation est inexistant puisque la Banque centrale européenne est chargée, par les traités européens, de maintenir la stabilité des prix dans la zone euro, dans une limite maximum de 2 % par an.

Par ailleurs, sur longue période, M. Philippe Mills, Directeur général de l’AFT, a indiqué lors de son audition du 26 septembre 2012 par la Commission des finances (18), que : « Les obligations indexées nous permettent d’obtenir de meilleurs coûts, à moyen terme. Ce n’est d’ailleurs pas une spécialité française (19). (…) S’agissant des obligations indexées, nous avons constaté que les titres indexés arrivés à échéance nous avaient permis de gagner environ vingt points de base par rapport aux obligations nominales émises au même moment et de même maturité : en effet, ils protègent ceux qui les souscrivent des risques d’inflation, et les investisseurs sont prêts à rémunérer cette garantie. De plus, ces titres permettent d’accroître la diversité de la base des investisseurs, donc de diminuer la pression sur les obligations nominales, ainsi vendues dans des conditions plus favorables pour le contribuable français ».

Compte tenu de l’ensemble des éléments présentés ci-dessus, le Rapporteur spécial ne peut que se réjouir du maintien de la charge de la dette au niveau constaté fin 2012 malgré une hypothèse prudente d’inflation et de remontée des taux d’intérêts. Il s’ensuit que le déficit primaire de la France
– c'est-à-dire le déficit budgétaire hors charges d’intérêt – ne s’élèverait plus qu’à – 14,7 milliards d’euros en 2013 (soit 0,7 % du PIB), contre – 36,9 milliards d’euros fin 2012 (soit 1,8 % du PIB) et – 48,7 milliards d’euros fin 2011 (soit 2,4 % du PIB).

Cette perspective est néanmoins dépendante d’au moins deux conditions :

– d’une part, elle suppose une reprise de l’activité économique en France en 2013 après une année 2012 atone, la croissance du PIB étant attendue à 0,8 % en 2013 contre 0,3 % en 2012 ;

– d’autre part, elle implique que l’ensemble des administrations publiques contribuent à l’effort de redressement des comptes publics et modèrent la progression de leurs dépenses, afin de respecter l’engagement du Gouvernement de réduire le déficit public de 4,5 % à 3 % en 2013 pour atteindre le solde stabilisant la dette publique. Cette étape est essentielle pour continuer à bénéficier des meilleurs taux sur les marchés financiers et échapper, à l’inverse, à un choc de taux dévastateur : rappelons à cet égard qu’une augmentation de 1 % sur l’ensemble des taux par rapport à la prévision se traduit mécaniquement par une augmentation de la charge d’intérêt de 1,8 milliard d’euros la première année et de 12,8 milliards d’euros cumulés sur une période de dix ans.

C.– LA PERFORMANCE DU PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Le Rapporteur spécial rappelle que l’évolution de la charge d’intérêt annuelle de la dette de l’État ne saurait être considérée comme un quelconque indicateur de la performance du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État.

Pour le responsable de ce dernier, la charge de la dette apparaît en effet très largement comme une contrainte exogène, sur laquelle il n’est possible d’agir qu’à la marge, au moyen d’une gestion « active » de la dette.

Techniquement, le montant de la charge de la dette de l’État résulte des opérations retracées sur le compte de commerce Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État (20). Sur sa première section sont imputées les opérations relevant du service primaire des intérêts de la dette, à savoir le versement des intérêts échus (en dépenses) et l’encaissement des coupons courus ou des revenus tirés de la rémunération de la trésorerie (en recettes). Cette section est équilibrée par un versement du budget général, égal au montant des crédits du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État (21). Conformément à l’article 113 de la loi de finances rectificative pour 2004, elle fait l’objet d’une autorisation de découvert évaluative, dont le montant est proposé pour 2013 à 17,5 milliards d’euros (article 49 et état E du présent projet) contre 19,2 milliards d’euros en 2012.

La seconde section du compte de commerce retrace les opérations de gestion active de la dette via des produits financiers dérivés – c’est-à-dire les produits et les charges des opérations, autorisées en loi de finances, d’échange de devises ou de taux d’intérêt (swaps), ainsi que d’achat ou de vente d’options ou de contrats à terme sur titres d’État. Dénuée d’impact sur le budget général, cette section fait l’objet d’une autorisation de découvert limitative, qui serait fixée l’année prochaine à 1,7 milliard d’euros, à l’instar des années précédentes.

Les orientations stratégiques du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État pour 2013 devraient théoriquement faire l’objet d’une présentation au début du projet annuel de performances (PAP) annexé au présent projet de loi de finances. En pratique, la « présentation stratégique » consiste en une série de développements descriptifs reconduits à l’identique chaque année, redondants avec la présentation du programme figurant quelques pages plus loin et, de surcroît, dépourvus de tout lien avec l’actualité de la gestion budgétaire.

Sous cette réserve, la performance du programme peut être appréciée au moyen de 12 indicateurs associés à 7 objectifs, qui appellent peu de commentaires spécifiques, dans la mesure où les prévisions pour 2013 reconduisent à l’identique les objectifs de l’année précédente. Le Rapporteur spécial estime néanmoins important de constater que :

– les cibles afférentes aux indicateurs Temps et Allocation, permettant de mesurer la pertinence des choix de mise en œuvre de la gestion de la dette obligataire, sont très larges, réitérées et réalisées chaque année. Elles posent donc la question de l’insuffisante ambition des objectifs fixés ;

– l’indicateur relatif à la stratégie d’optimisation du solde du compte de l’État à la Banque de France en fin de journée en fonction des conditions de marché montre une légère dégradation de la performance depuis 2010 : cible atteinte dans 91 % des cas en 2010, 90 % des cas en 2011 et seulement 80 % en prévision 2012. La cible pour 2013 est donc à juste titre relevée à 85 % ;

– comme le souligne lui-même le PAP, l’amélioration de la performance de l’Agence France Trésor pour placer les excédents ponctuels de trésorerie de l’État au meilleur prix (le taux EONIA) semble désormais limitée car les facteurs adverses sont croissants : la contribution de la gestion de la trésorerie à la maîtrise annuelle de la dette de l’État, par exemple via la hausse des dépôts des correspondants, se traduit par une volatilité accrue du profil infra-annuel. De plus, l’amplitude des mouvements de trésorerie croît de manière structurelle avec l’augmentation des amortissements de titres de dette, liée à l’accroissement de la taille du portefeuille, ainsi qu’avec l’augmentation nominale des recettes du seul fait de l’inflation ;

– s’agissant de l’objectif n° 6 consistant à améliorer l’information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor, le Rapporteur spécial observe avec satisfaction que la mise en œuvre du module dit de la « supervalidation » devrait améliorer les taux d’annonce : d’une part, les irrégularités seront mieux ciblées et les auteurs de celles-ci rappelés à leur obligation d’annonce ; d’autre part, le report systématique au jour suivant des opérations supérieures à un million d’euros non annoncées et dont l’exécution a été refusée par l’AFT constitue une forte incitation au respect de l’obligation d’annonce. Il se félicite également des bons résultats constatés depuis 2010 (taux d’annonce compris entre 95 et 97 %) qui conduisent le Gouvernement à proposer une cible plus ambitieuse à l’horizon de 2015 de 96 %.

– en outre, le Rapporteur spécial note le changement opéré en 2013 s’agissant de l’indicateur mesurant l’impact des swaps de taux d’intérêt sur la durée de vie moyenne de la dette : désormais, ce n’est plus la durée de vie moyenne de la dette négociable induite par un swap de taux d’intérêt qui est visée mais la réduction de la durée de vie moyenne de la dette induite par un swap de taux d’intérêt, mesurée en jours. Aucune cible n’est fixée pour 2013 puisque le programme de swaps est interrompu depuis septembre 2002 (22) faute de se trouver dans des conditions de marché favorables. Avec l'arrivée à échéance progressive des premiers swaps longs et en l’absence de reprise du programme, l'encours du portefeuille de swaps a donc régulièrement décru. Il est passé d’un maximum de 61 milliards d'euros en octobre 2005 à moins de 11,5 milliards d’euros au 31 août 2012. Cette stratégie a permis de réaliser un gain budgétaire de 329 millions d’euros en 2011.

À titre de récapitulation, le tableau présenté ci-après rend compte de l’ensemble des performances du programme Charge de la dette et trésorerie de l’État réalisées en 2012 et prévues pour 2013.

PERFORMANCE DU PROGRAMME CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L’ÉTAT

Objectif

Indicateur

Résultat 2012

Prévision 2013

1. Couvrir le programme d’émission en toute sécurité

Adjudications non couvertes

0

0

Taux de couverture moyen des adjudications

BTF : 200 %

BTF : 200 %

OAT et BTAN : 150 %

OAT et BTAN : 150 %

2. Améliorer la pertinence des choix de mise en œuvre de la gestion de la dette obligataire

Indicateur « temps »

+ 10 à – 10

+ 10 à – 10

Indicateur « allocation »

+ 10 à – 10

+ 10 à – 10

3. Piloter la durée de vie moyenne de la dette après swaps

Réduction de la durée de vie moyenne de la dette après swaps (jour)

5

4. Optimiser le solde du compte de l’État à la Banque de France en fin de journée en fonction des conditions de marché

Solde du compte de l’État à la Banque de France en fin de journée (pourcentage de journées où la cible est atteinte)

80 %

85 %

5. Placer les excédents ponctuels de trésorerie de l’État au meilleur prix

Rémunération des opérations de dépôts réalisées avec les SVT

EONIA

EONIA (a)

Rémunération des opérations de pensions livrées réalisées avec les SVT

swap EONIA 
– 0,02 %

swap EONIA
– 0,02 %

6. Améliorer l’information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor

Taux d’annonce par les collectivités locales de leurs opérations financières supérieures à un million d’euros et affectant le compte du Trésor

95 %

95 %

Taux d’annonce par les établissements publics de leurs opérations financières supérieures à un million d’euros et affectant le compte du Trésor

95 %

95 %

7. Obtenir un niveau de contrôle des risques de qualité constante et qui minimise la survenance d’incidents

Qualité du système de contrôle : incidents ou infractions au cahier interne de procédures

0

0

Qualité du système de contrôle : notation externe du contrôle interne

(composite)

(composite)

Nombre d’incidents d’exécution des opérations de dette et de trésorerie

Dégradant le niveau du compte BdF : 1

Dégradant le niveau du compte BdF : 0

Ne dégradant pas ou améliorant le niveau du compte BdF : 1

Ne dégradant pas ou améliorant le niveau du compte BdF : 0

Autres incidents : 19

Autres incidents : 0

(a) European overnight interbank average. Ce taux représente le taux moyen, pondéré par les volumes, des prêts à un jour réalisés sur le marché interbancaire par un panel d’établissements bancaires de la zone euro.

Enfin, et même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’un indicateur de performance, le Rapporteur spécial a noté l’intérêt des parlementaires s’agissant de la problématique de la diversification des détenteurs de la dette de l’État et entend faire valoir son point de vue.

Tout d’abord, la base d’investisseurs de dette française est très diversifiée du point de vue sectoriel. Elle est principalement constituée de banques centrales (gestion des réserves de change), puis d’établissements de crédits (environ 25 %), d’assureurs (environ 15 %), des fonds de pension, de gestionnaires d’actifs, etc.

Elle est également diversifiée d’un point de vue géographique. La direction de la balance des paiements de la Banque de France fournit les données concernant la détention de la dette française par les non-résidents qui montre que celle-ci a progressé sans discontinuer jusqu’en 2009 (68,4 %) puis a connu une légère décrue depuis pour atteindre 62,7 %.

PART DE LA DETTE FRANÇAISE DÉTENUE PAR DES NON-RÉSIDENTS DEPUIS 2003

(en pourcentage, en fin d’année)

 

BTF

BTAN

OAT

TOTAL DETTE NÉGOCIABLE

30/06/2012 (a)

66,1 %

87,6 %

55,4 %

62,7 %

31/12/2011

83,9 %

89,1 %

56,4 %

66,2 %

31/12/2010

83,6 %

88,2 %

58,8 %

67,7 %

31/12/2009

75.3 %

87,7 %

60,9 %

68,4 %

31/12/2008

68,2 %

85,8 %

58,6 %

65,1 %

31/12/2007

63,4 %

75,7 %

56,5 %

61,3 %

31/12/2006

68,7 %

71,1 %

54,2 %

59,0 %

31/12/2005

71,5 %

72,7 %

49,7 %

56,5 %

31/12/2004

64,4 %

71,8 %

45,1 %

52,7 %

31/12/2003

56,7 %

69,9 %

39,7 %

48,0 %

Source : Banque de France et AFT.

(a) au 30 juin 2012 selon les données transmises par le Gouvernement

Le sondage Coordinated Portfolio Investment Survey mené par le FMI donne également une indication partielle sur la part des résidents situés dans la zone euro dans les investissements de portefeuille dans les titres de dette (dette publique et dette bancaire étant mêlées). Selon ce sondage, à la fin de l’année 2010 il apparaît que 49,2 % des titres de dettes détenues par les non résidents le sont par des non-résidents situés à l’intérieur de la zone euro, soit un tiers du total de la dette française (23).

Le Rapporteur spécial estime néanmoins que le niveau de détention élevé de la dette française par des non-résidents ne doit pas être un sujet d’inquiétude : d’une part, une bonne partie de ces non-résidents (environ la moitié) sont nos voisins de la zone euro. D’autre part, c’est un signal de confiance de la part de la communauté des investisseurs sur la qualité de la signature et la solidité de l’économie française. Nos partenaires européens, au sein du groupe des pays les moins risqués, se trouvent d’ailleurs dans une situation comparable puisque, parmi les titres de dette nationale publique et privée détenus par des non résidents, la part provenant de l’extérieur de la zone euro s’élèverait fin 2010 à 55,4 % en Allemagne et 38,8 % aux Pays-Bas.

De plus, les investisseurs non résidents sont principalement des banques centrales, dont les décisions d’investissement sont structurellement plus stables que celles d’autres types investisseurs.

La demande des investisseurs non résidents a d’ailleurs été stable durant la période de tensions que le marché a connu au cours de la deuxième moitié de l’année 2011 alors que la demande des investisseurs institutionnels français (banques et assurances notamment) s’est réduite. Il apparaît au demeurant que plus la dette est détenue de manière diversifiée du point de vue géographique et par type de détenteur, meilleure est la résistance à des chocs affectant la demande de titres.

Enfin, le Rapporteur spécial ne peut que souligner que l’épargne française est fort heureusement orientée vers d’autres actifs qui permettent de financer le secteur privé, bénéficiant ainsi également à l’économie. Une orientation plus importante de l’épargne domestique vers le financement de la dette publique pourrait alors générer un effet d’éviction vis-à-vis du financement du secteur privé qui ne peut aujourd’hui se le permettre.

CHAPITRE II : LE PROGRAMME APPELS EN GARANTIE DE L’ÉTAT : UNE EXPOSITION ENCORE LIMITÉE

Le programme 114 Appels en garantie de l’État regroupe l’ensemble des dispositifs pour lesquels l’État a octroyé sa garantie dans le cadre d’accords bien définis au sens du compte général de l’État. Il ne reprend pas, en revanche, l’ensemble des engagements hors bilan de l’État, passifs éventuels qu’il n’est pas pertinent de totaliser (voir encadré) (24). Or, à l’occasion de la certification des comptes de l’État en 2011, la Cour des comptes avait étendu sa réserve substantielle sur les passifs d’intervention de l’État à ces engagements, en raison de problèmes récurrents d’exhaustivité du recensement, notamment des garanties apportées par l’État.

Entendu sur ce point par le Rapporteur spécial, le directeur général du Trésor, M. Ramon Fernandez, a déclaré : « Comme je m’y suis engagé en avril dernier auprès de la Cour des comptes, mes services ont élaboré un projet de guide de procédures et mettent en place en étroite liaison avec les autres administrations concernées un outil de recensement des garanties accordées par l’État. Cet outil, dénommé TIGRE (tableau d’inventaire des garanties recensées par l’État), doit aujourd’hui être complété avec les données utiles (encours au 31 décembre de l’année N…) par l’ensemble des acteurs internes à ma direction, mais aussi par l’ensemble des acteurs externes, c’est-à-dire par les autres départements ministériels. Le volet interne a fait l’objet d’une note de service formalisant la procédure pour collecter les informations utiles sur les garanties. En ce qui concerne le volet externe, des réunions de travail se tiennent avec nos collègues de la DGFIP, du CBCM Finances et de la DB. Ces travaux devraient conduire à l’envoi d’une lettre de saisine/circulaire à l’attention des autres ministères ». Le Rapporteur spécial ne peut, dès lors, que se réjouir que la recommandation de la Cour des comptes ait été suivie d’effet, l’État disposant désormais d’un tableau de bord de l’ensemble des garanties qu’il a accordé.

Le programme 114 présente les dépenses budgétaires 2013 qui découlent de la mise en jeu de cette garantie. Il est constitué de crédits évaluatifs qui contribuent à la mise en œuvre de politiques figurant dans des programmes de crédits limitatifs du ministère de l’économie et des finances (développement des entreprises, aide économique et financière au développement) ou d’autres ministères (équipement, transports, aménagement du territoire, tourisme et mer, culture, agriculture et pêche).

Avec la crise économique et financière de 2008 suivie de la crise des dettes souveraines en Europe, le programme se trouve au cœur du soutien financier en faveur des banques et du plan de sauvetage des États membres de la zone euro en difficulté puisque l’État a systématiquement accordé sa garantie.

LES ENGAGEMENTS « HORS BILAN » DE L’ÉTAT EN 2011

1. Les engagements pris « dans le cadre d’accords bien définis »

a) La dette garantie regroupe les engagements ayant reçu la garantie de l’État. Son encours au 31 décembre 2011 était de 124 milliards d’euros, après 138 milliards d’euros fin 2010.

b) Les garanties accordées par l’État à des organismes chargés pour son compte de missions d’intérêt général résultent principalement de l’engagement de l’État d’équilibrer le compte « État » ouvert à la Coface (83 milliards d’euros, en hausse de 4 milliards) et des procédures de couvertures de risques par Natixis (13 milliards d’euros, en hausse de 5 milliards d’euros). S’y ajoutent également les garanties de protection des épargnants (339 milliards d’euros contre 314 milliards d’euros en 2010), qui concerne principalement les dépôts effectués par les épargnants sur les livrets A, les livrets bleus, les livrets de développement durable et les livrets d’épargne populaire.

c) Les garanties de passif sont accordées notamment dans le cadre d’opérations de cession ou de restructurations d’entreprises (61 milliards d’euros).

d) Les engagements financiers de l’État comportent des engagements budgétaires (aides au logement pour 93 milliards d’euros, annulations de dettes de pays pauvres très endettés etc.), des engagements juridiques n’ayant pas encore donné lieu à service fait (93 milliards d’euros, dont 48 milliards d’euros sur la seule mission Défense), les contrats de projet État-région, les concessions de service public, les partenariats public-privé, les passifs sociaux etc.

e) Les autres engagements de l’État concernent par exemple les déficits reportables en avant en matière d’impôt sur les sociétés (47 milliards d’euros) et d’impôt sur le revenu (2 milliards d’euros) et les plus values de cession de titre de sociétés en sursis d’imposition (11 milliards d’euros).

2. Les engagements de l’État en matière de retraites

Les engagements au titre des retraites des fonctionnaires et agents publics relevant de régimes spéciaux peuvent être approchés de deux façons :

– en calculant la valeur actuelle des pensions des retraités et des droits à retraite des agents en activité, sur la base de la législation en vigueur (ce qui revient à déterminer ce que l’État aurait dû débourser au 31 décembre 2011 pour honorer l’intégralité de son engagement). À cette aune, les engagements sont évalués à 1 192 milliards d’euros, soit environ 60 % du PIB. Ce montant, correspondant à un taux d’actualisation de 1,62 %, est un ordre de grandeur pouvant évoluer en fonction des changements de comportements induits par la réforme des retraites du 21 août 2003 complétée par la loi du 10 novembre 2010 ;

– en calculant la valeur actuelle des besoins de financement futurs, c’est-à-dire la somme actualisée des déficits annuels des régimes de retraite (ce qui représente l’accumulation des surcoûts annuels par rapport à ce que l’État finance aujourd’hui). À la différence de la méthode précédente, le système est « ouvert » : il prend en compte les actifs recrutés après la date d’évaluation et dont les cotisations limitent le besoin de financement. De ce point de vue, avec un taux d’actualisation de 1,62 %, les engagements sont évalués à 505 milliards d’euros (soit environ 25 % du PIB) pour la fonction publique d’État et à 195 milliards d’euros pour les régimes spéciaux de retraite.

Source : Rapport n° 75 de M. Christian Eckert, Rapporteur général de la commission des Finances, sur le projet de loi de règlement pour 2011.

Le présent projet de loi de finances propose d’ouvrir 207,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour 2013, soit 17,3 millions d’euros de plus que le montant prévu en 2012 (189,4 millions d’euros).

A.– DES DÉPENSES EN HAUSSE DE PRÈS DE 10 % EN 2013

Le tableau ci-après présente les crédits et les dépenses correspondant à l’ensemble des garanties couvertes par le programme.

CRÉDITS ET DÉPENSES DES PROCÉDURES DE GARANTIE DU PROGRAMME

(AE=CP, en millions d’euros)

Actions

Agriculture et environnement

Soutien au domaine social, logement, santé

Financement des entreprises et industrie

Développement international de l’économie française

Autres garanties

Total

2008

Crédits initiaux

2,5

24

16

52

192,8

287,7

Dépenses

22,1

37,7

174,0

234,0

2009

Crédits initiaux

1,1

25

16

68

168,5

278,8

Dépenses

22,2

15,9

77,5

82,8

120,9

2010

Crédits initiaux

1,1

26

86,1

134,4

247,8

Dépenses

25,3

2,8

82,5

0,472

111,0

2011

Crédits initiaux

1,1

28,8

10

122,5

74,9

227,3

Dépenses 

27,3

10

99,6

461,7

546,9

2012

Crédits initiaux

1,1

6,9

10

130,5

40,9

189,4

Dépenses(a)

2,8

10

120

0,14

2,94

2013

Crédits initiaux

1,5

7,2

10

137,6

51,6

207,9

Dépenses

(a) Evaluation au 30 octobre 2012.

1.– L’action Agriculture et environnement

Ces dépenses représentent 0,7 % du programme et concernent principalement trois sous-actions : le désendettement des exploitants agricoles installés en Corse, les emprunts destinés à financer des compléments de primes à l’arrachage des vignes et les emprunts destinés à soutenir la filière bois suite à la tempête Klaus.

Contrairement aux années précédentes les crédits nécessaires pour 2013 sont de 1,5 million d’euros, le montant était fixé à 1,1 million d’euros depuis la loi de finances initiale de 2009, pour un encours au 1er janvier 2012 à 181,1 millions d’euros, contre 14 millions d’euros en 2011 (stabilisé les années précédentes à 11,5 millions d’euros).

L’évolution constatée entre 2011 et 2012 résulte du rattachement à l’action agriculture et environnement de la garantie de l’État accordée aux prêts destinés aux opérateurs de la filière bois à la suite de la tempête Klaus. Ainsi, 180,7 millions d’euros de prêts ont été garantis pour un encours du capital restant dû au 31 décembre 2011 de 152,2 millions d’euros ;

2.– L’action Soutien au domaine social, logement, santé

Représentant 3,5 % du coût du programme, les dépenses les plus significatives sur cette action concernent les Prêts à l’accession sociale (PAS) et les prêts à taux zéro (PTZ) (97,2%) ; les prévisions d’exécution de cette action pour 2013 s’élèvent à 7 millions d’euros, elles concernent en 2012 un encours de 38,9 milliards d’euros contre 36,6 milliards d’euros en 2011.

Viennent ensuite deux dispositifs, chacun évalué à 100 000 euros de dépenses pour l’année 2013 ; les prêts complémentaires aux fonctionnaires, garantie donnée par l’État au Crédit Foncier de France et au Comptoir des entrepreneurs (devenu Entenial) pour pallier la défaillance des emprunteurs bénéficiaires, et les prêts accordés aux rapatriés et garantis par l’État dans le cadre de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987, dispositif aujourd’hui en extinction.

Les dépenses totales sur l’action Soutien au domaine social, logement, santé atteindraient donc 7,2 millions d’euros en 2013, après 6,9 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2012.

3.– L’action Financement des entreprises et industrie

Comme l’année précédente, le projet annuel de performance pour 2013 prévoit une dépense de 10 millions d’euros pour l’action Financement des entreprises et de l’industrie (soit 4,8 % des dépenses du programme), malgré une diminution de l’encours d’environ de 30 %, celui-ci passant de 15,9 millions d’euros en 2011 à 11,3 millions d’euros au titre de l’année 2012.

Cette action concerne principalement cinq sous-actions :

1) Les garanties accordées dans le cadre du plan de soutien aux banques à l’automne 2008 : ce plan reposait essentiellement sur des garanties de l’État accordées à Dexia, à un instrument de prise de participations, la Société de prise de participation de l’État (SPPE), et à un instrument de refinancement de créances bancaires, la Société de financement de l’économie française (SFEF).

Les prêts en instruments de fonds propres de la SPPE (19,75 milliards d’euros) ont été intégralement remboursés depuis le 23 mars 2011. Le remboursement des encours garantis au titre de la SFEF (77 milliards d’euros), qui ont fait l’objet d’une rémunération ab initio, se poursuit : l’encours en principal au 19 septembre 2012 est de 24 milliards d’euros et le remboursement s’achèvera en 2014. Un appel en garantie sur une émission de la SFEF est considéré comme très fortement improbable.

S’agissant du cas particulier de Dexia, la France a accordé conjointement avec la Belgique et le Luxembourg plusieurs garanties de refinancement au groupe avec la clé de répartition suivantes : 36,5 % pour la France, 60,5 % pour la Belgique et 3 % pour le Luxembourg :

 une première garantie sur les financements émis avant le 30 juin 2010 pour une échéance maximale de 4 ans, autorisée par la Commission européenne, a été accordée le 9 décembre 2008 et prolongée le 14 octobre 2009. Dexia ne peut plus émettre sous ce régime de garantie, pour lequel les derniers titres arrivent à échéance en 2014 ;

 dans le cadre du plan de résolution ordonné décidé par les États fin 2011 (mise en extinction des activités), une nouvelle garantie de refinancement a été accordée au groupe. Son plafond serait de 90 milliards d’euros mais, dans l’attente de la validation par la Commission européenne du plan de résolution et de la mise en place de la garantie définitive, les trois États ont obtenu l’autorisation de la Commission européenne d’accorder une garantie temporaire de refinancement de 45 milliards d’euros le 16 décembre 2011. Son plafond a été augmenté à 55 milliards d’euros le 5 juin dernier. Elle a été prolongée jusqu’à fin janvier 2013.

Par ailleurs, une garantie avait été accordée en 2008 sur le portefeuille de produits financiers (16,5 milliards d’euros) conservé par Dexia après la cession de la société Financial Security Assurance (FSA). Ce portefeuille a été liquidé en 2011 et cette garantie est aujourd’hui éteinte. Enfin, dans le cadre de la cession de Dexia Municipal Agency (DMA), il est prévu que l’État français accorde à Dexia une garantie relative à certains crédits structurés considérés comme sensibles. Elle vise à compenser les engagements pris par Dexia vis-à-vis des acquéreurs de DMA afin d’immuniser ceux-ci contre les risques liés à ces actifs. Cette garantie n’est à ce jour pas active.

Fin 2012, l’exposition de la France dans le cadre du « sauvetage » de Dexia sera de 25 milliards d’euros. Ces garanties de refinancement sont néanmoins comptabilisées hors du bilan de l’État compte tenu de leur faible probabilité d’appel. Il n’est pas attendu que les garanties qui ont été accordées jusqu’à présent au groupe soient appelées, dans la mesure où l’objet même de l’intervention des trois États garants en 2008 Dexia était d’éviter toute défaillance de Dexia sur ses obligations vis-à-vis de ses créanciers, compte tenu du risque systémique que cela représenterait non seulement pour le secteur financier européen mais également pour les États, à commencer par la Belgique.

À l’inverse, l’opération de garantie a conduit Dexia à verser à l’État une rémunération à hauteur de 0,8 milliard d’euros à ce jour. Sur la période 2013-2015, les rémunérations prévues au titre des garanties Dexia, estimées sur la base de prévisions d’encours et de commissions de 90 points de base pour la garantie de 2008 et de 5 points de base pour la garantie de 2011 (ce taux doit encore faire l’objet d’un accord entre les États et de l’autorisation de la Commission européenne au titre des aides d’État), se répartissent ainsi : pour la garantie octroyée en 2008 : 45 millions d’euros en 2013 et 15 millions d’euros en 2014 ; et pour la garantie octroyée en 2011 : 20,95 millions d’euros en 2013, 12,6 millions d’euros en 2014 et 10,95 millions d’euros en 2015.

2) Les garanties des prêts accordés aux entreprises signataires d’un contrat de partenariat ;

3) La garantie des risques d’assurance-crédit situés en France ;

4) Les garanties d’emprunts émis ou contractés par les établissements et entreprises qui contribuent à la réalisation du Plan de modernisation et d’équipement ;

5) La garantie des prêts consentis par la Banque européenne d’investissement à une entreprise, un établissement public ou une collectivité, pour des projets à réaliser sur le territoire français.

4.– L’action Développement international de l’économie française

Regroupant 66,2 % du montant total des crédits et avec une dotation globale de 137,6 millions d’euros en 2013 contre 130,5 millions d’euros en 2012, c’est la principale action du programme. Elle regroupe les crédits consacrés aux garanties à l’exportation. Elle se compose de six sous-actions, chacune correspondant à un instrument mis à la disposition des exportateurs par l’État. À l’exception de la garantie de taux d’intérêt qui relève directement de Natixis, l’ensemble de ces procédures de garantie est géré par la Coface(25). Cette dernière exerce en effet à la fois des activités pour son compte propre (assurance-crédit, information commerciale, recouvrement de créances) et des activités pour le compte de l’État.

Le tableau ci-après présente les crédits consacrés à l’action Développement international de l’économie française de 2011 à 2013.

CRÉDITS DE L’ACTION DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE

(en millions d’euros)

 

2011

LFI
2012

PLF
2013

 

LFI

Exécution

Assurance-crédit

Assurance prospection

95,3

92,1

107,2

99

Risque de change

2

5,8

2

4

Risque économique

5,6

1,3

7

4,6

Stabilisation de taux d’intérêt

Risque exportateur

19,6

0,4

14,3

30

Total action

120,5

99,6

130,5

137,6

Source : ministère du Budget.

● L’assurance-crédit couvre un exportateur (assurance-crédit fournisseur) ou sa banque (assurance-crédit acheteur) contre le risque de défaut de remboursement d’un crédit à l’exportation.

Fin 2011, l’encours couvert par ce dispositif s’établissait à 64,2 milliards d’euros contre 59,5 milliards d’euros fin 2010. Toutefois, depuis 1995, l’assurance-crédit présente un solde excédentaire et ne suscite donc plus de dépense budgétaire car les produits perçus par la Coface continuent de dépasser les indemnités versées, à tel point que les excédents dégagés par la Coface permettaient à l’État de la mettre à contribution pour abonder ses propres recettes. Ainsi, 2,9 milliards d’euros ont été prélevés en 2007, puis 2,5 milliards d’euros en 2008, afin d’abonder les recettes non fiscales du budget général. Du fait de la diminution du résultat de l’assurance-crédit, le prélèvement de l’État sur la trésorerie de la Coface n’a cessé cependant de diminuer : un milliard d’euros en 2009, 850 millions d’euros en 2010 et seulement 450 millions d’euros en 2011. En 2012, il n’a été opéré qu’un prélèvement de 300 millions d’euros sur la Coface afin de préserver un niveau de trésorerie du compte de l’État permettant de faire face à une forte augmentation de la sinistralité. Pour 2013, ce prélèvement est relevé à 400 millions d’euros.

● Gérée elle aussi par la Coface, l’assurance prospection permet de couvrir les entreprises contre le risque d’échec des prospections à l’étranger. Le produit actuel, redéfini en 2001, a été réformé en 2009 et 2012 afin d’améliorer l’accompagnement des entreprises françaises à l’exportation, dans un contexte économique tendu avec notamment des délais d’instruction réduits et des accords de distribution entre la Coface et les banques, Ubifrance et Oseo. Cette procédure s’adresse aux entreprises implantées en France, ayant un chiffre d’affaires inférieur à 500 millions d’euros et dont les prestations sont majoritairement d’origine française.

Cette sous-action est la plus importante du programme Appels en garantie de l’État en volume de crédits. Le présent projet prévoit en effet une dépense de 99 millions d’euros contre 107,2 millions d’euros en 2012, soit une baisse de 7,5 % après une hausse de 11 % par rapport à 2011 (26).

● La garantie de change offre une protection contre la baisse éventuelle des devises de facturation des exportations. Elle permet de couvrir le risque de change auquel les exportateurs français font face lors d’appels d’offres internationaux concurrentiels (entre la remise d’une offre et la signature éventuelle du contrat, puis pendant la période de paiement). Cette procédure fonctionne selon un impératif de gestion à l’équilibre et généralement sans coût budgétaire pour l’État. Les crédits demandés pour 2013 s’élèvent néanmoins à 4 millions d’euros contre 2 millions d’euros en 2012 afin de couvrir les coûts de gestion de cette procédure qui entraînent parfois un déficit.

● La garantie du risque économique a pour objet de couvrir les entreprises contre la dérive de leurs prix de revient dans les marchés d’exportation conclus à prix fermes ou à prix révisables plafonnés et relatifs à la fourniture d’équipements élaborés. Du fait de la modération de l’inflation et, partant, de l’absence de nouveaux bénéficiaires, l’encours garanti diminue sans discontinuer depuis plusieurs années car aucun nouvel encours n’a été ouvert depuis 2004. La dotation prévue pour 2013 est d’ailleurs de 4,6 millions d’euros contre 7 millions d’euros en 2012.

● La garantie de taux d’intérêt de crédits à l’exportation constitue l’une des missions assurées par Natixis pour le compte de l’État (27). Elle permet de proposer à un emprunteur étranger, au moment de l’offre d’un contrat commercial, un taux fixe défini par les autorités françaises selon les règles de l’« arrangement OCDE » (28) sur les crédits à l’exportation. Natixis prend en charge – ou reçoit – le différentiel entre le taux du crédit et le coût de la ressource bancaire, majoré d’une marge définie par l’État. En outre, Natixis peut procéder à la mise en place d’opérations de couverture du risque de taux, afin de constituer un portefeuille de swaps « payeurs » annulant le risque supporté par l’État qui est engagé dans des flux opposés. À l’instar de ces dernières années, aucun crédit n’est prévu à ce titre pour 2013, du fait de prévisions excédentaires offertes par les couvertures mises en place sur les marchés financiers.

● La garantie du risque exportateur, regroupe deux garanties créées en 2005 et 2006 : la garantie des cautions, qui permet à un exportateur d’honorer un contrat à l’international en lui fournissant les cautions de bonne fin et de restitution d’acomptes exigées par l’acheteur et la garantie des préfinancements, qui couvre un prêt consenti par une banque pour financer le lancement d’un contrat d’exportation.

La dépense budgétaire prévue pour cette action a doublé par rapport à 2012, passant de 14,3 millions d’euros à 30 millions d’euros en 2013 du fait de la montée en puissance de la réforme de la procédure à l’automne 2008 (suppression des seuils quantitatifs ; relèvement des quotités garanties ; relèvement du niveau de chiffres d’affaires en deçà duquel les entreprises bénéficient d’une quotité garantie majorée) et de la situation critique de certaines entreprises dont la probabilité de défaut est élevée, et, si elle se réalisait, entraînerait le versement d’indemnités par la Coface.

À titre de synthèse, le tableau ci-après présente les encours garantis par les procédures de garanties précédemment décrites (hors risque exportateur).

ENCOURS GARANTIS PAR LES PROCÉDURES COFACE

(en millions d’euros)

Sous-actions

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

1. Assurance-crédit

51 540

50 357

42 956

42 111

42 401

52 918

59 459

64 170

dont moyen terme

49 482

48 702

42 475

41 774

42 134

52 683

59 159

63 872

dont court terme

2 058

1 655

482

337

267

235

300

298

2. Assurance prospection

107

106

110

123

148

201

220

225

3. Garantie de change

2 360

1 930

1 900

2 050

1 780

1 300

1 400

1 410

4. Garantie du risque économique 

59,0

41,4

27,8

24,75

17,165

12,108

6,83

4,6

5. Stabilisation de taux d’intérêt

               

Euro

3 200

3 036

2 689

2 348

2 352

2 668

3 206

4 554

Dollar (en M$US)

7 800

5 350

5 395

4 529

4 141

3 764

3 661

3 797

6. Garantie du risque exportateur

   

246

426

1 188

2 130

1 944

2 004

Source : ministère de l’Économie.

Ce tableau permet de constater un regain des encours couverts par les procédures d’aide à l’exportation gérées par la Coface depuis 2009 à la suite de la crise économique et financière, en particulier ceux couverts par le dispositif d’assurance-crédit.

5.– L’action Autres garanties

Alors que cette action constituait la principale dépense du programme Appels en garantie de l’État depuis 2008, elle ne mobiliserait plus que 24,8 % des crédits du programme en 2013, soit 51,6 millions d’euros (après 40,9 millions d’euros en 2012, 74,9 millions d’euros en 2011, 134,4 millions d’euros en 2010 et 184,5 millions d’euros en 2009).

Ces garanties sont accordées afin de favoriser l’octroi de prêts sur fonds propres des établissements concernés – en particulier l’Agence française de développement (AFD) – ou pour faire face à un risque de retrait des États bénéficiaires du mécanisme de refinancement par dons découlant du volet bilatéral de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE).

Il s’agit principalement :

– des prêts accordés par l’AFD aux pays de l’Afrique subsaharienne et aux pays éligibles à l’initiative PPTE ;

– des prêts accordés par l’AFD au titre de l’initiative PPTE et devant faire l’objet, dans le cadre du volet bilatéral complémentaire à cette initiative, d’un refinancement par dons (contrats de désendettement et de développement dits « C2D ») ;

– des prêts accordés par la Banque européenne d’investissement (BEI) aux États d’Afrique, des Caraïbes, du Pacifique et aux collectivités d’outre-mer dans le cadre de la mise en œuvre des conventions de Lomé et des accords de Cotonou. En 2011, la France a été appelée en garantie pour un montant total de 0,26 million d’euros en raison d’un défaut de paiement d’un projet au Zimbabwé. Au 22 septembre 2012, ce même projet a donné lieu à deux appels en garantie pour un total de 0,284 million d’euros tandis que la prévision d’exécution pour cette action s’élève à 1 million d’euros. Pour 2013, une dotation de 2,8 millions d’euros est prévue pour couvrir les appels en garantie au titre de sinistres sur des prêts.

On retrouve enfin le prêt consenti par la Banque de France au compte « Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance et facilité et protection contre les chocs exogènes du Fonds monétaire international » (dans la limite de 1,4 MdDTS).

Les mises en jeu de la garantie de l’État ne sont pas comptabilisées dans l’aide publique au développement (APD) au sens de l’OCDE. Toutefois, l’action Autres garanties retrace également les dépenses liées à l’indemnisation de Natixis en cas d’annulation par le Club de Paris de certaines créances garanties par l’État (29) : de telles annulations sont comptabilisées dans les statistiques d’aide publique au développement et pourraient atteindre 382,4 millions d’euros en 2012, soit un montant sensiblement inférieur aux 437,65 millions d’euros constatés en 2011.

MONTANT DES CRÉANCES GARANTIES ANNULÉES CHAQUE ANNÉE PAR LA COFACE

(en millions d’euros)

 

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012 (prévision)

Principal

328,64

514,43

1794,82

1281,95

626,63

436,18

71,75

279,01

177,79

316,21

Intérêts

812,85

268,13

126,36

879,92

378,12

195,40

174,09

99,56

259,86

66,21

Total

1141,49

782,56

1921,18

2161,87

1004,75

631,58

245,84

378,58

437,65

382,42

Source : ministère de l’Économie

Pour 2013, les dépenses de cette action se répartiraient en deux catégories. D’une part, 2,8 millions d’euros de crédits seraient nécessaires au titre des sinistres sur prêts de la BEI, compte tenu notamment de la situation de certains pays quant au risque induit de défaut de paiement. D’autre part, une provision de 48,8 millions d’euros est constituée pour faire face à des appels en garantie « non connus à ce stade » (après une provision de 37,9 millions d’euros en 2012 et 65,3 millions d’euros en 2011) : l’essentiel des crédits de cette action concerne les garanties de l’État en faveur de dispositifs d’aide économique et financière au développement (30).

Selon les informations transmises au Rapporteur spécial, le principal élément de la dépense à ce titre en 2013 est le passage en Club de Paris à court terme du Soudan pour 42 millions d’euros d’intérêts.

B.– UN DISPOSITIF DE PERFORMANCE DIFFICILE À INSTAURER

Seule l’action 4 Développement international de l’économie française est dotée d’un dispositif de performance dans ce programme. Plusieurs facteurs permettent de comprendre cette situation :

– les objectifs de performance doivent être maîtrisables par le responsable de programme sur le plan budgétaire et dans la durée. Or, certaines garanties peuvent être le corollaire d’engagements internationaux ou avoir été directement créées par le législateur. En outre, les garanties accordées présentent la particularité d’être irrévocablement acquises au profit de leurs bénéficiaires et la dépense budgétaire est automatique sitôt la garantie appelée ;

– les garanties sont des instruments au service de politiques sectorielles extrêmement variées et pour la plupart dépendent d’autorités administratives différentes du responsable de ce programme. La performance d’une garantie doit donc être évaluée à la lumière de la politique sectorielle qui la sous-tend.

– l’efficacité des garanties ne peut enfin être appréciée que sur une durée limitée, dans tous les cas inférieure à la durée de la garantie, qui est généralement longue. Les objectifs d’efficacité socio-économique de ce programme se rapportent donc aux dispositifs toujours actifs et aux garanties nouvellement octroyées.

Par conséquent, l’objectif du responsable de programme est de définir les conditions de la garantie propres à maximiser son effet de levier tout en limitant le risque financier encouru par l’État. En effet, les garanties accordées par l’État sont des engagements hors bilan qui exposent l’État à un risque financier à un terme plus ou moins éloigné. Le niveau d’exposition de l’État doit ainsi rester cantonné dans des limites raisonnables qui dépendent de l’analyse des risques et des bénéfices propres à chaque dispositif. Certains dispositifs présentant des enjeux des plus significatifs pour les finances publiques sont d’ailleurs sécurisés par des mécanismes prudentiels.

Du fait des contraintes fortes qui pèsent sur le responsable de programme, il ne peut ainsi être défini un indicateur synthétique de performance des garanties de l’État permettant d’apprécier à la fois l’effet de levier des garanties et le risque encouru par l’État. Les objectifs et indicateurs du programme 114 portent donc sur l’action 4 Développement international de l’économie française, sur laquelle la direction générale du Trésor est en mesure d’exercer une action directe et continue. Or, l’examen des différents indicateurs montre que les résultats sont satisfaisants depuis 2011 et que les cibles n’ont pas été modifiées pour 2013.

CHAPITRE III : LE PROGRAMME ÉPARGNE

Le programme Épargne mérite de retenir l’attention à un double titre : à l’exception de l’année 2012, ses crédits sont régulièrement sous-évalués. Ils s’élèvent à 724,7 millions d’euros pour 2013 contre 773,7 millions d’euros en 2012 ; les dépenses fiscales qui y sont rattachées, six fois plus importantes que les crédits (plus de 4,2 milliards d’euros en 2013), représentent plus de 6,8 % de l’ensemble des dépenses fiscales du budget de l’État en 2013.

A.– LES DÉPENSES FISCALES : UNE RÉFORME À VENIR

1.– Quatre objectifs principaux

Afin d’offrir une vision plus claire des dispositifs rattachés au programme, le Rapporteur spécial procède ci-après à la ventilation de la dépense fiscale en fonction des principaux objectifs affichés.

● Orienter l’épargne vers des produits de moyen-long terme

L’un des objectifs du programme Épargne est de stimuler le développement de l’épargne individuelle à long terme, afin de contribuer au financement des entreprises.

Pour 2013, l’exonération ou l’imposition réduite des produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d’assurance-vie, constitue la deuxième dépense fiscale du programme et est évaluée à 1,2 milliard d’euros. C’est désormais la seule dépense fiscale destinée à orienter l’épargne vers des produits de moyen ou de long terme.

L’indicateur n° 3.1 montre que la part de l’assurance-vie dans l’épargne financière des Français s’élevait à 39,4 % en 2010 et 38,6 % en 2011. Elle devrait légèrement progresser pour atteindre 39 % en 2012 et 2013 bien que la cible soit fixée à 40 % prévus. Cette situation s’explique notamment par une collecte nette d’assurance-vie négative depuis septembre 2011, du fait d’une accélération marquée des rachats. La collecte brute en assurance-vie est d’ailleurs passée de 50 milliards d’euros en 2010 à moins de 10 milliards d’euros en 2011.

L’indicateur n° 3.2 donne des informations sur la destination des fonds collectés par les compagnies d’assurance dans le cadre des contrats d’assurance-vie. Pour les années 2011 et 2012, 55 % des fonds collectés ont été utilisés conformément à l’objectif indiqué, c’est-à-dire la détention d’actions, d’obligations ou d’immeubles des entreprises. La cible pour 2013 est la même.

● Orienter la dépense fiscale vers l’investissement des salariés dans le capital de leur entreprise

Le tableau ci-après reproduit les trois dépenses fiscales principales destinées à orienter l’épargne des salariés vers le capital de leur entreprise. Il n’existe aucun indicateur de performance assigné à cet objectif.

COÛT DES PRINCIPALES DÉPENSES FISCALES DESTINÉES
À ORIENTER L’ÉPARGNE DES SALARIÉS VERS LE CAPITAL DE LEUR ENTREPRISE

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

120108 Exonération des sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement et de l’abondement aux plans d’épargne salariale

1 000

1 400

1 120

1 440

1 440

140109 Exonération des revenus provenant de l’épargne salariale (participation et plan d’épargne salariale)

300

300

300

nc

nc

150701 Exonération des gains réalisés lors des cessions à titre onéreux de titres acquis dans le cadre des dispositifs d’épargne salariale (participation aux résultats de l’entreprise, plan d’épargne entreprise, actionnariat salarié régi par la loi du 27 décembre 1973)

250

200

200

200

nc

140120 Exonération des produits achetés à certains contrats d’assurance investis en actions

10

10

10

10

10

Total

1 560

1 560

1 630

>1 650

> 1 450

Source : PAP 2013.

● Favoriser l’épargne afin de financer des missions d’intérêt général, notamment d’investissement dans l’immobilier social

Une partie des produits de l’épargne réglementée (livrets A, bleus, d’épargne populaire et de développement durable) est centralisée au Fonds d’épargne géré par la Caisse des dépôts et consignations. Ces dépôts sont mobilisés notamment pour permettre aux organismes sociaux d’avoir accès à des moyens de financement attractifs, afin de favoriser le logement social.

La dépense fiscale dans ce domaine a fortement augmenté entre 2008 et 2009, avec un accroissement en valeur de 30 millions d’euros. En revanche, cette dépense a connu une forte baisse en 2010 (– 34 %) et en 2011 (– 16 %).

Grâce à l’intervention du nouveau Gouvernement pour déplafonner le montant des dépôts sur les livrets développement durable et sur les livrets A (31), l’année 2012 se caractériserait par un redémarrage à la hausse de ces dépenses de près de 60 % (soit + 170 millions d’euros), principalement du fait d’un attrait supplémentaire des épargnants en faveur des livrets A (+ 110 millions d’euros) et livrets de développement durable (+ 30 millions d’euros).

Ce mouvement à la hausse se poursuivrait en 2013, l’ensemble des dépenses fiscales étant censé progresser de 40 % en un an pour atteindre 640 millions d’euros.

PRINCIPALES DÉPENSES FISCALES DESTINÉES À FINANCER DES MISSIONS D’INTÉRÊT GÉNÉRAL, NOTAMMENT D’INVESTISSEMENT DANS L’IMMOBILIER SOCIAL

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

140102 Exonération des intérêts des Livrets A

250

280

190

160

270

410

140105 Exonération des intérêts des Livrets d’épargne populaire

100

60

50

40

60

60

140104 Exonération des intérêts des Livrets de développement durable

130

130

80

70

100

130

140103 Exonération partielle des intérêts des Livrets bleus

10

50

25

20

30

40

Total

490

520

345

290

460

640

Source : PAP 2010 à 2013.

Le relèvement du plafond du livret A et du livret de développement durable correspond à l'engagement du Président de la République de contribuer au financement de la construction de 150 000 logements sociaux par an durant le quinquennat, dont 30 000 logements très sociaux, et au financement des entreprises, particulièrement des PME.

Sur le plan de la performance, il convient de relever qu’après s’être stabilisé autour 65,4 % en 2010 et 2011, le pourcentage des ressources centralisées au Fonds d’épargne employées au financement du logement social (indicateur n° 1.1) a baissé à 62,2 % en 2012 contre une prévision de 67,3 %, selon PAP 2012. La baisse de ce sous-indicateur entre 2011 et 2012 s’expliquerait par une collecte sur les livrets A et LDD centralisés au fonds d’épargne plus rapide que l’accroissement de l’encours des prêts au logement social et à la politique de la ville. Il s’ensuit que, selon le projet annuel de performances pour 2013, et compte tenu des réformes engagées par le nouveau Gouvernement, le pourcentage des ressources centralisées au fonds d’épargne employées au financement du logement social devrait progresser pour atteindre 63,2 % en 2013 puis la cible de 65 % en 2015.

La part de l’encours total de prêts sur fonds d’épargne qui est effectivement consacrée au financement du logement social et de la politique de la ville (2ème sous-indicateur) serait en revanche en progression en 2010 : après 89,8 % en 2010, 88,8 % en 2011 elle devrait représenter 90 % de l’encours en 2012.

● Favoriser l’épargne des contribuables modestes

En dehors des livrets d’épargne populaire, un autre dispositif existe depuis 1992 en vue de favoriser l’épargne des contribuables les plus modestes. Il s’agit des plans épargne populaire. En 2013, il est prévu que cette dépense fiscale soit quasiment doublée, passant de 180 millions d’euros à 330 millions d’euros.

2.– Un dispositif défaillant

Le montant des dépenses fiscales rattaché au programme Épargne augmente de 14 % par rapport à la prévision d’exécution pour 2012 passant d’au moins 4,3 milliards d’euros à 4,8 milliards d’euros.

COÛT TOTAL DES DÉPENSES FISCALES RATTACHÉES AU PROGRAMME ÉPARGNE

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Ensemble des dépenses fiscales rattachées au programme

5 616

6 024

6 014

3 963

4 263

4 863

Source : PAP 2010, 2011, 2012 et 2013.

Sur les 28 dispositifs fiscaux mentionnés dans le PAP 2013, 11 sont indiqués comme étant « non chiffrables », 4 ne sont pas pris en compte car ils représentent une dépense fiscale inférieure à 0,5 million d’euros et seuls 13 font à l’heure actuelle l’objet d’un chiffrage estimé à partir du produit d’une base taxable et d’un taux marginal d’imposition. En l’absence de données déclaratives, l’administration est en effet contrainte de caractériser les bénéficiaires des exonérations afin d’effectuer des recoupements avec les données figurant sur leurs déclarations fiscales. Cette méthode ne semble pas marquée du sceau de la précision.

En mars 2010, l’Inspection générale des finances a évalué les principales niches fiscales du programme (32) : assurance-vie, épargne salariale, épargne retraite, épargne sur livret, et épargne en actions. Elle a conclu à une juxtaposition de très nombreux dispositifs ne permettant pas d’identifier une réelle stratégie fiscale d’ensemble en matière d’épargne financière, et à l’origine d’incohérence et d’un manque de lisibilité pour les épargnants. Elle a en particulier dénoncé la méthode de chiffrage retenue dans les PAP et considéré que les dépenses fiscales du programme sont en réalité probablement deux à trois fois moins élevés qu’annoncé. Or, la méthode de chiffrage retenue dans le PAP 2013 n’a pas évolué et présente les mêmes errements sans qu’aucune explication ne soit fournie. Enfin, l’IGF a dénoncé l’insuffisance du rapport coût / efficacité d’un certain nombre de ces dispositifs.

Cette analyse a été confirmée par les travaux de la Cour des comptes en 2012, sur le financement de l’économie (33) et sur l’assurance vie  (34), qui ont mis en valeur les problèmes soulevés par l’évolution de la fiscalité de l’épargne financière et la nécessité de favoriser une meilleure allocation de l’épargne financière vers le financement de l’économie en développant l’épargne longue. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, a confié à votre Rapporteur spécial ainsi qu’à notre collègue Mme Karine Berger, une mission sur la réforme de l’épargne financière le 9 octobre dernier.

Dans ces conditions, le présent rapport se bornera à présenter les objectifs principaux des dépenses fiscales du programme sans empiéter sur les futures propositions formulées à l’issue de cette mission pour offrir une plus grande lisibilité aux épargnants et des financements plus longs aux entreprises.

B.– DES DÉPENSES BUDGÉTAIRES EN BAISSE DE 9,7 % EN 2013 APRÈS LE RESSAUT DES PRIMES D’ÉPARGNE LOGEMENT EN 2012

Le programme Épargne comprend deux actions : Épargne logement et Instruments de financement du logement. Cette dernière est essentiellement consacrée à des dispositifs en voie d’extinction (35) et ne représente que 0,5 % du budget du programme (soit 3,5 millions d’euros en 2013 contre 4,9 millions d’euros en 2012).

Le Rapporteur spécial entend donc concentrer son analyse sur l’évolution des dépenses budgétaires de l’action Épargne logement qui s’élèvent à 722 millions d’euros en 2013 après 773,7 millions d’euros en 2012. Celles-ci visent à faciliter l’accession à la propriété à travers deux outils : les plans épargne logement (PEL) et, plus accessoirement, les comptes épargne logement (CEL). Ces dispositifs ont un double objectif : ouvrir droit à un prêt, tout en permettant préalablement au bénéficiaire de se constituer un apport personnel.

En pratique, l’État accorde une prime d’épargne aux titulaires des PEL et de CEL d’un montant maximal de 1 525 euros dans les cas suivants : la clôture des PEL et la souscription d'un prêt d’épargne-logement pour les PEL ouverts à compter du 12 décembre 2002 ; la simple clôture du PEL pour les PEL ouverts avant cette date ; et l’utilisation, par les détenteurs d’un CEL, de leurs droits à prêt lors de la souscription d’un prêt.

 Le tableau ci-après montre l’évolution des dépenses de l’action Épargne logement entre 2007 et 2012 qui laisse augurer la reconstitution d’un découvert auprès du Crédit Foncier de France (CFF) de près de 50 millions d’euros en 2012 :

LES REPORTS DE CHARGES SUR L’ÉPARGNE LOGEMENT : UN NOUVEAU RISQUE EN 2012?

(en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Crédits ouverts en LFI

1 143,2

1 122

1 157

1 250

1 116

649

Fonds appelés par le CFF (paiement des primes + frais de gestion)

1 489,4

1 610

911,6

629

670

700

Versement du Trésor au CFF (hors frais de gestion)

1 142

1 119

1 156

1 249

1 116

460(a)

Report de charges dues au titre de l’année n-1

495

622

963

719,2

16,5

5,3

Charges à payer au titre de l’année n

842

1 113

719,2

99,5

0

234,7

Ouverture de crédits en cours d’année

220

150

0

83,1 (a)

0

0

Charges restant à payer au titre de l’année n après LFR ou décret d’avance

– 622

– 963

– 719,2

– 16,5

88,39

– 234,7

(a) L’abondement exceptionnel en LFR du 30 décembre 2010 a eu pour objet d’apurer les dettes de l’État vis-à-vis du Crédit foncier de France.

(b) Au 31 août 2012. Source : ministère de l’Économie

Les décalages successifs entre les ouvertures de crédit en loi de finances initiale et le volume des primes effectivement versées par le Crédit Foncier de France (CFF) pour le compte de l’État ont conduit pendant plusieurs années à l’existence d’un découvert de l’État auprès du Crédit Foncier, en constante augmentation entre 2006 et 2008.

À compter de l’année 2009, l’exécution budgétaire a enregistré une baisse du montant de la dette de l’État vis-à-vis du CFF, qui s’est poursuivie en 2010. Ce n’est qu’en 2011 que l’État est parvenu à terminer l’exercice en position créditrice vis-à-vis du CFF à hauteur de 5,3 millions d’euros. À noter que l’État a également négocié à la baisse le coût du portage financier par le CFF par rapport à la convention de base signée avec ce dernier en 1992, afin de limiter le coût de son découvert.

En 2012, malgré une légère augmentation de l’encours des dépôts, il est prévu une augmentation de 9,4 % du montant des primes réglées par le CFF à 700 millions d’euros. Or, si le montant des crédits ouverts en LFI s’élevait à 769 millions d’euros, il faut rappeler que le programme 145 a fait l’objet d’une annulation de crédit de 120 millions d’euros dans le cadre de la loi n° 2012-534 de finances rectificative pour 2012. Cette annulation a concerné à la fois l’intégralité des crédits mis en réserve (46,4 millions d’euros) et des crédits hors réserve à hauteur de 73,7 millions d’euros qui pèse en totalité sur l’action Épargne Logement. Au 31 août 2012, le paiement des primes versées par le CFF s’élevait à 460 millions d’euros de sorte que les restes à payer en 2012 s’élèveraient à 234,7 millions d’euros. Les prévisions d’exécution budgétaire montrent ainsi que l’apparition d’un nouveau découvert est probable (d’un montant d’environ 50 millions d’euros) sauf si des crédits supplémentaires sont inscrits en loi de finances rectificative pour 2012.

ÉPARGNE LOGEMENT : ÉVOLUTION DU MONTANT GLOBAL DES PRIMES VERSÉES

(en milliards d’euros)

 

2007

2008

Écart

2009

Écart

2010

Écart

2011

Écart

Prév 2012

Écart

Comptes

48,5

63,3

+ 30,4

54,7

– 13,5 %

36,0

– 34 %

29,2

– 18,9 %

35

+ 20 %

Plans

1 427,3

1 524,9

+ 6,8

853

– 44,1 %

592

–30,6 %

640,1

+ 8,2 %

700

+ 9,4 %

Total

1 475,8

1 588,1

+ 7,6

907

– 42,8 %

628

–30,7 %

669,3

+ 6,6 %

735

+ 9,8 %

Source : ministère de l’Économie.

ÉPARGNE LOGEMENT : ÉVOLUTION DE L’ENCOURS DES DÉPÔTS

(en milliards d’euros)

 

2007

2008

Écart

2009

Écart

2010

Écart

2011

Écart

Comptes

38,1

37,1

– 2,8 %

36,8

– 0,7 %

36,38

– 1,2

36,36

– 0,06 %

Plans

191,7

172,1

– 10,2 %

176,1

+ 2,4 %

185,2

+ 5,2 %

189,5

+ 2,3 %

Total

229,8

209,2

– 9,0 %

212,9

+ 1,8 %

221,6

+ 4,1 %

225,9

+ 1,9 %

Source : ministère de l’Économie.

Source : PAP 2013.

 Une légère baisse des dépenses budgétaires liées au paiement des primes de PEL en 2013

La réforme de l’épargne-logement, entrée en vigueur au 1er mars 2011 vise notamment à recentrer le PEL sur les projets d’accession à la propriété concernant la résidence principale tout en prenant en compte les impacts environnementaux.

Ces nouvelles dispositions n’auront cependant pas d’impact sur la dépense budgétaire avant 2014, soit trois ans après la mise en œuvre de la nouvelle réglementation, délai à l’issue duquel les toutes premières générations de PEL post 2011 pourront donner lieu à un prêt épargne logement. En revanche, la réforme pourrait commencer à produire ses effets sur les CEL dès 2012 (la souscription d’un prêt CEL étant autorisée dès 18 mois après l’ouverture d’un CEL).

Concernant les CEL, au 31 août 2012, la dépense budgétaire s’élève à 21,65 millions d’euros, en augmentation de 4 % par rapport à la période du 1er janvier au 31 août 2011. Cependant, les évolutions constatées jusqu’à présent permettent d’envisager une prévision de 35 millions d’euros pour 2013. Cette prévision devra être précisée en fonction à la fois de l’exécution finale au titre de 2012 et des résultats d’exécution au titre des premiers mois de 2013.

Concernant les PEL, au 31 août 2012, le montant effectif de primes payées depuis le début 2012 s’élève à 466,48 millions d’euros contre 445,9 millions d’euros à la même période en 2011, soit une augmentation de 4,6 %. Sur l’ensemble de l’année, la prévision de dépenses est relevée à 700 millions d’euros.

Cette augmentation pourrait s’expliquer en grande partie par la hausse du niveau de clôture des générations de PEL antérieures à 2002, pour lesquelles le versement de la prime est automatiquement acquis indépendamment de toute souscription de prêts PEL.

TABLEAU RÉCAPITULATIF DES CLÔTURES PAR GÉNÉRATION DE PEL (10, 11 ET 12 ANS)

Génération de PEL

Taux de clôture en 2011

Génération de PEL

Taux de clôture en 2010

Génération de PEL

Taux de clôture en 2009

de 12 ans en 2011 (génération 1999)

39 %

de 12 ans en 2010 (génération 1998)

29 %

de 12 ans en 2009 (génération 1997)

33 %

de 11 ans en 2011 (génération 2000)

28 %

de 11 ans en 2010 (génération 1999)

25 %

de 11 ans en 2009 (génération 1998)

27 %

de 10 ans en 2011 (génération 2001)

29 %

de 10 ans en 2010 (génération 2000)

27 %

de 10 ans en 2009 (génération 1999)

36 %

Pour l’année 2013, et au regard des exercices 2011 et 2012, le niveau de dépense des primes PEL a été évalué à 685,4 millions d’euros (soit une baisse de 9,7 % par rapport à l’exécution 2012). La prévision tient compte des taux de clôture de PEL (pour les générations de 10 ans, 11 ans et 12 ans), et du taux de transformation des PEL en prêts épargne logement dont la baisse se poursuit.

Le taux de clôture de PEL donnant lieu à un prêt épargne logement est un indicateur pertinent du bon fonctionnement du mécanisme puisqu’il permet de vérifier que les PEL sont utilisés conformément à leur objectif (deuxième sous-indicateur de l’indicateur n° 1.2). Le taux, qui était de 18,04 % en 2008 est descendu jusqu’à 8,7 % en 2011 et 9 % en 2012. Le PAP prévoit une stabilité de ce taux pour la période 2013-2015.

Il est utilement complété par un indicateur rapportant l’encours des prêts à l’encours des dépôts (premier sous-indicateur de l’indicateur n° 1.2). Ce taux de transformation des dépôts, après une baisse, semble se stabiliser. En effet, à 4,8 % en 2010 il est descendu à 4 % en 2011 pour remonter à 4,8 % en 2012. Ce niveau devrait se maintenir autour de 4,5 % pour la période 2013-2015. La réforme du PEL issue de l’article 26 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 devrait participer à cet objectif puisqu’elle conditionne l’octroi de la prime à la souscription d’un prêt épargne-logement d’un montant minimum de 5 000 euros destiné à financer une opération d’acquisition ou de construction d’un logement « vert », à savoir un logement dont le niveau de performance énergétique globale répond à des critères précis.

ÉVOLUTION DE LA TRANSFORMATION DES DÉPÔTS D’ÉPARGNE LOGEMENT EN PRÊTS

(échelle de gauche en milliards d’euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire, calculs du Rapporteur spécial.

CHAPITRE IV : LE PROGRAMME MAJORATION DES RENTES : LA GESTION D’UN DISPOSITIF EN EXTINCTION

Ce programme, doté d’une action unique, comporte les crédits par lesquels l’État participe aux majorations de rentes viagères, dispositifs en voie d’extinction (36). Compte tenu du caractère « fermé » des procédures concernées et de l’absence d’intervention directe de l’État dans leur gestion, ce programme est, à juste titre, dépourvu de dispositif de mesure de la performance.

En 2010, les demandes de remboursement ont émané de 33 compagnies d’assurance et de 12 mutuelles et ont concerné environ 423 316 crédirentiers. Les dépenses ont atteint 204,2 millions d’euros, à répartir entre 187,1 millions d’euros de majorations servies par les compagnies d’assurance et 16,9 millions d’euros de majorations servies par les mutuelles.

En 2011, la baisse tendancielle de ces dépenses s’est poursuivie : alors que les crédits prévus en loi de finances initiale pour 2011 s’établissaient à 195 millions d’euros, l’exécution s’est établie à 194,7 millions d’euros. Le nombre de crédirentiers dont les contrats bénéficient de majoration légale était de 409 331 dont 337 825 pour les rentes services par 29 sociétés d’assurances (pour un montant de 180,1 millions d’euros) et 71 506 pour celles servies par 11 mutuelles (pour un montant de 14,6 millions d’euros).

Pour 2012, le montant de la dépense serait de 183,3 millions d’euros, ce qui représenterait un taux d’exécution de 99,1 % (la loi de finances pour 2012 prévoyait 185 millions d’euros de dépenses). Ce résultat traduirait une réduction de la dépense de 6 % par rapport à 2011, un peu plus rapide que l’année précédente (5 %) et deux fois plus rapide que les années antérieures (3 %) en raison de l’âge moyen élevé des crédirentiers (80 ans) et de l’augmentation de la mortalité correspondante. Les dépenses seraient réparties entre 169,4 millions d’euros au titre de la majoration des rentes servies par les compagnies d’assurance à 303 131 crédirentiers et 13,9 millions d’euros au titre de la majoration des rentes servies par les mutuelles à 73 893 crédirentiers.

L’année 2013 présente une baisse moins marquée de ces dépenses que l’année précédente (– 2,2 %). Ainsi, le projet de loi de finances prévoit au titre de l’année à venir 181 millions d’euros de dépenses dont 168 millions d’euros au titre de la majoration des rentes servies par les compagnies d’assurance à 303 000 crédirentiers et 13 millions d’euros au titre de la majoration des rentes servies par les mutuelles à 73 000 crédirentiers.

CHAPITRE V : LE PROGRAMME DOTATION EN CAPITAL DU MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILITÉ (MES)

A.– LE MES : UN DISPOSITIF PÉRENNE DE STABILISATION FINANCIÈRE AU SEIN DE LA ZONE EURO

Le Fonds européen de stabilité financière (FESF), est une société anonyme de droit luxembourgeois fondée sur un contrat international signé le 7 juin 2010 par les 17 États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro. Mis en place pour une durée de trois ans, dans le contexte de fortes tensions financières en zone euro, il est destiné à apporter des financements aux États membres jusqu’à hauteur de 440 milliards d’euros et bénéficie à cet effet de garanties apportées par l’ensemble des États membres de la zone euro à proportion de leur quote-part au montant des émissions, soit 21,8 % pour la France.

Le FESF a été successivement mobilisé en 2010 et 2011 au profit de l’Irlande (17,7 milliards d’euros), du Portugal (26 milliards d’euros) et de la Grèce, (144,6 milliards d’euros au total) conjointement avec une assistance financière du FMI. L’encours des émissions du FESF représente à ce jour un montant de 147,6 milliards d’euros en principal. L’exposition en garantie est d’environ 57,3 milliards d’euros pour la France (dont 50,3 milliards d’euros en principal), sur lesquels les surgaranties représentent 20,6 milliards d’euros à raison de 60,8 % du montant garanti (soit une garantie totale de 165 %).

Le Traité instituant le Mécanisme européen de stabilité (MES) a été signé le 2 février 2012 et ratifié par la loi n° 2012-324 du 7 mars 2012. La date d’entrée en vigueur du traité sur le MES, initialement prévue pour mi-2013, est intervenue de façon anticipée à l’automne 2012. Il a vocation à succéder au FESF à titre permanent et à reposer, non seulement sur des garanties des États, mais sur un capital effectivement constitué.

Le MES a pour but de mobiliser des ressources financières et de fournir, sous une stricte conditionnalité de politique économique adaptée à l’instrument d’assistance financière choisi, un soutien à la stabilité de ses membres qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement, lorsque c’est indispensable pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble et de ses États membres. À cette fin, il est autorisé à lever des fonds en émettant des instruments financiers, en concluant des accords ou des arrangements financiers ou d'autres accords ou arrangements avec ses membres, des institutions financières ou d'autres tiers.

Le mécanisme pourra non seulement réaliser des prêts assortis de programmes d’ajustement macroéconomiques complets et des interventions sur le marché primaire, mais aussi intervenir sur le marché secondaire, intervenir à titre de précaution et allouer des prêts à des États pour recapitaliser des banques.

La plupart des décisions stratégiques sont prises d’un commun accord, mais une procédure d’urgence peut être utilisée, sur recommandation de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne, pour prendre des décisions adoptées à la majorité qualifiée (85 % des droits de vote).

Le MES a son siège à Luxembourg et tous les États membres dont la monnaie est l’euro en sont membres. En outre, des États membres de l’Union européenne dont la monnaie n’est pas l’euro peuvent participer, au cas par cas, aux côtés du MES, à une opération d'assistance financière en faveur d'États membres de la zone euro. Dans ce cas, ils seront invités à participer, en qualité d'observateurs, aux réunions du MES qui portent sur cette assistance financière ainsi qu’à son suivi. Dès lors, ils auront accès en temps utile à toutes les informations et seront dûment consultés.

B.– CONSÉQUENCES BUDGÉTAIRES ET COMPTABLES DE LA DOTATION EN CAPITAL

Le capital autorisé du MES est fixé à 700 milliards d’euros. Il se compose de parts libérées (ou capital appelé) et de parts appelables. La valeur nominale totale initiale des parts libérées s’élève à 80 milliards d’euros et la quote-part de la France à 20,3859 %. Sa souscription au capital libéré se monte donc à 16,31 milliards d’euros, la part de la France dans le capital autorisé étant de 142,701 milliards d’euros.

Cette contribution doit être apportée en 5 tranches égales, conformément aux dispositions du Traité. La première loi de finances rectificative pour 2012 (37) a donc créé le programme Dotation en capital du MES pour ouvrir 16,31 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 6,5 milliards d’euros de crédits de paiement au titre du versement des deux premières tranches de la contribution de la France. Deux autres décaissements sont prévus en 2013 et le dernier en 2014, conformément à la décision prise par les ministres chargés des finances à Copenhague le 30 mars 2012.

Le programme Dotation en capital du MES du présent projet de loi de finances propose donc d’ouvrir 6 523 488 000 euros de crédits de paiement, au titre du versement de la troisième tranche de la contribution de la France.

Dans une étude préliminaire du 7 avril 2011, Eurostat a annoncé que, contrairement au FESF, le MES pourrait être considéré comme une institution communautaire. En conséquent, les financements levés par ce nouveau mécanisme ne viendront pas accroître l’endettement public brut des États, sauf en cas de constatation de pertes. Ainsi, le capital appelé sera comptabilisé en dette brute au sens de Maastricht mais pas en dette nette. Le capital appelable sera traité comme un passif contingent des États et n’aura aucun impact sur les comptes de l’État tant qu’il n’est pas appelé.

Les versements de la France au titre du capital libéré sont comptabilisés dans le déficit budgétaire au moment de leur décaissement, mais sont considérés comme des opérations financières en comptabilité nationale n’impactant pas le déficit public au sens de Maastricht.

Les appels de capital seraient quant à eux traités différemment selon qu’ils couvrent des pertes du MES ou non. Dans le premier cas, il s’agira d’un transfert de capital et donc d’une dépense du gouvernement qui affectera le déficit public en comptabilité nationale. Mais dans le second cas, les appels seront traités comme une prise de participations de l’État, avec un impact sur la dette publique brute, mais pas sur le déficit public en comptabilité nationale, à l’instar du versement du capital libéré.

CHAPITRE VI : LE PROGRAMME AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA BANQUE EUROPÉENNE D’INVESTISSEMENT (BEI)

Le programme porte sur la participation de la France à l’augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement (BEI) décidée lors du conseil d’administration du 24 juillet 2012.

Proposée à l’article 65 du projet de loi de finances pour 2013, cette augmentation de capital est commentée par votre Rapporteur spécial à l’issue de cet exposé général.

Elle donne lieu à l’ouverture de 1 617 003 000 euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement à l’état B annexé au projet de loi de finances pour 2013.

*

* *

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE
DU 30 OCTOBRE À 18 HEURES

(Application de l’article 120, alinéa 2, du Règlement)

M. Dominique Baert, président. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre de l’économie et des finances, et vous prie de bien vouloir excuser l’absence du président Gilles Carrez qui préside actuellement une autre réunion de la Commission des finances consacrée à la TVA sur la restauration.

Nous sommes réunis en commission élargie pour vous entendre sur les crédits pour 2013 des missions « Engagements financiers de l’État » et « Remboursements et dégrèvements », des comptes d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » et « Participation de la France au désendettement de la Grèce », et du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics ».

Je rappelle que la Conférence des présidents du 31 juillet dernier a reconduit la procédure des commissions élargies destinée à favoriser les échanges les plus interactifs possible entre les ministres et les députés.

M. Dominique Lefebvre, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour la mission « Engagements financiers de l’État ». Je commencerai par quelques réflexions générales sur la situation de la dette publique.

La mission « Engagements financiers de l’État » comporte six programmes, dont le plus important en volume budgétaire est le programme « Charge de la dette et trésorerie de l’État »,pour lequel 46,9 milliards d’euros de crédits sont ouverts pour 2013 – soit près de 95 % des crédits de la mission. Ce programme représente la première dépense budgétaire de l’Etat hors charges de pensions et la troisième, toutes dépenses confondues, derrière les programmes « Remboursements et dégrèvements » et « Enseignement scolaire ».

En l’espace de trente-cinq ans, la France est passée d’une économie à forte croissance fondée sur le dynamisme de la consommation des ménages et de l’investissement des entreprises à une économie dont le principal ressort est l’endettement public et où la croissance est à la fois plus faible et plus volatile.

Si la dette a augmenté continûment depuis trente-cinq ans, on peut néanmoins distinguer six phases dont deux se démarquent. En effet de 1993 à 1996, puis à compter de 2007, la dette publique a augmenté en moyenne de plus de 4,4 % par an. Il n’y a qu’entre 1997 et 2001 que le taux de dette publique par rapport au PIB s’est stabilisé en deçà du critère fixé par le traité de Maastricht et a même diminué. De 59,5 % du PIB en 1997, la dette n’en représentait plus que 57,1 % en 2001.

La crise est loin d’expliquer cette dérive de la dette publique – dette de l’État principalement, mais aussi dette sociale. La dette sociale cumulée depuis 1996 qui a été transférée à la CADES se monte à 210 milliards d’euros. Même si un mécanisme d’amortissement permet de la ramener aujourd’hui à 140 milliards d’euros, c’est beaucoup trop et surtout peu responsable vis-à-vis des générations futures.

L’évolution constatée est liée, notamment depuis 2002, à un solde structurel négatif. De 2007 à 2011, la dette a augmenté de 22 points de PIB, avec un solde structurel négatif passé de 2,3 % à 4,8 % du PIB de 2006 à 2010. C’est dire que l’accroissement de la dette publique, loin de s’expliquer par la crise et des phénomènes conjoncturels, tient à des décisions publiques qui, pour avoir été ou n’avoir pas été prises, ont aggravé le déficit structurel.

La dette publique représente aujourd’hui une charge de plus de 26 000 euros par habitant et de 62 000 euros par ménage. Sa charge représente 2,2 points de PIB. C’est les deux tiers des ressources nettes de l’impôt sur le revenu ou bien encore 95% des dépenses de fonctionnement nettes de l’État. La nouvelle majorité n’est pas responsable de cette situation : elle n’en doit pas moins l’assumer. L’encours de la dette publique totale devrait atteindre 1 830 milliards d’euros fin 2012 et le besoin de financement de l’Etat s’établir à 171,1 milliards d’euros en 2013.

Maîtriser la dette publique est donc devenu un impératif de souveraineté nationale – avons-nous toujours la capacité de la garantir avec une telle dépendance aux marchés financiers ? – et de responsabilité vis-à-vis des générations futures.

Le poids de la dette et de la charge de ses intérêts dans le budget de l’État expose aujourd’hui à trois risques majeurs.

Un risque financier, tout d’abord, vu la volatilité des taux d’intérêt et l’influence des agences de notation sur le marché des dettes souveraines.

Un risque économique, ensuite, avec un risque d’emballement de la dette. Il n’y a pas de seuil absolu, mais toutes les études rétrospectives montrent qu’au-delà de 90 % du PIB, un effet boule de neige peut se produire et grever durablement la croissance.

Un risque politique, enfin, car tout accroissement de la charge des intérêts de la dette signifie autant de marges de manœuvre en moins pour financer les priorités politiques.

Le choix du nouveau Gouvernement d’inverser la courbe de la dette dès 2014 et d’atteindre l’équilibre structurel en 2016 est donc à la fois courageux et surtout responsable.

Ces remarques générales étant faites, je vous poserai, monsieur le ministre, quatre questions.

Tout d’abord, sur le programme « Charge de la dette et trésorerie de l’État ». Pourrions-nous avoir des informations sur le volume des amortissements de dette arrivant à échéance en 2014 et 2015 ? Le besoin de financement de l’Etat pour 2013, même s’il diminue de près de 12 milliards d’euros par rapport à 2012, demeure colossal, se montant à 171,1 milliards d’euros. Si la part liée au déficit budgétaire régresse, celle des amortissements de dette progresse en revanche. Nous avons besoin d’informations sur la trajectoire. Si l’on connaît les prévisions du Gouvernement en matière de solde budgétaire jusqu’en 2017, il est important de savoir aussi comment les choses évoluent, notamment pour comprendre la dépendance aux marchés.

Je tiens à souligner l’excellent travail réalisé par l’agence France Trésor en matière de gestion de la dette et de trésorerie de l’État. Ce travail a permis de détendre l’exposition de la France. Des efforts importants ont été réalisés pour mieux centraliser les trésoreries sur le compte unique du Trésor, ce qui a permis un moindre recours aux BTF à 3 et 6 mois. Existe-t-il encore des marges de manœuvre en la matière ?

En 2012, la charge nette de la dette sera inférieure d’environ 2 milliards d’euros à la prévision initiale, essentiellement du fait de la faiblesse historique des taux d’intérêt. Le projet de loi de finances pour 2013 table sur une remontée progressive de ces derniers, mais prévoit néanmoins une stabilisation de la charge de la dette, alors même que l’encours continuera de progresser. Cette situation paradoxale perdurera-t-elle au-delà de 2013 ou faut-il s’attendre à une augmentation de la charge des intérêts de la dette en 2014 et 2015 ? Si oui, pour quel montant ?

Le programme « Appels en garantie de l’État » ne présente pas de problèmes particuliers dès lors que l’État maîtrise bien les risques qu’il encourt à proportion des garanties qu’il octroie – j’ai abordé cette question lors de l’audition du directeur général du Trésor. Ce programme se trouve au cœur du soutien financier aux banques, dont Dexia, et du plan de sauvetage en cours des États membres de la zone euro en difficulté. À ce jour, aucun appel en garantie n’a eu lieu à ces titres et il n’en est pas prévu non plus en 2013. Comment évaluez-vous le risque budgétaire à moyen et long terme lié à l’octroi de ces garanties ?

La situation du Crédit immobilier de France (CIF) est préoccupante. Nous avons déjà abordé le sujet en commission et aurons à y revenir en séance publique pour discuter des conditions d’octroi de la garantie de l’État à cet établissement. La colère est grande quand on voit tout ce qui aurait pu être fait depuis de nombreuses années pour éviter la situation actuelle. Où en sont les discussions entre l’État et la direction du CIF depuis l’audition du directeur général du Trésor par la Commission des finances le 22 octobre dernier ?

Je termine par le programme « Épargne ». On constate de nouveau en 2012 un découvert de près de 50 millions d’euros auprès du Crédit foncier de France. Cette dette sera-t-elle apurée ? Si oui, par quel biais ?

M. Dominique Baert, président. Les précédents découverts ont en effet mis du temps à être apurés.

Mme Eva Sas, rapporteure spéciale, pour la mission « Remboursements et dégrèvements ». La mission « Remboursements et dégrèvements » est la plus importante, en volume, du budget de l’État, avec 96 milliards d’euros de crédits prévus pour 2013. Plutôt que d’en présenter de manière exhaustive les crédits, je souhaiterais mettre l’accent sur trois points particuliers.

Tout d’abord, la mission retrace des remboursements de taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE). Partant de là, je me suis intéressée plus largement aux dépenses fiscales liées à la consommation d’énergies fossiles.

Selon le rapport du comité d’évaluation de l’Inspection générale des finances sur les niches fiscales, ces dispositifs présentent une double caractéristique.

D’une part, leur incidence sur l’emploi est – je cite le rapport – « vraisemblablement peu significative ». Les exonérations de TICPE au profit des vols intérieurs ne permettraient de sauvegarder que 950 emplois et celles au profit du transport routier seulement 800. Cette dernière exonération représente un coût par emploi de quelque 412 000 euros, ce qui est, vous en conviendrez, exorbitant. Le Gouvernement confirme-t-il les évaluations de l’Inspection générale des finances ? L’argent public ne pourrait-il pas être utilisé plus efficacement, à la fois en soutien de l’emploi et pour la protection de l’environnement ?

Le rapport de l’IGF montre, d’autre part, que la fiscalité applicable aux différents modes de transport ne prend pas en compte leur impact environnemental. En effet, les transports les plus polluants ne sont pas les plus taxés. Les modes de transport collectif, que nous devrions pourtant encourager pleinement pour réduire les émissions de CO2 et désengorger les axes routiers, sont à peine avantagés. La taxe applicable au gazole utilisé dans les transports publics est de 39,19 euros par hectolitre contre 42,84 euros pour celle applicable au gazole utilisé par les particuliers. Quant au transport aérien, qui émet pourtant le plus de CO2 par passager, il est le plus soutenu puisque totalement exonéré de taxe sur le kérosène.

Le Gouvernement partage-t-il ce constat ? Ne faudrait-il pas revoir la fiscalité énergétique en fonction du double critère de l’emploi et des émissions polluantes ?

Je me suis par ailleurs attachée à étudier les contentieux fiscaux dans lesquels l’État a été condamné et qui pourraient lui coûter plus de 8 milliards d’euros sur les années 2012 à 2014, dont 1,8 milliard d’intérêts moratoires.

L’État a été condamné pour les deux régimes fiscaux des OPCVM et du précompte mobilier, du fait desquels les contribuables non résidents étaient plus fortement taxés que les contribuables résidents. Dans ces conditions, la condamnation de l’État ne faisait guère de doute.

D’ailleurs, dans son rapport de juin dernier sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes indique que la direction générale des finances publiques avait alerté le précédent Gouvernement sur les risques de condamnation dans l’affaire des OPCVM. Aucune mesure de correction n’a pourtant été décidée avant cette législature et il a fallu attendre la loi de finances rectificative d’août dernier.

Monsieur le ministre, confirmez-vous que la direction générale des finances publiques avait alerté le Gouvernement précédent des risques de condamnation associés à ces contentieux ? Si oui, comment expliquez-vous que celui-ci n’ait pas réagi ? Une mise en conformité plus rapide du droit aurait pourtant permis que les intérêts moratoires à acquitter soient moindres.

Je souhaite enfin appeler l’attention de la Commission sur deux points particuliers concernant le bouclier fiscal. Celui-ci fait l’objet non pas d’un crédit d’impôt, mais d’une imputation sous forme de réduction de l’ISF sur l’année N et les années suivantes. Malgré sa suppression en juillet 2011, le Gouvernement de l’époque a dû reporter sur les années suivantes des charges très significatives, qui s’élèvent encore à 350 millions d’euros en 2013.

Par ailleurs, et c’est plus gênant encore, la charge prévisionnelle du bouclier fiscal en 2012 a été réévaluée de 150 à 450 millions d’euros. Cette révision n’est pas anodine. En effet, la réforme de l’ISF du printemps 2011 était censée être équilibrée sur le plan financier dès 2012. Cette estimation se fondait notamment sur un coût estimé du bouclier de 150 millions d’euros. On sait maintenant que, contrairement aux annonces du gouvernement précédent, la réforme n’aura pas été équilibrée. Tout laisse à penser que la prévision initiale de 150 millions d’euros avait été volontairement sous-évaluée.

Monsieur le ministre, à votre connaissance, comment se justifiait la charge prévisionnelle du bouclier fiscal pour 2012, estimée au moment de la réforme de l’ISF en 2011 ? Accepteriez-vous de qualifier cette prévision d’insincère ?

M. Guillaume Bachelay, rapporteur spécial, pour les comptes d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » et « Participation de la France au désendettement de la Grèce », et pour le compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics ». En tant que rapporteur des participations financières de l’État, je me suis appliqué à réfléchir au périmètre d’intervention actuel de l’État actionnaire et à voir comment il pourrait évoluer.

La mission actuelle de l’État actionnaire consiste à valoriser son patrimoine financier. La légitimité de cette mission ne fait pas de doute et il n’est pas question de la remettre en cause – c’est d’ailleurs l’objet de la seconde partie de mon rapport.

Chacun s’accordera néanmoins sur la nécessité de soutenir la compétitivité de l’économie – dont l’insuffisance est attestée par le juge de paix incontestable que constituent notre balance commerciale et nos parts de marché à l’exportation, qui se sont gravement et continûment dégradées depuis 2002, dernière année où le solde du commerce extérieur français fut positif.

Pour l’actuelle majorité, la puissance publique doit mobiliser tous les moyens à sa disposition pour renforcer la vraie compétitivité – la compétitivité-qualité – de l’économie française. Les entreprises dont l’État est actionnaire doivent y prendre toute leur part.

L’État actionnaire doit non seulement garantir la bonne gestion de ces entreprises, mais également peser sur leurs décisions afin de renforcer la compétitivité-qualité. Concrètement, l’État devrait encourager ces entreprises à structurer et animer leur filière industrielle, en particulier pour construire des relations de compétences et de confiance entre donneurs d’ordre et PME sous-traitantes ; à privilégier autant que possible la localisation en France de leurs centres de recherche et de leurs unités de production ; à développer des synergies industrielles avec les autres entreprises publiques du même secteur d’activité.

Il s’agit non pas de réactiver les politiques interventionnistes des années 70, mais, dans un contexte de mondialisation et de compétition internationale farouche, de définir une politique économique au sein de laquelle l’État actionnaire pourrait jouer pleinement son rôle dans le double cadre qui s’impose à lui.

Tout d’abord, le cadre juridique du droit de la concurrence – dont votre rapporteur estime qu’il gagnerait à s’appliquer de manière moins dogmatique en Europe – et du droit des sociétés. Ensuite, le cadre financier qui impose une gestion rigoureuse des entreprises publiques. Il n’est pas question de nier ces contraintes, mais l’État conserve une marge d’action non négligeable.

Monsieur le ministre, ma question est double.

Quelle est la position du Gouvernement sur cette proposition d’assigner à l’État actionnaire l’objectif de soutenir la compétitivité- qualité de l’économie, lequel compléterait l’objectif traditionnel de valorisation de son patrimoine financier ?

Alors que la Banque publique d’investissement aura pour vocation de prendre activement des participations dans les PME et les ETI au service l’innovation, en lien avec les acteurs régionaux, et de les soutenir, si les missions de l’État actionnaire demeuraient inchangées, cela ne conduirait-il pas à maintenir l’État dans un rôle de gestionnaire de participations héritées du passé et progressivement cédées au gré des besoins des finances publiques ?

M. Dominique Baert, président. Je remercie les rapporteurs spéciaux. Avant de vous donner la parole, monsieur le ministre, j’ai moi aussi quelques questions à vous poser.

Tout d’abord, sur le programme « Charge de la dette et trésorerie de l’État ». La France bénéficie actuellement de conditions de financement très favorables grâce à des taux d’intérêt négatifs sur les BTF à 3 et 6 mois et à des taux plus faibles que prévu sur les OAT à 10 ans. Selon vous, quels facteurs pourraient être à l’origine d’un retournement de situation pour la France ? Y a-t-il un risque crédible d’envolée des taux à court ou moyen terme ?

Sur le programme « Appels en garantie de l’État », quelle est votre appréciation générale sur la capacité de l’État à maîtriser le degré d’exposition aux risques pour les garanties qu’il accorde ? L’État ne risque-t-il pas d’être appelé rapidement en garantie pour Dexia ? Quel en serait l’impact sur les finances publiques ?

Enfin, s’agissant du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », il semble que EDF travaille actuellement avec un partenaire chinois, CGNPC (China Guangdong Nuclear Power Company), sur un nouveau réacteur de moyenne puissance. Il est étonnant qu’Areva ne soit pas associé à ce projet et développe, semble-t-il, un projet semblable avec un partenaire japonais. Le gouvernement précédent avait évoqué une mise en commun des deux projets. Quelle est la position de l’actuel Gouvernement sur la question ? Comment au demeurant maîtriser les transferts de technologie vers la Chine si le projet devait aboutir ?

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. J’ai bien pris note de toutes vos questions et vais m’efforcer d’y répondre. Je devrai malheureusement, pour des contraintes d’agenda, vous quitter avant la fin de cette réunion. Benoît Hamon prendra alors le relais.

Après une réunion consacrée la semaine passée aux moyens de fonctionnement du ministère de l’économie et des finances, votre commission examine aujourd’hui des dépenses d’une autre nature, liées aux grandes orientations de la politique économique et, s’agissant des remboursements et dégrèvements, à la politique fiscale.

Je remercie les rapporteurs pour la qualité de leurs rapports et le caractère incisif de leurs questions.

Les charges de la dette constituent l’essentiel des dépenses de la mission « Engagements financiers de l’État » avec 47 milliards d’euros prévus en 2013, contre 46 milliards pour la mission « Enseignement scolaire » et 26 milliards pour la mission « Recherche et enseignement supérieur ». C’est un montant considérable qui traduit le poids très élevé de l’endettement que notre pays supporte après des années de dérive. Sur ce point, je partage le sentiment de Dominique Lefebvre. Il est vrai qu’il n’y a pas de seuil fatal dans l’absolu, mais 90% du PIB est en général considéré comme celui au-delà duquel se produit un effet boule de neige et où la croissance est durablement atteinte.

Il est donc impératif que l’État se désendette. D’où le choix fait par le Gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2013 et le projet de loi de programmation triennal des finances publiques de redresser les comptes pour dégager ensuite des marges de manœuvre. Je l’ai déjà dit à plusieurs reprises : au-delà d’un certain niveau, le poids de la dette handicape notre croissance et consomme des ressources qui pourraient être utilisées pour financer nos priorités. Il faut casser ce cercle vicieux.

Les charges de la dette dépendent non seulement du poids de celle-ci, mais aussi du niveau des taux d’intérêt, lesquels ne sont naturellement pas indépendants de notre crédibilité budgétaire – le contexte européen actuel le montre amplement. Nous empruntons aujourd’hui à des taux historiquement bas parce que notre politique est crédible. Si nous venions à baisser la garde et à céder aux sirènes du laxisme, il ne fait aucun doute que nous tomberions dans cet autre cercle vicieux que d’autres pays ont connu, où la sanction des marchés est immédiate et où l’augmentation des taux accroît la charge de la dette. Et les deux processus étant cumulatifs, l’augmentation ne se limite pas à quelques dixièmes de point. Il est de l’intérêt de l’État, et de manière plus générale de notre économie, que les taux demeurent bas. Je ne vois pas aujourd’hui de menace, monsieur le président, mais nous devons rester vigilants. Cette discussion budgétaire, ici et au Sénat prochainement, est d’ailleurs scrutée par des spécialistes en France, en Europe et dans le monde.

Les services du ministère s’attachent à cette vigilance avec une compétence reconnue sur le plan international. Maîtrisons-nous l’ensemble des risques ? Je crois que oui. Je ne suis pas de ceux qui accusent la direction du Trésor d’incompétence ou de déloyauté. Elle a sans doute des défauts – c’est le propre de l’humanité. Mais avec l’agence France Trésor, elle gère notre endettement de manière efficace.

Dans les dépenses examinées aujourd’hui, les engagements communautaires de la France comptent également pour beaucoup, avec la contribution prévue en 2013 au Mécanisme européen de stabilité (MES) et l’augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement, à la suite des décisions du Conseil européen de juin dernier. Au total, plus de 8 milliards d’euros ont été ouverts à ces deux titres en 2013.

On touche également de près dans ce champ aux interventions économiques, aussi bien à travers des mécanismes permanents – je pense, par exemple, au financement des entreprises exportatrices, que l’État soutient en leur apportant sa garantie – qu’à travers des décisions plus ponctuelles, comme pour Dexia ou le Crédit immobilier de France. Dans ces deux cas, très différents, l’État a pris ses responsabilités.

S’agissant de Dexia, j’ai dû, en arrivant au ministère, traiter ce lourd héritage laissé par l’ancien gouvernement. L’objectif est de stabiliser définitivement la banque résiduelle, afin d’éviter toute incidence systémique. Il est aussi de faire aboutir au plus vite le projet de rachat de DMA par l’État, la Caisse des dépôts et la Banque postale, afin de disposer d’un nouvel outil pour financer les collectivités locales. C’est une priorité pour le Gouvernement qui partage votre préoccupation. J’y insistais la semaine dernière encore à Bruxelles auprès du commissaire Almunia qui doit autoriser l’opération. J’espère qu’elle aboutira très vite.

S’agissant du Crédit immobilier de France, l’État est intervenu pour éviter la faillite de la banque. La garantie n’était pas la solution que souhaitait l’État. Du fait de l’application du droit communautaire et en l’absence de modèle économique viable, celle-ci implique en effet l’arrêt de la production de nouveaux crédits et la mise la mise en extinction de la banque. Le Gouvernement aurait préféré une autre solution qui permette, en adossant le CIF à un grand acteur bancaire, une poursuite de l’activité. Mais beaucoup de temps a été perdu dans ce dossier et la situation économique et financière de l’établissement était trop dégradée pour que cela soit possible.

Le Gouvernement souhaite désormais pouvoir mettre en œuvre la garantie dans les meilleurs délais et notifier au plus vite le dossier aux autorités européennes. Il tente, par ailleurs, de résoudre les questions soulevées par l’arrêt de la production du CIF. Il travaille notamment à faire développer par la Banque Postale une offre de prêts à l’accession sociale à la propriété et à pérenniser les missions sociales des SACICAP, actionnaires du CIF. Nous sommes bien entendu très attentifs aussi au sort des personnels.

Nous aurons l’occasion d’échanger sur la gestion par l’État de ses participations financières, mais sachez d’ores et déjà, monsieur Bachelay, que l’État actionnaire cherche – et c’est bien naturel – à valoriser son patrimoine financier. Sa mission est toutefois bien plus large : il se doit d’accompagner les entreprises publiques vers plus de compétitivité en définissant une stratégie industrielle de long terme, en soutenant leur gouvernance, en les épaulant dans les défis qu’elles doivent relever. Et cet État actionnaire, qui compte dans son portefeuille près de soixante entreprises publiques ou à participation publique, agit de façon complémentaire et coordonnée avec le Fonds stratégique d’investissement qui, demain, sera intégré au sein de la Banque publique d’investissement – dont je sais qu’elle vous est chère, car vous êtes en partie à son origine.

J’en viens aux questions que vous m’avez posées.

S’agissant du programme « Charge de la dette et trésorerie de l’État », le besoin de financement de l’État pour 2013 est toujours colossal : 171,1 milliards d’euros, même s’il diminue de 11,7 milliards d’euros par rapport aux besoins constatés en 2012. Toutefois, la structure de financement évolue, puisque la partie liée au déficit budgétaire se resserre de plus en plus grâce aux efforts du Gouvernement, tandis que la part des amortissements de dette de moyen et long terme arrivés à échéance progresse pour atteindre 109,5 milliards d’euros en 2013.

À la date du 30 septembre 2012, les encours des obligations de moyen à long terme – obligations assimilables au trésor, bons du trésor – sont les suivants : 107,9 milliards d’euros en 2013, 118,1 milliards en 2014, 125,6 milliards en 2015 et 117,1 milliards en 2016. Ces encours ne sont toutefois pas définitifs, parce que d’autres émissions auront lieu dans le futur sur une maturité de deux ans et plus, parce que des achats par anticipation seront réalisés avant la date de maturité de ces titres, ce qui diminuera leur encours, et parce que l’encours est augmenté chaque année de la provision pour charges d’inflation des titres indexés sur l’inflation.

Sur l’exécution 2011 et 2012, les dépôts d’entités sur des comptes ouverts au Trésor – ces entités déposantes devenant ainsi des correspondants du Trésor – constituent une ressource de trésorerie passive qui contribue au financement de l’État. Dans ce contexte, la politique de centralisation des trésoreries publiques consiste, comme son nom l’indique, à centraliser les dépôts d’entités ayant des liens avec le secteur public, par exemple des établissements publics ou des organismes en charge d’une mission de service public ou bénéficiant de financements publics. L’objectif de cette politique est la réduction du recours aux financements de marché, notamment sur la partie courte de la courbe, et la réduction du ratio de dette publique. Cette politique volontariste, menée en lien entre plusieurs services de Bercy et activement soutenue par la Cour des comptes, a nécessité la modernisation des outils de placement offerts par le Trésor. Elle aura permis, depuis 2010, de centraliser plus de 17 milliards d’euros sur le compte unique du Trésor. Les montants rapatriés sur le compte du Trésor issu de la mutualisation correspondent à plus de 1,2 % de l’encours de la dette négociable de l’État attendu à la fin de 2012.

Pour 2013, aucune opération n’est définitivement arrêtée à ce stade et n’a donc été inscrite dans le projet de loi de finances initial. Toutefois, plusieurs opérations sont en cours d’analyse et pourraient aboutir dans les prochains mois. Je ne manquerai pas d’en tenir informée la Commission des finances.

La charge de la dette devrait s’établir en deçà de 46,7 milliards d’euros, soit un niveau inférieur de plus de 2,1 milliards à celui inscrit dans la loi de finances initiale, en raison du faible niveau des taux d’intérêt. D’où la nécessité de maintenir ce niveau, car à l’inverse, si le déficit était plus important et notre crédibilité plus faible, nous pourrions connaître des évolutions extrêmement coûteuses.

Les taux d’émission de la dette souveraine française enregistrés au cours des derniers mois ont été très favorables. À la mi-octobre, le taux moyen pondéré à l’émission de titres à court terme s’établit à 0,1 %, et celui des titres à moyen et long terme à 1,94 %. Dans ce contexte, les hypothèses de taux retenus pour les années 2013 à 2015 dans le budget triennal de l’État sont prudentes. Il faut tenir compte des évolutions de la politique monétaire, de la BCE, de la crédibilité budgétaire de la France. Dans un contexte de sortie de crise des dettes souveraines, nos hypothèses reposent sur un scénario de normalisation des marchés monétaires et financiers qui se traduirait par une remontée limitée, modeste et progressive des taux courts et longs dès l’année 2013 : le taux à dix ans s’établirait en moyenne à 2,9 % sur l’année 2013 et continuerait sa progression de 25 points de base chaque année pour s’établir à 3,65 % en moyenne sur l’année 2015.

Je le dis parce que notre loi de finances doit être réaliste et prudente. On nous reproche parfois d’être trop optimistes, mais je note que ces hypothèses de taux sont supérieures pour 2013 aux anticipations de marché et aux prévisions des économistes retracées dans le consensus forecast. Le budget que nous bâtissons nous donne donc des marges de manœuvre, mais c’est mieux ainsi. C’est bien dans ce sens qu’il faut procéder.

S’agissant du programme « Appels en garantie de l’État », M. Lefebvre le sait déjà, mais nous suivons la situation de manière précise. Quant à Dexia, elle est entrée dans le périmètre des participations de l’État à l’occasion de l’augmentation de capital de 6 milliards d’euros annoncée le 30 septembre 2008, en période de crise financière aiguë, et souscrite par une partie des actionnaires existants ainsi que par les États belge et français, via la Société de prise de participation de l’État. Un premier plan de soutien a permis à la banque de faire face aux difficultés rencontrées dans le contexte de crise financière internationale et d’éviter une matérialisation du risque systémique qui pesait sur le système financier européen. Ce plan reposait notamment sur la mise en place, fin 2008, par les gouvernements belge, français et luxembourgeois, d’une garantie des émissions obligataires assortie d’une clé de répartition – 60,5 % pour la Belgique, 30,5 % pour la France et 3 % pour le Luxembourg – et d’une garantie des obligations de liquidités de Dexia à l’égard de sa filiale FSA Asset Management.

Après un retour aux bénéfices en 2009, le groupe a été impacté par l’aggravation des tensions sur les dettes souveraines de certains pays de la zone euro. Il a été contraint de modifier profondément son périmètre et sa stratégie et de demander à nouveau le soutien de la puissance publique. Un accord a été trouvé entre les trois États en octobre 2011, qui prévoit un plan de résolution ordonnée des activités du groupe Dexia. Il s’appuie sur la vente des entités viables de Dexia – Dexia Banque Belgique, Dexia Banque internationale Luxembourg, Dexia municipal agency, DenizBank –, et sur la gestion extinctive des actifs résiduels, grâce à une garantie de 90 milliards d’euros apportée par les trois États, qui permettra à Dexia de couvrir ses besoins de liquidité jusqu’à l’arrivée à maturité de l’ensemble de son portefeuille. Le risque se répartit selon la clé déjà évoquée. Le plan vise à éviter les pertes liées à la vente rapide d’actifs illiquides et donc décotés.

La Commission européenne, qui doit encore valider ce plan – et nous travaillons activement en ce sens –, avait autorisé dès décembre 2011, compte tenu de l’urgence, une garantie temporaire des États sur le financement de Dexia.

J’espère aboutir rapidement, tant les enjeux sont importants. En effet, l’État est exposé : Dexia n’émet plus sous le régime de garantie de 2008, et les encours déjà émis et non encore échus à ce jour représentent un peu moins de 20 milliards d’euros. Ils arrivent à échéance d’ici à 2014. La garantie de 2008 n’a jamais été appelée ; la garantie temporaire mise en place en décembre 2011 sur les financements de Dexia a été prolongée jusqu’au 31 janvier 2013 et augmentée pour atteindre à peu près 54 milliards d’euros. À ce jour, l’exposition totale de l’État français sur le groupe Dexia est de 36,5 % des 74 milliards d’euros de financement garantis par les trois États, soit 27 milliards d’euros.

Le dossier va évoluer très prochainement, compte tenu de deux échéances majeures : le dépôt devant la Commission européenne du plan de résolution ordonnée du groupe et l’arrêté des comptes du groupe pour le troisième trimestre. Dans ces conditions, une recapitalisation du groupe fait partie des scénarios mis sur la table, comme l’a mentionné le gouverneur de la Banque de Belgique, pour sécuriser le refinancement auprès des banques centrales et écarter sur le long terme tout risque d’appel en garantie pour les États. La discussion sur le montant exact de la garantie, sur sa répartition et son articulation avec les garanties existantes pourrait aboutir très prochainement.

Quant aux garanties européennes, elles transitent essentiellement par les mécanismes du Fonds européen de stabilité financière et du mécanisme européen de stabilité.

En ce qui concerne le Crédit immobilier de France, le Gouvernement a pris l’attache de la Commission dès les premiers jours de septembre et a engagé un dialogue avec la Direction générale de la compétitivité, en charge du dossier. Nous en sommes aujourd’hui au stade de la pré-notification, la notification ne pouvant intervenir formellement que lorsque nous disposerons d’une version finalisée et signée des documents demandés par la Commission, en particulier la convention de garantie et le protocole de garantie. L’affaire suit donc son cours.

S’agissant du programme « Épargne », le Gouvernement est très attentif à la position financière de l’État vis-à-vis du Crédit foncier de France pour le paiement des primes d’épargne logement. Il veille ainsi à maintenir un solde équilibré en moyenne auprès du CFF au titre du règlement des primes d’épargne logement dans la limite des disponibilités budgétaires. L’ouverture éventuelle de crédits sur ce programme sera traitée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative et des arbitrages de fin de gestion, qui n’ont pas encore été rendus.

Mme Sas m’a interrogé sur les remboursements de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – TICPE. Il est clair que différentes dépenses fiscales affectent cet impôt, soit sous la forme de remboursements – pour un montant de plus de 900 millions d’euros en 2011, à comparer au produit total de cet impôt : 24 milliards d’euros à partager entre l’État, les régions et les départements –, soit par l’application de taux réduits, par exemple pour le gazole utilisé dans le secteur agricole. Ces dispositifs visent à favoriser les biocarburants ou à préserver certains secteurs comme le transport routier ou les artisans taxis.

La récente conférence environnementale s’est engagée à examiner, dans le cadre d’un groupe de travail pluraliste, les niches fiscales antiécologiques, et les taux réduits de TICPE en font clairement partie. Je confirme par ailleurs les évaluations de l’Inspection générale des finances sur l’impact qu’elles ont sur l’emploi. Cependant, le sujet est délicat, puisque nous avons affaire à des secteurs économiques vulnérables ou sensibles – les agriculteurs – ou exposés à une vive concurrence internationale – les transporteurs. Si nous décidons de faire évoluer la TICPE, il faudra envisager parallèlement des mesures d’accompagnement. La Commission permanente de suivi de la fiscalité environnementale sera en place d’ici à la fin de l’année, et les premiers groupes de travail se tiendront dans la foulée.

Vous m’avez par ailleurs interrogé sur trois séries de contentieux fiscaux qui résultent tous d’un débat de principe sur la compatibilité du droit français avec le droit communautaire. Le contentieux « précomptes mobiliers » porte sur les modalités de taxation des dividendes en cas de distribution par une filiale étrangère.

Le contentieux « OPCVM » – organismes de placement des valeurs mobilières – est différent : le dispositif de retenue à la source sur les dividendes versés à des OPCVM étrangers a été maintenu jusqu’en 2012, le précédent régime ayant été supprimé en 2004. C’est surtout dans ce deuxième cas que la gestion du dossier est contestable. La mise en conformité a pris pas moins de sept ans, ce qui s’est révélé coûteux, de nouvelles réclamations et de nouveaux contentieux étant apparus durant cette période. Le coût total du dossier est estimé à 5 milliards d’euros.

Quant au troisième contentieux, il concerne la taxe sur les opérateurs de communications électroniques créée pour compenser la suppression de la publicité après vingt heures dans l’audiovisuel public. Il se poursuit à l’heure actuelle. Le Gouvernement s’est montré prudent en prévoyant 1,3 milliard d’euros de crédits budgétaires en 2013 au cas où le juge communautaire lui donnerait tort. Cette précaution relève de la bonne gestion et ne préjuge bien évidemment pas du résultat de la procédure.

J’en viens aux questions de M. Bachelay sur le compte d’affectation spécial relatif aux participations de l’État. En tant qu’actionnaire, l’État se doit de veiller à la compétitivité de chacune des entreprises publiques ou à participation publique. Ce n’est pas parce qu’une entreprise est publique qu’elle doit être mal gérée. Ce rôle s’apprécie non seulement au regard des coûts de production, mais aussi à travers la qualité, le positionnement des produits et services, ce qui suppose d’encourager l’innovation par l’investissement, la recherche et le développement, en s’appuyant plus largement sur le tissu des petites et moyennes entreprises et des établissements de taille intermédiaire. C’est un gage de pérennité.

La compétitivité n’est pas seulement un mot à la mode ; c’est un impératif pour réindustrialiser la France. La responsabilité de l’État, à cet égard, est d’assurer dans la durée le succès d’une filière, dans la mesure où elle participe à un écosystème.

L’État peut aussi s’appuyer sur le Fonds stratégique d’investissement – FSI – pour agir au-delà de ses participations directes. Il dispose d’un certain nombre d’outils, dont une implication forte au sein des différents conseils d’administration et de surveillance et la promotion de codes de bonne conduite, comme la charte de la sous-traitance établie par le médiateur de la sous-traitance et dont l’Agence des participations de l’État – APE – encourage la signature pour les entreprises qui relèvent de son périmètre.

J’attire d’ailleurs votre attention sur l’évolution profonde du rôle de l’APE, dotée depuis quelques mois d’un nouveau directeur et qui se voit désormais attribuer un rôle explicite en matière de stratégie industrielle nationale des entreprises qu’elle suit. Dans la continuité des états généraux de l’industrie réunis au printemps 2010, l’État a renforcé pour chacune des participations son implication dans la définition d’une stratégie de développement industriel et économique.

Ainsi, dans le secteur de la défense, il convient de réfléchir aux implications des contraintes budgétaires sur les dépenses d’armement et d’anticiper la reconfiguration d’une industrie européenne encore très fragmentée. De même, s’agissant de l’énergie, nous devons définir la configuration optimale du secteur ainsi que ses limites en termes de synergie avec des activités connexes ; identifier les ressources minières pour garantir l’approvisionnement ; et orienter le positionnement de certaines de nos entreprises dans leurs filières respectives.

De manière générale, l’APE doit poursuivre sa réflexion sur les effets de l’ouverture à la concurrence de secteurs traditionnellement réglementés comme les transports ou la poste. Ces évolutions ont été consacrées par le décret du 31 janvier 2011 qui indique que le commissaire aux participations de l’État anime la politique actionnariale de l’État sous ses aspects économiques, industriels et sociaux. À cet effet, une revue de la politique industrielle des entreprises concernées est menée annuellement.

L’État a toujours agi avec le souci de l’intérêt social de ses entreprises ainsi que de son intérêt patrimonial. C’est par exemple cet intérêt qui a dicté une partie de notre stratégie de négociation dans le cadre de la fusion – qui finalement n’a pas abouti – entre EADS et BAE. Nous étions parvenus à sauvegarder nos intérêts patrimoniaux, mais comme vous le savez, ce n’est pas l’État français qui a pris l’initiative d’interrompre les discussions.

Au total, l’État actionnaire porte maintenant une attention particulière à la contribution des entreprises publiques au développement industriel français.

Le FSI continuera de contribuer au renforcement de nos filières industrielles stratégiques au sein de la Banque publique d’investissement. Le fait de mettre en place une telle banque, regroupant différents métiers, les mettant en synergie, leur donnant une cohérence, augmentant les moyens d’action, ne signifie pas la suppression d’un quelconque de ces métiers. L’APE et le FSI sont d’ailleurs deux instruments complémentaires s’inscrivant dans des horizons différents. L’APE poursuit un objectif de renforcement de la compétitivité de notre économie à long terme. Le suivi des participations passe notamment par une implication active dans les travaux des organes sociaux. Créé par la Caisse des dépôts en décembre 2008, le FSI est un actionnaire de moyen terme en mesure d’adapter le temps de l’investisseur au temps industriel. À la différence de l’État actionnaire, le FSI n’a pas vocation à détenir des participations majoritaires, mais il s’inscrit dans une démarche d’accompagnement des entreprises.

Par ailleurs, l’État est actionnaire du FSI à hauteur de 49 %, et à ce titre il participe activement à sa gouvernance. Cela permet une bonne coordination des investissements. De ce point de vue, la création de la BPI n’a vocation à affaiblir ni l’APE ni le FSI.

M. Baert m’a interrogé sur les investissements d’EDF en Chine. Ce pays représente, pour les trente ans à venir, la moitié du marché nucléaire mondial. Or la France dispose d’un savoir-faire inégalé dans cette filière, qui peut, j’en ai la conviction, contribuer à résorber notre déficit commercial. Les différents ministres qui interviennent dans le champ économique à Bercy, qu’il s’agisse de Mme Bricq ou de moi-même, sont très attentifs à cette question. Les engagements pris par le Président de la République en matière de mix énergétique ne préjugent pas, en effet, de notre capacité exportatrice, qui reste intacte. De même, nous avons décidé de ne pas déployer le second EPR, parce que nous n’en avons pas besoin compte tenu de l’ampleur de notre parc, mais cela ne signifie pas que le premier n’entrera pas en fonctionnement ou qu’il n’est pas exportable. Au contraire, il s’agit d’une technologie extrêmement performante. Des marchés sont d’ailleurs en cours de finalisation, et d’autres restent à conquérir.

Le Conseil de politique nucléaire a confirmé la volonté de la France d’être présente à l’export sur le secteur du nucléaire. À cet égard, la Chine représente, je le répète, un marché stratégique, et je me réjouis que les industriels de notre pays y soient implantés. Deux des quatre EPR actuellement en construction dans le monde sont en Chine. La coopération franco-chinoise est ancienne, puisqu’elle aura trente ans dans quelques jours. Pour autant, et vous avez raison, les entreprises françaises doivent jouer collectif en Chine. Elles ne doivent pas être présentes à n’importe quel prix, en particulier du point de vue des transferts de technologie. Nous devons être attentifs à bien articuler les exportations que nous réalisons à court terme avec les conséquences qu’elles peuvent avoir à long terme sur notre balance commerciale et notre indépendance. Les décisions du Conseil de politique nucléaire du 28 septembre vont clairement dans ce sens.

M. Dominique Baert, président. Je vous remercie, monsieur le ministre, de nous avoir fait le plaisir et l’honneur de votre présence, inhabituelle en cette circonstance, ainsi que pour la clarté et la précision de vos réponses.

Je salue l’arrivée de M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je suis arrivée immédiatement après l’autorisation, par la Commission des finances, de la publication du rapport sur les conséquences de la baisse de la TVA dans la restauration. J’ignorais, monsieur le président, que notre commission pût tenir deux réunions en même temps.

M. Dominique Baert, président. Je l’ignorais également…

Mme Marie-Christine Dalloz. Je me souviens par ailleurs que vous étiez, l’année dernière, rapporteur spécial des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État ». Dans le passé, il revenait donc à l’opposition de travailler sur cette importante mission.

M. Dominique Baert, président. Vous savez très bien, madame la députée, que la désignation des rapporteurs spéciaux a été effectuée de manière consensuelle par le président de la Commission des finances et le rapporteur général. Je ne pense donc pas qu’il y ait là matière à polémique.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce n’était qu’une simple remarque.

Je me suis d’ailleurs reportée au rapport que vous avez publié l’an dernier : vous prévoyiez que les crédits du programme « Charge de la dette et trésorerie de l’État » atteindraient 55,2 milliards d’euros en 2013. Ils seront finalement de 46,9 milliards. Vous aviez donc fait preuve d’un pessimisme pour le moins exacerbé.

Pilotée par la direction générale du Trésor, la mission « Engagements financiers de l’État » est un assemblage de crédits à destinations diverses, mais qui ont tous pour objet de couvrir différents passifs de l’État, et de lui permettre d’honorer ses engagements financiers en toutes circonstances, au meilleur coût pour le contribuable et dans des conditions de maîtrise maximale des risques financiers et techniques.

C’est cette mission qui recouvre la charge de la dette, qui pourrait s’établir selon le Gouvernement à un niveau inférieur à 46,7 milliards d’euros, soit un niveau inférieur de plus de 2,1 milliards d’euros à celui inscrit dans la loi de finances initiale, en raison du niveau très faible des taux d’intérêts.

Pour l’année 2013, la charge de la dette progresserait à 46,9 milliards d’euros, puis enregistrerait une progression plus soutenue en 2014 et 2015.

Cette prévision tient compte de la baisse des taux d’intérêt enregistrée au cours des derniers mois. Mais il convient de rester prudent, puisque le scénario retenu par le Gouvernement repose sur l’hypothèse d’un retour progressif relativement rapide à des conditions normales de marché au cours des prochaines années, ce qui se traduirait immanquablement par une remontée des taux.

La gestion de la dette répond à l’impératif de couvrir le besoin de financement de l’État tout en minimisant, sur la durée, la charge de la dette pour le contribuable. La mise en œuvre de cet objectif se décline en deux volets : d’une part, la gestion de la dette obligataire, qui porte essentiellement sur la politique d’émission primaire et, d’autre part, la gestion du portefeuille de produits dérivés.

Les taux à l’émission de la dette souveraine française enregistrés au cours des derniers mois ont été favorables. À la mi-septembre 2012, le taux moyen pondéré à l’émission des titres à court terme s’est établi à 0,11 % et celui des titres à moyen et long termes à 1,99 %, contre respectivement 0,81 % et 2,80 % en 2011. Ces taux historiquement bas sont dus essentiellement à la crédibilité de la politique budgétaire menée par le précédent gouvernement, qui a permis à la France d’obtenir la confiance des investisseurs internationaux à la recherche de titres de qualité pour investir leurs liquidités, ainsi qu’à la politique accommodante de la BCE et à sa récente annonce d’un programme d’« opérations monétaires en prise ferme ».

D’après les prévisions du Gouvernement, le taux à dix ans s’établirait en moyenne à 2,9 % sur l’année 2013 et continuerait sa progression de 25 points de base chaque année pour s’établir à 3,65 % en moyenne sur l’année 2015.

Je remarque tout d’abord que la trajectoire fixée pour le redressement des finances publiques est une obligation intangible pour le Gouvernement. C’est d’ailleurs à cette condition que le groupe UMP a accepté de voter en faveur du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance.

J’en viens à mes questions. En 2011, la dette souveraine de la France était détenue pour un tiers par des résidents nationaux, pour un autre tiers par des ressortissants de la zone euro et pour un dernier tiers par des non-résidents situés hors de la zone euro. Quelle est la répartition actuelle ?

Tout le monde s’accorde à juger que le Gouvernement surestime les perspectives de croissance en fixant un taux de 0,8 % pour 2013. De même, il est inconcevable que la croissance atteigne 2 % en 2014 et 2015. Il faut faire preuve d’un plus grand sérieux budgétaire. Quel est votre sentiment sur la sensibilité de la dette au choc des taux d’intérêts et à l’inflation ? Vous le savez, le ratio de la dette augmente mécaniquement quand le PIB diminue : c’est ce que l’on appelle l’effet « dénominateur ».

En conclusion, je vous appelle instamment à engager les réformes de structure nécessaires pour garantir la bonne gestion des finances et assurer l’efficacité de la dépense publique. Le projet de loi de finances pour 2013 ne s’attaque pas suffisamment aux dépenses ; c’est une réalité à laquelle vous serez à nouveau confrontés dans l’avenir. Il est donc temps d’assumer vos responsabilités et d’aller plus loin dans la voie de leur réduction.

M. Éric Alauzet. Je concentrerai mon propos sur le Crédit immobilier de France, dont la situation complexe a mobilisé beaucoup d’énergie. L’État a décidé d’apporter sa garantie en l’assortissant d’une annonce d’extinction. Il me semble nécessaire de reculer cette échéance de l’extinction pour laisser encore une chance à l’établissement.

On nous dit que 85 % de l’activité du Crédit immobilier de France pourraient être assumés par des banques classiques, mais on peut en douter, sachant que plus de 50 % des prêts sont accordés sans aucun apport et que l’apport moyen n’est que de 3 % pour l’ensemble des personnes s’adressant au CIF.

Par ailleurs, lorsque, pour se conformer à la demande de l’autorité de contrôle prudentiel – l’ACP – le CIF a dû appliquer les règles prudentielles – 20 % d’apport personnel, une durée du crédit n’excédant pas vingt ans, 33 % d’effort personnel – l’activité de la banque s’est effondrée. Cela prouve que bien plus de 15 % des clients du CIF appartiennent à des publics en difficulté.

En dépit de ce fait, le Crédit immobilier de France a toujours su entourer ses prêts de garanties qui les préservaient de l’insécurité. Il vérifie que ces personnes n’ont pas connu de graves incidents de paiement pendant les trois années précédentes ; il mène un long travail de pédagogie auprès d’elles pour s’assurer qu’elles sont bien conscientes de leur engagement. Enfin, la durée de ces prêts peut aller jusqu’à vingt-cinq, voire trente ans. Moyennant toutes ces précautions, le taux d’échec est extrêmement faible et les risques minimes.

Via les sociétés anonymes coopératives d’intérêt collectif pour l’accession à la propriété, les SACICAP, le CIF joue en outre un rôle décisif en matière de résorption de l’habitat indigne. Sans lui, je ne vois pas comment des programmes tels qu’ « Habiter mieux »pourraient être menés à bien. Ce rôle est d’autant plus important aujourd’hui qu’il est à craindre que le public visé ne fasse que croître dans les prochaines années sous l’effet d’une crise dont chacun sait qu’elle ne va pas se résorber rapidement.

Pour toutes ces raisons, le Crédit immobilier de France semble irremplaçable. Il serait bon qu’on se donne encore un peu le temps d’aller au bout de la réflexion, plutôt que de décider de son extinction dès maintenant.

M. André Chassaigne. Ma première question porte sur la gestion de la dette publique. Plusieurs orateurs ont souligné que la France a bénéficié cette année de taux d’emprunt historiquement bas sur les échéances de moyen et long terme. Elle a ainsi pu, en septembre, emprunter sur dix ans à 2,21 %, et elle profite depuis juillet de taux négatifs sur le court terme. Il faut toutefois remarquer que la moitié des créanciers de la France pour la dette levée en 2012 sont en Asie et au Moyen-Orient, contre à peine un tiers pour la zone euro. Philippe Mills, directeur général de l’Agence France Trésor, soulignait récemment ne pas constater de phénomène de redomestication de la dette française, qui reste très diversifiée. Fin juin 2012, les détenteurs de cette dette sont encore majoritairement hors de France pour ce qui est du stock, à hauteur de 62,7 %. Le Gouvernement compte-t-il mettre en place des outils susceptibles de domestiquer la dette publique et garantir ainsi une proximité accrue ? Des initiatives pourraient-elles être prises en ce sens, notamment dans le cadre de la réforme bancaire ? On pourrait, en outre, ouvrir aux particuliers la possibilité de souscrire des obligations d’État, comme cela a été fait en Italie : cela a permis au gouvernement italien de lever 18 milliards d’euros auprès des épargnants italiens.

Ma deuxième question porte sur les choix du Gouvernement en matière d’orientation de l’épargne vers le financement des politiques publiques. Fin septembre, l’encours du Livret A, qui sert à financer les logements sociaux, s’élevait à 232,6 milliards d’euros au total. Pour favoriser la construction de tels logements, le plafond du Livret A a été relevé de 25 % le 1er octobre, un second relèvement de 25 % devant intervenir d’ici à la fin de l’année. On estime que le doublement du plafond du Livret de développement durable et du Livret A devrait rapporter entre 30 et 55 milliards d’euros les deux prochaines années. Cette épargne réglementée, dont l’encours dépasse 300 milliards d’euros, est un outil majeur de financement de l’économie

Or actuellement, sur 100 euros collectés, seuls 65 sont conservés et gérés, pour le compte de l’État, par la Caisse des dépôts et des consignations ; les 35 euros restants sont conservés par les banques, soit 100 milliards d’euros en 2011, que celles-ci prétendent consacrer au financement des PME. Nous sommes pour notre part favorables à ce que l’État conserve une part supérieure de la collecte et permette ainsi au Livret A de financer autre chose que le logement social. La mise en place d’une Banque publique d’investissement nous semble renforcer la pertinence d’une telle option. Quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière ?

Mon troisième point a trait à la dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité, le MES. Le projet de loi de finances nous propose d’autoriser le versement, en 2013, de deux des cinq tranches de la quote-part française de souscription au capital du Mécanisme européen de stabilité, soit une contribution d’un peu plus de 6,5 milliards d’euros l’an prochain. Comme vous le savez, nous doutons de la pertinence de ce type d’aides, destinées à pallier le désengagement des banques, et dont la mise en œuvre est conditionnée par l’adoption de politiques d’austérité qui n’ont en rien assuré une meilleure cohésion de la zone euro : la faiblesse des taux d’emprunt de la France porte à sa manière témoignage de la persistance et de l’aggravation des déséquilibres entre le nord et le sud de l’Europe.

Nous avions proposé l’an passé, conjointement avec nos collègues allemands de Die Linke, la création d’un fonds européen de développement ayant le statut de banque, afin qu’il puisse se financer auprès de la BCE. Il s’agirait de couper court à la spéculation sur les dettes des États en permettant aux plus fragiles de ne plus dépendre des marchés financiers pour le financement de leurs investissements. Que pensez-vous de cette proposition ?

Je consacrerai la dernière partie de mon exposé au Crédit immobilier de France. Jusqu’à sa dégradation par Moody’s cet été, la santé du CIF, banque sans dépôt, était bonne, avec un résultat excédentaire de 78 millions d’euros affiché pour 2011 et près de 2,4 milliards d’euros de fonds propres. Son modèle économique étant complètement dépendant des marchés, la dégradation de sa note par Moody’s a coupé son seul accès au financement.

Pour Bercy, la disparition de cet organisme de crédit serait désormais inéluctable. Sans parler des 2 500 emplois qui sont ainsi menacés, l’extinction programmée de cet organisme de crédit ferait peser une lourde menace sur le financement de l’accession des plus modestes à la propriété – le CIF assure 15 % des crédits d’accession sociale.

Pour notre part, nous pensons comme Bernard Sevez, l’ancien président du CIF, que « seule la constitution d’un outil public garantira la continuité de financement de l’accession sociale de manière pérenne ». Des banques se disent aujourd’hui intéressées par la reprise d’une partie du réseau du Crédit immobilier de France. La solution d’une reprise du CIF par l’État ou la Caisse des dépôts et des consignations ne vous semble-t-elle pas préférable, quitte à engager une négociation avec Bruxelles en ce sens ?

M. Jean-Louis Dumont. Laissez-moi vous raconter une matinée dans la vie d’un député d’une circonscription rurale.

Il rencontre d’abord un maire, à qui aucune banque, même pas du réseau mutualiste et coopératif, n’accepte de prêter les 300 000 euros qui lui font défaut pour boucler le plan d’assainissement de sa commune. Pour se remonter le moral, notre député décide de rendre visite au chef d’une entreprise d’une trentaine de salariés, dont le chiffre d’affaires est en augmentation constante, et qui n’a pas de dettes, sinon quelques versements sociaux en retard. Après avoir injecté beaucoup d’argent personnel, le chef d’entreprise s’est tourné vers le représentant de l’État dans la circonscription pour qu’il lui indique le moyen d’obtenir une ligne de trésorerie ou une aide. La seule réponse lui est parvenue sous la forme d’un contrôle fiscal. Peut-être choisira-t-il de s’exiler au Portugal, où il est attendu !

Notre député rencontre enfin un artisan, qui veut reprendre une très petite entreprise en redressement. Ce n’est pas tant l’argent qui lui manque, mais il faudrait que certains organismes dépendants de l’État fassent un effort : or il n’en est pas question.

Voilà où en est notre économie. Alors que les intérêts versés par les collectivités locales qui ont souscrit des emprunts toxiques continuent à augmenter, on attend toujours la banque qui va aider l’investissement, la création d’emplois, l’entreprise. On nous promet qu’elle arrive, mais avec une lenteur dont on espère qu’elle n’est que le signe de sa majesté. Pendant ce temps, des salariés perdent leur emploi, des entreprises sont contraintes de réduire la voilure, alors qu’elles œuvrent dans des secteurs qui ne sont pas susceptibles de délocalisations : travaux publics, bâtiment, vie quotidienne.

On s’interrogeait sur l’existence d’une volonté politique lors de la faillite de Dexia : cette question se pose aussi dans le cas du Crédit immobilier de France. Il faut rappeler que le Conseil d’État avait donné raison au CIF quand celui-ci contestait le renforcement par l’ACP de ses ratios de solvabilité. Sans qu’elle ait été précédée de la moindre alerte, d’une mise en demeure, de discussions, on apprend début septembre la décision d’extinction prise, sous couverture des ministres, par l’administration, et dont on nous dit qu’elle est désormais irréversible.

Aujourd’hui, c’est la possibilité pour des populations fragiles d’accéder à la propriété qu’on balaie d’un revers de main. D’où notre colère, monsieur le président. Nous ne pouvons pas accepter que l’État actionnaire n’exerce pas ses droits. Puisque, dans sa sagesse, le Conseil constitutionnel a censuré la loi sur le logement social, nous débattrons peut-être à nouveau de la volonté du Gouvernement de mettre en place des outils pour assurer la construction de 150 000 logements sociaux. Il y a aujourd’hui des terrains disponibles : il suffit de les concéder via des baux emphytéotiques, comme le faisaient certaines collectivités locales il y a cinquante ans. Une nouvelle politique peut se servir des outils qui ont déjà fait la preuve de leur utilité sur le plan économique et social.

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Madame Dalloz, vous attribuez le bas niveau des taux auxquels nous empruntons à la politique budgétaire du précédent gouvernement : c’est pourtant sous le gouvernement précédent que la France a perdu son triple A. Ce n’était pas la marque d’une grande confiance des agences de notation à l’égard des choix budgétaires opérés à l’époque. Nous avons été obligés, en loi de finances rectificative, de franchir une marge de 0,5 point de PIB pour respecter une trajectoire de réduction des déficits conforme à l’engagement pris par le précédent Président de la République à l’égard de l’Union européenne. Nous réalisons aujourd’hui, fait salué par l’ensemble des observateurs, une marge supplémentaire de 1,5 point de PIB en loi de finances initiale, ce qui représente un effort significatif.

Si certains conjoncturistes estiment que la croissance sera en deçà de l’hypothèse de 0,8 point sur laquelle le Gouvernement a fondé ses prévisions de recettes fiscales, d’autres prévoient une croissance supérieure. Je note avec satisfaction que M. Mariton a reconnu notre sincérité dans ce domaine : cela démontre qu’au sein même de l’UMP on reconnaît que les estimations du Gouvernement ne sont pas totalement absurdes, dès lors qu’elles sont assorties d’une stratégie de croissance. Celle-ci s’appuiera notamment sur une politique fiscale favorisant l’innovation, notamment en étendant le bénéfice du crédit impôt recherche aux PME, sur une politique fiscale plus favorable à l’investissement et moins à la distribution de dividendes. Ce sont ces choix politiques et fiscaux qui nous permettent de considérer une croissance de 0,8 point comme un objectif réaliste.

La dette française se répartit selon une clé des trois tiers entre résidents et non-résidents : un tiers est détenu par des résidents, les deux autres par des non-résidents, dont un tiers par des non-résidents n’appartenant pas à la zone euro.

Vous avez interrogé le Gouvernement sur la sensibilité de nos prévisions budgétaires à l’inflation. Nous estimons aujourd’hui que si l’inflation varie de 1 % par rapport à nos prévisions, la charge de la dette variera de 1,5 milliard d’euros, et nous avons intégré cette estimation à nos prévisions.

Les éléments de réponse que Pierre Moscovici vous a apportés à propos du CIF ont suscité des commentaires de la part de plusieurs d’entre vous : je vais essayer d’y répondre de manière globale.

L’extinction du CIF n’est pas un choix, c’est une obligation. La réalité c’est que le CIF n’est plus viable dès lors qu’un adossement n’est pas possible.

Vous avez évoqué la nécessité de trouver des organismes qui se substituent au CIF dans l’exercice de ses missions, notamment en direction des ménages les plus modestes. Il faut rappeler que le CIF n’était pas le seul organisme à faire crédit aux ménages modestes : c’est le cas aussi de la Banque postale ou du Crédit foncier. L’État souhaite que la Banque postale puisse développer son offre dans son domaine. De même, le Gouvernement souhaite pérenniser les missions locales que mènent les SACICAP au côté de l’Agence nationale de l’amélioration de l’habitat, l’ANAH.

Vos propositions en matière d’orientation de l’épargne ne manquent pas d’intérêt, monsieur Chassaigne. Les conclusions du rapport Duquesne pour réformer l’épargne réglementée sont tout aussi intéressantes, notamment quant à l’utilisation des crédits décentralisés. Je suis particulièrement intéressé par la proposition d’orienter ces crédits vers le financement des stratégies de transition écologique et de l’économie sociale et solidaire, ce vaste gisement d’emplois non délocalisables. Il est clair que les orientations du Gouvernement s’inspireront largement des conclusions de ce rapport.

Que des non-résidents détiennent de la dette française n’est pas mauvais en soi, monsieur Chassaigne : c’est au contraire un signe de confiance à l’égard de la France. Cette diversification est par ailleurs un gage d’équilibre. La « redomestication » de la dette espagnole, c’est-à-dire son rachat par les banques espagnoles, est a contrario un signe de faiblesse aux yeux de beaucoup. Les investisseurs français restent intéressés par la dette, mais ils doivent aussi financer des acteurs privés français : nous ne pouvons pas avoir pour objectif de siphonner l’épargne des Français pour financer la dette publique. Il est vrai que l’Italie a levé 18 milliards d’euros auprès des particuliers, mais au taux très élevé de 2,5 % hors inflation, alors que la France empruntait la même semaine au taux de moins 0,04 % hors inflation. C’est parce qu’elle avait un programme d’émission en forte hausse par rapport à ses prévisions que l’Italie a accepté de payer un prix élevé : nous n’avons pas ce problème. En tout état de cause, les épargnants français détiennent de la dette, via leur livret A ou leur assurance-vie, même si la question de l’utilisation de cette épargne se pose aujourd’hui.

Le MES, inauguré le 8 octobre, permettra de porter assistance aux États sous tension financière. La France a apporté 6,5 milliards de capital cette année ; elle apportera en tout 16,3 des 80 milliards d’euros en provenance de l’ensemble des États européens. Ce capital permettra au MES de soutenir les États en difficulté à hauteur de 500 milliards d’euros, afin de les mettre à l’abri de la pression des marchés financiers. Il s’agit de faire en sorte que les citoyens ne soient pas les seuls à supporter, par le sacrifice de leur modèle social, les conséquences d’une crise dans laquelle ils n’ont aucune responsabilité. En soustrayant les États à la dépendance à l’égard des marchés financiers et des agences de notation, le MES garantit que l’Europe ne se retrouvera pas dépourvue de toute protection sociale au terme de cette crise.

Les conditions de politique économique dont l’aide est assortie sont adaptées au type d’assistance déployée. Ainsi, l’aide octroyée à l’Espagne pour lui permettre de renforcer son secteur bancaire n’est conditionnée qu’à la réforme de celui-ci. La Banque centrale européenne a son propre mandat, fixé par les traités, et participe activement à la lutte contre les tensions en zone euro. L’annonce par M. Draghi de son nouveau programme d’achat de dettes marque d’ailleurs un changement de doctrine de la BCE dont ne peuvent que se réjouir ceux qui, comme vous, appellent depuis longtemps celle-ci à jouer véritablement son rôle de banque centrale. Désormais, elle ne devrait plus être « la seule banque clandestine au monde », pour reprendre les mots de Mme Kirchner.

S’agissant du financement des collectivités territoriales, vous avez décrit, monsieur Dumont, une situation que beaucoup de parlementaires, d’élus locaux et d’acteurs économiques de terrain connaissent. Le sort de Dexia a pesé lourd dans cette situation. L’État a pris des mesures fortes, en dégageant des enveloppes exceptionnelles à partir du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 5 milliards d’euros.

De plus, comme l’a indiqué Pierre Moscovici, le Gouvernement travaille activement pour que la Commission européenne donne son feu vert au lancement de la banque des collectivités locales créée à partir de Dexia Municipal Agency (DMA). Celle-ci doit être opérationnelle – c’est notre objectif – dès 2013. Il est cependant nécessaire de respecter des délais dont nous n’avons pas, à nous seuls, la maîtrise.

S’agissant du CIF, de nombreuses alertes ont été émises quant à sa situation. Comme l’a indiqué le directeur général du Trésor, les 500 millions d’euros prélevés en 2006 n’ont pas eu d’impact sur sa liquidité. C’est non pas la solvabilité du CIF ou le niveau de ses fonds propres qui est en cause, mais la rentabilité et la viabilité de son activité de crédit immobilier : le CIF était systématiquement obligé de se refinancer sur les marchés. Le Gouvernement – Pierre Moscovici le rappelle régulièrement – est mobilisé pour trouver une réponse à la question de l’accession sociale à la propriété. La Banque postale, notamment, va développer une offre de prêt à l’accession sociale se substituant à celle du CIF.

Ce que vous avez dit à propos des baux emphytéotiques est exact, monsieur Dumont. Cependant, les collectivités territoriales ont toujours la possibilité de recourir aux baux emphytéotiques administratifs (BEA) pour favoriser la construction de logements. Le Gouvernement le souhaite et c’est le sens du projet de loi qu’il a présenté…

M. Jean-Louis Dumont. Rien ne figurait à ce sujet dans le projet initial ! C’est ce que nous reprochons au Gouvernement. Ces dispositions ont été introduites grâce au Parlement !

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Je m’en réjouis : les propositions du Gouvernement – qui n’a pas le monopole des bonnes idées – s’enrichissent grâce à cette co-production de la norme avec le Parlement.

Quoi qu’il en soit, il est dommage que le Conseil constitutionnel ait censuré la loi. En outre, le dispositif proposé par le Gouvernement invite à pratiquer une décote. Nous espérons que ces mesures permettront d’atteindre nos objectifs en matière de logement.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de MM. Pierre Moscovici, Ministre de l’Économie et des finances, et Benoît Hamon, Ministre délégué auprès du ministre de l'Économie et des finances, chargé de l'Économie sociale et solidaire et de la consommation, lors de la commission élargie (voir le compte rendu de la réunion du 30 octobre 2012), sur la mission Engagements financiers de l’État, la commission des Finances examine les crédits de cette mission.

M. Dominique Baert, Président. Après l’audition des ministres, nous allons maintenant procéder à l’examen des crédits et des articles rattachés. Monsieur le Rapporteur spécial de la mission Engagements financiers de l’État, quelle est votre position concernant les crédits de la mission ?

M. Dominique Lefebvre, Rapporteur spécial. Suite aux explications des ministres, j’émets un avis favorable.

Suivant l’avis favorable du Rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de la mission Engagements financiers de l’État.

Article 65

Participation française à l’augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement

Texte du projet de loi :

Le ministre chargé de l’économie est autorisé à souscrire avant le 31 mars 2013 à une augmentation de capital en numéraire entièrement libérée de la Banque européenne d’investissement d’un montant maximum de 1 617 003 000 euros. Le versement correspondant interviendra dans sa totalité avant le 31 mars 2013.

Exposé des motifs :

Conformément au Pacte pour la croissance et l’emploi, initié par la France et adopté au Conseil européen des 28 et 29 juin 2012, le présent article vise à permettre une augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement (BEI), banque de prêts à long terme de l’Union européenne.

Sa mission est d’accorder des prêts et des garanties contribuant au développement équilibré et sans heurt du marché commun dans l’intérêt de l’Union. Dans ce but, la BEI emprunte d’importants volumes de fonds sur les marchés des capitaux et les prête à des conditions favorables pour soutenir les projets qui concourent à la réalisation des objectifs de l’Union européenne.

Son capital, souscrit par les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne, s’élève aujourd’hui à 232,4 Md€. L’Allemagne, la France, l’Italie et le Royaume-Uni en détiennent chacun 16,17 %.

Depuis la création de la Banque, il a été procédé à quatorze augmentations de capital. Les dernières augmentations ont été réalisées par incorporation des réserves et souscription des Etats nouvellement membres de l’Union. La part du capital versé est actuellement statutairement fixée à 5 % du capital souscrit.

La présente augmentation de capital vise à donner à la BEI les moyens d’augmenter ses financements au sein de l’Union européenne tout en préservant ses équilibres financiers ainsi que la qualité de sa signature. Le surplus de financements octroyés par la BEI grâce à cette augmentation de capital pourra notamment bénéficier aux Etats membres les plus fragilisés par de fortes tensions économiques et sociales.

La présente augmentation, à laquelle la France participe à hauteur de 1,6 Md€, s’élève à 10 Md€, ce qui portera le capital de la banque à 242,4 Md€.

Formellement, la décision d’augmentation du capital a été actée par le conseil d’administration de la Banque le 24 juillet 2012. Cet article autorise le ministre de l’économie et des finances, gouverneur de la Banque pour la France, à donner son accord au conseil des gouverneurs pour procéder à cette augmentation.

Observations et décision de la Commission :

Conformément au Pacte pour la croissance et l’emploi, initié par la France et adopté par le Conseil européen des 28 et 29 juin 2012, le présent article vise à permettre une augmentation de 10 milliards d’euros du capital de la Banque européenne d’investissement (BEI), à laquelle la France participe à hauteur de 1,6 milliard d’euros.

I.– LA BANQUE EUROPÉENNE D’INVESTISSEMENT (BEI)

A.– LE RÔLE DE LA BEI

Instituée par le Traité de Rome en 1958, la BEI représente les intérêts des États membres et travaille en étroite collaboration avec les autres institutions européennes pour mettre en œuvre la politique de l'Union européenne (UE), par l’octroi de prêts et garanties aux entreprises. Ses statuts sont établis par le protocole n° 5 annexé au Traité sur l’Union Européenne (TUE) et au Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) modifiés par la décision du Conseil des gouverneurs de la BEI du 30 mars 2009 en vue d’augmenter le capital de la structure. Cette augmentation de capital, la dernière à ce jour, a été réalisée le 1er avril 2009.

Dotée de la personnalité juridique, de l’autonomie financière et d’une structure décisionnelle propre, son capital s’élève aujourd’hui à 232,4 milliards d’euros. Il est constitué de la somme des participations des États membres à proportion du poids de leur PIB national relativement à celui de l’Union européenne (à l’occasion des souscriptions initiales des États membres lors de la fondation ou de leur adhésion et des augmentations successives intervenues depuis, ainsi que des résultats de la banque). Le capital versé est statutairement fixé à 5 % du capital souscrit.

La BEI bénéficie de la notation AAA et ses fonds propres sont régulièrement consolidés par ses résultats annuels (de l’ordre de 2 milliards d’euros par an), placés en réserves. Elle a engagé environ 61 milliards d’euros de prêts nouveaux en 2011, dont 53,8 milliards d’euros au sein de l’Union européenne (4,9 milliards d’euros en France). Son résultat net, intégralement versé en réserves, s’est élevé à 2,3 milliards d’euros.

B.– UNE MESURE PHARE PRÉVUE PAR LE PACTE POUR LA CROISSANCE ET L’EMPLOI

L’augmentation à hauteur de 10 milliards d’euros du capital de la BEI est l’une des principales mesures du Pacte pour la croissance et l’emploi adopté lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012 à l’initiative de la France, venant compléter le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance.

Pour être adoptée, cette disposition doit au préalable être approuvée par le Conseil des gouverneurs (auquel siègent les ministres, et principalement les ministres des finances) sur proposition du Conseil d’administration.

En l’espèce, une proposition d’augmentation de la participation des États membres (38) au capital de la BEI, avant le 31 décembre 2013, a été déposée lors du Conseil d’administration du 24 juillet 2012. Cette opération doit être actée par le Conseil des gouverneurs de la banque, composé des ministres des finances, avant le 31 décembre 2012.

Le présent article permettra donc d’honorer l’engagement souhaité et pris par la France d’augmenter sa participation au capital de la banque à hauteur de 1,6 milliard d’euros.

II.– VERS UNE HAUSSE DES CAPACITÉS DE PRÊT DE LA BEI POUR SOUTENIR LES ENTREPRISES ET L’EMPLOI

A.– UNE AUGMENTATION DE CAPITAL ENTIÈREMENT LIBÉRÉE

Le présent article vise à autoriser le ministre chargé de l’économie à souscrire à une augmentation de capital en numéraire entièrement libérée de la BEI d’un montant maximum de 1 617 003 000 euros. Le versement correspondant interviendra dans sa totalité avant le 31 mars 2013.

À l’issue de cette augmentation de capital, la part du capital versé s’élèvera ainsi à 8,919 % (après arrondi) du capital souscrit ce qui nécessitera une modification des statuts de la banque qui prévoient que ce chiffre est fixé à 5 %.

En vertu du présent article, la France donne son accord au renforcement des fonds propres de la BEI et à l’augmentation de 60 milliards d’euros de sa capacité totale de prêt, ce qui permettrait de libérer jusqu'à 180 milliards d’euros d'investissements supplémentaires, à répartir dans l'ensemble de l'Union européenne.

Cette opération vise à donner à la BEI les moyens d’augmenter ses financements au sein de l’Union européenne tout en préservant ses équilibres financiers ainsi que la qualité de sa signature. Le surplus de financements octroyés par la banque grâce à l’augmentation de capital pourra notamment bénéficier aux États membres les plus fragilisés par les tensions économiques et sociales.

B.– UNE MESURE INDISPENSABLE POUR STIMULER LA CROISSANCE ET L’EMPLOI

Les 60 milliards d’euros de capacité de prêt supplémentaire viendront s’ajouter aux 50 milliards d’euros de prêts que la Banque prévoit déjà d’accorder chaque année.

Ces prêts bénéficieront aux projets économiquement viables dans les années à venir dans le domaine de l’innovation, des PME, des énergies propres et des infrastructures modernes, secteurs dans lesquels l’accès au financement est des plus difficiles et où l’intervention de la Banque aura pour effet de débloquer des financements supplémentaires du secteur privé qui stimuleront la croissance et la création d’emplois. Les nouveaux financements iront à des régions et des secteurs de l’ensemble des États membres.

Selon Bernard Cazeneuve, ministre chargé des Affaires européennes, l'augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) à hauteur de 10 milliards d'euros devrait permettre à la France de bénéficier de prêts supplémentaires à hauteur de 5 à 6 milliards d'euros en 2013 et 2014.

C.– CONSÉQUENCES BUDGÉTAIRES EN 2013

L’augmentation du capital prévue par le présent article nécessite une ouverture de crédits budgétaires en 2013, en autorisations d’engagement et crédits de paiement, d’un montant de 1 617 003 000 euros sur un programme dédié de la mission Engagements financiers de l’État.

S’agissant d’une augmentation de capital, cette dépense supplémentaire n’aura aucun impact sur le calcul du déficit au sens du Traité de Maastricht.

Le suivi général de l’activité de la BEI permettra de mesurer au fil de l’eau l’impact effectif de l’augmentation de capital. Des comptes rendus portant sur les financements additionnels mis en œuvre au moyen des ressources apportées par cette augmentation de capital seront produits.

L’ouverture de crédits proposée par ailleurs dans le présent projet de loi est documentée par un projet annuel de performances. Le rapport annuel de performances, qui sera transmis en 2014 au Parlement avec le projet de loi de règlement afférent à l’exercice 2013, sera l’occasion de dresser un premier bilan des effets de la présente disposition.

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La Commission examine ensuite l’article 65, rattaché à cette mission.

M. Dominique Baert, Président. Nous devons désormais procéder à l’examen des articles rattachés à la mission Engagements financiers de l’État. Monsieur le Rapporteur spécial, quelle est votre position concernant l’article 65 relatif à la participation française au capital de la Banque européenne d’investissement ?

M. Dominique Lefebvre, Rapporteur spécial. Avis favorable, il s’agit de respecter les engagements pris par le Président de la République à l’occasion du sommet européen des 28 et 29 juin 2012 pour relancer la croissance en Europe. L’augmentation du capital de la BEI devrait ainsi lui permettre de disposer d’une capacité de prêt supplémentaire de 60 milliards d’euros ce qui permettrait de libérer jusqu'à 180 milliards d’euros d'investissements supplémentaires, à répartir dans l'ensemble de l'Union européenne.

Suivant l’avis favorable du Rapporteur spécial, la commission adopte l’article 65.

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Article 66

Octroi de la garantie de l’État au groupe Crédit immobilier de France

Texte du projet de loi :

I.– Le ministre chargé de l’économie est autorisé à accorder à titre onéreux la garantie de l’État :

a) Aux créances, en principal, intérêt, intérêts de retard, frais et accessoires, de la société de crédit foncier « CIF Euromortgage » à l’égard de la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France (3 CIF), résultant du placement, par « CIF Euromortgage », de sa trésorerie auprès de la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France et investie sous la forme de titres, valeurs ou dépôts - y compris au moyen de la conclusion de prêts garantis ou d'opérations de pension - émis ou, selon le cas, reçus par la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France, à titre de valeurs de remplacement régies par les articles L. 515–17 et R. 515–7 du code monétaire et financier ; et de tout contrat de couverture de taux conclu entre la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France et « CIF Euromortgage », en ce compris, le cas échéant, toutes créances résultant du dépôt auprès de la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France de tous fonds initialement remis en propriété par Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France (en qualité de contrepartie de contrat d’échange) à « CIF Euromortgage » à titre de garantie de ses obligations découlant desdits contrats de couverture et en application de leurs termes ;

b) Aux créances, en principal, intérêt, intérêts de retard, frais et accessoires, du fonds commun de titrisation « CIF Assets »  à l’égard de la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France, résultant du placement, par « CIF Assets », de sa trésorerie auprès de la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France (y compris le fonds de réserve et la réserve spéciale de recouvrement) et de tout contrat de couverture de taux conclu entre la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France et « CIF Assets », en ce compris, le cas échéant, toutes créances résultant du dépôt auprès de la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France de tous fonds initialement remis en propriété par la Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France (en qualité de contrepartie de contrat d’échange) à « CIF Assets » à titre de garantie de ses obligations découlant desdits contrats de couverture et en application de leurs termes ;

c) Aux titres financiers chirographaires, en principal, intérêt, intérêts de retard, frais et accessoires, émis par 3 CIF ayant la nature de titres de créance.

II.– La garantie de l'État mentionnée aux a et b du I est accordée pour un encours total maximal en principal de 12 milliards d’euros.

La garantie de l'État mentionnée au c du I est accordée pour un encours total maximal en principal de 16 milliards d’euros.

III.– Un commissaire du Gouvernement assiste aux réunions du conseil d’administration du Crédit Immobilier de France Développement pendant la période d’octroi des garanties mentionnées aux I et II.

IV.– Une convention entre le ministre chargé de l’économie et chacune des sociétés concernées fixe notamment les modalités selon lesquelles chacune des garanties mentionnées aux I et II pourra être appelée, les contreparties de la garantie, sa durée, ses conditions tarifaires ainsi que les éventuelles sûretés conférées à l'État en contrepartie de la garantie.

V.– Le Gouvernement rend compte chaque année au Parlement de la mise en œuvre du présent article.

Exposé des motifs :

Le présent article vise à autoriser le ministre de l’économie et des finances à accorder la garantie de l’État au groupe Crédit Immobilier de France.

Ce groupe bancaire, dont le modèle de refinancement exclusivement tourné vers le marché constitue une vulnérabilité portant atteinte à sa viabilité dans un contexte de crise, se trouve en graves difficultés financières depuis l’annonce le 28 août 2012 par l’agence Moody’s de sa décision de mise sous revue avec perspective négative de la centrale de trésorerie du groupe, dénommée Caisse centrale du crédit immobilier de France (3CIF).

Cette décision a cristallisé brutalement ces difficultés nécessitant une intervention de l’État. Afin de prévenir un défaut désordonné et ses conséquences, l’État a dû intervenir en annonçant son intention d’octroyer sa garantie au groupe CIF.

Les deux composantes de la garantie sont décrites au I de l’article :

– la première composante, qui prend la forme d’une garantie sur les expositions sous forme de dépôts des entités CIF euro et CIF Assets sur 3CIF, vise à permettre la circulation de la liquidité au sein du groupe CIF. Ces expositions découlent de la centralisation de la trésorerie du groupe CIF au sein de 3CIF. La dégradation de 3CIF entraîne l’obligation pour CIF euro et CIF Assets de retirer leurs dépôts, puisque ceux-ci doivent par contrat être déposés auprès d’un établissement bénéficiant du deuxième meilleur échelon de qualité de crédit. Un tel scénario aurait entraîné un besoin net supplémentaire de liquidité pour le CIF, puisque ces dépôts financent les actifs de 3CIF. Ces dépots sont susceptibles d’augmenter du fait de l’existence de contrat d’échange entre CIF Euromortgage et 3CIF ;

– la seconde composante, qui est une garantie sur de nouvelles émissions non collatéralisées à réaliser par 3CIF, vise à assurer le portage des actifs pendant la durée nécessaire à leur amortissement et à couvrir le besoin de liquidité qui résulte de la transformation de maturité du groupe CIF.

Les plafonds proposés pour les deux composantes de la garantie, fixés au II du présent article à respectivement 12 et 16 Md€, résultent de projection des besoins de liquidité du groupe CIF dans un scénario de mise en extinction progressive, scénario inévitable compte tenu de l’absence de perspective de retour à la viabilité du CIF et des exigences de la Commission européenne. En pratique ces plafonds ne seront pas simultanément utilisés en totalité : alors que le premier plafond sera utilisé pratiquement en totalité dès l’octroi de la garantie, le second plafond sera utilisé progressivement au fur et à mesure des besoins de nouvelles émissions. L’exposition maximale totale de l’Etat devrait atteindre 24 Md€ en 2016 (à cette date 8 Md€ seraient encore utilisés de la première composante de la garantie). L’autorisation de la Commission, qui sera donnée dans un premier temps dans le contexte d’une aide au sauvetage (au sens de la Communication de la Commission sur les aides d’Etat au secteur bancaire dans le contexte de la crise financière) pour une durée maximale de 6 mois, pourra imposer temporairement le respect d’un plafond plus bas. Un plan de résolution définitif fera l’objet d’un accord ultérieur de la Commission européenne.

Les III à V fixent les autres modalités d’encadrement de suivi et de contrôle de ces garanties. En particulier, le III dispose que l’octroi de la garantie sera conditionné à la signature, par les dirigeants du groupe CIF et leurs actionnaires, de conventions de garantie destinées à organiser une gestion appropriée de la gestion extinctive et protéger les intérêts patrimoniaux de l’Etat. Cette garantie sera notamment rémunérée, dans un premier temps, au niveau minimal nécessaire à son acceptation par la Commission européenne, soit environ 100 points de base en moyenne, puis par la suite au niveau nécessaire à son acceptation par la Commission dans le cadre d’un plan définitif.

Observations et décision de la Commission :

Compte tenu des fortes tensions constatées sur les marchés financiers, l’agence de notation Moody’s a décidé, le 16 février 2012, d’abaisser les notes de 114 banques européennes, dont le groupe Crédit Immobilier de France (CIF). Celui-ci a ainsi été placé sous « surveillance négative » dans la mesure où son modèle de financement reposait exclusivement sur l’appel aux marchés et non sur un mode de financement mixte associant appel au marché et dépôts de fonds.

Faute d’avoir constaté que le groupe CIF avait trouvé une solution d’adossement à un établissement bancaire viable pour garantir son avenir, l’agence Moody’s a décidé, dans un record de temps, le 28 août 2012 d’abaisser de trois niveaux la note de l’une des principales filiales du groupe, la Caisse centrale du crédit immobilier de France (3 CIF). L’État français a dû annoncer le 1er septembre 2012 l’octroi de sa garantie en faveur du groupe CIF afin de prévenir un défaut désordonné qui pourrait entraîner des perturbations sur le marché obligataire dans une période déjà marquée par des tensions manifestes.

Le présent article tire les conséquences de cette annonce et propose d’instaurer une double garantie en faveur du groupe CIF, pour un montant total maximal de 28 milliards d’euros. En conséquence, le groupe CIF est contraint d’être géré en extinction conformément à la réglementation européenne en vigueur en matière d’aide d’État en faveur des banques en difficultés. Cette opération constitue le premier « sauvetage » dans le secteur bancaire depuis celui du franco-belge Dexia.

I.– LE MODÈLE DU CRÉDIT IMMOBILIER DE FRANCE (CIF)

A.– LE GROUPE CIF

1.– Historique : des SACI aux SACICAP

Le groupe CIF est né des opérations de structuration des activités concurrentielles des Sociétés Anonymes Coopératives d’Intérêt Collectif pour l’Accession à la Propriété (SACICAP) en 2006. Les SACICAP étaient elles-mêmes issues des Sociétés Anonymes de Crédit Immobilier (SACI).

Créées par la loi « Ribot » du 10 avril 1908, les SACI étaient les actionnaires de sociétés anonymes d’HLM et détenaient des filiales de promotion immobilières pour l’exercice des métiers de l’immobilier, ainsi que des filiales financières pour la distribution de prêts aux particuliers. Elles se sont vu confier pour mission principale la distribution de prêts aidés pour faciliter l’accession sociale à la propriété et jouissaient à ce titre d’un statut fiscal privilégié.

À partir des années 1960, leur objet social s’est progressivement étendu à un ensemble de compétences tournées vers l’accession à la propriété et elles se sont diversifiées en 1984 pour devenir également des établissements de crédit organisés en réseau.

En 1995, le remplacement des prêts à l'accession sociale (PAS) par les prêts à taux zéro (PTZ), distribuables par tous les établissements de crédit, a consacré la banalisation de la distribution des prêts aidés pour l'accession sociale à la propriété. Cette banalisation a incité les SACI à opérer une profonde mutation avec la mise en place d’outils de refinancement garantissant un accès du réseau aux marchés financiers et la séparation des risques issus des activités immobilières et de crédit. Afin de prendre en compte cette évolution et pour recentrer l’action des SACI sur leur activité de développement de l’accession sociale à la propriété, l’ordonnance du 25 août 2006 (39) les a transformées en SACICAP.

Les 56 SACICAP, dont le capital est détenu par des organismes locaux de logement social et des collectivités ou groupements de collectivités territoriales, interviennent dans le secteur social à travers leur filiale commune de promotion immobilière, PROVICIS. Les SACICAP ont également créé une société financière, le Crédit Immobilier de France Développement (CIFD), pour exercer l’activité « crédit ». Les SACICAP sont financées par les dividendes qu’elles perçoivent du groupe CIF, d’un montant de 45 millions d’euros en 2011 (soit 1/3 de leurs ressources) et, par les dividendes de leurs propres filiales immobilières.

Les SACICAP, détiennent elles-mêmes, outre le CIFD, des filiales immobilières et financières pour la réalisation des objectifs de production de logements en accession sociale à la propriété prévus par les conventions qu’elles passent avec l’État.

Dans le cadre de sa politique du logement social, l’État a confié aux SACICAP d’importantes missions d’accompagnement. Par le biais d’une convention portant sur les années 2007 à 2017, conclue entre l’État et l’instance de représentation et de coordination des SACICAP, l’Union d’Économie Sociale pour l’Accession à la Propriété (UESAP), elles se sont engagées à :

– réaliser un vaste programme de construction et de vente de 25 000 logements sociaux destinés à favoriser l’accession à la propriété ;

– mobiliser chaque année pour les missions sociales qui leur seront confiées par l’État, une somme au moins égale au tiers de leur bénéfice distribuable, avec un objectif global et collectif de financement compris entre 340 et 500 millions d’euros. Ces missions comprennent des interventions très sociales en faveur de l’accession à la propriété ou de propriétaires occupants.

LES RELATIONS ENTRE L’ÉTAT, LES SACICAP ET LEURS FILIALES

2.– Les filiales du groupe CIF

CIFD, société financière et organe central du groupe depuis le 1er janvier 2008, est chargé de définir la politique du groupe et d’assurer la mise en œuvre et le contrôle, tant économique que réglementaire, des moyens communs.

CIFD détient 51 % du capital de 11 sociétés financières régionales (contre 49 % détenus directement par les SACICAP) qui exercent une activité de crédit à l’habitat sur l’ensemble du territoire français et 100 % du capital de Banque Patrimoine & Immobilier (ex-Banque Woolwich SA), acquise en 2001 et spécialisée dans toutes les opérations impliquant le patrimoine immobilier familial (acquisition, transmission, valorisation, optimisation…). Les filiales opérationnelles couvrent l’ensemble du territoire avec près de 300 agences.

Contrairement aux banques universelles qui adossent une partie de leurs prêts à des ressources qu’elles collectent directement par les dépôts, l’épargne logement et les livrets bancaires et ne font appel au marché que pour le complément, le groupe CIF recueille l’ensemble de ses ressources sur le marché. L’accès au marché financier est assuré par deux structures de refinancement, directement détenues par CIFD :

 CIF Euromortgage, société de crédit foncier (SCF) du groupe : celle-ci a pour mission d’assurer le refinancement à moyen et long terme du groupe en se portant acquéreur des titres prioritaires émis par les deux organismes de titrisation internes du groupe, dont les actifs sont exclusivement constitués des prêts distribués par CIFD : CIF Assets et – jusqu’à sa dissolution en octobre 2010 – BPI Master Mortgage.

CIF Euromortgage refinance également le groupe en plaçant auprès de lui une partie de sa trésorerie auprès de la 3CIF et en acquérant les billets hypothécaires émis par les filiales opérationnelles entre deux rechargements des organismes de titrisation.

● La Caisse Centrale du Crédit Immobilier de France (3CIF) : celle-ci a pour mission d’apporter aux filiales opérationnelles du groupe les ressources à court terme ainsi que le refinancement à moyen terme non fourni par CIF Euromortgage. 3CIF est également en charge de la négociation des instruments financiers à terme nécessaires à la couverture des risques de taux et de change du groupe et, enfin, de la gestion de la trésorerie et des réserves de liquidité de celui-ci.

Dans le cadre du contrat de solidarité financière du groupe CIF, CIFD s’est engagé à répondre à toute demande du gouverneur de la Banque de France de fournir à ses filiales financières le soutien nécessaire afin de garantir leur liquidité et leur solvabilité. Dans ce but, chacune des filiales, à l’exclusion de CIF Euromortgage (40), s’est elle-même engagée à répondre à première demande de CIFD, dans la limite de ses fonds propres, à tout appel de fonds nécessaire, destiné à préserver la liquidité ou la solvabilité d’une entité du groupe.

B.– UN MODÈLE DE FINANCEMENT CONDAMNÉ

1.– Un financement dépendant exclusivement des marchés

Contrairement à la plupart des groupes bancaires français dont le financement repose sur deux pieds : les dépôts de fonds et l’appel au marché, le groupe CIF a fondé sont modèle de développement sur un recours exclusif à l’emprunt sur les marchés financiers.

Ainsi, les besoins de financement à moyen et long terme sont essentiellement couverts par des emprunts. Le groupe hiérarchise ses accès au refinancement en privilégiant les émissions d’obligations foncières sécurisées, par le biais de CIF Euromortgage et les emprunts obligataires, principalement constitués de la ressource « evergreen » (41) émis par la 3CIF.

 Les obligations foncières (42) : c’est un portefeuille constitué des créances nées des crédits à l’habitat octroyés par la banque aux particuliers, et cédé à une société de crédit foncier (CIF Euromortgage), laquelle les émet sur le marché pour se refinancer. Les investisseurs qui acquièrent ces obligations sont rémunérés par le flux du remboursement des emprunts par les particuliers et bénéficient d’une garantie de premier rang définie à l'article L. 515-19 du Code monétaire et financier. Le montant des encours apportés au titre de l’année 2010 correspond pour cette ressource à plus de 3,2 milliards d’euros.

 La ressource « evergreen » : en 2010, les financements nouveaux accordés par la 3CIF aux entités opérationnelles du groupe sont majoritairement constitués de la ressource « evergreen », autorisation de découvert bancaire d’un montant et d’une durée illimités et qui, en cas de résiliation du contrat, se transforme, à concurrence du montant du découvert, en prêt à 7 ans remboursable in fine. L’encours moyen « evergreen » livré au groupe CIF au cours de l’exercice 2010 s’établit à 3,43 milliards d’euros.

● Une autre partie du refinancement est réalisée à court terme sur le marché interbancaire (43), aujourd’hui durement ébranlé par la crise financière, pour près de 3,9 milliards d’euros au 31 décembre 2010.

● Enfin, toujours au titre de l’année 2010, le groupe disposait d’un important volume d’actifs éligibles aux appels d’offres de la BCE (44). Cependant, cette dernière a cessé ces opérations sur les durées les plus longues, tout en maintenant sa pratique d’octroi sans limitation des refinancements contre garanties aux banques qui en formulaient la demande.

Ainsi, à la différence des établissements de crédits classiques, alimentés à la fois par les dépôts de fonds et les marchés financiers, le modèle du CIF ne repose que sur un seul pied, sérieusement affecté par la crise économique et financière. Ce modèle de financement avait conduit l’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP) à demander au CIF, dès le 4 mars 2010, de renforcer ses fonds propres afin de sécuriser le groupe.

LE MODÈLE DE FINANCEMENT DU CIF





2.– Un contexte durablement défavorable

a) Le refinancement à long terme menacé

Les Sociétés de Crédit Foncier (SCF), comme CIF Euromortgage, sont des établissements de crédit agréés qui effectuent des opérations de banque.

Elles sont spécialisées, d’une part, sur l’octroi ou l’acquisition de prêts garantis et, d’autre part, sur les expositions sur des personnes publiques ou entièrement garanties par elles. Ce mécanisme de financement est régi par la loi du 25 juin 1999 (45) relative à l’épargne et à la sécurité financière. En vertu de ces dispositions, un principe de spécialité et d’exclusivité a été retenu. Ainsi, les crédits sont extraits du bilan de l’émetteur et deviennent l’actif de la SCF qui les détient en pleine propriété.

Néanmoins, la SCF et la banque qui distribue le crédit font partie de la même entité. Contrairement à une opération de titrisation classique, il n’y a pas de transfert de risque vers l’investisseur puisque les crédits se retrouvent au bilan consolidé du groupe bancaire. En conséquence, si le particulier fait défaut, la SCF doit malgré tout rémunérer les porteurs d’obligation.

Le Comité de Bâle a publié le 16 décembre 2010 un ensemble de règlements dit « Bâle III », dispositif entrant en vigueur au 1er janvier 2013, qui, tirant les leçons de la crise, est destiné à renforcer la résilience du secteur bancaire, avec en particulier un rehaussement considérable du niveau minimum des fonds propres des banques au regard de leurs risques, prolongé par une pondération beaucoup plus lourde des activités jugées les plus risquées et par une définition beaucoup plus restrictive des fonds propres admis au numérateur du ratio de solvabilité. Les règlements sur la solvabilité sont accompagnés par la mise en place de règlements sur la liquidité des banques, contraignant celles qui ne l’ont pas encore fait à gérer leur liquidité avec davantage de prudence comme le rappelle le tableau ci-après.

PRINCIPALES MESURES ADOPTÉES DANS LE CADRE DE « BÂLE III »

Objectifs poursuivis par Bâle III

Mesures adoptées

Renforcer la solvabilité des banques

– Création d’une nouvelle catégorie de fonds propres dits « durs » ou « purs » (Common Equity Tier 1)

– Durcissement des critères requis pour qu’un instrument soit reconnu dans les fonds propres réglementaires

– Rehaussements de seuils minima des ratios de solvabilité et durcissement de leurs modalités de calcul

Améliorer la couverture et la gestion du risque de liquidité des banques

Instauration de deux ratios de liquidité :

Ratio de liquidité à un mois (LCR) (46)

Ratio de liquidité à un an (NSFR) (47)

Limiter l’effet de levier des banques

Instauration d’un ratio de levier (48)

Réduire la pro-cyclicité des règles Bâle II

Constitution de deux coussins de fonds propres :

coussin de conservation

coussin contra-cyclique

Mieux encadrer le risque de contrepartie

Incitation à négocier les dérivés via des chambres de compensation

Imposition d’exigences en fonds propres additionnelles pour couvrir la volatilité des credit value adjustements (CVA) qui sont enregistrés en comptabilité en cas de dégradation de la qualité d’une contrepartie à une opération sur dérivé

Malgré un ratio de solvabilité Tier 1 de 14,72 % (49) annoncé pour l’année 2011, Bâle III a fragilisé le modèle de financement du groupe CIF, notamment par le nouveau système de pondération des prêts et l’obligation de conserver davantage de fonds propres.

Cette difficulté se conjugue avec le contexte difficile que connaît l’immobilier français actuellement, et vient menacer le financement du groupe sur le long terme, essentiellement assuré par les obligations foncières. Ainsi, le contexte économique actuel a rendu difficile l’accès à la propriété pour les ménages les plus modestes. D'après l’étude mensuelle de l'Observatoire Crédit Logement/CSA (50), pour septembre 2012, le montant des crédits immobiliers accordés par les banques aurait ainsi reculé de 26 % sur un an. De son côté, l’agence de notation Standard & Poor’s anticipe une décote des prix de l’immobilier, de l’ordre de 15 % d’ici la fin 2013. À plus court terme, les professionnels de l’immobilier de la FNAIM (51) s’attendent pour leur part à une baisse plus mesurée, de l’ordre de 5 % cette année.

b) Le refinancement à court et moyen terme du groupe CIF interrompu

L'agence de notation Moody's a annoncé le 16 février 2012 qu'elle envisageait d'abaisser à court terme les notes de 114 banques européennes, en raison de la crise dans la zone euro et de la baisse de la note de plusieurs États membres. Moody's a ainsi placé "sous surveillance" la note des grandes banques françaises (dont le CIF) et ainsi que d’autres établissements financiers européens.

Cette décision a d'abord amené les commissaires aux comptes de l'établissement à considérer qu'ils ne pouvaient pas attester de la "continuité d'exploitation" du groupe CIF, et en conséquence à refuser d'arrêter les comptes du dernier exercice. L'AMF a donc demandé, le 8 mai 2012, la suspension des obligations émises par le CIF, ouvrant la porte aux spéculations sur sa santé financière.

Prenant acte des difficultés de refinancement du groupe, le 28 août 2012, l'agence a abaissé de trois niveaux la note de la 3CIF compliquant ainsi sérieusement le financement de la banque. Pourtant, le CIF s'apprêtait alors à publier un bénéfice pour 2011 à peu près comparable à celui de 2010, estimé à 78 millions d'euros en 2011 et à 37 millions d’euros au titre du premier semestre 2012, mais pour un produit net bancaire d'environ un demi-milliard d'euros.

Cette profitabilité a cependant été jugée trop faible par l’agence de notation, le problème soulevé n'étant pas la solvabilité mais la liquidité du groupe CIF et les difficultés rencontrées par le groupe dans le contexte immobilier actuel. Moody’s ajoutait dans son communiqué que la note pourrait chuter de neuf niveaux supplémentaires, en l’absence de soutien de l’État, et considérait que les difficultés structurelles de l'établissement à se refinancer accroissaient la probabilité d'une gestion future en extinction.

II.– LES MODALITÉS D’INTERVENTION DE L’ÉTAT VIS-À-VIS DU CIF

Le 1er septembre 2012, le Gouvernement a annoncé l’octroi d’une garantie de l’État en faveur du CIF en précisant que, faute de repreneur, seule une gestion en extinction des activités du groupe serait conforme au droit communautaire relatif au régime des aides d’État.

A.– UNE DOUBLE GARANTIE DE L’ÉTAT D’UN MONTANT TOTAL DE 28 MILLIARDS D’EUROS POUR UNE GESTION EN EXTINCTION

Le présent article propose l’octroi d’une double garantie en faveur du groupe CIF :

– la première garantie, d’un montant de 12 milliards d’euros, prend la forme d’une garantie sur les expositions sous forme de dépôts des entités CIF Euromortgage et CIF Assets sur 3CIF. Ces expositions découlent de la centralisation de la trésorerie du groupe CIF au sein de 3CIF. En effet, la dégradation de 3CIF entraîne l’obligation pour CIF Euromortgage et CIF Assets de retirer leurs dépôts, puisque ceux-ci doivent par contrat être déposés auprès d’un établissement bénéficiant du deuxième meilleur échelon de qualité de crédit. Un tel retrait entraîne un besoin net supplémentaire de liquidité pour le CIF, puisque les dépôts de ses deux filiales financent les actifs de 3CIF. La garantie de l’État vise donc à permettre la circulation de la liquidité au sein du groupe CIF.

– la seconde garantie, d’un montant de 16 milliards d’euros, porte sur de nouvelles émissions non collatéralisées, à réaliser par 3CIF, pour assurer le portage des actifs pendant la durée nécessaire à l’amortissement des passifs existants et pour couvrir le besoin de liquidité qui résulte de la transformation de maturité du groupe CIF. Elle suppose donc une gestion en extinction des activités du groupe.

Le III du présent article précise qu’un commissaire du Gouvernement assiste aux réunions du Conseil d’administration du CIFD pendant la période d’octroi des garanties. Le IV précise qu’une convention sera signée par le ministre de l’économie et chacune des sociétés concernées pour fixer les modalités selon lesquelles chacune des garanties pourra être appelée ainsi que les contreparties de la garantie, sa durée, ses conditions tarifaires et les éventuelles sûretés conférées à l’État en contrepartie de sa garantie. Le V prévoit enfin que le Gouvernement rende compte chaque année au Parlement de la mise en œuvre de ces garanties.

Si de telles garanties n’avaient pas été annoncées par l’État, le groupe CIF aurait fait défaut en 48 heures et aurait dû déposer le bilan. Or, dans le cadre de la procédure judiciaire qui s’en serait suivie, les créanciers du CIF auraient supporté un risque de pertes significatives dans un contexte de cession désordonnée des actifs du CIF et de probable dégradation du recouvrement des crédits par l’entreprise. Ce défaut aurait entraîné des difficultés sur le marché obligataire susceptible de porter atteinte à l’ensemble du financement de l’économie (52) et conduirait à la disparition du groupe, et donc à la destruction des 2 500 emplois concernés, dans la mesure où la procédure collective n’aurait pu déboucher que sur une liquidation de l’entreprise en l’absence de toute perspective crédible de reprise.

En effet, il convient de rappeler que l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP), en charge de la supervision bancaire, a plusieurs fois alerté la direction du groupe CIF sur la nécessité de s’adosser à une banque de dépôt traditionnelle depuis 2010. Toutefois, la direction du CIF n’a pas suivi ces recommandations et les a parfois même contestées devant les tribunaux, retardant la recherche d’un partenariat viable (53). Le nouveau Gouvernement, dès son arrivée aux affaires, a également fait pression sur la direction du CIF pour qu’elle recherche une solution de reprise des activités du groupe par un établissement bancaire viable.

Finalement, sous la pression du régulateur et du Gouvernement, la direction du groupe a mandaté la société HSBC pour qu’elle cherche un repreneur à la fin du mois de juin 2012. Un seul candidat a étudié le dossier : la Banque Postale, pour le repousser très vite compte tenu de l’absence de gains en fonds propres voire du risque de diminution de ses propres ratios de solvabilité, ainsi que des difficultés sociales attendues.

Aucune solution de reprise n’a donc été trouvée avant la décision de l’agence Moody’s du 28 août 2012 si bien que l’État a été contraint d’annoncer qu’il apporterait sa garantie au groupe CIF dans le respect des règles européennes en vigueur relatives aux aides d’État.

B.– L’ENCADREMENT DE L’INTERVENTION DE L’ÉTAT PAR LE DROIT EUROPÉEN DE LA CONCURRENCE

L’article 107 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) considère comme incompatibles avec le marché intérieur les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État dès lors qu’elles conduisent à fausser la concurrence entre les États membres. Par dérogation, le même article autorise ces aides dès lors qu’elles sont octroyées aux consommateurs individuels ou destinés à remédier aux conséquences de catastrophe naturelle, industrielle ou politique.

D’autres dérogations sont possibles, dès lors qu’un contrôle étroit des autorités européennes est assuré lorsque les aides d’État visent à favoriser le développement économique d’activités ou régions sinistrées, à prévenir une perturbation grave de l’économie, à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, ou par décision du Conseil sur proposition de la Commission.

L’article 108 du même Traité précise le régime d’autorisation de ces aides sous le contrôle de la Commission européenne, qui peut notamment imposer aux États membres la suppression ou la modification de ces aides. La Commission européenne a publié plusieurs communications précisant les modalités spécifiques de l’application des règles relatives aux aides d’État au bénéfice des établissements financiers (54).

Peuvent bénéficier d’une aide de l’État les établissements financiers dont les difficultés résultent exclusivement des conditions générales du marché écartant ainsi le risque de voir un gouvernement se laisser persuader par des groupes d’intérêt nationaux de soutenir des établissements en difficulté pour des raisons endogènes (modèle commercial, pratiques dangereuses…). Dans l’hypothèse où le modèle de l’établissement financier apparaît viable sur le long terme, la Commission subordonne les aides à la réalisation d’un plan de restructuration (recapitalisation, sauvetage d’actifs dépréciés) que ce soit au moyen de ressources nationales ou de ressources de l'UE.

Néanmoins, avant d’autoriser la mise en place d’un plan de restructuration, la Commission procède à une appréciation proportionnée de la viabilité à long terme des banques, « en tenant pleinement compte des éléments indiquant que ces dernières peuvent être viables à long terme sans devoir faire l'objet d'une restructuration significative, notamment si le besoin en capital est essentiellement lié à une crise de confiance concernant la dette souveraine, si l’injection de capital public est limitée au montant nécessaire à la compensation des pertes engendrées par la valorisation au cours du marché des obligations souveraines des Parties Contractantes à l'Accord sur l'EEE dans des banques qui seraient normalement viables, et si l’analyse démontre que les banques en question n'ont pas pris de risques excessifs lors de l'acquisition de dettes souveraines ».

En l’espèce, il apparaît que le modèle de financement du groupe CIF, fondé sur le recours exclusif aux marchés financiers, n’est plus viable et que le groupe présente en outre des fragilités importantes :

– son offre est concentrée sur les crédits immobiliers en France, secteur en situation de repli actuellement ;

– sa profitabilité est jugée structurellement faible : en effet, le résultat du CIF n’est positif (78 millions en 2011 et 37 millions au premier semestre 2012) que grâce à un refinancement à bas coût, sur des durées très courtes, ce qui expose à tout moment le CIF à une remontée des taux d’intérêt. En outre, l’adossement entre actifs et passifs est imparfait puisque les passifs sont de moins longue durée que les actifs, même en tenant compte des remboursements anticipés de crédits ;

– la forte concurrence liée à la nature des produits d’appel des crédits immobiliers (PTZ, PTZ +, PAS) proposés par toutes les banques universelles pour capter la clientèle à qui sont ensuite vendus d’autres produits l’empêche d’augmenter désormais ses marges : le CIF n’a pas de relation clientèle directe et n’aurait pas la capacité commerciale de vendre de nouveaux produits. En outre, le groupe CIF ne dispose d’aucun revenu de commission ;

– son portefeuille d’encours (33 milliards d’euros) présente des risques tenant à la durée de crédit très longue accordée (jusqu’à 40 ans pour certains prêts), à un rapport prêt/valeur acheté (loan to value) élevé (> 100 % pour près de 45 % des dernières productions), à des structurations complexes quasi-toxiques pour 13 % de son encours (taux variables non plafonnés et crédits structurés à échéances variables) et à un profil de client relativement risqué.

Témoignant de ces difficultés, les comptes 2011 ont été publiés avec retard provoquant une suspension de la cotation des titres alors que les commissaires aux comptes avaient multiplié les avertissements depuis la fin 2011.

L’ensemble de ces éléments l’écarterait du bénéfice de la réalisation d’un plan de restructuration, et justifierait l’option de la gestion en extinction. Néanmoins, l’octroi de la garantie de l’État est elle-même une aide d’État qui doit être autorisée par la Commission européenne.

Pour ce faire, la France doit respecter les règles édictées par la Commission européenne sur les garanties de l’État, à savoir prévoir une rémunération des garanties accordées et présenter un plan de résolution ordonnée des activités du groupe CIF dans un délai de six mois à compter de l’annonce de la garantie, soit dans le courant du mois de mars 2013.

Parmi les autres conditions d’octroi de la garantie, l’État a demandé aux actionnaires de renoncer à leurs dividendes et à tout boni de liquidation et a acté le départ à la retraite du président du groupe, M. Claude Sadoun, en précisant qu’il s’attendait à ce qu’il renonce à ses indemnités de départ accordées en juin 2012.

C.– LES CONSÉQUENCES ÉCONOMIQUES, SOCIALES ET BUDGÉTAIRES DU DISPOSITIF

1.– Conséquences sur l’emploi

D’après la lettre ouverte des salariés du CIF adressée au Gouvernement français, le choix des autorités publiques de démanteler la banque conduirait à menacer directement ses 2 500 employés, et écarterait 250 000 foyers d’une solution d’accession à la propriété. Cette décision priverait en outre les SACICAP de la manne financière nécessaire à la construction des 25 000 nouveaux logements prévus d’ici 2017 par la convention qui les lie envers l’État, menaçant ainsi indirectement 200 000 emplois dans la construction.

Cependant, le Gouvernement estime que la gestion en extinction du groupe CIF ne conduira pas la destruction des 2 500 emplois du groupe car elle implique le maintien de certaines activités du CIF afin de procéder au recouvrement du portefeuille de crédits, opération qui pourrait prendre plusieurs dizaines d’années (certains prêts octroyés par le CIF ayant une durée particulièrement longue). Entre 500 et 800 emplois pourraient ainsi être maintenus.

En outre, une grande partie des emplois restants pourraient être conservés soit par le maintien de certaines filiales, dans le cadre de cession d’actifs, soit par la reprise des activités d’accession à la propriété par d’autres établissements financiers. L’État travaille actuellement avec plusieurs acteurs du secteur pour développer l’activité de prêt pour l’accession à la propriété rapidement et dès lors, reclasser les salariés du groupe CIF qui disposent d’un savoir faire et de compétences largement reconnues en la matière.

D’une manière générale, le Gouvernement veillera à ce que, en cette période très difficile pour les salariés du CIF, la nouvelle direction soit exemplaire en terme de dialogue social et transparente dans ses projets avec les représentants des salariés. Il convient néanmoins que le dialogue s’instaure très rapidement afin de proposer un plan social pour raisons économiques dans les meilleurs délais, le plan de résolution ordonnée des activités du groupe devant être présenté à la Commission européenne au plus tard en mars 2013.

2.– Conséquences sur le secteur du logement social

S’agissant de l’accession à la propriété, il apparaît que le groupe CIF ne représente que 5 % de l’ensemble des prêts à taux zéro (PTZ) distribués par les banques en France (55) et réalise moins de 10 % des prêts à l’accession sociale (PAS), soit au total seulement 7 % de la production bancaire sociale comme le montrent les tableaux suivants :

RÉPARTITION DES PARTS DE MARCHÉ DANS L’OCTROI DE PRÊTS À L’ACCESSION SOCIALE À LA PROPRIÉTÉ EN 2011 (EN %)

 

PAS (effectif)

PAS
(en valeur)

CIFD

10

11

CFF (1ère valeur)

31

37

BPCE Banques populaires

2

2

BPCE Caisses d’épargne

8

7

Crédit Mutuel

11

10

CIC

2

2

Crédit agricole

32

26

LCL

1

2

Société générale

2

2

BNP Paribas

1

1

La Banque Postale

0

0

TOTAL

100

100

Source : ministère de l’Économie.

RÉPARTITION DES PARTS DE MARCHÉ DANS L’OCTROI DE PRÊTS À TAUX ZÉRO EN 2011

(en %)

 

PTZ

(effectif)

PTZ

(en valeur)

CIF

5

5

CFF

7

7

Banques populaires

9

9

CENCEP

16

15

La Banque Postale

7

7

BNP Paris

5

5

Personal Finance

1

1

Société générale

5

5

Crédit du Nord

1

1

Crédit agricole (1ère valeur)

24

22

Crédit Lyonnais

4

4

Crédit Mutuel

13

12

CIC

4

4

TOTAL

100

100

Source : ministère de l’Économie.

RÉPARTITION DES PARTS DE MARCHÉ DANS L’OCTROI DE PRÊTS À TAUX ZÉRO POUR LA TRANCHE 1 (MÉNAGES LES PLUS MODESTES) EN 2011

(en %)

 

PTZ tranche 1

(effectif)

PTZ tranche 1

(en valeur)

CIF

10

10

CNCE (BPCE)

15

13

BFBP (BPCE)

7

6

CFF (1ère valeur)

19

25

Société générale

4

4

Crédit du Nord

1

1

Crédit Agricole

21

18

LCL

3

4

Crédit Mutuel

10

7

CIC

3

3

BNP Paribas

3

3

Personal Finance

0

0

La Banque Postale

4

4

Autres

0

1

TOTAL

100

100

Source : ministère de l’Économie.

Auditionné par la commission des Finances du Sénat, M. Cyril Roux, premier secrétaire général adjoint de l’ACP, a confirmé que : « Le CIF détient 4 % des crédits à l’habitat, au lieu de 6 % il y a dix ans en raison de la banalisation des aides à l’achat immobilier par des ménages modestes (…) Ce n’est pas l’institution qui accorde en moyenne, ni les prêts les plus longs, ni avec l’apport personnel le plus faible, ni avec le seuil d’endettement le plus élevé : un autre établissement est devant le CIF sur chacun de ces critères » (56).

Ces données permettent de relativiser les craintes quant à l’impact de la disparition programmée du CIF sur l’emploi (bâtiment, immobilier) et la construction, d’autant plus que le Gouvernement a entamé des démarches avec les banques universelles pour les inciter à développer la distribution de prêts à l’accession sociale.

Plusieurs pistes sont envisagées : renforcement du PTZ +, optimisation des barèmes de l’aide personnalisée au logement (APL) pour améliorer la solvabilité des ménages, création d’un groupe de travail sur la refondation de l’accession sociale à la propriété. S’agissant de la construction de logements sociaux, le Gouvernement indique être mobilisé pour trouver une solution pour les SACICAP.

3.– Conséquences budgétaires

L’octroi d’une garantie par l’État n’a, en tant que telle, pas d’incidence sur le déficit budgétaire. En revanche, en cas d’appel de ces garanties, la dépense correspondante vient dégrader tant le déficit de l’État en comptabilité budgétaire – elle serait retracée sur le programme 114 Appels en garantie de l’État doté de crédits évaluatifs – que le déficit public.

Quant au coût de la garantie, il demeurerait sans conséquences pour les finances publiques, d’autant qu’elle serait réalisée à titre onéreux pour toute la période de garantie : les projections du Gouvernement sur le montant de la rémunération des garanties prévues par le présent article s’élèvent à 187 millions d’euros en 2013 puis 200 millions d’euros au déjà. Toutefois, ces projections sont fondées sur une estimation des montants à garantir pour les années 2013-2015 et sur l’hypothèse que la garantie sera tarifée au niveau minimal fixé dans la communication de la Commission européenne précitée.

Sur le plan fiscal, la disparition du CIF priverait l’État de recettes fiscales, la charge de l’impôt sur les sociétés s’élevant pour le groupe au titre de l’année 2010, à 33 millions d’euros. Les représentants des salariés évoquent de leur côté une perte commerciale de près de 5 milliards d’euros d’ici à 2017.

S’agissant de l’impact sur la dette publique, le Gouvernement a précisé que l’octroi de la garantie au groupe CIF devrait lui permettre de conserver sa licence bancaire, sous réserve de l’accord de la Commission européenne. Dans ces conditions, le groupe CIF resterait en dehors du champ des administrations publiques de sorte qu’il n’y aurait pas lieu d'inclure dans les calculs d'endettement public brut de la France le montant de la garantie accordée. En revanche, si la Commission européenne assimilait le groupe CIF à une structure de défaisance et lui retirait sa licence bancaire, il conviendrait alors d’inclure dans le calcul de la dette publique brute notifiée le montant de la garantie accordée, qui représente plus de 1 % du produit intérieur brut (PIB). Une augmentation de la dette publique de ce niveau ne devrait toutefois pas entraîner de dégradation de la notation de la dette publique française.

*

* *

La Commission examine l’article 66, rattaché à cette mission.

M. Dominique Baert, Président. Quelle est votre position concernant l’article 66 relatif à l’octroi de la garantie de l’État au groupe Crédit immobilier de France ?

M. Dominique Lefebvre, Rapporteur spécial. Avis favorable. Je rappelle que si l’État n’avait pas octroyé sa garantie en septembre 2012, le CIF serait en situation de cessation de paiement. J’ajoute que le Gouverneur de la Banque de France a indiqué lors de son audition par la commission des Finances que la Banque de France intervient quotidiennement pour soutenir le CIF, et qu’en l’absence de cette intervention, celui-ci se trouverait en défaut.

Eu égard à la situation de l’emploi et à l’urgence de prendre en considération la situation des 2500 salariés du CIF qui ne sont pas responsables de l’échec du modèle du CIF, il est souhaitable que les négociations entre le Gouvernement et la nouvelle direction du CIF, dont je comprends qu’elle ait voulu explorer toute les pistes possibles pour éviter la mise en extinction des activités du CIF, se finalisent au plus vite pour que puissent être signée la convention de garantie et que puisse être instauré un plan social en bonne et due forme dans les délais imposés par la notification de cette aide d’État devant la Commission européenne.

J’ai, comme nombre de mes collègues, été alerté par différents acteurs du secteur pour envisager des solutions alternatives à la mise en extinction des activités du SIEG : adossement à la CDC, recentrage du CIF sur un cœur de métier susceptible d’être qualifié de service d’intérêt économique général… Toutefois, la situation actuelle montre que ces propositions – qui seraient qualifiées en tout état de cause d’aide d’État – ne sont plus envisageables car le CIF n’est pas dans une situation viable à court ou moyen terme.

J’émets donc un avis favorable à l’octroi de la garantie prévue par l’article 66 en insistant à nouveau sur l’urgence de mettre en place dans les meilleurs délais un plan social qui puisse sauvegarder l’emploi d’un maximum de salariés du CIF d’une manière ou d’une autre.

M. Dominique Baert, Président. M. Dumont a souhaité prendre la parole sur cet article.

M. Jean-Louis Dumont. Je veux simplement préciser que donner un avis favorable à l’octroi de la garantie en commission des Finances me paraît indispensable mais cela ne signifie pas que l’on donne un blanc-seing au Gouvernement. La discussion n’est pas finie et le vote définitif en séance dépendra beaucoup de l’avancée des négociations entre la nouvelle direction du CIF et le Gouvernement. Il est de la responsabilité des élus de la nation d’interpeller de façon solennelle le Gouvernement dans l’hémicycle sur les manipulations qu’il y a pu avoir sur ce dossier.

M. Yves Censi. Je suis d’accord avec M. Dumont et je suis contre l’article 66.

Suivant l’avis favorable du Rapporteur spécial, la commission adopte l’article 66.

ANNEXE : AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

– Audition par la commission des Finances de M. Philippe Mills, directeur général de l’Agence France Trésor et de MM. François Monier, conseiller maître, et Philippe Ravalet, conseiller référendaire, à la Cour des comptes (Première chambre), sur la gestion de la dette de l’État (57) ;

– Audition de M. Ract-Madoux, Président du conseil d’administration de la caisse d’amortissement de la dette sociale ;

– Audition de M. Ramon Fernandez, directeur général du Trésor, sur les programmes Épargne et Appels en garanties ;

– Audition par la commission des Finances de M. Michel Bouvard, président-directeur général du Crédit Immobilier de France, et de M. Ramon Fernandez, directeur général du Trésor, sur la situation et les perspectives du Crédit Immobilier de France (58) ;

– Audition par la commission des Finances de l’intersyndicale du Crédit Immobilier de France, sur la situation et les perspectives du Crédit Immobilier de France (59).

© Assemblée nationale

1 () Le PIB diminue alors de 0,9 % en volume.

2 () L’année 2006 a été marquée par un volume exceptionnel de produits de cessions d’actifs affectés au désendettement de l’État (13 milliards d’euros, apportés par les privatisations des sociétés d’autoroute) et par des mesures massives d’optimisation de la trésorerie publique (en particulier la réduction de l’encours du compte du Trésor en fin d’année de près de 26 milliards d’euros). Ces deux facteurs, non reconductibles, expliquent plus des trois quarts de la diminution du taux d’endettement public entre 2005 et 2006.

3 () Pour les années 2009 et 2010, la Cour des comptes, à la différence de la Commission européenne, exclut du calcul du solde structurel l’impact des mesures de relance.

4 () Rapport spécial de M. Dominique Baert sur la mission Engagements financiers de l’État, annexe au rapport n° 3805 sur le projet de loi de finances pour 2012, page 13.

5 () Selon la réponse au questionnaire budgétaire envoyée par la direction du budget au Rapporteur spécial.

6 () En longue période, le taux d'intérêt est à peu près égal au taux de croissance de l'économie. Il ne devrait donc pas y avoir d'effet « boule de neige ». Cependant, celui-ci apparaît lorsque la situation fragile de l'Etat engendre des primes de risque (les prêteurs exigent une rémunération plus élevée pour compenser le risque de défaut), lorsqu'un ralentissement inattendu de l'inflation accroît le taux d'intérêt réel payé sur la dette ou lorsque la croissance économique s'effondre. L'effet « boule de neige » oblige à dégager un excédent du solde budgétaire primaire (avant paiement des intérêts de la dette).

7 () Par ailleurs, il convient de rappeler les conventions de consolidation de la dette de Maastricht en comptabilité nationale : lorsque l’État achète des bons du Trésor de l’ACOSS, c’est la contribution de la sécurité sociale à la dette qui baisse alors que celle de l’État reste inchangée.

8 () Loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 et loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

9 () Malgré la diminution de 1,4 milliard d’euros des recettes du budget général, le solde de l’État s’est amélioré en raison de la révision, en hausse de 4,4 milliards d’euros du solde des comptes spéciaux, principalement due à la disparition des prêts bilatéraux à la Grèce ainsi que par la constatation d’une économie de 0,7 milliard d’euros sur la charge de la dette.

10 () Article 82 de la loi de finances rectificative pour 2007.

11 () Article 55 de la loi de finances pour 2008.

12 () Grâce aux informations contenues dans chacune des conventions signées entre les opérateurs et les bénéficiaires finaux et aux remontées comptables, un calendrier pluriannuel de décaissement a été construit par le Commissariat général à l’investissement (CGI) : un profil « en bosse » pour les montants décaissés a été retenu, avec une phase de hausse des décaissements jusqu’en 2013 (après 1,5 milliard d’euros en 2011, 3,3 milliards d’euros en 2012 et 4,3 milliards d’euros en 2013) pour atteindre environ 4 milliards d’euros de décaissements en 2014 et 2015, puis une décrue en 2016 (2,7 milliards d’euros) et 2017 (1,9 milliard d’euros). L’impact sur la variation de la dette publique serait un peu inférieur aux décaissements (1,1 milliard d’euros en 2011 puis 2,7 milliards d’euros en 2012, 3,6 milliards d’euros en 2013, puis environ 3,2 milliards d’euros en 2014-2015, et en moyenne 1,6 milliard d’euros en 2016-2017). En effet, les décaissements des intérêts versés par l’État sur les dotations non consommables sont gagés par des économies équivalentes sous la norme de dépense de l’État.

13 () Le taux d’émissions des BTF à trois mois sont ressortis à – 1 point de base au cours du troisième trimestre 2012 alors que l’hypothèse de taux en LFI 2012 s’élevait à + 1,4 %.

14 () L’étude empirique récente, et désormais célèbre, de Carmen Reihnart et Kenneth Rogoff (2009) montre une corrélation statistique entre le niveau du ratio dette publique/PIB et le niveau de croissance : jusqu’au seuil de 90 %, la relation entre dette publique et croissance économique est faible, mais au-delà de cette limite, la croissance est affaiblie : le taux de croissance annuel médian chuterait de 1 % à long terme et le taux de croissance moyen encore plus. Ce résultat vaut tant pour les pays avancés que pour les économies émergentes. Ce résultat empirique ne peut se traduire par une règle de seuil absolue, car il n’existe que des situations d’endettement relatives : en pratique, la soutenabilité de la dette publique pour chaque pays dépend principalement de l’écart entre la croissance potentielle et le niveau des taux d’intérêts, eux-mêmes fixés par l’offre et la demande de titres publics. Le risque d’effet « boule de neige » lié à une dette élevée en proportion du PIB s’accentue quand le taux de croissance est faible par rapport aux taux d’intérêts.

15 () Cette décision de la BCE a donc eu pour effet de supprimer pour les banques la rémunération de l’excès de liquidité du système bancaire et les a conduites à rechercher d’autres placements, ce qui a accentué l’offre de liquidités sur le marché monétaire, provoquant la baisse des taux monétaires. Ainsi le taux au jour le jour EONIA est passé d’environ 0,33 % avant la décision à 0,12 % tandis que le taux de la pension à une semaine qui correspond à un placement contre collatéral (donc sans risque), est passé de 0,13 % à 0,01 %. Dans ce nouvel environnement où les liquidités ne sont plus rémunérées, de nombreux investisseurs choisissent d’acheter des titres sûrs même si leurs taux sont faibles, voire légèrement négatifs, plutôt que de conserver des liquidités qui constituent une exposition non rémunérée au secteur bancaire. Dans ce contexte les investissements de certaines poches de liquidité dans des titres des pays jugés les plus sûrs (Allemagne, Finlande, Pays-Bas, Autriche, Belgique) ainsi que des titres du FESF entraînent une forte baisse des taux de ces émetteurs. Ainsi, les taux courts de ces émetteurs sont désormais nuls ou légèrement négatifs pour des maturités allant de 3 mois à 1 an. Pour tous ces émetteurs, les taux ne sont que très faiblement négatifs (– 0,5 pb à – 2 pb) et les transactions sur le marché secondaire à de tels taux restent relativement rares car la majorité des investisseurs ne souhaite pas investir à des taux négatifs mais préfère investir sur des maturités plus longues présentant un rendement positif ou nul.

16 () Soit environ 13 % de l’encours de la dette de l’État en 2012.

17 () Les provisions pour charge d’indexation du capital des titres indexés sont calculées sur la base de l’inflation constatée d’une date anniversaire à l’autre, soit en pratique entre le 25 juillet de l’année N-1 et le 25 juillet de l’année N. La provision passée en année N ne dépend ainsi que de l’inflation constatée en année N et est indépendante de celle de l’année N-1.

18 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/cr-cfiab/11-12/c1112013.asp#P11_486

19 () Le plus grand utilisateur de titre indexés sur l’inflation est le Royaume-Uni : les obligations indexées constituent 25 % du stock de sa dette. Viennent ensuite la Suède, avec 22 %, la France et les États-Unis, avec 12 %, l’Italie, avec 10 %. Seule l’Allemagne se situe nettement en dessous, mais elle a lancé son propre programme beaucoup plus tard.

20 () Le II de l’article 22 de la LOLF dispose en effet que « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l’État, à l’exclusion de toute opération de gestion courante, sont retracées sur un compte de commerce déterminé. Ce compte est divisé en sections distinguant les opérations selon leur nature. Chaque section est dotée d’une autorisation de découvert (…) ».

21 () Les versements se font les 6, 16 et 26 de chaque mois, avec deux versements spécifiques en début et fin d’année, à hauteur du solde apparaissant à la première section.

22 () Les swaps de taux d’intérêt sont des contrats négociés entre deux parties qui décident de s’échanger les flux d’intérêt correspondant, d’une part, à une échéance fixe (en général) moyenne ou longue et, d’autre part, à une échéance variable courte. Sans intervenir sur l’encours de la dette, il est donc possible de réduire sa durée de vie apparente en concluant avec une contrepartie déterminée un swap de taux visant à percevoir le taux fixe long et à payer le taux variable court. Ainsi, le débiteur paye le taux fixe long sur l’emprunt qu’il a émis, reçoit le taux fixe long du fait du swap et paye le taux variable court du fait du swap. S’il veut éviter d’être exposé à une charge d’intérêt variable, le débiteur peut conclure un swap inverse avec une autre contrepartie en recevant le taux variable court et en payant un taux fixe associé à une maturité intermédiaire. Dans ces conditions, l’ensemble des instruments financiers utilisés (emprunt, swap taux long / taux court et swap taux court / taux moyen) aboutit à ce que le débiteur paye sur sa dette à long terme un taux d’intérêt à moyen terme. En pratique, ces opérations substituent des taux de 2 à 3 ans à des taux de 8 à 10 ans.

23 () Si l’on fait l’hypothèse que la structure de la détention de l’ensemble de la dette extérieure de la France est identique à la structure de la détention de la dette de l’Etat et que cette structure de détention n’a pas évolué entre 2010 et 2012.

24 () Comme l’indiquait la Cour des comptes en 2007, ces passifs « sont très hétérogènes (…) et donc porteurs de risques financiers de nature et d’intensité variables. À ce titre, ils ne peuvent donner lieu à totalisation, même indicative, laquelle serait dépourvue de sens économique » (Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, juin 2007, p. 28).

25 () La Coface est elle-même une filiale de Natixis.

26 () L’augmentation serait même de 18,7 % par rapport à la dernière prévision d’exécution pour 2011.

27 () Conformément à l’article 116 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.

28 () L’« arrangement relatif aux crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public » est un accord multilatéral né en 1978 sous l’égide de l’OCDE – et transposé en droit communautaire – tendant à encadrer l’intervention publique dans les échanges et favoriser la transparence en vue de maintenir des conditions de concurrence fondées sur des déterminants techniques, commerciaux et non financiers.

29 () Au début des années 1980, Natixis (ex-BFCE) a refinancé des créances dans le cadre d’accords de consolidation décidés en Club de Paris. En contrepartie, l’État a accordé à Natixis sa garantie sur ces prêts.

30 () À ce titre, cette action participe à la « politique transversale » que constitue, au sens de l’article 128 de la loi de finances rectificative pour 2005 (n° 2005-1720 du 30 décembre 2005), la politique française en faveur du développement.

31 () Le décret n° 2012-1056 du 18 septembre 2012 a procédé au relèvement du plafond du livret A pour le porter de 15 300 euros à 19 125 euros au 1er octobre 2012 et au relèvement du livret développement durable pour le porter de 6 000 à 12 000 euros. Dans une communication présentée au Conseil des ministres du mercredi 22 août 2012, le ministre de l'économie et des finances a annoncé un 2ème relèvement de 25 % du plafond du livret A d'ici fin 2012.

32 () http://www.economie.gouv.fr/files/import/rapport-depenses-fiscales/Annexe-B-Rapport.pdf

33 () http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/L-Etat-et-le-financement-de-l-economie

34 () http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/La-politique-en-faveur-de-l-assurance-vie

35 () Tels que les prêts spéciaux du Crédit Foncier de France, certains prêts aidés pour l’accession à la propriété ou les primes pour l’amélioration de l’habitat rural.

36 () Les contrats de rente viagère sont des conventions de droit privé par lesquelles un débirentier, en général une société d’assurance ou une mutuelle, s’engage à verser une rente à un crédirentier jusqu’à son décès. L’État majore certaines de ces rentes : rentes viagères constituées auprès des compagnies d’assurance-vie au titre de la loi du 2 août 1949, rentes allouées en réparation d’un préjudice (loi du 24 mai 1951), rentes constituées auprès des caisses autonomes mutualistes et de la caisse nationale de prévoyance par des anciens combattants (loi du 9 juin 1948 et article L. 321-9 du code de la mutualité). Depuis plusieurs années, l’État ne participe plus qu’au financement des rentes correspondant à des contrats souscrits avant le 1er janvier 1987.

37 () Loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012.

38 () Le Conseil d’administration du 24 juillet 2012 a décidé que les Etats membres en ayant formulé la demande avant le 14 septembre 2012 peuvent étaler le règlement de leur souscription en trois paiements (50 % avant le 31 mars 2013, 25 % avant le 31 mars 2014 et 25  % avant le 31 mars 2015).

39 () Ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété.

40 () En sa qualité de membre du Crédit Immobilier de France, CIF Euromortgage bénéficie, au-delà de ses propres mécanismes de sécurité, de la solidarité du réseau du CIF. Si CIF Euromortgage bénéficie de ce pacte, elle ne peut, toutefois, être elle-même appelée en garantie car ses actifs sont, conformément à la réglementation qui lui est applicable, exclusivement affectés en garantie des engagements qu’elle a souscrits auprès de ses propres créanciers privilégiés. En effet, aux termes de l'article L. 515-19 du Code monétaire et financier, la totalité de l’actif de la société de crédit foncier est affectée par priorité au paiement des obligations foncières et des autres ressources privilégiées qu’elle peut être amenée à lever. Les créanciers bénéficiaires de ce privilège disposent ainsi sur cet actif d’une garantie de premier rang sans concours possible de la part d’un autre créancier, fût-il l’État.

41 () La ressource « evergreen » est une dette de premier rang non garantie (« senior unsecured »).

42 () Les obligations foncières sont des obligations garanties par des crédits hypothécaires ou des créances sur le secteur public (« covered bonds »).

43 () Constitués principalement d’émissions de certificats. Ce sont des produits dérivés sur action, indice, matière première ou tout autre type d'actif financier, dotés d’un pouvoir spéculatif important (effet de levier).

44 () Les appels d’offres sont les opérations par laquelle la BCE propose d’allouer des liquidités aux banques, moyennant le versement d’intérêts et la remise en gage de titres financiers.

45 () Loi n° 99-532 du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière.

46 () Pour s’assurer que la banque détient suffisamment d’actifs liquides pour faire face à ses besoins de liquidité en cas de crise pendant un mois : toutefois, la définition des actifs dits « liquide » est très restrictive.

47 () Pour s’assurer que les actifs à plus d’un an sont couverts par des ressources à plus d’un an.

48 () Pour limiter le recours à l’endettement en obligeant les banques à financer au moins 3 % du montant de leurs actifs par des fonds propres Tier 1 (le reste étant financé par d’autres ressources telles que les dépôts de la clientèle, les émissions obligataires, certificats de dépôts, etc.)

49 () Ratio affiché au 30 juin 2011 (Cf. page 23 du rapport semestriel pour 2011).

50 () Crédit Logement est un établissement de crédit spécialisé dans la garantie (caution) de prêts immobiliers à particuliers distribués par les banques, son capital est partagé entre les grandes banques françaises (BPCE, BNP Paribas, Le Crédit Lyonnais, Crédit Agricole…).

51 () La Fédération Nationale de L’immobilier (FNAIM) est une organisation fédérant des agences immobilières, gestionnaires locatifs et gestionnaires de copropriétés.

52 () Le marché des obligations foncières représente un encours de plus de 300 milliards d’euros et 40 % du financement long des banques.

53 () L’ACP avait ainsi imposé une augmentation des fonds propres du CIF en 2009 mais celui-ci a exercé un recours en annulation devant le Conseil d’État qui a annulé la décision de l’ACP le 5 mars 2012.

54 () La dernière en date est celle du 1er décembre 2011, C(2011) 8744 final, communication de la Commission concernant l'application, à partir du 1er janvier 2012, des règles en matière d'aides d'État aux aides accordées aux banques dans le contexte de la crise financière.

55 () Seuls 25 % de l’encours de prêts du groupe CIF est éligible au PTZ tandis que les dossiers réalisés avec l’octroi d’un prêt PAS ne représentent qu’environ 15 % de l’encours du CIF.

56 () Voir http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20121001/fin.html.

57 () Audition du 26 septembre 2012(http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/cr-cfiab/11-12/c1112013.pdf).

58 () Audition du 22 octobre 2012 (http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/cr-cfiab/12-13/c1213016.pdf).

59 () Audition du 22 octobre 2012 (http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/cr-cfiab/12-13/c1213017.pdf).