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°  251

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2012.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2013 (n° 235),

PAR M. CHRISTIAN ECKERT,

Rapporteur Général,

Député

——

ANNEXE N° 34

OUTRE-MER

Rapporteur spécial : M. Patrick OLLIER

Député

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INTRODUCTION 5

CHIFFRES CLÉS 7

I.– DÉVELOPPER LES OUTILS D’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE 8

A.– LES ÉVOLUTIONS LÉGISLATIVES ENVISAGÉES POUR L’OUTRE-MER : UNE POLITIQUE S’INSCRIVANT GLOBALEMENT DANS LA CONTINUITÉ 8

1.– La poursuite du processus de transfert des compétences à la Nouvelle-Calédonie issu de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998 8

2.– Refonte du Code minier : sortir de l’ambiguïté 9

3.– Code des communications électroniques : extension à Wallis-et-Futuna 10

4.– Évolution institutionnelle de la Martinique et de la Guyane 10

5.– Évolution institutionnelle du département de Mayotte 10

B.– ASSOUPLIR L’APPLICATION DES NORMES COMMUNAUTAIRES DANS LES RÉGIONS ULTRAPÉRIPHÉRIQUES 12

II.– CRÉDITS DE LA MISSION : DES MESURES ET DES FINANCEMENTS LARGEMENT RECONDUITS 16

A.– UNE MISSION PRÉSERVÉE DE LA BAISSE GÉNÉRALE DES DÉPENSES PUBLIQUES 16

1.– Les crédits demandés pour 2013 en légère augmentation par rapport à 2012 16

2.– Des changements de périmètre 16

B.– LE PROGRAMME EMPLOI OUTRE-MER 17

1.– L’action Soutien aux entreprises 17

a) Les exonérations de charges sociales : un dispositif essentiel 17

b) Les crédits destinés à l’aide au fret et à l’aide à la rénovation hôtelière en baisse 19

2.– L’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle 22

a) Initialement prévu pour 2012, un doublement des volontaires du service militaire adapté repoussé à 2014 22

b) Le passeport mobilité « formation professionnelle » mis en œuvre par la LADOM, seul opérateur du programme 22

3.– Création d’une action Pilotage des politiques de l’Outre-mer 23

C.– LE PROGRAMME CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER 24

1.– L’action Logement 24

a) En matière d’amélioration de l’habitat, une bonne dynamique enclenchée grâce aux outils de la loi de 2011 24

b) Partiellement financée par la défiscalisation, la construction de logements sociaux freinée par le manque de disponibilité foncière 26

2.– L’action Aménagement du territoire 27

a) Les contrats de projet (DOM) 28

b) Les contrats de développement (COM) 29

3.– L’action Continuité territoriale finançant essentiellement le fonds de continuité territoriale 30

4.– L’action Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport partiellement ventilée sur d’autres missions du budget général 31

5.– Un soutien à la reconversion de l’économie polynésienne absorbant l’essentiel des crédits de l’action Collectivités territoriales 31

6.– L’action Insertion économique et coopération régionales : une action à renforcer 33

7.– De nouveaux programmes seront lancés depuis l’action Fonds exceptionnel d’investissement 33

8.– L’action Appui à l’accès aux financements bancaires 34

III.– LE SOUTIEN DE L’ÉTAT À L’OUTRE-MER PASSE ESSENTIELLEMENT PAR LA DÉPENSE FISCALE 35

A.– DES DÉPENSES FISCALES, DONT LE MONTANT EST SUPÉRIEUR À CELUI DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES, MAINTENUES EN 2013 35

1.– Un montant des dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission Outre-mer supérieur à celui des crédits budgétaires 35

2.– L’Outre-mer écarté de l’abaissement du plafonnement global de certains avantages fiscaux à l’impôt sur le revenu 37

B.– DÉFISCALISATION : ÉVITER TOUT DOGMATISME 37

C.– LES AVANTAGES CONSENTIS AUX AGENTS DE L’ÉTAT EN POSTE DANS LES DOM 39

EXAMEN EN COMMISSION 41

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 59

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 65 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION

Alors qu’en 2010 il était possible de dresser un constat global à peu près convergent de la situation économique des départements et collectivités d’Outre-mer, la situation était beaucoup plus contrastée à la fin de l’année 2011.

On peut cependant observer certaines tendances par zones géographiques :

– la situation économique s’améliore dans les départements français d’Amérique (DFA) avec un taux de croissance de 1,6 % à Saint-Pierre et Miquelon, 2,7 % en Guadeloupe, 2,5 % en Guyane et même 4,6 % en Martinique. Le taux de chômage demeure toutefois élevé – autour de 20 % – même s’il baisse de 5 % en Guadeloupe et de 1 % en Martinique. Il reste toutefois préoccupant pour la jeunesse ; à titre d’exemple, 60 % des jeunes martiniquais de moins de 25 ans sont au chômage ;

– la situation de la Réunion et de Mayotte fléchit nettement en fin d’année, ce mouvement étant accentué à Mayotte par les événements sociaux. La Réunion termine l’année à – 0,2 % de croissance ; Mayotte – malgré le net ralentissement de fin d’année – a connu un taux de croissance record de 11 % synonyme d’un fort rattrapage à la suite de la départementalisation ;

– à l’image de ce qui est relevé depuis plusieurs années, l’économie des collectivités d’Outre-mer du Pacifique connaît des évolutions divergentes : une conjoncture toujours favorable pour la Nouvelle-Calédonie avec 4 % de croissance, une morosité persistante en Polynésie française (– 0,4 % de croissance).

Ces chiffres globalement meilleurs qu’en métropole valident la stratégie de développement initiée lors de la précédente législature et assise sur des instruments d’incitation fiscale et budgétaires à préserver.

Le Rapporteur spécial appelle à poursuivre cette politique devant permettre aux départements et collectivités d’Outre-mer de valoriser leurs propres avantages comparatifs et de s’insérer pleinement dans leurs aires géographiques. Les normes européennes doivent en particulier être adaptées à la réalité de l’économie des collectivités ultramarines et aux particularités du commerce avec des pays tels que le Brésil (Antilles, Guyane), l’Inde et l’Afrique du Sud (Mayotte, La Réunion) ou la Chine (Polynésie, Nouvelle Calédonie). Le présent rapport revient sur cette problématique essentielle pour une croissance réellement durable de ces territoires.

Dans ce contexte de fragilité économique et potentiellement de crise sociale, l’Outre-mer est en quête d’une stabilité qui seule offrirait aux acteurs économiques la visibilité à moyen terme dont ils ont besoin. S’agissant du financement du développement de l’Outre-mer, le Gouvernement a souhaité une certaine continuité en excluant l’Outre-mer du « plafonnement global des niches fiscales ». Cette décision apparaît comme un gage de stabilité et le Rapporteur spécial s’en réjouit.

En effet, les dépenses budgétaires peuvent être remises en cause chaque année à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances (PLF) et notamment en période de crise des finances publiques ; les exonérations fiscales permettant de libérer les énergies apparaissent de ce fait plus susceptibles de générer de l’activité.

Le Rapporteur spécial a spécifiquement demandé au Gouvernement de préserver l’incitation fiscale spécifique à l’Outre-mer quelles que soient les majorités politiques. Pour 2013, le projet de loi de finances préserve les dispositifs fiscaux incitatifs.

À cet effet, l’effort financier de l’État à destination spécifique de l’Outre-mer demeurera essentiellement fiscal. En effet, le montant des dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission Outre-mer s’élèverait en 2013 à 3 056 millions d'euros, soit 1,49 fois le montant des crédits de paiement prévus pour la mission.

La mission Outre-mer porte les crédits correspondant en principe à des mesures propres à l’Outre-mer, mises en œuvre par le ministère chargé de l’Outre-mer. Mais les collectivités ultramarines bénéficient par ailleurs, comme toutes les collectivités françaises, d’une fraction des crédits portés par de nombreuses autres missions, sans que ces crédits répondent aux spécificités ultramarines.

L’effort budgétaire global de l’État est retracé dans un document de politique transversale (DPT), qui détaille par missions et programmes les crédits destinés à l’Outre-mer, ainsi que les prélèvements sur recettes (comme par exemple la dotation globale de fonctionnement) dont bénéficient ces collectivités.

Le DPT 2013 fait état d’un effort global de 13,79 milliards d’euros en AE et de 13,74 milliards d’euros en CP contre respectivement 13,93 milliards d’euros et 13,6 milliards d’euros en LFI 2012.

CHIFFRES CLÉS

Les crédits demandés pour 2013 sur la mission Outre-mer s’élèvent à 2,18 milliards d’euros en autorisations d’engagement contre 2,11 milliards d’euros l’an dernier et 2 milliards d’euros en crédits de paiement contre 1,96 milliard d’euros, soit une progression de respectivement 3,3 et 3,7 % par rapport à 2012.

Ces crédits représentent seulement une petite fraction de l’effort global de l’État en faveur des collectivités ultramarines. Le document de politique transversale fait en effet état d’un effort global de la Nation de 13,79 milliards d’euros en AE et de 13,74 milliards d’euros en CP. De plus les dépenses budgétaires de la mission sont inférieures aux dépenses fiscales rattachées (un peu plus de 3 milliards d’euros en 2013). Le Gouvernement a tout de même fait le choix d’exclure les dépenses fiscales Outre-mer du plafonnement global des « niches fiscales » à 10 000 euros. Les « niches fiscales » Outre-mer continueront donc à bénéficier d’un plafonnement global de 18 000 euros majorés de 4 % du revenu imposable du foyer fiscal.

Le Rapporteur spécial rappelle la fragilité d’économies insulaires cumulant les handicaps structurels : insularité, marché domestique étroit, inégalité importante. Le besoin impérieux de financement en faveur des collectivités ultramarines justifie aisément d’évaluer les conséquences d’un changement brutal de fiscalité avant tout changement des règles. Il convient donc de veiller à ne pas réduire le soutien de l’État à l’Outre-mer, a fortiori dans un contexte de crise économique et de tensions sociales.

Il appelle également à sortir de la dialectique dépenses fiscales contre dépenses budgétaires. Une fiscalité allégée offre aux entreprises ultramarines un regain de compétitivité dans un environnement de pays à faibles coûts salariaux et les dépenses budgétaires permettent de soutenir l’investissement des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages.

Le programme Emploi Outre-mer finance essentiellement la compensation des exonérations de charges patronales. La dette de l’État auprès des organismes de sécurité sociale semble en voie de résorption, même si le Rapporteur spécial n’a pas encore reçu l’état de cette dette pour 2012.

Annoncé pour 2012, le doublement des effectifs du service militaire adapté ne sera effectif qu’en 2014.

Le programme Conditions de vie Outre-mer, assez composite, finance notamment :

– la politique du logement Outre-mer, notamment la réhabilitation de l’habitat insalubre, pour laquelle une loi de 2011 a créé de nouveaux outils ;

– la continuité territoriale, dont la réforme par la LODEOM commence à produire ses effets ;

– l’aide à la reconversion de l’économie polynésienne, profondément réformée en loi de finances pour 2011.

I.– DÉVELOPPER LES OUTILS D’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

A.– LES ÉVOLUTIONS LÉGISLATIVES ENVISAGÉES POUR L’OUTRE-MER : UNE POLITIQUE S’INSCRIVANT GLOBALEMENT DANS LA CONTINUITÉ

1.– La poursuite du processus de transfert des compétences à la Nouvelle-Calédonie issu de l’accord de Nouméa du 5 mai 1998

Conformément aux engagements pris par le Gouvernement précédent, le processus de l’accord de Nouméa, initié en 2008, s’est poursuivi depuis 2009.

Les transferts de compétences prévus par l'article 21-III de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie sont en cours d'achèvement.

Au 1er janvier 2012 a pris effet le transfert de la compétence en matière d'enseignement du second degré public et privé, d'enseignement primaire privé et de santé scolaire.

Conformément à la loi du pays n° 2009-11 du 28 décembre 2009, le transfert de la compétence en matière de police et de sécurité de la circulation aérienne intérieure prendra effet le 1er janvier 2013.

La loi du pays n° 2012-1 du 20 janvier 2012 a fixé la date du transfert de la compétence en matière de sécurité civile au 1er janvier 2014. Une annexe à la loi du pays a précisé les compétences transférées ainsi que les modalités de transfert.

La loi du pays n° 2012-2 du 20 janvier 2012 a fixé la date du transfert de la compétence en matière de droit civil, de règles concernant l'état civil et de droit commercial au 1er juillet 2013, sous réserve de la conclusion des conventions prévues aux articles 203 et 203-1 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie et de l'adoption d'un arrêté du Gouvernement constatant la réalisation des extensions des textes législatifs et réglementaires demandées par la Nouvelle-Calédonie. Une annexe à la loi du pays a précisé les compétences transférées ainsi que les modalités de transfert.

En définitive, s’agissant des compétences intermédiaires, l’ensemble des six compétences à transférer sur la période 2009-2014, énumérées à l’article 21-III de la loi organique du 19 mars 1999 modifiée, est soit déjà transféré soit en cours de transfert jusqu’à la date butoir du 15 mai 2014. Deux des trois établissements publics ont également été transférés à la date du 1er janvier 2012.

Dès lors, il ne reste à transférer que les compétences inscrites à l’article 27 de la loi organique (communication audiovisuelle, enseignement supérieur et administration, contrôle administratif et budgétaire des provinces, communes et de leurs établissements publics), à l’initiative du congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Le Gouvernement prendra part aux réflexions des signataires de l’accord de Nouméa pour permettre la pleine application de celui-ci dans le respect du consensus entre les différents partenaires. Le comité des signataires de l’accord devrait se réunir en présence du Premier ministre, avant la fin de l’année 2012, pour déterminer les prochaines étapes de son application.

2.– Refonte du Code minier : sortir de l’ambiguïté

Le nouveau code minier issu de l’ordonnance n° 2011-91 du 20 janvier 2011 portant codification de la partie législative du code minier précise l’état du droit en matière de recherche et d’exploitation des substances minérales en mer (domaine public, plateau continental et zone économique exclusive) et son livre VI expose l’état du droit en matière minière dans l’ensemble des collectivités ultramarines.

Reprenant le plan du code, il contient des dispositions particulières à la Guyane et à Mayotte et, lorsqu’il y a lieu, les dispositions d’adaptation du code à certaines collectivités à identité législative (départements d’Outre-mer, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon) ou les conditions limitatives de son application dans d’autres collectivités d’Outre-mer (Polynésie française, Wallis-et-Futuna) et en Nouvelle-Calédonie. Il contient également les dispositions applicables dans les Terres australes et antarctiques françaises. Ainsi, les matières relevant de la compétence de l’État en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises sont désormais régies par le code minier et non plus par un décret de 1954.

Le projet de loi portant ratification de l’ordonnance du 20 janvier 2011 précitée a été déposé sur le bureau du Sénat en mai 2012.

La partie réglementaire du code minier est en cours d’élaboration. Son examen par la commission supérieure de codification et par la Conseil d’État est prévu pour le deuxième semestre 2012 sous réserve de la refonte du code minier annoncée par le Gouvernement.

Le Rapporteur rappelle que les collectivités d’Outre-mer doivent assurer leur développement tout en préservant la qualité de vie des habitants. Une évaluation précise de la situation guyanaise à la suite de l’imbroglio concernant les forages off shore (1) devra être menée avec toute modification du code minier.

3.– Code des communications électroniques : extension à Wallis-et-Futuna

Le régime juridique des postes et communications électroniques en vigueur dans les îles Wallis-et-Futuna est issu du monopole historique de l’État. Il a révélé son obsolescence à l’occasion de l’émergence d’opérateurs privés notamment dans la perspective de la mise en œuvre de la téléphonie mobile. Le code des postes et communications électroniques de métropole (CPCE) n’est que très partiellement applicable et le monopole de fait de l’État apparaît difficile à maintenir.

Le Gouvernement s’est fixé pour objectif de donner un cadre législatif moderne aux activités de communications électroniques dans les îles de Wallis-et-Futuna. La solution privilégiée est l’adaptation du CPCE au territoire, plutôt que l’écriture d’un code particulier. Dans le cadre de ses travaux, le Gouvernement a demandé au Contrôle général économique et financier (CGFI) de lui apporter une expertise afin de confirmer la pertinence et la viabilité des options à retenir.

4.– Évolution institutionnelle de la Martinique et de la Guyane

Le Gouvernement poursuit la mise en œuvre des collectivités uniques de Martinique et de Guyane initiée par le précédent Gouvernement.

Après l’institution des commissions tripartites dans ces collectivités par le décret n° 2011-1905 du 19 décembre 2011, le Gouvernement élabore les projets d’ordonnance qui détermineront les règles budgétaires, financières et comptables applicables et assureront le transfert des personnels, des biens et des finances de la région et du département aux collectivités territoriales de Martinique et de Guyane. Ces ordonnances devraient être publiées avant la fin de l’année 2012.

5.– Évolution institutionnelle du département de Mayotte

Les lois du 7 décembre 2010 (loi organique n° 2010-1486 et loi ordinaire n° 2010-1487), relatives au département de Mayotte ont précisé les conditions d’organisation et de fonctionnement des nouvelles institutions locales et engagé le processus d’harmonisation juridique nécessaire à l’application du droit commun.

S’agissant de l’extension du droit commun, la loi n° 2010-1487 a rendu applicables à Mayotte plusieurs textes dans des domaines divers (copropriété, éducation nationale, protection du patrimoine culturel…) et a habilité le Gouvernement à procéder à diverses extensions dans un délai de 6 à 18 mois à compter de la publication de la loi.

C'est sur cette base que le Gouvernement a pris dix-sept ordonnances dans différents domaines (agriculture, action sociale, sécurité sociale, travail, justice, urbanisme, construction et logement, droit commercial...). Ces textes prévoient une mise à niveau du droit progressive et adaptée, afin de tenir compte des spécificités locales et de ne pas bouleverser localement les équilibres économiques et sociaux.

Par ailleurs, l’accession de la collectivité au statut de région ultra-périphérique de l’Union européenne en 2014 nécessite la transposition de l’acquis communautaire. Ainsi, le Gouvernement envisage-t-il notamment de modifier les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’entrée et au séjour des étrangers à Mayotte et au droit d’asile au cours de l’année 2013.

Le Rapporteur spécial estime dangereux aussi bien pour l’économie locale que pour la société la transposition « aveugle » de règles européennes non adaptées.

B.– ASSOUPLIR L’APPLICATION DES NORMES COMMUNAUTAIRES DANS LES RÉGIONS ULTRAPÉRIPHÉRIQUES

LE TRAITÉ EUROPÉEN OPÈRE UNE DISTINCTION ENTRE LES STATUTS DE RÉGION ULTRAPÉRIPHÉRIQUE (RUP) ET PAYS ET TERRITOIRE D’OUTRE-MER (PTOM)

Pour la France, la catégorie des DOM correspond au statut de RUP tandis que les autres statuts correspondent à celui de PTOM. Cependant, le changement de statut d’une collectivité en droit interne n’a pas de conséquence automatique sur son statut au regard du droit communautaire. Avant le traité de Lisbonne, le changement de statut d’un PTOM était difficile car une révision du traité était nécessaire. L’article 355 du traité de Lisbonne ouvre la possibilité (pour les territoires français, danois ou néerlandais), sur initiative de l’État membre concerné, d’une décision à l’unanimité du Conseil européen modifiant le statut à l’égard de l’UE d’un PTOM ou d’une RUP.

Ainsi, Mayotte, à la suite de la départementalisation, est passé du statut de PTOM à celui de RUP. Cette évolution lui permet notamment de bénéficier des fonds structurels. Par ailleurs, l’adaptation du droit applicable rendue nécessaire par la départementalisation entraînera l’applicabilité de l’acquis communautaire.

Une déclaration annexée au traité de Lisbonne indique que : « Les Hautes Parties Contractantes conviennent que le Conseil européen, en application de l’article 355, paragraphe 6, prendra une décision aboutissant à la modification du statut de Mayotte à l’égard de l’Union, de manière à ce que ce territoire devienne une région ultrapériphérique au sens de l’article 355, paragraphe 1, et de l’article 349, lorsque les autorités françaises notifieront au Conseil européen et à la Commission que l’évolution en cours du statut interne de l’île le permet ».

À l’inverse, Saint-Barthélémy, qui était auparavant rattaché à la Guadeloupe et qui est devenu en 2007 une Collectivité d’Outre-mer (COM) au sens de l’article 74 de la Constitution, demande à quitter la catégorie des RUP pour devenir un PTOM. Cette demande s’appuie sur une analyse des conséquences du statut de PTOM : le PIB de Saint-Barthélémy est supérieur de 75 % au PIB moyen de l’Union européenne, ce qui l’exclut du bénéfice des fonds structurels et l’application intégrale des normes européennes génère des coûts élevés. 

Source : rapport d’information sur l’avenir des relations entre l’Union européenne et les PTOM. Mme Annick Girardin et M. Hervé Gaymard. 10 février 2010

Ces deux exemples montrent le dilemme auquel sont confrontées les collectivités ultramarines entre un accès aux financements européens réservé aux RUP et une plus grande souplesse dans l’application de l’acquis communautaire apanage des PTOM.

Ces situations mènent à des situations absurdes. À titre d’exemple, la Guyane qui est adossée à la plus grande forêt équatoriale du monde se voit contrainte d’importer du bois de hêtre. En effet, les normes communautaires obligent le saumon à être fumé avec cette essence.

Par ailleurs, le Rapporteur spécial avait présidé sous la précédente législature une mission d’information relative au prix des carburants dans les DOM (2).

Cette mission avait relevé que la directive 2003/217/CE qui exige l’introduction sur le marché de carburants ayant une teneur en soufre égale ou inférieure à 10 ppm (10 parties par millions, soit l’équivalent de 10 grammes par tonne), à compter du 1er janvier 2005, sur une base géographique équilibrée ne s’est pas appliquée immédiatement aux DOM. Sur ce point, à la demande de la France, une dérogation a été introduite pour les régions ultrapériphériques, valable jusqu’au 1er janvier 2009, date à partir de laquelle la réglementation européenne s’applique intégralement à l’ensemble du territoire européen, y compris aux RUP. Ce n’est d’ailleurs par un hasard si les troubles en Guadeloupe ont débuté à ce moment-là et ont eu comme catalyseur le prix des carburants.

L’application de ces normes empêche les distributeurs ultramarins de s’approvisionner localement – Trinidad et Tobago ainsi que le Venezuela produisent du carburant meilleur marché – et renchérissent de facto le prix des carburants.

PROPOSITION N° 10 DU RAPPORT D’INFORMATION : PRÉPARER L’AVENIR DE LA SARA (3)

« L’implantation d’une activité de raffinage aux Antilles a été décidée il y a maintenant quarante années, dans un contexte géostratégique et géopolitique fondamentalement différent de celui que connaît le monde aujourd’hui.

C’est effectivement dans un contexte international de guerre froide, en 1969, que, sous l’impulsion du général de Gaulle, soucieux d’assurer les conditions d’une indépendance énergétique des Antilles françaises, la SARA a été créée. Le général de Gaulle souhaitait notamment renforcer la présence nationale par l’implantation sur le sol Antillais de compagnies pétrolières françaises (ELF et Total). L’approvisionnement des Antilles françaises et de la Guyane dépendait en effet de sociétés étrangères (Esso, Shell et Texaco).

À travers les activités de raffinage, la SARA et la Martinique ont su développer un véritable savoir-faire dans le domaine du traitement des hydrocarbures. Afin de procéder aux modifications de l’outil industriel pour parvenir à produire des carburants respectant les normes environnementales européennes, les ingénieurs et techniciens de la SARA ont acquis de véritables compétences dans les adaptations technologiques indispensables à la compatibilité des carburants et la réduction des gaz à effet de serre.

Il a été rapporté à la mission d’information que le laboratoire de la SARA était intervenu judicieusement dans l’expertise de carburéacteur non-conforme livré en Guyane et que la raffinerie avait su trouver les solutions technologiques appropriées à son retraitement pour le rendre compatible avec les normes européennes.

Par ailleurs, il convient de souligner que dans la zone géographique, au sens large, la SARA est le seul raffineur disposant d’un savoir faire technologique en matière d’adaptation de la production de carburants à la lutte contre le réchauffement climatique.

De façon à atteindre l’objectif de réduction de moitié des émissions de gaz à effet de serre, les pays industrialisés se sont engagés à faire baisser les leurs d’environ 80 % d’ici 2010, ce qui suppose l’application, dans nombre de ces pays, de spécifications drastiques, proches, voire identiques, à celles des normes européennes prochainement applicables. Au premier rang des pays concernés figurent les États-Unis ce qui suppose que ce continent et ses fournisseurs en produits raffinés devront, dans un proche avenir, produire des carburants répondant à des spécifications équivalentes à celles des normes européennes.

Cette perspective pourrait laisser augurer un développement futur de la seule unité de raffinage se situant à proximité de cette zone. Or, les capacités de production de la SARA ne suffisent pas à alimenter le marché des Antilles et de la Guyane, contraignant la SARA à importer annuellement des carburants. Par ailleurs, compte tenu de l’implantation du site de production en zone urbaine, toutes possibilités d’extension semblent compromises.

Dans ces conditions, on ne peut que s’interroger sur la stratégie future des compagnies pétrolières qui pourraient être tentées de se fournir sur des marchés de carburants raffinés produits à proximité. Cette tentation sera d’autant plus grande que ceux-ci devraient être offerts à un coût moindre du fait de la mutualisation des coûts, notamment de transport, et d’une production dans des unités beaucoup plus importantes. Les actionnaires de la SARA, souhaiteront-ils, sans garanties sur les marges qu’ils pourront réaliser, conserver un outil de production de petite capacité ou opteront-ils alors pour une restructuration de cet outil en fonction d’objectifs différents ? Ils pourraient notamment, profitant des compétences acquises en matière d’expertise des carburants par le laboratoire de la SARA, envisager un recentrage stratégique par le développement des activités de recherche ?

Faut-il attendre que les compagnies développent leurs propres stratégies ou, en liaison avec l’Union européenne, anticiper leurs éventuelles décisions ? Ne conviendrait-il pas plutôt de rebondir en s’appuyant sur l’outil existant et de développer, autant que faire se peut, une opportunité pour la Martinique et les RUP, en facilitant, au plus vite, en liaison avec les acteurs pétroliers et les acteurs locaux un pôle de compétitivité européen notamment sur la pollution et les normes environnementales des carburants ?

La création d’un pôle de compétitivité de dimension européenne, centré sur la recherche et la mise au point de carburants d’origine minérales susceptibles d’atteindre les objectifs futurs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, constituerait une véritable vitrine des engagements européens en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique pour l’ensemble du continent Nord et Sud américain.

En lançant un tel projet, la France et l’Europe démontreraient leurs engagements forts, en faveur de la réduction des gaz à effet de serre et de la lutte contre le réchauffement climatique, tout en marquant leur volonté de d’appuyer le développement futur d’un espace technologique européen innovant dans la zone Caraïbe.

Ce pôle de compétitivité de dimension européenne, voire mondiale, pourrait utilement travailler en partenariat avec des organismes existant ayant une vocation voisine, tel que le CEDRE (Centre de documentation, de recherche et d’expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux) de Brest, le pôle AVENIA en Aquitaine, renforçant ainsi les liens et les complémentarités entre la Martinique et la métropole. »

Le Gouvernement précédent avait saisi la Commission européenne d’une demande de dérogation à l’application à la Guyane des normes européennes en matière de composition des carburants. La Guyane constitue, certes, une enclave européenne sur un continent où les normes environnementales concernant les carburants sont nettement moins draconiennes.

Le Rapporteur spécial exhorte le Gouvernement à continuer à porter ces demandes de prise en compte des spécificités ultramarines.

Plus généralement, le Rapporteur spécial appelle le Gouvernement à mener les négociations afin de desserrer l’étau qui enserre les économies ultramarines dans des normes édictées dans le cadre de standards purement continentaux.

Le développement des collectivités ultramarines passe par une intégration accrue dans l’aire géographique naturelle. Il est de ce fait essentiel d’introduire plus de souplesse en matière de coopération juridique entre l’Union européenne et les collectivités ultramarines.

II.– CRÉDITS DE LA MISSION : DES MESURES ET DES FINANCEMENTS LARGEMENT RECONDUITS

A.– UNE MISSION PRÉSERVÉE DE LA BAISSE GÉNÉRALE DES DÉPENSES PUBLIQUES

1.– Les crédits demandés pour 2013 en légère augmentation par rapport à 2012

Avant d’entrer dans une présentation détaillée des deux programmes qui composent la mission, il faut remarquer que les crédits prévus pour 2013 sont en légère augmentation par rapport à ceux votés en 2012. En effet, les autorisations d’engagement progressent de 3,3 % passant de 2 118,6 millions d’euros à 2 189,9 millions d’euros et les crédits de paiement de 3,7 %, de 1 966,4 millions d’euros à 2 040,5 millions d’euros.

Par ailleurs, la programmation triennale fait apparaître une augmentation constante des crédits budgétaires. Elle fixe les plafonds de la mission Outre-mer à 2 069,4 millions d’euros en 2014 et 2 143,7 millions d’euros en 2015.

Il y a donc bien une exception faite en faveur de l’Outre-mer, eu égard à l’évolution de la norme de dépenses. Le Rapporteur spécial se réjouit que le Gouvernement pérennise l’effort entrepris sous la précédente législature en faveur des collectivités ultramarines.

Cette augmentation globale masque toutefois quelques redéploiements au sein de la mission.

2.– Des changements de périmètre

Une nouvelle action Pilotage des politiques des Outre-mer est créée au sein du programme 138 Emploi Outre-mer. Elle est la conséquence budgétaire de la création d’un ministère de l’Outre-mer indépendant du ministère de l’Intérieur.

Une grande partie des politiques sanitaires, sociales, culturelles, de jeunesse et sport en Outre-mer est désormais retracée au sein du programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances.

B.– LE PROGRAMME EMPLOI OUTRE-MER

Le programme le plus important de la mission en volume voit ses autorisations d’engagement progresser de 7 % pour s’établir à 1 405,6 millions d'euros et ses crédits de paiement augmenter de 4,2 %, à 1 395 millions d'euros. Le tableau ci-dessous détaille, pour chacune des deux actions du programme, l’évolution des crédits entre la loi de finances initiale (LFI) pour 2012 et le projet de loi de finances pour 2013 (PLF 2013).

PROGRAMME 138 : ÉVOLUTION DES CRÉDITS PAR ACTION

(en millions d’euros)

Programme / Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2012

Demandées pour 2013

Évolution (en %)

Ouverts en LFI pour 2012

Demandés pour 2013

Évolution (en %)

Emploi outre-mer

1 312,8

1 405,6

+ 7%

1 338,4

1 395

+ 4,2%

Soutien aux entreprises

1 088,7

1 116,3

+ 2,5%

1 089,2

1 116,3

+ 2,4%

Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle

224,2

236,3

+ 5,3

248,9

225,7

– 9,2%

Pilotage des politiques des Outre-mer (nouveau)

 

2,9

   

2,9

 

Source : projet annuel de performances

1.– L’action Soutien aux entreprises

a) Les exonérations de charges sociales : un dispositif essentiel

Depuis 1994, les quatre départements d’Outre-mer (DOM) et Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficient d’un dispositif d’exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale plus favorable que celui applicable en métropole, du fait de la situation dégradée de l’emploi.

Le dispositif a été modifié à plusieurs reprises, en dernier lieu par l’article 25 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des Outre-mer (LODEOM), qui est lui-même partiellement revenu sur le durcissement du régime introduit par l’article 159 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances initiale pour 2009.

En application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, l’État est en principe tenu de compenser aux organismes de sécurité sociale les sommes dont ils n’ont pu être crédités du fait de la mise en œuvre d’une politique d’exonérations.

LE PREMIER OBJECTIF ASSIGNÉ AUX EXONÉRATIONS DE CHARGES APPLICABLES OUTRE-MER EST DE FAVORISER LA CRÉATION D’EMPLOIS EN RÉDUISANT LE COÛT DU TRAVAIL

Le législateur a explicitement assigné au dispositif un objectif d’abaissement structurel du coût du travail, destiné à encourager les créations d’emplois dans le secteur marchand en modifiant de façon durable les comportements d’embauche des entreprises.

Le régime d’exonérations a pour vocation de permettre aux économies des DOM de faire face à plusieurs handicaps structurels : inadéquation entre le coût du travail et sa productivité apparente, le niveau de formation et de qualification des salariés très inférieur à celui de la métropole, la concurrence de la main-d’œuvre à bas coût des pays voisins, l’existence d’une économie parallèle.

La LODEOM a amorcé un recentrage du dispositif sur les moyens et bas salaires, en instaurant une dégressivité et une extinction à 3,8 SMIC (4,5 SMIC s’agissant des exonérations renforcées).

Source : Évaluation des dépenses sociales et fiscales spécifiques à l’Outre-mer. Inspection générale des finances. 2012

Depuis 2005, date à laquelle la charge de compenser les exonérations a été confiée au ministère de l’Outre-mer, le montant des crédits est tendanciellement insuffisant pour couvrir le montant total des exonérations. Une dette de l’État auprès des organismes de sécurité sociale s’est ainsi constituée, culminant à 486 millions d'euros fin 2008 selon la Cour des comptes (4).

Diverses mesures d’apurement prises au cours de l’exercice 2009 ont permis de résorber significativement la dette de l’État, estimée par le ministère de l’Outre-mer à 76,3 millions d'euros au début de l’exercice 2010.

Le Rapporteur spécial n’a pas à ce jour reçu de réponses de la Délégation générale à l’Outre-mer quant à l’état actuel de la dette à l’égard des organismes de sécurité sociale.

Au titre de l’exercice 2013, les besoins sont évalués à 1 157,3 millions d’euros.

Compte tenu de l’enjeu budgétaire attaché à la compensation des exonérations, il serait souhaitable que le Parlement soit mieux informé des modalités de chiffrage de cette dépense.

Du point de vue de la performance, les réalisations 2011 marquent une réduction de 34 % entre l’écart de taux de croissance de l’emploi salarié dans les entreprises d’Outre-mer exonérées de cotisations sociales et le taux global de croissance de l’emploi dans les DOM. Ce résultat est meilleur que l’année précédente.

Les prévisions 2012 traduisent une perspective de rééquilibrage du taux de croissance entre les entreprises exonérées et non exonérées. Les entreprises aidées combleraient alors leur handicap structurel.

Le comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales montre que sur une base 100 en 1999, les effectifs des entreprises des DOM exonérées atteignent 130 en 2006 tandis que ceux des entreprises de DOM non exonérées se situent à 124 et ceux des entreprises métropolitaines exonérées culminent à 104.

En attendant des études plus récentes, prenant notamment en compte les effets de la crise, le Rapporteur spécial exhorte le Gouvernement à poursuivre cette politique qui a démontré son efficacité pour soutenir l’emploi.

b) Les crédits destinés à l’aide au fret et à l’aide à la rénovation hôtelière en baisse

L’article 24 de la LODEOM a créé une aide aux entreprises des DOM, de Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna, destinée à abaisser le coût des intrants et des extrants, entendus respectivement comme :

– les produits importés dans les collectivités concernées pour y entrer dans un cycle de production ;

– les produits exportés, après un cycle de production dans ces mêmes collectivités, vers l’Union européenne.

Pour les DOM, l’aide au fret a vocation à être cofinancée par une aide communautaire, l’allocation additionnelle spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques.

Le régime de l’aide est présenté ci-dessous.

LE RÉGIME DE L’AIDE AU FRET

Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Saint-Martin, Saint-Barthélemy

Les dépenses de transport éligibles portent sur les liaisons maritimes ou aériennes directes ou avec escale d’un port ou aéroport situé sur le territoire européen de la Communauté, vers un port ou aéroport situé sur le territoire de la Guadeloupe, de la Martinique, de La Réunion, de la Guyane, de Saint-Martin ou de Saint-Barthélemy.

Le bénéficiaire de l’aide, lorsqu’elle porte sur des intrants, est en principe l’importateur, désigné en tant que tel sur les documents douaniers, dès lors qu’il supporte directement ou indirectement les coûts de transport.

Peuvent ouvrir droit au bénéfice de l’aide les transports maritimes de tous types de marchandises susceptibles d’entrer dans un processus de fabrication locale (intrants) ainsi que les produits fabriqués localement et destinés à la commercialisation sur le marché métropolitain (extrants). Par exception, les transports aériens des mêmes produits et marchandises sont également éligibles, lorsque la nature du fret le justifie.

Toutes les entreprises locales exerçant une activité de production peuvent bénéficier de l’aide au fret. Les activités d’achat-revente, en revanche, sont exclues du dispositif.

Le coût du transport maritime ou aérien inclut les assurances, les frais de manutention et de stockage temporaire avant enlèvement au port ou à l’aéroport. Lorsque l’aide porte sur des intrants, elle ne prend pas en compte les frais d’acheminement, ni du producteur métropolitain au port ou à l’aéroport, ni du port ou de l’aéroport au producteur local. Elle n’intègre pas davantage le coût induit par la durée du transport ou celui lié au stockage autre que celui, temporaire, lié à l’enlèvement des marchandises au port ou à l’aéroport.

Les taxes et les droits de douane ne sont pas compris dans la base éligible.

Pour chaque demande d’aide, la base éligible est calculée sur la base des coûts réels justifiés par facture, ou des montants figurant sur les documents douaniers ; le coût de transport retenu dans la base éligible ne pouvant excéder le coût d'un transport équivalent entre le département d'Outre-mer, Saint-Barthélemy ou Saint-Martin et la France métropolitaine.

Le montant global maximum de l’aide nationale cumulée à l’aide communautaire ne peut excéder 75 % de la base éligible.

Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte

À Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna, en l’absence de dispositif-cadre communautaire, des modalités spécifiques sont prévues. Les mêmes modalités s’appliquent aux entreprises situées à Mayotte, tant que celle-ci demeure sous statut PTOM.

Dans les collectivités territoriales de Wallis-et-Futuna, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, l’aide au fret se définit, comme dans les DOM, comme une aide au fonctionnement. Elle a pour objet la compensation du handicap d’éloignement et, à ce titre, elle couvre partiellement les dépenses de transport supportées pour l’acheminement des intrants et des extrants, sans limitation sectorielle.

Les dépenses de transport éligibles s’entendent :

– des prestations de liaison maritime ou aérienne, directes ou indirectes, entre la métropole, d’une part, et les collectivités de Wallis-et-Futuna, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte d’autre part ;

– des prestations de liaison maritime ou aérienne entre les îles de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les dépenses éligibles sont basées sur le coût réel du transport justifié par facture, ou sur les montants figurant sur les documents douaniers. Le coût de transport retenu dans la base éligible ne peut excéder le coût d'un transport équivalent entre les collectivités de Wallis-et-Futuna, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte d’une part et la France métropolitaine d’autre part. Aussi, la base éligible est plafonnée à hauteur du coût moyen constaté des prestations de transport pour une liaison maritime ou aérienne standard.

Le montant global maximum de l'aide correspond à 25 % de la base éligible.

Source : ministère chargé de l’Outre-mer, réponses au questionnaire budgétaire. PTOM = pays et territoires d’Outre-mer

2011 a été l’année de démarrage effectif du dispositif : 6 975 433 euros ont été engagés et 3 763 905 euros ont été payés. La sous consommation par rapport à la ressource initiale (plus de 32 millions d’euros) était conjoncturelle, le dispositif ayant nécessité un apprentissage de la part de l’ensemble des acteurs, services territoriaux de l’État et entreprises.

Malgré une mise en place tardive, 82 entreprises ont pu bénéficier en 2011 de ce nouveau dispositif.

 

AE

(euros)

CP

(euros)

Intrants Nombre de dossiers

Extrants

Nombre de dossiers

Nombre total de dossiers

nombre d'entreprises subventionnées

Guadeloupe

1 986 197,00

367 612,12

4

3

7

5

Guyane

478 265,45

 

28

4

32

28

Réunion

4 458 709,50

3 344 032,13

43

0

43

43

Mayotte

52 260,76

52 260,76

5

1

6

6

TOTAL

6 975 432,71

3 763 905,01

80

8

88

82

Source : ministère de l’Outre-mer

Les chiffres pour l’année 2012 ne sont pas encore disponibles.

– Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit une dotation de 9 millions d’euros pour les aides aux entreprises au titre du programme 138 Emploi outre-mer qui comprend à la fois l’aide au fret et l’aide à la rénovation hôtelière.

Au-delà des difficultés de mise en route de cette aide, résultant de la publication tardive du décret d’application, le Rapporteur spécial continue de s’interroger sur sa pertinence même ; en effet, dès lors qu’elle est limitée aux échanges entre l’Outre-mer et l’Union européenne, l’aide au fret ne favorise pas l’intégration des collectivités ultramarines dans leur environnement économique régional.

Il recommande donc d’élargir l’aide au fret à l’ensemble des importations et exportations et non pas uniquement celles en provenance ou en direction de l’Union européenne.

– Une partie des crédits de l’aide au fret est redéployée vers le financement de l’aide à la rénovation hôtelière.

L’article 26 de la LODEOM a créé une aide à la rénovation des établissements hôteliers situés dans les DOM, à Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et Saint-Martin.

Déterminé par décret en fonction du classement de l’hôtel, le montant de l’aide, qui ne peut être versée qu’une seule fois, ne peut excéder 7 500 euros par chambre à rénover, dans la limite de 100 chambres.

Les travaux ouvrant droit à l’aide doivent satisfaire deux conditions cumulatives :

– concerner des établissements de plus de 15 ans ;

– être réalisés directement par l’exploitant.

– Les crédits consacrés à l’aide au fret comme à la rénovation hôtelière seront en tout état de cause significativement inférieurs à ceux de 2012 qui étaient de 17 millions d’euros.

2.– L’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle

a) Initialement prévu pour 2012, un doublement des volontaires du service militaire adapté repoussé à 2014

Le Rapporteur spécial n’a pas reçu à ce jour de réponse à sa question relative à l’objectif de doublement des volontaires du service militaire adapté et aux moyens qui y seront consacrés.

b) Le passeport mobilité « formation professionnelle » mis en œuvre par la LADOM, seul opérateur du programme

Au-delà des crédits du SMA, l’action Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle finance :

– d’une part la subvention pour charges de service public versée à l’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité (LADOM), seul opérateur du programme ;

– d’autre part les actions mises en œuvre par celle-ci au titre de la formation professionnelle, particulièrement en mobilité.

PASSEPORT – MOBILITÉ FORMATION PROFESSIONNELLE

Ce dispositif vise à pallier les limites de l’offre locale de formation, à améliorer l’employabilité des jeunes ultramarins en offrant un parcours de formation adapté et à assurer ultérieurement leur insertion professionnelle par une orientation vers les secteurs en tension dans leurs départements et collectivités d’origine ou en métropole. Ce dispositif est doté de 20,3 millions d’euros en 2013.

La subvention pour charges de service public s’élèverait à 8,5 millions d’euros en 2013 contre 9,1 millions d'euros en 2012, en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Il s’agit d’une baisse significative pour un organisme chargé d’accompagner les jeunes ultramarins vers l’insertion professionnelle.

La société d’État, qui s’est substituée en février 2010 à l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’Outre-mer (ANT), percevrait en outre en 2013 :

– 20,3 millions d'euros pour le financement du passeport-mobilité « formation professionnelle », depuis le programme Emploi outre-mer ;

– 37 millions d'euros pour le financement de la continuité territoriale, depuis le programme Conditions de vie outre-mer.

Le budget de l’opérateur est par ailleurs constitué de ressources dont le montant prévisionnel pour 2013 n’a pas été communiqué dans les réponses au questionnaire budgétaire :

– des subventions des régions et des collectivités d’Outre-mer pour le financement des actions de formation ;

– un financement du Fonds social européen.

La forte augmentation du plafond d’emplois de LADOM (de 122 en 2011 à 150 en 2012 et 2013) résulte de l’intégration d’effectifs, jusqu’alors placés hors plafond, au titre de la gestion par l’Agence du dispositif de continuité territoriale.

3.– Création d’une action Pilotage des politiques de l’Outre-mer

La création du ministère de l’Outre-mer en tant que ministère de plein exercice a conduit à transférer sur des programmes de la mission une partie de ses crédits de fonctionnement portée jusqu’alors par le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur.

Ces crédits sont retracés dans une nouvelle action du programme 138. Ils représentent 2,9 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement. Le ministère de l’Intérieur continue tout de même à assurer les fonctions support dans un souci de mutualisation et d’économies d’échelle.

C.– LE PROGRAMME CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER

Si les crédits du programme 123 sont globalement stables depuis 2012,
(– 2,6 % en autorisations d’engagement et + 2,7 % en crédits de paiement), le tableau ci-après montre que certaines actions connaissent d’importantes variations.

PROGRAMME 123 : ÉVOLUTION DES CRÉDITS PAR ACTION

(en millions d’euros)

Programme / Action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertes en LFI pour 2012

Demandées pour 2013

Évolution (en %)

Ouverts en LFI pour 2012

Demandés pour 2013

Évolution (en %)

Conditions de vie outre-mer

805,7

784,3

– 2,6 %

628,3

645,5

+ 2,7 %

Logement

273

271,7

– 0,1 %

214,1

227

+ 6 %

Aménagement du territoire

208,8

184,8

– 11,4 %

144,4

164,9

+ 14,2 %

Continuité territoriale

51,4

51,4

0 %

51,4

51,4

0 %

Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports

32,2

5,4

– 83,1 %

32,1

5,4

– 83,1 %

Collectivités territoriales

188,4

187,8

– 0,3 %

158,3

161,4

+ 2 %

Insertion économique et coopération régionales

1,8

1,9

+ 5,5 %

1,8

1,9

+ 5,5 %

Fonds exceptionnel d’investissement

17

50

+ 194,1 %

19

25,9

+ 36,3 %

Appui à l’accès aux financements bancaires

33

30

– 9 %

7

7,5

+5,7 %

Source : Projet annuel de performances

1.– L’action Logement

Il faut tout d’abord signaler que la progression significative des crédits de paiement de l’action (+ 6 %) s’explique par la couverture d’engagements antérieurs.

a) En matière d’amélioration de l’habitat, une bonne dynamique enclenchée grâce aux outils de la loi de 2011

Globalement moins bon qu’en métropole, l’état de l’habitat Outre-mer fait l’objet d’une attention particulière des pouvoirs publics :

– à travers les aides à l’amélioration de l’habitat privé, octroyées sous conditions de ressources aux propriétaires occupants effectuant des travaux de remise aux normes de décence et de confort de leur logement (27 millions d'euros en autorisations d’engagement et 32,5 millions d'euros en crédits de paiement prévus pour 2013, contre respectivement 27 et 36 millions en 2012) ;

– plus encore à travers les actions de résorption de l’habitat insalubre (RHI), auxquelles seraient consacrés en 2013 36 millions d'euros d’autorisations d’engagement (stables depuis 2011) et 30 millions d'euros de crédits de paiement (– 4,4 %).

Il faut en effet rappeler qu’Outre-mer, environ 68 000 logements sont classés comme insalubres par l’État, la population occupant ces logements étant estimée à 150 000 personnes. La Guyane et Mayotte restent les collectivités les plus touchées par l’insalubrité.

Les travaux conduits depuis deux ans par notre collègue M. Serge Letchimy ont permis d’importantes avancées en matière de RHI. Le rapport remis en septembre 2009 à la ministre chargée de l’Outre-mer (5) a tout d’abord abouti à la réorientation partielle des fonds régionaux d’aménagement fonciers urbains (FRAFU) vers la viabilisation des quartiers d’habitat spontané ou insalubre. En conséquence, les préfets ont été destinataires en 2010 d’une circulaire interministérielle sur la mise en place de pôles départementaux de lutte contre l’habitat indigne et sur la création de plans communaux de lutte contre l’habitat indigne.

Par ailleurs, à l’initiative de M. Serge Letchimy et à l’action du Rapporteur spécial alors Président de la commission des Affaires économiques, le Parlement a adopté la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'Outre-mer. Cette loi prévoit notamment :

– l’octroi d’une aide financière versée aux occupants sans droit ni titre (d’un terrain public ou privé) par un maître d’ouvrage ou par son concessionnaire, à l’occasion d’une opération d’aménagement ou d’équipements publics ;

– la prise en compte de la notion d’habitat informel dans la définition de l’habitat indigne figurant à l’article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 modifiée visant à la mise en œuvre du droit au logement ;

– l’institution par arrêté du préfet d’un périmètre insalubre dont le contenu serait adapté à l’état des diverses constructions dans les secteurs d’habitat informel, périmètre moins rigide dans son contenu et ses effets de droit que le périmètre insalubre défini à l’article L. 1331-25 du code de la santé publique ;

– l’ouverture d’un droit à indemnisation des personnes à l’origine de l’édification de constructions exposées à un risque prévisible menaçant gravement des vies humaines, sous réserve qu’elles les occupent à titre de résidence principale ;

– la mise en place d’une procédure accélérée et simplifiée de déclaration des biens en état d’abandon manifeste, afin de permettre aux collectivités de récupérer le foncier disponible.

Depuis l’adoption de la loi, les pôles départementaux de lutte contre l’habitat indigne ont été créés dans chacun des départements concernés (hors Mayotte) en 2011 et 2012.

Bien que relativement longue, la constitution de ces pôles marque le point de départ d’une démarche institutionnelle partagée en matière de lutte contre l’habitat indigne. Elle donne une impulsion pour :

– l’engagement du repérage des terrains supportant un habitat informel ;

– la mise en œuvre des plans d’action départementaux et l’élaboration des plans communaux ou intercommunaux de lutte contre l’habitat indigne dont les modalités d’appui financier seront précisées dans une prochaine circulaire réformant les procédures de lutte contre l’habitat insalubre.

De plus, une formation « départements d’Outre-mer » a été instituée au Pôle national de lutte contre l’habitat indigne/PNLHI. Les buts de cette formation sont principalement de renforcer le niveau de connaissance nécessaire pour intervenir efficacement dans ce domaine, de construire une culture commune entre les services intervenant au nom de l’État à l’échelon départemental, d’améliorer l’efficience des agents concernés, et de repérer des formateurs potentiels dans les services de l’État dans les DOM pour assurer ensuite des formations dans ces départements.

Des cycles de formation ont été conduits en Martinique en juin 2010, à La Réunion en octobre 2010, en Guyane en février 2011 et en Guadeloupe en avril 2011. En avril 2012 un nouveau cycle de formation s’est tenu en Martinique et en Guadeloupe rassemblant les services de l’État concernés des Antilles et de la Guyane. Une formation se tiendra à Mayotte à l’automne 2012.

b) Partiellement financée par la défiscalisation, la construction de logements sociaux freinée par le manque de disponibilité foncière

Les besoins en logements sociaux sont particulièrement importants outre-mer, du fait d’une part d’une croissance démographique globalement très supérieure à celle de la métropole, d’autre part d’une forte proportion de ménages percevant des salaires faibles.

L’estimation du nombre de demandeurs pour les seuls DOM, fournie par les réponses au questionnaire budgétaire, est de 15 000 en Guadeloupe, 10 000 à 12 000 à la Martinique, 11 000 en Guyane, 22 300 à La Réunion et 700 à Mayotte.

Pour 2013, le Gouvernement se fixe un objectif de création de 6 260 logements locatifs dans les DOM contre 6 300 en 2012. Ce chiffre est malheureusement en retrait par rapport à la dynamique enclenchée lors de la précédente législature alors même que les besoins demeurent considérables.

155,2 millions d'euros en autorisations d’engagement et 103,5 millions d'euros en crédits de paiement seraient consacrés en 2013 au financement du logement social, au titre de la ligne budgétaire unique (LBU).

La satisfaction des besoins en logements sociaux se heurte dans la plupart des collectivités ultramarines au manque de disponibilité foncière, lié à la forte croissance démographique, à l’insularité et aux risques naturels et sismiques.

Partiellement réorientés vers la viabilisation des quartiers d’habitat spontané ou insalubre, les Fonds régionaux d’aménagement foncier urbain (FRAFU) – dotés depuis l’action Logement de 28 millions d'euros en autorisations d’engagement et de 25 millions d'euros en crédits de paiement – ont également pour mission de réaliser des opérations d’aménagement destinées au développement du logement social.

Afin de contribuer au relâchement des tensions foncières, la LODEOM a prévu plusieurs dispositifs, dont les effets se font attendre :

– l’article 35 permet la création d’un groupement d’intérêt public (GIP) pour la reconstitution des titres de propriété dans les DOM et à Saint-Martin, afin de faciliter la cession des terrains. Une mission de préfiguration, créée en mars 2010, a conclu en mars 2011 qu’il était plus judicieux de créer un GIP par collectivité, et non un GIP unique. Un projet de décret précisant les règles d’organisation et de fonctionnement des GIP a été préparé et déposé au Conseil d’État. Le Conseil d’État a estimé que la loi obligeait à créer un GIP unique. Le Rapporteur spécial appelle à rapidement se conformer à la loi afin de mettre en pratique le dispositif voté.

2.– L’action Aménagement du territoire

Le montant total des contrats de projet des DOM et des contrats de projet de développement des COM représente 1 926,6 millions d’euros dont 1 262 millions d’euros pour l’État avec 854,29 millions d’euros pris en charge par l’action Aménagement du territoire du programme 123.

S’agissant des quatre CPER, le montant initialement pris en charge par le programme 123 était de 268 millions d’euros et s’élève après transfert de crédits issus d’autres ministères à 297,9 millions d’euros.

Il convient en effet de rappeler que dans le cadre du Conseil Interministériel de l’Outre-mer (CIOM) du 6 novembre 2009, il a été décidé de regrouper les crédits de plusieurs ministères destinés au financement des CPER, à compter du 1er janvier 2011, au sein du programme 123 afin de donner aux représentants de l’État une plus grande souplesse dans la programmation des opérations.

a) Les contrats de projet (DOM)

– Le CPER 2007-2013 de la Guadeloupe : le montant des participations du contrat de projet de la Guadeloupe s’élève à 332,7 millions d’euros dont 169,5 millions d'euros pour l’État avec 66,8 millions d'euros sur le programme 123. Le montant cumulé des crédits engagés de 2007 à 2011 s’élève à 41,3 millions d’euros soit un taux d’engagement de plus de 62 %, conforme à la programmation des opérations contractuelles au niveau national. 11,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 10 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus par le projet de loi de finances afin de financer des opérations relatives à l’agriculture, à la pêche ainsi qu’à la mise en conformité d’infrastructures d’adduction d’eau potable.

– Le CPER 2007-2013 de la Guyane : son coût prévisionnel total est de 169,2 millions d’euros, dont 134,9 millions d’euros de participation de l’État dont 61,8 millions d’euros sur le programme 123, 28,2 millions d'euros de la région et 6,1 millions d’euros du département. Le montant cumulé des crédits engagés de 2007 à 2011 s’élève à 31,8 millions soit un taux d’engagement de 51 %. 12 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 8,6 millions d’euros de crédits de paiement sont inscrits pour 2013 afin notamment de contribuer au désenclavement du territoire et à la rénovation urbaine de Cayenne et Kourou.

– Le CPER 2007-2013 de la Martinique : son coût prévisionnel total est de 443,2 millions d’euros, dont 141,6 millions d’euros de participation de l’État avec 56,4 millions d’euros sur le programme 123, 167,5 millions d’euros de la région et 134 millions d’euros du département. Le montant cumulé des crédits engagés de 2007 à 2011 s’élève à 20,4 millions d'euros soit un taux d’engagement de 36 %. Le CPER de la Martinique peine à rattraper son retard dû à la signature tardive du contrat (courant 2008) et aux mouvements sociaux de 2009 qui ont entraîné une mise en œuvre plus lente des opérations. 10,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 9,8 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus, concentrés sur l’amélioration de l’attractivité du territoire, le renforcement de la cohésion sociale et le développement des filières traditionnelles.

– Le CPER 2007-2013 de La Réunion : les crédits inscrits s’élèvent à 531,9 millions d’euros, répartis entre 257,6 millions d’euros de participation de l’État avec 112,8 millions d’euros sur le programme 123, 162,1 millions d’euros de la région et 112,2 millions d’euros du département. Le montant cumulé des crédits engagés entre 2007 et 2011 s’élève à 52,7 millions d'euros soit un taux d’engagement de 47 %. Le PLF prévoit 17 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 14,9 millions d’euros de crédits de paiement pour la formation et l’emploi, le renforcement de la cohésion sociale et à la réduction de la fracture insulaire.

Pour les quatre « régions » d’Outre-mer, le taux d’engagement des CPER est passé de 39 % au 31 décembre 2010 à 49 % au 31 décembre 2011. La signature tardive de ces contrats, leur adossement aux programmes opérationnels européens qui ont également connu des retards en termes de programmation et d’engagement, ainsi que les mouvements sociaux qu’ont connus les régions d’Outre-mer au début de l’année 2009, expliquent en partie ces retards d’exécution, qui sont en cours de rattrapage. Avec l’apport du plan de relance, qui a permis une accélération du rythme d’exécution des opérations contractualisées, les retards de programmation des CPER DOM s’amenuisent.

b) Les contrats de développement (COM)

– Le contrat de projets État– Mayotte 2008-2014 : il s’élève à 550,70 millions d’euros sur l’ensemble de la période dont 336,86 millions d’euros de part État. À mi-parcours et dans le contexte de la départementalisation de Mayotte, le contrat de projets a fait l’objet d’une révision substantielle en deux volets : une révision des opérations programmées dans le cadre du contrat de projets et dans le respect de l’enveloppe initiale, un raccourcissement du contrat de projet d’un an pour l’aligner avec l’ensemble des contrats projet État-Région. Mayotte entrera en 2014 dans le droit commun du CPER et pourra parallèlement accéder aux fonds européens. Elle vient en effet d’obtenir en juillet 2012 son statut de Région Ultra Périphérique (RUP) européenne à l’issue de la procédure engagée par le ministère des Outre-mer auprès de la Commission Européenne.

Le montant total des crédits engagés de 2008 à 2011 s’élève à 78,8 millions d’euros soit un taux d’engagement de 56 %. 17,9 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 15,3 millions d’euros de crédits de paiement seront mobilisés en faveur de l’égalité des chances, du développement durable et de la modernisation des exploitations acquacoles.

– Le contrat de développement État-Saint-Pierre-et-Miquelon 2007-2013 : il met en œuvre un ensemble de financements à hauteur de 43,12 millions d’euros sur la période 2007-2013, dont 19,29 millions d’euros issus de l’État, qui permettront la réalisation des opérations regroupées selon les axes suivants : consolidation des équipements, diversification économique, appui au développement de l'Archipel, amélioration des conditions de vie. Le montant des crédits engagés entre 2007 et 2011 s’élève au total à 6,3 millions d’euros soit un taux d’engagement de 48 % et représenteraient en 2013 1 million d’euros en autorisations d’engagement et 1,4 million d’euros en crédits de paiement.

– Le contrat de développement État-Wallis-et-Futuna 2012-2016 : le nouveau dont l’enveloppe globale s’élève à 49,035 millions d’euros dont 41,8 millions d’euros à la charge de l’État, sous réserve de la participation financière des établissements publics opérateurs de l’État (CNDS, AFITF…) et 7,235 millions d'euros à la charge du Territoire, a été signé le 9 mars 2012. Les axes retenus sont la santé, l’éducation et l’emploi d’une part et l’aménagement durable d’autre part. 4,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et 3 millions d’euros en crédits de paiement y seraient consacrés.

– Le contrat de projet État-Polynésie française 2008-2013 : d’un montant total de 435 millions d’euros, auquel l’État contribue à hauteur de 177 millions d’euros, le contrat de projet signé le 27 mai 2008 s’articule autour des priorités suivantes : le logement, la santé, les équipements structurants et l’éducation. Le montant des crédits engagés depuis 2008 s’élève à 47 millions d’euros soit un taux d’engagement de 27 %. Ce faible taux s’explique, d’une part, par l’instabilité politique qui a retardé le choix des opérations et, d’autre part, par une conjoncture économique très dégradée dans ce territoire. 24,9 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 15 millions d’euros de crédits de paiement en 2013 devraient participer à combler ce retard.

– Les contrats de développement État-Nouvelle-Calédonie 2011-2015 : conformément aux arbitrages du VIIIème comité des signataires de l’Accord de Nouméa du 24 juin 2010, la participation de l’État a été reconduite à hauteur de ses engagements soit 370 millions d’euros pour la nouvelle génération de contrats de développement 2011-2015. La réunion interministérielle du 30 juin 2011 a, par ailleurs, permis de déterminer le montant que les opérateurs apporteraient, soit 30 millions d’euros. Ainsi 400 millions d'euros sont prévus au total, soit une enveloppe identique à l’ancienne génération. Le contrat s’articule autour de deux axes : solidarité et cohésion sociale, aménagement durable. Le contrat serait doté en 2013 de 53 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 50,3 millions d’euros de crédits de paiement.

– Le contrat de développement de Saint-Martin 2011-2013 : signé le 23 décembre 2010, il est issu du changement de statut administratif du territoire de Saint-Martin. Il est d’un montant total de 81,52 millions d’euros, auquel l’État contribue à hauteur de 30 millions d’euros au titre du contrat de développement et 5,63 millions d’euros au titre du volet territorial du CPER Guadeloupe. Le montant des crédits engagés pour 2011 s’élève à 7,4 millions d’euros soit un taux d’engagement de 21 %. 7 millions d’euros en autorisations d’engagement et 4,7 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus pour 2013.

Par ailleurs, l’action finance également des opérations non contractualisées comme le plan séisme Antilles et la résorption de l’habitat insalubre.

3.– L’action Continuité territoriale finançant essentiellement le fonds de continuité territoriale

La loi du 27 mai 2009 (LODEOM) a créé un fonds de continuité territoriale pour le financement des aides au déplacement des résidents d'Outre-mer, et a réorganisé lesdites aides, tout en conservant la structure par public cible :

– l'aide à la continuité territoriale pour tout public, en prolongement de la dotation de continuité territoriale (ACT) ;

– le passeport-mobilité études pour les étudiants et les lycéens (PME) ;

– le passeport-mobilité formation professionnelle (PMFP) pour les personnes ayant un projet d'insertion professionnelle.

Les ayants-droit doivent avoir leur résidence habituelle dans l'une des collectivités suivantes de l'Outre-mer français : la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, La Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

Le bénéfice de ces aides est désormais soumis à des conditions dont trois sont communes :

– la condition de résidence : le demandeur de l'aide justifie que sa résidence habituelle est sise dans l'une des collectivités énumérées ci-dessus ;

– la condition de ressources : le demandeur doit justifier de ressources inférieures à un montant maximum fixé par arrêté, qui peut varier suivant l'aide et la collectivité de résidence ;

– la condition de non-cumul : les aides du fonds de continuité territoriale ne sont pas versées plus d'une fois par année civile à la même personne.

L'aide ne peut pas dépasser les frais engagés par le bénéficiaire.

Les déplacements aidés sont effectués par le mode aérien en classe économique ou équivalente.

Le Fonds serait doté de 47,2 millions d’euros en 2013.

4.– L’action Sanitaire, social, culture, jeunesse et sport partiellement ventilée sur d’autres missions du budget général

L’essentiel des crédits de l’action servait jusqu’à présent à financer l’Agence de santé de Wallis-et-Futuna (25,9 millions d'euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement en 2012). Le ministère chargé de l’Outre-mer indique qu’après plusieurs demandes « de transfert sur la mission relevant du ministère de la Santé », les crédits ont enfin rejoint le droit commun.

Ce changement de périmètre explique la baisse de plus de 83 % de la dotation. Sur les 4,3 millions d’euros, 3 millions d’euros seraient affectés au financement d’actions de santé dans les collectivités d’Outre-mer et 1,3 million d’euros à des actions culturelles à destination de la jeunesse.

5.– Un soutien à la reconversion de l’économie polynésienne absorbant l’essentiel des crédits de l’action Collectivités territoriales

L’objectif de cette action est le suivant :

– maintenir la capacité financière des collectivités territoriales ultramarines et favoriser l’égal accès aux services publics locaux ;

– apporter une aide d’urgence financière et humaine aux populations et aux collectivités frappées par des cataclysmes naturels.

L’aide à la reconversion de l’économie polynésienne absorbe 151,2 millions d’euros d’autorisations d’engagement sur 185,7 millions d’euros et 125,2 millions d’euros de crédits de paiement sur un total de 157,7 millions d’euros.

Le reste est affecté à la dotation d’équipement scolaire en Guyane (10 millions d’euros en autorisations d’engagement et 7,9 millions d’euros en crédits de paiement), au Fonds intercommunal de péréquation en Polynésie française (9 millions d’euros autorisations d’engagement et crédits de paiement), à une dotation de rattrapage et de premier équipement des communes de Mayotte (8,9 millions d’euros autorisations d’engagement et crédits de paiement), à une subvention d’équilibre des budgets de Wallis-et-Futuna et des Terres australes (6,3 millions d’euros autorisations d’engagement et crédits de paiement) et à l’Agence de développement économique de Nouvelle-Calédonie (0,26 million d’euros autorisations d’engagement et crédits de paiement).

RÉGIME D’AIDE À LA RECONVERSION DE L’ÉCONOMIE POLYNÉSIENNE

Le régime de l’aide à la reconversion de l’économie polynésienne, mis en place au lendemain de la cessation des essais nucléaires afin de garantir à la Polynésie le maintien des ressources que lui procurait l’activité du Centre d’expérimentation du Pacifique, a été profondément réformé par l’article 168 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

Mise en place en 2002 afin de succéder au fonds pour la reconversion de l’économie de la Polynésie française (FREPF), la dotation globale de développement économique (DGDE) était servie annuellement à la Polynésie française, à hauteur de 150,92 millions d'euros. À l’origine, la DGDE a été conçue comme une dotation d’investissement, mais jusqu’à 50 % de son montant ont en pratique été affectés à des dépenses de fonctionnement. En outre, le suivi a posteriori des dépenses engagées au moyen de la DGDE – versée en une seule fois en début d’exercice – s’est révélé délicat.

La réforme de 2011, que le précédent Gouvernement a mis en œuvre, a substitué trois nouvelles dotations à la DGDE :

– une dotation globale d’autonomie pour la Polynésie française (6) (dotation de fonctionnement représentant 60 % du montant de la DGDE, soit 90,8 millions d'euros d’autorisations d’engagement en 2013) ;

– une dotation territoriale pour l’investissement des communes de la Polynésie française (6 % de la DGDE, soit 9 millions d'euros d’autorisations d’engagement en 2013) ;

– un concours de l’État aux investissements prioritaires de la Polynésie française (34 % de la DGDE, soit 51,3 millions d'euros d’autorisations d’engagement en 2013, et 25,4 millions d'euros de crédits de paiement pour couvrir les engagements 2013).

6.– L’action Insertion économique et coopération régionales : une action à renforcer

Cette action vise à favoriser l’intégration et l’insertion économique des départements et collectivités d’Outre-mer dans leur environnement régional tout en affirmant la présence française dans ces zones. Il s’agit notamment d’inciter les collectivités à réduire leur isolement et à développer les échanges avec leurs voisins.

Si les objectifs sont louables, la faiblesse de la dotation budgétaire, soit 1,9 million d’euros, ne permettra sûrement pas de l’atteindre.

Le Rapporteur spécial rappelle l’importance de sortir d’une économie trop largement tournée vers l’Europe et de permettre enfin aux collectivités ultramarines de profiter pleinement du dynamisme de leur zone où se situent nombre de pays émergents. La faiblesse de la dotation de l’action est de ce fait, à regretter.

7.– De nouveaux programmes seront lancés depuis l’action Fonds exceptionnel d’investissement

Le fonds exceptionnel d’investissement (FEI) a pour objet d’apporter une aide financière de l’État à des investissements publics structurants réalisés dans les collectivités ultramarines.

Les crédits du FEI ont été inscrits sur la mission Outre-mer dès la loi de finances pour 2009, avant même sa création officielle par l’article 31 de la LODEOM. Initialement doté de 39,6 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 15,8 millions d’euros en crédits de paiement, le FEI a été massivement abondé au titre du Plan de relance de l’économie. Ce sont, au final, 158 millions d’euros en autorisations d’engagement et 46 millions d’euros en crédits de paiement qui ont été consommés en 2009. La loi de finances pour 2010 a ramené le montant des crédits au niveau de la programmation initiale de 2009, soit 40 millions d'euros en autorisations d’engagement et 17 millions d'euros en crédits de paiement. En loi de finances initiale 2011, le niveau des autorisations d’engagement a été divisé par quatre (10 millions d’euros), et celui des crédits de paiement porté à 21,5 millions d'euros.

En 2012, les autorisations d’engagement ont significativement augmenté (17 millions d'euros), le ministère de l’Outre-mer ayant décidé le lancement de nouveaux programmes.

Le projet de loi de finances pour 2013 poursuit la tendance observée en 2012 puisque le Fonds est abondé à hauteur de 50 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 25,9 millions d’euros en crédits de paiement. Le Fonds devrait être doté de 150 millions d’euros sur la période 2013-2015 afin de financer des opérations de désenclavement, d’adduction d’eau, de gestion des déchets ou de prévention des risques naturels.

8.– L’action Appui à l’accès aux financements bancaires

Cette action finance depuis 2010 des mesures dont la création avait été annoncée par le CIOM :

– une bonification des prêts octroyés aux entreprises et aux collectivités territoriales d’Outre-mer par l’Agence française de développement (AFD) ;

– un fonds de garantie agriculture et pêche, afin de faciliter l’accès au crédit bancaire des exploitants agricoles.

Cette année, la totalité des crédits de l’action servira en 2013 au financement des prêts AFD (30 millions d’euros en autorisations d’engagement et 7,5 millions d’euros en crédits de paiement) puisque le projet annuel de performances ne fait plus mention du fonds de garantie agriculture et pêche.

III.– LE SOUTIEN DE L’ÉTAT À L’OUTRE-MER PASSE ESSENTIELLEMENT PAR LA DÉPENSE FISCALE

A.– DES DÉPENSES FISCALES, DONT LE MONTANT EST SUPÉRIEUR À CELUI DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES, MAINTENUES EN 2013

1.– Un montant des dépenses fiscales rattachées à titre principal à la mission Outre-mer supérieur à celui des crédits budgétaires

Ce montant s’élèverait en 2013 à 3 056 millions d'euros, soit 1,49 fois le montant des crédits de paiement prévus pour la mission.

DÉTAIL DE LA DÉPENSE FISCALE EN FAVEUR DE L’OUTRE-MER

(en millions d’euros)

Objet de la mesure

2011

2012

2013

Dépenses fiscales sur impôts d’État contribuant au programme Emploi outre-mer

Exonération de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion

185

190

190

Régime particulier de TVA des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion. Déductibilité de la taxe afférente à certains produits exonérés

100

100

100

Abattement d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés applicable aux bénéfices des entreprises provenant d’exploitations situées dans les DOM

72

74

74

Exonération des taxes sur le chiffre d’affaires des opérateurs du secteur audiovisuel et de communications électroniques établis dans les DOM, pour les activités qu’ils y exercent, jusqu’à la disparition des messages publicitaires sur le service public audiovisuel.

5

5

5

Imputation de l’impôt sur le revenu global, sur agrément, des déficits industriels et commerciaux non professionnels provenant de la location d’un hôtel, d’une résidence de tourisme ou d’un village de vacances classé, situé dans les DOM, et ayant fait l’objet de travaux de rénovation ou de réhabilitation

0

0

0

Exonération d’impôt sur les sociétés, sur agrément, des bénéfices réinvestis dans l’entreprise pour les sociétés de recherche et d’exploitation minière dans les DOM

e

e

e

Exonération d’impôt sur les sociétés, sur agrément, des bénéfices en cas de création d’activité nouvelle dans les DOM

0

0

0

Prise en compte de l’impôt sur les sociétés sur une base réduite des résultats provenant d’exploitations situées dans les DOM.

Abattement du tiers

185

-

-

Total pour le programme

547

369 

369

Dépenses fiscales sur impôts d’État contribuant au programme
Conditions de vie outre-mer

Régime de TVA des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion. Fixation des taux à : 8,5 % pour le taux normal ; 2,1 % pour le taux réduit

1 140

1 225

1 255

Réduction d’impôt sur le revenu à raison des investissements productifs réalisés dans les départements, territoires et collectivités territoriales d’Outre-mer, avant le 31 décembre 2017

Girardin productif

700

480

410

Réduction d’impôt sur le revenu au titre des investissements locatifs et de la réhabilitation de logements situés dans les départements d’Outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises

Girardin locatif

355

355

265

Réduction de l’impôt sur le revenu, dans la limite d’un certain montant, pour les contribuables des DOM (30 % en Guadeloupe, Martinique et à La Réunion ; 40 % en Guyane)

295

295

300

Exclusion des DOM du champ d’application de la taxe intérieure de consommation applicable aux carburants

104

104

104

Réduction d’impôt sur le revenu au titre des investissements effectués dans le secteur du logement social, dans les départements et collectivités d’Outre-mer.

Défiscalisation du logement social

11

70

80

Taux réduit de TVA (2,1 %) applicable aux ventes et apports de terrains à bâtir, aux constructions et ventes de logements neufs à usage locatif réalisés dans le cadre d’investissements locatifs donnant lieu à défiscalisation

10

20

nc

Réduction d’impôt sur le revenu en faveur des investissements locatifs réalisés outre-mer

Scellier outre-mer

9

12

11

Réduction d’impôt sur le revenu en faveur des investissements locatifs réalisés outre-mer dans le secteur intermédiaire

Scellier intermédiaire outre-mer

5

6

6

Réduction de 50 % des tarifs des droits d’enregistrement et de timbre en Guyane

3

3

3

Réduction du taux d’imposition des plus-values réalisées lors de la cession de participations substantielles par des contribuables domiciliés dans les DOM

3

3

3

Réduction d’impôt en faveur des résidents des départements et collectivités d’Outre-mer au titre de la souscription de parts de fonds d’investissement de proximité (FIPOM) investis dans des sociétés qui exercent leurs activités dans ces départements et collectivités.

-

2

2

Exonération de TVA des transports maritimes de personnes et de marchandises dans la limite de chacun des départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion

ε

ε

ε

Déduction d’impôt sur les sociétés des investissements productifs réalisés dans les départements, territoires et collectivités territoriales d’Outre-mer et des souscriptions au capital de sociétés qui réalisent de tels investissements

Défiscalisation à l’IS

175

180

180

Total pour le programme

2 810

2 755

2 639

Dépenses fiscales sur impôts locaux, prises en charge par l’État, contribuant au programme Conditions de vie outre-mer

Exonération partielle des terres agricoles situées dans les DOM (taxe foncière sur les propriétés non bâties)

8

8

8

Abattement de la cotisation sur la valeur ajoutée en faveur des entreprises dont les établissements situés dans les DOM peuvent bénéficier d’un abattement sur leurs bases nettes imposables à la CFE en l’absence de délibération contraire d’une commune ou d’un établissement public de coopération intercommunale

9

20

nc

Abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties sur la base d’imposition des établissements situés dans les DOM

3

8

8

Abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des immeubles anti-sismiques des DOM

0

0

0

Abattement sur la base nette imposable des établissements situés dans les départements d’Outre-mer

0

12

nc

Total pour le programme

20

48 

48 (7)

Total pour la mission Outre-mer

3 377

3 172

3 056

Source : projet annuel de performances

Le tableau précédent appelle une remarque : les dépenses fiscales non renseignées sont curieusement les plus dynamiques. En effet, le coût du taux réduit de TVA (2,1 %) applicable aux ventes et apports de terrains à bâtir, aux constructions et ventes de logements neufs à usage locatif réalisés dans le cadre d’investissements locatifs donnant lieu à défiscalisation est passé de 10 millions d’euros en 2011 à 20 millions d’euros en 2012.

Par ailleurs, l’abattement de la cotisation sur la valeur ajoutée en faveur des entreprises dont les établissements situés dans les DOM peuvent bénéficier d’un abattement sur leurs bases nettes imposables à la CFE en l’absence de délibération contraire d’une commune ou d’un établissement public de coopération intercommunale présente un coût pour les finances publiques de 20 millions d’euros alors qu’il était de 9 millions d’euros en 2011.

2.– L’Outre-mer écarté de l’abaissement du plafonnement global de certains avantages fiscaux à l’impôt sur le revenu

Le plafonnement global des réductions et crédits d’impôt à caractère incitatif ou liées à l’investissement, mis en place à compter de l’imposition des revenus de l’année 2009, comprend une part proportionnelle au revenu imposable de 4 % et une part forfaitaire de 18 000 euros.

L’article 56 du projet de loi de finances pour 2013 propose d’abaisser le niveau de ce plafonnement global en diminuant la part forfaitaire de 18 000 euros à 10 000 euros et en supprimant la part proportionnelle. Toutefois, afin de préserver l’attractivité des investissements ultramarins, qui nécessitent la mobilisation de montants importants – eu égard à l’exiguïté du marché domestique, à l’insularité et aux difficultés économiques et sociales structurelles – le plafonnement actuel sera maintenu pour des réductions d’impôt sur le revenu en faveur des investissements outre-mer (investissements immobiliers, productifs et dans le logement social visés aux articles 199 undecies A, B et C du code général des impôts).

B.– DÉFISCALISATION : ÉVITER TOUT DOGMATISME

Le ministre délégué au budget a indiqué que le dispositif de défiscalisation serait revu durant l’année 2013. Le Rapporteur spécial rappelle les difficultés structurelles auxquelles sont confrontées les économies ultramarines.

Elles font par ailleurs face à la concurrence d’économie de pays à très faibles coûts salariaux. Les baisses ciblées de fiscalité représentent donc non pas un « cadeau », mais une tentative de maintenir la compétitivité de larges pans de l’économie ultramarine.

Le rapport (8) de l’Inspection générale des finances sur les niches fiscales souligne en conclusion que : « l’insuffisante collecte de données en gestion limite la capacité de pilotage de certains dispositifs et les possibilités d’évaluation fine, en particulier concernant la défiscalisation de plein droit ».

Par ailleurs, un plafond de 10 000 euros d’avantage fiscal signifie pour la procédure des investissements productifs telle qu’elle est définie à l’article 199 undecies B du code général des impôts un investissement maximum de 59 000 euros pour les investissements indirects (qui sont les plus nombreux) compte tenu du taux de rétrocession de 62,5 %. La réduction d’impôt à laquelle le contribuable a droit dans ce dernier cas est de 26 600 euros. Actuellement en prenant en compte le plafond Outre-mer à 30 600 euros, un investisseur a droit à un investissement de 181 300 euros. C’est dire qu’il faudrait plus de 3 fois plus d’investisseurs pour réaliser un même investissement.

Un tel accroissement du nombre des investisseurs renchérirait les coûts de gestion de la procédure, en allongerait les délais sans avoir la garantie que le nombre nécessaire d’investisseurs sera trouvé. Les monteurs qui fédéreront plus de 100 investisseurs sur un même projet devront obtenir un agrément AMF. Il s’agit quasiment d’un métier différent. La rapidité et la relative simplicité de la procédure qui ont fait son succès et permis la plus grande part des investissements Outre-mer seraient donc perdues.

S’agissant de la défiscalisation des logements sociaux (article 199 undecies C du CGI), le maximum d’investissement par contribuable serait de 57 200 euros, compte tenu d’une réduction d’impôt de 28 600 euros et d’un taux de rétrocession de 65 %. Avec l’actuel plafond Outre-mer de 40 000 euros pour ces investissements, le montant maximum d’investissements est de 228 600 euros. Il faudrait donc dans ce cas 4 fois plus d’investisseurs.

Les exemples donnés ci-dessus considèrent que le contribuable réalise l’ensemble de ses avantages fiscaux sur des investissements outre-mer, or ce n’est généralement pas le cas.

Le plafond va aussi abriter les salaires des personnels à domicile dont une partie est défiscalisée et de nombreux contribuables peuvent aussi avoir réalisé des investissements patrimoniaux, acquisition de logements par exemple, en partie encore défiscalisés.

Le plafond de 10 000 euros sera donc le plus souvent déjà atteint avec ces avantages et le contribuable les préférera le plus souvent aux investissements outre-mer, parce qu’ils font partie de sa vie domestique ou visent à augmenter son patrimoine.

Les investissements outre-mer sont plus risqués et n’ont aucun aspect patrimonial pour le contribuable. Il ne les réalisera que s’il dispose encore de place sous son plafond et si l’avantage fiscal est suffisamment attractif.

En conséquence, toute baisse des plafonds conduit mécaniquement à réduire l’aide accordée aux exploitants ultramarins.

S’il était opportun que la procédure soit « moralisée » et que les montants d’avantages fiscaux soient réduits de façon à éviter que de gros contribuables puissent s’exonérer totalement de leurs impôts, une contraction extrême et brutale des avantages fiscaux conduirait à tuer l’aide aux investissements outre-mer sous cette forme, sans qu’aucune alternative n’existe à ce stade.

C.– LES AVANTAGES CONSENTIS AUX AGENTS DE L’ÉTAT EN POSTE DANS LES DOM

Les fonctionnaires de la fonction publique de l’État bénéficient d’une rémunération majorée par application d'un coefficient multiplicateur à leur traitement en fonction de la collectivité dans laquelle ils sont affectés, à l’exception de Mayotte, où ce dispositif n’est pas applicable, allant de 1,35 à La Réunion à 2,08 en Polynésie Française.

Cette indemnité est versée sur la base d’un séjour de deux ans qui constitue, selon les décrets du 26 novembre 1996, la période normale d'affectation des fonctionnaires de l'État dans les territoires d'Outre-mer. Elle est renouvelable une seule fois consécutivement.

Le Rapporteur spécial n’a pas reçu de réponse à sa question concernant les coûts de ces mesures de bonification et leur justification. En effet, si ces sur-traitements constituent un regain de richesse dans les collectivités ultramarines, elles constituent néanmoins un gisement potentiel d’économie pour les finances publiques.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 11 octobre 2012 à 14 heures, la commission des Finances examine les crédits de la mission Outre-mer en commençant par l’exposé du Rapporteur spécial.

M. le président Gilles Carrez. La tradition consistant à confier à un parlementaire de l’opposition le rapport spécial sur la mission Outre-mer nous permet d’avoir une approche non partisane de toutes les questions intéressant ces territoires. Je suis ravi qu’après Jérôme Cahuzac puis Claude Bartolone, le choix de la commission des Finances se soit porté sur Patrick Ollier qui, en amoureux de l’Outre-mer, a bien volontiers accepté cette charge.

M. Patrick Ollier, rapporteur spécial. Merci, monsieur le président, de le rappeler : j’ai apporté ces dernières années la preuve de ma passion pour ce sujet.

Le budget de l’Outre-mer est un budget de continuité. À ce titre, il constitue une forme d’hommage à la politique qui a réussi à préserver les collectivités ultramarines des effets les plus graves de la crise économique dont le monde a souffert à partir de 2008. En exonérant les niches fiscales spécifiques à l'Outre-mer de l'abaissement global du plafonnement des niches – j'y reviendrai –, en ménageant une légère hausse des dotations budgétaires et, enfin, en poursuivant la politique de développement du précédent Gouvernement, il rend justice à l’action menée de 2007 à 2012.

Sur quels outils repose cette politique ? Les collectivités ultramarines cumulent des handicaps structurels : éloignement, insularité, climat difficile, étroitesse du marché domestique. Ces handicaps, pour l'essentiel géographiques, nécessitent de se doter de dispositifs spécifiques visant à les compenser. La politique d'aménagement du territoire, conçue précisément pour cet objet et pour remédier aux déséquilibres territoriaux, justifie des traitements différents lorsque la situation objective le commande. Dans le même esprit, les zones de revitalisation rurale (ZRR) de la métropole, à la création desquelles j’ai contribué, avaient pour fin de favoriser l’installation d’entreprises et de développer l’emploi dans des régions cumulant des handicaps. C'est pourquoi les incitations fiscales en faveur de l'investissement et de l'emploi Outre-mer doivent être maintenues, car elles sont la condition indispensable à la création de richesses sur ces territoires.

Pour 2013, ces dépenses fiscales sont évaluées globalement à 3,05 milliards d'euros, soit 1,49 fois les dépenses budgétaires de la mission. Si cela peut paraître beaucoup, il faut savoir que plus d'un tiers de ce montant, soit 1,22 milliard d'euros, va au maintien d’un taux normal de TVA à 8,5 % et d’un taux réduit à 2,1 % ; or, qui pourrait contester cette utilisation au moment où la question de la vie chère fait l'objet d'un projet de loi soumis à notre approbation ? Quant au dispositif Girardin, de défiscalisation des investissements Outre-mer, le mettre sous le plafond reviendrait à le supprimer, à tarir tout investissement productif Outre-mer et à condamner ces territoires à une perfusion budgétaire éternelle. En effet, le plafond global va aussi abriter les salaires des personnels employés à domicile, dont une partie est défiscalisée, et de nombreux contribuables peuvent également avoir réalisé des investissements patrimoniaux
– acquisition de logements par exemple – en partie défiscalisés eux aussi. Le plafond de 10 000 euros sera donc le plus souvent déjà atteint avec ces avantages, qui auront en général la préférence du contribuable dans la mesure où les investissements Outre-mer sont plus risqués sans présenter de bénéfice pour sa vie domestique ou pour son patrimoine. Il ne réalisera ces investissements que s'il dispose encore de place sous son plafond et si l'avantage fiscal est suffisamment attractif.

En conséquence, toute baisse de plafond conduit mécaniquement à réduire l'aide accordée aux exploitants ultramarins.

S'il apparaît opportun de « moraliser » la procédure et de réduire les montants d'avantages fiscaux en sorte que de gros contribuables ne puissent s'exonérer totalement de leurs impôts, une contraction extrême et brutale conduirait à tuer le soutien aux investissements Outre-mer, en l’absence de dispositif alternatif.

En 2013, les dépenses budgétaires atteindront 2,11 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,18 milliards en crédits de paiement. Sur ce point également, nous constatons une certaine continuité.

Le programme 138 Emploi Outre-mer finance essentiellement la compensation des exonérations de charges patronales, pour 1 157 millions d'euros. La dette de l'État auprès des organismes sociaux a été résorbée en 2012 à la suite de la réforme opérée par la loi pour le développement économique des Outre-mer, la LODEOM, et grâce à un important effort de l'État. J'ai demandé plus de précisions sur le calcul ayant servi à déterminer le montant de la compensation en 2013, sans obtenir de réponse. Il conviendrait d'éviter que ne se reforme une dette supportée par les organismes de sécurité sociale. J'y serai vigilant.

Le programme 138 retrace également les crédits destinés au service militaire adapté – SMA –, au profit des jeunes ultramarins sortis du système scolaire sans qualification. Le président Sarkozy avait annoncé le doublement des effectifs du SMA, de 3 000 à 6 000 bénéficiaires, pour 2014. L'objectif a été réaffirmé et j'en remercie le Gouvernement. Toutefois, je m'interroge sur la réelle volonté de l'exécutif d'atteindre cet objectif : les crédits de paiement diminuent pour l'action 2, passant de 248 millions à 225 millions d'euros. Cette baisse risque de compromettre la montée en charge d'un dispositif qui fait aujourd'hui l'unanimité. J’espère obtenir sur ce point une réponse du Gouvernement en séance publique.

Enfin, une troisième action a été créée, intitulée Pilotage des politiques des Outre-mer, en conséquence de la décision de faire du ministère de l'Outre-mer un ministère de plein exercice. Cette autonomisation évitera peut-être au ministère de l'Intérieur de faire porter ses efforts de maîtrise de la masse salariale sur les effectifs Outre-mer, ce dont je me réjouirais.

Le programme 123 Conditions de vie Outre-mer finance, quant à lui, une série d'actions concernant notamment le logement et l'aménagement du territoire.

L'action Logement est dotée de 272 millions d'euros en autorisations d’engagement, et de 227 millions d'euros en crédits de paiement. La ligne budgétaire a été sanctuarisée sous la précédente législature afin de concourir aux opérations de logement social, notamment aux actions foncières et à la résorption de l'habitat insalubre.

L'action Aménagement du territoire concernant l'action des régions est dotée de 164,9 millions d'euros. Elle est constituée de transferts aux collectivités territoriales dans le cadre des contrats de plan État-régions – il s'agit de la part État contractualisée sous la précédente législature.

Je tiens cependant à souligner la faible part de l'action Insertion économique et coopération régionales, dotée de seulement 1,8 million d'euros. Il me semble en effet que notre pays a la chance d'être présent dans l'immédiat voisinage de pays dit « émergents ». Le développement du commerce de la Guyane et des Antilles avec le Brésil, de la Réunion et de Mayotte avec l'Inde et l'Afrique du Sud, et de nos îles du Pacifique avec la Chine, est une opportunité à ne pas manquer. Il faut donc tout mettre en œuvre pour développer les échanges au sein de ces zones géographiques.

Je ferai sur ce point une remarque qui n'a que peu d'incidence budgétaire, mais qui est d'une grande importance : elle a trait à la question des normes européennes. En effet, nos cinq départements d'Outre-mer ont le statut de régions ultrapériphériques – RUP – de l’Union européenne et, s’ils bénéficient à ce titre des fonds structurels, ils doivent appliquer intégralement des normes qui, édictées à des milliers de kilomètres de distance, ne prennent pas en compte les spécificités de ces territoires. Cet aveuglement participe au renchérissement des produits et à ce que l’on appelle aujourd'hui la vie chère. J'ai présidé une mission d'information sur les prix de l'essence aux Antilles à la suite des troubles sociaux de 2009. Les recommandations de cette mission sont toujours d'actualité : permettre aux collectivités ultramarines de se ravitailler en carburant moins cher sur le marché local et, pour cela, ne pas appliquer les normes européennes qui obligent à le faire venir de Rotterdam ou de Hong Kong. Je compte interpeller le Gouvernement en séance publique sur ce problème.

Une remarque concernant la jeunesse, et plus spécifiquement l'apprentissage. Au cours de mes auditions préparatoires, j'ai constaté la difficulté pour les entreprises de recruter des apprentis. J'interpellerai en conséquence le Gouvernement sur la possibilité d'alléger le coût de l'apprentissage pour les entreprises, en ouvrant aux apprentis le bénéfice du RSA activité. Cette mesure aurait l’avantage d’être peu coûteuse.

Enfin, l'article 26 du projet de loi de finances plafonne les ressources des opérateurs, notamment des chambres consulaires. Je rappelle simplement que celles d’Outre-mer se trouvent parfois en situation financière très délicate.

En conclusion, je donne un avis favorable à l’adoption de ce budget de continuité.

M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des Affaires économiques. Je me réjouis de la nomination de Patrick Ollier comme rapporteur spécial, car il a une parfaite connaissance des enjeux et des problématiques de l’Outre-mer, comme il l’a démontré à plusieurs reprises, en particulier s’agissant de l’habitat insalubre et du transfert de blocs de compétence en rapport avec le développement durable, dans le cadre du Grenelle I.

Je souligne également la justesse de son analyse de ce budget. La mission Outre-mer connaît en effet une évolution positive, qu’il convient de saluer dans ce contexte budgétaire difficile. Nous, ultramarins, n’avons cependant pas à demander toujours plus, mais à faire mieux en utilisant tous les moyens propres à susciter une dynamique de croissance partagée. Ce d’autant que l’effort budgétaire de l’État ne se réduit pas aux 2,1 milliards d’euros de cette mission, mais s’élève, tous ministères compris, à quelque 13 milliards d’euros.

Il convient également de saluer le maintien des exonérations.

Je partage le point de vue du rapporteur spécial sur l’apurement très important opéré dès 2007, notamment sur les dettes et les créances vis-à-vis des caisses. Néanmoins, nous n’avons pas encore de chiffres précis à cet égard.

La ligne budgétaire unique (LBU) a été sanctuarisée, comme nous l’avions demandé, et sa combinaison avec la défiscalisation semble donner de bons résultats. Cependant, je regrette que des dispositifs très intéressants pour le logement intermédiaire, notamment en faveur des primo-accédants ou de l’accession à la propriété, aient été supprimés. La dynamique du BTP dépend, certes, du logement social, mais aussi des logements intermédiaires destinés aux populations ayant un revenu médian. Il faudra donc poser la question de l’application du dispositif Scellier, ou d’un dispositif Duflot au cas où celui-ci se révélerait plus favorable.

Le moratoire sur les tarifs d’achat d’énergies renouvelables, notamment de l’électricité d’origine photovoltaïque, me préoccupe. Certes, il était légitime de réagir aux abus mais, en l’absence de ces tarifs, nous ne pouvons actuellement nous appuyer que sur des appels à projet, notamment pour l’éolien ; pour l’énergie photovoltaïque, le débat sur l’intégration ou la surimposition en toiture n’est pas tranché. On entend parler d’un tarif d’environ 22 euros. Il est important que cela puisse nous être confirmé, d’autant que des engagements pris avec de nombreuses entreprises ont été remis en cause. J’insiste sur cette question car il est très important de créer une dynamique de développement autour de pôles de compétitivité ou de pôles d’excellence autour de cette filière d’avenir. Nous attendons des réponses claires.

S’agissant des normes européennes, Patrick Ollier a tout à fait raison. La situation actuelle est ubuesque. La Martinique, qui a le statut de région ultra-périphérique, ne peut s’approvisionner aisément en matières premières auprès du Brésil par exemple, à la fois pour des raisons financières tenant au coût des transports maritime et aérien, mais aussi à cause de la non-équivalence des normes. Le chantier est énorme pour nous permettre de nous approvisionner en circuit court, mais aussi pour faire de l’import/transformation. Nous pourrions ainsi donner un sens à la notion de développement endogène, car organiser le développement par soi-même, c’est créer les conditions de la compétitivité économique grâce à des filières porteuses d’avenir et d’emplois.

Sur le service militaire adapté, je partage également le point de vue du rapporteur spécial. Ce dispositif a pris du retard par rapport à l’objectif initial, en raison de la nécessité de construire préalablement les bâtiments destinés à accueillir ces jeunes, mais il y a là une ambition collective qui doit être soutenue.

S’agissant du recrutement des jeunes en apprentissage, une solution doit être trouvée. Les 150 000 emplois d’avenir peuvent y contribuer, mais il faut aller plus loin en améliorant le dispositif de réduction des charges des entreprises, dans des collectivités où le taux de chômage des moins de vingt-sept ans est très élevé
– 64 % en Martinique et à La Réunion, contre 24 % en métropole.

François Hollande a pris l’engagement de maintenir la défiscalisation des investissements Outre-mer, ce dont je me réjouis. Aujourd’hui, lorsque 12 000 euros sont investis en métropole pour le financement des équipements publics, ce sont 5 à 6 millions qui le sont dans les Outre-mer. Quelles que soient les critiques ou les campagnes dont elle fait l’objet et malgré la nécessité de la moraliser, la défiscalisation est vitale pour l’Outre-mer, en particulier pour le logement social. J’approuve donc la position du rapporteur spécial, d’autant que le dispositif a déjà connu deux coups de rabot, de 10 % et 15 %. Comme tous les députés Outre-mer, je suis opposé à toute diminution de 4 % à 2 % du revenu imposable, et je le ferai savoir publiquement.

Enfin, la loi sur l’habitat indigne, votée à l’unanimité en 2011, apporte une réponse aux situations de mal-logement, mais 10 à 15 % de l’habitat étant insalubre ou indigne en Guyane, à la Martinique et à la Guadeloupe, nous sommes actuellement en discussion avec le Gouvernement pour que le volume des sommes affectées à la résorption de ces situations augmente.

Mme Annick Girardin. Monsieur le Rapporteur spécial, nous partageons votre analyse : ce budget est un budget de continuité et l’effort consenti est indéniable, confirmant que le Gouvernement a fait de l’Outre-mer une de ses priorités.

Cependant, depuis deux ou trois ans, on entendait peu parler du grand domaine maritime français, de la richesse qu’est l’Outre-mer pour la France, et nous ne voyions pas nos espoirs se concrétiser. Serge Letchimy a raison d’expliquer que ces territoires doivent se donner les moyens d’une croissance plus dynamique. Donner aux collectivités ultramarines les moyens de leur développement économique, chacune dans sa région, constitue une priorité, car c’est ce qui assurera leur rayonnement comme celui de la France et de l’Europe dans ces zones. Faute de quoi, nous resterons dans le « volet social », tributaires de l’assistance.

Nos économies souffrent de deux difficultés : le coût du fret maritime et le coût du transport de passagers. Le volet économique doit être renforcé en Outre-mer, et il faut revoir toutes les notions d’aide à la continuité territoriale et de soutien aux échanges. Pourquoi le dispositif d’aide aux intrants/extrants prévu par la LODEOM concerne-t-il les seuls produits en provenance d’Europe, par exemple ?

La loi Girardin – dans laquelle je ne suis pour rien, contrairement à ce que croient beaucoup ! – a eu le mérite de venir à un moment où l’Outre-mer avait un besoin impérieux d’investissements, d’autant que l’État n’avait pas plus qu’aujourd’hui les moyens de remédier à notre retard considérable en la matière. Je reste donc très solidaire de tous mes collègues en ce qui concerne la défiscalisation. D’ailleurs, si des critiques ont pu être émises, c’est parce que le travail de contrôle des services de Bercy s’est révélé efficace. Nous ne pouvons pas nous permettre une année blanche, avec un abaissement des seuils et des pourcentages, au risque de condamner un dispositif qui, du reste, peut être perfectionné.

M. Patrick Lebreton. Je salue le travail du rapporteur spécial mais, dans les cinq années à venir, nous devrons sans doute, monsieur le président, nous préoccuper d’examiner l’ensemble des budgets consacrés à l’Outre-mer par les différents ministères, ce qui passera par un travail de consolidation.

J’ai le plaisir de constater que la mission Outre-mer est en progression, les crédits de paiement passant de 1,96 milliard à 2,04 milliards d’euros. Les engagements du Président de la République trouvent ainsi une traduction concrète dans ce budget, qui permettra de soutenir le logement, l’aménagement du territoire, la continuité territoriale et les investissements structurants des collectivités.

Le Fonds exceptionnel d’investissement – FEI – a constitué une avancée importante de la LODEOM, dont l’application ces dernières années a malheureusement été très contrastée. En effet, au-delà d’un manque de clarté dans l’affectation des crédits aux collectivités, le FEI a été pour ainsi dire vidé de sa substance par la précédente loi de finances. Dans la mission qui nous est présentée, les autorisations d’engagement du fonds sont au contraire pratiquement triplées pour atteindre 50 millions d’euros. Toutefois, le projet annuel de performances fournit peu de précisions sur la manière dont ces crédits seront déployés, notamment sur le type d’équipements structurants qui seraient soutenus et sur les critères d’affectation. Monsieur le rapporteur spécial, êtes-vous en mesure de nous donner des éclaircissements sur ces points ?

M. Jean-Claude Fruteau. Je me réjouis que l’Outre-mer soit redevenu une priorité du Gouvernement, conformément à l’engagement du Président de la République. L’augmentation des crédits de paiement sera d’environ 5 % pour 2013, et bien plus importante sur la période triennale, ce qui est très appréciable en cette période de contrainte financière. Il y a là, sinon une rupture avec le passé récent, du moins une accélération. Et si l’espoir que portait le FEI a été déçu dans le budget 2012, la dotation de 50 millions d’euros pour 2013 marque un changement substantiel et constitue un signal fort en direction des Outre-mer. Je qualifierai donc ce budget de volontariste.

Sur la défiscalisation, je voudrais mettre en garde contre les raccourcis un peu faciles. S’il est en effet de bon ton – spécialement dans cette commission des Finances, ce qui se comprend d’ailleurs – de préférer la dépense budgétaire à la dépense fiscale, cette philosophie ne peut s’appliquer aux Outre-mer.

Certes, la réorientation de la défiscalisation vers le logement social avait suscité notre inquiétude. Mais aujourd’hui, les deux tiers du financement du logement social, dont la plupart d’entre nous ont un besoin criant, proviennent de cette défiscalisation et le tiers restant, seulement, de la ligne budgétaire unique. Si donc il faut se féliciter que cette LBU augmente en 2013, conformément aux promesses du Président de la République, la suppression de la défiscalisation imposerait de tripler sa dotation pour maintenir le même volume de constructions. C’est pourquoi je me félicite, monsieur le rapporteur spécial, de votre insistance en faveur du maintien d’une dépense fiscale absolument indispensable pour le logement social mais aussi pour l’investissement productif, d’autant que le travail des services de Bercy a permis une moralisation de cet outil.

Nous nous battrons par conséquent avec la dernière énergie pour le préserver. Je précise néanmoins que je ne suis pas un fanatique de la défiscalisation par principe : si le Gouvernement nous démontre que le financement de nos économies ultramarines peut être réalisé grâce à la simple dépense budgétaire, j’applaudirai des deux mains.

M. Jean-Louis Dumont. À l’époque où j’étais Rapporteur spécial du budget du logement, la ligne budgétaire consacrée aux territoires ultramarins a été transférée au ministère de l’Outre-mer. J’ai tenté, depuis, d’en mesurer l’impact. Pourriez-vous, de votre côté, monsieur le rapporteur spécial, me dire comment accroître l’efficacité des crédits publics, y compris des produits de défiscalisation, en matière de construction de logements pour répondre aux besoins, tout en tenant compte de la diversité des statuts fonciers d’un territoire à l’autre ? Comment, dans le cadre de l’acte III de la décentralisation, pourrait-on responsabiliser les collectivités en leur donnant les moyens d’offrir aux populations des logements salubres et durables ?

M. Jean Jacques Vlody. Je souscris pleinement aux analyses faites par les précédents orateurs à propos de la défiscalisation, dont la suppression imposerait des dépenses budgétaires vraisemblablement hors de portée dans la présente conjoncture budgétaire.

Certes, la ligne budgétaire unique va être abondée de manière importante, mais ce budget ne comporte pas suffisamment de crédits en faveur de l’aménagement du foncier. Les fonds régionaux d’aménagement foncier urbain, les FRAFU, ne permettent pas de mener à bien un grand nombre d’opérations de logements. Pour la seule Réunion, 700 millions d’euros seraient nécessaires pour aménager les terrains disponibles. La défiscalisation pourrait être réorientée vers ces besoins de financements publics, dont nous avons tant besoin, en particulier pour notre jeunesse.

À propos de celle-ci, je m’inquiète de la baisse des crédits en faveur de la mobilité et de la formation professionnelle. La réduction de la dotation de l’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité – LADOM – serait justifiée par le fait qu’elle se voit attribuer la gestion du dispositif de continuité territoriale et par la mobilisation des fonds européens. Or il faut selon moi additionner les dispositifs, les besoins en mobilité et en formation professionnelle à la Réunion étant sans commune mesure avec ceux du territoire national. Dans notre île, quand 8 000 jeunes arrivent sur le marché local de l’emploi, 4 000 emplois seulement sont créés. Certes, la défiscalisation nous assure presque 3 % de croissance. L’effort financier de la Nation nous permet ce résultat dont beaucoup rêveraient, mais il est très loin de suffire pour absorber l’arrivée sur le marché du travail d’un aussi grand nombre de jeunes.

Outil de formation, le SMA doit demeurer une priorité, notamment à La Réunion. Le doublement des effectifs ne prendra effet qu’en 2014, ce que je regrette. Monsieur le rapporteur spécial, comment justifier la diminution des crédits du programme, de 249 millions à 226 millions d’euros, au regard des besoins de formation Outre-mer ?

M. Philippe Gomes. Monsieur le Rapporteur spécial, je vous sais gré d’avoir rappelé dans votre rapport écrit le processus, particulier au sein de la République française, d’émancipation et de décolonisation dont bénéficie la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de l’accord de Nouméa. Vous faites également mention de tous les transferts de compétences qui conduiront notre collectivité à exercer sur son territoire, à partir de 2014, toutes les compétences non régaliennes de l’État.

Or la loi organique modifiée en 2009 et mise en œuvre en application de l’accord de Nouméa prévoit explicitement, au sein d’un article dédié, la construction de deux lycées, l’un dans la commune du Mont-Dore, située au Sud, l’autre dans celle de Pouembout, située au Nord. La réalisation de ces investissements par l’État constitue la condition préalable au transfert à la Nouvelle-Calédonie de la compétence pleine et entière en matière d’enseignement. C’est pourquoi les crédits permettant le financement de ces lycées ont été inscrits au fur et à mesure en loi de finances, au sein, non pas du budget de l’Outre-mer, mais de celui de l’Éducation nationale – ce qui peut paraître curieux étant donné que l’État ne finance plus de lycées depuis longtemps, la compétence en ayant été transférée aux régions. Quoi qu’il en soit, dans le budget pour 2013, ces crédits ne figurent que pour 6,5 millions d’euros, du fait, nous dit-on, d’un rééchelonnement du calendrier de réalisation de ces deux établissements. Ce rééchelonnement étant ignoré des services déconcentrés à Nouméa, j’aimerais obtenir des éclaircissements sur ce point.

Je souscris à ce qui a été dit sur la nécessité de maintenir la défiscalisation Outre-mer, mais il nous faut également donner l’exemple en tenant compte des cruelles observations formulées par la Cour des comptes dans son rapport de février 2012. Je proposerai donc d’abaisser de 300 000 à 250 000 euros, voire à 100 000 ou 150 000 euros, le seuil des investissements non soumis à une obligation d’agrément préalable de la direction du Budget. En effet, ne connaître qu’a posteriori le cheminement d’un montant non négligeable d’argent public n’est pas satisfaisant. Étant donné le contexte budgétaire actuel et les rigueurs « polaires » qui nous attendent, nous ne pouvons pas ne pas prendre en considération la nécessité de plus de transparence et d’un meilleur contrôle de l’utilisation des deniers publics.

L’article 57 du projet de loi de finances, non rattaché à la mission Outre-mer et qui sera donc examiné en commission des Finances après le 6 novembre, prévoit la substitution du dispositif « Duflot » à l’amortissement « Scellier ». Ce nouveau dispositif sera applicable à l’Hexagone et aux départements d’Outre-mer, mais non aux territoires français du Pacifique, contrairement au dispositif « Scellier », étendu il y a trois ans à ces territoires, avec des taux et des durées différents selon la localisation du logement construit : 13 % avec une durée d’amortissement de neuf ans pour le « Scellier » hexagonal, 18 % sur neuf ans pour le « Scellier » des DOM et 24 % sur cinq ans pour le « Scellier Pacifique ». Désormais, le taux serait de 18 % dans l’Hexagone comme dans les DOM, la durée d’amortissement de neuf ans étant maintenue. Quant au « Scellier Pacifique », il semble avoir disparu corps et biens dans le triangle des Bermudes de la préparation budgétaire. Or il doit impérativement être maintenu, dans des conditions qui restent à déterminer mais qui soient, si possible, identiques aux conditions actuelles. Il ne faut pas oublier qu’étant donné la distance, ceux qui investissent dans un produit «Scellier» en Nouvelle-Calédonie n’ont pas nécessairement tous les éléments souhaitables pour apprécier la viabilité de leur investissement.

Je constate que je parle depuis un certain temps, au risque de priver mes collègues de la possibilité de s’exprimer, mais, monsieur le président, n’accorder qu’une heure et demie à un débat sur ce budget, acte politique majeur dont dépendent tant de choses Outre-mer, constitue un manquement aux règles démocratiques élémentaires ! Les élus que nous sommes, dont certains ont fait jusqu’à vingt-quatre heures de vol pour se rendre à l’Assemblée nationale, doivent pouvoir défendre les intérêts de l’Outre-mer et de leur collectivité en Commission.

M. le président Gilles Carrez. Cette mission est également examinée par la commission des Affaires économiques et par la délégation aux Outre-mer avant de l’être dans l’hémicycle. Vous aurez donc d’autres occasions de vous exprimer.

M. Philippe Gomes. Les crédits consacrés à la continuité territoriale sont fondamentaux. Dans un souci d’équité, j’insiste néanmoins sur la nécessité de prévoir un dispositif en faveur de la continuité territoriale intérieure au profit de la Polynésie française – dont la surface équivaut à celle de l’Europe – ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. Actuellement, seule la Guyane bénéficie d’une telle mesure.

Les dispositifs en faveur de la jeunesse sont importants et anciens. Il s’agit d’abord du service militaire adapté – SMA –, formidable école de formation pour les jeunes en situation d’échec scolaire. Le doublement du nombre de places est engagé en Nouvelle-Calédonie : près de 500 jeunes pourront donc y être admis. Il s’agit également de « Cadre Avenir », dispositif, établi en 1988, de rééquilibrage au profit notamment de la population kanak. Il est en effet indispensable de faire en sorte que, quelle que soit son ethnie d’origine, chaque Néo-Calédonien ait une place reconnue dans notre société. Il s’agit enfin des dispositifs de soutien dits « chantiers de développement local » – CDL – et « jeunes stagiaires du développement » – JSD –, ce dernier, institué en 1986, étant financé par l’État. Je souhaite que ces formidables actions soient maintenues et renforcées, comme le prévoit au reste le budget de l’Outre-mer.

Enfin, il me paraît curieux d’examiner cette mission sans disposer d’un bilan de la LODEOM. Seuls des bilans partiels ont pu être réalisés : ainsi, il y a deux ans, le rapport sur l’application de cette loi rendu par MM. Gaël Yanno et Claude Bartolone a recensé les textes réglementaires qui n’avaient pas encore été adoptés et les crédits qui n’avaient pas été votés. Pourrions-nous savoir ce qu’il en est aujourd’hui ?

Quant à l’Observatoire des prix, l’Assemblée l’a transformé hier en Observatoire des prix, des marges et des revenus. Cependant, il demeurera impuissant s’il n’est doté que de 50 000 euros. Il est donc indispensable de le renforcer.

Mme Hélène Vainqueur-Christophe. Reconnaissons que cette mission représente un effort important de l’État en faveur des Outre-mer. Étant donné la crise, nous sommes fort satisfaits de cette progression, en particulier de celle des crédits de la ligne budgétaire unique. Cela étant, il est vrai que la défiscalisation apporte beaucoup au secteur du logement social : sa remise en cause freinerait les constructions alors même qu’il manque plus de 100 000 logements sociaux Outre-mer.

Je suis également heureuse que la politique d’allégements et d’exonérations de charges en faveur des petites et moyennes entreprises ait pu être conservée. Quant au prix des carburants, il nous faut absolument sortir du carcan des normes européennes qui nous empêche de nous ravitailler chez nos voisins.

Si les régions mettent en œuvre des moyens importants en faveur de l’apprentissage, l’État doit néanmoins appuyer cet effort – peut-être sous forme d’allégements –, car il existe des freins importants en la matière. Je rejoins également le propos tenu par M. Philippe Gomes au sujet de la continuité territoriale entre les îles d’une même collectivité, le territoire de la Guadeloupe étant, lui aussi, en archipel.

À l’instar de mes collègues, je m’opposerai à toute modification du dispositif de défiscalisation en faveur de l’Outre-mer, que je suis toujours choquée d’entendre qualifier de niche fiscale. De fait, les effets d’aubaine qu’il a pu engendrer par le passé ont déjà fait l’objet de rectifications. S’il reste sans doute des efforts à faire, il soutient incontestablement l’investissement productif, le secteur du logement social et par conséquent l’économie de l’Outre-mer. Or tout amendement qui le remettrait en cause ou simplement en réduirait l’attractivité, en dépit de l’engagement pris par le candidat François Hollande, permettrait certes un gain de recettes mais signerait l’arrêt des investissements dans nos territoires.

M. Thierry Robert. Je salue ce budget dont la progression inhabituelle démontre que nos problèmes sont pris en considération.

Tout d’abord, les participations respectives de l’État et des collectivités territoriales à la couverture du déficit des opérations de résorption de l’habitat insalubre – RHI – ont nettement évolué : si, autrefois, l’État finançait ce déficit à hauteur de 70 %, contre 30 % pour les collectivités, la proportion s’est aujourd’hui complètement inversée. Dès lors, la progression de la ligne budgétaire unique
– LBU –ne sera-t-elle pas utilisée pour compenser ces déficits ?

La baisse du prix de vente de l’énergie photovoltaïque aux différents opérateurs a entraîné une chute des investissements en faveur des énergies renouvelables Outre-mer. Le PLF prévoit-il une révision de ces prix ?

Enfin – et cet avis est unanimement partagé par mes collègues –, la défiscalisation est extrêmement importante pour nos territoires car c’est elle qui nous permet de nous en sortir. Si, actuellement, elle est essentiellement destinée à financer la construction de logements sociaux, serait-il envisageable d’en orienter une partie vers la construction d’infrastructures touristiques ? Une telle mesure contribuerait à faire baisser le taux de chômage record que l’on enregistre Outre-mer, surtout parmi les jeunes.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je félicite le rapporteur spécial pour son travail. Comme lui, je suis atterrée de constater qu’en dépit d’un taux de chômage exorbitant, l’on n’ait pas exploré, en amont, la piste réellement intéressante de l’apprentissage. Le budget 2013 comportant une ligne de soutien aux entreprises dotée de 1 116 millions d’euros, ne pourrait-on en destiner une partie au financement de contrats d’apprentissage ? Ne peut-on également alerter le ministère de l’Éducation nationale sur la situation ?

Madame Vainqueur-Christophe, le terme de « niche » n’est pas péjoratif : en droit fiscal, il s’applique dès lors qu’il y a exonération d’impôt. Ne prenez donc pas ombrage de son utilisation ! En revanche, il se pose un réel problème de pilotage du dispositif, tenant à « l’insuffisante collecte des données », pour reprendre l’expression de l’inspection générale des finances. Tant que cette situation perdurera, elle fera peser la suspicion sur la défiscalisation.

L’avantage consenti aux agents en poste dans les départements d’Outre-mer est d’une durée de deux ans maximum, reconductible une seule fois. Cependant, nous ne disposons d’aucune évaluation du coût budgétaire de ce dispositif. Ne pourriez-vous l’obtenir, monsieur le rapporteur spécial ? De plus, si l’agent revient en France, peut-il ensuite, au bout d’un certain temps, conclure un nouveau contrat ?

Enfin, si nous nous réjouissons tous de la progression des crédits de l’Outre-mer, celle-ci contraste avec l’évolution globale du budget de l’État. Comme nous sommes tous responsables d’un certain équilibre budgétaire, il faut aussi avoir conscience que certaines catégories en France ne peuvent éprouver la même satisfaction…

M. le président Gilles Carrez. Vous avez commencé, monsieur le rapporteur spécial, par relever que ce budget s’inscrivait dans la continuité des précédents, ce dont je me réjouis. Il est vrai qu’un effort important et constant est réalisé en faveur de la mission Outre-mer dont les crédits budgétaires sont en très forte progression – de 3 % –, ce qui contraste avec la diminution enregistrée par toutes les autres missions. Mais nous ne pouvons que souscrire à cet effort indispensable.

Ensuite, on constate une stabilité totale des règles du jeu applicables aux exonérations sociales patronales comme en matière de coût du travail. C’est un point essentiel en faveur duquel nous avons constamment plaidé, malgré une tendance générale à réduire ce type de crédits.

Ce budget se traduit également par une très grande stabilité des règles du jeu fiscales, les dispositifs de défiscalisation prévus aux articles 199 undecies A, B et C du code général des impôts, décisifs pour l’économie des Outre-mer, et le taux réduit de TVA n’étant pas modifiés.

Nous craignions beaucoup que l’amortissement fiscal au profit de l’investissement dans le secteur du logement social ne conduise à un désengagement budgétaire de l’État. Si j’en crois ce que j’ai entendu, le bilan serait plutôt rassurant. Cependant, si le mécanisme de défiscalisation est maintenu tel quel Outre-mer, ses modalités d’application sont modifiées en métropole. Le PLF prévoit en effet un plafonnement global des niches à 10 000 euros. Or ce plafond très rapidement atteint, du fait des emplois familiaux et des investissements réalisés dans le secteur locatif, et l’on peut dès lors redouter un transfert des dispositifs hexagonaux vers la défiscalisation Outre-mer. Nous devons en tirer les conséquences. Vous êtes plusieurs à avoir rappelé que le dispositif faisait désormais l’objet de nombreux contrôles, ce que je peux confirmer pour avoir suivi ces questions de près au cours des dix dernières années. Cependant, on ne pourra en maintenir le bénéfice de plein droit, comme c’est le cas actuellement.

En effet, les résultats d’un contrôle sur pièces et sur place que j’ai effectué il y a quelques années avec Didier Migaud, alors président de notre Commission, sont stupéfiants : si le revenu moyen des dix contribuables recourant le plus à la défiscalisation s’élevait à 12 millions d’euros, ces contribuables avaient réussi à en effacer l’équivalent de 10 millions grâce au dispositif de défiscalisation prévu à l’article 199 undecies B du code général des impôts. C’est pour cette raison que Didier Migaud et moi-même avons introduit le plafonnement spécifique, puis le plafonnement global des niches fiscales.

Or, lorsque l’on s’apercevra que ce sont les ménages de loin les plus aisés qui, parce qu’ils auront rapidement atteint le plafond global de 10 000 euros, utiliseront le plus la défiscalisation Outre-mer, nous ne manquerons pas d’être interpellés. Je rappelle en effet que le Président Hollande a été élu sur le thème du développement dans la justice. C’est pourquoi nous devons être plus rigoureux dans notre méthode de défiscalisation en Outre-mer et, à cet égard, je souscris tout à fait à la proposition de Philippe Gomes, même si la technique de l’agrément présente l’inconvénient d’allonger le traitement des demandes.

En outre, certains éléments budgétaires posent également problème : lorsqu’en application de l’article 199 undecies B, et par le biais d’une société en nom collectif, un contribuable investit 100, compte tenu de la rémunération des cabinets de défiscalisation, il achète en réalité une réduction d’impôt de 130 en moyenne : la rentabilité de son investissement est donc de 30 %.

Dès lors, il serait peut-être plus pertinent que, faisant exception à la norme « zéro valeur », l’État augmente ses crédits budgétaires en faveur de l’Outre-mer par un recours accru à l’emprunt et qu’il réduise d’autant ses dépenses fiscales. En tant que président de la commission des Finances membre de l’opposition, j’ai fait savoir au ministre que je serais prêt à le soutenir dans une telle démarche. Ainsi, si cette défiscalisation doit être conservée en raison de sa souplesse – le nouvel article 199 undecies C en faveur du logement social est parfaitement cadré, les cabinets de défiscalisation sont gérés par des gens sérieux et les taux de rémunération, de 6 ou 7 %, sont devenus raisonnables –, nous avons cependant tout intérêt à faire un travail de remise à plat avec nos collègues de l’Outre-mer, comme nous en avions émis le souhait la dernière fois que ce sujet avait été évoqué ici même, avec le rapporteur spécial d’alors, Claude Bartolone, et le président de la Commission de l’époque, Jérôme Cahuzac.

L’expérience de la réduction d’impôt en faveur de l’installation de panneaux photovoltaïques démontre qu’un manque d’anticipation peut conduire à la catastrophe. Pendant trois ans, Jérôme Cahuzac et moi-même n’avons cessé d’alerter Jean-Louis Borloo sur l’explosion qu’allait provoquer le cumul de la réduction d’impôt prévue à l’article 199 undecies B en faveur des investissements dans le photovoltaïque et du prix très favorable de rachat de l’énergie solaire, afin qu’il « refroidisse » le système. Or, en septembre 2010, le Gouvernement a mis un coup d’arrêt brutal au dispositif. Avec Victorin Lurel, alors membre de notre Commission, dont j’ai beaucoup apprécié le comportement, nous sommes allés nous battre auprès de notre interlocuteur, François Baroin, par ailleurs fin connaisseur de l’Outre-mer. Si celui-ci fut réceptif, il nous a cependant fallu mettre en place un système de transition qui n’était en réalité qu’un pis-aller. C’est pourquoi je soutiens votre demande de fixation d’un nouveau prix de rachat par le Gouvernement afin de débloquer les investissements actuellement gelés.

M. Jean-Claude Fruteau. Monsieur le président, l’excès est nuisible en toute chose, y compris l’excès de vertu. Je propose de ne pas modifier le dispositif tant que nous n’aurons pas conduit, ensemble et dans la plus grande transparence, une étude pour en déterminer précisément les effets négatifs, les éléments à corriger, puis défini le meilleur système à mettre en place. Nous craignons en effet que, par vertu excessive et par comparaison avec ce qui se passe en France métropolitaine, l’on assiste à une diminution, voire à une suppression progressive du dispositif. L’outil perdrait alors toute son efficacité sans que l’on dispose du moindre système de remplacement.

M. le rapporteur spécial. Je ne souhaite pas ouvrir de polémique avec le président Gilles Carrez, pour qui j’ai respect et amitié. Cela étant, nous sommes en désaccord sur certains points. J’évoquais au début de mon propos les zones de revitalisation rurale, système de défiscalisation que j’ai créé dans le cadre de la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 afin de soutenir l’activité en zone de montagne : celles-ci étaient fondées sur le même principe de recours à l’instrument fiscal pour favoriser l’investissement et développer la richesse et, par conséquent, la création d’emplois. Il s’agit ainsi d’inciter les entreprises à s’implanter dans des territoires où elles ne souhaitent pas s’installer spontanément. Or il n’est pas certain du tout qu’elles souhaitent s’installer dans les DOM, compte tenu des contraintes insulaires, des courbes démographiques et du caractère captif des marchés locaux.

Si le système de défiscalisation a ses limites, il a cependant des effets très positifs. C’est pourquoi je souhaite son maintien. Quant à sa moralisation et à sa finalité, on oppose toujours une approche comptable des choses à l’objectif de développement territorial qui est poursuivi. Ainsi, lorsque je présidais la commission des Affaires économiques, nous demandions le développement de ces aides alors que la commission des Finances demandait qu’on freine le mouvement : c’est schizophrénique ! Je souhaite donc trouver un juste milieu entre la dépense budgétaire et la dépense fiscale. En revanche, si l’on supprimait l’incitation, on condamnerait nos départements d’Outre-mer de même que l’on condamne nos territoires ruraux et montagnards avec la suppression des ZRR.

Quant aux modalités d’application de l’article 199 undecies B, l’investisseur ne bénéficie en fait que de 27,5 % de la dépense, les 62,5 % restants devant demeurer sur le territoire du fait du mécanisme de rétrocession.

En tout état de cause, je m’associe au refus, exprimé par Annick Girardin, d’une année blanche en matière de défiscalisation. Et j’ai bien entendu le cri du cœur de Mme Hélène Vainqueur-Christophe.

M. Serge Letchimy. En outre, ce sont à 90 % de petits équipements qui sont financés grâce au dispositif.

M. le rapporteur spécial. Les actions concertées de l’ensemble des ministères en faveur de l’Outre-mer représentent tout de même 13 milliards d’euros de dépenses et ne sont pas en diminution. Je me réjouis, encore une fois, que ce budget s’inscrive dans la continuité de l’excellent travail accompli par Nicolas Sarkozy – travail que j’ai pu apprécier de près puisque j’ai fait partie de son Gouvernement.

Serge Letchimy a rappelé le problème que pose le moratoire sur l’achat d’énergie photovoltaïque. Il me semble pour ma part nécessaire de fixer un prix. Lorsque je présidais la commission des Affaires économiques, Serge Poignant et moi-même nous étions rendus auprès de Jean-Louis Borloo et on avait fini par fixer un prix de rachat pour l’Hexagone. À cette occasion, nous avions d’ailleurs réduit les surfaces éligibles aux aides et fixé un prix d’achat satisfaisant. Quant au dérapage enregistré en Outre-mer, il s’explique par le cumul insupportable d’un prix de rachat avantageux et du dispositif de défiscalisation en faveur de l’investissement dans l’installation de panneaux photovoltaïques. Il est temps que le Gouvernement mette fin à cette schizophrénie en fixant un prix cohérent avec l’exonération.

Cela étant, je vous mets en garde contre le risque de pourrir votre territoire, comme je l’ai évité à l’époque dans les Hautes-Alpes, par l’installation de fermes photovoltaïques de dizaines d’hectares, nuisant considérablement au développement du tourisme alors que celui-ci constitue un atout exceptionnel pour le développement de vos territoires. C’est aussi pour cela que j’ai tout fait pour empêcher la scandaleuse installation d’une ferme photovoltaïque de quatre hectares dans mon Périgord natal, aux abords d’un château historique !

M. Thierry Robert. Ne pourrions-nous pas poser des règles permettant d’éviter les dérives ?

M. le rapporteur spécial. Peut-être faudrait-il demander à la commission du Développement durable et de l’Aménagement du territoire de créer une mission d’information sur le sujet.

Quant aux normes européennes, je compte sur le président Gilles Carrez pour nous aider à remettre en cause cette absurde logique administrative et étatique – de droite comme de gauche ou du centre. Ainsi, le fumage du poisson en Guyane ne peut-il se faire qu’au hêtre alors même que cet arbre n’y pousse pas mais que d’autres catégories de bois formidables pourraient être utilisées à cette fin. Le carburant pose un problème voisin : en effet, le Venezuela produit des carburants gras que l’on ne peut utiliser en raison des normes applicables à nos pots d’échappement. C’est pourquoi l’on fait venir les carburants de Rotterdam !

Mme Marie-Christine Dalloz a soulevé une question tout à fait intéressante au sujet de l’apprentissage : je propose pour ma part de conditionner le bénéfice des exonérations de charges au recrutement d’apprentis par les entreprises. Je soumettrai donc au Gouvernement ces deux propositions d’incitation.

S’agissant de la continuité territoriale, si 51 millions d’euros y ont été consacrés l’an dernier, ce montant est maintenu pour 2013 : c’est bien ce que l’on appelle de la continuité budgétaire ! Quant à la continuité au sein de territoires en archipel, elle correspond à une notion différente de la continuité territoriale, qui s’entend de la continuité entre les collectivités ultramarines et l’Hexagone. Vous pouvez certes élargir cette définition mais pas dans le cadre de l’examen du présent budget.

M. Philippe Gomes. Telle qu’actuellement définie par la loi pour l’ensemble de l’Outre-mer, la notion de continuité territoriale inclut la continuité interne à un territoire donné, mais à condition que l’État le spécifie par décret. Or, le seul territoire à bénéficier de cet agrément étatique est la Guyane.

M. le rapporteur spécial. Je me suis donc mal exprimé : c’est au Gouvernement et non au rapporteur spécial qu’il vous faut adresser votre demande.

Je partage le souhait exprimé par M. Patrick Lebreton de veiller à la consolidation du budget global de l’Outre-mer : c’est ce qu’a fait la majorité précédente et c’est ce que continue à faire votre majorité. Je m’en félicite et j’espère que cela durera.

Je ne dispose, tout comme vous, que du montant global des crédits du fonds exceptionnel d’investissement, passé de 17 à 50 millions d’euros, sans avoir obtenu de réponse sur les actions que ces crédits permettront de mettre en œuvre. J’interrogerai donc à nouveau le Gouvernement par écrit afin que le ministre nous réponde en séance publique.

Je ne suis pas loin de partager l’avis de M. Jean-Claude Fruteau sur la conception orthodoxe défendue par la commission des Finances s’agissant des exonérations.

M. le président Gilles Carrez. Chaque année qui passe me donne malheureusement raison ! Que faire s’il n’y a plus d’argent dans les caisses ?

M. le rapporteur spécial. Cela étant, les exonérations et les dépenses budgétaires sont tout aussi créatrices d’endettement l’une que l’autre. Nous sommes en revanche bien d’accord sur la nécessité d’éviter celui-ci.

S’agissant du logement social, M. Jean-Claude Fruteau a raison : l’effort serait bien trop important à faire pour inverser le rapport entre la part de la dépense budgétaire et celle de la dépense fiscale. Cependant, le président de la Commission a également raison de dire qu’il nous faut trouver un juste équilibre pour éviter une dérive excessive des exonérations.

Je n’ai pas de réponse immédiate à fournir à Jean-Louis Dumont concernant les volumes de crédits, mais la dynamique enclenchée en 2011 en matière de résorption de l’habitat indécent, indigne et insalubre se poursuit : en effet, les travaux de remise aux normes de décence des logements représentent une dépense de 27 millions d’euros en 2012 et la résorption de l’habitat insalubre, une dépense de 36 millions d’euros. La réorientation des FRAFU vers la « normalisation » des quartiers insalubres est acquise mais l’on bute sur l’obstacle du foncier. Or j’ignore quel est l’instrument adéquat pour soutenir l’acquisition de cette ressource – c’est d’ailleurs une question que tous les Gouvernements se posent.

Les besoins de financement nécessaires à la formation sont évoqués dans mon rapport. En outre, j’ai interrogé le Gouvernement quant à la diminution des crédits destinés au SMA, incohérente avec sa volonté d’en doubler le nombre de bénéficiaires.

Monsieur Gomes, j’interrogerai le Gouvernement sur le financement des deux lycées néo-calédoniens, mais le document de politique transversale devrait aussi répondre à cette interrogation. Quant à l’extension du dispositif d’amortissement Duflot, pourquoi en effet ne pas l’étendre aux territoires français du Pacifique ? Pour ce qui est de la LODEOM, après le rapport sur l’application de la loi que vous avez mentionné, le comité de l’application des lois que j’ai réuni lorsque j’étais au Gouvernement, à la fin de l’année 2011, a fait état d’un taux de 93 % de textes d’application publiés – dont un certain nombre doivent concerner la LODEOM –, contre 65 % en 2009.

M. Thierry Robert a salué le fait que le budget de l’Outre-mer ne soit pas en baisse, ce qui revient indirectement à saluer l’intérêt qu’il présentait déjà l’an dernier. Je l’en remercie.

Je n’ai pas de réponse à la question de Mme Marie-Christine Dalloz concernant les agents de l’État. Mais autant je suis favorable aux exonérations, autant il me semble impératif, par mesure d’économie, de revoir les surrémunérations.

Suivant l’avis du Rapporteur spécial, la Commission adopte les crédits de la mission Outre-mer.

ANNEXE :
LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère de l’Outre-mer

● M. Victorin LUREL, ministre de l’Outre-mer

Délégation générale à l’Outre-mer

● M. Vincent BOUVIER, délégué général à l’Outre-mer

Parlementaire

● M. Alfred MARIE-JEANNE, député de la Martinique

Fédération des entreprises d’Outre-mer

● M. Jean-Pierre PHILIBERT, président

© Assemblée nationale

1 () Arrêt des forages offshore opéré par Shell au large de la Guyane sans perspective à long terme.

2 () Rapport d’information n° 1885 de MM. Jacques Le Guen et Jérôme Cahuzac en conclusion des travaux de la mission d’information commune de la commission des finances et de la commission des affaires économiques sur le prix des carburants dans les départements d’Outre-mer

3 () Ibid.

4 () Note d’exécution du budget 2009.

5 () L’habitat insalubre et indigne dans les départements et régions d’Outre-mer : un défi à relever.

6 () Versée par douzième.

7 () Lorsque le chiffrage n’est pas renseigné, le Rapporteur spécial prend comme base le chiffre de l’année précédente.

8 () Évaluation des dépenses fiscales et sociales spécifiques à l’Outre-mer. Inspection générale des finances. Août 2011.