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N° 2261

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI de finances pour 2015,

TOME V

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES

AUDIOVISUEL ; AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

Par Mme Martine MARTINEL,

Députée.

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Voir le numéro : 2234, 2260 (annexe n° 32).

SOMMAIRE

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PAGES

INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE : L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN FAVEUR DE L’AUDIOVISUEL EN 2015 7

I. FRANCE TÉLÉVISIONS : DES INCERTITUDES SUR LE RESPECT DE LA TRAJECTOIRE DE RETOUR À L’ÉQUILIBRE 8

II. FRANCE MÉDIAS MONDE : DES OBJECTIFS AMBITIEUX DANS UN ENVIRONNEMENT FINANCIER CONTRAINT 10

III. TV5 MONDE : UNE DOTATION CONFORME AU PLAN STRATÉGIQUE 2014-2016 12

IV. RADIO FRANCE : UNE ENTREPRISE CONFRONTÉE À DES DÉFIS MAJEURS 13

V. ARTE FRANCE : LA NÉCESSITÉ DE CONSOLIDER UNE STRATÉGIE ÉDITORIALE QUI A PORTÉ SES FRUITS 13

VI. L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL : UNE ANNÉE CHARNIÈRE 14

VII. LE FONDS DE SOUTIEN À L’EXPRESSION RADIOPHONIQUE LOCALE (FSER) : UNE STABILISATION DES CRÉDITS ET UN RENFORCEMENT DE LA SÉLECTIVITÉ DES AIDES 16

DEUXIÈME PARTIE : RADIO FRANCE 17

I. MAINTENIR LE LIEN AVEC LE PUBLIC : LE DÉFI DE LA STRATÉGIE ÉDITORIALE ET NUMÉRIQUE 18

A. LES ANTENNES : DES PERTES D’AUDIENCES PRÉOCCUPANTES 19

B. UN VIEILLISSEMENT INQUIÉTANT, UN PROFIL SOCIOCULTUREL INSUFFISAMMENT DIVERSIFIÉ 20

C. LA NOUVELLE STRATÉGIE ÉDITORIALE 22

1. Des propositions qui vont dans le sens d’une clarification de l’identité des antennes 22

2. La place de la musique sur les antennes 24

3. Les interrogations de la rapporteure sur l’avenir du Mouv’ 24

4. Pour une antenne plus représentative de la diversité de la société française 25

D. LE DÉFI DU NUMÉRIQUE : L’URGENCE DE DÉFINIR UNE STRATÉGIE COMMUNE À L’ENSEMBLE DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC 26

1. Un démarrage tardif, des résultats contrastés 26

2. Les interrogations suscitées par la nouvelle stratégie numérique 29

3. L’urgence de mieux articuler les offres du service public audiovisuel numérique 31

E. LA QUESTION DE LA COUVERTURE 32

1. Une couverture à améliorer 32

2. La nécessité de clarifier la question de la diffusion numérique 34

F. LES FORMATIONS MUSICALES : DES CHANGEMENTS NÉCESSAIRES 35

II. LA NÉCESSAIRE MODERNISATION DE LA GESTION 37

A. LA CONTRAINTE BUDGÉTAIRE 37

1. Les ressources publiques : la fin d’une période sans contrainte 37

2. Les ressources propres : des marges d’augmentation limitées 40

B. LA MAÎTRISE DE LA MASSE SALARIALE ET LA MODERNISATION SOCIALE 41

1. La maîtrise de la masse salariale : enjeu majeur 41

2. Un plafond d’emplois qui incite à recourir à l’intermittence 42

3. La modernisation de la gestion des ressources humaines 45

4. La diversité dans l’entreprise 46

C. LA MODERNISATION DE LA GESTION ET L’AMÉLIORATION DE LA GOUVERNANCE 48

1. Des marges d’économies et d’amélioration importantes malgré de récents progrès 48

2. L’amélioration de la gouvernance et de la transparence 50

D. LE CHANTIER : UNE DÉRIVE PRÉOCCUPANTE 51

1. Une sous-évaluation initiale 51

2. Une dérive préoccupante 52

TRAVAUX DE LA COMMISSION 55

I. AUDITION DE LA MINISTRE 55

II. PRÉSENTATION DE L’AVIS 55

III. EXAMEN DES CRÉDITS 82

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE POUR AVIS 85

INTRODUCTION

Après une brève présentation de l’évolution des crédits en faveur de l’audiovisuel dans le présent projet de loi de finances, la rapporteure a souhaité consacrer la partie thématique de son avis à Radio France.

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 fixe au 10 octobre la date butoir pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À la date butoir, le pourcentage de réponses parvenues à la rapporteure pour avis était d’environ 70 %.

PREMIÈRE PARTIE : L’ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN FAVEUR
DE L’AUDIOVISUEL EN 2015

Pour 2015, les recettes de contribution à l’audiovisuel public devraient s’élever à 3,66 milliards d’euros contre 3,55 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2014. Cette augmentation résulte d’une augmentation de trois euros du montant de la contribution à l’audiovisuel public, dont un euro du fait de son indexation. La répartition du montant de cette contribution est effectuée dans le cadre du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Les crédits en faveur de l’audiovisuel sont complétés par des crédits budgétaires inscrits sur le programme 313 « Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique » de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Ce programme est doté de 189,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement dans le présent projet de loi de finances, dont 160 millions d’euros destinés à France Télévisions et 29 millions d’euros pour le fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER). Le gouvernement a annoncé la suppression progressive, d’ici à 2017, des crédits budgétaires destinés à compléter le financement de France Télévisions. Le programme 313 devrait donc s’élever à 109,5 millions d’euros en 2016, dont 29 millions d’euros pour le FSER, et à 29 millions d’euros en 2017, correspondant aux crédits du seul FSER.

RÉPARTITION DE LA CONTRIBUTION À L’AUDIOVISUEL PUBLIC

(Montants TTC, en millions d’euros)

 

LFI 2014

PLF 2015

évolution
(%)

France Télévisions (*)

2 429,8

2 369,3

-2,5

ARTE France

265,9

267,2

0,5

Radio France

614,5

614,3

0,0

France Média Monde (**)

169,8

247,0

45,5

INA

70,9

90,8

28,1

TV5 (***)

 

77,8

NS

Total

3 551,1

3 666,7

3,3

(*) Dotation complétée par 160,4 millions d’euros de crédits budgétaires

(**) La hausse compense la suppression du financement sur crédits budgétaires (73,9 millions d’euros en 2014)

(***) La dotation compense la suppression du financement sur crédits budgétaires (76,2 millions d’euros en 2014)

Source : état D du projet de loi de finances

I. FRANCE TÉLÉVISIONS : DES INCERTITUDES SUR LE RESPECT DE LA TRAJECTOIRE DE RETOUR À L’ÉQUILIBRE

Pour 2015, il est proposé d’allouer à France Télévisions une dotation totale de ressources publiques de 2 481,0 millions d’euros HT, en baisse de 0,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Cette dotation est répartie comme suit :

– 2 320,6 millions d’euros HT (2 369,4 millions d’euros TTC) à partir du programme 841 du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » ;

– 160,4 millions d’euros à partir du programme 313 du budget général.

Cette dotation est inférieure de 4,6 millions d’euros HT au montant inscrit au plan d’affaires de l’avenant 2013-2015 au COM 2011-2015.

Par rapport à la loi de finances initiale pour 2014, le financement de France Télévisions sur la part du budget général de l’État augmente de 47,7 millions d’euros (+ 42,3 %). Cette augmentation est essentiellement liée à la modification de la maquette budgétaire introduite par le présent projet de loi de finances : le programme 115 « Action audiovisuelle extérieure » au sein de la mission « Médias, livre et industries culturelles » est supprimé, avec transfert de l’intégralité de la dotation publique de France Médias Monde et de TV5 Monde sur le compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public ». Cette modification fait évoluer la répartition du financement de France Télévisions entre les crédits du budget général du programme 313 (appelés à disparaître d’ici 2017) et ceux issus du produit de la contribution à l’audiovisuel public du programme 841.

France Télévisions connaît une situation financière difficile. L’objectif du plan d’affaires de l’avenant au COM, sur lequel la rapporteure a formulé un avis en septembre 2013, était le retour à l’équilibre en 2015.

L’exercice sera difficile, compte tenu, ainsi que le précise explicitement le texte de l’avenant, des aléas importants qui pèsent sur la trajectoire des ressources et des charges de l’entreprise.

En ce qui concerne les ressources, l’entreprise est confrontée aux incertitudes fortes qui pèsent sur l’évolution du marché publicitaire. La suppression de la publicité après 20 heures, la dégradation du marché publicitaire liée au contexte économique et à la concurrence accrue entre les chaînes mais aussi l’érosion des audiences ont fortement impacté les recettes de publicité et de parrainage de l’entreprise. Depuis 2011, les ressources publicitaires sont en très forte diminution (de 121 millions d’euros en 2013 par rapport à 2010 soit -16 %). Cette diminution est supérieure à celle des recettes publicitaires des autres chaînes historiques, dans un contexte de marginalisation croissante de la régie de France Télévisions, qui ne peut commercialiser d’écrans puissants en soirée alors que ceux-ci se sont multipliés sur les chaînes concurrentes.

L’avenant au COM a été élaboré avec une hypothèse de reprise modérée de ces recettes en 2015 et 2016 après une diminution en 2014. Ce scénario, qui semblait relativement prudent, n’est pas pour autant assuré : 2013 a été légèrement inférieure à la prévision et 2014 s’annonce incertaine. Les recettes de publicité sur les supports numériques ont également été inférieures aux prévisions en 2013 et l’objectif 2014 est volontariste. L’écart de 35 millions d’euros entre la reprévision 2014 (320 millions d’euros) et les prévisions 2015 de l’avenant au COM (355 millions d’euros) constituent une difficulté réelle. La rapporteure pour avis se réjouit que la réflexion sur la présence de la publicité sur les antennes ne soit plus un tabou. Comme elle a eu l’occasion de l’exprimer à plusieurs reprises, elle serait favorable à certains assouplissements de l’interdiction de la publicité après 20 heures.

En ce qui concerne les ressources publiques, France Télévisions est confrontée à la fragilité inhérente à la part de son financement qui repose sur le budget général de l’État (la loi de finances rectificative pour 2014 ayant réduit de 7 millions d’euros la dotation budgétaire versée à France Télévisions, dotation qui sera également inférieure aux prévisions pour 2015).

En ce qui concerne les charges, le respect de la trajectoire financière est fortement conditionné par l’évolution des effectifs et de la masse salariale. La finalisation du plan de départs volontaires qui doit ramener l’effectif à 9 750 ETP fin 2015 constitue à cet égard un enjeu majeur. À la différence des plans de départs volontaires précédents, qui n’ont pas atteint leur objectif de réduction des effectifs, le nouveau plan cible des postes (339) à supprimer. Le plan est aussi ouvert aux candidats qui occupent des postes non ciblés. Comme la rapporteure pour avis l’avait souligné dans son avis sur l’avenant au COM, il importe de mettre en place un suivi vigilant des départs et des suppressions de postes afin d’éviter que ces derniers ne soient remplacés.

Une amélioration est constatée depuis mi-2012 dans l’évolution des effectifs non permanents dont le volume avait augmenté en 2011 et 2012 malgré la constitution en 2010 de l’entreprise unique et le précédent plan de départs. La poursuite de la diminution des effectifs constatée en 2013 est d’autant plus nécessaire que le nouvel accord collectif signé le 28 mai 2013 (transposition des salariés dans les nouvelles classifications, harmonisation salariale, temps de travail) a un effet d’augmentation – de l’ordre de 4 % – sur la masse salariale et qu’il en sera de même des sujets qui n’ont pas été réglés par cet accord (polycompétence des journalistes, permanentisation de CDD) et pour lesquels des négociations vont s’ouvrir.

En outre, l’entreprise doit poursuivre la modernisation des outils et des organisations et la politique de rationalisation induite par la fusion.

En réponse au questionnaire budgétaire, l’entreprise estime que « Même si la démarche volontariste de transformation de l’entreprise et de gains de productivité initiée mi-2012 a déjà porté ses fruits en 2013 et se poursuit en 2014 et 2015 dans tous les domaines de l’entreprise (programmes, fonctionnement, organisation, modernisation des moyens techniques), les incertitudes identifiées au moment de la signature de l’avenant au COM, qui se confirment, rendront la construction du budget 2015 et le retour à l’équilibre extrêmement difficiles, et pourront nécessiter des ajustements substantiels dans les missions de l’entreprise. »

Enfin, l’érosion de l’audience des chaînes de France Télévisions est préoccupante. Elle concerne France 2, France 3 mais aussi France 4 qui n’a jamais eu une ligne éditoriale de service public convaincante. Outre ces baisses d’audience, le public de France 2 et France 3 vieillit.

Comme la rapporteure pour avis a eu l’occasion de le regretter dans son avis sur le projet d’avenant au COM, ce dernier apporte peu de modifications de la ligne éditoriale des chaînes. Le CSA, qui doit procéder l’année prochaine à la nomination du président de France Télévisions, a annoncé la publication d’un bilan détaillé de l’entreprise sous la présidence de Rémy Pflimlin. Ce rapport permettra d’éclairer le choix par le régulateur d’une personnalité mais surtout d’un projet stratégique dont la rapporteure estime qu’il devra nécessairement comporter une réflexion sur l’identité des chaînes. Elle appelle également de ses vœux une meilleure articulation et mise en cohérence des offres du service public audiovisuel sur le numérique. Ce point sera développé plus amplement dans la deuxième partie du présent rapport.

II. FRANCE MÉDIAS MONDE : DES OBJECTIFS AMBITIEUX DANS UN ENVIRONNEMENT FINANCIER CONTRAINT

Dans le présent projet de loi de finances, le montant de ressource publique destiné à France Médias Monde s’élève à 247,1 millions d’euros TTC (242 millions d’euros HT), issus intégralement du programme 844 du compte de concours financiers (mission « Avances à l’audiovisuel public ») financé par la contribution à l’audiovisuel public.

Cette dotation est en hausse de 0,7 % par rapport au montant voté en loi de finances initiale 2014. Elle correspond à l’hypothèse de dotation totale de ressource publique inscrite dans le COM 2013-2015 (242,1 millions d’euros) de France Médias Monde, minorée de 0,1 million d’euros « afin de neutraliser la baisse des cotisations patronales consécutive à la mise en œuvre du pacte de responsabilité ».

Née en 2012 de la fusion entre la société chargée de l’audiovisuel extérieur de la France (AEF) et ses filiales RFI, France 24 et Monte Carlo Doualya (MCD), France Médias Monde a pour mission de proposer une alternative aux médias existant sur la scène internationale en offrant en plusieurs langues, sur tous les supports, une vision de l’actualité internationale indépendante, contribuant au rayonnement mondial de la France et de la francophonie.

Le COM conclu en janvier 2014 avec l’État pour la période 2013-2015 fixe des objectifs ambitieux : consolider les positions dans les zones d’influence traditionnelle (Afrique francophone, Maghreb et Proche-Orient), développer la présence des antennes dans de nouvelles zones et saisir les opportunités de développement (en particulier en Asie et sur le continent américain).

Actuellement accessible à 258 millions de foyers, dont les deux tiers en Europe, France 24 devra, selon le COM, avoir accru sa diffusion d’un quart en 2015. L’audience des antennes (42 millions de téléspectateurs pour France 24, 35 millions pour RFI et 7 millions pour MCD), qui s’est accrue au cours des dernières années, devra poursuivre sa croissance.

Ce développement se réalise dans un environnement financier contraint.

La fusion ayant entraîné la suppression de 109 postes, un plan de départs volontaires a été mis en place en 2012 (1), dont le coût de 23,9 millions d’euros a été financé par l’État. RFI avait déjà connu un plan de départs volontaires en 2009-2010 conduisant à 232 départs, pour un coût global pour l’État de 41,2 millions d’euros. Ces plans de départs volontaires ont permis, d’une part, de développer la diffusion des antennes et de créer la version arabophone de France 24 (44 créations de postes à RFI, puis 44 à France Médias Monde) ; d’autre part de réaliser une économie nette de 19 millions d’euros (13,5 millions d’euros à partir de 2010, puis de 5,5 millions d’euros en 2012).

Le regroupement de l’ensemble des filiales sur un même site à Issy-les-Moulineaux s’est réalisé dans le cadre d’un projet immobilier qui a coûté 44 millions d’euros, au titre duquel l’État a versé une subvention exceptionnelle de 27,7 millions d’euros entre 2010 et 2012 (2).

Dès 2012, la dotation de l’État au budget de l’entreprise a été fixée à 237,7 millions d’euros, soit une réduction de 6,1 % (15,3 millions d’euros) par rapport à 2011. Son évolution reste depuis lors très limitée (1,13 % entre 2014 et 2012 au total).

Une grande partie de l’effort financier est venue de l’entreprise, qui a entrepris une rationalisation de ses processus de production et une diminution de ses frais généraux : les économies de gestion réalisées sont évaluées à 16,7 millions d’euros.

Dans ce contexte, le développement ou au moins la stabilité des recettes publicitaires constitue un enjeu critique. Celles-ci représentent 4,5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, soit un montant de 5,1 millions d’euros sur un total de ressources propres de 10,7 millions d’euros en 2012 (le montant prévu de ces ressources en 2015 s’élève à 10,4 millions d’euros).

Le risque d’une baisse des recettes publicitaires de France 24, qui constituent les trois-quarts de ces recettes, s’est concrétisé en 2013, année marquée par la fin du minimum garanti auquel France Télévisions Publicité s’était engagée : le produit de la commercialisation des espaces publicitaires de France 24 a baissé d’un tiers par rapport à 2012, ne s’élevant qu’à 1,6 million d’euros alors que l’objectif figurant dans le COM était de 2,4 millions d’euros.

Le contrat de cinq ans liant France Médias Monde à France Télévisions Publicité jusqu’en 2015 a été mis sous surveillance, et la coordination entre France Télévisions Publicité et l’entreprise a été renforcée pour assurer un suivi attentif de l’évolution des produits publicitaires. Pour 2014 il semble que la réalisation sera proche de l’objectif de 2,4 millions d’euros.

À la suite, d’une part, de la fusion au sein d’une même entité de sociétés distinctes régies par des conventions propres, et d’autre part de la disparition des anciennes conventions collectives qui s’appliquaient à RFI et MCD, France Médias Monde doit négocier un accord collectif unique.

Une harmonisation devra être trouvée entre des statuts et des modes d’organisation très différents : d’une part, le système hérité de l’ancienne convention collective de la communication et de la production audiovisuelle et de l’ancien avenant audiovisuel à la convention collective nationale sur le travail des journalistes, applicable à RFI et MCD, et d’autre part la réglementation minimale appliquée à France 24 et à l’ancienne structure holding par application des clauses de la convention collective des chaînes thématiques du secteur privé.

L’objectif des négociations, dont la conclusion est prévue à ce stade fin 2014, est de créer le cadre social permettant de travailler ensemble dans des directions fusionnées, même si les rédactions restent séparées. La négociation devra porter sur la définition des métiers, leurs évolutions, le système de qualification, une simplification et une harmonisation de la structure des rémunérations ainsi que l’organisation et le temps de travail. Les différences entre les statuts appliqués jusqu’alors sont réelles en termes de trajectoires de rémunération et de temps de travail. L’enveloppe budgétaire prévue au titre de cet accord s’élève à 3,5 millions d’euros.

III. TV5 MONDE : UNE DOTATION CONFORME AU PLAN STRATÉGIQUE 2014-2016

Le constat ayant été fait que le positionnement de TV5 Monde au sein de France Médias Monde n’était pas satisfaisant, le gouvernement, en accord avec ses partenaires francophones, a souhaité faire à nouveau de France Télévisions l’actionnaire principal de TV5 Monde en lieu et place de France Médias Monde. La cession de 36,4 % du capital de la société TV5 Monde par la société France Médias Monde à France Télévisions, portant sa participation au capital à 49 %, est effective depuis le 23 mai 2013. En conséquence de cette évolution capitalistique, le président de France Télévisions s’est substitué à celui de l’AEF dans le rôle de président du conseil d’administration de TV5 Monde.

Dans le présent projet de loi de finances, le montant de ressource publique destiné à TV5 Monde s’élève à 77,8 millions d’euros TTC (76,2 millions d’euros HT), issus intégralement du nouveau programme 847 du compte de concours financiers (mission « Avances à l’audiovisuel public ») financé par la contribution à l’audiovisuel public.

Ce montant est stable par rapport au montant voté en loi de finances initiale 2014 et cette dotation correspond à l’hypothèse de ressource publique inscrite dans le plan stratégique de TV5 Monde 2014-2016 approuvé par les gouvernements bailleurs de fonds en novembre 2013.

IV. RADIO FRANCE : UNE ENTREPRISE CONFRONTÉE À DES DÉFIS MAJEURS

Le montant de ressource publique destiné à Radio France s’élève à 614,4 millions d’euros TTC (601,8 millions d’euros HT) dans le présent projet de loi de finances. Il est stable par rapport au montant voté en loi de finances initiale 2014.

À titre de rappel, la loi de programmation des finances publiques 2013-2015 prévoyait d’allouer à Radio France en 2015 une dotation publique de 618,3 millions d’euros TTC (soit 605,6 millions d’euros HT).

La rapporteure reviendra en détail sur les défis importants auxquels l’entreprise Radio France est confrontée dans la seconde partie du présent rapport.

V. ARTE FRANCE : LA NÉCESSITÉ DE CONSOLIDER UNE STRATÉGIE ÉDITORIALE QUI A PORTÉ SES FRUITS

Le montant de ressource publique destiné à ARTE France s’élève à 261,8 millions d’euros HT (267,2 millions d’euros TTC) dans le présent projet de loi de finances.

Ce montant, en légère hausse (de 1,3 million d’euros, soit + 0,5 %), correspond à une quasi-stabilisation de la ressource publique après une réduction exceptionnelle (d’un million d’euros) intervenue en loi de finances pour 2014 au titre de la participation d’ARTE France au redressement des finances publiques. Elle est toutefois inférieure de 30,7 millions d’euros à la prévision de dotation publique pour 2015 inscrite dans le COM de la société (292,4 millions d’euros).

Depuis 2012, ARTE est parvenue à des résultats satisfaisants à la faveur d’une stratégie éditoriale et de développement numérique soutenue par les pouvoirs publics. La part d’audience d’ARTE, qui se dégradait depuis le lancement de la TNT, a progressé de 33 % en deux ans, passant de 1,5 % en 2011 à 2 % en 2013, avant de se stabiliser au premier semestre 2014 à 2 %.

ARTE doit désormais consolider cette situation en continuant à donner la priorité à ses investissements dans les programmes. Dans ce contexte, il conviendrait rapidement de revenir au niveau d’investissement direct dans les programmes (plan de production et d’achats) réalisé en 2012 (133,13 millions d’euros). En 2015, ARTE France souhaite consacrer 131,44 millions d’euros à cet objectif. L’entreprise doit par ailleurs poursuivre ses développements numériques ambitieux, sa gestion rigoureuse, sa démarche constante d’optimisation des coûts et le développement de ses recettes commerciales.

VI. L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL : UNE ANNÉE CHARNIÈRE

Le montant de ressources publiques destiné à l’INA s’élève à 90,9 millions d’euros TTC (89,0 millions d’euros HT) dans le présent projet de loi de finances. Conformément à l’engagement pris par l’État, il est ainsi proposé de rétablir la dotation publique accordée à l’INA à un niveau comparable à celui des années antérieures à 2014. La baisse de la dotation de l’INA intervenue en 2014 n’avait pas vocation à être structurelle. Il s’agissait d’une contribution ponctuelle de l’établissement, permise par sa trésorerie : le financement de ses activités récurrentes et des projets prévus (hors immobilier) ont été maintenus.

2015 constituera une année charnière en tant que première année de mise en œuvre du nouveau COM 2015-2019 qui doit être signé dans les prochains mois.

Lancé en 1999 à la veille du premier COM (2000-2003), le plan de sauvegarde et de numérisation (PSN) restera prioritaire. Il continuera d’intégrer la migration vers un nouveau format informatique qui garantit la pérennité des images sur le long terme ainsi que leur utilisation sous tous les formats d’exploitation actuels.

Comme l’indique le projet annuel de performance, l’Institut souhaite également poursuivre sa stratégie d’accroissement et de diversification de ses publics, « au travers d’une démarche commerciale dynamique, complémentaire de ses missions de service public » :

– afin de développer sa position sur le marché de la formation professionnelle, INA EXPERT se fixe l’objectif de proposer « une offre renouvelée et enrichie, en phase avec les attentes du marché, en s’appuyant sur la complémentarité de ses deux centres de formation » : son site historique de Bry-sur-Marne, consacré aux formations technico-artistiques, et le nouveau site d’Issy-les-Moulineaux, centré sur les formations à la stratégie, au marketing et au management des contenus. Dans le même temps, l’Institut souhaite « maintenir une politique d’enseignement supérieur et de recherche innovante et dynamique » ;

– l’activité d’expertise – en France et à l’étranger – doit être développée non seulement dans le domaine de l’archivage numérique mais aussi en matière d’ingénierie technico-pédagogique (aide à la conception de cursus audiovisuels) et d’analyse de contenus audiovisuels ;

– la refonte des systèmes de ventes aux professionnels (INA MEDIAPRO) comme au grand public doit permettre d’augmenter la visibilité commerciale des produits de l’Institut et d’améliorer également l’accès aux fonds patrimoniaux (nouvelle boutique en ligne ina.fr, nouvelle offre illimitée par abonnement) ;

– l’implantation de postes de consultation multimédia donnant accès à l’ensemble des collections se poursuivra dans de grandes bibliothèques et cinémathèques régionales.

Enfin, toujours selon le projet annuel de performance, « l’Institut devra assurer un niveau d’investissements important, estimé à 18 millions d’euros, qui sera plus particulièrement mobilisé dans le domaine de l’informatique. Cette enveloppe est estimée ici hors investissements d’avenir et alors que la réhabilitation du site de Bry-sur-Marne est en cours de chiffrage. Le ministère de la culture et de la communication et l’INA ont en effet confié à l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) une expertise sur l’évolution des implantations immobilières de l’INA, en remplacement du projet immobilier inscrit au COM 3 et abandonné du fait d’un coût trop élevé » jugé irréaliste par la nouvelle présidente. « Les conclusions de cette étude engagée en juin 2014 permettront ensuite d’établir le niveau des investissements pluriannuels nécessaires à cette évolution immobilière. »

Le rapport 2013 de la mission de contrôle économique général et financier, ainsi que le rapport pour avis de M. le Sénateur David Assouline sur les crédits en faveur de l’audiovisuel dans le projet de loi de finances pour 2014, faisaient apparaître plusieurs points de vigilance qui confirment certains des éléments de diagnostic portés à la connaissance de la rapporteure par la nouvelle présidente-directrice générale, Mme Agnès Saal, auditionnée le 2 septembre 2014.

En 2013, la mission de contrôle général économique et financier a alerté sur l’augmentation des frais de personnel : « le nouvel accord collectif du 9 novembre 2012 a influencé à la hausse la masse salariale, augmentation évaluée à environ 533 000 euros pour l’année 2012 et qui sera supérieure en 2013. Cet accord collectif semble absorber pour l’avenir la totalité des marges de manœuvre de l’établissement en matière salariale. Ce constat s’est révélé vrai puisqu’au titre de 2013, le Président de l’INA a estimé que le cadrage salarial qui lui a été signifié était insuffisant (1,8 %) et a demandé à la tutelle de le relever ».

De fait, l’accord collectif signé en novembre 2012 « restreint significativement les marges de manœuvres » de l’Institut.

Par ailleurs, comme l’indique la mission de contrôle « dans la perspective de départs à la retraite à hauteur de 200 emplois sous cinq ans, l’INA doit rapidement se doter d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) afin de prévoir l’évolution des métiers. »

VII. LE FONDS DE SOUTIEN À L’EXPRESSION RADIOPHONIQUE LOCALE (FSER) : UNE STABILISATION DES CRÉDITS ET UN RENFORCEMENT DE LA SÉLECTIVITÉ DES AIDES

L’action « Soutien à l’expression radiophonique locale » couvre le financement de l’aide aux radios associatives, prévue à l’article 80 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Cette aide publique est versée dans le cadre du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER) dans le but de soutenir le secteur radiophonique local associatif, garant de l’expression du pluralisme et de la communication de proximité. Elle est attribuée aux radios locales associatives accomplissant une mission de communication sociale de proximité, lorsque leurs ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur chiffre d’affaires total. Chaque année, plus de 600 radios associatives bénéficient de l’aide du FSER (649 en 2013) qui représente en moyenne 40 % de leurs ressources.

La dotation budgétaire pour le fonds de soutien à l’expression radiophonique locale est fixée à 29 millions d’euros dans le présent projet de loi de finances. Cette dotation intègre les fonds mobilisables, dans la limite de 1,8 million d’euros, en cas de lancement de la radio numérique terrestre. Elle doit permettre de maintenir l’effort en faveur du soutien aux radios associatives, tout en faisant face à l’augmentation du nombre de demandes de subventions de fonctionnement constatée chaque année.

Comme l’indique le ministère de la culture en réponse au questionnaire budgétaire, « La mise en œuvre du « plan FM + », qui a notamment profité aux radios associatives, a entraîné une augmentation des besoins financiers proportionnelle aux nouvelles autorisations. Face à l’augmentation du nombre de bénéficiaires du FSER, il est apparu indispensable d’améliorer l’efficacité du dispositif de soutien fixé par le décret du 25 août 2006. Dans cette optique, une nouvelle réforme du FSER, qui sera effective en 2015, permettra de renforcer la sélectivité des aides versées par le FSER et de redéployer les financements vers les radios les plus actives dans la communication sociale de proximité. »

DEUXIÈME PARTIE : RADIO FRANCE

2014 constitue pour Radio France une année importante de bilan et de transition marquée par la nomination par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) d’un nouveau Président, Mathieu Gallet, qui succède à Jean-Luc Hees, nommé le 7 mai 2009 par l’ancien président de la République. Cette année sera également marquée par la publication attendue d’un rapport de la Cour des comptes et la signature d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens (COM) pour la période 2015-2019.

La rapporteure a souhaité s’intéresser à cette société qui, ces dernières années, a fait l’objet de beaucoup moins d’attention et d’inquiétude que les autres sociétés de l’audiovisuel public, à commencer par France Télévisions et France Médias Monde, soumises à des réformes très lourdes et à des contrôles plus réguliers. La Cour des comptes, dont le dernier contrôle de la société remontait à 2005, devrait publier prochainement un rapport approfondi sur sa gestion. Un bilan à la fois plus global et plus détaillé que ne le sont les rapports d’exécution des COM apparaît bienvenu compte tenu de la perspective d’un nouveau COM et des défis importants auxquels l’entreprise sera soumise dans les prochaines années. Avant que ne soit publié le rapport très attendu de la Cour des comptes, la rapporteure a souhaité formuler plusieurs observations.

Il lui apparaît que sous la présidence de Jean-Luc Hees, l’entreprise a commencé à réaliser des progrès sur le plan de la gestion, comblé une partie de son retard dans le domaine du numérique et enregistré certains succès d’audiences, ces dernières connaissant néanmoins sur les deux dernières années une évolution inquiétante. Dans un cadre budgétaire qui sera nécessairement très contraint, les défis pour les années à venir en matière éditoriale et stratégique mais aussi en matière d’amélioration de la gestion apparaissent majeurs dans un contexte de diminution et de vieillissement des audiences mais aussi de dérive du coût du chantier de réhabilitation de la maison de la radio qui ne peut que peser fortement sur les marges de manœuvre du groupe.

Mathieu Gallet, ancien président de l’INA, a été nommé le 27 février 2014, en application de l’article 47-3 de la loi du 30 septembre 1986 modifié par la loi du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public, sur la base d’un projet stratégique dont le CSA a publié un résumé. De même, comme le prévoit l’article précité, Mathieu Gallet a, le 18 juin 2014, présenté devant la Commission des affaires culturelles et de l’éducation de notre assemblée un rapport d’orientation reprenant la substance de ce projet stratégique, sur lequel les parlementaires ont pu formuler des observations avant sa traduction dans le futur COM.

Si le CSA a publié, en octobre 2013, un bilan 2012 de Radio France assorti de préconisations particulièrement pertinentes et intéressantes, la rapporteure regrette l’absence de mise en œuvre du quatrième alinéa de l’article 47-4 introduit par la loi du 15 novembre 2013 qui dispose que « quatre ans après le début du mandat des présidents des sociétés de l’audiovisuel public, le CSA rend un avis motivé sur les résultats de ces sociétés au regard de leur projet stratégique (en l’espèce le COM), cet avis étant transmis aux commissions permanentes compétentes. » Alors même que le CSA annonce un bilan détaillé de la présidence de France Télévisions sous la présidence de Rémy Pflimlin pour la fin de cette année, la rapporteure regrette qu’un tel bilan n’ait pas été établi en ce qui concerne Radio France dans les trois mois et demi qui se sont écoulés entre la promulgation de la loi et la décision de nomination. La rapporteure estime que ce rapport est un élément important de la nouvelle procédure de nomination. Il a vocation à éclairer les membres du collège, les parlementaires et les candidats sur le choix d’un projet stratégique, lequel doit s’appuyer sur un diagnostic de la situation et des besoins de la société.

I. MAINTENIR LE LIEN AVEC LE PUBLIC : LE DÉFI DE LA STRATÉGIE ÉDITORIALE ET NUMÉRIQUE

La société Radio France regroupe sept stations dont trois créées en 1963 : France Inter, radio généraliste proposant des programmes d’information, des programmes culturels, des émissions de débat et du divertissement, France Musique, radio musicale, et France Culture, radio généraliste consacrée à la connaissance et au savoir. Les quatre autres, de création plus récente, sont FIP, radio musicale centrée sur le jazz et la musique classique créée en 1975, France Info, radio d’information en continu créée en 1987, le Mouv’, radio à dominante musicale destinée aux 20-30 ans créée en 1997 et France Bleu, réseau de 44 radios locales né de la fusion en 2001 des « locales » de Radio France et de Radio-Bleue. France Bleu remplit des obligations de diffusion d’une information de proximité et un engagement d’ordre culturel envers les régions (valorisation des patrimoines locaux, découverte des nouveaux talents de la chanson…).

Le tableau ci-après indique l’évolution du coût des différents programmes nationaux.

ÉVOLUTION DU COÛT DES PROGRAMMES NATIONAUX

(en millions d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Évolution moyenne 2009-2013

France Inter

113,2

118,0

121,1

126,1

125,8

2,7 %

France Info

62,6

62,1

62,7

63,4

64,7

0,8 %

France Culture

82,6

85,4

88,3

93,4

92,1

2,8 %

France Musique

55,2

55,9

56,5

57,1

55,1

0,0 %

FIP

9,7

10,5

10,4

10,3

11,0

3,3 %

Le Mouv’

12,1

12,0

16,7

19,4

19,0

12,0 %

Direction des nouveaux médias

3,9

5,4

5,7

9,4

12,9

35,2 %

Formations permanentes

55,4

57,3

58,1

57,4

58,0

1,2 %

Autres prod musicales

9,8

8,9

10,5

10,2

9,8

0,1 %

Total

404,3

415,5

430,0

446,7

448,3

2,6 %

Source : Radio France.

A. LES ANTENNES : DES PERTES D’AUDIENCES PRÉOCCUPANTES

Entre 2012 et 2013, l’audience cumulée sur un jour moyen du groupe est passée de 26,8 % à 25,6 %, ce taux étant inférieur à la cible du COM qui était au minimum de 25,8 %.

AUDIENCE CUMULÉE SUR UN JOUR MOYEN

(Lundi-Vendredi)

(en pourcentage)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Cible COM
2010-2014

Total Radio France

25,8

25,5

26

26,8

25,6

≥ 25,8

France Inter

10,2

10,2

10,5

10,9

10

≥ 10,2

France Bleu

6,8

7,2

7,1

7,3

7,6

≥ 7

France Info

8,8

8,4

9

8,9

8,1

≥ 8,8

France Musique

1,5

1,3

1,4

1,5

1,6

France Culture

1,5

1,6

1,8

2

2

Le Mouv’

0,9

0,7

0,5

0,4

0,4

≥ 1,5

FIP (*)

2

2

2,1

2,3

2,1

≥ 2,2

(*) : FIP dans sa zone de diffusion (Île-de-France, Bordeaux, Nantes, Strasbourg, Montpellier) septembre 2012-juin 2013.

Source : rapport d’exécution du COM 2013.

Si des évolutions favorables ont été constatées entre 2009 et 2013, depuis 2013, les résultats sont beaucoup plus inquiétants pour la plupart des antennes.

En 2013, France Culture et France Musique ont stabilisé leurs audiences et France Bleu connaît une progression très significative (avec des disparités importantes selon les antennes). En revanche, les audiences de France Inter, en forte diminution, sont en dessous de la cible du COM, de même que celles de France Info, qui connaissent une dégradation préoccupante. Quant au Mouv’, avec une audience de 0,4 %, ses résultats sont très en deçà de la cible du COM. Il en va de même des audiences de FIP, qui n’atteignent pas la cible fixée.

Les résultats de 2014 amplifient les inquiétudes. Entre septembre 2013 et juin 2014, l’audience cumulée du groupe est tombée à 24,9 %. Les audiences sont au plus bas pour France Inter et France Info. Les tendances ne sont pas favorables pour France Musique. Dans une interview donnée à La Tribune le 16 septembre 2014, Mathieu Gallet observe que « France Inter est tombée à 9 % en juillet [son plus mauvais score depuis 2006, ndlr], ce n’est clairement pas satisfaisant, on doit pouvoir remonter à l’étiage normal de 10 %. Pour France Musique, on est tombé à 1,4 %, quand Radio Classique est à 2,2 %-2,3 %, on doit pouvoir remonter et se rapprocher des 2 %. France Info est tombé à 7,5 %, là aussi on doit pouvoir reprendre des points. »

B. UN VIEILLISSEMENT INQUIÉTANT, UN PROFIL SOCIOCULTUREL INSUFFISAMMENT DIVERSIFIÉ

En ce qui concerne la structure de l’audience, comme l’a indiqué Mathieu Gallet, auditionné le 18 juin 2014 par la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, « la moyenne d’âge est trop élevée, le profil socioculturel n’est pas assez populaire ».

Radio France est confrontée à un vieillissement très préoccupant de ses audiences, dont l’âge médian est supérieur de dix ans à celui des auditeurs du média radio en général, comme le montre le tableau ci-après. Il se rapproche dangereusement des 60 ans pour France Bleu, France Inter et France Culture et atteint 68 ans pour France Musique ! L’âge moyen des auditeurs tend par ailleurs à s’éloigner légèrement de l’âge moyen des auditeurs, toutes radios confondues.

Âge médian des auditeurs

2009

2010

2011

2012

2013

Le Mouv’

28 ans

29 ans

34 ans

36 ans

34 ans

Fip

49 ans

48 ans

47 ans

50 ans

49 ans

France Info

51 ans

51 ans

52 ans

52 ans

53 ans

France Bleu

56 ans

57 ans

58 ans

58 ans

59 ans

France Inter

57 ans

57 ans

58 ans

58 ans

59 ans

France Culture

57 ans

58 ans

58 ans

58 ans

59 ans

France Musique

64 ans

65 ans

66 ans

66 ans

68 ans

Total Radio France

54 ans

55 ans

56 ans

56 ans

57 ans

Ensemble 13 ans et plus

46 ans

46 ans

46 ans

46 ans

47 ans

Total radio

45 ans

45 ans

46 ans

46 ans

47 ans

Source : Médiamétrie, 126 000 Radio, Ensemble 13 ans et +, lundi-vendredi 5 heures-24 heures.

Dans ces conditions, la rapporteure estime que l’élargissement de l’audience à des publics plus jeunes doit être au cœur de la stratégie fixée par le nouveau COM. Il en va de l’avenir du service public de la radio.

En ce qui concerne le profil sociologique des auditeurs, les actifs demeurent sous-représentés et les CSPI+ largement surreprésentés. Comme l’indique le rapport d’exécution du COM 2010-2014 pour l’exercice 2013, la surreprésentation des CSPI+ est particulièrement élevée pour France Inter, France Info, France Culture, Le Mouv’ et Fip. L’objectif affiché par le COM de s’adresser à tous les publics et de favoriser la diversité sociale est donc loin d’être atteint.

STRUCTURE DE L’AUDIENCE DE FRANCE INTER

(en pourcentage)

 

Septembre 09
-juin 10

Septembre 10
-juin 11

Septembre 11
-juin 12

Septembre 12
-juin 13

Septembre 13
-juin 14

Ensemble des 13 ans et plus

100

100

100

100

100

Homme

53,3

53,3

52,2

50,9

51,8

Femme

46,7

46,7

47,8

49,1

48,2

13 à 34 ans

13,4

13,7

12,8

12,1

11,5

35 à 49 ans

21,6

21,4

20,5

20,2

20,6j

50 ans et plus

65,0

64,9

66,7

67,7

67,9

Actif

51,8

51,0

50,1

50,5

50,1

Inactif

48,2

49,0

49,9

49,5

49,9

CSPI+

40,5

39,7

39,4

40,1

39,7

CSPI-

11,3

11,2

10,8

10,4

10,4

Ile-de-France

20,5

19,3

19,7

20,0

21,2

Source : Radio France.

STRUCTURE DE L’AUDIENCE DE FRANCE CULTURE

(en pourcentage)

 

Septembre 09
-juin 10

Septembre 10
-juin 11

Septembre 11
-juin 12

Septembre 12
-juin 13

Septembre 13
-juin 14

Ensemble des 13 ans et plus

100

100

100

100

100

Homme

56,3

55,5

54,4

49,5

53,6

Femme

43,7

44,5

45,6

50,5

46,4

13 à 34 ans

11,8

11,2

10,8

11,0

13,7

35 à 49 ans

21,2

23,8

20,9

18,8

19,0

50 ans et plus

67,0

65,0

68,3

70,2

67,4

Actif

54,6

54,0

51,0

52,0

51,3

Inactif

45,4

46,0

49,0

48,0

48,7

CSPI+

44,8

43,5

42,2

42,7

43,7

CSPI-

9,8

10,5

8,8

9,3

7,6

Ile-de-France

23,8

22,5

22,5

25,7

26,0

Source : Radio France.

STRUCTURE DE L’AUDIENCE DE FRANCE INFO

 

Septembre 09
-juin 10

Septembre 10
-juin 11

Septembre 11
-juin 12

Septembre 12
-juin 13

Septembre 13
-juin 14

Ensemble des 13 ans et plus

100

100

100

100

100

Homme

63,9

64,0

62,5

63,3

62,6

Femme

36,1

36,0

37,5

36,7

37,4

13 à 34 ans

16,9

16,6

14,4

13,3

13,1

35 à 49 ans

31,4

30,5

31,0

30,5

28,9

50 ans et plus

51,7

52,9

54,6

56,2

58,0

Actif

63,8

62,3

62,3

61,6

61,5

Inactif

36,2

37,7

37,7

38,4

38,5

CSPI+

45,2

44,5

44,5

43,8

45,0

CSPI-

18,7

17,8

17,9

17,8

16,4

Ile-de-France

23,1

23,1

22,5

22,0

21,9

Source : Radio France.

C. LA NOUVELLE STRATÉGIE ÉDITORIALE

1. Des propositions qui vont dans le sens d’une clarification de l’identité des antennes

Le projet stratégique de Mathieu Gallet propose plusieurs évolutions de la stratégie éditoriale destinées en particulier à mieux marquer l’identité des différentes antennes. Il s’agit notamment d’éviter les phénomènes de concurrence entre ces dernières. Lors de son audition par la Commission des affaires culturelles et de l’éducation le 18 juin 2014, il a indiqué vouloir « des chaînes généralistes encore plus éclectiques et des chaînes thématiques encore plus spécialisées. »

Au sujet de France Info, le bilan 2012 de Radio France établi par le CSA faisait la constatation suivante : « France Info semble avoir multiplié les émissions de débats ou consacrées à l’analyse des sujets. Il conviendrait de renforcer son rôle de référence en matière d’information ainsi que le prévoit le COM. À cet égard, le Conseil constate que les grilles de rentrée 2013 sont présentées comme renforçant le décryptage de l’information au travers de reportages plus longs et d’émissions d’analyse ».

Le redressement des audiences de France Info constitue une priorité. Conformément aux préconisations du CSA, le nouveau président a proposé qu’elle redevienne une radio d’information en continu, privilégiant le direct, la stratégie de son prédécesseur tendant à multiplier les magazines, souvent préenregistrés, n’ayant pas été payante : « France Info dispose d’une marque puissante mais subit une érosion de son audience face à la concurrence multiforme des chaînes d’information en continue et du numérique. Il est temps d’y remédier en revenant à l’ADN de France Info, à savoir une plate-forme publique d’information en continue, la plus rapide, la plus pédagogique et la plus proche des auditeurs. Je suis convaincu que France Info retrouvera et développera son audience en renouant avec la logique de l’actualité chaude, la logique de « breaking news ». Ceci implique de consacrer les moyens journalistiques au direct et, à l’heure des réseaux sociaux, au décryptage, à l’investigation, à l’éclairage de l’actualité. Ceci suppose aussi pour un média de mobilité comme la radio des applications et des systèmes d’alerte de dernière génération sur tous les supports mobiles comme les smartphones et les tablettes ».

L’objectif annoncé est de « rivaliser avec les sites leaders en matière d’information ». On verra qu’on en est encore très loin au vu des chiffres d’audience du site de France Info.

S’agissant de France Musique, Mathieu Gallet a rappelé, lors de cette même audition, qu’elle reste une institution au regard de la qualité de ses contenus mais que la concurrence de Radio Classique la menace depuis de nombreuses années : « Radio Classique a notamment pénétré, avec succès, le marché des amateurs de musique classique. Les chiffres d’audience ne sont pas à l’avantage de France Musique, nous en avons conscience. Il faut avoir pour France Musique l’ambition que les différentes directions ont eue pour France Culture depuis la fin des années 1990, en n’opposant plus la qualité des programmes à la recherche de l’audience. Je crois que cette chaîne peut conquérir de nouveaux auditeurs, à condition de quitter le registre trop étroit de la musicologie, pour se consacrer plus manifestement à la musique elle-même, en développant une approche ouverte, pédagogique et éducative ».

2. La place de la musique sur les antennes

Le bilan 2012 de Radio France établi par le CSA encourageait le groupe à mieux exposer la musique sur les antennes : « S’agissant des chansons d’expression originale française, la part de celles-ci dans la programmation de la station Le Mouv’ s’établit à 31,4 % en 2012, en diminution de 1,5 point par rapport à 2011. Le Conseil constate que cette baisse est une constante depuis plusieurs années. (…) Il estime que la diminution constante de la part des chansons d’expression originale française sur le Mouv’ n’est pas acceptable et qu’il conviendrait d’y remédier ».

En matière de programmation musicale, la rapporteure note en effet que certains des objectifs du COM ne sont pas remplis. En 2012 et 2013, la proportion de nouveautés parmi les titres diffusés par France Inter est inférieure à la cible (52,3 % en 2013 contre un objectif de 55 % minimum). Il en va de même pour le Mouv’ dont la part de nouveaux talents francophones diffusés est de 24,4 % contre une cible de 25 % minimum.

Interrogé sur la place qu’il entend accorder à la musique sur les antennes, Mathieu Gallet, a indiqué vouloir « évaluer l’opportunité d’un rapprochement entre FIP, radio unique par le caractère éclectique de son offre, aujourd’hui contrainte dans son développement en hertzien par la rareté des fréquences, et RF8, la plate-forme de musique en ligne, ce qui permettrait à FIP de se développer sur le numérique. »

Le nouveau COM devra donc clarifier les objectifs en ce qui concerne la place de la musique sur les antennes.

3. Les interrogations de la rapporteure sur l’avenir du Mouv’

Dans son bilan 2012 de Radio France, le CSA notait que le repositionnement de la station prévu par le COM 2010-2014 pour en faire une radio « généraliste à dominante musicale » mêlant émissions d’information, de débats et de musique, n’avait pas eu l’incidence positive espérée en termes d’audience. Le Conseil constatait également que les changements fréquents de ligne éditoriale nuisaient à cette audience.

En 2013, le Président Hees avait en outre opéré un rapprochement entre le Mouv’ et la direction des nouveaux médias dans l’objectif d’en faire la « vitrine numérique du groupe » en accentuant notamment ses développements numériques.

Alors que les résultats ne sont pas du tout au rendez-vous et que le COM 2010-2014 avait déjà été présenté comme celui de la dernière chance pour le Mouv’, le nouveau président souhaite faire de la relance de cette radio, fondée sur une nouvelle ligne éditoriale, une priorité. C’est ce qu’il a réaffirmé lors de son audition par la Commission des affaires culturelles et de l’éducation : « Il faut le dire clairement, le Mouv’ n’a jusqu’à présent pas rencontré son public. Je souhaite revenir à une organisation de la chaîne autour de la radio, séparée de la direction des nouveaux médias, et proposer pour début 2015 une nouvelle chaîne. »

Comme l’indique la synthèse du projet stratégique de Mathieu Gallet élaborée par le CSA, « ce repositionnement éditorial sera accompagné d’un changement de marque et d’une campagne marketing. La radio sera associée à une offre musicale en ligne par abonnement à partir de l’expérience antérieure de RF8. Un partenariat avec des scènes de musiques actuelles sera mis en place. Il s’agit de donner aux jeunes générations le goût et l’habitude du « son service public » et d’éviter qu’elles soient accoutumées très tôt à la présence invasive de la publicité. »

Si la ligne éditoriale de cette chaîne n’a pas encore été précisément définie, l’objectif affiché est d’en faire la chaîne des jeunes et des « cultures urbaines ». La rapporteure s’interroge sur cette notion, qui n’a pas été clarifiée. De manière générale, de nombreuses interrogations sur le sens et l’avenir de cette chaîne se sont exprimées au cours des auditions conduites dans le cadre de la préparation du présent rapport. La rapporteure fait sienne la question posée par Stéphane Travert lors de l’audition de Mathieu Gallet par notre commission : « peut-on réduire les jeunes aux cultures urbaines ? » Elle rappelle qu’elle a déjà eu l’occasion de dénoncer le caractère de chaîne « alibi » ou chaîne « ghetto » de France Ô. Dans le même esprit, elle estime que les objectifs de rajeunissement et de diversification de l’audience doivent être au cœur de la stratégie fixée par le futur COM, qu’ils doivent irriguer l’ensemble des antennes et surtout constituer un axe majeur de la stratégie numérique, le public jeune étant plus facile à toucher sur les réseaux numériques. Dans la mesure où par ailleurs, la contrainte budgétaire oblige à opérer des choix, elle s’interroge sur le maintien de cette chaîne dans le périmètre du service public compte tenu de son incapacité à réunir un public suffisant (0,4 % d’audience) qui doit être mise en regard de son coût annuel (environ 20 millions d’euros annuels depuis 2012).

Si le Mouv’ est maintenu au sein du bouquet, il devra s’agir cette fois-ci véritablement de la « dernière chance » pour cette antenne. Il conviendra par ailleurs d’être attentif aux coûts induits notamment par un changement de marque et à ce que la ligne éditoriale soit bien clarifiée ainsi que sa valeur ajoutée de service public par rapport à l’offre existante privée, l’absence de « présence invasive de publicité » ne pouvant tenir lieu d’identité de service public.

4. Pour une antenne plus représentative de la diversité de la société française

Dans son bilan 2012, le CSA souhaite « que Radio France s’assure que les intervenants (animateurs, chroniqueurs, invités) reflètent au mieux la diversité de la société française dans toutes ses composantes et invite Radio France à faire part au Conseil du respect de cette obligation. » Toutefois, s’agissant de la prise en compte de la diversité des origines et des cultures de la communauté nationale, le Conseil a souligné à plusieurs reprises les difficultés auxquelles il se heurte pour contrôler cette obligation. En effet, pour l’heure, le Conseil ne dispose d’aucun outil pour mesurer la diversité sur les antennes de radio à l’image du baromètre de la diversité qui mesure la diversité à la télévision.

Par ailleurs, la rapporteure souhaite faire siens les propos tenus par Hervé Féron lors de l’audition de Mathieu Gallet par notre commission : « toujours trop peu de femmes s’expriment encore à l’antenne (…). Le baromètre du CSA nous apprend qu’en 2013, la présence des femmes à l’antenne n’a été que de 37 %. Quant à la part des femmes expertes intervenant dans les émissions d’information, elle est inférieure à 20 %. Ainsi, l’année dernière, les invités des matinales de France Culture étaient, à 78 %, des hommes. Face à la sous-représentation féminine et suivant les recommandations du CSA, Radio France s’est engagé à ce que, d’ici la fin de l’année 2014, 30 % des invités des matinales soient des femmes. Ces chiffres, bien qu’encourageants, sont loin d’être suffisants quand on considère que les femmes représentent 52 % de la population et 49,6 % des auditeurs. »

A. LE DÉFI DU NUMÉRIQUE : L’URGENCE DE DÉFINIR UNE STRATÉGIE COMMUNE À L’ENSEMBLE DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC

1. Un démarrage tardif, des résultats contrastés

L’entreprise n’a véritablement amorcé le virage du numérique qu’en 2012, à la suite de la création de la direction des nouveaux médias, confiée à Joël Ronez, anciennement chargé des développements numériques d’Arte.

La création de cette direction a conduit à un doublement des effectifs (de 70 à 150 personnes) par redéploiements mais aussi recrutements externes (environ 30 %), la nomination de responsables des nouveaux médias et la mise en place d’équipes dédiées au sein de chaque chaîne. Le budget de la direction des nouveaux médias est passé de 3,9 millions d’euros en 2009 à 12,9 millions d’euros en 2013.

Au-delà de la refonte des sites des antennes, du développement des podcasts et des applications mobiles des chaînes du groupe, Radio France a commencé à développer la radio filmée (déjà en place depuis septembre 2014 sur France Inter et France Info), lancé la plateforme musicale RF8, créé de nouveaux sites thématiques (France Culture Fictions, NouvOson, site consacré à la production de contenus sonores en multicanal, maison.radio.france.fr) et des applications mobiles à thèmes (Marseille Sons, France Bleu Football, etc.).

Des résultats encourageants sont enregistrés en matière de téléchargements de podcasts.

(en milliers)

 

Nombre mensuel moyen de téléchargements de podcasts
Base : France métropolitaine

Rang stations

 

2009 (*)

2010

2011

2012 (**)

2013

Total Radio France

5 822

6 714

7 244

8 302

9 787

 

France Inter

3 529

4 042

3 901

3 845

4 118

3

France Info

161

204

435

591

651

 

France Bleu

31

51

116

212

211

 

France Culture

1 966

2 256

2 601

3 145

4 175

2

France Musique

96

114

126

233

211

 

Le Mouv’

38

47

64

257

288

 

Europe 1

3 753

3 902

4 277

5 302

6 493

1

RTL

1 692

2 347

3 345

3 967

3 948

4

(*) : Pour 2009, la moyenne est calculée sur les mois de novembre et décembre. La mesure a commencé en novembre.

(**) : La moyenne 2012 est calculée sur 12 mois pour les concurrents de Radio France et sur 11 mois pour les stations de Radio France. En effet, au mois de mars 2012, un incident dans la diffusion des podcasts du groupe chez le prestataire technique n’a pas permis de prendre en compte les téléchargements pendant une grande partie du mois.

Source : rapport d’exécution du COM en 2013.

Les résultats de France Culture apparaissent en particulier remarquables. En revanche, on note le nombre très faible de téléchargements de podcasts de France Bleu et France Info (ce format étant certes peu adapté à une radio d’information en continu). Autre point de vigilance, le nombre de téléchargements de podcasts de France Inter a faiblement évolué entre 2010 (4 442) et 2013 (4 118) alors que celui d’Europe 1 est passé de 3 902 à 6 493 et celui de RTL de 2 347 à 3 948 sur la même période.

En ce qui concerne la fréquentation des sites, alors que la direction met en avant des records de fréquentation et des chiffres d’évolution importants, voire spectaculaires (+ 100 % de visiteurs uniques sur l’ensemble des sites Radio France depuis 2011), qui le sont d’autant plus que l’on vient de loin, les comparaisons font état d’un retard de Radio France.

NOMBRE DE VISITEURS UNIQUES MENSUEL

 

Janvier-juillet 2012

Août-décembre 2012

Janvier-décembre 2013

France Inter

1 005 000

954 000

967 000

France Info

770 000

730 000

1 106 000

France Bleu

485 000

534 000

814 000

FIP

141 000

128 000

156 000

France Culture

379 000

488 000

583 000

France Musique

130 000

167 000

204 000

Le Mouv’

146 000

186 000

RTL

3 215 298

2 285 308

2 611 500

FTV info

3 958 386

4 314 879

4 996 006

Europe 1

2 865 214

1 936 029

2 163 039

Le Figaro

9 128 171

9 372 767

9 946 806

Source : Radio France.

Le retard concerne l’ensemble des sites de la radio par rapport à ceux d’autres médias, en particulier de la presse quotidienne (plus de 8 millions de visiteurs uniques pour Le Monde et Le Figaro). Cependant, sur l’année 2013, les audiences des sites d’Europe 1 et de RTL sont supérieures à 2 millions (2,6 millions pour RTL, 2,1 millions pour Europe 1) contre 967 000 pour France Inter et 1,1 million pour France Info et 583 000 pour France Culture.

Le classement des 20 applications mobiles les plus fréquentées en juin 2014 ne comporte par ailleurs aucune des applications de Radio France. À cet égard, afin d’en améliorer la lecture, la rapporteure insiste sur la nécessité d’assortir les indicateurs du futur COM en matière de développements numériques d’un plus grand nombre de comparaisons.

CLASSEMENT DES 20 PREMIÈRES APPLICATIONS MOBILE LES PLUS FRÉQUENTÉES
EN VISITES SUR LE MOIS DE JUIN 2014

Rang

Applications mobile

Visites totales

Visiteurs uniques

Visites par visiteurs

1

Appli l’Équipe

103 182 782

2 651 840

39

2

Appli Télé-Loisirs

36 215 046

2 591 450

14

3

Appli La Chaîne-Météo

31 602 073

2 700 323

12

4

Appli Le Monde.fr

25 837 067

1 739 069

15

5

Appli LeParisien.fr

23 154 356

1 164 151

20

6

Appli Le Figaro

20 267 601

2 066 043

10

7

Appli Public

18 469 901

603 435

31

8

Appli Tele 7

18 005 842

1 367 262

13

9

Appli 20minutes.fr

14 177 041

949 879

15

10

Appli Europe 1

13 260 782

249 267

53

11

Appli Metronews

7 073 122

678 748

10

12

Appli NRJ

6 611 331

779 791

8

13

Appli Closer

6 604 627

361 360

18

14

Appli LePoint.fr

6 494 611

442 703

15

15

Appli Pages Jaunes

6 347 928

1 722 319

4

16

Appli RMC Sport

5 392 421

284 019

19

17

Appli BFM TV

5 000 556

528 153

9

18

Appli Sud Ouest

4 698 314

236 715

20

19

Appli Jeuxvideo.com

4 287 211

162 287

26

20

Appli Lexpress.fr

3 694 960

271 432

14

Source : juin 2014 OJD.

Plusieurs interlocuteurs ont estimé que malgré l’impulsion décisive donnée depuis 2012 et les réussites incontestables, notamment en matière de podcasts, l’entreprise demeurait encore en retard sur le numérique. Le retard est jugé très important en ce qui concerne France Bleu. Les chiffres montrent globalement que Radio France ne fait encore pas suffisamment figure de « média de référence » sur les réseaux numériques, d’où l’urgence de définir des offres numériques communes à l’ensemble de l’audiovisuel public.

2. Les interrogations suscitées par la nouvelle stratégie numérique

Mathieu Gallet a déclaré vouloir poursuivre une « stratégie numérique ambitieuse. » C’est d’autant plus indispensable que la diffusion sur les réseaux numériques permet une couverture plus large du territoire que la seule diffusion hertzienne et qu’il s’agit du vecteur le plus adapté pour toucher un public plus jeune.

Selon les informations transmises par l’entreprise, le premier axe de cette stratégie consiste, comme c’est le cas actuellement, à « prolonger l’antenne au-delà de la diffusion linéaire analogique, par une offre de streaming et de podcasts de ses émissions sur les supports numériques. »

Le second axe est « la conquête de nouveaux publics », ce qui passe par l’offre de formats adaptés aux nouveaux modes de consommation de la radio, sur les sites Internet mais également sur les supports mobiles. « Cette ambition se traduit avant tout par l’enrichissement numérique des contenus diffusés analogiquement : la radio filmée, diffusée sur les sites Internet du groupe, permet l’ajout d’images, de graphiques et d’archives. »

Radio France souhaite également mettre l’accent sur l’interactivité qu’amènent Internet et, tout particulièrement les réseaux sociaux, « ce qui doit permettre à Radio France de donner davantage la parole à ses auditeurs et contribuera ainsi à attirer de nouveaux publics. »

L’entreprise indique que « la stratégie numérique pour la période 2015-2019 est actuellement en cours de définition et sera finalisée dès l’arrivée d’un nouveau directeur des nouveaux médias en remplacement de Joël Ronez. » Un travail de clarification et d’approfondissement de cette stratégie numérique apparaît en effet nécessaire dans le cadre de l’élaboration du futur COM.

Par ailleurs, l’audition de Mathieu Gallet par la commission des affaires culturelles et de l’éducation le 18 juin dernier a été l’occasion pour la plupart des membres de cette commission de faire part de leurs doutes quant à l’une des propositions majeures de son projet stratégique en matière numérique : remettre en cause la gratuité d’accès aux podcasts.

Comme l’indique la DGMIC, en réponse au questionnaire budgétaire, « ces podcasts sont aujourd’hui disponibles gratuitement sur les différents sites des antennes de Radio France pendant une durée de trois ans. La nouvelle Présidence de Radio France s’interroge sur la gratuité intégrale de l’accès à ses podcasts, leur archivage et leur stockage occasionnant des frais supplémentaires non négligeables qui reposent sur le produit de la contribution à l’audiovisuel public. Il s’agit, sans renoncer au principe de gratuité du service public, de permettre à Radio France de faire face aux coûts grandissants liés au stockage des podcasts. Une solution envisagée par la société consisterait par exemple à réduire cette durée de mise à disposition gratuite et de proposer, au-delà, un accès payant à ces contenus. Il s’agirait ainsi de s’accorder sur une durée qui permette de concilier au mieux les impératifs de gratuité et de diversification des ressources (…). Le moment venu, le gouvernement examinera avec la plus grande attention les propositions de Radio France en la matière, notamment dans ses modalités de mise en œuvre, après avoir évalué le bilan inconvénients / avantages d’une telle évolution. »

Sur ce point, et dans la continuité des nombreux avis exprimés lors de l’audition de Mathieu Gallet, la rapporteure souhaite réaffirmer sa vive opposition à la remise en cause du principe de gratuité des contenus du service public sur internet. La proposition de faire payer les podcasts lui paraît irrecevable et en total décalage avec les principes du financement du service public audiovisuel. Elle lui semble de nature à fragiliser à la fois l’acceptation de la redevance et les fondements mêmes de la notion de service public audiovisuel à l’ère numérique.

3. L’urgence de mieux articuler les offres du service public audiovisuel numérique

Le rapport d’orientation de Mathieu Gallet comporte en revanche une proposition que la rapporteure a déjà eu l’occasion de formuler à plusieurs reprises et qui lui paraît d’une totale pertinence mais aussi d’une certaine urgence : « l’enrichissement mutuel des contenus éditoriaux (textes, vidéos, archives, photos, etc.) des partenaires de l’audiovisuel public sur l’ensemble des supports numériques interactifs qu’il s’agisse des sites Internet, des applications ou même des podcasts. » L’idée de définir en commun les offres numériques des différentes sociétés de l’audiovisuel public (France Télévisions, Radio France, Arte, France Médias Monde, l’INA), qui se développent actuellement sans aucune coordination, ni complémentarité, a été reprise par le Président de la République à l’occasion des cinquante ans de la maison de la radio. L’ancienne ministre de la culture avait également plaidé pour des « synergies » entre les plateformes numériques des opérateurs de l’audiovisuel public.

Cette proposition, à laquelle Jean-Luc Hees était fermement opposé, est parfois caricaturée par ses détracteurs qui la présentent comme la première étape d’une fusion de l’ensemble des sociétés et partant d’un retour à l’ORTF ! Elle se fonde pourtant sur le constat que dans l’univers numérique, marqué par la convergence des contenus (les sites de radio proposent du texte et des contenus vidéo, tout comme les sites de télévision), on ne peut plus raisonner par type de média. C’est la stratégie retenue avec succès par les groupes audiovisuels publics dans de nombreux pays européens, comme la BBC en Grande-Bretagne ou la RTBF en Belgique.

Il s’agirait d’une véritable révolution culturelle dans un paysage audiovisuel public particulièrement cloisonné et dans lequel le dialogue entre les sociétés est souvent difficile voire inexistant et les relations davantage marquées par la concurrence que par la recherche de complémentarités. Comme l’a rappelé Mme Véronique Cayla, présidente d’Arte, auditionnée le 4 septembre 2014, l’idée même de créer des renvois entre les sites des uns et des autres ou de faire des promotions croisées n’a jamais pu être menée à bien…

La rapporteure estime que l’opportunité de lancer ce chantier se présente à la faveur de la négociation de nouveaux COM pour l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel public d’ici à 2016 (INA, Radio France, France Télévisions, France Médias Monde, Arte). Dans un contexte budgétaire contraint, il s’agit également d’un moyen de rendre le service public audiovisuel numérique plus efficace à moindre coût. Ne pas le faire constituerait aux yeux de la rapporteure une erreur stratégique importante.

A. LA QUESTION DE LA COUVERTURE

1. Une couverture à améliorer

S’agissant de la diffusion par voie hertzienne des programmes de Radio France, le CSA estime, dans son bilan 2012 de Radio France, qu’« une très bonne couverture du territoire métropolitain est assurée. »

(en pourcentage)

 

Taux de couverture
du territoire

Taux de couverture
de la population

France Inter

93 %

96 %

France Culture

92 %

95 %

France Musique

92 %

95 %

France Info

80 %

88 %

France Bleu

78 %

86 %

Le Mouv’

11 %

41 %

Fip

6 %

28 %

Source : Radio France. Méthodologie : estimation des taux de couverture au 1er janvier 2014 réalisée par Radio France, selon l’ancienne méthode de calcul du Conseil supérieur de l’audiovisuel (l’entreprise est en attente de la communication par le CSA de ses résultats pour Radio France, conformément à la nouvelle méthode de calcul mise en place en décembre 2013).

L’entreprise identifie néanmoins trois faiblesses majeures dans la couverture de Radio France :

– France Bleu en région Midi-Pyrénées ;

– France Bleu à Lyon ;

– et France Info sur les axes routiers et autoroutiers, notamment en région Bretagne.

Les contribuables financent les sept programmes de Radio France via la contribution à l’audiovisuel public. Au regard du principe d’égalité devant l’impôt, il n’est pas acceptable que certains n’en reçoivent que trois. C’est pourquoi la rapporteure soutient la volonté du Président de Radio France de tout mettre en œuvre pour les rendre accessibles.

La politique de réservation prioritaire de fréquences en faveur de Radio France

Il convient de rappeler que l’attribution de fréquences hertziennes terrestres au secteur public de l’audiovisuel se fait par la voie de la réservation prioritaire, en application du premier alinéa du II de cet article 26 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : les fréquences sont attribuées en priorité par le CSA à la demande du gouvernement.

S’agissant spécifiquement de la société nationale de programme Radio France, la mise en œuvre de ce dispositif a évolué au cours du temps, dans le contexte d’une « bataille des fréquences » entre le secteur public et les acteurs privés de la radio. En effet, ces derniers demandent de façon récurrente depuis une vingtaine d’années des fréquences supplémentaires afin de développer ou d’adapter leurs antennes existantes, de créer de nouvelles radios ou bien de procéder à des extensions de couverture des programmes existants.

Ces demandes ont conduit en 2000 à la restitution au CSA d’environ 500 fréquences alors inutilisées par Radio France, qui ont été redistribuées depuis au secteur privé. En outre, eu égard aux attentes des radios privées et à la pratique jusqu’alors constatée de la société Radio France qui saisissait elle-même le CSA sur le fondement de l’article 26 de la loi, le législateur a précisé, lors de l’adoption de la loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, que ces dispositions ne pourraient à l’avenir trouver à s’appliquer qu’à la demande du gouvernement.

Dans le même temps, le CSA a lancé en 2005 un plan d’optimisation de la ressource hertzienne, dit « plan FM+ » destiné à améliorer la planification de la bande FM sur tout le territoire. C’est ainsi qu’entre 2007 et 2010, 15 appels aux candidatures ont permis de dégager près de 1 300 nouvelles fréquences, soit un gain de l’ordre de 20 % du nombre de fréquences.

Il convient de relever que les radios du secteur privé et associatif ont été les principales bénéficiaires des ressources supplémentaires ainsi dégagées, ce qui a permis en particulier une amélioration substantielle de leur couverture : sur ces zones, la part de fréquences utilisée par les services privés et associatifs a augmenté de 6 points pour atteindre un peu plus des deux tiers des fréquences autorisées (contre un tiers pour Radio France).

Comme l’indique la DGMIC en réponse au questionnaire budgétaire, « dans le cadre de ce plan d’optimisation du spectre, Radio France, qui a consenti d’importants efforts de réaménagements de ses réseaux, a également pu bénéficier de nouvelles ressources pour améliorer la continuité de la couverture de France Info (en particulier sur les principaux axes autoroutiers) et pour développer certaines de ses antennes (France Bleu, Le Mouv’ et FIP) dans de nouvelles agglomérations jugées stratégiques. Ainsi, depuis 2007 l’État a demandé l’attribution prioritaire de fréquences à Radio France dans près d’une centaine de cas en application de l’article 26 de la loi du 30 septembre 1986. »

Certains acteurs contestent aujourd’hui le droit de préemption de l’État au profit du secteur public, estimant que les sociétés de l’audiovisuel public devraient être soumises à une procédure de droit commun de mise en concurrence pour l’attribution de fréquences.

Le ministère de la culture et de la communication indique que « les missions de service public incombant, sur le fondement combiné des articles 43-11 et 44 de la loi du 30 septembre 1986, à la société nationale de programme justifient, à elles seules, que le Gouvernement puisse solliciter, lorsqu’il l’estime nécessaire à celles-ci, l’attribution à titre prioritaire de droits d’usage de la ressource radioélectrique par le CSA. »

Selon le CSA, « les chiffres de couverture des services de Radio France actuellement disponibles ont été effectués par l’opérateur, avec une méthode qui lui est propre, sans consulter le Conseil. » La décision controversée du CSA de modifier le mode de calcul du taux de couverture des services de radios pour l’application du plafond de concentration prévu par l’article 41 de la loi du 30 septembre 1986 (3) a soulevé des interrogations concernant le taux de couverture de Radio France selon cette nouvelle méthode. Cette dernière entraîne en effet une diminution globale importante des taux de couverture, qui selon certaines estimations, pourrait atteindre 20 % pour Radio France.

Interrogé sur ce point, le CSA indique que « l’article 41 relatif au dispositif anti-concentration de la loi ne s’applique pas à Radio France. En outre, les obligations de Radio France en matière de couverture (article 2 de leur cahier des charges) ne définissent aucune obligation précise en matière de couverture pour la radiodiffusion en FM. Seule est actée une obligation de diffusion sur l’ensemble du territoire des émissions à caractère national ou local, sans que la répartition entre les différents modes de diffusion (FM, réseaux fixes et mobiles télécoms, satellite) ne soit précisée. Le Conseil n’est donc pas formellement tenu de réaliser les calculs de populations couvertes pour le service public. Or, du fait de la sophistication de la méthodologie de calcul et de sa lourdeur de mise en application, le Conseil se concentre désormais sur le calcul de la couverture des réseaux détenus par les principaux groupes radiophoniques en application de l’article 41. Il n’a donc pas procédé aux calculs de couverture pour les radios du service public. Le Conseil ne dispose donc pas actuellement des données de population couvertes par les radios du service public et n’a pas reçu à ce stade de demande de calcul de la part du Gouvernement. »

Pour garantir un mode de répartition équilibré des fréquences, il apparaît pourtant indispensable de pouvoir comparer les taux de couverture de l’ensemble des opérateurs, calculés selon une méthodologie unifiée. En vue de l’élaboration du prochain COM, la rapporteure souhaite qu’un indicateur de couverture soit fixé pour Radio France selon la même méthodologie que celle appliquée par le CSA aux autres services.

2. La nécessité de clarifier la question de la diffusion numérique

La stratégie de Mathieu Gallet repose sur « l’accessibilité des contenus de Radio France à tous les publics », ce qui pose la question de la diffusion numérique.

Sur la RNT, le nouveau président s’est montré réservé lors de son audition du 18 juin : « Je suis très partagé sur la RNT, même si j’y étais très favorable en 2006, lorsque j’étais au ministère de l’industrie. Dans les pays où elle a été lancée, notamment au Royaume Uni, elle ne décolle pas. À la lecture des deux rapports rendus en 2009 et 2011 sur le sujet, je comprends les questions que l’on se pose, notamment celles du coût et de la durée de la double diffusion. Je rappelle qu’il y a encore une diffusion en ondes longues et en ondes moyennes alors que la FM a maintenant plusieurs décennies. Cette diffusion a un coût mais 10 % de la population nous écoute encore en longues ondes. Le financement de la double diffusion, ce serait autant de moins pour les programmes. Pour quels publics et quels bénéfices ? Rappelons que la radio se développe sur internet notamment pour une écoute en 4G. La question ne me paraît donc pas suffisamment mature et je comprends donc toutes les interrogations dans ce dossier. »

Les pouvoirs publics ont décidé de ne pas engager Radio France dans les premiers développements de la RNT lancés à Paris, Marseille et Nice, tout en réservant la possibilité d’un engagement futur.

Le 4 juillet dernier, les principaux grands groupes privés radiophoniques (RTL, NRJ, NextRadioTV, Lagardère) ainsi que Radio France ont annoncé la mise en place en septembre 2014 d’un portail commun de services de radios sur Internet, nommé « Direct Radio ». Cette offre viendra compléter celle disponible au travers du portail « Les Indés Radio » lancé il y a plusieurs mois par les radios indépendantes.

En réponse aux questions de la rapporteure sur l’avenir de la RNT, le ministère de la culture indique que le « gouvernement ne se satisfait pas de la répartition actuelle des services radiophoniques sur le territoire : s’il est possible de recevoir plus de 50 radios à Paris, environ un tiers des Français reçoit moins d’une dizaine de services de radio en bande FM. La numérisation du média radio est potentiellement un excellent instrument au service de cet objectif, et c’est dans cet esprit qu’elle doit être envisagée : il s’agit de proposer une offre de services riche et diversifiée sur tout le territoire, et ce quelles que soient les modalités d’écoute, au domicile comme en mobilité, tout en préservant l’économie parfois fragile des acteurs, en particulier les radios associatives et les réseaux locaux indépendants. Dans cette perspective, le gouvernement est attaché à ce que toutes les pistes soient étudiées. »

Le CSA n’a pas communiqué sur les perspectives de lancement d’appels à candidature sur d’autres zones mais a fait savoir qu’il publierait à l’automne un rapport très attendu qui proposera des orientations pour l’avenir de la RNT. La rapporteure souhaite que ces propositions se fassent à l’aune d’une évaluation précise des résultats des expériences étrangères, des coûts de la RNT, notamment par rapport à la radio sur IP, et d’une analyse objective des inconvénients et des avantages.

La RNT constitue un dossier complexe et conflictuel, dont le lancement a fait l’objet de nombreux reports et atermoiements qui ont fortement nui au projet. Il serait souhaitable, à l’issue de la remise du rapport du CSA, que les pouvoirs publics adoptent enfin une position claire sur ce dossier.

A. LES FORMATIONS MUSICALES : DES CHANGEMENTS NÉCESSAIRES

La gestion des formations musicales (orchestre national de France, orchestre philharmonique, chœur et maîtrise de Radio France) constitue un sujet qui mériterait d’être approfondi et sur lequel la rapporteure n’a pu recueillir que peu d’éléments. C’est pourquoi elle se contentera de quelques observations.

Le poids des formations musicales dans le budget de Radio France est passé 55,4 millions d’euros en 2009 à 58 millions d’euros en 2014. Au cours des auditions, des interrogations ont notamment été exprimées sur le dimensionnement de ces formations, l’exemple fréquemment cité étant celui du chœur, le plus grand d’Europe, mais aussi sur leur politique tarifaire et la faiblesse des recettes commerciales générées.

Le COM 2010-2014 se fixait comme objectif principal de clarifier les missions de ces formations (répertoire, lieux de production, format des concerts, thématiques de la programmation…) et d’assurer la complémentarité de leurs répertoires et de leur programmation musicale. Les formations devaient également « gagner de nouveaux publics » et renforcer leurs missions pédagogiques.

Les auditions réalisées par la rapporteure et les constats dressés par Mathieu Gallet font apparaître que les principales orientations stratégiques du COM n’ont pas été atteintes. Lors de son audition du 18 juin, le nouveau président a estimé à très juste titre que la situation des formations musicales n’était plus tenable : « Les deux orchestres ont une taille similaire et défendent des programmes souvent proches, mettant leurs directeurs musicaux en concurrence. Redéfinir les missions respectives des deux orchestres est un préalable. Une harmonisation des programmes, et donc de l’offre, est tout à fait indispensable. » Ce diagnostic a été corroboré par l’ensemble des auditions réalisées par la rapporteure.

S’agissant de la place réservée aux formations sur les antennes de Radio France, le CSA, dans son bilan 2012, constate « une diminution de celle-ci au cours de l’exercice 2012 (190 concerts ont été produits par les formations orchestrales et vocales de Radio France contre 222 en 2011 et 205 en 2010). Le Conseil estime que Radio France doit inverser l’évolution constatée en réservant une place privilégiée aux formations permanentes dont elle a la charge. Par ailleurs le Conseil constate que peu de concerts des formations de Radio France ont bénéficié de captations télévisuelles. »

Lors de son audition du 18 juin, le nouveau président a présenté plusieurs axes importants de réforme. Le premier consiste en « une profonde réforme de l’organisation de la direction de la musique. C’est la mission essentielle que j’ai confiée à Jean-Pierre Rousseau, qui connaît bien cette maison et qui était à la tête de l’orchestre philharmonique de Liège depuis une dizaine d’années. » Un pilotage plus centralisé apparaît en particulier nécessaire.

Le second axe vise à distinguer les rôles de chacune des formations : « l’orchestre national de France doit être conforté dans son rôle d’orchestre de grand répertoire, à rayonnement national et international. Quant à l’orchestre philharmonique de Radio France, il doit mettre l’accent sur sa mission d’orchestre dédié à la création, à la pédagogie, aux festivals et aux ouvrages lyriques. »

Le troisième axe concerne l’offre des concerts elle-même. « Sans abandonner les programmes de concert traditionnels, il nous faut imaginer et proposer une programmation nouvelle, diversifiée, avec de nouveaux formats, plus courts à des horaires décalés ou à des périodes de l’année inhabituelles. C’est ainsi que nous pourrons donner accès à la musique classique et contemporaine à un public différent, élargi et renouvelé. »

Le projet stratégique de Mathieu Gallet indique également que « la politique de captation et de diffusion audiovisuelle s’appuiera sur les sites de Radio France mais aussi les carrefours d’audience que sont les plateformes de partage de vidéos. Le nouvel auditorium sera utilisé comme plateforme multimédia de concerts numériques (captation des répétitions, diffusion d’extraits, organisation de concerts-rencontres à des horaires décalés, diffusion en direct sur un multi-canal HD). »

Dans le cadre du programme de réhabilitation de la maison de la radio, Radio France a lancé la construction d’un auditorium de 1 450 places destiné notamment à accueillir l’offre de concerts des quatre formations musicales. Le COM 2010-2014 fixait à la société l’objectif de « créer et préfigurer le fonctionnement de l’auditorium. » Se pose en effet la question de l’insertion de cet auditorium, dont l’ouverture est imminente, dans l’offre musicale parisienne et le risque de concurrence avec la Philharmonie (2 400 places), les deux projets ayant été conçus de manière totalement autonome.

À l’issue des auditions, il apparaît que la société a globalement pris du retard dans le travail de clarification de la stratégie de ses formations musicales ces dernières années. Il s’agit donc d’un enjeu majeur pour le futur COM.

I. LA NÉCESSAIRE MODERNISATION DE LA GESTION

A. LA CONTRAINTE BUDGÉTAIRE

1. Les ressources publiques : la fin d’une période sans contrainte

Radio France a bénéficié de la part des pouvoirs publics de moyens toujours croissants jusqu’au budget 2013. Le total des ressources de l’entreprise (son chiffre d’affaires) a crû de 23,29 % entre 2004 et 2012. Parmi ces ressources, la contribution à l’audiovisuel public, qui en représente 90 %, a crû de 24,26 %. En comparaison, l’inflation cumulée pendant cette période s’est élevée à 16,7 %. Lors de son audition le 2 septembre, la Cour des comptes évoque une certaine « aisance financière » au cours des dix dernières années, les années 2013 et 2014 marquant pour Radio France « la fin d’une période sans grande contrainte. » En l’absence de forte pression sur les ressources, la Cour des comptes estime que le pilotage s’est fait par la recette, la recherche d’une plus grande efficacité dans l’utilisation des ressources n’ayant pas été une priorité.

En 2013 et 2014, dans un contexte de contrainte très forte sur les ressources publiques, la rapporteure observe que les efforts demandés à Radio France ont été très inférieurs à ceux qui ont été demandés à France Télévisions, ce qui s’explique notamment par le poids de la masse salariale dans le budget de Radio France, qui limite plus fortement ses marges de manœuvre.

ÉVOLUTION DE LA CONTRIBUTION À L’AUDIOVISUEL PUBLIC VERSÉE À RADIO FRANCE ET PRÉVISIONS DES COM

(en millions d’euros)

 

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

 

Exécution

469,3

485,2

495,2

508,3

528,4

556,2

571,9

594,2

610,2

605,5

600,4

Fonctionnement

469,3

479,9

489,4

502,1

514,1

533,9

549,6

568,6

583,1

574,4

575,8

Investissement

0,0

5,3

5,8

6,2

14,3

22,3

22,3

25,6

27,1

31,1

24,6

Évolution

 

2005/2004

2006/2005

2007/2006

2008/2007

2009/2008

2010/2009

2011/2010

2012/2011

2013/2012

2014/2013

Exécution

 

3,4 %

2,1 %

2,7 %

4,0 %

5,3 %

2,8 %

3,9 %

2,7 %

-0,8 %

-0,9 %

Fonctionnement

 

2,3 %

2,0 %

2,6 %

2,4 %

3,9 %

2,9 %

3,5 %

2,6 %

-1,5 %

0,2 %

Investissement

   

9,7 %

6,9 %

130,6 %

56,0 %

0,0 %

14,8 %

5,9 %

14,8 %

-20,9 %

 

COM

   

495,1

508,2

528,4

548,2

571,9

594,1

618,8

636,8

648,2

Fonctionnement

   

489,3

502,0

514,1

525,9

546,6

570,5

591,7

605,7

621,6

Investissement

   

5,8

6,2

14,3

22,3

22,3

23,6

27,1

31,1

26,6

Évolution

     

2007/2006

2008/2007

2009/2008

2010/2009

2011/2010

2012/2011

2013/2012

2014/2013

COM

     

2,6 %

4,0 %

3,8 %

4,3 %

3,9 %

4,2 %

2,9 %

1,8 %

Fonctionnement

     

2,6 %

2,4 %

2,3 %

4,5 %

3,8 %

3,7 %

2,4 %

2,6 %

Investissement

     

6,9 %

130,6 %

55,9 %

0,0 %

5,8 %

14,8 %

14,8 %

-14,5 %

Source : Radio France.

L’entreprise est parvenue à faire face à une réduction de son budget en 2013 et 2014 par des redéploiements et des économies, résultant notamment de renégociations et de remises en appel d’offres de contrats de maintenance et d’exploitation. En particulier, l’optimisation et la renégociation des contrats de diffusion lui ont permis de générer des économies.

Le futur COM sera probablement établi sur la base d’une stabilité des ressources publiques, ce qui constitue un défi majeur pour l’entreprise.

2. Les ressources propres : des marges d’augmentation limitées

Lors de son audition par la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, Mathieu Gallet a indiqué vouloir prolonger et amplifier l’action de Jean-Luc Hees, qui, dans un contexte de contrainte budgétaire accru, a lancé une stratégie de renforcement des ressources propres : développement des recettes de billetterie des concerts, valorisation des espaces et infrastructures de la maison de la radio, valorisation des contenus et des marques, développement d’une politique de mécénat, nouvelle politique de partenariats.

Cependant, depuis 2009, la part des ressources propres dans le chiffre d’affaires de Radio France décline : elle est passée de 9,1 % (53,3 millions d’euros) en 2009 à 7,8 % (49,1 millions d’euros) en 2013 en lien notamment avec le recul des locations immobilières consécutif au départ de RFI en 2013 et l’érosion des recettes publicitaires depuis 2011. Les résultats de la politique de diversification des ressources demeurent limités. Les marges d’augmentation des ressources propres du groupe le sont aussi.

Les recettes publicitaires (supports radio, supports numériques et mise à l’antenne des messages radio), qui représentent 6,3 % du chiffre d’affaires de la société, s’établissent en 2013 à 40,4 millions d’euros. Aux termes des articles 32 à 34 du décret du 13 novembre 1987 portant cahier de missions et des charges de la société, Radio France peut uniquement diffuser sur ses antennes des messages de « publicité collective et d’intérêt général », laquelle comprend :

– la publicité pour certains produits ou services présentés sous leur appellation générique ;

– la publicité en faveur de certaines causes d’intérêt général ;

– la publicité effectuée par des organismes publics ou parapublics ;

– des campagnes d’information des administrations.

Dans son bilan 2012, le CSA indique regretter « avoir dû intervenir à trois reprises en matière de publicité pour non-respect des articles 34, 40 et 43 de son cahier des missions et des charges. »

Comme l’a indiqué Mathieu Gallet lors de l’audition du 18 juin « l’encadrement de la publicité sur les antennes, compte tenu des secteurs autorisés, ne peut conduire qu’à des recettes tendanciellement stagnantes, voire à la baisse, en raison de la chute des investissements publics dans les médias. Pour redonner de l’élan à la régie, il convient donc d’imaginer de nouveaux formats, de nouvelles pistes de partenariat avec les secteurs autorisés. »

En tout état de cause, la rapporteure estime que le CSA doit appliquer strictement la loi et que le nouveau COM doit être l’occasion de clarifier la place de la publicité sur les antennes de Radio France.

A. LA MAÎTRISE DE LA MASSE SALARIALE ET LA MODERNISATION SOCIALE

1. La maîtrise de la masse salariale : enjeu majeur

Radio France constitue la deuxième entreprise publique du secteur de l’audiovisuel, par son nombre de salariés (plus de 5 000 : 4 600 ETP en 2013, auxquels s’ajoutent environ 700 ETP intermittents et pigistes) et son chiffre d’affaires (650 millions d’euros en 2012, 640 millions d’euros en 2013, et un budget de 660 millions d’euros en 2014).

La masse salariale (dont les cachets des intermittents) représente à elle seule presque 60 % des dépenses de l’entreprise, contre 55 % en 2004. Il s’agit en effet d’une entreprise de réseau, France Bleu avec ses 44 stations locales représentant le tiers du budget de l’entreprise. Par ailleurs, l’entreprise produit elle-même les programmes qu’elle diffuse et ne les achète pas à des producteurs extérieurs, contrairement à France Télévisions.

Dans ces conditions, la maîtrise de la masse salariale représente évidemment un enjeu majeur et le premier indicateur de gestion fixé par le COM. Or, la masse salariale a augmenté de 26 % entre 2004 et 2012, plus vite encore que la contribution à l’audiovisuel affectée à Radio France. Quant au nombre de salariés, il a augmenté de 3,7 % entre 2004 et 2012 hors intermittents.

ÉVOLUTION DES MASSES SALARIALES COMPTABLES ET DES EFFECTIFS DE 2009 À 2013

 

2009

2010

2011

2012

2013

Personnels permanents – CDI

         

Brut (en K€)

203 628

210 558

215 792

218 032

220 125

Charges (en K€)

79 227

82 023

85 684

87 471

89 090

En équivalent temps plein (ETP)

4 183

4 218

4 199

4 187

4 211

Personnels occasionnels – CDD

         

Brut (en K€)

12 026

13 432

14 812

15 394

14 197

Charges (en K€)

4 042

4 563

4 975

5 132

4 691

En équivalent temps plein (ETP)

355

387

409

417

392

Cachetiers et Pigistes

         

Brut (en K€)

29 148

30 093

31 830

31 106

31 506

Charges (en K€)

12 775

13 282

14 118

14 331

14 492

Dépenses sociales (en K€)

8 776

9 052

9 584

9 531

9 889

Total brut +- charges (en K€)

349 622

363 003

376 795

380 997

383 990

Source : Radio France.

Le tableau précédant montre que la masse salariale a continué d’augmenter de manière dynamique (+ 5,7 %) sur la durée de l’exécution du COM. Dans son bilan 2012, le CSA appelle Radio France à une meilleure maîtrise de ses charges de personnel. Il s’agit en effet d’un enjeu majeur pour les années à venir.

2. Un plafond d’emplois qui incite à recourir à l’intermittence

Après une forte augmentation (de 70 ETP) en 2009, le COM 2010-2014 avait fixé un objectif de stabilité des effectifs apprécié en moyenne à 4 619,5 ETP sur la période « afin de laisser des marges de manœuvre à l’entreprise pour mettre en œuvre des développements nouveaux à travers des efforts de redéploiement. »

Il s’agissait notamment de permettre :

– des recrutements sur des compétences pointues en multimédia : le plafond a ainsi permis le doublement des effectifs dédiés aux nouveaux médias sur la période 2011-2013 (de 70 à 150 personnes) ;

– et le développement du réseau local France Bleu : deux stations locales ont en effet été créées sur la période 2010-2013 (France Bleu Toulouse et France Bleu Saint-Étienne).

INDICATEUR 7.1 DU COM 2010-2014 : STABILITÉ DES EFFECTIFS

Équivalent temps plein

2009

2010

2011

2012

2013

OBJECTIF COM 2010-2014

Nombre de CDD et CDI (*)

4 566,7

4 636,1

4 634,6

4 615,7

4 600,2

4 619,5

(*) Hors stagiaires et contrats de formation en alternance ; hors intégration de cachetiers et pigistes ; hors nouveaux ETP refacturés.

Source : rapport d’exécution du COM pour 2013.

Le rapport d’exécution du COM pour 2013 indique que sur la période 2010-2013, la moyenne atteinte s’établit à 4 621,6 ETP, très proche de l’objectif fixé par le COM pour l’ensemble des cinq années du contrat. Un effort supplémentaire d’environ 30 ETP doit être réalisé en 2014 afin de respecter globalement la cible.

Il convient de souligner que ce plafond est calculé « hors stagiaires et contrats de formation en alternance, hors intégration de cachetiers et pigistes, hors nouveaux ETP refacturés. » Les contrats de formation en alternance (apprentissage et professionnalisation), dont le temps de présence dans l’entreprise est variable, n’entrent pas dans le périmètre de l’indicateur. S’agissant des ETP refacturés, il s’agit, selon les précisions fournies par l’entreprise, « de collaborateurs de Radio France détachés dans d’autres organismes et pour lesquels Radio France refacture leur salaire à l’organisme concerné. Ils n’entrent donc pas non plus dans le périmètre de l’indicateur 7.1. »

Enfin, en ce qui concerne les cachets et piges, qui font partie de la masse salariale, l’entreprise indique qu’« ils ont vocation à rémunérer une prestation forfaitaire et ne peuvent être directement analysés en ETP, ce qui explique leur exclusion du périmètre de l’indicateur 7.1. Néanmoins, leur suivi est effectué en euros. »

Du fait de leur exclusion du calcul du plafond d’emplois, le recours aux intermittents apparaît comme un moyen de contourner ce plafond. Plusieurs personnes auditionnées ont souligné cet effet pervers du COM.

Alors que l’entreprise estime que l’on ne peut convertir les cachetiers (ou CDDU) et pigistes en ETP, la Cour des comptes et la mission de contrôle général économique et financier évaluent leur nombre à environ 724 ETP en 2013 sur la base d’une méthode définie par Radio France en 2011 mais contestée par l’entreprise depuis.

En tout état de cause, si cette méthode n’est pas totalement exacte (le nombre de jours de travail par an pouvant varier selon les types de cachetiers), elle donne au moins une idée du volume global des cachetiers et pigistes (proche de 700 ETP) et de sa variation. À cet égard, on note une diminution constante entre 2005 (772) et 2010 (665), ce qui est cohérent avec la politique de « permanentisation » de certaines catégories de cachetiers faisant suite à l’accord collectif national du 29 novembre 2007, mais on observe une augmentation continue depuis lors, ce qui n’est pas clairement explicité ni justifié.

En ce qui concerne le recours à l’intermittence, lors de l’audition de Mathieu Gallet par la commission des affaires culturelles, Mme Catherine Sueur, directrice générale déléguée avait expliqué que « l’intermittence est en effet consubstantielle aux métiers de Radio France. Les évolutions éditoriales des grilles, le fonctionnement des formations musicales et la fiction radiophonique nécessitent le recours à l’intermittence. Cependant, nous respectons à la lettre l’accord interprofessionnel signé en 2007 qui définit très précisément la liste des métiers auxquels Radio France a le droit de recourir sous forme de contrats d’usage. En particulier, plus aucun technicien de Radio France n’est employé sous forme d’intermittence. » C’est ce qui a été réaffirmé au cours de l’audition du 4 septembre par la direction de Radio France.

La Cour des comptes et la mission de contrôle tempèrent cette affirmation. Selon la Cour, « certains métiers techniques seraient à la limite de la conformité. » Quant à Anne Cazala, contrôleuse générale, elle indique que « différents audits ont été lancés à la suggestion du contrôleur sur ces sujets mais ne sont pas achevés. Ils laissent entrevoir un certain nombre de situations risquées :

– des risques graves concernant quelques cas de recours à l’intermittence technique, pourtant strictement interdite à Radio France par l’accord collectif national du 29 novembre 2007 ; et aussi une vingtaine de recours au moins à des intermittents pour des fonctions pourtant permanentes figurant dans l’organigramme fonctionnel de l’entreprise (notamment les fonctions d’articulation entre la grille des programmes et les producteurs) ;

– des pratiques risquées mais partagées avec les autres entreprises du secteur, public et privé, dans le recours à l’intermittence pour les métiers d’antenne (producteurs, chroniqueurs…). »

La permittence, pratique consistant à employer des intermittents de manière permanente ou quasi permanente, reste largement répandue à Radio France comme l’a rappelé le rapport d’information de Jean-Patrick Gilles sur les conditions d’emploi dans les métiers artistiques, sans que l’on soit capable de la chiffrer. Pour le contribuable, cela se traduit notamment par des risques de coûts contentieux de requalification en CDI.

En réponse à ces observations, la direction de Radio France précise que « seule une dizaine de cas de recours à l’intermittence ne sont effectivement pas prévus par l’accord de 2007 et que ces situations sont toutes en cours de résolution. S’agissant des intermittents figurant dans l’organigramme, seul un cas est recensé à Radio France et cette situation relève du souhait du salarié concerné. L’entreprise tient à rappeler qu’elle respecte le cadre de l’accord de 2007 et que, dès lors, les pratiques de recours à l’intermittence en son sein ne peuvent être qualifiées de risquées. »

Concernant le recours à la procédure contentieuse devant les prud’hommes, la direction de Radio France tient à préciser que celle-ci conserve un caractère exceptionnel : « Sur la période 2010-2012, seulement huit ruptures de contrats d’intermittents ont débouché sur un contentieux, soit à peine 11 % du nombre de ruptures contractuelles d’intermittents. Il convient également de noter que les procédures contentieuses représentent seulement 6 % du coût total des indemnités au titre des ruptures de contrats des intermittents. »

La rapporteure souhaiterait que soit évaluée l’idée, avancée par Françoise Miquel, cheffe de la mission de contrôle général économique et financier, de créer un groupement des employeurs de l’audiovisuel public sous forme d’une association loi de 1901, qui permettrait aux intermittents dits « techniques » (réalisateurs, monteurs, techniciens…) d’être employés en CDI. Le groupement affecterait les salariés à des missions dans les entreprises adhérentes tout en les rémunérant selon leur contrat.

La rapporteure souhaite également que le plafond d’emploi qui sera fixé par le nouveau COM intègre les cachetiers et pigistes afin de remédier à l’effet pervers constaté.

3. La modernisation de la gestion des ressources humaines

Dans un contexte de baisse des moyens de l’entreprise, l’augmentation continue de la masse salariale rend cruciale la modernisation de la gestion des ressources humaines, qui est, selon les observateurs, « éloignée des standards applicables dans les grandes entreprises ». La Cour des comptes, lors de son audition le 2 septembre a rappelé que l’organisation du travail n’avait pas changé depuis longtemps et que le cloisonnement très important des tâches ne permettait pas à l’entreprise de s’adapter aux évolutions technologiques. La gestion du temps de travail serait notamment rendue excessivement complexe par la variété des statuts des salariés de l’entreprise.

La modernisation passe d’abord par la renégociation des conventions collectives, à la suite de la disparition des anciennes conventions du secteur de l’audiovisuel public.

La renégociation des conventions collectives à Radio France

À la suite de la loi de 2009 relative à la communication audiovisuelle qui a fait de France Télévisions une société unique, l’association des employeurs du service public de l’audiovisuel a été dissoute et les deux conventions collectives de l’audiovisuel public (la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles du 31 mars 1984 applicable aux personnels techniques et administratifs de l’audiovisuel public et l’avenant audiovisuel public du 9 juillet 1983 à la convention collective nationale des travailleurs journalistes.) ont été remises en cause, obligeant les sociétés de l’audiovisuel public à négocier des accords d’entreprise d’ici 2011 et 2012. Aussi Radio France a-t-elle entamé, dès 2009, un dialogue social destiné à négocier deux nouveaux accords collectifs : un accord collectif pour les journalistes et un accord collectif pour les personnels techniques et administratifs (PTA).

Les négociations relatives au nouvel accord collectif des journalistes ont débuté en 2010 et ont abouti à un accord qui a été signé par la SNJ et FO. Différentes organisations syndicales ont cependant fait jouer leur droit d’opposition et la direction de Radio France a dû mettre en œuvre des mesures unilatérales (suppression des commissions paritaires salariales, suppression du conseil de discipline et maintien des automatismes de grille). Ces mesures unilatérales s’appliquent depuis le 21 mars 2011, en complément des dispositions de la convention collective nationale de travail des journalistes et de l’accord salarial de 2006.

S’agissant des PTA, les négociations du nouvel accord d’entreprise ont débuté en 2012. Elles ont été interrompues à deux reprises, entre mai 2012 et juin 2013 pour l’organisation des élections professionnelles, puis entre septembre 2013 et mars 2014 après l’annulation contentieuse des élections professionnelles obtenue par une organisation syndicale.

Les négociations ont toutefois repris après la proclamation des résultats, avec l’objectif d’aboutir à la fin de l’année 2014. Les thèmes de la négociation sont les suivants : engagements à l’embauche ; conclusion, vie et fin du contrat ; nomenclature des emplois ; positionnement des emplois ; système de rémunération ; temps de travail ; temps partiel ; déplacements ; congés ; utilisation des prestations ; CDD-U ; dialogue social ; musiciens.

Les enjeux de ce nouvel accord d’entreprise sont les suivants :

– la modernisation et le toilettage des emplois grâce à la réécriture d’une nouvelle nomenclature : il existe aujourd’hui 210 métiers dans l’entreprise ;

– un système de classification des emplois plus lisible pour un lien plus efficace avec la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) permettant des parcours professionnels mieux identifiés ;

– la réaffirmation du rôle de l’encadrement et la fin du paritarisme, auquel est substituée une commission de suivi des carrières, composée de représentants du personnel et de représentants de la direction ;

– la suppression des automatismes salariaux au profit d’une revalorisation des mesures individuelles.

Les débuts des négociations de ce nouvel accord ont été marqués par les positions de SUD et de la CGT – et, dans une moindre mesure, de la CFDT – demandant un engagement de la direction, préalable à la reprise des négociations, sur le maintien des progressions automatiques (la classification proposée revenant largement sur le fonctionnement antérieur) et du paritarisme (étant proposé de supprimer les commissions paritaires où étaient évoquées les progressions de carrière). Or, Radio France doit rassembler les signatures de la CFDT, de l’UNSA et de Sud pour obtenir un accord.

Le nouveau président-directeur-général de Radio France a renouvelé sa volonté de voir le nouvel accord collectif signé avant la fin de l’année.

4. La diversité dans l’entreprise

Dans son bilan 2012 de Radio France, le CSA « regrette que les femmes restent sous-représentées au sein de l’entreprise, jusqu’aux responsabilités les plus élevées (selon les chiffres fournis par Radio France, elles représenteraient 42 % du personnel). Il invite Radio France à y remédier dans les années à venir. » Sur ce point la rapporteure déplore que l’entreprise n’ait pas encore rempli les objectifs fixés par le COM, qui n’apparaissent d’ailleurs pas particulièrement ambitieux. L’entreprise fait remarquer que l’année 2014 sera marquée par une forte féminisation des cadres dirigeants « qui permettra à l’entreprise de remplir l’objectif fixé dans le COM pour la période 2010-2014. »

INDICATEUR 8.2 : RÉPARTITION HOMMES / FEMMES PAR CATÉGORIES AU 31/12/2013

 

Femmes

Hommes

Total

Part des femmes

Cible 2014

Convention générale

1 133

1 364

1 364

45 %

-

Cadres de direction

66

132

198

33 %

≥ 35 %

Enseignant-e-s de la Maîtrise

17

3

20

85 %

-

Personnels antenne FIP

16

 

16

100 %

-

Responsables de progr. Radios locales

9

33

42

21 %

-

Protocole V

55

112

167

33 %

-

Journalistes

296

451

451

40 %

-

Musicien-ne-s et choristes

138

212

350

39 %

-

Personnels antenne radios locales

123

224

347

35 %

-

Total

1 853

2 531

4 384

42 %

-

Source : rapport d’exécution du COM 2010-2014 pour l’année 2013.

Radio France a obtenu le label diversité le 8 février 2013 devenant ainsi la première entreprise de l’audiovisuel public à l’obtenir. L’obtention du label diversité impose au groupe public d’être exemplaire en matière de représentation de la diversité de la société française dans ses programmes ainsi que dans ses équipes. Comme l’indique le CSA dans son bilan 2012, « le groupe public a annoncé un plan d’actions renforcé pour remédier à un certain nombre de faiblesses dans l’égalité de gestion des carrières. Le Conseil se montrera particulièrement vigilant pour la mise en œuvre de ces engagements. » La rapporteure n’a pas pu obtenir plus de précisions sur ces « faiblesses dans l’égalité de gestion des carrières » mais appelle le gouvernement et l’entreprise à fixer des objectifs précis dans le futur COM.

Enfin, lors de leur audition par le CSA, les représentants de Radio France ont indiqué que les personnes handicapées représentaient 2,92 % du personnel de Radio France en 2012. En 2008, elles ne représentaient que 1,88 % du personnel. Dans son bilan 2012, « le Conseil encourage Radio France à continuer de faire évoluer ce taux pour les années à venir avec pour objectif d’atteindre le taux prévu dans la loi. » Pour rappel, le taux d’emploi des personnes en situation de handicap, est fixé à 6 % de l’effectif total pour toutes les entreprises de 20 salariés et plus par la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés.

A. LA MODERNISATION DE LA GESTION ET L’AMÉLIORATION DE LA GOUVERNANCE

1. Des marges d’économies et d’amélioration importantes malgré de récents progrès

Selon la mission de contrôle économique général et financier, Radio France présente « une accumulation surprenante d’archaïsmes dans une entreprise de cette taille », notamment :

« – l’absence, jusqu’en 2012, de formalisation des tâches attachées aux emplois et d’organigrammes fonctionnels formalisés : ces outils permettent de faire apparaître les zones de sureffectifs, le contour imprécis des activités de certains salariés, les rattachements hiérarchiques mal clarifiés etc. ; ce point est particulièrement important dans une entreprise qui dépense en salaires l’équivalent du chantier de réhabilitation tous les ans ;

– la faible formalisation des délégations de signatures (un texte synthétique a été mis en œuvre en 2012, mais son application reste encore aléatoire) : la hiérarchisation des signatures en fonction du montant de la dépense est un élément central d’un contrôle interne opérationnel et, partant, de la maîtrise efficace de la dépense ;

– l’absence quasi-générale de procédures formalisées, publiées, contrôlées dans leur mise en œuvre : cause de dysfonctionnements, retards, lourdeurs, autant de sources de risques, de coûts de gestion élevés voire de dépenses abusives et, inversement, cause de décisions prises dans l’urgence, faute d’anticipation, et souvent coûteuses ;

– l’absence de comptabilité analytique, et en conséquence l’absence de connaissance réelle des coûts par fonction ou opérations et donc d’outils d’aide à la décision pour optimiser la ressource publique ;

– une organisation en silo et un dialogue insuffisant entre les directions opérationnelles et les directions de soutien (finances, ressources humaines, juridique, achats), mettant parfois ces directions devant le fait accompli, ce qui peut se révéler coûteux pour l’entreprise. »

S’y ajouteraient « une architecture des systèmes informatiques obsolescente, des défaillances signalées dans la mise en œuvre des règles applicables aux achats publics, une gestion globalement lourde, inefficiente et insuffisamment contrôlée. »

Bref, la faiblesse générale du contrôle interne constitue, selon le contrôle général économique et financier, un risque autant qu’une cause importante de dépenses superflues.

La direction de l’entreprise met quant à elle en avant les « énormes progrès » réalisés au cours des dernières années :

 « s’agissant de la formalisation des tâches, si un effort réel a été entrepris en 2012, des organigrammes et des fiches de poste existaient bien avant cette date. Au demeurant, si ces éléments sont indispensables, ce ne sont pas eux qui permettraient, le cas échéant, d’identifier des zones de sureffectifs ;

 concernant les délégations de signature, une procédure a été définie et présentée au comité de direction en avril 2012. Une note du secrétariat général a été adressée à l’ensemble des cadres de direction en mai 2012. L’ensemble des personnes habilitées à signer des actes respectent ces règles et l’application du dispositif régulièrement mis à jour n’est en aucun cas aléatoire. Cette note a été mise à jour et adressée à l’ensemble des cadres de direction en janvier 2014 ; »

Radio France précise également qu’une direction de l’audit, de la gestion des risques et du contrôle interne a été créée fin 2012. Elle estime que cette création a permis :

– « de développer les travaux amorcés par la Délégation à l’Audit Interne depuis 2004 et les initiatives qui se développaient dans certaines directions sur le renforcement et la structuration du contrôle interne,

– de transformer l’exercice de cartographie des risques mené à bien à 2 reprises en un véritable dispositif de management par les risques avec le pilotage de plans d’action,

– et de capitaliser sur le développement de la culture de l’audit interne dans l’entreprise dans un souci d’amélioration continue de la performance de l’entreprise, à travers la supervision du contrôle interne et l’identification très opérationnelle des risques. »

Enfin, la société reconnaît que « la mise en œuvre du projet de comptabilité analytique a pris du retard » mais indique qu’« un nouvel outil budgétaire a été mis en place en 2013 et [que] la comptabilité analytique est en cours de déploiement et sera opérationnelle pour le budget 2015. »

Le renforcement du contrôle interne est logiquement affiché comme l’une des priorités du management. Comme l’indique la mission de contrôle, « il progresse depuis 2012 avec l’élaboration de l’organigramme fonctionnel des directions et antennes, la formalisation et la publication des délégations de signature ainsi que de certaines règles (frais de déplacement et de mission, de réception…). » Les progrès, bien que tardifs, sont maintenant réels.

Par ailleurs, « après plusieurs rapports d’audit alarmants, la création en 2012 d’une direction des achats a permis, en deux ans, de généraliser la mise en concurrence des prestataires. Ce domaine est sensible : il concerne 30 % des dépenses de Radio France. Seulement le quart des achats était couvert par des procédures de mise en concurrence ». Il existait donc, selon la mission de contrôle, un grave problème de conformité aux règles de la commande publique résultant de l’ordonnance de 2005. Radio France indique que ce problème est aujourd’hui résolu.

Selon le contrôle général économique et financier, « les marchés du chantier de la réhabilitation soulèvent pour leur part des problèmes spécifiques qui ne sont pas encore totalement résolus. »

Sur l’ensemble de ces questions et compte tenu des nuances d’appréciation entre l’entreprise et la mission de contrôle, la rapporteure se réjouit que la Cour des comptes vienne prochainement apporter son propre diagnostic.

2. L’amélioration de la gouvernance et de la transparence

La mission de contrôle estime que « faute d’une culture de gestion suffisante, l’entreprise peine à accepter les regards extérieurs sur son fonctionnement, vécus comme intrusifs. », constat qui est contesté par la direction de Radio France La rapporteure salue à cet égard les efforts réels de transparence fournis par la nouvelle direction dans le cadre de la préparation de ce rapport. Cependant, afin d’améliorer la transparence, elle propose que les comptes des entreprises publiques financées majoritairement par l’impôt soient rendus publics et accessibles sur data.gouv.fr.

Les auditions réalisées dans le cadre de la préparation du présent rapport ont également montré que le conseil d’administration de Radio France a besoin d’être modernisé et dynamisé pour devenir un véritable lieu de décision. Selon la mission de contrôle, « bien que doté d’un comité d’audit depuis 2004, le conseil d’administration n’exerce pas pleinement ses compétences, notamment en matière de stratégie et de rémunérations. » Se pose notamment la question de l’absence de l’agence des participations de l’État (APE) qui apparaît comme une anomalie. Plusieurs observateurs soulignent en outre la nécessité pour le CSA de nommer des personnalités qualifiées dotées d’une forte compétence financière au sein des conseils d’administration des sociétés de l’audiovisuel public.

Enfin, en matière de gouvernance, des interrogations se font jour sur les rôles respectifs des tutelles et du CSA, dont les responsabilités à l’égard de l’audiovisuel public ont été considérablement renforcées par la loi du 15 novembre 2013. Une clarification apparaît souhaitable. En particulier, la nomination des présidents de l’audiovisuel public par le CSA doit se concilier avec le rôle de l’actionnaire en matière stratégique et la responsabilité du président à l’égard de ce dernier.

A. LE CHANTIER : UNE DÉRIVE PRÉOCCUPANTE

La gestion du chantier de réhabilitation de la maison de la radio semble avoir été un révélateur des défauts de gestion évoqués précédemment.

1. Une sous-évaluation initiale

Au début de 2003, après qu’une étude du centre technique industriel de la construction métallique a établi des rapports inquiétants entre la stabilité au feu des poutrelles formant l’armature de plusieurs bâtiments et les temps d’évacuation des personnels, la préfecture de police informait le président de Radio France que « le niveau global de sécurité (était) notoirement insuffisant pour assurer l’évacuation des occupants et l’intervention des secours dans des conditions satisfaisantes » et qu’un avis défavorable avait été émis à la poursuite de l’occupation de la Maison de Radio France.

Très rapidement Radio France a envisagé de coupler la mise aux normes de sécurité de la Maison de la radio avec un remodelage très important de l’utilisation des locaux et la réhabilitation de l’immeuble.

Telles furent les lignes directrices du schéma directeur élaboré par l’agence d’architecture à laquelle Radio France avait eu recours en juillet 2003. Ce schéma directeur, remis en janvier 2004, prévoyait que les travaux s’étaleraient sur huit ans et chiffrait le budget prévisionnel correspondant aux études et aux travaux à 176 millions d’euros (en euros 2004).

Ce schéma avait été vivement critiqué dans une note détaillée de la mission du contrôle d’État datée du 30 janvier 2004 qui soulignait notamment que la restructuration du site constituerait une « opération lourde, sans précédents comparables, et dont le coût serait plus élevé qu’annoncé » et préconisait une solution alternative de « relocalisation du siège ».

Certaines de ces critiques ont été reprises dans un rapport de l’inspection générale des finances remis au cours de l’été 2004 qui chiffrait à 238 millions d’euros (en euros 2004) le coût des travaux, auquel s’ajoutaient 24 millions de coûts d’actualisation et 62 millions de coûts de fonctionnement soit un total de 324 millions d’euros. Le rapport élaborait des scénarii alternatifs comme le déménagement dans un autre bâtiment neuf avec vente de la maison de la radio et celui du déménagement dans un bâtiment existant acheté et réaménagé pour Radio France et la vente de la Maison de la Radio.

Il concluait de cette comparaison que les évaluations financières plaidaient clairement en faveur d’un déménagement et de la construction d’un nouveau bâtiment. « Un maintien dans les lieux avec une réhabilitation lourde n’arrive qu’en troisième position, tant en raison de son coût supérieur aux alternatives étudiées qu’en raison des aléas importants qui marquent le déroulement du chantier envisagé. »

La Cour des comptes en déduisait que « compte tenu des risques et aléas de l’opération, le budget prévisionnel serait vraisemblablement exposé à des dérives ».

2. Une dérive préoccupante

Après la réhabilitation de la tour centrale et la création d’un parc de stationnement souterrain en 2010-2011, la réhabilitation de l’ERP (la partie du bâtiment en front de Seine) et du studio 104 ainsi que la création d’un nouvel auditorium de 1 450 places s’achèvent. La réhabilitation de la grande couronne (phases 4 et 3) s’engage.

Le COM 2006-2009 avait évalué le coût total de la réhabilitation à 333 millions d’euros (217 millions d’euros de travaux, 23 millions d’euros de coûts d’actualisation, 93 millions de coûts de fonctionnement). En 2007, après inclusion de l’orgue et de l’auditorium dans le chiffrage, le coût a été réévalué à 382 millions d’euros (247 millions de travaux, 42 millions d’euros d’actualisation, 93 millions d’euros de fonctionnement).

Le COM 2010-2014 a réévalué le coût total à 461 millions d’euros en valeur 2008 (328 millions d’euros de travaux, 17 millions d’euros de coût d’actualisation, 116 millions d’euros de coûts de fonctionnement), coût validé par le conseil d’administration en décembre 2008.

Le coût final estimé des travaux est actuellement évalué par l’entreprise à 386 millions d’euros, auxquels s’ajoutent les dépenses de fonctionnement (réévaluées à 154 millions d’euros), le coût d’actualisation (depuis 2008, date de passation des marchés) évalué à 44 millions d’euros et les indemnités versées aux entreprises. Le coût total est donc estimé à 584 millions d’euros, soit une augmentation de plus de 80 % par rapport aux prévisions qui ont fondé le choix des travaux en 2004.

Les objectifs du COM concernant le chantier sont donc loin d’être tenus. En termes de calendrier, la date prévisionnelle d’achèvement des opérations, fixée à août 2016 à la signature du COM, est désormais prévue pour la fin 2017 par le rapport d’exécution du COM pour 2013. Certains observateurs n’excluent pas une dérive supplémentaire du coût tandis que la fin des opérations est plutôt prévue pour début 2018.

Lors de son audition, l’entreprise a mis en avant la complexité, réelle, d’une telle opération de réhabilitation en site occupé et les dépassements qui résultent nécessairement de la « vie d’un chantier » et seraient « mesurés » compte tenu de la complexité du chantier.

L’entreprise souligne le poids des évolutions réglementaires : « en dix ans, la réglementation des bâtiments publics s’est développée et est devenue de plus en plus contraignante, par exemple, sur le plan de l'accessibilité, de l’utilisation des matériaux (lesquels ne doivent contenir des composants de formaldéhyde qu’à des niveaux très limités) ou le changement de réglementation en matière de sécurité incendie. Du fait de l’évolution de ces normes, certains besoins ont ainsi dû être revus (sécurité des biens et des personnes, captations vidéo, éclairage centralisé, normes de haute qualité environnementale). Les mutations technologiques entrent également en ligne de compte. Si le numérique en était à ses balbutiements au début des années 2000, il s’est imposé depuis lors, faisant apparaître la nécessité d’adapter les prestations des marchés signés à ces nouveaux besoins. (…) Par ailleurs, en cours d’exécution des travaux, différents paramètres sont apparus et des évolutions ont été rendues nécessaires par la découverte d’éléments non prévisibles sur le chantier, ce qui est pour partie lié au bâtiment (construit dans les années 1960). Enfin, au fur et à mesure de l’exécution des prestations et de la finalisation des phases, le retour d'expérience a été tiré des phases précédentes au regard des besoins exprimés par les utilisateurs et occupants (sous-estimation du nombre de prises électriques…).»

La mission de contrôle économique général et financier, à l’issue d’une analyse précise des coûts, estime que les dépassements sont dus pour au moins plus de la moitié, voire les deux tiers à des décisions de l’entreprise. Les aléas de chantier et l’évolution des obligations réglementaires et des normes de construction, indépendants de la volonté de l’entreprise, ne seraient pas responsables de plus d’un tiers des dépassements. L’entreprise a en particulier décidé des nombreux travaux supplémentaires, mises à niveau et améliorations qui n’étaient pas prévus initialement (augmentation du nombre de cloisons amovibles, de prises électriques, installations vidéo dans les studios…).

La rapporteure se félicite que le rapport annoncé de la Cour des comptes vienne apporter son propre diagnostic sur les causes de la dérive de ce chantier.

La tutelle indique avoir été alertée très tardivement de ces surcoûts. En 2013, un nouveau maître d’œuvre a été désigné et a relancé toutes les études de chiffrage. Un expert en maîtrise d’ouvrage a par ailleurs été nommé auprès du comité d’audit à la demande de la DGMIC et de la direction du budget. Cependant, la Cour des comptes et la mission de contrôle s’accordent à estimer que la pression exercée par les tutelles (DGMIC et direction du budget) sur l’entreprise de manière générale et dans ce dossier en particulier a été insuffisante, le conseil d’administration s’étant contenté de constater les dépassements. Quoi qu’il en soit, la complexité de l’opération de réhabilitation, inédite dans cette entreprise, semble avoir mis à l’épreuve une gestion trop approximative et une programmation largement insuffisante des besoins et des opérations.

Ce chantier est aujourd’hui très mal vécu par les salariés qui évoquent un « gouffre financier » et portent un regard sévère sur un dossier géré selon eux avec « amateurisme ». On ne peut que regretter avec eux que les débordements de cette opération de réhabilitation soient condamnés à peser lourdement sur l’équation financière du groupe, notamment ses marges d’investissement dans la stratégie éditoriale et numérique.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE LA MINISTRE

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède, le jeudi 23 octobre 2014, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, sur les crédits pour 2015 des missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Avances à l’audiovisuel public » (4).

II. PRÉSENTATION DE L’AVIS

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède à l’examen des rapports pour avis de Mme Martine Martinel (Audiovisuel ; Avances à l’audiovisuel public), de M. Jean-Noël Carpentier (Presse), et de M. Rudy Salles (Livre et industries culturelles) sur les crédits pour 2015 des missions « Médias, livre et industries culturelles » et « Avances à l’audiovisuel public » lors de sa première séance du mercredi 22 octobre 2014.

M. le président Patrick Bloche. Mes chers collègues, nous poursuivons ce matin l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2015 avec la présentation des trois rapports pour avis sur les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », ainsi que ceux figurant au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », autrement dit, la répartition de la contribution à l’audiovisuel public (CAP), communément appelée redevance.

Dans leurs avis budgétaires, Mme Martine Martinel, M. Jean-Noël Carpentier et M. Rudy Salles ont chacun abordé un thème spécifique, ce qui leur a permis de porter un éclairage particulier sur une entreprise, un secteur ou un enjeu particulièrement important pour l’action publique dans le domaine des médias et des industries culturelles.

Je vous rappelle que Mme la ministre de la culture et de la communication nous présentera demain soir son budget « Médias » pour 2015 en commission élargie.

Nos trois rapporteurs pour avis présenteront successivement leurs travaux avant que n’interviennent un représentant de chaque groupe politique, puis les orateurs qui le souhaitent.

Mme Martine Martinel, rapporteur pour avis. J’ai consacré la partie thématique de mon rapport pour avis à Radio France qui, ces dernières années, a fait l’objet de beaucoup moins d’attention que les autres sociétés de l’audiovisuel public, en particulier France Télévisions et France Médias Monde.

L’année qui s’achève a été marquée à Radio France par la nomination d’un nouveau président, M. Mathieu Gallet, la fin de l’application du contrat d’objectifs et de moyens (COM) 2010-2014 et la préparation d’un nouveau COM pour la période 2015-2019. Il s’agit donc pour l’entreprise d’une période de bilan et de transition.

La Cour des comptes, dont le dernier contrôle remontait à 2005, devrait publier prochainement un rapport très attendu sur Radio France. Alors que le CSA annonce un bilan détaillé de France Télévisions sous la présidence de M. Rémy Pflimlin, je regrette qu’un travail similaire n’ait pas été réalisé pour Radio France. La loi du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public a pourtant prévu que le CSA rende un avis motivé sur les résultats des sociétés de l’audiovisuel public quatre ans après le début du mandat de leurs présidents. Ce bilan aurait été très utile pour éclairer le choix d’un projet stratégique et préparer l’avenir d’une entreprise confrontée à des défis majeurs.

La stratégie éditoriale constitue le premier de ces défis.

Radio France est confrontée à une crise de ses audiences. Si des évolutions favorables ont été constatées entre 2009 et 2013, depuis 2013, les résultats sont beaucoup plus inquiétants pour la plupart des antennes. Et les résultats de 2014 amplifient ces inquiétudes : France Inter est tombée à 9 % d’audience en juillet, son plus mauvais score depuis 2006, France Musique est à 1,4 % alors que Radio classique passe la barre des 2 %, et France Info ne dépasse pas les 7,5 %.

Radio France connaît aussi un vieillissement très préoccupant de ses auditeurs dont l’âge médian est supérieur de dix ans à celui des auditeurs du média radio : il frôle soixante ans pour certaines antennes et atteint soixante-huit ans pour France Musique. Le rajeunissement doit donc être au cœur de la stratégie du nouveau COM ; il en va de l’avenir du service public de la radio. Par ailleurs, les chiffres montrent que l’objectif affiché par le COM de voir les antennes s’adresser à tous les publics, en termes de profil sociologique, et favoriser la diversité sociale des auditeurs, est loin d’être atteint.

Le projet stratégique de M. Mathieu Gallet, que notre Commission a entendu le 18 juin dernier, comporte des propositions très intéressantes qui vont dans le sens d’une clarification de l’identité des antennes. Elle est nécessaire pour éviter les phénomènes de prédation de l’audience entre stations. L’un des objectifs consiste à rendre à France Info son identité de chaîne d’information en continu. Le COM devra également clarifier la place de la musique sur les antennes.

Je m’interroge fortement sur l’avenir du Mouv’. À l’heure où nous sommes contraints par des choix budgétaires, devons-nous conserver une antenne qui réunit un si petit nombre d’auditeurs et coûte 20 millions d’euros par an ? Pour le Mouv’, le COM 2010-2014 devait être celui de la dernière chance. Le nouveau président annonce une relance fondée sur une nouvelle ligne éditoriale en cours de définition : il s’agirait de faire de la station la radio des jeunes et des cultures urbaines, notion qui n’a pas été clarifiée au cours des auditions. J’ai déjà eu l’occasion de regretter le caractère de chaîne « alibi » ou « ghetto » de France Ô. Je mets en garde contre le même risque pour le Mouv’. Le rajeunissement et la diversification de l’audience doivent au contraire irriguer l’ensemble des antennes et surtout constituer un axe majeur de la stratégie numérique. Si le choix est néanmoins fait de maintenir la station, il conviendra de bien clarifier son identité de service public par rapport à l’offre existante privée.

Enfin, pour diversifier les publics, il faut évidemment que l’antenne soit représentative de la diversité de la société française. À cet égard, je note que trop peu de femmes s’expriment encore à l’antenne – elles n’étaient que 37 % environ en 2013. Par ailleurs elles ne représentent que 33 % des cadres de direction alors que le COM fixe un objectif de 35 %.

Le numérique constitue un autre défi pour Radio France. Le démarrage en la matière a été tardif puisque l’entreprise ne l’a véritablement amorcé qu’en 2012 avec la création de la direction des nouveaux médias. Une grande partie du retard a pu être comblée, mais les résultats apparaissent contrastés. En matière de podcasts, ils sont remarquables pour France Culture mais demeurent assez modestes pour les autres antennes.

En ce qui concerne la fréquentation des sites, les comparaisons que j’ai établies dans mon rapport font état d’un retard de Radio France. Calculées en nombre de visiteurs uniques mensuel, les audiences, pour l’année 2013, des sites d’Europe 1 et de RTL atteignent à 2 millions contre un peu plus de 960 000 pour France Inter, et 580 000 pour France Culture. Par ailleurs, je note qu’on ne trouve aucune des applications mobiles de Radio France parmi celles qui ont été les plus fréquentées au mois de juillet 2014. Radio France ne fait donc pas encore suffisamment figure de « média de référence » sur les réseaux numériques, d’où l’urgence de définir des offres numériques communes à l’ensemble de l’audiovisuel public. Lors des cinquante ans de la Maison de la radio, le Président de la République a d’ailleurs affirmé que cette articulation était nécessaire.

Cette ambition figure dans le projet stratégique de M. Mathieu Gallet, et je m’en félicite, mais il ne peut agir seul. L’idée d’une coordination se fonde sur le constat qu’on ne peut plus raisonner par type de média à l’ère de la convergence, comme le montre la stratégie retenue avec succès par les groupes audiovisuels publics dans de nombreux pays européens, tels que la BBC en Grande-Bretagne, ou la RTBF en Belgique. Notre audiovisuel public est trop cloisonné : les relations entre les sociétés sont davantage marquées par la concurrence que par la recherche de complémentarités. Mme Véronique Cayla, présidente d’Arte, l’a rappelé : l’idée même de créer des renvois entre les sites des uns et des autres ou de faire des promotions croisées n’a jamais pu être menée à bien… Pour renforcer et pérenniser le service public audiovisuel à l’ère numérique, il me semble impératif de lancer ce chantier à la faveur de la négociation des nouveaux COM qui va avoir lieu pour l’ensemble des sociétés de l’audiovisuel public d’ici à 2016.

Dans la continuité de ce que nous avons été plusieurs à exprimer lors de l’audition de M. Mathieu Gallet, je réitère mon opposition à la remise en cause de la gratuité des podcasts dans le cadre de la nouvelle stratégie numérique. Cette solution me paraîtrait de nature à fragiliser l’acceptation de la redevance et les fondements mêmes de la notion de service public audiovisuel à l’ère numérique.

En ce qui concerne la couverture du territoire par Radio France, je rappelle qu’à travers la redevance, les contribuables financent les sept programmes du groupe. Il ne me paraît donc pas acceptable que certains n’en reçoivent que trois. C’est pourquoi je soutiens la volonté du président de Radio France de tout mettre en œuvre pour les rendre accessibles. À cet égard, je souhaite également qu’un indicateur de couverture soit fixé par le futur COM selon la même méthodologie que celle appliquée par le CSA aux autres services.

Pour le nouveau président de Radio France, la clarification de la stratégie des formations musicales constituera par ailleurs un enjeu majeur du futur COM dans le contexte d’ouverture du nouvel auditorium en fin d’année.

La modernisation de la gestion apparaît comme un autre défi et comme une priorité dans un contexte de contrainte forte sur les ressources publiques et alors que les marges d’augmentation des ressources propres sont modérées.

La maîtrise de la masse salariale devrait rester le premier objectif de gestion du futur COM. Je rappelle qu’elle représente presque 60 % des dépenses de l’entreprise et qu’elle a continué d’augmenter de manière dynamique ces dernières années, au point que le CSA en octobre 2013 a appelé Radio France à une meilleure maîtrise de ses charges de personnel. Au cours des auditions, mon attention a été appelée sur un effet pervers du COM auquel il conviendra de remédier. Il fixe en effet un plafond d’emplois – 4 619 équivalents temps plein – qui ne prend pas en compte les cachets et les piges. L’entreprise est donc de facto encouragée à recourir à l’intermittence pour contourner ce plafond. À cet égard, je propose que soit évaluée l’idée de créer un groupement des employeurs de l’audiovisuel public sous forme d’une association loi de 1901, qui permettrait d’employer les intermittents dits « techniques » en CDI.

Dans un contexte de baisse des moyens de l’entreprise, l’augmentation continue de la masse salariale rend également indispensable la modernisation de la gestion des ressources humaines, qui est, selon les observateurs, « éloignée des standards applicables dans les grandes entreprises ». Cette modernisation passe d’abord par la renégociation encore en cours des conventions collectives. Le nouveau président a dit sa volonté de voir un nouvel accord collectif signé avant la fin de l’année.

Au cours des auditions, des observations sévères ont été formulées sur la gestion et ses étonnants archaïsmes. Ont notamment été relevés l’absence, jusqu’en 2012, de procédures formalisées, publiées, contrôlées dans leur mise en œuvre, l’absence de comptabilité analytique, une organisation « en silo » marquée par un dialogue insuffisant entre les directions opérationnelles et les directions de soutien. S’y ajouteraient une architecture des systèmes informatiques obsolète, des défaillances dans la mise en œuvre des règles applicables aux achats publics, et une gestion globalement lourde, inefficiente et insuffisamment contrôlée. La Cour des comptes apportera sans doute plus de précisions sur ces aspects. Quoi qu’il en soit, le renforcement du contrôle interne est logiquement affiché comme l’une des priorités du management.

Des améliorations de la gouvernance et de la transparence seraient également souhaitables. Je salue les efforts réels fournis en la matière par la nouvelle direction. Cependant, afin d’améliorer encore la transparence, je suggère que les comptes des entreprises publiques financées majoritairement par l’impôt soient rendus publics, et qu’ils soient accessibles sur la plateforme data.gouv.fr. En matière de gouvernance, les observateurs, y compris la direction, appellent de leurs vœux une dynamisation du conseil d’administration – ce qui ne concerne évidemment pas notre collègue Michel Françaix. (Sourires) Une clarification me paraît en outre nécessaire sur les rôles respectifs des tutelles et du CSA.

Je souhaite conclure sur un autre défi de taille : le chantier de réhabilitation de la Maison de la radio, qui a mis au jour les défauts de gestion que je viens d’évoquer. Depuis 2004, le coût total de ce chantier a fait l’objet de nombreuses réévaluations. Il est aujourd’hui estimé à 584 millions d’euros, dont 116 millions d’euros de coûts de fonctionnement, soit une augmentation de plus de 80 % par rapport aux prévisions sur lesquelles s’est fondé le choix des travaux en 2004.

Les objectifs du COM concernant le chantier sont donc loin d’être tenus. En termes de calendrier, la date prévisionnelle d’achèvement des opérations, fixée à août 2016 à la signature du COM, est désormais repoussée à la fin de l’année 2017 par le rapport d’exécution du COM pour 2013. Certains observateurs n’excluent pas une dérive supplémentaire du coût tandis que la fin des opérations ne devrait pas avoir lieu avant le début de 2018.

Lors de son audition, Radio France a mis en avant la complexité, réelle, d’une telle opération de réhabilitation en site occupé et estimé que les dépassements qui résultent nécessairement de la « vie d’un chantier » seraient « mesurés » compte tenu de la difficulté des travaux. Les auditions ont toutefois montré que la programmation des besoins et des opérations a été notoirement insuffisante. Une analyse des dépassements montre qu’ils sont dus pour au moins plus de la moitié, voire les deux tiers, à des décisions de l’entreprise.

La tutelle indique avoir été alertée très tardivement de ces surcoûts – pas avant février 2014. Cependant, la Cour des comptes et la mission de contrôle de Bercy s’accordent à estimer que la pression exercée par les tutelles – la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture, et la direction du budget à Bercy –, sur l’entreprise de manière générale, et dans ce dossier en particulier, a été insuffisante, le conseil d’administration s’étant contenté de constater les dépassements. La Cour des comptes apportera, je l’espère, plus de précisions concernant une gestion de chantier aujourd’hui très mal vécue par les salariés : ces derniers évoquent un « gouffre financier » et portent un regard sévère sur un dossier géré, disent-ils, avec « amateurisme ». Quoi qu’il en soit, on ne peut que regretter avec eux que les débordements de cette opération de réhabilitation soient amenés à peser lourdement sur l’équation financière du groupe, notamment sur ses marges d’investissement dans la stratégie éditoriale et numérique.

M. Jean-Noël Carpentier, rapporteur pour avis. La partie thématique de mon rapport pour avis est consacrée au soutien à la presse à l’ère numérique. Je ne vous parlerai donc pas ce matin de l’imbroglio des aides d’État à la presse, de leur efficacité toute relative ni des effets d’aubaine qu’elles suscitent chez certains patrons d’industrie qui s’offrent ainsi de l’influence à bon compte. Permettez-moi simplement de faire quelques remarques concernant l’actualité de la presse à l’heure du numérique.

Aujourd’hui 40 % de la population mondiale est connectée sur la toile, et ce n’est pas fini ! Déjà, près de 80 % des habitants des pays de l’OCDE sont connectés. Résultat d’une évolution des technologies spectaculaire, le numérique bouscule tout ; certains évoquent même une véritable révolution industrielle. En 1950, les plus gros ordinateurs traitaient mille opérations par seconde ; depuis, ce nombre a été démultiplié tous les ans, et les ordinateurs peuvent aujourd’hui effectuer plusieurs milliards d’opérations dans ce même laps de temps. Cette progression est exponentielle : il faut s’attendre à voir émerger, comme le préconisent certains, des machines dotées de la capacité du cerveau humain.

Cette puissance informatique alliée à la connexion massive à internet modifie profondément nos sociétés. Le travail, les loisirs, les communications, l’éducation et la circulation de l’information : rien n’est dorénavant plus tout à fait comme avant ! Nos démocraties elles-mêmes évoluent sans doute, et certains chercheurs affirment qu’un nouveau monde est né. Un monde incertain dans lequel l’on se demande si le système capitaliste va redistribuer aux peuples les dividendes des avancées technologiques. Un monde aussi où l’on a l’impression parfois de perdre pieds tellement il va vite. Un monde où l’on peut légitimement s’inquiéter d’être fichés et suivis à la trace par les géants du net, les fameux « GAFA » (Google, Apple, Facebook, Amazon).

Mais le numérique offre aussi des potentialités puissantes pour l’économie et des outils nouveaux et formidables pour la démocratie.

Au terme des auditions que j’ai menées pour préparer mon rapport pour avis, j’ai acquis la conviction que le numérique était une chance pour la presse et le journalisme, à condition que le journalisme sache se réinventer et que les éditeurs de presse remettent en question un système en difficulté.

Avec internet, les médias et les industries culturelles (musique, livre, cinéma, audiovisuel…) font face à une profonde mutation qui modifie leur écosystème. Le secteur de la presse et du journalisme est donc lui aussi transformé. Les comportements de nos concitoyens sont dorénavant modifiés. Toujours friands d’information, ils veulent pouvoir la consommer partout et tout le temps. Il faut qu’elle soit rapide et crédible. M. Patrick Le Floch le rappelle dans son ouvrage L’économie de la presse à l’ère numérique : « L’arrivée des sites d’actualités casse les frontières traditionnelles des marchés de la presse, l’aire géographique de diffusion et la périodicité n’ont plus de sens. » Alors qu’un monde ancien recule, un nouveau émerge.

Pourtant, même si les Français doutent parfois légitimement de l’indépendance des médias face aux pouvoirs politiques et économiques, ils font toujours davantage confiance aux médias dits « traditionnels », comme la radio, la presse écrite et la télévision, qu’à internet, même si sa cote de confiance progresse. On sent comme une retenue de nos concitoyens face au flot d’informations disponibles. Il serait toutefois erroné d’en conclure que la presse ne peut progresser sur internet. Bien au contraire, la tendance est bien celle-là.

Pour le débat public et pour notre démocratie, il est essentiel qu’à travers des titres de presse reconnus et crédibles un journalisme de référence donne des repères aux lecteurs sur la toile. Le numérique est avant tout une chance pour la démocratie. Internet n’est pas qu’un danger pour la presse ; c’est aussi une opportunité. Il est d’ailleurs rassurant de constater que les sites les plus consultés en France sont ceux de la presse quotidienne nationale, devant ceux des autres médias que sont TF1, France Télévisions, ou les radios en ligne. On ne peut que s’en féliciter. La récente proposition de rachat de LCI par le groupe Le Monde témoigne des évolutions en cours.

Internet n’est pas seulement une opportunité en termes économiques, elle en est également une pour le journalisme. Pour les grands titres de presse, la nécessité de réactualiser continuellement l’information exige de nouveaux moyens. Il faut notamment permettre la vérification plus rapide des sources afin d’éviter la propagation de rumeurs, enrichir les contenus par la vidéo ou par l’infographie, et puis, surtout, créer plus d’interactivité avec le lecteur, ce qui modifie le rôle du journaliste et des rédactions.

Sur internet, le nouveau rapport entre le lecteur et l’information, ainsi que des coûts d’investissement moins importants que dans la presse papier, permettent l’émergence de nouveaux titres de journaux dits « pure players » qui se veulent plus indépendants des pouvoirs économiques et offrent assurément un ton différent et plus libre sur plusieurs sujets de l’actualité.

Le modèle de soutien de l’État est-il pertinent à l’ère numérique ?

Le soutien de l’État à la presse demeure massivement centré sur la diffusion papier et sur la distribution – points de vente, distribution des abonnements… Il s’élève à environ 260 millions d’euros. Comme les années précédentes, les aides à la presse en ligne continuent de représenter une partie très faible des aides budgétaires, environ 10 %. Déjà en 2013, Michel Françaix, alors rapporteur pour avis de notre Commission, faisait ce constat : « L’écosystème actuel continue à orienter l’essentiel de ses ressources vers le maintien de modèles anciens, indépendamment de toute réflexion sur leur finalité, leur pertinence et leur viabilité. »

On peut légitimement s’inquiéter de la grande difficulté des éditeurs de presse papier à s’entendre et à améliorer ensemble l’efficacité de leurs réseaux de diffusion. Des synergies sont pourtant indispensables pour maintenir une activité papier en constante diminution. Des aides d’État ne pourront indéfiniment combler les carences des éditeurs qui se refusent à prendre des décisions.

Cette politique est vouée à l’échec dans un contexte où la mutation numérique apparaît inéluctable tant la baisse de la diffusion papier s’accélère : le recul est tout de même de 25 % en douze ans alors que la population sur la même période a augmenté de près de 10 %. Cette baisse de la diffusion, inégale selon les médias, touche plus particulièrement la presse quotidienne nationale. M. Francis Morel, président du syndicat de la presse quotidienne nationale, a reconnu lors de son audition que l’État avait trop soutenu la dimension industrielle de la presse papier au détriment du soutien à la presse en ligne, ce qui explique peut-être en partie le retard de la presse française dans sa mutation numérique.

L’État a toutefois fait évoluer les choses positivement avec notamment l’application du taux de TVA super-réduit de 2,1 % à la presse en ligne – le président de notre Commission n’étant pas étranger à cette évolution. De même, un ciblage accru du fonds stratégique pour les services de presse en ligne (SPEL) est mis en place depuis le mois de juin dernier. Désormais, seuls les SPEL d’information politique et générale sont éligibles à ce fonds et les sites d’information pratique en sont écartés. Je me félicite de ce ciblage resserré qui n’est que la première étape dans la révision complète du modèle de soutien français à la presse.

Nous devons en effet nous interroger sur la pérennité de notre système d’aides à la presse à l’ère numérique.

Contrairement à l’édition d’un journal sous format papier, la création d’un site internet ne nécessite pas d’infrastructure très importante : les barrières à l’entrée du secteur sont bien moindres et les opinions peuvent s’y exprimer plus facilement dans toute leur diversité. De ce fait, la question de la protection du pluralisme, qui fonde le système français d’aide à la presse, ne peut plus se poser dans les mêmes termes depuis l’avènement du numérique.

Nous pouvons aussi interroger notre système d’aides en le comparant à celui de nos voisins. Si les aides à la presse papier existent chez un grand nombre d’entre eux, leur niveau est beaucoup plus élevé en France. Les aides directes telles que nous les pratiquons sont d’ailleurs interdites dans plusieurs pays au nom même de la liberté de la presse.

Au final, on peut s’interroger sur le maintien d’un système d’aide particulièrement généreux qui contribue parfois à nourrir les interrogations de nos concitoyens sur l’indépendance politique de la presse. De même, l’évolution récente du profil des propriétaires de presse accrédite l’idée qu’on n’achète plus aujourd’hui forcément un titre de presse pour sa rentabilité mais peut-être plutôt pour l’influence politique qu’il procure. Dans un tel contexte, les aides à la presse peuvent, hélas ! conforter des logiques d’influence plus que des logiques d’investissement au service du journalisme et de l’information du citoyen.

Le même raisonnement me fait m’interroger sur les fondements du « fonds Google ». Si le principe de cet accord de compromis avec Google reste pragmatique puisqu’il offre des ressources supplémentaires, il ne peut constituer à mon sens une solution à long terme pour résoudre les défis auxquels est confrontée la presse en ligne, et répondre à l’enjeu que représentent les conditions de diffusion et de rémunération des contenus de cette dernière. Compte tenu de la position dominante de ce moteur de recherche et de son rôle capital et controversé dans l’accès à l’information, il serait malsain que Google devienne de manière durable le principal mécène de la presse française. Ces accords devront être encadrés. Ceux qui profitent de contenus produits par d’autres doivent rémunérer ceux qui les ont créés.

Au vu des évolutions du secteur de la presse, la question d’une redéfinition et d’une réduction de certaines aides à moyen ou à long terme peut désormais être posée. Il faut le faire sereinement, en veillant à ne pas déstabiliser un secteur industriel qui emploie des milliers de personnes et en accordant aux quotidiens à faibles ressources une attention particulière afin de préserver le pluralisme.

Dans le temps très limité qui m’était imposé, j’ai peut-être présenté certaines de mes propositions de façon abrupte, mais la mutation numérique déjà engagée doit impérativement être accélérée. Les patrons de presse, les journalistes et les citoyens ont tout à gagner si elle se fait au nom de la démocratie et du débat public.

M. Rudy Salles, rapporteur pour avis. J’ai choisi cette année de consacrer l’avis budgétaire relatif au programme « Livre et industries culturelles » au jeu vidéo. En effet, longtemps dominé par le livre, le secteur des industries culturelles compte désormais un nouveau venu : le jeu vidéo, qui est devenu le bien culturel le plus vendu en France et représente le deuxième marché de divertissement. Il mérite d’autant plus notre attention qu’il constitue un enjeu culturel et économique pour notre pays.

Enjeu culturel, tout d’abord : le jeu vidéo n’est plus seulement une affaire de passionnés : son public élargi est même devenu familial. Quelques chiffres sont susceptibles de bouleverser les idées reçues : la moyenne d’âge du joueur tourne autour de quarante et un ans, et 52 % des joueurs sont des joueuses. Le jeu vidéo est un vecteur d’influence culturelle, et les jeux français se distinguent à la fois par la qualité de leur création et par leurs innovations technologiques. Notre savoir-faire est reconnu internationalement : 80 % de la production est destiné au marché étranger. La filière musicale n’a pas le monopole de la « touche française » !

Les studios français bénéficient d’équipes de qualité composées de graphistes, de scénaristes, de monteurs ou d’ingénieurs. Nos écoles de formation sont réputées dans le monde entier et notamment l’école des Gobelins à Paris, pour n’en citer qu’une.

Le jeu vidéo est ensuite un enjeu économique. On compte en France trente et un million de joueurs, et le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) estime qu’un joueur dépense en moyenne 40 euros par mois. La filière française est très dynamique, son chiffre d’affaires direct, qui était de 700 millions d’euros en 2002, a atteint presque 3 milliards d’euros en 2013. La société Ubisoft, troisième éditeur mondial de jeu vidéo, en est l’exemple même.

L’État soutient le secteur à travers deux dispositifs spécifiques : le crédit d’impôt pour les dépenses de création de jeu vidéo et le fonds d’aide au jeu vidéo.

Le premier permet aux entreprises installées en France de déduire de leur impôt sur les bénéfices 20 % de leurs dépenses affectées directement à la création de ces jeux. Ce dispositif contribue à éviter la délocalisation des entreprises en comblant partiellement la différence entre les coûts de conception dans les studios français et ceux des studios étrangers. De plus, il génère des recettes fiscales : en 2013, pour 1 euro de crédit versé, 1,80 euro de recettes fiscales et sociales a été perçu par l’État.

Le deuxième dispositif, le fonds d’aide au jeu vidéo, comprend trois aides : l’une destinée à la réalisation de prototypes de jeux – l’aide à la pré-production, une autre destinée à créer une valeur patrimoniale – l’aide à la création de propriétés intellectuelles, et la dernière consacrée à la promotion de ces jeux et de la profession – l’aide aux opérations à caractère collectif.

Malgré ce soutien, la position française s’effrite, concurrencée par le marché asiatique, canadien, mais aussi européen où se positionnent la Finlande, le Royaume-Uni ou l’Allemagne. En dix ans, nous sommes passés du cinquième au huitième rang des pays producteurs de jeu vidéo. L’emploi dans le secteur a été divisé par deux : seulement 12 000 salariés y travaillaient en 2013, alors qu’ils étaient 25 000 durant les années 2000.

Le Syndicat national du jeu vidéo et l’IDATE ont publié le 15 octobre dernier un baromètre annuel du jeu vidéo en France. On y apprend que 62 % des entreprises interrogées considèrent la France comme peu attractive. C’est pourquoi il est urgent que le soutien de l’État soit repensé. De nombreuses pistes existent, des solutions sont connues, des projets annoncés. Il est temps que ces annonces soient suivies d’effet, et que ces projets deviennent opérationnels. Trois grandes priorités devraient s’imposer.

Première priorité : l’aménagement du crédit d’impôt au jeu vidéo. Ce dispositif n’est plus adapté à l’évolution des jeux. De plus, il est concurrencé par des dispositifs extrêmement agressifs mis en place à l’étranger, notamment à Singapour qui propose un crédit d’impôt de 50 %. La production des jeux sur supports physiques, dits de nouvelle génération, nécessite de longues années de travail, c’est pourquoi la procédure d’agrément doit être revue – le délai entre l’agrément provisoire et l’agrément définitif doit être allongé. En revanche, les coûts de développement des jeux dématérialisés sur tablettes ou téléphones sont moindres, ce qui devrait permettre d’abaisser, pour ce qui les concerne, le seuil des dépenses éligibles au crédit d’impôt.

Ces points d’amélioration ont été identifiés et des aménagements ont été votés l’année dernière, lors de l’examen de la loi de finances pour 2014. Cependant, le nouveau dispositif n’est toujours pas applicable et il n’est pas certain qu’il s’appliquera en 2015. En effet, une aide d’État doit être notifiée à la Commission européenne et validée. Je m’étonne que la transmission à Bruxelles ne soit intervenue que cet été, retardant d’autant la mise en œuvre effective du nouveau crédit d’impôt.

Deuxième priorité : inciter les entreprises du secteur à prétendre à des aides transversales liées à l’innovation, à la recherche ou à la compétitivité, comme les crédits d’impôts recherche ou innovation, le dispositif jeune entreprise innovante, ou des projets dans le cadre du fonds interministériel. Encore faut-il que l’administration fiscale joue le jeu ! Les entreprises du secteur peuvent prétendre au crédit d’impôt recherche. Malheureusement, depuis un an, les dépenses éligibles à ce crédit d’impôt qu’elles déclarent sont requalifiées, et nombre d’entreprises subissent de ce fait des redressements fiscaux. Je déplore cette instabilité juridique qui ne leur permet pas de rivaliser avec la concurrence internationale.

Troisième priorité : l’accès au financement. Il s’agit d’un enjeu crucial pour un secteur composé majoritairement de très petites entreprises qui ne disposent pas de fonds propres, ce qui menace leur pérennité. Le secteur bancaire, traditionnellement frileux à l’égard des industries culturelles, l’est plus encore lorsqu’il a affaire à un secteur méconnu où les risques sont grands.

Sur ce sujet également, plusieurs projets sont en gestation. En particulier celui d’un fonds d’octroi de prêts participatifs géré par l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC), doté de 20 millions d’euros, qui servirait de levier aux entreprises pour trouver ensuite des crédits complémentaires auprès du secteur bancaire traditionnel. La Banque publique d’investissement (BPI France) devrait aussi s’impliquer davantage dans ce secteur. Son manque d’intérêt et sa prudence dans ce domaine doivent être dépassés. Un projet existe : la signature d’une convention cadre avec l’IFCIC lui permettrait de co-garantir des crédits et d’utiliser le réseau régional de ses agences.

Il est grand temps que tous ces dispositifs soient opérationnels afin de préserver un secteur culturel d’avenir, à forte valeur ajoutée.

M. Le président Patrick Bloche. Ces trois rapports pour avis portant sur la même mission budgétaire, il n’y aura qu’un seul orateur par groupe. Au demeurant, les représentants des groupes auront trois fois l’occasion d’intervenir : ce matin, demain soir en commission élargie et in fine la semaine prochaine, en séance publique.

M. Michel Françaix. Italo Calvino s’interrogeait sur nos capacités réelles à pouvoir reconnaître un nouveau monde s’il se présentait à nous et sur la cécité devant ce qui émerge de neuf d’une société tout entière occupée à prévoir le passé, l’œil rivé au rétroviseur. Gramsci, quant à lui, définissait la crise comme le moment où une société se meurt sans qu’une autre soit encore née. Gardons-nous donc de sauter sans discernement sur toute technologie nouvelle ; à force de vouloir voir du nouveau partout, on finit par ne plus en voir nulle part. Si le numérique a réellement bouleversé nos vies et modifié nos repères, s’il faut accepter le changement et inventer de nouveaux formats sans nous retrancher derrière une ligne Maginot, attention toutefois aux effets de mode et au « bougisme ». Pour paraphraser Robert Filliou, le numérique est ce qui rend la vie plus intéressante que le numérique… à condition de la rendre plus intéressante !

L’ordre ancien de la presse vacille : érosion continue et vieillissement inexorable du lectorat, déclin prolongé de la diffusion, réduction régulière du nombre de points de vente – si les kiosquiers étaient mieux payés, peut-être le problème serait-il différent –, déstabilisation de Presstalis, diminution du chiffre d’affaires et chute significative des recettes publicitaires, rentabilité négative des entreprises, fragmentation de l’offre, c’est tout l’écosystème de la presse écrite qui est engagé dans une spirale cruelle.

Même si le pluralisme de la presse est aujourd’hui reconnu comme un objectif à valeur constitutionnelle, il serait illusoire de penser que l’État assurera à lui seul le renouveau de la presse, dans un contexte où le nombre total de journaux vendus chaque année en France est passé de 6,5 à 4 milliards depuis 2000. Cette baisse est inéluctable mais la presse papier n’aura pas disparu pour autant en 2050 : les exemples anglais ou américains ont montré que tous les titres ayant abandonné le papier pour le numérique sont morts. Et l’idée de marque reste encore particulièrement présente.

Sur les 4 milliards de journaux diffusés, 2 milliards le sont par la vente au numéro, dont 1 milliard par Presstalis et les Messageries lyonnaises de presse (MLP) et 2 milliards par abonnement – 1,2 milliard par la poste et 800 millions par portage. Cela m’inspire trois réflexions. La première est qu’il conviendrait de donner davantage de pouvoir aux instances de régulation, afin de mieux rationaliser l’organisation de Presstalis et des MLP ; à défaut, je ne suis pas loin de penser, comme Marie-George Buffet, qu’il faudrait peut-être fusionner ces deux structures. Il est ensuite important de correctement répartir les aides accordées au transport postal et au portage, lequel concerne essentiellement la presse quotidienne. Si La Poste ne fait pas son boulot, donnons tout au portage ! Mais les autres formes de presse ne sont pas intéressées par le portage et il faut donc les aider via La Poste… Reste que l’État se concurrence lui-même en donnant de l’argent aux mêmes deux fois : il faudrait pour le moins rationaliser tout cela. Enfin, notre système d’aides doit tenir compte du fait que 40 % des diffuseurs ont aujourd’hui une rémunération inférieure au SMIC – je m’étonne d’ailleurs qu’on ouvre encore de nouveaux kiosques aujourd’hui et qu’il n’y en ait pas davantage qui ferment.

Entre l’immobilisme, qui n’est plus tenable, et la révolution, mon grand âge m’incite à défendre une troisième voie, qui consiste à accompagner la transition en évitant la rupture.

Un mot pour conclure sur l’AFP qui subit aujourd’hui la concurrence d’internet. Or elle est la seule à vérifier ses informations. Sur dix scoops sortis sur internet, sept sont faux ! Et l’on trouvera à peine deux lignes le lendemain pour démentir… L’AFP doit demeurer un champion national, vecteur de l’exception culturelle, reconnu pour l’excellence de son travail. Son statut se justifie pour autant qu’il lui permet de remplir cette mission et d’être pour la France un instrument de souveraineté et d’expression. Mais si l’AFP est unique, elle est aussi une entreprise comme les autres. Par conséquent, elle doit continuer à se développer en se diversifiant ; elle doit convaincre ses clients et en recruter de nouveaux, dans un contexte de concurrence de plus en plus âpre et en constante évolution. Face à ces enjeux, tout immobilisme conduira inéluctablement les acteurs de ce dossier à la paupérisation et à une inévitable crise. Réformer dès aujourd’hui me paraît préférable à la perspective de subir demain, sous la contrainte, des transformations brutales. Dans son intérêt et celui de la presse tout entière, l’AFP doit se donner les moyens de rester en mouvement au rythme du monde.

Mme Annie Genevard. J’ai trouvé le rapport de Martine Martinel sur Radio France très sérieux et très courageux. Il aborde tous les aspects du sujet, qu’il s’agisse de la stratégie, des choix budgétaires, de la place du numérique ou de la gouvernance ; mais surtout, il a le courage de n’éviter aucun des sujets qui peuvent fâcher.

À ce titre et prenant le contre-pied des propos qu’avait tenu Jean-Luc Hees lors de son audition l’an dernier, il pose clairement et légitimement la question du maintien du Mouv’, dont la faible audience montre qu’il n’a jamais véritablement rencontré son public.

Le rapport évoque également le vieillissement des audiences de France Inter, de France Musique ou de France Info, dont l’âge moyen tourne autour de soixante ans. Vous aviez l’an dernier poussé des cris d’orfraie, mes chers collègues, lorsque, longtemps fidèle auditrice de France Inter, j’avais avoué m’être détournée d’une chaîne devenue très prévisible et ayant perdu son esprit novateur. Martine Martinel ne dit rien d’autre lorsqu’elle évoque une offre qui n’a sans doute pas su se renouveler. Elle aborde enfin le risque de ghettoïsation qui menace certaines stations, question d’autant plus fondamentale qu’elle rejoint un des enjeux auxquels se trouve confrontée la société française dans son ensemble.

S’agissant de la presse, nous avons eu très opportunément ce matin un rendez-vous avec les éditeurs de quotidiens nationaux, avec qui nous avons évoqué quatre sujets importants : l’imprimerie, la distribution, le statut et le financement des entreprises de presse, les objets connectés. Sur ce dernier point, les éditeurs s’interrogent sur le sort de la préconisation qui figurait dans le rapport Lescure et consistait à taxer les objets connectés pour rémunérer les contenus.

Notre rapporteur Jean-Noël Carpentier considère dans son rapport que le numérique est une chance pour la presse, à condition qu’elle sache se réinventer. Encore faudrait-il définir ce que signifie « réinventer »… Est-ce devenir une presse à consommer partout et tout le temps ? Au vu de ce que nous apportent les chaînes d’information en continu, qui sont certes intéressantes en termes d’instantanéité mais pèchent souvent par manque de recul, je ne suis pas sûre d’adhérer à cette vision des choses.

M. Rudy Salles a fort judicieusement axé son rapport autour des jeux vidéos. C’est un choix opportun car il s’agit d’une industrie culturelle moins connue que d’autres, mais dont le poids économique n’est pas négligeable. Le sujet est de surcroît dans l’air du temps, a fortiori lorsqu’on connaît l’intérêt de notre nouvelle ministre pour la dimension numérique de la culture. L’industrie des jeux vidéos est emblématique de ce qui caractérise les entreprises françaises : une grande créativité, un écosystème performant, mais un soutien public mal ajusté, un soutien privé trop faible et un défaut de compétitivité qui compromet tout à la fois l’emploi et la place de ce secteur dans notre économie. Pour remédier à cette situation, le rapport ébauche des pistes intéressantes, qui méritent d’être creusées.

Mme Barbara Pompili. Le rapport de Martine Martinel nous sera fort utile lors des discussions à venir autour du futur contrat d’objectifs et de moyens (COM) entre l’État et Radio France. Je regrette moi aussi que le CSA n’ait pas prévu de réaliser un bilan du COM qui s’achève : si Radio France est une belle entreprise, dont on peut être fiers, il est également de notre devoir de contrôler la bonne réalisation des objectifs du COM, qui doivent permettre à cette société de relever les défis auxquels elle doit faire face, au premier rang desquels le défi du numérique.

En matière de maillage territorial, faire le pari de la radio numérique terrestre (RNT) pourrait permettre de résoudre les problèmes de rupture dans la couverture du territoire, notamment pour France Info ou France Bleu. La réserve du nouveau président de Radio France à ce propos, lors de son audition, n’augure rien de bon. Comme la rapporteure, j’espère que le rapport du CSA sur la RNT évaluera ce qui s’est fait à l’étranger et permettra de clarifier la position des pouvoirs publics à ce propos.

Comme la rapporteure également, je suis opposée à l’idée de revenir sur la gratuité d’accès aux podcasts. De même, je tiens à rappeler que nous sommes très attachés à la gratuité de RF8.

Aujourd’hui, les frontières entre ce qui est vu ou écouté sont de plus en plus floues, d’où l’intérêt que suscite l’idée d’avancer vers un système d’enrichissement mutuel des contenus éditoriaux des partenaires de l’audiovisuel public. Développer des offres numériques communes peut déboucher sur de nouvelles potentialités – elles sont énormes –, ouvrir sur de nouveaux usages, bénéfiques pour l’ensemble des supports traditionnels, à condition d’être source d’enrichissement culturel.

Lors de l’audition de Matthieu Gallet, j’avais indiqué que ces évolutions devaient se faire dans le dialogue et la concertation entre les directions et les salariés concernés afin que tout le monde s’y retrouve et partage ce projet collectif. Ce sont les personnels qui font vivre les radios, ne l’oublions pas. Par ailleurs, la question de la « permittence » se doit d’être soulevée afin de trouver des réponses pérennes.

La représentation de la diversité me semble également un point capital, qui devra nécessairement être revu dans le prochain COM.

Enfin, je rejoins les analyses de la rapporteure quant à la nécessaire clarification de l’identité des différentes chaînes.

Le rapport de Jean-Noël Carpentier pose quant à lui la question de la pertinence du modèle de soutien à la presse à l’ère du numérique, question d’autant plus légitime que les rapports suggérant de remettre à plat le système actuel sont nombreux. C’est pourquoi je regrette que nous n’allions pas plus loin dans la réforme structurelle des aides à la presse, qui nécessite d’être menée en prenant en compte les médias dans leur globalité : avec l’arrivée du numérique, les frontières s’étiolent entre presse papier, télévision et radio, ce qui remet en question la pertinence d’un système d’aides en fonction des supports.

Il ne s’agit pas de renier le fait que les besoins et les problèmes ne sont pas les mêmes entre presse papier et presse numérique mais, compte tenu de l’essor du numérique, le ratio actuel pose question : la presse numérique bénéficie de moins de 10 % des aides budgétaires. Or elle mérite autant de considération que la presse papier. En effet, quel que soit le support, les médias concourent au bon fonctionnement de notre démocratie. La pluralité de l’offre en matière d’information est une nécessité démocratique, tout comme sa qualité. Les Écologistes sont donc favorables à une égalité de traitement entre presse écrite et presse électronique. C’est en ce sens que nous avions soutenu l’harmonisation des taux de TVA, levier très intéressant puisque plus vertueux que celui des subventions, qui font toujours l’objet de suspicion de conflits d’intérêts et peuvent poser la question de l’indépendance de la presse. Il serait intéressant de disposer d’un retour sur les effets de cette harmonisation.

Compte tenu de ces éléments, on peut légitimement s’interroger sur les freins qui expliqueraient le retard de la France en matière de développement de l’offre numérique. Dans cette perspective se pose la question du modèle économique de cette presse. Le modèle du « freemium » est-il majoritaire dans les autres pays européens ? Des solutions alternatives ont-elles été développées et fonctionnent-elles ?

Dans un autre registre, pourriez-vous préciser, monsieur le rapporteur, votre position sur d’éventuelles instances de régulation, au regard notamment du respect du principe de la neutralité du Net qui, vous le savez, est un point essentiel pour nous ?

Nous partageons enfin l’idée que le fonds Google comporte des risques et qu’il est urgent de clarifier les choses.

Mme Marie-George Buffet. Nous avons avec l’AFP un outil performant, qui assure le pluralisme et la qualité de l’information, et contribue au rayonnement de notre pays à l’étranger. Or les syndicats sont aujourd’hui inquiets de l’avenir de l’AFP et dénoncent l’opacité dont la direction entoure le futur COM, lequel doit notamment définir les missions d’intérêt général qui seront financées par l’argent public. L’absence d’informations précises sur la nouvelle filiale, qui doit être créée début 2015, est également source d’inquiétude pour les personnels. Je me félicite pour ma part que la proposition de loi du groupe socialiste sur l’AFP et l’avenir de la presse soit inscrite rapidement à notre débat. Elle nécessitera sans doute d’être amendée, mais elle constitue d’ores et déjà une bonne base de départ.

La seconde partie du rapport de Jean-Noël Carpentier est consacrée aux aides à la presse à l’ère numérique. Le rapporteur estime que la question de la suppression progressive des aides directes à la presse doit désormais être posée. Je me félicite qu’il ait été un peu plus mesuré dans sa présentation orale, car ce n’est pas à mon sens la question de la suppression des aides à la presse qui doit être posée, mais celle de la pertinence de leur affectation, en fonction de la complémentarité qui existe entre la presse numérique et la presse papier. Il nous faut sortir de l’immobilisme, recentrer les aides à la presse sur les quotidiens d’information politique et générale, régler le sort des messageries dont il va bien falloir un jour ou l’autre envisager la fusion, repenser l’aide à la rémunération des diffuseurs et l’aide à la promotion de la lecture.

Faudra-t-il enfin attendre longtemps encore l’inscription à l’ordre du jour du projet de loi sur la protection du secret des sources des journalistes ?

M. le président Patrick Bloche. Je redonne la parole à M. Rudy Salles, cette fois en tant que porte-parole du groupe UDI.

M. Rudy Salles. J’ai lu le rapport de Martine Martinel avec un grand intérêt. J’étais administrateur de Radio France lorsque Le Mouv’ a été créé sous la présidence de Michel Boyon. Je m’étais opposé à l’époque à la création de cette radio, dans la foulée des radios privées qui s’étaient développées avec succès à destination des jeunes, estimant que le format retenu n’était pas le bon, ce qui, avec le recul, s’avère exact.

Il faudrait en revanche inciter Radio France à s’intéresser davantage aux régions, car si Le Mouv’ a été un échec, France Bleu a été un succès. Or les stations du réseau ne disposent pas des moyens suffisants pour fournir une bonne information locale. C’est pourtant nécessaire, compte tenu du monopole qu’elles détiennent dans nos régions, les radios privées locales nées dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix ayant disparu ou ayant été absorbées dans des réseaux à dominante musicale. On serait bien inspiré de renforcer les moyens à destination de l’information locale à travers le réseau de France Bleu plutôt que de s’obstiner à entretenir des radios qui ne fonctionnent pas.

À l’occasion de l’avis budgétaire que j’ai rédigé l’an dernier sur la presse quotidienne régionale, j’avais consulté une étude montrant que les jeunes, avant vingt ans, ne s’informent que sur internet, tandis qu’entre vingt et quarante ans, les sources d’information privilégiées sont la radio et la télévision, puis, à partir de quarante ans, la presse écrite. Nous devons donc nous demander si ceux qui n’ont jamais ouvert un journal avant quarante ans le feront un jour.

S’il est normal que la presse écrite investisse de façon importante dans le numérique, elle doit continuer d’investir dans le papier pour pouvoir vendre des journaux, car le numérique ne rapporte rien. Nous ne disposons pas à ce jour de modèle économique à cinq ou dix ans et la presse écrite est aujourd’hui au milieu du gué, confrontée à une baisse considérable du nombre de ses lecteurs : huit cent mille lecteurs perdus en cinq ans, c’est l’équivalent de la diffusion de Ouest-France, premier quotidien régional français. Je tenais à ajouter ce constat à l’excellent rapport présenté par Jean-Noël Carpentier.

M. Marcel Rogemont. Nous nous sommes déjà prononcés contre la suppression inadmissible de la gratuité des podcasts, mais peut-être notre commission pourrait-elle envisager de réitérer son opposition, plus clairement encore, par le biais d’une motion ?

En ce qui concerne les mutations de la presse, n’oublions pas que ce qui permet aujourd’hui aux groupes de presse d’être rentables et de dégager des marges, c’est le papier et non le numérique. N’allons donc pas trop vite, sous peine de déstabiliser totalement le secteur.

Si certains sont tentés de voir en Google un nouveau mécène, il m’apparaît surtout pour l’instant, et c’est bien ce que laisse entendre le rapport, comme le principal prédateur… On peut néanmoins penser que la position adoptée par la France n’a pas contribué à renforcer la position des éditeurs allemands face à Google ; si nous aussi avions adopté une loi, peut-être aurions-nous inversé le rapport de force, même si nous ne pouvons que nous féliciter des 60 millions d’euros concédés par la firme et de la manière dont ils seront dépensés.

M. Rudy Salles a eu raison de rappeler dans son rapport que le jeu vidéo est un bien culturel très important en France : 67 % des Français y jouent, dont 52 % de femmes. C’est aussi une industrie dont le chiffre d’affaires est passé en France de 700 millions d’euros en 2002 à 3 milliards en 2013 et dans laquelle notre pays fait preuve d’un réel dynamisme et d’une vraie capacité d’innovation technologique.

Les pouvoirs publics ont donc mis en œuvre nombre de mécanismes de soutien, notamment via le CNC afin d’accompagner les acteurs du secteur et conforter notre bonne réputation internationale. L’essentiel de ces dispositifs consiste dans un crédit d’impôt et un fonds d’aide au jeu vidéo, auquel doit s’ajouter un fonds d’octroi de prêts participatifs permettant aux entreprises de disposer de fonds propres pour asseoir leur développement.

Nous devons adopter une démarche proactive et adapter sans cesse ces dispositifs de soutien à la concurrence internationale si l’on veut éviter les délocalisations : le jeu vidéo est une industrie qui se déplace très rapidement. Je soutiens totalement le rapporteur lorsqu’il insiste sur cette nécessité. Je rappelle que le CNC a évalué à 8 millions d’euros le montant du crédit d’impôt pour 2015 et qu’en 2013 un euro de crédit versé a rapporté 1,80 euro de recettes fiscales à l’État et entraîné 8 euros de dépenses réalisées dans la filière. Cet outil essentiel à la compétitivité de la filière française doit impérativement être adapté et pérennisé.

M. Patrick Hetzel. L’État a la responsabilité de deux grandes bibliothèques, dont la Bibliothèque nationale de France, véritable fleuron de notre patrimoine, qui contribue au rayonnement de la culture française, grâce notamment à la numérisation de son fonds et au dispositif Gallica. Or le rapport de M. Rudy Salles a nourri mon inquiétude au sujet des travaux de rénovation du quadrilatère Richelieu : seulement 13,2 millions d’euros en crédits de paiement ont été budgétés, ce qui représente moins de 10 % des crédits de paiement nécessaires au projet de rénovation, laquelle doit s’étaler sur cinq à six ans. Je crains donc que nous ne disposions pas du budget permettant de réaliser les travaux dans les délais, ce qui risque de générer des surcoûts, d’autant que le chantier a déjà connu certaines surprises – la découverte d’amiante, par exemple.

M. Michel Pouzol. La sanctuarisation des budgets de la culture est une très bonne nouvelle, aussi bonne peut-être que le fait que le budget de l’éducation nationale redevienne le premier budget de l’État ! J’ai néanmoins été frappé que l’excellent rapport de Martine Martinel mette en évidence, à propos de Radio France, autant de questions similaires à celles que nous avons eu à nous poser lorsque nous évoquions France Télévisions, questions qui rejoignent par ailleurs celles que se pose Jean-Noël Carpentier sur la presse. Dans tous les cas, il s’agit de s’interroger sur l’adaptation de nos modèles historiques à un paysage bouleversé par le numérique et l’émergence de nouveaux usages, mais également sur la pertinence des stratégies mises en œuvre dans ces entreprises.

Face à ces bouleversements et grâce à la sanctuarisation des budgets de la culture, peut-être devons-nous prendre le temps de sortir de l’immédiateté et de réinterroger l’ensemble de nos dispositifs de soutien, pour tenir compte de cette nouvelle donne dans une vision globale de notre politique culturelle. Le temps de l’analyse n’est certes pas le temps budgétaire ni le temps politique, mais c’est peut-être le temps que nous devons prendre si nous voulons redynamiser un modèle qui nous tient tant à cœur et qui est essentiel tant pour l’économie de notre culture que pour son rayonnement. À entendre nos rapporteurs et les orateurs de nos groupes, il semble que ce nouveau monde à naître ne soit pas très loin de nos réflexions. À nous de lui tendre la main pour l’aider à entrer dans le réel et éclairer les chemins à prendre pour fixer les bases de l’acte II de l’exception culturelle.

Mme Dominique Nachury. Je félicite les trois rapporteurs pour leur travail, riches de réflexions et d’interrogations. Si le rapport de Jean-Noël Carpentier fait état de l’utilité du fonds Google et de la satisfaction du plus grand nombre des acteurs du secteur, il en pointe aussi les limites et les risques. Existerait-il d’autres solutions permettant la rémunération des contenus ?

Un mot enfin sur l’infaillibilité de l’AFP qu’a évoquée Michel Françaix. L’AFP a repris une information de la presse locale me concernant, selon laquelle j’avais été victime d’une agression et d’un vol. Or c’était faux… L’AFP n’est donc pas toujours infaillible.

M. le président Patrick Bloche. Il faut au moins convoquer un synode pour traiter de l’infaillibilité…

M. Hervé Féron. Mme Martinel a évoqué la mise en place, en septembre 2014, d’un portail commun de services de radio sur internet nommé direct-radio.fr, regroupant les principales radios privées et celles de Radio France. Grâce à ce portail, les auditeurs peuvent désormais passer d’une radio à l’autre et télécharger les podcasts qui les intéressent. Or, dans le projet de Mathieu Gallet pour Radio France, figure la fin de la gratuité du téléchargement des podcasts, alors même que ces émissions sont en partie déjà financées par la contribution à l’audiovisuel public, par ailleurs en hausse dans le PLF pour 2015 : autant de raisons qui me poussent à considérer que le téléchargement des podcasts doit demeurer gratuit.

D’autant que la gratuité d’accès aux productions audiovisuelles contribue à leur notoriété sur internet et à la valorisation de notre patrimoine culturel public. Nous pouvons prendre exemple sur de nombreuses institutions étrangères, notamment allemandes ou américaines, qui mettent leurs images sur internet en utilisation libre de droit, parfois en plus faible résolution. Êtes-vous favorable à la création d’un grand portail public de l’audiovisuel français à accès gratuit rassemblant diverses ressources, dont les podcasts de Radio France ?

Par ailleurs, le service de proximité de la radio s’incarne dans le réseau des quarante-quatre stations locales de France Bleu réparties sur tout le territoire. Or, comme vous le soulignez dans votre rapport, l’objet de France Bleu est de diffuser une information de proximité et de qualité et de valoriser le patrimoine et la vie culturelle des régions. Parce que ses animateurs radiophoniques sont de vrais professionnels et que l’offre de France Bleu répond à une demande croissante, les chiffres d’audience montent en flèche. Cependant les financements versés à France Bleu sont régulièrement en baisse, ce qui n’est pas sans conséquence en termes de masse salariale – techniciens, animateurs et journalistes. Les moyens en équivalents temps plein ne sont pas suffisants alors que la dynamique du réseau mérite d’être mieux soutenue. Cette volonté politique est nécessaire parce qu’il s’agit du réseau de proximité de la radio publique.

Le Mouv’, quant à lui, coûte 20 millions d’euros par an sans rencontrer la réussite escomptée : aussi est-il légitime de se demander s’il est pertinent d’institutionnaliser la culture alternative. La radio publique peut-elle rencontrer son public en s’appropriant la culture urbaine, qui est, par définition, une culture alternative ? Les jeunes veulent avant tout être acteurs. À l’époque des stations locales, il existait sur Radio France Nancy-Lorraine une émission, « Fréquence Fac », qui donnait la possibilité à de jeunes étudiants d’animer leur émission quotidienne. Elle avait rencontré son public parce qu’elle était pensée pour les jeunes et réalisée par les jeunes, de plus dans la proximité. Cela fonctionnait bien, et cela coûtait infiniment moins cher que le Mouv’ !

M. Michel Herbillon. Je veux féliciter nos trois collègues dont les rapports étaient très intéressants. Et notre réunion de ce matin, monsieur le président, montre combien était pertinente votre proposition, que j’avais soutenue, de nous réunir préalablement à la commission élargie pour entendre nos rapporteurs pour avis et débattre de leurs rapports.

Madame Martinel, je tiens à évoquer la place de la musique sur Radio France, dans le cadre de la rénovation de l’auditorium – l’orchestre de Radio France peut de nouveau s’y produire – et de l’ouverture début janvier 2015 de la Philharmonie de Paris : quelle serait, selon vous, la meilleure organisation des différentes salles de concert de Paris ? Si Paris a longtemps manqué de salles de concert, nous nous trouvons désormais, sinon devant une surabondance, du moins devant la nécessité d’organiser différents concerts dans différentes salles.

Je souhaite par ailleurs souligner la qualité du plaidoyer de M. Françaix pour la presse. Monsieur Carpentier, alors même que notre presse est très aidée, comment expliquer le fait que la France n’ait pas, comme les Britanniques, de journaux mondiaux de référence – je pense notamment au Financial Times. Ne serait-il pas possible de profiter des possibilités offertes en la matière par le numérique ?

Notre collègue Rudy Salles a souligné l’importance, la notoriété et la créativité du secteur français du jeu vidéo, mais également les dangers qui guettent ce secteur pourtant très porteur. Est-ce seulement dû à l’environnement juridique et fiscal ou y a-t-il d’autres raisons ?

Une suggestion pour terminer, monsieur le président : ne serait-il pas possible de changer de temps à autre le tableau qui orne la salle de la Commission des affaires culturelles, en ayant, pour cela, recours au Fonds national d’art contemporain ? Cela nous donnerait l’occasion de connaître un plus grand nombre d’œuvres. Pour Malraux, dois-le rappeler, la culture était « la connaissance du plus grand nombre d’œuvres par le plus grand nombre d’hommes ».

M. le président Patrick Bloche. Je remercie M. Herbillon de son intervention. Nous examinerons sa proposition lors d’une réunion du bureau de la Commission.

Mme Sophie Dessus. L’année dernière, l’Assemblée nationale a adopté différentes dispositions dans le cadre de la loi encadrant les conditions de la vente à distance des livres, visant notamment à interdire la gratuité des frais de port pour éviter que des grands groupes comme Amazon ne contournent la loi Lang sur le prix unique du livre. Il faut savoir que ces grands groupes, non contents d’être responsables de la mort programmée des librairies, se permettent de censurer les éditeurs – je pense au conflit qui a opposé cette année Hachette à Amazon. De plus, Amazon n’hésite pas à frauder le fisc et à violer le droit du travail.

Un an après le vote de ces dispositions législatives, ne conviendrait-il pas d’apporter de nouveau un soutien marqué aux vrais professionnels du livre qui, seuls, ne peuvent lutter contre de tels mastodontes ?

Mme Isabelle Attard. Le rapport de Mme Martinel évoque l’engagement de Radio France d’atteindre le taux de 30 % de femmes invitées lors de ses matinales. Je suis pour ma part très déçue de la faiblesse de cet engagement : derrière quelle excuse la société Radio France peut-elle bien se cacher pour ne pas viser plus haut que ces 30 % ? Sachant que cela fait deux hommes pour une femme, peut-on savoir comment s’opère la sélection ? Pensez-vous comme moi, madame la rapporteure, que le CSA devrait fixer des objectifs plus contraignants en termes de diversité ?

Alors que les sites de Radio France sont moins fréquentés que ceux des autres radios émettant sur le territoire national, le projet du président Mathieu Gallet de faire payer l’accès aux archives des émissions aggravera ce retard : je partage donc la vive opposition de notre rapporteure et de notre collègue Marcel Rogemont à ce projet. Aux États-Unis, toute œuvre réalisée par un agent public dans l’exercice de ses fonctions tombe automatiquement dans le domaine public. Les citoyens finançant déjà par leur impôt la création de ces œuvres, comment justifier un second paiement ?

Je partage également les conclusions du rapport de M. Carpentier sur le fonds Google. Ce n’est pas en rendant la presse financièrement dépendante d’une multinationale américaine que nous améliorerons son sort. Monsieur le rapporteur pour avis, avez-vous des propositions concernant l’avenir de ce fonds ?

Monsieur Salles, vous soulignez dans votre rapport l’importance de maintenir un équilibre économique entre tous les acteurs de la chaîne du livre, sans évoquer toutefois les problèmes posés par les plateformes de vente de livres numériques. Depuis plusieurs mois, Amazon applique des mesures de rétorsion à l’éditeur Hachette pour obtenir des baisses de ses tarifs. Hachette est pris au piège d’Amazon parce que ses lecteurs, clients d’Amazon, sont eux-mêmes dépendants de la plateforme. Alors qu’ils pensent avoir acheté des livres numériques, ils ne peuvent pas les transférer sur un autre système en raison des mesures techniques de protection – les fameuses DRM – mises en place par Amazon. J’ai proposé l’an dernier de supprimer l’application du taux réduit de TVA à ces pseudo-livres : nous suivrez-vous dans cette voie ?

La ministre de la culture et de la communication souhaite maintenir la réponse graduée prévue dans le cadre de la loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet en raison de ses aspects prétendument pédagogiques. Or la seule réussite de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) en la matière a été d’inciter les internautes à quitter les réseaux pair à pair vertueux pour des sites de téléchargement direct tels que Megaupload : les citoyens partageurs ont été poussés dans les bras des réseaux mafieux !

Monsieur le rapporteur pour avis, pensez-vous, comme moi, qu’en cessant la chasse aux partageurs de la culture, nous assécherons, à moindre coût, le financement des sites d’hébergement qui gagnent de l’argent sans le redistribuer aux auteurs ?

M. Christophe Premat. La constante des trois rapports pour avis est celle d’une stratégie numérique impliquant de facto une réorganisation de l’audiovisuel public. Les pratiques d’accès à l’information ont évolué – nous basculerons bientôt vers le Web 3.0 qui multipliera les occasions interactives et participatives.

De plus, les frontières entre les différents médias sont poreuses. On lit sur internet, on peut y écouter l’extrait d’un journal ou regarder des vidéos, sans oublier l’apport du sous-titrage. Au regard de la stratégie numérique, la convergence vers un service universel numérique prend-elle forme ?

Ce service universel numérique impliquerait de réfléchir également à la fiscalité numérique applicable aux moteurs de recherche – question que vous abordez, Monsieur Carpentier, en évoquant la « Lex Google ». Je rejoins mes collègues sur la nécessité de revoir les pratiques d’optimisation fiscale pour éviter toute dépendance par rapport à une multinationale.

Par ailleurs, le rapport « sur la francophonie économique », remis par Jacques Attali au Président de la République le 26 août dernier, regrettait l’absence d’un Netflix à la française, qui bouleverse les pratiques d’accès aux médias. Que pensez-vous d’une telle perspective, qui touche les structures et l’évolution de tous les médias ?

Enfin, je rejoins le souci de Michel Herbillon : pourrions-nous imaginer un titre de presse international, à l’exemple de The Economist, non pas français mais francophone ? Si oui, nous gagnerions à nous rapprocher de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), pour réfléchir aux conditions d’émergence d’un vrai titre de presse international.

Mme Laurence Arribagé. Monsieur Carpentier, le montant des crédits d’aides à la presse s’est élevé en 2015 à un peu plus de 260 millions d’euros. Si de nombreux organes de presse ont besoin de cette aide, qui est vitale pour eux, d’autres appartiennent à de grands groupes qui font des bénéfices et distribuent chaque année des dividendes importants à leurs actionnaires. À titre d’exemple, un grand groupe dont le principal actionnaire est un fonds d’investissement étranger a, en 2013 et 2014, distribué 2 milliards d’euros de dividendes alors qu’il a perçu plusieurs dizaines de millions d’euros d’aides à la presse, notamment d’aide au portage.

Nos concitoyens, qui font face actuellement à une pression fiscale de grande ampleur, peuvent légitimement s’interroger sur la pertinence, la répartition, l’efficience et le ciblage de ces aides mais aussi sur leur attribution à un groupe qui n’en a manifestement pas besoin. S’il n’est pas question de remettre en cause les aides qui permettent de bénéficier d’une presse pluraliste et de qualité, il conviendrait de prendre en considération la nature et les contraintes économiques des organes de presse et de leurs propriétaires, afin que les impôts de nos concitoyens n’alimentent pas les dividendes des actionnaires de groupes privés.

C’est pourquoi je m’interroge sur la possibilité de conditionner la perception définitive de ces aides à la non-distribution de dividendes ou à un plafonnement desdits dividendes à 50 % des aides obtenues, par exemple. Les sommes correspondant au remboursement des aides indues viendraient abonder un fonds d’urgence de la presse destiné à conforter le soutien aux organes de presse en situation précaire ou à allotir, de façon additionnelle et proportionnelle, tous les autres bénéficiaires des aides à la presse.

M. Stéphane Travert. Le rapport de Mme Martinel nous livre une vision très juste de la situation de l’audiovisuel public, en particulier de Radio France, dont la mission de service public est essentielle car elle garantit l’équité, la diversité, la mixité et la culture des valeurs de la République à l’égard de tous nos concitoyens.

Le service public, notamment Radio France, c’est le laboratoire des idées, de l’information, de la musique, de la fiction et de la création. Or vous avez illustré, madame la rapporteure pour avis, à travers de nombreux exemples, la difficulté que rencontre aujourd’hui Radio France pour afficher l’identité précise de chacune de ses stations.

Comment par ailleurs Radio France peut-elle réussir l’entrée dans l’ère du numérique, qui garantit des ressources nouvelles tant sur le plan financier qu’en termes de taux d’audience, toutes stations confondues ? Selon vous, la nouvelle stratégie autour du numérique tarde à porter ses fruits. Comment renforcer l’identité des stations ? Comment les personnels se sont-ils adaptés à la révolution numérique ? Comment concilier l’exigence de service public et la nécessité de modifier l’âge moyen des auditeurs qui, selon le PDG de Radio France, est trop élevé ? Pensez-vous comme lui qu’il faille baisser le niveau d’exigence pour toucher des catégories dites populaires ?

M. Christian Kert. La réservation prioritaire des fréquences en faveur de Radio France soulève un débat régulier lorsque nous rencontrons les représentants de syndicats de producteurs de radio. Si notre excellente rapporteure a rappelé à juste titre que des acteurs contestent aujourd’hui ce droit de préemption de l’État, elle ne nous a pas fait part de son opinion personnelle sur le sujet. S’est-elle forgée une philosophie sur la question, qui nous permettrait d’apporter une réponse homogène aux représentants des syndicats lorsqu’ils nous interrogent sur le sujet ?

M. le président Patrick Bloche. Je remercie le bureau de la Commission d’avoir pris la décision de consacrer un temps de réflexion et de discussion aux rapports pour avis. Je tiens à souligner que nous sommes la seule commission à procéder ainsi.

Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Monsieur Pouzol, la sanctuarisation du budget, c’est normalement pour demain soir… C’est la raison pour laquelle je ne l’ai pas évoquée. Je tiens à ajouter que Radio France n’est pas la société audiovisuelle qui ait le plus pâti de l’austérité budgétaire, même si on l’entend dire parfois.

M. Féron a évoqué la gratuité des téléchargements. Cette question semble faire l’unanimité de la Commission : l’audiovisuel public ne saurait faire payer l’accès aux podcasts, alors que nos concitoyens paient déjà une redevance.

J’ai évoqué à grands traits l’idée d’une offre commune de l’audiovisuel public numérique. Si elle est souhaitée par certains, elle paraît toutefois pour le moment très difficile à mettre en place, d’autant que les différents partenaires ne manifestent pas une réelle volonté de s’associer. Peut-être M. Gallet qui, je l’espère, est conscient, au-delà du boulevard qui s’est ouvert devant lui, des difficultés à venir, s’attachera-t-il à ce travail dans le cadre du nouveau COM.

Le réseau de France Bleu se développe, tout en marquant le pas sur le plan du numérique. Le rapport de la mission Brucy a évoqué un rapprochement entre France Bleu et France 3 – cette idée est à l’étude.

C’est à juste titre, monsieur Herbillon, que vous avez évoqué la place de la musique dans le cadre de la rénovation de l’auditorium de Radio France et de l’ouverture de la Philharmonie de Paris. À ma connaissance, aucune vraie réflexion n’est menée à l’heure actuelle sur le risque d’une possible concurrence, voire d’un télescopage entre ces deux installations prestigieuses et coûteuses. Il faudra veiller à les utiliser et à les gérer dans un double souci de qualité de l’offre musicale et de respect de l’argent public. Il serait dommage que de si belles salles offrent des concerts concurrents ou soient à peine remplies. Je n’ai pas été contactée pour participer à l’élaboration d’une quelconque synergie entre leurs programmations ! Je ne pense pas du reste que M. Gallet ait à pour l’heure son mot à dire sur le sujet.

Madame Attard s’est inquiétée de la faiblesse de la participation des femmes. Il est nécessaire que le CSA s’attache à la présence à l’antenne non seulement des femmes mais également de la diversité au sens plus général. Il est vrai que je me suis penchée plus particulièrement sur la question des femmes. C’est le CSA qui, après études, a fixé ce taux de 30 %. On peut, assurément, s’inquiéter du faible nombre de femmes invitées à l’antenne : plus inquiétante encore me semble être la place réduite des femmes cadres à Radio France. Le COM qui vient à échéance avait prévu de la porter à 35 % : or ce taux n’est pas encore atteint. M. Gallet devra s’employer à tenir les objectifs fixés.

M. Féron a également souhaité la création d’une antenne alternative diffusant de la musique faite par les jeunes et pour les jeunes : je n’y suis pas favorable. Si Radio France veut exister comme radio publique de qualité, toutes ses antennes méritent d’être rajeunies. Il est inutile d’enfermer les jeunes dans une culture dite alternative : ils peuvent s’intéresser à toutes les cultures et les personnes plus âgées aux cultures urbaines.

Monsieur Travert, je n’ai pas eu le sentiment que M. Gallet ait manifesté son souhait de baisser le niveau d’exigence en vue de toucher tous les publics. S’il l’a dit, c’est une erreur. Les publics populaires ont une exigence aussi grande que les publics cultivés. Souvent, on s’interdit à tort des choses auxquelles on ne croit pas être préparé : c’est une vision bien peu démocratique et à courte vue de la culture.

Je suis favorable, monsieur Kert, à l’adoption d’une position homogène sur le droit de préemption. La question est toutefois complexe et les fréquences ne semblent pas toujours préamptées à bon escient. Les tutelles pourraient se préoccuper de ce problème.

M. Jean-Noël Carpentier, rapporteur pour avis. Les évolutions numériques ne peuvent faire l’objet d’aucune solution miracle, d’autant que nous ne disposons pas en la matière d’une boule de cristal. L’évolution du numérique nous bouscule, si bien que nous ne pouvons pas nous projeter avec certitude sur le long terme – c’est déjà difficile à moyen terme.

En revanche, s’agissant de la presse, nous sommes bien au milieu du gué. M. Salles a raison : nous assistons à une baisse inexorable de la diffusion de la lecture sur papier sans disposer pour autant d’un modèle numérique abouti de la presse. Nous ne devons pas opposer le numérique au papier : les supports et les objectifs ne sont pas les mêmes, mais les deux sont de l’écrit, les deux sont de la presse, les deux sont du journalisme. Accompagner leur mutation est loin d’être facile, surtout en période de difficulté économique, mais demeure possible, d’autant que l’information sur internet a besoin de références fortes, qui permettent de guider le lecteur tout en étant susceptibles d’être enrichies par d’autres acteurs de l’information, plus petits.

Monsieur Herbillon, l’absence de titre de référence mondial en français peut s’expliquer en partie par le fait que le français est moins parlé que l’anglais dans le monde. Cela étant, les journaux français s’y préparent. Nous avons auditionné Mme Isabelle André, président-directeur général du Monde Interactif : pour elle, l’une des orientations du Monde est le développement à l’international via le numérique, avec, notamment, la possibilité de publier sur la Toile des éditions du Monde en plusieurs langues.

Les demandes de nos concitoyens sont pleines de contradictions : ils veulent de l’information qui soit à la fois en continu, disponible partout et de qualité. Les éditeurs de presse et les journalistes doivent s’atteler à répondre à cette demande en améliorant encore leur valeur ajoutée. C’est pourquoi je ne crois pas au tout gratuit sur internet : si l’on veut une valeur ajoutée, si l’on veut de la qualité, il faut des moyens, il faut bien payer les journalistes. Les aides de l’État doivent accompagner cette mutation en ne portant plus uniquement sur la presse papier. Un rééquilibrage est nécessaire.

Il faut également améliorer l’éducation aux médias, notamment dans le cadre des programmes scolaires – mon expérience de maire me le confirme – en enseignant le recul citoyen par rapport à la Toile. D’ailleurs, les jeunes générations s’y préparent.

Le fonds Google est le résultat d’un accord pragmatique. Google utilisant les contenus des journaux, les éditeurs de presse arguent fort légitimement qu’ils participent à la croissance du moteur de recherche et donc de ses capacités publicitaires et de ses gains. Il est donc normal à leurs yeux que Google abonde ce fonds. Mais face à ce géant tentaculaire, les éditeurs doivent faire converger leurs intérêts aux plans international et européen. Les éditeurs français, allemands ou suisses ne peuvent pas mener des stratégies différentes.

Le fonds Google nous pose la question de la fiscalité numérique. Google et les autres majors doivent participer au financement de la diffusion de l’information. Nous, parlementaires, devons réfléchir, à côté de l’État, à un modèle permettant de faire participer ces majors. Les éditeurs sont favorables à la proposition de création d’une taxe sur les appareils connectés mais par les temps qui courent, créer une nouvelle taxe, ce n’est pas terrible… De plus, l’instauration d’une telle taxe ne réglerait pas le problème de la participation de Google au financement de la diffusion de l’information.

Je regrette en outre l’opacité totale de l’accord commercial entre Google et les éditeurs, paraphé par les plus hautes autorités de l’État. Certes, un tel accord relève du droit privé des affaires mais nous y avons participé au plan financier. La moindre des choses serait d’en connaître la teneur. Ni la ministre ni nous-mêmes n’en avons eu connaissance, ce qui n’est pas normal.

Je regrette enfin que les éditeurs de presse ne s’entendent pas entre eux pour rationaliser le système de la presse papier. Si je ne crois pas à la disparition totale du papier, je pense en revanche qu’elle diminuera fortement en volume, pour atteindre un niveau que nous ne sommes pas aujourd’hui en mesure de calculer, mais qui sera à coup sûr très bas. Et pour imprimer beaucoup moins de journaux, il faudra évidemment moins d’imprimeries. Les éditeurs devront se mettre d’accord et comprendre que l’argent public ainsi économisé doit servir à mener à bien cette mutation en engageant comme il convient les négociations avec les personnels qui travaillent dans le secteur de la presse papier : les syndicats sont d’ailleurs ouverts à la discussion. Nous attendons de connaître les rapports commandés par Mme la ministre sur le sujet.

M. Rudy Salles, rapporteur pour avis. Alors que la créativité française en matière de jeux vidéo est très importante, les difficultés que rencontre ce secteur sont de plusieurs ordres : instabilité juridique, instabilité fiscale, aide inadaptée ne permettant pas d’assurer la compétitivité du secteur, contrairement aux politiques menées par d’autres pays en ce domaine. Trop de jeunes créateurs, formés dans nos écoles, partent notamment à Montréal pour y travailler. Bien que l’activité de ce secteur explose depuis dix ans, le nombre de ses salariés diminue en France : c’est un paradoxe auquel il convient de mettre fin.

Je ne saurais répondre à la proposition de Mme Isabelle Attard de mettre fin au taux réduit de TVA pour les plateformes de livres numériques. Ce sujet mérite que nous y travaillions de manière approfondie. Nous avons tous la volonté de défendre le livre mais également les plateformes qui le méritent. Nous avons un peu de temps : les revenus de l’édition numérique ne représentent qu’environ 4 % du chiffre d’affaires des éditeurs. Peut-être, monsieur le président, devrions-nous en profiter pour mettre en place un groupe de travail sur le sujet.

Que n’a-t-on entendu sur Hadopi sous la précédente législature, notamment de la part de l’opposition de l’époque ! On pouvait donc s’attendre, depuis deux ans et demi, à de grands changements. La Hadopi devait disparaître et le CSA reprendre ses activités : or, il ne s’est rien passé… et il ne se passe toujours rien ! Il faut savoir que la Hadopi est aujourd’hui exsangue, avec un budget bloqué à 6 millions d’euros. La réponse graduée est à la fois ce qui lui coûte le plus cher et ce qui est le moins efficace – d’aucuns l’avaient prédit lors de l’examen du projet de loi créant cette autorité. En revanche, la Hadopi favorise aussi l’offre légale : il conviendrait de soutenir cette mission importante.

Je vous pose la question, mes chers collègues de la majorité : que voulez-vous faire de la Hadopi ? Si la situation continue, l’institution court à la catastrophe. La faiblesse de son budget lui interdit de remplir les missions que le législateur lui a confiées. Je tiens à rappeler, en effet, que la Hadopi a été créée par la loi et ne peut être supprimée et éventuellement remplacée par un autre dispositif que par l’adoption d’une nouvelle loi. Or je n’ai aucune nouvelle allant en ce sens.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie, monsieur Salles, d’avoir posé une excellente question pour la réunion de la commission élargie : ce sujet pourra être utilement relayé par des députés d’autres groupes parlementaires.

Je vous remercie tous pour la qualité de nos échanges durant cette discussion, particulièrement dense.

Qu’il me soit permis de féliciter en notre nom à tous les trois rapporteurs pour avis, ainsi que leurs administrateurs qui les ont accompagnés dans ce travail approfondi.

III. EXAMEN DES CRÉDITS

À l’issue de l’audition, en commission élargie, de Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, la Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine, pour avis, les crédits pour 2015 de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».

M. le président Patrick Bloche. Avant de procéder au vote des crédits, nous allons examiner l’amendement AC9 de Mme Virginie Duby-Muller.

Mme Virginie Duby-Muller. Lors de son audition par la Commission des affaires culturelles, le 14 octobre dernier, Mme la ministre de la Culture et de la Communication a affirmé : « Je suis attachée à ce que la Hadopi ait des compétences en vertu de la loi, à l’heure actuelle il n’est pas question que celle-ci ne puisse remplir ses missions. Il peut très bien y avoir un dialogue budgétaire ».

Pour mémoire, un montant exceptionnellement bas avait été attribué à l'institution en 2014 en tenant compte de ses disponibilités en fonds de roulement. Or, pour 2015, la dotation envisagée pour la Haute autorité reste gelée à 6 millions d'euros, malgré l'absence de disponibilités équivalentes en fonds de roulement. Ce montant est insuffisant pour lui permettre d’exécuter ses missions. Les dotations publiques ont diminué de 51 % en 4 ans, ce qui est une trajectoire hors norme ; dans le même temps, le budget a diminué de 36 %. La Hadopi a aujourd’hui atteint un plancher en deçà duquel il ne lui est pas possible de fonctionner. Elle ne peut plus, comme l’an dernier, puiser dans son fonds de roulement, car celui-ci doit être préservé afin de respecter les normes comptables et les règles de bonne gestion.

Si la volonté sous-jacente du Gouvernement est de restreindre les missions de la Hadopi à la riposte graduée par l’asphyxie budgétaire, cela se fait au mépris de la loi qui lui confie d’autres missions.

Le dialogue budgétaire proposé par Mme la Ministre s'avère donc indispensable : pour maintenir la conduite de ses missions, la Hadopi doit voir sa dotation augmenter d'au moins 1,5 million d'euros pour 2015.

Tel est l'objet du présent amendement, qui se présente comme un amendement d'appel. Notre volonté n'est pas de réduire les crédits du programme presse, bien au contraire. Mais en vertu de la LOLF, nous étions contraints de compenser toute augmentation de crédits au sein même de la mission pour pouvoir ouvrir le débat. Cela étant fait, je retire l’amendement AC9.

M. Rudy Salles. Je regrette le retrait de cet amendement car j’y suis favorable. Il s’agit là d’un problème grave, sur lequel Mme la ministre ne nous a pas répondu ce soir. C’est la première fois que nous voyons une institution publique traitée de la sorte et je regrette qu’elle ne soit pas restée pour le débat sur cet amendement.

M. le président Patrick Bloche. Je constate que la question de la Hadopi a été évoquée à plusieurs reprises par nos collègues de l’opposition : lors de l’audition de Mme la ministre par la Commission la semaine dernière, lors de la présentation des avis budgétaires, hier, et ce soir, de nouveau, durant cette commission élargie. Cela semble être leur seule préoccupation au sein de ce budget !

Mme la ministre a redit ce soir que la dotation de 6 millions d’euros était suffisante pour que la Hadopi exerce ses missions. Je le pense également.

Je vous fais observer qu’il est tout à fait normal, dans le cadre de la LOLF, que Mme la ministre ne soit pas présente : elle est venue pour être auditionnée dans le cadre de la commission élargie mais n’avait pas à assister à nos travaux au sein de la Commission des affaires culturelles. Si vous souhaitez l’interroger à nouveau sur ce sujet, vous pouvez redéposer un amendement en séance publique mercredi prochain, lors de l’examen de la mission « Médias » : le gouvernement sera alors présent et pourra vous répondre.

M. Rudy Salles. Je demande simplement une clarification. Personne, aujourd’hui, ne sait où va cette institution. On peut être contre son existence mais, dans ce cas, il convient de modifier la loi pour la supprimer ou la remplacer. Et je persiste à considérer que Mme la ministre n’a pas été claire.

M. le président Patrick Bloche. Je vous mets en garde, mes chers collègues : à force de réclamer une clarification, d’aucuns pourraient être tentés de déposer une amendement de suppression des crédits de la Hadopi…

L’amendement AC9 est retiré.

M. le président Patrick Bloche. Je consulte maintenant la commission sur les crédits pour 2015 de la mission « Médias, livre et industries culturelles », ainsi que sur les crédits figurant à l’état D pour les comptes spéciaux « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien » et « Avances à l’audiovisuel public ». Je rappelle que nos trois rapporteurs pour avis ont donné un avis favorable.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », ainsi que des crédits figurant à l’état D pour les comptes spéciaux « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien » et « Avances à l’audiovisuel public ».

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA RAPPORTEURE POUR AVIS

(par ordre chronologique)

Ø Cour des comptes – M. Patrick Lefas, président de la 3e chambre, et M. Emmanuel Glimet, conseiller maître

Ø Syndicat national des radios libres (SNRL) – M. Emmanuel Boutterin, président, et M. Pierre Montel, délégué général

Ø Mission de contrôle général économique et financier de l’audiovisuel public – Mme Françoise Miquel, cheffe de la mission, et Mme Anne Cazala, contrôleuse générale économique et financier

Ø Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) – M. Marc El Nouchi, directeur général, M. Patrice Gélinet et Mme Sylvie Pierre-Brossolette, conseillers, M. Jean-Pierre Camby, conseiller pour les relations avec le Parlement

Ø Institut national de l’audiovisuel (INA) – Mme Agnès Saal, présidente, et M. Jean-Marc Auvray, secrétaire général

Ø Agence nationale des fréquences (ANFR) – M. Gilles Brégant, directeur général, M. Jean-Marc Salmon, directeur général adjoint, et Mme Isabelle Hautbois, chef du service de la communication et des relations institutionnelles

Ø Ministère de la culture et de la communication – Direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) – Mme Laurence Franceschini, directrice générale

Ø France Télévisions – M. Christophe Beaux, administrateur

Ø ARTE France – Mme Véronique Cayla, présidente du directoire, et Mme Anne Durupty, directrice générale

Ø Radio France – M. Mathieu Gallet, président-directeur général, Mme Catherine Sueur, directrice générale déléguée, Mme Bérénice Ravache, secrétaire générale, M. Jean-Pierre Rousseau, directeur de la musique, et M. Joël Ronez, directeur du Mouv’ et des nouveaux médias

Ø Confédération française démocratique du travail de France Télévisions (CFDT Médias) – MM. Patrice Christophe et Thierry Vildary, délégués syndicaux centraux

Ø Confédération générale du travail (CGT) de Radio France – Mme Catherine Hamaide, membre du bureau, secrétaire du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), M. Jean-Marc Lescot, membre du bureau, secrétaire du comité d’entreprise (CE), M. Daniel Bonne, membre du bureau, élu du CE, M. Antoine Denéchère, élu du comité central d’entreprise (CCE), et M. Lionel Thompson, membre du bureau, élu du conseil d’administration

Ø Confédération française démocratique du travail (CFDT) Radio France – Mme Périne Menguy, chargée de réalisation, M. Alain Arnstamm, cadre supérieur technique, M. Claude Bensimon, délégué syndical, M. Renaud Dalmar, chargé de réalisation, et M. Jean-Éric Ziolkowski, délégué central d’entreprise

Ø Syndicat national des journalistes (SNJ) de Radio France – Mme Bleuette Dupin, journaliste à France Bleu Pays de Savoie (Chambéry), M. Thierry Colin, journaliste à France Bleu Sud Lorraine (Nancy), et M. Matthieu Darriet, journaliste à France Bleu Nord (Calais)

Ø Syndicat national des personnels de la communication et de l’audiovisuel – Confédération générale des cadres (SNPCA-CGC) Radio France – M. Alain Neau, secrétaire général, membre du bureau fédéral de la Fédération des médias-CGC, et M. Gilles Le Mouël, représentant de la section syndicale

Ø Confédération générale des cadres (CFE-CGC) France Télévisions – MM. Jacques Larose et Jean-Jacques Cordival, délégués syndicaux, et Mme Aurélie Chesné, déléguée du personnel et membre du CHSCT

Ø Confédération générale du travail (CGT) France Télévisions M. William Maunier, secrétaire général du syndicat national de radiodiffusion et de télévision (SNRT) CGT Audiovisuel, M. Christophe Porro, secrétaire général adjoint du SNRT CGT Audiovisuel, M. Pierre Mouchel, délégué syndical central CGT de France Télévisions, Mme Christine Perrier, déléguée syndicale CGT INA, et Mme Françoise Delignon, déléguée syndicale SNRT CGT France médias monde (FMM)

Ø Syndicat national des journalistes (SNJ) France Télévisions – Mme Dominique Pradalié, secrétaire générale, et M. Didier Givodan, délégué syndical central à France Télévisions

Ø Force ouvrière (FO) Radio France – Mmes Sylviane Saurei et Isabelle Chamois, déléguées syndicales

Ø Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) Radio France – M. Emmanuel Moreau, journaliste à Radio France, M. Guillaume Baldy, chargé de réalisation à Radio France, M. Philippe Ballet, permanent syndical à Radio France, et M. Denis Cheissoux, producteur à France Inter

Ø Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (SIRTI) – M. Philippe Gault, président, M. Tarek Mami, secrétaire national, et M. Kevin Moignoux, chargé de missions pour les relations institutionnelles

Ø France médias monde (FMM) – Mme Marie-Christine Saragosse, présidente, M. Victor Rocaries, directeur général délégué, M. Thierry Delphin, directeur financier, Mme Geneviève Goëtzinger, directrice des relations institutionnelles

Ø France Télévisions – M. Rémy Pflimlin, président-directeur général, M. Patrice Papet, directeur général délégué à l’organisation, aux ressources humaines et au projet d’entreprise, M. Fabrice Lacroix, directeur général délégué aux ressources, et Mme Juliette Rosset-Cailler, relations avec les pouvoirs publics

Ø Mission de contrôle général économique et financier de l’audiovisuel public – France Télévisions – Mme Françoise Miquel, cheffe de mission culture, Mme Anne Cazala, contrôleuse générale, et M. Jean-Charles Aubernon, contrôleur général

Ø Cabinet de Mme la ministre de la culture et de la communication – Mme Aude Accary-Bonery, conseillère audiovisuel

Ø Direction générale du budget – Sous-direction chargée des médias – M. Alexandre Grosse, sous-directeur chargé du secteur des médias

Ø Agence des participations de l’État – Ministère des finances et des comptes publics – Ministère de l’économie, du redressement productif et du numérique – M. Antoine Saintoyant, directeur de participations services et finances

© Assemblée nationale

1 () Les effectifs de l’AEF étaient de 1 793 ETP (permanents et non permanents) en 2010 et de 1 724 ETP en 2011. Ceux de France Médias Monde étaient de 1 703 ETP en 2012 ; ils sont de 1 714 depuis lors.

2 () Les dépenses exceptionnelles de l’État pour RFI puis France Médias Monde ont donc représenté 94 millions d’euros entre 2009 et 2012 (65 millions d’euros au titre des plans de départ volontaires et 28 millions d’euros au titre du déménagement). Entre 2011 et 2015, la baisse de la subvention équivaut, en cumulé, à 52,40 millions d’euros (y compris le CICE).

3 () Délibération du 11 décembre 2013.

4 () Cf. compte rendu de la commission élargie :
http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/cr/