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N
° 2262

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2015
(n° 2234)

TOME I

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

FORÊT

PAR M. André CHASSAIGNE

Député

——

Voir les numéros : 2234, 2260 (annexe 4).

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. UN BUDGET INQUIÉTANT 7

A. LE PROGRAMME 149 CONNAÎT UNE DIMINUTION IMPORTANTE DUE AUX BAISSES DE DOTATIONS ACCORDÉES À L’ONF ET AU CNPF 7

1. La structure du programme 149 7

2. Une diminution conséquente des crédits du programme 149, prolongement d’une longue tendance baissière 8

B. ACTION 11 : GESTION DES FORÊTS PUBLIQUES ET PROTECTION DE LA FORÊT : VERS LA REMISE EN CAUSE DU RÉGIME FORESTIER ? 9

1. La structure de l’action 11 9

2. Vers une remise en cause du régime forestier ? 10

C. ACTION 12 : DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA FILIÈRE ET GESTION DURABLE 12

1. La structure de l’action 12 12

2. L’abandon de la mobilisation du bois en forêt privée ? 12

D. ACTION 13 : FONDS STRATÉGIQUE DE LA FORÊT ET DU BOIS 15

1. Une initiative nécessaire pour remplacer le fonds forestier national 15

2. Un financement modeste au regard des enjeux 16

3. Un financement qui devra être complété 17

II. LA DESSERTE FORESTIÈRE, UN ENJEU CRUCIAL POUR LA MOBILISATION DU BOIS 17

A. L’ENJEU 17

B. LE CONSTAT : UNE ACCESSIBILITÉ INÉGALE MALGRÉ L’EXISTENCE DE CERTAINS DISPOSITIFS DE SOUTIEN 18

1. Une accessibilité inégale 18

2. Un état du réseau qui laisse parfois à désirer 19

3. Les dispositifs de soutien existants 20

C. POURSUIVRE L’EFFORT 21

III. L’ÉTAT DE LA FILIÈRE FORÊT BOIS 21

A. UNE BALANCE COMMERCIALE STRUCTURELLEMENT DÉFICITAIRE 21

B. UN APPAREIL INDUSTRIEL À DÉVELOPPER 22

C. PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT ET NOUVEAUX DÉBOUCHÉS 22

D. L'INFLUENCE IMPORTANTE DE LA CHINE SUR LES MARCHÉS 23

EXAMEN EN COMMISSION 25

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 30

INTRODUCTION

Le régime forestier est la garantie d’une gestion de la forêt publique française dans le souci de l’intérêt général et de l’égalité des territoires. Il assure une péréquation financière entre les régions où l’exploitation forestière est rentable et les autres régions dotées de grandes forêts peu productives.

Il faut considérer les intérêts à long terme de la forêt, loin des arbitrages financiers de courte vue des grands argentiers de Bercy qui en font une simple variable d’ajustement. La forêt française mérite mieux, la forêt française mérite plus.

Or le financement du régime forestier est régulièrement remis en cause, l’État cherchant, dans ce domaine comme pour beaucoup d’autres, à se désengager en faisant supporter les coûts par d’autres acteurs. Cette gestion financière issue des choix politiques nationaux a d’ores et déjà provoqué une perte de confiance entre l’État et les communes forestières.

La proposition d’augmenter de manière disproportionnée – de 50 M€ sur trois ans – les frais de garderie des collectivités, un temps envisagée par le Gouvernement ne saurait constituer une solution satisfaisante. D’abord parce que les communes forestières ont accepté il y a à peine quelques années une augmentation des frais de garderie. Ensuite parce que cela représenterait pour certaines communes dont la forêt est peu productive un fardeau bien difficile à porter, a fortiori à l’heure de la rigueur où l’État diminue les dotations budgétaires aux collectivités. Cela aurait signifié – signifierait à coup sûr si c’est le chemin que devaient prendre les négociations – la remise en question du régime forestier. En effet, beaucoup de communes auraient alors demandé de pouvoir bénéficier d’un « droit d’option », c’est-à-dire à ne pas garder l’ONF comme gestionnaire de leur forêt communale, estimant le coût d’une gestion publique trop élevé.

Mais ce droit d’option aurait entrainé la fin de la péréquation, de la solidarité qui est le propre du régime forestier. Au détriment même des comptes de l’État. Car les premières communes à demander le droit d’option seraient celles qui tirent des recettes des ventes de bois, ce qui déséquilibrerait encore plus les comptes de l’ONF.

En tout état de cause, cette augmentation de la contribution des communes aurait probablement eu un impact négatif sur le budget de l’ONF dans la mesure où elle se serait traduite par une diminution certaine des 70 à 80 M€ de travaux forestiers confiés à l’établissement public chaque année.

Devant la mobilisation des communes indignées, le Gouvernement a accepté de revoir sa copie initiale mais l’ONF doit cependant prendre à sa charge une baisse de dotation de 20 M€.

Faut-il se satisfaire de cette solution ? Certes non. Il s’agit tout au plus d’un simple répit, d’un statu quo, puisqu’il a été décidé d’avancer d’un an, la renégociation du contrat d’objectifs et de performance de l’ONF qui lie l’ONF, les communes forestières et l’État.

Votre rapporteur souligne l’importance primordiale du maillage territorial. Il ne faut pas nécessairement refuser toute discussion sur les contours et l’avenir du régime forestier. Mais il faut être prudent, analyser les conséquences d’un changement de paradigme. De grandes questions doivent être posées : quel doit être le niveau du service universel assuré par l’ONF à toutes les communes ? L’ONF a-t-il encore vocation à effectuer des travaux forestiers ?

Il faut rechercher de nouvelles sources de financement pérennes pour l’ONF. Comme la Cour des comptes, votre rapporteur estime que l’enjeu crucial est d’identifier les actions pouvant faire l’objet de missions d’intérêt général confiées à l’ONF afin de permettre une plus juste rémunération des services rendus par l’ONF et par la forêt, notamment en matière de préservation de la biodiversité, de contribution à la lutte contre le changement climatique, à la qualité de l’eau ou à l’accueil du public. Il faut rémunérer les aménités environnementales rendues par la forêt.

Pour toutes ces raisons, votre rapporteur salue la décision, tardive, du Gouvernement de ne pas avoir essayé de réduire le débat sur le régime forestier à une simple question financière et d’avoir renoncé à faire du projet de loi de finances le véhicule législatif pour une telle réforme. Il sera néanmoins vigilant dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016 ; l’ONF, de ses propres dires, parviendra à absorber la baisse de dotations de 20 M€ en 2015, bien que sa situation financière l’amène déjà à solliciter des autorisations d’engagement à court terme à hauteur de 400 millions d’euros. Ainsi l’office entend revoir son modèle économique qui repose principalement sur les ventes de bois qui ne suffisent pas à compenser la baisse des engagements de l’État.

Votre rapporteur ne peut donc émettre un avis positif sur les crédits du programme 149 qui connaît une baisse qui témoigne du manque de vision du Gouvernement pour cette filière d’avenir qu’est la filière forestière.

I. UN BUDGET INQUIÉTANT

A. LE PROGRAMME 149 CONNAÎT UNE DIMINUTION IMPORTANTE DUE AUX BAISSES DE DOTATIONS ACCORDÉES À L’ONF ET AU CNPF

1. La structure du programme 149

Le programme 149 définit la politique nationale en matière de forêt et de filière bois.

Le programme repose sur trois grands objectifs : produire plus et mieux valoriser les ressources en bois, en développant en particulier la commercialisation ; gérer les forêts de manière durable et mieux préserver la biodiversité ; anticiper le phénomène du réchauffement climatique.

Il prend en compte également la gestion des risques : ses crédits ont visé ainsi à la reconstruction des forêts après les tempêtes de 1999 et 2009 ; ils portent aussi de manière structurelle sur la restauration des terrains en montagne comme sur la défense des forêts contre les incendies.

Les dotations du programme sont réparties en trois actions :

– L’action 11 : « gestion des forêts publiques et protection de la forêt », où sont recherchées la pérennisation des régime et patrimoine forestiers et la prévention des risques ;

– L’action 12 : « développement économique de la filière et gestion durable », qui vise la compétitivité de la filière bois et la gestion durable de la forêt ;

– L’action 13 : « fonds stratégique de la forêt et du bois », qui a pour objectif de soutenir les actions de développement dans le domaine de la forêt et du bois pour répondre aux deux défis du secteur forestier que sont l’adaptation au changement climatique et le développement de la filière bois.

2. Une diminution conséquente des crédits du programme 149, prolongement d’une longue tendance baissière

(en euros)

Les dotations du programme 149 s’élèvent à 279 M€ en AE (au lieu de 321 M€ en 2014) et à 297 M€ en CP (au lieu de 338 M€ en 2014). Cela représente une diminution conséquente du budget forêt de près de 15 %.

Elle s’inscrit, après une seule année 2014 de répit, dans la logique structurelle de baisse des autorisations d’engagement sur le budget forêt depuis dix ans – les rares budgets en augmentation étaient essentiellement dus à la prise en compte, après 2009, des conséquences de la tempête Klaus.

Projet de loi de finances

Autorisations
d’engagement

2003

396 M€

2004

343 M€

2005

312 M€

2006

294 M€

2007

306 M€

2008

305 M€

2009

293 M€

2010

366 M€

2011

360 M€

2012

354 M€

2013

290 M€

B. ACTION 11 : GESTION DES FORÊTS PUBLIQUES ET PROTECTION DE LA FORÊT : VERS LA REMISE EN CAUSE DU RÉGIME FORESTIER ?

1. La structure de l’action 11

Les crédits de l’action 11 (78 % du programme) s’élèvent en 2015 à 218,25 M€ en AE (240,057 M€ en 2014) et à 222,25 M€ en CP (244,06 M€ en 2014). Ils connaissent donc une baisse significative de 10 % en AE et de 11 % en CP.

Cette baisse des crédits est entièrement subie par l’ONF et doit conduire à s’interroger, à terme, sur le financement du régime forestier.

(en euros)

 

PLF 2014

PLF 2015

 

AE

CP

AE

CP

Gestion des forêts publiques et protection de la forêt

240 057 785

244 061 443

218 248 048

222 251 000

ONF - Versement compensateur

194 000 000

194 000 000

171 990 000

171 990 000

ONF – MIG

22 316 232

22 316 232

=

=

DFCI cofinancée

1 836 532

2 840 190

=

=

RTM cofinancée

1 185 916

2 185 916

=

=

DFCI non cofinancée

11 800 000

13 800 000

=

=

RTM non cofinancée

7 500 355

7 500 355

=

=

Acquisition de forêts par l'État ou les collectivités territoriales

925 000

925 000

=

=

Classement et lutte phytosanitaire

693 750

693 750

300 000

300 000

2. Vers une remise en cause du régime forestier ?

L’équilibre du contrat d’objectifs et de performance (COP) conclu entre l’ONF, l’État et la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR), pour la période 2012-2016, établi en 2011, n’a pu être atteint.

Le Président de la République a demandé le 26 juin 2012, de tirer un bilan de la situation financière et sociale de l'ONF à l'issue de la première année du contrat.

Les travaux effectués depuis cette date ont permis d'établir un diagnostic et de décider des actions à mettre en œuvre. Le conseil d'administration a voté une résolution le 27 juin 2013 pour consolider le modèle économique et financier, qui implique des efforts partagés de tous les partenaires. Un effort financier supplémentaire a été consenti par l’État, dans le cadre du PLF 2014 à hauteur de 30 M€ (+ 20 M€ pour le versement compensateur et + 10 M€ pour la subvention d’équilibre). Le budget prévisionnel 2014 a été voté à l’équilibre, à 852,40 M€.

En ce qui concerne les charges, la masse salariale est maîtrisée, à 473 M€, dont une participation au compte d’affectation spéciale (CAS) « Pensions » de 105,60 M€, cette dernière n’étant pas compensée par l’État. Les charges externes s’établissent à 193 M€, ce qui témoigne de la volonté de l’ONF et de ses tutelles de poursuivre le développement du bois façonné et des activités concurrentielles, conformément aux orientations retenues en 2013.

S’agissant des produits, les subventions de l’État sont en hausse, le versement compensateur s’établissant à 140,40 M€, soit +20 M€ par rapport à 2013. Le total des subventions de l’État est de 224 M€, dont 216 M€ apportés par le ministère de l’agriculture. Ces subventions couvrent notamment les missions d’intérêt général à hauteur de 30 M€. Le produit bois s’inscrit à 241 M€.

En lien avec la hausse des charges externes, le chiffre d’affaires travaux et services est en hausse à 167 M€ (contre 151 M€ en 2013).

Mais comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes de juin 2014 sur le modèle économique de l’ONF, le financement de l’ONF est structurellement déficitaire : « l’activité de l’ONF conduit à un résultat net qui varie de - 12,2 millions d’euros à - 0,93 million d’euros sur la période [2012-2014], mais ces chiffres sont peu représentatifs de la réalité dès lors que l’État apporte en fin d’exercice des secours sous diverses formes, comme par exemple à la fin de 2012, 47 M€ de remboursement de TVA sur le versement compensateur ou, encore, une subvention d’équilibre de 45 M€ » (1).

La forêt publique représente 25 % de la superficie des forêts françaises mais contribuent à près de 40 % de la récolte de bois. Elle a donc un rôle économique important. Or, la Cour des comptes montre que si le volume de bois vendus est en hausse par rapport à 2012 il reste inférieur aux cibles du COP. Elle estime que l’ONF doit inciter, en particulier les collectivités, à respecter les objectifs du COP. Il serait alors possible d’augmenter les recettes :

o En forêt domaniale, la cible n'est pas atteinte : 6,37 Mm3 vendus et délivrés pour une cible fixée à 6,63 Mm 3;

o En forêt communale, la cible n'est pas atteinte : 8,26 Mm3 vendus et délivrés pour une cible fixée à 8,72 Mm 3.

L’augmentation massive des recettes de ventes de bois pour rééquilibrer les comptes ne saurait cependant suffire et poserait d’autres problèmes car les origines des difficultés de l’office pointées par le rapport de la Cour des comptes sont les : « incertitudes du marché du bois, baisse des cours, le coût des contraintes environnementales et le développement des réticences sociales à l’exploitation économique de la forêt. » (2)

Le financement du régime forestier repose pour partie sur le produit fluctuant des ventes de bois alors qu’il faudrait mettre un œuvre un financement complémentaire pérenne et ambitieux, à la hauteur des aménités environnementales et sociales fournies par la forêt.

La politique forestière mérite une vision nationale de long terme, au-delà d’un simple contrat de plan. Votre rapporteur ne peut qu’espérer que les négociations du prochain COP permettront d’aboutir à un financement pérenne de ce beau service public de l’ONF et non à son lent démantèlement. L’EPIC ONF ne doit plus être une variable d’ajustement pour les arbitrages financiers.

C. ACTION 12 : DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA FILIÈRE ET GESTION DURABLE

1. La structure de l’action 12

Les crédits de l’action 12 s’élèvent à 50, 4 M€ en AE et 52,6 M€ en CP (18 % des moyens du programme) ; ils poursuivent deux objectifs : le développement économique de la filière forêt-bois et la gestion durable des forêts.

(en euros)

   

PLF 2014

PLF 2015

   

AE

CP

AE

CP

Action 12

Développement économique de la filière et gestion durable

66 447 832

68 652 787

50 404 000

52 609 000

 

Chablis Klaus

41 693 620

42 898 575

=

=

 

Centre National de la Propriété Forestière (CNPF)

16 050 000

16 050 000

0

0

 

Soutien aux organismes, études, recherche

8 704 212

8 704 212

=

=

 

Prêts bonifiés

0

1 000 000

=

=

Le budget de cette action est stable à l’exception des 16 M€ alloués en PLF 2014 au centre national de la propriété forestière (CNPF) qui disparaissent en 2015.

2. L’abandon de la mobilisation du bois en forêt privée ?

Le CNPF est un établissement public à caractère administratif institué par l'ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009 et le décret n° 2010-326 du 22 mars 2010. Il regroupe un échelon central situé à Paris, le service d'utilité forestière « Institut pour le développement forestier » (IDF) et les 18 délégations régionales que sont les centres régionaux de la propriété forestière (CRPF).

L’ACTION DU CNPF

Le CNPF encadre la gestion durable de la forêt privée et son renouvellement :

– un tiers de la forêt privée géré selon un document de gestion durable instruit par le CNPF ;

– participation active au réseau de surveillance de la santé des forêts, prise en compte de la biodiversité dans la gestion courante des forêts ;

– 5 400 expérimentations « forêt privée », outil d’adaptation des forêts au changement climatique

– un transfert de connaissances assuré par le CNPF : information forestière de 600 000 propriétaires forestiers en 2013, formation à la gestion forestière de 1 200 propriétaires forestiers par an, publications…

Le CNPF concourt également à la mobilisation accrue des produits bois et au développement des services rendus par la forêt :

– stratégies locales de développement forestier : animation régionale d’environ 150 plans de développement de massifs en faveur de la mobilisation du bois, du regroupement du foncier et de la gestion forestière, du développement de la desserte pour 1 440 000 ha de forêt et 500 000 propriétaires

– expérimentation, validation et diffusion des innovations de sylvicultures adaptatives et économes et de contractualisation des services écosystémiques rendus par la forêt pour l’eau et le carbone.

Un contrat d'objectifs et de performances (COP) pour la période 2012-2016 a été signé le 27 janvier 2012 par l'État et le CNPF. Si le CNPF a pour mission générale de développer, orienter et améliorer la gestion forestière des forêts privées, son orientation stratégique, à travers ce contrat, consiste à développer la gestion durable en forêt privée en assurant son renouvellement et une mobilisation accrue des produits forestiers.

Le budget du CNPF, qui s’élève à 40 M€, est actuellement structuré de la manière suivante :

- 40 % par le ministère de l’agriculture au titre d’une subvention pour charge de service public ;

- 24 % par une quote-part forestière de la taxe additionnelle sur le foncier non bâti (TATFNB) ;

- 26 % par des subventions et marchés passés avec l’État, les collectivités territoriales et d’autres partenaires ;

- 10 % de ressources propres.

La ponction de 16 M€ prévue par le PLF 2015 sur le fonds de roulement du CNPF remet en partie en cause la capacité de l’établissement public à améliorer la mobilisation du bois, qui est déjà très difficile si l’on en croit les indicateurs de performance.

Le CNPF employait fin 2012 un peu plus de 500 salariés. A minima, la ponction effectuée par le projet de loi de finances pour 2015 va se traduire par une diminution de l’emploi au CNPF. Les estimations recueillies par votre rapporteur lors de ses auditions oscillent entre 7 et 50 personnes, principalement des techniciens. Or, ce sont ces personnes-là qui vont sur le terrain inciter les petits propriétaires forestiers à mobiliser le bois. Il ne faut pas s’imaginer que sans le CNPF, les incitations fiscales suffiraient à mobiliser le bois. C’est l’animation, sur le terrain, qui est essentielle pour informer les petits propriétaires.

INDICATEUR DE PERFORMANCE 
(PROJET ANNUEL DE PERFORMANCE PLF 2015)

Améliorer la mobilisation du bois en améliorant la
connaissance de la ressource et des producteurs, en regroupant les structures foncières, en développant les stratégies locales de développement forestier (SLDF) et en regroupant les producteurs.

Pourcentage de bois récolté en forêt privée par rapport à l'accroissement biologique annuel de la forêt privée (cible de + 16 % fin 2016) :

– Très légère augmentation de la récolte globale estimée à 35,9 Mm3 contre 35,2 Mm3 en 2012 (résultat définitif). Sur ces 35,9 Mm3, la récolte prélevée en forêt privée s’élève à 21,27 Mm3, en légère diminution par rapport à 2011 (- 0,23 Mm3). La baisse de la récolte est liée au contexte économique dégradé dans la construction, principal utilisateur des produits bois et à la fin des récoltes de bois chablis en Aquitaine (s'ajoute dans cette région l'effet dépressif sur le marché de la sortie de bois des stocks arrosés).

Nombre cumulé de SLDF actives (dont les plans de développement de massif – PDM) dont la maîtrise d'œuvre est assurée par le CNPF en surfaces cumulées de forêt privée correspondante (cible de 150 nouvelles pour 600 000 ha fin 2016) :

312 SLDF actives pour plus de 5,9 Mha, dont 73 nouvelles pour près de 970 000 ha, parmi lesquelles 38 PDM. Ces SLDF sont pour 48 % des PDM, 27 % des chartes forestières de territoires et 25 % autres (plans d'approvisionnement territoriaux, schémas de desserte...).

D. ACTION 13 : FONDS STRATÉGIQUE DE LA FORÊT ET DU BOIS

1. Une initiative nécessaire pour remplacer le fonds forestier national

Comme le soulignait déjà votre rapporteur dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2013, « la forêt française souffre de sous-investissement. Le maintien des surfaces boisées occulte les graves difficultés auxquelles est confrontée la filière forestière, évoquées dans la seconde partie du présent rapport. Sans soutien, la filière continuera à péricliter alors même que le bois devient incontournable dans les développements des énergies thermiques et que la forêt est un élément essentiel du maintien de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique. »

La filière avait donc besoin d’un fonds stratégique pour financer des investissements d’avenir. Il faut signaler à cet égard qu’un fonds dédié à la forêt a existé de 1946 à 1999. En effet, après la fin de la seconde guerre mondiale, dans le cadre du Conseil National de la Résistance, il avait été décidé de créer un Fonds forestier national (FFN) destiné à accorder des aides aux reboisements aux particuliers et aux communes afin d’augmenter la production de bois pour la reconstruction du pays et l’industrie de la production papetière. Le FFN fut supprimé en 1999, du fait de la complexité de la perception de ses ressources, et parce qu’il n’était pas conforme à la réglementation communautaire.

Le fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB) créé par le PLF 2014 prend la forme d’une nouvelle action du programme 149, l’action 13. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (LAAF) du 13 octobre 2014 confirme la création de ce fonds destiné aux interventions de développement et d’accompagnement de l’investissement dans la filière, prioritairement à l’amont, en améliorant la gestion durable et multifonctionnelle de la forêt. Un décret, prévu pour le premier trimestre 2015, définira les modalités de gestion du fonds et les règles d'éligibilité de ses financements.

Le regroupement dans un fonds unique de l'ensemble des ressources financières donne de la visibilité et de la cohérence aux interventions financières de l'État, qui feront l'objet d'un suivi par le Conseil supérieur de la forêt et du bois.

Le comité de gouvernance du fonds sera ainsi l’un des comités spécialisés du Conseil supérieur de la forêt et du bois. Il donnera des avis sur la programmation et l’usage du fonds. Les axes stratégiques et les priorités d’utilisation de l’enveloppe (cofinancée en partie par le FEADER) devront être cohérents avec les orientations du Programme national de la forêt et du bois. Il sera également informé et consulté sur les principes de répartition utilisés pour répartir l’enveloppe financière entre les régions. Il lui sera rendu compte de cette répartition régionale et devra pouvoir bénéficier d’une vision globale du financement par le fonds de la filière forêt-bois, y compris les cofinancements qu’il a pu générer auprès des différents fonds structurels européens et auprès des collectivités territoriales.

Le FSFB doit concourir à financer des projets d'investissement, prioritairement en forêt comme spécifié par la LAAF, et des projets de recherche, de développement et d'innovation s'inscrivant dans le cadre des orientations du plan national de la forêt et du bois.

Il s’agit de relancer une politique dynamique de gestion sylvicole favorisant la mobilisation des bois, indispensable pour conforter la compétitivité de notre filière de transformation.

Un volet « reboisement » devra permettre de maintenir et développer le puits de carbone forestier national, en adaptant graduellement nos forêts au changement climatique et en s’appuyant sur une recherche finalisée répondant directement aux besoins des gestionnaires forestiers.

Le volet développement de l’exploitation forestière et de la première transformation pourra comme c’est le cas aujourd’hui s’appuyer sur des prêts participatifs distribués par la banque publique d’investissement (BPI) pour soutenir les investissements.

Le fonds pourra également favoriser les démarches de regroupement pour la mise en gestion des forêts privées.

2. Un financement modeste au regard des enjeux

(en euros)

 

PLF 2014

PLF 2015

 

AE

CP

AE

CP

Fonds stratégique forêt-bois

14 367 234

25 523 190

10 667 000

21 823 000

Investissement forêt et filière bois

10 473 116

21 629 072

7 773 000

18 929 000

Animation, études, recherche et innovation

3 894 118

3 894 118

2 894 000

2 894 000

Les compensations financières aux défrichements s’ajoutent à la dotation du programme 149 du budget de l’État (10,6 M€ en 2015) et viennent abonder le FSFB. En régime de croisière, le niveau d’abondement du fonds est estimé à 18 M€. Cette mesure paraît particulièrement intéressante. Lors d’un défrichement il sera désormais possible de procéder à la compensation en reboisement ou en nature, ce qui permettra d’abonder le fonds.

En outre, les chambres départementales d’agriculture contribueront au financement des actions portées par ce fonds, sous la forme d’une cotisation provenant d’une partie de la taxe perçue sur tous les immeubles classés au cadastre en nature de bois et forêt.

3. Un financement qui devra être complété

Votre rapporteur regrette toutefois, comme tous les professionnels qu’il a entendus, la modestie de l’effort consenti au regard des enjeux de la filière bois. Les professionnels estiment que ce fonds devrait être abondé à hauteur de 150 M€ pour mériter son nom de fonds stratégique, c’est-à-dire pour pouvoir orienter la filière forêt – bois.

La question de la création d’un compte d’affectation spéciale continue d’être posée. Le Gouvernement y est hostile alors que cette solution constituerait une assurance pour le fonds d’un financement pérenne et conséquent.

La piste des surplus des quotas carbones évoqués dans les deux derniers avis par votre rapporteur n’est pas d’actualité étant donné leur très faible niveau actuel. Mais d’autres pistes pourraient être utilement examinées :

- Le fonds chaleur. Il existe un paradoxe actuellement car ce fonds encourage la consommation de biomasse sans se soucier de la disponibilité de la ressource, notamment française. Cela entraîne de l’importation de bois-énergie alors même que la ressource existe en France et qu’elle n’est pas mobilisée. Il faudrait examiner la possibilité de lier le fonds chaleur et la mobilisation du bois français.

- La contribution climat-énergie. Cette « taxe carbone » devrait pouvoir être liée au financement de la forêt, puits carbone par excellence.

II. LA DESSERTE FORESTIÈRE, UN ENJEU CRUCIAL POUR LA MOBILISATION DU BOIS

A. L’ENJEU

Un réseau de desserte, optimisé écologiquement et économiquement à l’échelle d’un massif forestier répond à des usages multiples et complémentaires. Il permet :

– de commercialiser une production de bois en en facilitant la mobilisation,

– de conduire les opérations sylvicoles nécessaires au renouvellement et à l’entretien des peuplements,

– d’assurer la protection rapide et efficace en cas d’incendie,

– d’assurer l’ensemble des autres services demandés par la société, notamment récréatifs.

L’augmentation de la mobilisation des bois en forêt pour répondre aux nouvelles demandes de la société, en particulier en bois - construction et bois - énergie ; est indissociable d’un effort d’investissement sur le réseau de desserte forestière. Les besoins de voirie, nécessaires pour desservir les massifs forestiers et ainsi assurer la bonne exploitation et une valorisation optimale de la ressource en bois ne sont pourtant pas couverts sur l’ensemble du territoire.

B. LE CONSTAT : UNE ACCESSIBILITÉ INÉGALE MALGRÉ L’EXISTENCE DE CERTAINS DISPOSITIFS DE SOUTIEN

1. Une accessibilité inégale

En dépit d'une surface importante (15,6 millions d’hectares en forêt de production), la forêt française constitue une ressource qui ne s'avère pas toujours mobilisable dans des conditions économiques optimales pour l’industrie. Ainsi un tiers de la surface forestière française de production, soit 5 millions d’hectares, est actuellement difficile ou très difficile d'accès. À cet égard, la forêt de montagne représente un enjeu particulièrement important.

En termes de volume, ces surfaces difficilement accessibles représentent 776 millions de m3 soit 31 % du volume total de bois, dont 68 % se situent en forêt privée.

La connaissance du réseau de desserte, tant du point de vue quantitatif que qualitatif reste pour l’heure très partielle.

Pour la forêt domaniale, le réseau de desserte a été entièrement inventorié et une enquête de terrain de grande ampleur, a permis en 2005, à l’occasion du bilan patrimonial, d’en dresser un état qualitatif. Il ressort de cette enquête que la densité moyenne du réseau au niveau national est de 1,8 km de routes (en terrain naturel, empierrées ou revêtues) pour 100 ha de forêt domaniale (3).

2. Un état du réseau qui laisse parfois à désirer

Selon la classification de l’IGN, ce sont 29 % des surfaces et des volumes de bois qui se trouvent en situation d’exploitabilité difficile en forêt domaniale.

L’entretien des voiries est un aspect crucial et coûteux que de nombreuses collectivités, dont les capacités de financement souvent assez faibles ne sont pas capables d’assumer seules. Il est par la suite dommage de constater que des équipements coûteux sont fortement dégradés, voire inutilisables, parce que les besoins financiers pour leur entretien n’ont pas été prévus.

Les moyens nécessaires pour l’amélioration de l’exploitation des forêts sont fixés à partir de la connaissance de l’accessibilité des massifs plutôt qu’à partir de la connaissance du réseau lui-même. Il a été estimé en 2007, que 3 millions d’hectares, sur les 4,9 difficiles ou très difficiles d’accès, justifient des investissements en desserte, le reste des surfaces pouvant être rendues accessibles par la mise en œuvre de moyens de débardage alternatifs (4).

L’utilisation des dessertes peut également être source de conflits. Nombreux sont les exemples de dégradations des routes forestières et pistes lors des chantiers d’exploitation. À cet égard, l’ensemble des professionnels de la filière ne sont pas à blâmer. Les problèmes et utilisations sont souvent le fait de quelques individus qui jettent le discrédit sur l’ensemble de la profession. La mise en place de règlements et procédures devient indispensable dans de nombreux secteurs, notamment ceux dont les jeunes futaies résineuses issues du fonds forestier national arrivent à maturité et dans lesquelles les exploitations et chantiers sont appelés à se multiplier dans les années à venir.

3. Les dispositifs de soutien existants

Le programme 149 contribue à l’amélioration de l’accessibilité et de l’exploitabilité des forêts via différents dispositifs :

– Amélioration de la desserte forestière interne aux massifs : cibler les actions sur la voirie privée communale et sur la desserte des forêts de particuliers ou de leurs groupements.

Entre 2007 et 2013, dans le cadre du programme de développement rural « hexagonal » (PDRH), près de 92 M€ de dépenses publiques (programme 149, collectivités territoriales et financement européen FEADER) ont permis de développer 4 760 km d’infrastructures de desserte (1 850 km de nouvelles routes, 1 330 km de routes mises au gabarit et 1 580 km de nouvelles pistes). Ces investissements ont rendu exploitables 430 000 ha de forêts qui ne l’étaient pas précédemment. Ce dispositif a aussi financé la création de 2 700 places de dépôt et autres travaux annexes (5).

– Investissement pour l’achat de matériel de débardage alternatif : soutenir l’équipement des entreprises d’exploitation et notamment l’achat de matériel de débardage alternatif.

Du fait des réductions budgétaires, ce dispositif n’est plus abondé par le programme 149 depuis 2011. Depuis le début de la programmation PDRH en 2007, il aura seulement permis de soutenir 18 projets d’acquisition de câbles-mâts pour un montant total d’investissement de 1,52 million d’euros.

– Soutien pour la mise en œuvre de techniques de débardage alternatives : dans les forêts de montagne à rôle de protection avéré de 2005 au 31 décembre 2013.

De 2011 à 2013, 100 000 à 250 000 € ont été dépensés chaque année pour ces opérations, permettant de débarder 7 000 à 13 000 m3 par an. Le dispositif a été reconduit au 1er janvier 2014.

– Animation en faveur de la desserte : dans la plupart des plans pluriannuels régionaux de développement forestier.

En 2012, cinq régions ont débuté la mise en œuvre de ce programme d’animation. Ce sont ainsi plus de 690 000 € qui ont été consacrés à cette action, dont 12 % proviennent du programme 149.

Par ailleurs, les plans de développements de massifs mis en œuvre par les CRPF, soutenus dans le cadre du PDRH, se sont révélés être des outils efficaces de mise en œuvre de projets de desserte.

C. POURSUIVRE L’EFFORT

La préservation des voies forestières passe par la concertation des différents acteurs. Ainsi, votre rapporteur a eu connaissance d’un projet intéressant dans le Pays de Guéret.

Les facteurs de réussite étaient les suivants :

- l’implication commune des organismes de la filière forêt bois au premier rang desquels figure l’État et auquel sont associés notamment le CRPF et l’ONF ;

- la concertation en amont avec les utilisateurs qui ne sont que très rarement enclins à appliquer un éventuel règlement qui leur serait appliqué de manière unilatérale et qu’ils n’ont pas pu discuter ;

- l’harmonisation des arrêtés sur un secteur géographiquement cohérent et de taille suffisante. Des arrêtés pris isolément et dont le contenu change d’une commune à l’autre sont difficilement applicables ;

- la communication autour de l’existence du dispositif, même si cela doit se traduire le cas échéant par quelques verbalisations initiales.

La mise en place de ce type d’outils requiert un portage politique fort et nécessite de l’animation, et donc des animateurs dédiés, par exemple des personnels des collectivités, de l’ONF ou des techniciens de CRPF.

III. L’ÉTAT DE LA FILIÈRE FORÊT BOIS

A. UNE BALANCE COMMERCIALE STRUCTURELLEMENT DÉFICITAIRE

La filière forêt-bois comprend les activités de la sylviculture, de l’exploitation forestière, des scieries, de l’industrie papetière, du travail du bois et de l’ameublement en bois. Ces activités s’exercent sur l’ensemble du territoire et représentent environ quarante milliards d’euros de chiffre d’affaires.

Les exportations portent surtout sur des produits bruts, notamment les bois ronds résineux et feuillus achetés plus cher par les importateurs étrangers, mais aussi sur les sciages feuillus et les panneaux de particules ainsi que sur les tonneaux. Les importations, quant à elles, concernent plutôt les biens de consommation comme les meubles, le papier et le carton ainsi que les sciages élaborés (produits techniques).

Le déficit de la filière bois baisse de 8 % en 2013, il est ramené à 5,6 milliards d’euros et retrouve un niveau équivalent au minimum atteint sous l’effet de la crise économique de 2008.

B. UN APPAREIL INDUSTRIEL À DÉVELOPPER

Les scieries françaises sont de taille plus modeste que la plupart de leurs concurrentes européennes et souffrent d’un manque de compétitivité. S’agissant des scieries de résineux, il existe quelques grosses unités mais la production de sciages plus élaborés doit être développée. C’est ainsi que le tiers de la demande en sciages résineux pour le bâtiment est aujourd’hui satisfait par des produits d’importation.

La demande actuelle porte essentiellement sur les sciages résineux. Or, en France la possibilité de récolte supplémentaire en résineux est réduite du fait de la prédominance des peuplements feuillus et d’une mobilisation insuffisante du bois résineux due pour partie aux difficultés de desserte d’une partie du massif situé en montagne. Les scieries résineuses commencent cependant à fournir des produits plus élaborés répondant mieux à la demande du bâtiment et pourraient ainsi regagner des parts de marché.

Inversement les bois feuillus ayant vu leurs débouchés traditionnels (meuble rustique, huisserie, traverses...) se réduire, la production de sciages feuillus est en constante régression ; la demande nationale en grumes est inférieure à l’offre qui s’oriente en partie vers l’exportation. Les efforts pour ouvrir la construction aux bois feuillus pourraient commencer à ouvrir de nouveaux marchés comme celui du bardage extérieur.

L’industrie de l’ameublement est un secteur industriel atomisé, complété par un artisanat puissant. En dépit d’une progression régulière de la demande, les industriels français souffrent face à une distribution concentrée et puissante qui impose sa politique d’achat. Axée sur les prix, cette dernière tend à délaisser la production française au profit d’approvisionnements en provenance de l’étranger. Les industriels français se sont néanmoins engagés, ces dernières années, dans des stratégies d’innovation de différenciation, ou de politiques de marque, autant d’initiatives qui semblent porter leurs fruits.

C. PERSPECTIVES DE DÉVELOPPEMENT ET NOUVEAUX DÉBOUCHÉS

Alors que la récolte de bois commercialisée est estimée à 35,9 millions m3 en 2013, il existe une ressource supplémentaire disponible, tout en respectant les conditions d’une gestion durable. Mobiliser davantage de bois est une nécessité notamment pour préparer les peuplements au changement climatique et suppose une politique de dynamisation de la gestion forestière et de la récolte.

La valorisation énergétique de la biomasse forestière est indispensable pour atteindre les objectifs du plan d'action national en faveur des énergies renouvelables, sachant que le bois devrait contribuer à hauteur de 20 % à l’effort supplémentaire pour respecter les engagements européens de la France en matière d’énergies renouvelables d’ici 2020.

L’augmentation constante de la demande en bois énergie qui résulte de notre politique énergétique doit être parallèle à celle du bois construction de façon à éviter les conflits d’usage : en effet, la récolte de bois d’œuvre s’accompagne de bois de second choix pour l’industrie ou l’énergie. C’est le sens des mesures prises pour développer la construction en neuf et en rénovation.

La polyvalence du bois en tant que matériau brut et les produits dérivés qui peuvent être fabriqués restent à explorer. Au-delà des produits les plus évidents comme le papier, les sciages et les panneaux, le bois offre des possibilités encore très peu exploitées par la chimie verte. Malgré cet intérêt, la plupart des projets sont encore aujourd’hui au stade de la recherche et du développement. La chimie du végétal bénéficie d'un environnement favorable et de soutiens financiers tant au niveau européen que français.

La LAAAF du 13 octobre 2014, dans son titre consacré à la forêt, a créé des outils permettant d'accroître la mobilisation du bois dans le cadre d'une gestion durable, tels que les Groupements d'Intérêt Économique et Environnemental Forestier (GIEEF), dont l'objectif est de permettre la mutualisation de la gestion et de l'exploitation forestière des petites parcelles notamment. Le programme national pour la forêt et le bois, inscrit dans la loi et dont l'élaboration relèvera du Conseil Supérieur de la Forêt et du Bois, a vocation à traiter la question du bois énergie.

En outre le plan national pour l'avenir des industries de transformation du bois a été lancé en octobre 2013. S’appuyant sur 54 mesures concrètes, ce plan rassemble tous les acteurs concernés pour mieux organiser l'ensemble de la filière forêt-bois, faciliter la mobilisation et promouvoir les différents usages.

D. L'INFLUENCE IMPORTANTE DE LA CHINE SUR LES MARCHÉS

La Chine est progressivement devenue le premier atelier bois de la planète. La production forestière chinoise ne suffisant plus à satisfaire la demande, le pays s’est donc tourné massivement vers l’importation, en provenance pour l’essentiel de pays en développement. Ainsi, entre 1997 et 2006, le total des importations chinoises de produits forestiers a plus que triplé en volume et plus que doublé en valeur.

Dans ce contexte, la Chine exerce une influence considérable sur les marchés des produits forestiers. Elle est le premier importateur de bois ronds - 33 % des importations mondiales de bois rond industriel en 2012. Elle est également le premier importateur de sciages et de pâte à papier.

En 2012, la France pèse dans les importations chinoises de bois ronds de feuillus. Elle est en effet le premier fournisseur de chêne, loin devant la Russie et les États-Unis et le deuxième fournisseur de hêtre, derrière l'Allemagne.

Pour reprendre les termes employés par la fédération nationale du bois lors de son audition par votre rapporteur : « La forêt chinoise a été pillée d’abord pour un usage domestique, puis par les industriels chinois. Aujourd’hui elle est « sous cloche », les industriels chinois ne pourront plus y accéder les 30 prochaines années. Une politique fiscale, industrielle et monétaire est installée par la Chine pour trouver dans le monde les volumes de grumes nécessaires à son développement. » Il faudra plusieurs décennies pour que l'augmentation de la surface forestière programmée par le gouvernement chinois (+ 40 millions d'ha entre 2005 et 2020) en subventionnant les investissements forestiers modère les importations de bois et facilite l'approvisionnement en bois des industries chinoises.

Votre rapporteur estime regrettable que l’Union européenne ne cherche pas assez à protéger son industrie et préconise a minima d’étudier les pistes suivantes :

- une politique phytosanitaire plus rigoureuse qui permette de préserver l’environnement et de valoriser les efforts faits dans la forêt européenne ;

- une politique rendant les produits à valeur àjoutée plus attractifs que les grumes sur le marché export ;

- la création d’un outil européen de régulation du marché des grumes.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. André Chassaigne (Forêt), les crédits de la mission « Agriculture, forêt et affaires rurales » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 4 novembre 2014, sur le site internet de l’Assemblée nationale 6).

*

À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Agriculture, forêt et affaires rurales ».

La commission examine l’amendement II- CE 9.

M. Antoine Herth. Cet amendement vise à augmenter les crédits en faveur de l’assurance récolte de 10 millions d’euros.

M. le président François Brottes. Ces crédits ont déjà augmenté de 5 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2015, ce qui doit déjà être salué compte tenu des contraintes qui pèsent sur les finances publiques. Je propose qu’on en reste là pour le moment.

L’amendement II-CE 9 n’est pas adopté.

La commission examine ensuite l’amendement II- CE 10.

M. Antoine Herth. Le fonds d’allègement de charges, qui contribue à la prise en charge de certains aléas, s’élève dans le projet de loi de finances pour 2015 à 1,5 million d’euros ce qui est très bas, surtout si l’on tient compte de la conjoncture liée à l’embargo russe. L’amendement propose d’augmenter les moyens de ce fonds de 6,5 millions d’euros.

M. le président François Brottes. Il faut prendre en compte l’ensemble des soutiens aux agriculteurs. La prise en charge des aléas a évolué avec notamment la montée en puissance des fonds de mutualisation sanitaires et environnementaux qui relèvent des organisations professionnelles agricoles. En outre les crédits alloués au dispositif d'assurance récolte ont été renforcés à travers une dotation complémentaire de 5 millions d'euros par rapport à 2014 (24,3 millions d'euros). Enfin s'agissant de crises spécifiques, vous n'ignorez pas le rôle important que peut jouer l'UE.

Mme Brigitte Allain. Le dispositif destiné aux agriculteurs en difficulté diminue depuis 10 ans. De plus, il n’est pas utilisé car il ne bénéficie pas de mesures d’accompagnement. Il a été abandonné sous la précédente législature.

L’amendement II-CE 10 n’est pas adopté.

La commission examine ensuite l’amendement II- CE 20.

M. Thierry Benoît. Le groupe UDI, constatant que le fonds d’allègement de charges est en diminution, propose d’augmenter ses crédits de 6,5 millions d’euros.

L’amendement II-CE 20 n’est pas adopté.

La commission examine ensuite l’amendement II- CE 24.

M. Serge Letchimy. Cet amendement vise à rétablir 6 millions d’euros en faveur de la diversification agricole et des aides à la filière de la canne à sucre. Il s’agit d’un engagement politique national et local. En effet, la ventilation des investissements d’avenir montre qu’il n’y a aucun fléchage en faveur de la filière de la canne à sucre ou de la diversification actuellement. Je serai très attentif aux propositions du ministre de l’agriculture qui annonce qu’il fera réalimenter les crédits du PIA de 6 millions d’euros envers ces filières.

M. le président François Brottes. Je suis favorable à cet amendement mais pas sur le fait de prendre les crédits sur le programme consacré aux moyens du ministère. Je vous propose néanmoins de maintenir cet amendement pour qu’il puisse faire l’objet d’une discussion en Séance.

L’amendement II-CE 24 est adopté.

La commission examine ensuite l’amendement II- CE 11.

M. Antoine Herth. Mes arguments sont les mêmes que pour mon amendement précédent.

L’amendement II-CE 11 n’est pas adopté.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 32.

La Commission, contrairement à l’avis défavorable de M. André Chassaigne, donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mission « Agriculture, forêt et affaires rurales ».

La commission examine ensuite les amendements à l’article 47 rattaché à la mission.

M. le président François Brottes. Je vous informe que les amendements CE16 et CE17 de M. Benoît ont été déclarés irrecevables au titre de la loi organique relative aux lois de finances car ils concernaient des crédits d’impôt, relevant de fait, de la première partie du PLF.

La commission examine l’amendement II-CE 5.

M. Antoine Herth. Cet amendement vise à supprimer l’article 47 du projet de loi de finances pour 2015 qui supprime des exonérations pour l’emploi de saisonniers agricoles.

M. le président François Brottes. Je ne vais pas revenir sur ce qu’a clairement expliqué le ministre lors de la commission élargie. L’exclusion des entreprises de travaux agricoles et forestiers (ETARF) de ce dispositif d’exonération est en effet justifiée par la volonté de lutter contre la précarisation des emplois dans les ETARF. Il faut rappeler en outre que les ETARF touchent le crédit d’impôt pour la compétitivité et pour l’emploi (CICE) depuis 2013 pour 39 M€, et des allègements des prélèvements obligatoires également prévus par le Pacte, dont elles bénéficieront dès 2015 pour 13 M€.

S’agissant du contrat vendanges, il existe un doute sérieux sur le respect de ce dispositif avec le principe d’égalité entre les assurés au sein du régime agricole de protection sociale. Il est donc proposé de mettre fin à l’exonération du contrat vendanges à compter du 1er janvier 2015. Cette suppression n’a aucune incidence sur le coût du travail pour l’employeur. Je vous rappelle que cet article ne remet pas en cause l'existence du contrat vendanges puisque les viticulteurs pourront continuer à recruter des salariés, y compris des salariés en congés payés ainsi que des agents publics

M. Kléber Mesquida. Je ne suis pas convaincu par les arguments du ministre. Ce dispositif du contrat vendange permet un supplément de salaire pour le salarié pendant 1 mois. Or, le projet de loi de finances diminue ces revenus. De plus, le Conseil constitutionnel n’a jamais été saisi, ni directement, ni par le biais d’une QPC. Nous sommes donc favorables à la suppression de l’article 47 et surtout de son alinéa 5.

M. le président François Brottes. Il y a toujours un recours devant le Conseil constitutionnel pour le PLF.

L’amendement II-CE 5 n’est pas adopté.

La commission examine ensuite l’amendement II-CE 23.

M. Thierry Benoît. L’article exclut les entreprises agricoles du dispositif d’exonération. L’amendement vise à un ajustement pour préserver les sylviculteurs et leur filière.

M. André Chassaigne, rapporteur pour avis. Je ne suis pas favorable sur le fond à ces dispositifs mais je suis favorable à cet amendement car il corrige simplement une erreur de l’article 47.

L’amendement II-CE 23 est adopté.

La commission examine ensuite l’amendement II-CE 19 en discussion commune.

M. Thierry Benoît. Cet amendement concerne le contrat vendanges et se situe dans le même esprit que les précédents.

La commission examine ensuite l’amendement II-CE 6 en discussion commune.

M. Antoine Herth. Cet amendement est un amendement de repli par rapport à mon amendement de suppression de l’article car l’alinéa 5 ne concerne que le contrat vendanges.

La commission examine ensuite l’amendement II-CE 7 identique en discussion commune.

Mme Jeanine Dubié. Le contrat vendanges permet de recruter de la main-d’œuvre en contrat à durée limitée d’un mois. Pour l’exonération de charges salariales, les personnes employées dépendent souvent d’autres régimes, donc il est logique qu’elles puissent ne pas payer de cotisations dont elles ne bénéficieraient pas.

La commission examine ensuite l’amendement II-CE 8 identique en discussion commune.

M. Frédéric Roig. Cette exonération permet d’apporter un complément nécessaire de revenus aux personnes qui ont recours à des contrats vendanges.

Mme Brigitte Allain. D’autres dispositifs ont été généralisés pour d’autres saisonniers. Mais la solidarité nationale doit jouer, en particulier pour les exonérations de prestations salariales. Le dispositif de l’article 47 ne porte pas atteinte à la capacité financière des patrons alors que les salariés participent à la mutuelle sociale agricole.

M. Thierry Benoît. Il est ici question d’une mission temporaire liée aux vendanges, pour une personne recherchant un complément de revenus. L’exonération de cotisations sociales a un intérêt pour un retraité ou un étudiant qui bénéficient du contrat vendanges. Exclure les contrats vendange de la suppression d’exonération est également favorable à la main-d’œuvre locale.

L’amendement II-CE 19 n’est pas adopté.

Les amendements identiques II-CE 6, II-CE 7 et II-CE 8 sont adoptés.

M. le président François Brottes. J’invite donc les membres de la Commission à se prononcer sur l’article 47 rattaché à la mission : « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 47.

La commission examine ensuite l’amendement II-CE 18 portant article additionnel après l’article 47.

M. Thierry Benoît. Cet amendement maintient la déduction fiscale des exploitants agricoles pour leurs investissements liés aux normes environnementales (ICPE, Phytosanitaires, économies d’énergie). Il s’agit d’un ajustement.

M. le président François Brottes. Cet amendement fait doublon avec la ligne consacrée à la modernisation des exploitations du programme 154, qui est en outre dotée dans le PLF pour 2015 de 26 millions supplémentaires par rapport à 2014. On peut considérer que c’est déjà positif.

L’amendement II-CE 18 est retiré.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Ø Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR)

M. Pierre Grandadam, premier vice-président, président des Communes forestières d’Alsace ;

M. Dominique Jarlier, président de l’Union régionale des Communes forestières Auvergne-Limousin ;

M. Yves Lessard, conseiller du président et secrétaire du Groupement de Coopération Communes forestières/ONF.

Ø Centre national de la propriété forestière (CNPF)

M. Thomas Formery, directeur général.

Ø Office national des forêts :

M. Pascal Viné, directeur général ;

M. Patrick Soulé, directeur général adjoint.

Ø Table ronde avec des représentants de la filière bois

Interprofession nationale France Bois Forêt

M. Laurent Denormandie, président ;

France Bois Industries Entreprise (FBIE)

M. Luc Charmasson, président,

Mme Emmanuelle Bour-Poitrinal, déléguée générale.

Fédération Nationale du Bois (FNB)

M. Nicolas Douzain, délégué général ;

Fédération des Forestiers Privés de France (FFPF)

M. Luc Bouvarel, directeur général.

Ø Direction générale des politiques agricole, agro-alimentaire et territoriale (DGPAAT)

M. François Moreau, chef du service de la forêt, de la ruralité et du cheval.

Ø Table ronde réunissant les syndicats de l’ONF

SNUPFEN SOLIDAIRES Forêt

– M. Philippe Berger, Secrétaire général

Syndicat CGT des personnels de droit public de l'ONF (CGT Forêt)

– M. Michel Bénard, agent patrimonial, secrétaire territorial CGT-Forêt d'Ile de France Nord-Ouest,

– M. Roland Roméo, retraité, permanent au local syndical national de la CGT-Forêt.

Fédération Nationale Agroalimentaire et Forestière (FNAF CGT)

– M. Roger Perret, secrétaire fédéral supérieur de la Forêt,

– M. Olivier Suter, délégué syndicale central de l’ONF.

Fédération Générale Agroalimentaire – FGA-CFDT

– Mme Annabelle Foury, secrétaire fédérale FGA-CFDT

– M. Jean François Davignon, délégué syndical central ONF

– M. Frédéric Chiny, délégué syndical ONF et membre du Conseil d'administration de l'ONF.

© Assemblée nationale

1 () Cour des comptes, septième chambre, rapport particulier « office national des forêts : exercices 2009 à 2012 », juin 2014.

2 () Ibid.

3 () Questionnaire budgétaire, programme 149, PLF 2015.

4 () Ibid.

5 () Ibid

6 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/cr/