Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF


N
° 2260

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 21

ÉCONOMIE : COMMERCE EXTÉRIEUR

Rapporteure spéciale : Mme Monique RABIN

Députée

____

SOMMAIRE

___

Pages

CHIFFRES-CLÉS 7

INTRODUCTION 9

PREMIÈRE PARTIE : LA SITUATION DU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS 11

I. UNE ATTENTION MAINTENUE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE SUR LE DÉFICIT COMMERCIAL DE LA FRANCE 11

II. SI LE SOLDE COMMERCIAL DEMEURE DÉFICITAIRE EN 2013, IL SE RÉDUIT NÉANMOINS ET DEVRAIT CONTINUER SUR CETTE TENDANCE EN 2014 ET 2015 13

A. L’ÉVOLUTION DU SOLDE DES ÉCHANGES DE BIENS 13

1. En 2013, le redressement progressif du solde commercial se poursuit 13

2. Le redressement de la balance commerciale hors énergie 13

B. VERS UNE STABILISATION DES PARTS DE MARCHÉ 14

1. L’évolution des parts de marché françaises au niveau mondial 14

2. L’évolution des parts de marché françaises dans l’Union européenne 16

C. LA CONTRIBUTION DU COMMERCE EXTÉRIEUR À LA CROISSANCE DU PIB 17

1. Une contribution de 0,1 point en 2013 17

2. Les perspectives pour 2014 et 2015 18

III. LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DE LA BALANCE COMMERCIALE FRANÇAISE 19

A. AU NIVEAU SECTORIEL 19

B. PAR ZONES GÉOGRAPHIQUES 20

C. UN FAIBLE NOMBRE D’ENTREPRISES EXPORTATRICES 21

DEUXIÈME PARTIE : RENFORCER L’INTERNATIONALISATION DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE : UNE PRIORITÉ GOUVERNEMENTALE AFFIRMÉE 23

I. LA STRATÉGIE POUR REDRESSER LA BALANCE COMMERCIALE 23

A. LA FUSION AFII-UBIFRANCE EST EN MARCHE 23

1. Les enjeux de la fusion 23

2. Les résultats de l’AFII en 2013 et au premier semestre 2014 26

3. Les résultats d’Ubifrance en 2013 et au premier semestre 2014 26

B. LA DIPLOMATIE ÉCONOMIQUE : LE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL AU SERVICE DES ENTREPRISES 27

1. Une direction dédiée aux entreprises 27

2. Des ambassadeurs pour les régions 28

3. Des représentants spéciaux pour les pays cibles 29

C. LES MISSIONS DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DU TRÉSOR ET DU RÉSEAU DES SERVICES ÉCONOMIQUES : UNE EXPERTISE RECONNUE 30

1. Le réseau des services économiques 30

2. La direction générale du Trésor 32

D. LES RÉGIONS, CHEFS DE FILE POUR L’EXPORT 33

II. LES VOIES D’APPROFONDISSEMENT POUR POURSUIVRE L’EFFORT DE RATIONALISATION 34

A. L’ARTICULATION ENTRE LES DIFFÉRENTS ACTEURS DOIT ENCORE ÊTRE AMÉLIORÉE 34

1. Les compétences et les tutelles sont partagées entre plusieurs ministres 35

2. Les moyens du commerce extérieur ne doivent pas être redondants 35

B. LES PERSPECTIVES POUR L’ACTION DES CHAMBRES DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE 38

1. Les missions du réseau des chambres de commerce et d’industrie à l’international 38

2. L’évolution de ses moyens en 2014 39

TROISIÈME PARTIE : COMPÉTITIVITÉ ET ATTRACTIVITÉ SONT INDISSOCIABLES 42

I. LES RÉFORMES STRUCTURELLES POUR FAVORISER LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES ET L’ATTRACTIVITÉ DU TERRITOIRE 42

A. LE PACTE DE RESPONSABILITÉ 43

B. DES MESURES POUR ACCÉLÉRER LE DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES 44

C. QU’EST-CE QU’UN PRODUIT FRANÇAIS ? 45

II. LA FRANCE DANS LES CLASSEMENTS INTERNATIONAUX : DES ATOUTS INDÉNIABLES, CONTRAIREMENT AUX IDÉES REÇUES 46

III. LA NÉCESSAIRE VALORISATION DE L’IMAGE INTERNATIONALE DE LA FRANCE 48

A. LA PROMOTION DE L’IMAGE ÉCONOMIQUE DE LA FRANCE 48

B. LA MARQUE FRANCE 50

EXAMEN EN COMMISSION 51

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE 53

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 68 % des réponses étaient parvenues à la Rapporteure spéciale.

CHIFFRES-CLÉS

Sur le plan budgétaire, le présent rapport spécial commente les crédits de l’action 7 Développement international des entreprises et attractivité du territoire du programme 134 Développement des entreprises et du tourisme de la mission Économie. Pour une vision plus complète de l’effort financier fourni par l’État en faveur du commerce extérieur, sa lecture peut être complétée par celle du :

– rapport spécial (annexe n° 22) de M. Thierry Robert portant, notamment, sur le programme 305 Stratégie économique et fiscale et dont l’action 2 Développement international de l’économie française regroupe les moyens du réseau régalien de la direction générale du Trésor ;

– rapport spécial (annexe n° 25) de M. Victorin Lurel portant sur la mission Engagements financiers de l’État. L’action 4 Développement international des entreprises du programme 114 Appels en garantie de l’État regroupe les crédits consacrés aux garanties à l’exportation gérées par la Coface pour le compte de l’État.

L’estimation des crédits budgétaires consacrés au soutien du commerce extérieur français pour la période 2010-2015 est présentée dans le tableau suivant.

ÉVALUATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES
CONSACRÉS AU SOUTIEN DU COMMERCE EXTÉRIEUR

(en millions d’euros)

2010

2011

2012

2013

2014

PLF 2015

Mission Économie

Programme 134 Développement des entreprises et du tourisme

Action 7 Développement international des entreprises et attractivité du territoire

90,3

102,2

100,47

103,9

97,1

108,8

Action 20 Financement des entreprises : subvention à l’AFII

19,6

13,9(*)

/ (**)

Programme 305 Stratégie économique et fiscale

Action 2 Développement international de l’économie française

110,0

93,6

90,3

93,2

91,9

84,3

Mission Engagements financiers de l’État

Programme 114 Appels en garantie de l’État

Action 4 Développement international de l’économie française

82,5

99,6

116,4

137,6

138,2

149,3

Total

282,8

295,4

307,17

354,3

341,7

342,4

Source : direction générale du Trésor.

(*) Dans le PLF pour 2014, cette action contenait, en plus de cette fraction de la subvention pour charges de service public versée à l’Agence française pour les investissements internationaux (13,9 millions d’euros), une dotation du budget général d’un montant de 25 millions d’euros destinée à abonder les fonds de garantie gérés par Bpifrance financement. S’y ajoutaient également, à hauteur de 5 millions d’euros, des moyens destinés à financer des bonifications accordées à des prêts en faveur des PME (0,1 million d’euros) et la dotation au fonds de garantie DOM (4,7 millions d’euros).

(**) Le projet de fusion d’Ubifrance et de l’AFII en 2015 se traduit par le transfert des crédits de l’AFII de l’action 20 à l’action 7.

En outre, le programme 185 Diplomatie culturelle et d’influence de la mission Action extérieure de l’État – rapport spécial de M. Pascal Terrasse (annexe n° 1) – porte sur les crédits de la politique culturelle et d’influence de la France à l’étranger, dont l’objectif est de conforter et de promouvoir les positions économiques, politiques et culturelles françaises. Ce programme est doté de 745,5 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2015.

Au sein de ce programme, un nouvel objectif a été introduit : « Renforcer le développement international ». Il s’appuie sur deux indicateurs :

– l’appui au commerce extérieur ;

– la promotion de l’attractivité de la France.

L’indicateur « Appui au commerce extérieur » reflète les résultats de l’action de l’État en faveur des entreprises françaises à l’export, à travers deux nouveaux sous-indicateurs « Solde du commerce extérieur » et « Solde du commerce extérieur hors énergie ».

INTRODUCTION

Au premier semestre de cette année, le solde des échanges de biens est passé sous la barre des 30 milliards d’euros, pour la première fois depuis 2010, pour s’établir à – 29,2 milliards d’euros. Après un niveau record en 2011
(– 73,7 milliards d’euros), redressé en 2012 (– 67,4 milliards d’euros), le déficit commercial continue de se résorber en 2013 (– 61,4 milliards d’euros) : c’est une bonne nouvelle, même si le la situation est encore loin d’être satisfaisante.

Le redressement de notre commerce extérieur est l’une des principales opportunités de retour à la croissance pour notre pays. La mobilisation du Gouvernement est totale pour renforcer la compétitivité de nos entreprises et l’attractivité de notre territoire.

Le Président de la République a en effet placé l’attractivité de la France au cœur des priorités de son action. Le 19 octobre dernier, il a ainsi réuni, pour la deuxième fois, une trentaine de dirigeants de multinationales, lors d’un Conseil stratégique de l’attractivité, afin d’annoncer les réformes à venir, notamment dans le cadre du projet de loi de relance de l’activité présenté en conseil des ministres le 22 octobre, et de faire un point sur celles déjà mises en œuvre.

Un certain nombre de grands changements sont en effet intervenus depuis le début de l’année :

– la première « maison de l’international » a été inaugurée par le Président de la République le 12 février dernier aux États-Unis, à San Francisco. Baptisée « French Tech Hub », elle vise à faciliter l’implantation des entreprises françaises sur les grands marchés cibles pour l’offre française ;

– pour la première fois sous la Ve République, le portefeuille du commerce extérieur a été placé sous l’égide du ministre des Affaires étrangères à l’occasion du remaniement d’avril 2014, ce qui répond à une logique d’unification de l’action extérieure de l’État ;

– le Président de la République a annoncé lors du premier Conseil stratégique de l’attractivité le 17 février 2014 la fusion d’Ubifrance (l’agence française pour le développement international des entreprises) et de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII). Le processus a été lancé en juin, sous la direction de Mme Muriel Pénicaud. Cette fusion permettra de renforcer l’efficacité des outils au service du développement international des entreprises et de l’attractivité du territoire. Elle permettra de regrouper dans une même structure les savoir-faire et expertises des deux réseaux, leur capacité à diffuser l’excellence française ainsi que le dynamisme de notre tissu productif, à identifier les besoins des entreprises et à développer les partenariats entre entreprises françaises et étrangères. Elle permettra également d’étendre très largement les moyens de la France consacrés à la promotion de l’attractivité.

Au-delà, ce sont l’ensemble des acteurs au service du développement des entreprises à l’international qu’il convient de rassembler dans une véritable équipe de l’export, lisible, où chacun connaît son rôle, sans redondance de moyens. Car, directement ou indirectement, près de 6 millions d’emplois sont liés à l’exportation, soit 28 % des emplois en France. Les filiales d’entreprises étrangères représentent 2 millions d’emplois.

Alors que le sujet est si important pour notre économie, la Rapporteure spéciale regrette que le commerce extérieur ne soit pas davantage ancré dans l’architecture budgétaire de l’État : il ne constitue pas une mission au sens de la LOLF, pas même un programme. La Rapporteure spéciale commente les seuls crédits d’une action intitulée « Développement international des entreprises et attractivité du territoire », alors même que l’objectif de redressement du solde du commerce extérieur se trouve dans une autre mission, celle de l’action extérieure de l’État. À cet égard également, il serait utile de rendre plus lisible l’action publique.

PREMIÈRE PARTIE :
LA SITUATION DU COMMERCE EXTÉRIEUR FRANÇAIS

I. UNE ATTENTION MAINTENUE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE SUR LE DÉFICIT COMMERCIAL DE LA FRANCE

Depuis fin 2011, la gouvernance économique des pays de la zone euro a été renforcée avec l’adoption d’un ensemble de dispositions législatives destinées à prévenir l’apparition de nouvelles crises économiques et financières dans la zone euro et l’Union européenne (1).

Ces règles prévoient un système d’alerte précoce, établi sur la base d’un tableau de bord comportant un ensemble de dix indicateurs relatifs aux principales sources de déséquilibres macroéconomiques, et dont le suivi fait l’objet d’un rapport annuel (2).

Ce tableau de bord inclut des statistiques relatives à la balance des paiements : il suit l’évolution du solde du compte courant et de la position extérieure nette par rapport au PIB, ainsi que des parts de marché des exportations (3). Des seuils indicatifs ont été établis : ainsi, le solde des transactions courantes doit être compris entre – 4 % et + 6 % du PIB en moyenne au cours des trois dernières années, la position extérieure négative inférieure à 35 %, la perte des parts de marché inférieure à 6 % sur cinq ans.

Le 13 novembre 2013, la Commission européenne a présenté son troisième rapport sur le mécanisme d’alerte (RMA), élaboré conformément à l’article 3 du règlement (UE) n° 1176/2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques. Le RMA est un premier instrument d’analyse contribuant à identifier les États membres qui méritent un examen approfondi afin de déterminer s’ils sont touchés par des déséquilibres ou risquent de l’être.

Pour la troisième fois, la Commission européenne a inscrit la France sur la liste des pays européens pour lesquels elle a considéré qu’une analyse complémentaire de leur situation macroéconomique respective s’imposait. Ces « bilans approfondis » (BA) de la situation spécifique de chaque pays analysent la nature, l’origine et la gravité des évolutions macroéconomiques dans l’État membre concerné, qui constituent ou pourraient entraîner des déséquilibres.

Le bilan approfondi réalisé pour la France, rendu au mois de mars 2014, concluait que celle-ci continuait de connaître des déséquilibres macroéconomiques requérant une surveillance particulière et l’adoption de mesures décisives. En particulier, la détérioration de la balance commerciale et de la compétitivité, d’une part, ainsi que les implications du fort endettement du secteur public, d’autre part, constituaient, selon la Commission, la justification d’une attention maintenue.

Concernant la détérioration du compte courant, la Commission observe que, depuis quelques années, la France enregistre des pertes importantes de ses parts de marchés d’exportation (– 14 % entre 2007 et 2012, ce qui est nettement supérieur au seuil de – 6 %). Ces résultats entraînent une dégradation continue de la balance des comptes courants, qui affichait un déficit de 2,2 % en 2012, par rapport à un excédent de 1 % du PIB dix ans plus tôt. Bien que ce niveau reste inférieur au seuil d’alerte (– 4 %), sa dynamique négative reste préoccupante.

Quant à l’endettement public, il est très élevé (93,5 % du PIB en 2013), soit égal à la moyenne de la zone euro, mais toujours nettement supérieur à la valeur de référence de 60 % retenue par l’article 126 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

Compte tenu du poids de l’économie française et de ses effets d’entraînement potentiels sur la zone euro, la Commission estime qu’il convient de prendre des mesures décisives pour réduire les risques de retombées négatives sur son fonctionnement et sur celui de la zone euro. Elle note « de faibles indices d’un rééquilibrage » pour améliorer la compétitivité de la France.

Les données relatives à l’évolution du compte des transactions courantes sur la période 2012-2015, issues du rapport économique, social et financier pour 2015, sont présentées dans le tableau suivant.

PRINCIPAUX ÉLÉMENTS DU COMPTE DES TRANSACTIONS COURANTES


(soldes, en milliards d’euros courants)

II. SI LE SOLDE COMMERCIAL DEMEURE DÉFICITAIRE EN 2013, IL SE RÉDUIT NÉANMOINS ET DEVRAIT CONTINUER SUR CETTE TENDANCE EN 2014 ET 2015

A. L’ÉVOLUTION DU SOLDE DES ÉCHANGES DE BIENS

1. En 2013, le redressement progressif du solde commercial se poursuit

Après un niveau record en 2011 (– 73,7 milliards d’euros), redressé en 2012 (– 67,4 milliards d’euros), le déficit des échanges de biens continue de se résorber en 2013 (– 61,4 milliards d’euros).

Au premier semestre 2014, le déficit commercial se réduit, à 29,2 milliards d’euros, grâce à la baisse des importations d’énergie, et passe sous la barre des 30 milliards d’euros pour la première fois depuis 2010. Les échanges restent assez peu dynamiques, les importations se repliant de 1,2 % en valeur tandis que les exportations sont quasi stables ( 0,2 %).

D’après le rapport économique, social et financier pour 2015, le solde commercial, fin 2014 et en 2015, s’améliorerait notamment grâce à la baisse des importations d’énergie. Le solde commercial en valeur continuerait de s’améliorer pour s’établir à environ  55 milliards d’euros en 2014, puis à  50 milliards d’euros en 2015. Cette évolution favorable serait principalement due à la réduction d’environ 12 milliards d’euros de la facture énergétique en 2014, en lien avec la baisse du prix du pétrole et du volume des importations d’énergie, puis à l’amélioration du solde déficitaire des produits manufacturés, en diminution d’environ 3 milliards d’euros en 2015. Cette tendance semble confirmée par une enquête, menée par le ministère des Affaires étrangères, auprès d’entreprises sur leurs projets d’exportations en 2015.

2. Le redressement de la balance commerciale hors énergie

Le Gouvernement a pris comme engagement de ramener à l’équilibre le solde de la balance commerciale hors énergie et hors matériel militaire à l’horizon 2017.

Comme le montre le tableau suivant, l’amélioration est nette entre 2011 et 2012, puisque ce solde est passé de – 29 à – 15 milliards d’euros. Il s’établit à
– 13 milliards d’euros en 2013. Les résultats du premier semestre 2014
(– 9 milliards d’euros) montrent une dégradation par rapport au premier semestre 2013 (– 6 milliards d’euros). Dans ces conditions, le déficit commercial hors énergie et biens militaires se dégraderait dans un premier temps à – 19 milliards d’euros en 2014 puis reviendrait à – 16 milliards d’euros en 2015.

ÉVOLUTION DES ÉCHANGES COMMERCIAUX DE LA FRANCE ET
DU COURS DU BARIL DE PÉTROLE DEPUIS 2002


N.B. La valeur des échanges de biens est d’abord évaluée au passage de la frontière française. Cette comptabilisation est dite CAF/FAB : pour les importations, « coût, assurance et fret » compris jusqu’à notre frontière nationale ; pour les exportations, « franco à bord » à notre frontière. Afin d’établir une symétrie dans l’évaluation des deux flux d’échanges, entrant et sortant, et ainsi ne pas biaiser le calcul du solde commercial, les Douanes procèdent ensuite au calcul d’un solde FAB/FAB global, sur l’ensemble des échanges de biens. Cet ajustement ne peut toutefois être réalisé pour chaque catégorie de biens ; les flux par produit (notamment ici le solde énergétique ou hors énergie) ou par pays partenaire restent donc exprimés en données CAF/FAB.

Source : Douanes, direction générale du Trésor, Global Insight.

A. VERS UNE STABILISATION DES PARTS DE MARCHÉ

1. L’évolution des parts de marché françaises au niveau mondial

Selon les dernières données du Fonds monétaire international (FMI) concernant les exportations de marchandises exprimées en dollars, la part de marché mondiale en valeur de la France (4) a été stable en 2013, s’établissant à 3,1 %.

Sur plus longue période, la baisse tendancielle des parts de marché des économies de l’OCDE résulte notamment de l’insertion progressive des pays émergents dans le commerce international, qui réalisent une part croissante des échanges mondiaux. En particulier, l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en décembre 2001 a accéléré le fléchissement des parts de marché des économies développées, amorcé dans les années 1990.

PARTS DE MARCHÉ EN VALEUR AU NIVEAU MONDIAL

(en pourcentage)

(Exportations de biens du pays concerné rapportées aux exportations mondiales en valeur)

Source : DOTS – FMI, calculs DG-Trésor.

L’interprétation de la part de marché en valeur est toutefois rendue délicate par les effets de valorisation. Les variations de la part de marché mondiale en valeur d’un pays reflètent non seulement sa compétitivité intrinsèque et son engagement commercial vers les zones économiquement dynamiques, mais aussi la variation des prix des marchandises échangées. Par exemple, lorsque la monnaie d’un pays se déprécie, sa part de marché en valeur est mécaniquement réduite avant que les effets de compétitivité n’influent positivement sur les quantités exportées.

Il convient donc d’examiner aussi l’évolution de la part de marché en volume, qui n’est pas affectée par la variation des prix des biens et services échangés, et qui offre un diagnostic sur les évolutions des performances des différents pays de l’OCDE et sur la position relative de la France.

En volume (5), la part de marché de la France a reculé depuis 2000. En 2013, la part de marché en volume de la France a baissé légèrement, après deux années où elle a été stable, pour s’établir à 3,5 %.

PARTS DE MARCHÉ EN VOLUME AU NIVEAU MONDIAL

(en pourcentage)

 

(Exportations de biens du pays rapportées aux exportations mondiales en volume)

Source : OCDE, calculs firection générale du Trésor.

Les autres principales économies de l’OCDE affichent des évolutions contrastées :

– l’Allemagne a vu sa part de marché en volume progresser quasi continûment au début des années 2000. Elle baisse en 2013 pour la première fois depuis 2008 et s’établit à 9,0 % ;

– la part de marché de Royaume-Uni confirme sa tendance baissière en 2013 pour s’établir à 4,0 % ;

– l’Italie est affectée par un déclin prononcé de sa part de marché jusqu’en 2009. Cette dernière se stabilise ensuite et baisse légèrement en 2013 pour s’établir à 2,9 % ;

– l’Espagne a réussi à stabiliser sa part de marché en volume depuis 2008, qui s’établit à 2,1 %.

2. L’évolution des parts de marché françaises dans l’Union européenne

Au premier semestre 2014, la part de marché française, en valeur, vis-à-vis de nos partenaires de l’Union européenne augmente légèrement pour s’établir à 9,7 %. Depuis 2000, comparée à nos principaux partenaires européens, la France est, avec le Royaume-Uni, le pays à avoir perdu le plus de parts de marché, alors que l’Allemagne a augmenté sa part de marché d’environ 3 points.

PARTS DE MARCHÉ EN VALEUR VIS-À-VIS DES PARTENAIRES DE L’UE (À 27)

(en pourcentage)

(Exportations en valeur de biens et services du pays rapportées à celles de l’Union Européenne)

Source : Eurostat, calculs direction générale du Trésor.

En volume, la part de marché de la France par rapport à nos partenaires de l’Union européenne a subi une érosion légèrement plus modérée de 2000 jusqu’au premier semestre 2014. Elle s’établit aujourd’hui à 10,1 %.

PARTS DE MARCHÉ EN VOLUME VIS-À-VIS DES PARTENAIRES DE L’UE (À 27)

(en pourcentage)

Exportations en valeur de biens et services du pays rapportées à celles de l’Union Européenne)

Source : Eurostat, calculs direction générale du Trésor.

B. LA CONTRIBUTION DU COMMERCE EXTÉRIEUR À LA CROISSANCE DU PIB

1. Une contribution de 0,1 point en 2013

Le commerce mondial s’est effondré durant l’hiver 2008-2009, conduisant à une contraction très vive des exportations de biens et services. Le commerce extérieur a contribué négativement à la croissance française en 2008 et 2009 à hauteur de – 0,3 point de PIB ces deux années.

La reprise de l’activité en 2010 et en 2011 a entraîné un redémarrage des échanges mondiaux. La demande mondiale adressée à la France a profité de ce dynamisme entraînant un rebond des exportations. Les importations ayant également augmenté avec la reprise de la demande, la contribution du commerce extérieur à la croissance a été quasiment neutre ces deux années.

La contribution positive du commerce extérieur à la croissance de l’activité en 2012 (+ 0,7 point) est liée à de bonnes performances à l’exportation, conjuguées à la baisse des importations dans un contexte d’atonie de la demande intérieure. La demande mondiale adressée à la France a ralenti mais les exportations ont en partie résisté, bénéficiant notamment de la dépréciation de l’euro par rapport à 2011.

En 2013, les échanges extérieurs ont contribué à hauteur de + 0,1 point à la croissance. Les exportations ont bénéficié d’une légère accélération de la demande mondiale (+ 2,0 %, après + 1,0 % en 2012), en provenance notamment de la zone euro, et ont crû à un rythme de + 2,2 % (après + 1,1 % en 2012) en dépit de la forte appréciation de l’euro depuis l’été 2012. Les importations, qui s’étaient contractées en 2012 (– 1,3 %), ont recommencé à progresser (+ 1,7 %).

CONTRIBUTION DU COMMERCE EXTÉRIEUR À L’ÉVOLUTION DU PRODUIT INTÉRIEUR BRUT EN VOLUME AUX PRIX DE L’ANNÉE PRÉCÉDENTE

 

2008

2009

2010

2011

2012

2013

T1 2014

T2 2014

Acquis au T2 2014

Solde extérieur des biens et services (contribution à la croissance du PIB en points)

– 0,3

– 0,3

– 0,1

0,0

0,7

0,1

0,0

– 0,1

0,0

Dont :

 

             

 

Exportations (contribution)

0,1

– 3,1

2,2

1,8

0,3

0,6

0,2

0,0

0,6

Importations (contribution)

– 0,4

2,7

– 2,3

– 1,8

0,4

– 0,5

0,2

0,1

– 0,7

Produit intérieur brut (taux de croissance)

0,2

– 2,9

2,0

2,1

0,3

0,3

0,0

0,0

0,3

Source : Insee Comptes nationaux, Données CVS-CJO pour T1 2014 et T2 2014.

2. Les perspectives pour 2014 et 2015

Au premier semestre 2014, la contribution du commerce extérieur à l’évolution du PIB est neutre. Le dynamisme des échanges observé en début d’année s’est affaibli au deuxième trimestre, pénalisé par une croissance en zone euro plus faible qu’attendue, avec notamment un recul de l’activité en Allemagne et en Italie. Ainsi, les exportations ralentissent au deuxième trimestre (+ 0,1 %, contre + 0,6 % en T1), de même que les importations (+ 0,4 %, contre + 0,8 % en T1).

Selon le rapport économique, social et financier pour 2015, l’accélération de la demande mondiale (+ 5,1 % en moyenne annuelle en 2015, contre + 3,8 % en 2014) soutiendrait la croissance des exportations (+ 4,6 % en 2015, après + 2,8 % en 2014). Si la dégradation de la compétitivité-prix liée à la forte appréciation de l’euro entre l’été 2012 et le printemps continuerait de peser sur les performances à l’export en 2014, ces effets se dissiperaient en 2015 et la compétitivité-prix resterait globalement stable. La compétitivité-prix serait soutenue par les mesures de baisse du coût du travail, portées par le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et le Pacte de responsabilité et de solidarité, mais les efforts entrepris simultanément dans les pays concurrents (déflation salariale en Espagne et modération des rémunérations en Italie, efforts de compression des marges au Royaume-Uni et aux États-Unis) viendraient amoindrir les gains de compétitivité attendus.

Dans un contexte de reprise progressive de la demande intérieure (+ 0,7 % en 2015, contre + 0,4 % en 2014), les importations progresseraient à un rythme plus soutenu (+ 3,6 % en 2015, contre + 2,6 % en 2014). En 2015, la demande extérieure demeurant plus dynamique que la demande intérieure, la croissance des importations (+ 3,6 %) resterait inférieure à celle des exportations. La contribution des échanges extérieurs à la croissance serait de nouveau positive
(+ 0,3 point en 2015), comme le montre le tableau ci-après.

À moyen terme, le commerce extérieur devrait donc soutenir la croissance, grâce au rétablissement progressif du commerce mondial et à la montée en puissance du plan compétitivité.

PRÉVISION DE LA CONTRIBUTION DU COMMERCE EXTÉRIEUR À L’ÉVOLUTION DU PRODUIT INTÉRIEUR BRUT EN VOLUME AUX PRIX DE L’ANNÉE PRÉCÉDENTE

 

2014

2015

Solde extérieur des biens et services (contribution à la croissance du PIB en points)

0,0

0,3

Exportations (contribution)

0,8

1,3

Importations (contribution)

– 0,8

– 1,1

Produit intérieur brut (taux de croissance en %)

0,4

1,0

Source : rapport économique, social et financier pour 2015.

III. LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DE LA BALANCE COMMERCIALE FRANÇAISE

A. AU NIVEAU SECTORIEL

SOLDE COMMERCIAL MOYEN DES PRINCIPAUX SECTEURS,

EN MOYENNE SUR LA PÉRIODE 2009-2013

(en milliards d’euros)


Le graphique ci-dessus donne une vision synthétique des principaux postes d’excédents et de déficits de la France, entre 2009 et 2013 :

– les points forts de la spécialisation française sont les secteurs de l’aéronautique, de la chimie et de l’agroalimentaire ;

– à l’inverse, les déficits sont constants dans les secteurs des produits manufacturés, du textile, des matériels électroniques et informatiques.

B. PAR ZONES GÉOGRAPHIQUES

Le tableau suivant présente l’évolution des exportations de la France vers les grandes régions du monde depuis cinq ans (en valeur).

ÉVOLUTION DES EXPORTATIONS DE LA FRANCE
VERS LES GRANDES RÉGIONS DU MONDE

(en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

Europe

233,9

261,4

282,2

285,0

280,6

Union européenne

214,8

239,6

256,9

257,0

254,6

Zone euro

170,5

190,5

203,7

202,9

200,3

Europe centrale et orientale

0,4

0,4

0,5

0,5

0,5

CEI

6,7

8,0

9,4

11,5

10,3

Afrique

23,3

26,6

28,2

28,2

27,6

Afrique du Nord

13,7

15,4

15,8

16,2

15,6

Afrique sub-saharienne

9,6

11,2

12,4

11,9

12,0

Amériques

29,9

35,4

37,3

42,0

43,1

ALENA

22,1

24,7

26,3

29,4

29,9

Amérique du Sud

7,9

10,6

11,0

12,5

13,2

Asie

30,5

39,6

44,9

52,3

50,1

Chine, Hong-Kong, Taïwan

11,3

16,6

19,8

23,0

21,2

Japon, Corée

7,4

9,1

10,7

11,1

11,0

Asean

8,7

10,3

10,7

14,1

14,3

Proche et Moyen-Orient

18,6

21,2

21,2

20,5

20,2

Proche Orient

2,9

2,7

3,1

3,0

3,0

Moyen-Orient

15,7

18,5

18,0

17,6

17,1

Océanie

2,8

3,5

4,3

3,4

3,6

Divers

2,6

2,3

2,5

2,5

2,0

Ensemble

341,6

390,0

420,6

433,9

427,2

Source : Douanes, données brutes collectées CAF-FAB.

L’Europe (6) demeure de loin le premier partenaire commercial de la France, concentrant les deux tiers de ses échanges en 2013 (67 %). La zone euro représente 80 % des échanges de la France avec l’UE.

Avec 14 % des échanges commerciaux de biens en 2013, l’Asie est la deuxième grande région partenaire commerciale de la France. Elle gagne en outre de l’importance par rapport à 2009, en étant la première région de croissance des échanges commerciaux.

L’Amérique se classe en troisième position en termes de commerce bilatéral français.

Les autres grandes régions ont un poids plus faible au sein du commerce extérieur français, part qui reste stable depuis cinq ans : ensemble l’Afrique, le Proche et Moyen-Orient, et le reste du monde représentent 9,8 % du commerce extérieur français en 2013, contre 9,6 % en 2008.

C. UN FAIBLE NOMBRE D’ENTREPRISES EXPORTATRICES

En France, le nombre d’entreprises exportatrices de biens est faible, rapporté au nombre total d’entreprises françaises (3,9 millions d’entreprises recensées par l’INSEE au 1er janvier 2013 dans le secteur marchand non agricole).

Entre 2009 et 2013, d’après l’estimation des Douanes, le nombre d’exportateurs de biens est passé de 116 000 à 121 505, soit son niveau le plus élevé depuis 2007.

En 2013, le nombre de nouveaux exportateurs (7) a également augmenté
(+ 1,6 % par rapport à 2012, soit 1 600 entreprises), tandis que le nombre d’entreprises cessant d’exporter a augmenté de 6,5 % (soit 3 200 entreprises). On constate que les entreprises travaillant à l’international connaissent une rotation importante d’une année sur l’autre. En 2013, comme en 2012, plus de 30 000 entreprises, soit un quart environ des exportateurs, ont commencé une activité d’exportation, alors qu’un nombre légèrement inférieur l’a arrêtée.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D’EXPORTATEURS DE BIENS, DE NOUVEAUX EXPORTATEURS ET D’ENTREPRISES CESSANT D’EXPORTER, DE 2003 À 2013

Année

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Exportateurs

125 415

124 049

123 594

122 545

121 785

119 473

116 033

118 624

116 299

119 518

121 505

Entrants

34 106

34 084

33 958

33 006

32 373

31 334

29 478

31 899

28 082

29 638

31 202

Sortants

38 120

35 450

34 413

34 055

33 133

33 646

32 918

29 308

30 407

26 631

26 809

Source : Douanes françaises.

En outre, il s’avère que les échanges de biens sont très concentrés sur les plus grandes entreprises, moins de 1 % des opérateurs réalisant plus de 70 % des exportations. À l’autre extrême, près de 90 % des exportateurs de biens sont des PME, mais ils ne représentent que 14 % des exportations.

Les grands groupes français internationalisés ainsi que les filiales françaises de groupes étrangers contribuent à plus des trois quarts des exportations françaises. Les entreprises françaises indépendantes ou faisant partie d’un groupe français non internationalisé représentaient près de 82 % de l’ensemble des entreprises exportatrices en 2013, mais leur part dans les exportations n’a pas dépassé 12 %.

DEUXIÈME PARTIE :
RENFORCER L’INTERNATIONALISATION DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE : UNE PRIORITÉ GOUVERNEMENTALE AFFIRMÉE

I. LA STRATÉGIE POUR REDRESSER LA BALANCE COMMERCIALE

Le plan stratégique en 2012 et 2013 s’est appuyé, d’une part, sur des mesures de ciblage des ETI à fort potentiel et, d’autre part, sur la stratégie dite « pays/secteurs » (qui consistait à promouvoir l’offre commerciale française de quatre secteurs correspondant à la demande mondiale future, dans 47 pays prioritaires). Ces politiques sont poursuivies. La Rapporteure spéciale souhaite donc mettre l’accent, dans cette partie, sur les changements intervenus en 2014.

A. LA FUSION AFII-UBIFRANCE EST EN MARCHE

1. Les enjeux de la fusion

● Une nouvelle agence afin de rendre plus lisible l’action publique

La décision de procéder à la fusion des deux agences (l’Agence française pour les investissements internationaux – AFII – et Ubifrance) a été prise par le Président de la République lors du Conseil supérieur de l’attractivité le 17 février dernier. Elle vise à doter la France d’un outil efficace pour œuvrer à l’internationalisation de son économie, qui repose sur deux facteurs essentiels : l’export et l’attractivité du territoire. L’objectif est de faire de la nouvelle agence l’opérateur public mettant en œuvre les politiques d’internationalisation de l’économie française.

Cette fusion résulte de la prise de conscience de la très forte complémentarité des problématiques export (Ubifrance) et investissement (AFII). Elle permettra d’étendre et d’approfondir les zones de prospection (mutualisation des outils de veille des réseaux d’affaires et des équipes à l’international) et de développer des synergies sur le front des partenariats internationaux entre les entreprises françaises (compétence d’Ubifrance) et les entreprises étrangères (compétence de l’AFII).

Enfin, elle a également pour ambition de se doter d’une agence de communication intégrée qui assurera la promotion du site France et veillera à la cohérence des messages, aujourd’hui très dispersée en fonction des pays et des opérateurs.

Les défis que devra relever l’Agence sont clairement identifiés. En matière d’export, il convient d’augmenter le nombre d’exportateurs dans la durée et d’accélérer le développement à l’international des entreprises à fort potentiel de croissance. Côté attractivité, il faut gagner la compétition que se livrent les grandes capitales et pays européens pour accueillir le plus grand nombre de projets d’investissements créateurs d’emplois, en développant des arguments notamment liés à la présence des services publics et à la formation dans notre pays.

● Les moyens de la fusion

Le processus de fusion a été lancé, au sein des deux agences, en juin 2014, sous la direction de Mme Muriel Pénicaud, ambassadrice déléguée aux investissements internationaux, présidente de l’AFII et directrice générale d’Ubifrance, que la Rapporteure spéciale a auditionnée le 30 septembre dernier, en compagnie de M. Jean-Paul Bacquet, président d’Ubifrance.

L’objectif visé est celui d’une réalisation effective le 1er janvier 2015. Les principales dispositions nécessaires à cette fusion doivent être définies dans une prochaine ordonnance, conformément à l’article 29 du projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises voté en première lecture à l’Assemblée nationale le 22 juillet dernier.

La stratégie, le modèle économique et les modalités d’organisation de la nouvelle agence sont en cours de discussion dans le cadre de chantiers internes aux agences et du groupe de travail avec les tutelles (Économie et Affaires étrangères). Mme Pénicaud a souligné que « la spécificité des métiers sera conservée, tout en renforçant les synergies ».

Elle a insisté en outre sur l’importance, pour la future agence, de « jouer collectif » avec tous les acteurs du secteur : leur partenariat avec BPI France et la Coface en est un exemple. Leurs liens avec les régions et leurs agences de développement seront également renforcés. Un accord est aussi recherché avec les réseaux consulaires pour créer un parcours export pour les PME et donc une meilleure lisibilité des politiques publiques mises en place.

Concernant les moyens financiers de la fusion, lors de leur audition, Mme Pénicaud et M. Bacquet ont clairement indiqué à la Rapporteure spéciale la nécessité de disposer de crédits suffisants pour réussir la fusion : « à l’heure actuelle, la fusion n’est pas financée ». Ils évaluent à « 3,2 millions d’euros en 2014 et 5 millions d’euros en 2015 » les moyens nécessaires à la fusion. La Rapporteure spéciale s’inquiète donc de l’absence à ce jour de ces crédits, qui pourrait être un véritable frein à la réussite de cette fusion. En effet, si le bien-fondé de la fusion est démontré sur le plan stratégique comme financier à moyen terme, celle-ci a un coût, ne serait-ce que pour harmoniser les statuts des personnels et mener la restructuration.

Ce projet de fusion se traduit dans le budget pour 2015 par le transfert des crédits de l’AFII de l’action 20 Financement des entreprises à l’action 7 Développement international des entreprises et attractivité du territoire. La subvention pour charges de service public allouée à la nouvelle agence fusionnée en 2015 s’élève à 108,77 millions d’euros.

Le graphique ci-après présente l’évolution des subventions reçues et des ressources propres des deux agences (recettes commerciales engendrées par la vente de prestations aux entreprises). La Rapporteure spéciale tient à souligner que ces ressources propres n’ont cessé d’augmenter depuis 2009 (+ 45 % en cinq ans) : aujourd’hui, cette part ne peut davantage croître sans remettre en cause la mission de service public de l’opérateur.

SUBVENTIONS ET RESSOURCES PROPRES DES DEUX AGENCES AFII ET UBIFRANCE
DEPUIS 2009

(en millions d’euros)

Dans le même temps, entre 2010 et 2014, l’AFII a vu ses subventions diminuer de 13,8 % (23,8 millions d’euros en 2010 ; 20,5 millions d’euros en 2014). Cette baisse s’inscrit dans un contexte de contraintes particulières, une part importante de l’ensemble des dépenses (environ 40 %) se trouvant en effet exposée aux évolutions de change et du coût de la vie à l’étranger, qui tend à augmenter.

La Rapporteure spéciale souligne donc l’attention qu’il convient de porter au futur modèle économique de l’agence, qui doit exercer une mission de service public à titre prédominant.

L’Autorité de la concurrence a d’ailleurs rappelé, dans un avis du 31 juillet 2014, les règles nationales et européennes encadrant l’intervention des personnes publiques dans la sphère économique, notamment dans le secteur concurrentiel des services de l’accompagnement à l’international.

La prise en charge par une personne publique d’une activité économique est en effet subordonnée à deux conditions : la personne publique doit agir dans la limite de ses compétences et son intervention sur le marché doit se justifier par un intérêt public, qui peut être caractérisé indépendamment de toute défaillance de l’offre privée.

Ainsi, l’Autorité de la concurrence, à propos d’Ubifrance, recommandait que les subventions allouées à l’agence soient exclusivement affectées aux activités de service public sous peine de fausser le libre jeu de la concurrence.

2. Les résultats de l’AFII en 2013 et au premier semestre 2014

Le nombre de projets d’investissement étrangers créateurs d’emplois en France est passé de 550, en moyenne, entre 2000 et 2004, à 650 entre 2005 et 2009, pour approcher des 700 ces trois dernières années.

Le résultat global en 2013 est proche de celui de 2012 : 685 décisions d’investissement, contre 693 en 2012. Le nombre d’emplois annoncés en 2013 est de 29 631, en hausse de 14 % ; près de 7 000 emplois ont été sauvegardés en 2013 par le rachat d’entreprises en difficulté.

Le nombre de projets américains passe de 156 à 122 et celui des projets allemands de 113 à 106. En contrepartie, les investisseurs proviennent d’un plus grand nombre de pays : 44, contre 39 en 2012. Les investissements provenant des pays émergents sont plus nombreux : 77 en 2013, contre 73 en 2012 (soit
11 % du total).

Depuis le début de l’année 2014, plus de 3 500 entreprises étrangères ont été rencontrées par les équipes de l’AFII. Cette prospection a permis de détecter près de 900 nouveaux projets, toutes les zones de prospection connaissant des orientations favorables.

Il convient de noter que 20 000 entreprises étrangères sont présentes en France ; elles représentent 28 % de la R&D et un tiers de l’exportation.

3. Les résultats d’Ubifrance en 2013 et au premier semestre 2014

Le nombre d’accompagnements individuels (8) de PME et ETI n’a cessé de progresser chaque année : de 4 483 en 2011, il est passé à 5 146 en 2012 puis 5 389 en 2013, enregistrant ainsi une croissance de + 20 % en deux ans.

En 2013, Ubifrance a intégré plus de 5 500 jeunes en volontariat international en entreprise (VIE), niveau record depuis la création du dispositif. Près de 8 300 VIE étaient en poste fin juin 2014. La mission d’un VIE est en moyenne de 18 mois. À la fin du premier semestre 2014, plus de 1 800 entreprises ont recours à la formule VIE, dont 1 211 PME. Il convient de rappeler que ce dispositif est fortement porté par l’accompagnement financier des régions.

Par ailleurs, Ubifrance dispose à l’étranger de 85 implantations, dans 70 pays. Ce déploiement nécessitera une évaluation plus précise après une année de fusion.

B. LA DIPLOMATIE ÉCONOMIQUE : LE MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL AU SERVICE DES ENTREPRISES

Le rattachement du commerce extérieur au ministère des Affaires étrangères et du développement international (MAEDI) répond à une logique d’unification de l’action extérieure de l’État sous une autorité commune. La recherche d’efficacité et de cohérence qui sous-tend cette initiative doit permettre, en collaboration avec les services du ministère de l’Économie et des finances, de contribuer au redressement économique du pays, priorité du Gouvernement. Cette vision transversale est partagée par la Rapporteure spéciale.

Aux termes du décret n° 2014-400 du 16 avril 2014 relatif aux attributions du ministre des Affaires étrangères et du développement international, ce dernier « est compétent pour définir et mettre en œuvre la politique du développement international de la France, notamment au titre du commerce extérieur et du tourisme ». En outre, il « prépare et conduit les négociations commerciales internationales, qu’elles soient multilatérales, européennes ou bilatérales et coordonne l’action des services qui concourent à promouvoir les intérêts économiques de la France à l’étranger ».

Ainsi, pour le ministre des Affaires étrangères, M. Laurent Fabius, « la diplomatie économique est une priorité du ministère des Affaires étrangères. Elle constitue désormais une instruction permanente du Quai d’Orsay. »

C’est pourquoi de nouveaux dispositifs ont été créés pour appuyer la diplomatie économique.

1. Une direction dédiée aux entreprises

La direction des entreprises et de l’économie internationale (DEEI) du MAE est récente : elle a été créée en mars 2013 pour répondre à la nouvelle répartition des compétences gouvernementales.

Lors de son audition par la Rapporteure spéciale, sa nouvelle directrice, Mme Agnès Romatet-Espagne, a présenté les trois pôles de son entité, « qui épousent les axes prioritaires du ministre ». La direction rassemble en effet les services compétents du ministère sur les questions d’économie internationale, de soutien aux entreprises et d’attraction des investissements étrangers.

Elle exerce en outre, avec la direction générale du Trésor, la cotutelle des opérateurs du commerce extérieur et l’animation des autres partenaires de l’export (CCI international, CCEF…). Le pilotage et l’animation du réseau pour la diplomatie économique sont hébergés au sein de la DEEI, comme la politique de soutien à l’innovation portée par le MAEDI, le suivi des mesures en faveur de l’attractivité de notre territoire et le suivi des grands investisseurs étrangers.

Plus spécifiquement, la sous-direction des affaires économiques internationales (AEI) est en charge du suivi et de la coordination des affaires globales dans les enceintes économiques internationales (préparation des sommets G7/G8 et G20, suivi des banques régionales, du Club de Paris et des organisations internationales à vocation économique : OCDE, FMI, Banque mondiale, OMPI…). Elle est associée à la définition des sanctions économiques et à la lutte contre les flux financiers illicites. Elle suit les questions commerciales et d’accès aux marchés des entreprises françaises ainsi que les stratégies commerciales des pays tiers. Elle traite des négociations relatives à la gouvernance et à la régulation de l’internet (ICANN etc.). Elle produit, en liaison avec le centre d’analyse, de prévision et de stratégie, des études économiques et contribue à la définition de la stratégie française vis-à-vis des pays émergents.

2. Des ambassadeurs pour les régions

Dans le cadre également de la mise en œuvre de la diplomatie économique, des « ambassadeurs pour les régions » sont mis à disposition des présidents de région qui le souhaitent pour favoriser le rapprochement entre les régions, leurs entreprises – en particulier les PME et les ETI – et le réseau diplomatique.

Pour les collectivités, les ambassadeurs jouent un rôle non institutionnel de conseil, de soutien et de mise en réseau. Ils agissent dans le cadre des plans régionaux d’internationalisation des entreprises (PRIE).

Pour le ministère, ils constituent un contact précieux avec les acteurs des territoires. Ils participent en particulier à l’identification de l’offre internationale des territoires, avec les services de l’État et de la région. L’information qu’ils rassemblent alimente ainsi la connaissance de l’offre dans l’élaboration des plans d’action des ambassades et enrichit la composition des délégations d’entreprises accompagnant les visites officielles.

Ils participent par ailleurs à l’accueil des investisseurs internationaux dans les régions et accompagnent le développement international des pôles de compétitivité de leurs régions en contribuant à leur rapprochement avec les clusters étrangers grâce au réseau des conseillers scientifiques.

Cette initiative est complémentaire des dispositifs existants. Les ambassadeurs en région sont fonctionnellement rattachés à la DEEI, dont les équipes sont à leur disposition pour le bon accomplissement de leur mission.

La Rapporteure spéciale estime, d’après les auditions qu’elle a menées, que les résultats de ce dispositif sont mitigés selon les régions, en fonction de la structuration déjà établie de leur offre export. M. Eric Guilloteau, conseiller régional délégué à l’export de la région Aquitaine, lui a par exemple indiqué que « la nomination de M. Henry Zipper de Fabiani, ambassadeur en région Aquitaine, était intervenue après la mise en place du PRIE de la région, dans un contexte où l’écosystème export était déjà organisé ». Son rôle est donc de fait circonscrit à celui de relais auprès des ministères des Affaires étrangères et de l’Économie. Une évaluation de ce dispositif des ambassadeurs pour les régions devra être faite dans un objectif de bonne utilisation des moyens publics.

3. Des représentants spéciaux pour les pays cibles

Des « représentants spéciaux », personnalités à l’expertise reconnue, ont été nommés pour accompagner la relation économique avec certains pays ou régions-clés (Algérie, Balkans, Brésil, Chine, Émirats arabes unis, Inde, Japon, Mexique, Russie), appuyer les efforts de l’État en soutien aux entreprises, dans les secteurs où ils peuvent apporter la plus forte valeur ajoutée et assurer la mobilisation complète des acteurs publics et privés en faveur des intérêts français.

À ce jour, dix représentants spéciaux ont été nommés :

– Mme Martine Aubry : Chine

– M. Jean-Pierre Chevènement : Russie

– M. Philippe Faure : Mexique

– M. Paul Hermelin : Inde

– M. Jean-Charles Naouri : Brésil

– M. Louis Schweitzer : Japon

– M. Pierre Sellal : Émirats arabes unis

– M. Jean-Pierre Raffarin : Algérie

– M. Alain Richard : Balkans

– M. Philippe Varin : ASEAN

Leur mise en place récente ne permet pas pour le moment de commenter l’efficacité de cette mesure.

C. LES MISSIONS DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DU TRÉSOR ET DU RÉSEAU DES SERVICES ÉCONOMIQUES : UNE EXPERTISE RECONNUE

1. Le réseau des services économiques

L’année 2012 a clos la dévolution, engagée dès 2008, des activités commerciales des anciennes missions économiques à l’opérateur Ubifrance, à savoir les services directs aux entreprises, en particulier aux PME, en matière de prospection économique à l’étranger et d’aide à l’export.

Les services économiques conservent toutefois l’ensemble de leurs compétences, dites régaliennes, qui s’inscrivent dans l’étendue des missions des ministères économiques et financiers ainsi que du ministère des Affaires étrangères et du développement international, pour le commerce extérieur, depuis les décrets d’attribution des ministères d’avril 2014, confirmés en septembre et en octobre.

À ce titre, l’article 1er du décret n° 2002-772 du 3 mai 2002, modifié en 2010, dispose que la mission des services économiques est « d’informer l’État, les collectivités publiques et les entreprises sur l’ensemble des questions économiques, commerciales et financières internationales, de défendre et promouvoir dans ces domaines les intérêts de la France à l’étranger et de contribuer en particulier à l’exercice des missions de la direction générale du Trésor. Ces services peuvent également être sollicités, en tant que de besoin, par les autres administrations publiques ayant vocation à connaître de questions à caractère économique. »

Au 1er juillet 2014, le réseau international de la direction générale du Trésor comprend 133 implantations immobilières dans 112 pays. Le réseau des services économiques constitue le réseau de l’État à l’étranger ayant consenti, ces dernières années, les efforts les plus importants, en proportion de sa taille et en sus des conséquences de la dévolution des activités commerciales à Ubifrance, en termes de réduction d’effectifs (– 19 % entre 2008 et 2012) et de rationalisation des dépenses (– 25 % des crédits de fonctionnement courant entre 2009 et 2014). Depuis fin 2010, le nombre d’implantations à l’étranger a diminué de 18 % et des redéploiements ont été réalisés, au plan fonctionnel en faveur du soutien aux entreprises, comme au plan géographique vers les zones prioritaires pour notre économie, avec notamment la mise en place de formules de représentation allégée.

En résumé, l’action quotidienne des services économiques comprend principalement :

– le soutien régalien aux entreprises accédant à des marchés tiers ;

– le suivi de la situation économique et des questions financières des pays sur lesquels ils ont compétence ;

– l’analyse de l’environnement et du climat des affaires ;

– l’analyse des positions adoptées par ces pays dans les instances internationales et dans le cadre des négociations multilatérales ;

– le relais des positions de la France dans ces négociations ;

– la veille stratégique sur les grandes questions européennes ;

– le pilotage des acteurs économiques de leur pays de résidence afin de veiller à la cohérence des actions menées localement en matière de soutien aux entreprises françaises et d’attractivité de la France.

Les relations entre les services économiques et les ambassadeurs n’ont pas changé de nature à la suite de l’instauration de la nouvelle architecture gouvernementale. Le chef du service économique (CSE) demeure le conseiller économique de l’ambassadeur. La coordination des actions menées au sein de l’ambassade s’articule, depuis 2013, autour du plan d’action de l’ambassade. Ce plan comporte un volet économique défini conjointement avec le CSE en cohérence avec la lettre de mission qui lui est adressée par le directeur général du Trésor.

Sous l’autorité de l’ambassadeur et en lien avec les services centraux de la direction générale du Trésor, le CSE exerce également le rôle de pilote des acteurs économiques locaux. Dans ce cadre, il coordonne notamment l’activité des bureaux locaux d’Ubifrance et de l’AFII en application d’un modus operandi tripartite conclu en octobre 2013.

Comme l’ont souligné M. Thomas Courbe, secrétaire général de la direction générale du Trésor et M. Éric David, sous-directeur en charge du financement international des entreprises, que la Rapporteure spéciale a auditionnés, un bon équilibre a été trouvé dans l’articulation des missions des CSE avec celles des ambassadeurs. « Au niveau local, ce modus operandi fonctionne bien. La compétence et l’expertise du réseau des services économiques en font un réseau reconnu et apprécié des partenaires. » La Rapporteure spéciale lève ainsi les doutes émis l’an passé.

2. La direction générale du Trésor

Le nouveau partage de compétences entre les ministres, issu des décrets d’attribution d’avril 2014, impacte davantage les services centraux que les services économiques, qui travaillaient déjà en lien direct avec l’ambassadeur et les services de l’ambassade.

Dans ce contexte, la direction générale du Trésor et le ministère des Affaires étrangères et du développement international (MAEDI), sous la coordination de son secrétaire général, ont élaboré une convention dont l’objectif est précisément de définir un cadre de travail clair, utilisant au mieux les compétences de chacun et tirant profit des méthodes de travail existantes. Cette convention a été signée le 15 juillet 2014.

La convention distingue plusieurs lignes de partage de compétence entre la direction générale du Trésor et les services du MAEDI, en fonction des compétences de services. À titre d’exemples :

– pour la préparation des dossiers d’entretiens et de déplacements des ministres, la direction générale du Trésor fournit au MAEDI une contribution intégrant l’ensemble des éléments de sa compétence en matière de commerce extérieur, en lien avec les services économiques ;

– la direction générale du Trésor conserve une compétence exclusive sur les dossiers liés aux négociations commerciales (OMC, Union européenne, etc.) et les dossiers relatifs au financement export ;

– le MAEDI est désormais en charge des secteurs prioritaires et des familles prioritaires à l’export.

Concernant ces familles prioritaires à l’export, Mme Agnès Romatet-Espagne, directrice des entreprises et de l’économie internationale au MAEDI, que la Rapporteure spéciale a auditionnée, a en effet indiqué que leur pilotage était désormais rattaché à la mission de soutien aux secteurs stratégiques, qui dépend de sa direction.

La stratégie des « familles » prioritaires de produits à l’export mise en place en 2012 vise à mieux structurer et positionner l’offre française en termes de pays et de secteurs porteurs, de manière à répondre aux évolutions anticipées de la demande mondiale tout en capitalisant sur les atouts sectoriels existants de la France à l’international. Elle s’appuie sur la mobilisation de l’ensemble des acteurs du soutien export, ainsi que sur le dispositif des « fédérateurs » désignés en 2013, pour chacune des quatre « familles » identifiées : « mieux se nourrir », « mieux se soigner », « mieux vivre en ville » et « mieux communiquer ». Leur mission reste double : identification de projets dans les pays cibles et meilleure structuration de l’offre. Les premières actions conduites ont été particulièrement significatives dans les secteurs de la santé et de la ville durable, avec le suivi d’une vingtaine de projets et la création d’une marque ombrelle de la ville durable, Vivapolis.

Afin de mieux cibler les démarches entreprises et de gagner en efficacité, les fédérateurs vont désormais resserrer leur action sur un nombre beaucoup plus limité de pays : cinq pays de priorité de premier rang et cinq de deuxième rang. Ces pays sont en cours d’identification avec les services de l’État.

Par ailleurs, l’approche va être étendue à d’autres familles de produits, en particulier les industries créatives et culturelles et le voyage/tourisme.

D. LES RÉGIONS, CHEFS DE FILE POUR L’EXPORT

Conformément aux engagements pris en septembre 2012 par le Président de la République, les ministres du Commerce extérieur ont confirmé le rôle de pilote des régions pour l’export, de manière logique, le chef-de-filât de celles-ci étant confirmé en matière de développement économique.

À ce titre, les régions ont développé des plans régionaux pour l’internationalisation des entreprises (PRIE). Ces plans stratégiques visent à renforcer l’action des conseils régionaux en matière d’identification et d’accompagnement des entreprises à l’export. Ils fixent des priorités d’actions, des objectifs et des calendriers notamment en termes de secteurs et de pays prioritaires (en reprenant les grands objectifs gouvernementaux (accompagner à l’export 10 000 entreprises primo-exportatrices à horizon de trois ans, définir des priorités sectorielles et géographiques en fonction de l’offre régionale, en lien avec la stratégie pays/produits, augmenter le nombre de VIE). Ils organisent sur le territoire régional le dispositif d’appui à l’export, en associant l’ensemble des acteurs concernés.

À ce jour, le bilan est positif : vingt régions sont dotées d’un PRIE. Dix-neuf régions ont adopté un PRIE, majoritairement voté par le conseil régional. Quant à la Bourgogne, le plan d’action régional export (PAREX) 2011-2014 fait office de PRIE. Certains PRIE n’ont pas été adoptés formellement par l’assemblée délibérante, comme en Rhône-Alpes ou en Corse. D’autres ont une nature conventionnelle et ont été signés par les partenaires locaux comme en Île-de-France ou en Champagne-Ardenne.

Les régions qui n’ont pas encore adopté un PRIE sont l’Alsace, le Languedoc-Roussillon, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et La Réunion. Pour l’Alsace, l’adoption du PRIE est prévue cet automne. En Languedoc-Roussillon, le processus de concertation entre les partenaires pour l’adoption d’un PRIE reste en suspens. Pour la Martinique et la Guadeloupe, la signature serait fixée à la fin de cette année. Pour La Réunion, le PRIE n’en est qu’à un stade d’ébauche ; la signature pourrait intervenir fin 2014 ou au premier semestre 2015.

La Rapporteure spéciale a auditionné M. Éric Guilloteau, conseiller régional délégué à l’export de la région Aquitaine. Dans cette région, le PRIE a surtout été, selon lui, « un outil de formalisation de la politique export amorcée par la région dès 2011 », ce qui semble être le cas de plusieurs régions.

Le 10 octobre dernier, à Toulouse où il concluait le dixième congrès des régions de France, le Premier ministre s’est engagé à ce que les conseils régionaux exercent « une compétence exclusive en matière de soutien aux entreprises » dans le cadre du projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale. Le Premier ministre a d’ores et déjà annoncé que « la région deviendra la collectivité responsable du développement économique, de l’innovation, de l’accompagnement notamment à l’export des entreprises ». « Ce guichet unique » assuré par des « régions renforcées sur les compétences » permettra, selon lui, d’assurer « une meilleure allocation de l’argent, moins de financements croisés, moins de complexité dans les procédures et moins de délais dans la prise de décision ». Il a précisé que ces compétences se mettront en œuvre dans les nouveaux périmètres régionaux. Elles s’accompagneront d’une « redéfinition des ressources des régions » qui disposeront d’une « fiscalité économique ».

Cette annonce était nécessaire dans le cadre de la réflexion sur la répartition des compétences des collectivités. Cependant, la Rapporteure spéciale appelle à la vigilance sur deux points :

– la fusion des régions nécessitera un travail de réappropriation des PRIE élargis ;

– la structuration régionale devra tenir compte de la présence des CCI sur le territoire.

II. LES VOIES D’APPROFONDISSEMENT POUR POURSUIVRE L’EFFORT DE RATIONALISATION

A. L’ARTICULATION ENTRE LES DIFFÉRENTS ACTEURS DOIT ENCORE ÊTRE AMÉLIORÉE

La multiplicité des acteurs intervenant dans le dispositif de soutien à l’export des entreprises françaises est de longue date un frein à sa lisibilité et à son efficacité. Comme l’ont souligné en juin dernier nos collègues Jean-Christophe Fromantin et Patrice Prat dans leur rapport de suivi sur l’évaluation du soutien public aux exportations (rapport d’information n° 2052 du Comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale), « en dépit de la mobilisation du Gouvernement sur le plan stratégique et en matière de financement, l’effort de rationalisation, préconisé par les rapporteurs pour améliorer la lisibilité des dispositifs publics, reste insuffisant ».

1. Les compétences et les tutelles sont partagées entre plusieurs ministres

Un pas a été franchi avec le rattachement au ministère des Affaires étrangères du secrétariat d’État au Commerce extérieur.

La Rapporteure spéciale a entendu M. Thomas Courbe, secrétaire général de la direction générale du Trésor et M. Éric David, sous-directeur en charge du financement international des entreprises, qui lui ont indiqué que les cotutelles n’étaient pas un problème et que la concertation était forte entre les deux administrations de Bercy et du Quai d’Orsay afin de « parler d’une seule voix ». Comme cela a été noté plus haut, une convention entre la direction générale du Trésor et le MAEDI a été signée en juillet 2014.

Toutefois, comme l’ont également signalé nos collègues Jean-Christophe Fromantin et Patrice Prat dans leur rapport d’information susmentionné, si le ministre des Affaires étrangères et le secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur sont désormais compétents pour définir la politique du commerce extérieur, les dispositifs de financement restent du ressort des ministres de Bercy.

Comme l’a rappelé Mme Agnès Romatet-Espagne lors de son audition, la répartition des compétences entre les acteurs publics est le fruit d’arbitrages compliqués ; « ce n’est encore pas un jardin à la française, même si les choses évoluent ».

Le partage est d’ailleurs peu lisible au niveau budgétaire : les crédits alloués au dispositif de développement international des entreprises et à l’attractivité du territoire sont présentés dans la mission Économie, tandis que l’objectif de renforcement du développement international, évalué au regard du solde du commerce extérieur, est présenté dans la mission Action extérieure de l’État.

La Rapporteure spéciale elle-même a éprouvé cette difficulté à l’occasion de la rédaction de ce rapport et de l’exercice de sa mission de contrôle.

2. Les moyens du commerce extérieur ne doivent pas être redondants

● Le label Bpifrance Export

En mai 2013, Bpifrance, Coface et Ubifrance ont noué un partenariat et créé le « label Bpifrance Export ». Ce label a vocation à améliorer et à simplifier l’offre des trois acteurs en matière d’export et à favoriser l’accès des PME et des ETI aux produits en améliorant la lisibilité de cette offre.

Les efforts de rationalisation de l’offre ont permis de coupler le volet accompagnement des entreprises à l’export d’Ubifrance avec le volet financement assuré par la Coface :

– la phase de prospection sur les marchés internationaux est couverte d’une part par un accompagnement d’Ubifrance, en vue d’explorer l’ouverture de nouveaux marchés, de dynamiser les réseaux de l’entreprise et d’accroître la visibilité de l’entreprise, et d’autre part par l’assurance prospection de la Coface qui avance les dépenses de prospection de l’entreprise ;

– la phase de financement du développement international est assurée par Bpifrance, d’une part, qui propose dorénavant un seul produit, le « prêt export » et, d’autre part, la Coface qui permet de garantir des cautions et des préfinancements sur des contrats exports accordés par des banques ;

– la phase de déroulement du projet export est sécurisée par la Coface qui peut couvrir les risques d’interruption de contrat et de non remboursement du crédit consenti à l’acheteur (assurance crédit) mais également le risque de fluctuation de change avec une extension à la période de négociation du contrat (assurance change) ;

– la phase de consolidation du projet export voit l’intervention d’Ubifrance, qui favorise un accompagnement de l’implantation de l’entreprise à l’étranger, de la Coface, qui propose une protection contre les risques politiques (assurance investissement), et de Bpifrance, qui garantit les apports en fonds propres d’une société mère à sa filiale étrangère (hors UE).

Le directeur de Bpifrance Export, M. Alain Renck, que la Rapporteure spéciale a auditionné, confirme ses propos de l’an passé : le premier bilan du label est très positif, selon lui. Trente-sept chargés d’affaires internationaux (CAI) d’Ubifrance sont désormais logés au sein des directions régionales Bpifrance. Les CAI sont mobilisés pour assurer la mise en œuvre de l’accompagnement personnalisé à l’international des 1 000 ETI et PME de croissance, conformément à la décision n° 14 du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi du 6 novembre 2012. Ils formulent des recommandations détaillées aux chefs d’entreprise, en les orientant le cas échéant vers les soutiens publics adaptés à leurs besoins.

Depuis le lancement du label, plus de 800 entreprises (essentiellement des ETI de croissance) ont été rencontrées. Fin août 2014, 556 PME et ETI ont donné leur accord pour bénéficier de l’accompagnement personnalisé à l’export. Parmi celles-ci, 293 entreprises ont commencé un plan d’action. L’objectif initial de 1 000 entreprises ainsi accompagnées devrait être largement dépassé.

Toutefois, au regard des auditions qu’elle a menées, notamment du conseiller régional délégué à l’export de la région Aquitaine, du président de CCI France international et au regard des propos mêmes de M. Renck, la Rapporteure spéciale craint que l’action propre de Bpifrance Export ne soit redondante en termes de moyens, notamment concernant sa participation à des salons ou à des missions à l’étranger.

● Les maisons de l’international

L’initiative des maisons de l’international a été annoncée par le Président de la République à l’issue des Assises de l’entreprenariat en avril 2013. L’objectif de ces maisons est de faciliter l’implantation des entreprises françaises sur les grands marchés cibles pour l’offre française. À ce stade, si la stratégie paraît intéressante, la Rapporteure spéciale n’a pas davantage d’informations sur les moyens de ce dispositif.

La première de ces « maisons de l’international » a été inaugurée par le Président de la République le 12 février dernier aux États-Unis, à San Francisco. Baptisée « French Tech Hub », elle est née de la transformation de l’incubateur de l’Agence régionale de développement (ARD) d’Île-de-France « Hubtech21 » localisé à San Francisco et Boston. La partie californienne offrira un support plus spécifique aux sociétés des TIC tandis que la partie bostonienne sera plus particulièrement dédiée aux biotechnologies et à la pharmacie.

Le projet prévoit d’ici trois ans d’accélérer la croissance aux États-Unis de 75 entreprises par an grâce à la mise en place d’un réseau de décideurs et de mentors de haut niveau, d’un réseau de financeurs comprenant Bpifrance, et d’un accompagnement intégré et dans la durée, réalisé notamment par Ubifrance, comprenant également des facilités d’hébergement à Boston et à San Francisco. Ubifrance met à disposition deux conseillers seniors spécialistes dans le numérique (à San Francisco) et dans les sciences du vivant (à Boston) et le ministère des Affaires étrangères un expert technique international. Il est prévu que le programme d’investissements d’avenir (PIA) apporte une dotation de 1 million d’euros d’amorçage pour la structure et de 2 millions d’euros d’aide aux entreprises sous forme d’avances remboursables.

La Rapporteure spéciale salue cette première expérience aux États-Unis, née d’un réseau existant et renforcée par une collaboration spécialisée.

D’autres projets de « maisons de l’international » sont actuellement à l’étude au Japon et en Russie, sans que leur éventuelle spécialisation n’ait été rendue publique.

Une deuxième « maison de l’international » a été inaugurée par M. Fabius en juin dernier, à Shangai. La Rapporteure spéciale insiste sur la nécessité de ne pas créer de nouveaux doublons dans nos pays cibles, lorsqu’une antenne française existe et est déjà solidement implantée. À titre d’exemple, le projet de « maison de l’international » en Chine n’a pas fait l’objet de concertation. La « maison de l’international », installée au sein du pavillon Rhône-Alpes de l’Exposition universelle, excentrée de tout centre d’affaires, vient fragiliser la chambre de commerce, implantée de longue date, au cœur de Shanghai. Cette installation appelle deux observations de la part de la Rapporteure spéciale : une fois encore, elle souligne la nécessité de ne pas multiplier le déploiement de fonds publics et de ne pas accroître le manque de visibilité.

● Un nouvel opérateur ? L’agence Entreprise Rhône-Alpes international (ERAI)

Avec son agence ERAI, la région Rhône-Alpes déploie des moyens très importants : une équipe de 150 collaborateurs, travaillant dans 27 implantations réparties dans 21 pays.

Depuis le 13 juin 2012, Ubifrance et ERAI sont liés par une convention de partenariat opérationnel dont l’objectif est d’articuler au mieux les réseaux et les compétences des deux opérateurs afin de proposer une offre claire au bénéfice des entreprises exportatrices rhônalpines. En mai 2013, les deux opérateurs ont signé un avenant à leur convention de partenariat, afin de promouvoir des actions communes dans les secteurs d’excellence transalpins. Cependant ERAI et Ubifrance semblent s’affranchir des limites de la convention précitée, avec un développement beaucoup plus large de l’agence sur l’ensemble du territoire national. Cette nouvelle stratégie n’a pas reçu l’aval du conseil régional, selon Jean-Louis Gagnaire, vice-président.

La redondance d’opérateurs à l’étranger pose un réel problème dans l’effort global de simplification et de lisibilité des acteurs de l’export, ainsi que de coût global. Cette inquiétude de la Rapporteure spéciale est partagée par les régions et par le président de CCI France international, M. Arnaud Vaissié. Des problèmes juridiques, liés à la mission de service public d’ERAI, sont en outre à craindre.

B. LES PERSPECTIVES POUR L’ACTION DES CHAMBRES DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE

1. Les missions du réseau des chambres de commerce et d’industrie à l’international

Représentant et porte-parole historique des acteurs économiques, des entreprises et des territoires, le réseau des chambres de commerce et d’industrie (CCI) constitue l’un des interlocuteurs privilégiés des pouvoirs publics en matière de politique économique. Il exerce également une importante activité à l’international, en partenariat avec Ubifrance et les 112 chambres françaises de commerce et d’industrie à l’étranger, associations d’entrepreneurs à but non lucratif, présentes dans 82 pays.

Les prestations du réseau sont extrêmement diverses et concernent aussi bien le développement de la présence des entreprises françaises à l’étranger, les services aux communautés d’affaires et aux ressortissants français à l’étranger et les services aux entreprises étrangères.

En dépit d’efforts de clarification des missions du réseau des CCI, celui-ci peine encore à trouver une place satisfaisante dans la nouvelle organisation du dispositif de soutien public à l’internationalisation telle qu’elle se met en place progressivement.

Ainsi, M. Arnaud Vaissié, président de CCI France international, et M. Dominique Brunin, délégué général, entendus par la Rapporteure spéciale, se montrent, comme en 2013, particulièrement critiques envers :

– la mise en place des guichets régionaux de la BPI a parfois déstabilisé l’organisation territoriale : il arrive que ces derniers fassent doublon avec certaines activités des CCI. Plutôt que de rationaliser, l’État aurait dupliqué des actions déjà existantes. Revendiquant leur rôle de proximité auprès des entreprises, les chambres estiment le renforcement de la présence des agents d’Ubifrance, via le déploiement en région des CAI, redondant dans la mesure où ces agents travaillent sur des portefeuilles d’entreprises déjà suivis pour l’essentiel par les CCI.

– le positionnement de BPI France Export, enrichi des CAI d’Ubifrance, sur les 1 000 ETI d’avenir peut cantonner les CCI sur des entreprises d’envergure plus modeste. Or, selon eux, la répartition ne doit pas être liée à la taille des entreprises ;

– la création des agences régionales de l’export accroît la confusion sur les territoires : la situation de la région Rhône-Alpes et de l’agence ERAI leur pose un réel problème ;

– la création des « maisons de l’international », comme cela a été évoqué plus haut.

Selon eux, le principe de spécialisation géographique ne fonctionne pas. Seule une répartition distincte des missions, dans la chaîne de soutien à l’export, permettrait de rendre le dispositif lisible et efficace.

1. L’évolution de ses moyens en 2014

L’exercice de la mission internationale des chambres dépend étroitement des moyens du réseau. Or, ceux-ci font l’objet d’évolutions importantes. La notion de « continuum » doit être prise en compte.

En 2012, le réseau des CCI était financé par des ressources propres à hauteur de 54 %, pour un tiers par la taxe sur les frais de chambre (TFC) et, pour le reliquat (13 %), par des subventions (collectivités territoriales et taxe d’apprentissage).

La TFC, affectée aux CCI de région, est constituée de deux contributions :

– une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (TACFE), dont le plafond a été fixé à 549 millions d’euros en 2013 ;

– une taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (TACVAE), dont le plafond a été fixé à 819 millions d’euros en 2013.

Le produit de la TFC a progressé de 19 % en euros constants de 2002 à 2012, excédant chaque année en moyenne de 130 millions d’euros les besoins réels des CCI. Le Gouvernement a donc estimé que le volume des recettes fiscales excède ainsi depuis dix ans les besoins de fonctionnement et d’investissement du réseau des CCI.

Dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2014, la baisse de 100 millions d’euros du plafond de la TFC a été entièrement imputée sur la TACVAE. Parallèlement, l’article 51 de cette loi a modifié les dispositions relatives à la fixation du taux national de la TACVAE (article 1600 du code général des impôts) afin que les entreprises bénéficient, à partir de 2014, d’une baisse de leur imposition à due concurrence.

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit, dans les mêmes conditions qu’en 2014, que le plafond de la TACVAE sera diminué de 212,9 millions d’euros afin d’adapter le niveau de la TFC aux besoins réels des CCI, intégrant des économies de fonctionnement.

Ainsi le montant de la TFC s’élèverait à 1 055,1 millions d’euros en 2015, contre 1 268 millions d’euros en 2014. Cette baisse devrait se poursuivre en 2016 et 2017, avec un plafonnement prévu à hauteur respectivement de 938,1 millions d’euros et 820 millions d’euros.

En complément de la réduction du plafond de la TFC, il est prévu de mettre en œuvre un prélèvement exceptionnel de 500 millions d’euros sur les CCI au titre de leur effort au rétablissement des comptes publics. Ce prélèvement exceptionnel est justifié par le sur financement accumulé ces dernières années par le réseau des CCI. Les chambres se sont constitué des fonds de roulement représentant en moyenne 200 jours de fonctionnement alors que la norme communément admise est comprise entre 60 et 90 jours.

Le prélèvement exceptionnel de 500 millions d’euros sera donc opéré sur les CCI dont le fonds de roulement excède 120 jours de fonctionnement. Cette solution présente l’avantage de prendre en compte la situation financière de chaque chambre. La base de 120 jours permet de laisser aux chambres une marge de manœuvre de plus de deux mois pour couvrir leurs engagements sociaux et préserver les projets d’investissements plus récents.

La Rapporteure spéciale estime que les CCI doivent participer à l’effort global en faveur du redressement des finances publiques. Des réformes de leur financement sont donc nécessaires mais elles doivent être adaptées aux réalités. La Rapporteure spéciale ne remet pas en cause les efforts demandés aux CCI mais estime que c’est plutôt le rythme de ces efforts qui soulève aujourd’hui des interrogations. Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2015, la Rapporteure spéciale a donc cosigné un amendement de M. Laurent Grandguillaume, déposé en commission des Finances, qui demande à ce que les CCI puissent lisser leurs efforts dans le temps afin de ne pas mettre en danger les investissements qu’elles ont déjà programmés, notamment dans le cadre des investissements d’avenir. Cet amendement a été rejeté.

Soucieuse de l’avenir des CCI, la Rapporteure spéciale se félicite par ailleurs de l’adoption en commission des Finances et en séance publique, en première lecture, de l’amendement qu’elle a déposé, demandant au Gouvernement un rapport sur l’impact de ces mesures sur le fonctionnement des chambres, avant le 1er juillet 2015. Les efforts qui leur sont demandés, au regard des contributions des autres opérateurs de l’État, n’ont pas fait l’objet d’une étude d’impact permettant d’appréhender l’évolution du fonctionnement des CCI à moyen terme et les éventuelles conséquences sur les outils de formation des CCI, notamment en apprentissage, ainsi que sur des projets d’investissement au service des TPE-PME.

La Rapporteure spéciale estime que les tensions qui règnent actuellement sur ce sujet doivent être prises en compte. Elle souhaite, en outre, au premier semestre 2015, travailler sur la place des CCI dans le paysage des opérateurs.

*

* *

TROISIÈME PARTIE :
COMPÉTITIVITÉ ET ATTRACTIVITÉ SONT INDISSOCIABLES

I. LES RÉFORMES STRUCTURELLES POUR FAVORISER LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES ET L’ATTRACTIVITÉ DU TERRITOIRE

La compétitivité est initialement un concept d’entreprise qui a été appliqué au niveau macroéconomique. La compétitivité des entreprises désigne leur capacité à faire face à la concurrence des autres entreprises nationales ou des concurrents étrangers. Deux notions de compétitivité sont alors distinguées : la compétitivité-prix se définissant par la capacité d’une entreprise à proposer un bien de qualité similaire à celui de ses concurrents mais à un prix inférieur, et la compétitivité hors-prix basée sur la capacité à offrir des biens différenciés par la qualité.

Rapportée à une nation, la notion de compétitivité est élargie et repose sur l’amélioration durable du bien-être de sa population. Dans son agenda de Lisbonne en 2000, l’Union européenne définit la compétitivité d’un pays comme « sa capacité à améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants et à leur procurer un haut niveau d’emploi et de cohésion sociale ». Toute analyse de la compétitivité nationale doit donc tenir compte de différents facteurs qui déterminent le niveau de vie de la population, à savoir la croissance, l’emploi et la répartition du revenu.

Quant à l’attractivité, elle peut être définie comme la capacité à attirer les activités nouvelles et les facteurs de production mobiles – capitaux, travailleurs qualifiés – sur un territoire. Les investissements étrangers contribuent au développement économique des pays d’accueil (création d’emploi, amélioration de la structure productive des économies, hausses de la productivité, etc.) et induisent des externalités positives fortes (transferts de technologie, de savoir-faire, contrôle de la qualité, amélioration des infrastructures, etc.). Avec l’accélération des mouvements de capitaux et de personnes, la capacité d’un pays à attirer et à retenir les entreprises et les talents est devenue un élément-clé des politiques économiques de croissance. La mondialisation a ainsi placé la politique d’attractivité des économies au cœur de la dynamique de croissance des territoires

La question relative au choix de localisation des entreprises multinationales représente une priorité pour les autorités économiques et politiques. L’enjeu est d’attirer les investissements étrangers créateurs d’emploi, acteur majeur de la dynamisation et de l’industrialisation des territoires.

A. LE PACTE DE RESPONSABILITÉ

Lors de ses vœux aux Français le 31 décembre 2013, le Président de la République a annoncé un ensemble de mesures, qui constituent le Pacte de responsabilité. Destiné à redresser la compétitivité des entreprises et à faire reculer le chômage, il doit permettre de gagner 0,5 % de croissance et de créer 200 000 emplois à l’horizon 2017. L’objectif est de réduire les coûts de nos entreprises, redresser leurs marges, relancer leur effort d’innovation pour reconquérir les parts de marché à l’export, perdues dans la dernière décennie.

À titre d’exemple, les entreprises bénéficient déjà de 11 milliards d’euros de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en 2014. Le Parlement a voté la première étape du Pacte avant l’été. En 2015, ce sont 5,5 milliards d’euros d’allégements du coût du travail et 1 milliard d’euros de diminution de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) qui seront mis en œuvre. La montée en charge du CICE et le déploiement du Pacte de responsabilité et de solidarité représenteront une baisse de prélèvement sur les entreprises de plus de 40 milliards d’euros à l’horizon 2017.

Bilan de la mise en œuvre du CICE pour les entreprises exportatrices

Le comité de suivi du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a été mis en place le 25 juillet 2013 avec pour mission de suivre la mise en œuvre et d’évaluer les effets de ce dispositif. Présidé par M. Jean Pisani-Ferry, commissaire général à la stratégie et à la prospective, ce comité a établi le 10 octobre 2013 son premier rapport public.

L’effort budgétaire lié au CICE (13 milliards d’euros en 2013), devrait bénéficier à hauteur de 38 % aux entreprises non exportatrices, 35 % à celles dont les exportations représentent moins de 5 % du chiffre d’affaires, et 27 % à celles exportant pour plus de 5 % de leur chiffre d’affaires. Le CICE ne cible ainsi pas spécifiquement les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale.

Selon le rapport du comité, le CICE est relativement peu sélectif avec un seuil d’éligibilité fixé à 2,5 fois le SMIC : 65,7 % de l’ensemble des entreprises entrent dans l’assiette de calcul. Le CICE devrait bénéficier au secteur de l’industrie manufacturière à hauteur de 18,3 %, au commerce pour 17,6 %, au secteur des services administratifs pour 10,1 %, au secteur de la construction pour 8,9 %, et environ 4 % respectivement pour les secteurs de l’information, la communication, la finance et l’assurance.

Pour l’ensemble des entreprises exportatrices, la part de la masse salariale entrant dans le champ du CICE est moindre (58 %) que pour les entreprises non exportatrices (79 %). Ceci s’explique par un niveau de salaire plus élevé dans ces entreprises insérées dans la chaîne de valeur mondiale. Pour les entreprises réalisant entre 5 % et 35 % de leur chiffre d’affaires à l’export, la part de leur masse salariale éligible au CICE est de 52 %, et pour les entreprises fortement exportatrices (plus de 35 % du chiffre d’affaires), cette part est inférieure à la moitié de la masse salariale.

Concernant le préfinancement du dispositif, il n’est pas possible pour l’instant de préciser la part d’entreprises exportatrices en ayant bénéficié. Au 31 août 2014, 15 000 dossiers de préfinancement avaient été soumis à Bpifrance pour un montant total de demandes de 1,1 milliard d’euros. Sur ce total, 940 millions d’euros de préfinancement avaient été accordés par BPI France.

Le comité de suivi a publié en septembre 2014 son deuxième rapport afin de permettre le suivi de la mise en œuvre du CICE et l’évaluation de ses effets sur la compétitivité et sur l’emploi. Il traduit une phase d’apprentissage par les entreprises du dispositif, qui s’est manifestée par une mise en œuvre plus lente qu’anticipée et à un niveau moindre. Les montants de la créance déclarée fiscalement par les entreprises comptabilisés par l’administration fiscale au titre du crédit d’impôt s’élevaient à 8,7 milliards d’euros et concernaient 713 000 redevables à l’impôt sur les sociétés ou l’impôt sur le revenu début septembre 2014. Dans les prévisions attachées au projet de loi de finances, le CICE au titre de 2013 est ainsi révisé à 10,8 milliards d’euros (contre 13 milliards d’euros dans les prévisions initiales). 1,5 milliard de préfinancements du CICE au titre de 2013 ont été accordés, toutes banques confondues, dont 940 millions d’euros par BPI France. Le préfinancement s’est adressé majoritairement à des entreprises faisant face à des difficultés financières : 69 % d’entre elles ont un niveau de solvabilité faible.

Près de 11 % de la créance CICE ont été octroyés à des microentreprises, les PME bénéficiant quant à elles de près d’un tiers de la créance pour un montant moyen d’environ 25 000 euros. Le reste de la créance se répartit entre les ETI (22,5 % pour un montant moyen de près de 500 000 euros) et les grandes entreprises (35,2 % pour un montant moyen de plus de 12 millions d’euros). Selon l’étude du comité de suivi, près de 40 % du CICE se sont concentrés sur les deux secteurs les plus pourvoyeurs de main-d’œuvre : le commerce et l’industrie manufacturière.

Les députés Olivier Carré et Yves Blein, dans leur rapport de la mission d’information sur le CICE, rendu public le 2 octobre dernier (rapport n° 2239), estiment qu’il est encore trop tôt pour savoir si le CICE soutient particulièrement les entreprises exportatrices.

Ainsi, si, pour le moment, on constate qu’il n’y a pas de relation avérée entre le CICE et l’export, ce crédit d’impôt reste cependant très attractif pour les entreprises étrangères soucieuses de s’implanter en France. Dans les ambassades, une action est actuellement menée en ce sens.

B. DES MESURES POUR ACCÉLÉRER LE DÉVELOPPEMENT DES ENTREPRISES

La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l’emploi transcrivant l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 a par ailleurs consacré de nouveaux droits pour les salariés et imposé de nouvelles obligations aux employeurs. Elle consacre notamment les accords compétitivité-emploi, désormais dénommés « accords de maintien dans l’emploi ». Ce dispositif permet aux entreprises de négocier, avec les représentants des salariés, le temps de travail en fonction de l’activité économique. Il peut prévoir : l’augmentation du temps de travail à salaire inchangé, le maintien du temps de travail et une baisse de salaire, ou une baisse du temps de travail et du salaire. Pour l’entreprise, il s’agit de réduire le coût horaire du travail, pour gagner en compétitivité. En échange, les salariés doivent recevoir la garantie de ne pas être licenciés durant la durée de l’accord.

En outre, le choc de simplification voulu par le Président de la République vise, au niveau des opérations d’exportation, à améliorer l’accessibilité de l’information douanière, réglementaire et fiscale, à accélérer la dématérialisation des procédures de transit international et à faciliter l’accès et la mobilisation des financements export, via la création des guichets régionaux de la BPI. Plus globalement, en simplifiant les démarches administratives, le but est d’accélérer le développement des entreprises. La Rapporteure spéciale prête une attention particulière à tous les travaux conduits par le secrétaire d’État à la réforme de l’État et à la simplification.

Lors du Conseil des ministres du 22 octobre, M. Laurent Fabius et
M. Emmanuel Macron ont annoncé un projet de loi pour l’activité,
qui favorisera le développement de l’activité des entreprises françaises et des entreprises étrangères s’établissant sur le sol national. Ce texte comportera notamment des mesures sur l’ouverture des commerces le dimanche et en soirée, l’actionnariat salarié, la rénovation du dialogue social, l’amélioration du fonctionnement des conseils de prud’hommes et la simplification des procédures administratives. Les investissements seront sécurisés par la mise en
œuvre de la charte sur la non-rétroactivité fiscale.

C. QU’EST-CE QU’UN PRODUIT FRANÇAIS ?

Une mission conduite par l’Inspection générale des finances travaille actuellement sur une évolution de la « part française ». Comme l’ont préconisé nos collègues Jean-Christophe Fromantin et Patrice Prat dans leur rapport d’information susmentionné, la réglementation relative à la part française devrait en effet être adaptée aux objectifs de rétablissement du commerce extérieur.

La vérification de la part française est une contrainte imposée aux exportateurs pour bénéficier d’un appui public ; il s’agit de ne pas encourager les délocalisations en vérifiant que les prestations et fournitures fabriquées sur le territoire national représentent une part significative du contrat aidé par la puissance publique. Alors que plusieurs de nos concurrents font preuve d’un grand pragmatisme en la matière, la France maintient un seuil de 50 % de part française dans tout projet aidé. Le contrôle de ce seuil devient de plus en plus difficile du fait de la complexité croissante des chaînes de valeur ajoutée.

À titre d’exemples, M. Éric David, sous-directeur en charge du financement international des entreprises à la Direction générale du Trésor, a indiqué à la Rapporteure spéciale que la voiture la plus française aujourd’hui était de la marque Toyota, la turbine la plus française de la marque General Electric, si l’on considère la localisation de la valeur ajoutée.

D’après les informations transmises par la Direction générale du Trésor, un produit français est un produit qui génère de la valeur ajoutée sur le territoire français. Cette valeur ajoutée peut être produite directement par l’entreprise qui vend le produit ou par ses sous-traitants lorsqu’ils génèrent de la valeur ajoutée sur le territoire français.

Une entreprise étrangère basée en France peut donc vendre un produit comportant plus de contenu français qu’une entreprise française, si la valeur ajoutée produite sur le territoire français associée au produit proposé par l’entreprise étrangère est supérieure.

La part française d’un contrat à l’exportation est actuellement définie par la Coface comme « les fournitures fabriquées et les services exécutés en France, la part payable en France des salaires du personnel français résidant temporairement à l’étranger, les frais généraux et les frais de siège (y compris ceux correspondant aux prestations exécutées dans le pays étranger), et, le cas échéant, les charges d’amortissement du matériel d’entreprise. » Cette définition peut comprendre la marge commerciale de l’entreprise. La Direction Générale du Trésor travaille actuellement à l’élaboration d’une définition élargie du contenu français d’un contrat à l’exportation dans le but d’y inclure notamment les coûts de recherche et de développement liés au produit.

Il paraît important, à la Rapporteure spéciale, de disposer d’informations objectives sur ce sujet, afin de lutter contre le déclinisme ambiant et les interprétations fausses sur la part française de notre économie.

II. LA FRANCE DANS LES CLASSEMENTS INTERNATIONAUX : DES ATOUTS INDÉNIABLES, CONTRAIREMENT AUX IDÉES REÇUES

La question de l’attractivité est fréquemment ramenée à celle des investissements directs étrangers (IDE). Or, la France reste aux premiers rangs mondiaux en termes de stock d’investissements étrangers accueillis sur son sol : elle accueille sur son territoire le quatrième stock mondial d’IDE (1 081 milliards de dollars en 2013 selon la CNUCED), derrière les États-Unis, la Chine et le Royaume-Uni. Ce classement est comparable au poids de notre pays dans l’économie mondiale (cinquième en termes de PIB).

En termes sectoriels, plus des deux tiers du stock d’investissements étrangers en France concernent le secteur des services, dont 30 % les activités financières et d’assurance et 22 % les activités immobilières, tandis que l’industrie manufacturière représente 28 %.

La France reste considérée comme un lieu d’implantation attractif dans nombre d’enquêtes réalisées auprès d’investisseurs internationaux (Ernst&Young, CNUCED notamment).

La publication de classements internationaux par une vingtaine d’organismes, avec des méthodologies variées, répond au besoin de comparaison internationale et de hiérarchisation dans un monde de plus en plus concurrentiel. Or, comme le souligne Mme Muriel Pénicaud, présidente de l’AFII et directrice générale d’Ubifrance, que la Rapporteure spéciale a auditionnée, « la médiatisation dont font l’objet certains d’entre eux donne parfois une vision biaisée des réalités économiques de notre pays, ce qui surprend les milieux d’affaires, dont les diagnostics sont plus contrastés. »

Aussi l’AFII établit-elle son propre bilan, avec les agences régionales de développement économique ou les services des conseils régionaux, qui recense les décisions d’investissements étrangers porteurs d’emplois au travers d’implantations nouvelles, d’extensions de sites existants, de rachats d’entreprises en difficulté et d’extensions consécutives à des acquisitions. Ce bilan livre trois principaux enseignements pour l’année 2013 :

– le nombre des décisions d’investissement se maintient à un niveau élevé, avec une contribution à l’emploi supérieure à celle de 2012 : les décisions d’investissement portent sur 29 631 emplois, contre 25 908 en 2012 (+ 14,5 %) ; 22 361 emplois seront générés dans les trois ans par des créations ou des extensions. 6 934 emplois ont été sauvegardés en 2013 par le rachat d’entreprises en difficulté par des investisseurs étrangers ;

 la France continue d’attirer des investissements dans toutes les fonctions, notamment celles de production et de recherche : le nombre des projets d’investissement étranger dans les fonctions de R&D, ingénierie et design est en forte hausse : 77, contre 58 en 2012. Le nombre des investissements dans les activités de production/réalisation, qui était en baisse depuis 2010, repart à la hausse, avec 209 décisions en 2013, contre 194 en 2012. Ces projets représentent un enjeu de 11 829 emplois, soit 40 % de l’emploi total. La baisse des investissements dans les activités de service aux entreprises et aux particuliers, dans la logistique et dans les bureaux commerciaux ou quartiers généraux a été compensée, pour partie, par un doublement du nombre des investissements étrangers dans les points de vente (58 projets) ;

– la diversité des territoires français reste un puissant facteur d’attractivité : les décisions d’investissement prises en 2013 vont générer de l’emploi dans la quasi-totalité des régions françaises. Si l’Île-de-France demeure la première région de destination, les autres régions attirent, ensemble, 72 % des investissements étrangers et 83 % des emplois liés.

III. LA NÉCESSAIRE VALORISATION DE L’IMAGE INTERNATIONALE DE LA FRANCE

A. LA PROMOTION DE L’IMAGE ÉCONOMIQUE DE LA FRANCE

Le baromètre TNS-Sofres-AFII, réalisé chaque année, assure une veille de l’opinion des grands investisseurs. Il aide l’agence à évaluer l’impact des actions de communication conduites auprès des prospects et influenceurs des pays ciblés.

Le dernier a été réalisé du 28 août au 8 septembre 2013 auprès de 606 décideurs économiques de 6 pays (Allemagne, Royaume-Uni, États-Unis, Inde, Chine, Brésil) et dans 116 entreprises étrangères installées en France. Il montre, notamment, que 64 % des dirigeants d’entreprises étrangères interrogés considèrent le site France comme une destination attractive, contre 68 % en 2012 (soit une baisse de 4 points). De fortes disparités s’observent d’un pays à l’autre. La France est placée au premier rang pour les investisseurs chinois, au troisième rang pour les investisseurs indiens, mais au onzième et dix-septième rang pour les investisseurs américains (alors qu’elle occupait la troisième place en 2012) et allemands (sixième place en 2012).

Si 60 % des entreprises interrogées estiment que la France est peu attractive, 72 % d’entre elles tirent un bilan positif de leur implantation en France.

Les fondamentaux de l’image de la France restent stables (qualité des infrastructures de communication, logistique, taille du marché intérieur, tissu industriel, formation et qualification des salariés, innovation et R&D).

Le graphique ci-après présente la perception de l’image de la France à l’étranger, selon le baromètre OpinionWay / CCI International / TV5 Monde, réalisé en juin 2014.

Ainsi, comme l’a souligné Mme Pénicaud lors de son audition, « la perception de la France est très souvent plus négative que la réalité ».

La France souffre donc d’un problème d’image, parfois alimenté par les Français eux-mêmes. Pour y remédier, le Gouvernement s’est engagé à livrer un
travail de fond pour améliorer la perception de la France auprès des relais d’influence internationaux.

Mme Pénicaud a présenté devant la Rapporteure spéciale la grande différence en termes de budget de communication entre les agences françaises, anglaise et italienne : moins de 1 million d’euros pour l’AFII et Ubifrance réunies, contre 12 millions pour le budget de promotion « made in Italy » et 25 millions pour la campagne du Royaume-Uni, dans un contexte européen identique.

En début d’année a été mis en place un portail internet « France International » visant à regrouper les offres des principaux opérateurs à destination des PME exportatrices.

Un travail sur l’unification du logo « France » doit également voir le jour. Pour la Rapporteure spéciale, l’attractivité est un véritable investissement d’avenir, qui mériterait un budget renforcé.

B. LA MARQUE FRANCE

Concernant la « marque France », une mission a été confiée à MM. Philippe Lentschener, Robert Zarader, Michel Gardel, et Mmes Clara Gaymard et Agnès B en décembre 2012. La mission a rendu son rapport et formulé ses recommandations lors d’une conférence publique le 28 juin 2013. Un dispositif d’études réalisé par l’institut TNS-Sofres a permis d’asseoir les enseignements des consultations sur une base véritablement représentative de l’opinion du grand public et des acteurs économiques. Les valeurs que la mission propose d’associer à la marque sont organisées autour de trois piliers : « l’amour des gestes et des savoir-faire », « la capacité à penser et à initier » et « l’art de la surprise ». Un quatrième axe, autour des valeurs éthiques, a été identifié via la consultation publique.

La marque France vise deux objectifs complémentaires : améliorer l’image de la France à travers une communication mieux coordonnée des institutions françaises qui communiquent à l’international, et s’appuyer sur les réussites du secteur privé français pour nourrir et rendre plus concrètes les valeurs affichées de la marque France. Ainsi, le schéma préférentiel est celui d’une plateforme de marque gérée en partenariat entre les institutions publiques et des entreprises volontaires.

La fusion de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et d’Ubifrance formera un opérateur naturellement compétent sur les deux principaux objectifs de la marque France : l’attractivité et l’export. Ainsi, les conditions sont maintenant réunies pour travailler concrètement à la création et à l’installation de la marque France.

Les premières estimations, fondées sur des comparatifs internationaux et sur des campagnes précédentes menées par l’AFII, font apparaître des besoins initiaux de financement conséquents, de l’ordre de quelques dizaines de millions d’euros au total. Une fois la marque bien installée, sa notoriété la rendra attractive pour les entreprises, et permettra de réduire à un niveau marginal le besoin de financement public.

La première phase de la mise en œuvre consistera donc à affiner les objectifs du projet ainsi que les besoins de financement associés et à identifier les crédits qui pourraient y être dévolus (les opérateurs ne pouvant probablement pas dégager l’intégralité des crédits sur leurs budgets récurrents).

Enfin, les mesures issues des Assises du tourisme et des travaux du Conseil de la promotion du tourisme, installé par le ministre des Affaires étrangères et du développement international le 3 septembre 2014, doivent contribuer au rayonnement de la France à l’international et à la valorisation de l’ensemble des grandes destinations françaises.

EXAMEN EN COMMISSION

Après les auditions de M. Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du Budget, Mme Carole Delga, secrétaire d’État chargée du Commerce, de l’Artisanat, de la Consommation et de l’Économie sociale et solidaire et Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du numérique (voir le compte rendu de la commission élargie du 30 octobre 2014 à 9 heures (9)), la commission des Finances examine les crédits de la mission Économie et des comptes spéciaux Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés, et Accords monétaires internationaux.

Sur l’avis favorable de M. Jean-Louis Gagnaire, Mme Monique Rabin et M. Thierry Robert, Rapporteurs spéciaux, la Commission adopte les crédits de la mission Économie.

*

* *

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

(par ordre chronologique)

Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et UBIFRANCE :

– Mme Muriel Pénicaud, ambassadrice déléguée aux investissements internationaux, présidente de l’AFII et directrice générale d’Ubifrance ;

– M. Jean-Paul Bacquet, président d’Ubifrance et député du Puy-de-Dôme ;

– M. Laurent Jacquet Saillard, directeur Financier (UBI, AFII) ;

– M. Bertrand Buffon, chef de cabinet AFII ;

– M. Julien Ravalais Casanova, chef de cabinet Ubifrance.

Bpifrance :

– M. Alain Renck, directeur international ;

– M. Jean-Baptiste Marin-Lamellet, directeur des relations institutionnelles et médias.

Ministère des Affaires étrangères et du développement international, direction des entreprises et de l’économie internationale (DEEI) :

– Mme Agnès Romatet-Espagne, directrice.

Ministère de l’Économie, des finances et de l’industrie, direction générale du Trésor :

– M. Thomas Courbe, secrétaire général ;

– M. Éric David, sous-directeur en charge du financement international des entreprises.

Région Aquitaine :

– M. Éric Guilloteau, conseiller régional délégué à l’export

CCI International :

– M. Arnaud Vaissié, Président

– M. Dominique Brunin, Délégué général

La Rapporteure spéciale remercie les personnes auditionnées pour l’éclairage qu’elles lui ont apporté.

© Assemblée nationale

1 () L’évaluation des déséquilibres macroéconomiques s’inscrit dans un ensemble de six textes législatifs (appelé « six-pack »), entrés en vigueur le 13 décembre 2011. Cette procédure de surveillance comprend un volet préventif qui permet à la Commission et au Conseil d’adresser des recommandations aux États concernés avant que les déséquilibres ne deviennent trop graves, et un volet correctif prévoyant des sanctions financières.

2 () Conformément à l’article 3 du règlement (UE) n° 1176/2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques.

3 () Mesurées par le ratio entre les exportations en biens et services du pays en proportion des exportations mondiales.

4 (1) La part de marché en valeur est définie comme le ratio de ses exportations de marchandises sur le total des exportations mondiales.

5 () La part de marché en volume est définie comme le rapport entre les exportations de biens et services d’un pays donné (en dollar 2005) sur les exportations mondiales (en dollar 2005).

6 (1) L’Europe comprend l’Union européenne (UE) et les pays européens hors UE.

7 (1) Définis comme les entreprises exportatrices au cours de l’année considérée qui ne l’étaient pas l’année précédente.

8 () L’accompagnement individuel est défini comme l’ensemble des actions de l’agence qui contribuent à générer des courants d’affaires.

9 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/