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N
° 2260

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 octobre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 29

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOURCES HUMAINES

POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT

GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Jean-Louis DUMONT

Député

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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 7

I. LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT 11

A. UNE POLITIQUE DE CESSIONS ACTIVE MALGRÉ UNE DIMINUTION DU NOMBRE ET DE LA VALEUR DES BIENS À VENDRE 12

B. LA CONTRIBUTION AU DÉSENDETTEMENT DE L’ÉTAT : TROIS MESURES PROROGÉES DANS LE CADRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2015 13

1. La prorogation de la contribution des cessions de biens immobiliers de l’État au désendettement 13

2. La prorogation des mesures d’exemption accordées aux cessions réalisées par le ministère de la Défense 15

3. Une prorogation des mesures d’exemption sous conditions pour le ministère des Affaires étrangères 16

C. UNE CONTRIBUTION AUX DÉPENSES IMMOBILIÈRES DE L’ÉTAT AJUSTÉE AUX PRODUITS DE CESSION 17

1. L’utilisation sur 2014 de l’enveloppe mutualisée 17

2. Les principaux projets sur 2015 17

II. POURSUIVRE LA RATIONALISATION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT 19

1. Le retard pris dans la signature des conventions d’utilisation devrait se résorber 19

2. Les obstacles à la généralisation du dispositif des loyers budgétaires 19

3. La gestion des logements de fonction : un devoir d’exemplarité 20

4. L’année 2015 sera marquée par l’expérimentation des schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) 21

5. L’évaluation de la performance du compte d’affectation spéciale 22

III. LE PROGRAMME 309 ENTRETIEN DES BÂTIMENTS : UNE OPTIMISATION DES CRÉDITS INCONTOURNABLE 24

1. La séparation des fonctions de propriétaire et d’occupant 24

2. Les préfets de régions ont des responsabilités de plus en plus étendues en matière de politique d’entretien du patrimoine de l’État 24

3. Une diminution des crédits qui permettra d’assurer essentiellement les opérations liées à la sécurité des personnes 25

4. La mise en œuvre du Grenelle de l’environnement dans les bâtiments publics : un sujet stratégique 27

IV. AMÉLIORER LE SYSTÈME D’INFORMATION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE 27

1. La fiabilisation des données a conduit la Cour des comptes à lever ses réserves sur l’inventaire du parc immobilier 28

2. Disposer d’un système d’information opérationnel 29

3. La création d’un outil de gestion des contrats immobiliers 30

4. Deux études relatives au système d’information de l’immobilier de l’État doivent donner lieu à des arbitrages 31

V. RENDRE EFFECTIVE LA MOBILISATION DU FONCIER PUBLIC EN FAVEUR DU LOGEMENT 32

1. Seuls trois terrains ont fait l’objet d’un acte de cession définitif et soixante dossiers sont en cours d’instruction 33

2. De nombreux obstacles à la concrétisation des programmes de construction 34

3. Les ministres du Logement et du Domaine ont demandé aux préfets de région d’identifier des dossiers prioritaires 35

4. Un équilibre à trouver entre deux priorités : la construction de logements sociaux et le désendettement 35

5. le rachat par la ville de Paris de la caserne de Reuilly 36

VI. L’HÔTEL DE LA MARINE 36

A. PLUSIEURS PROJETS N’ONT PAS VU LE JOUR 37

B. UN PROJET EXEMPLAIRE DU CENTRE DES MONUMENTS NATIONAUX 38

1. Un monument exceptionnel rendu au public 38

2. Une répartition judicieuse des surfaces entre espaces ouverts au public et espaces professionnels 39

3. Un programme de travaux à réaliser 39

4. L’équilibre de la gestion des espaces ouverts au public 40

5. Une valorisation économique assise sur la location de bureaux 40

6. Le financement de l’opération 41

C. UN SCHÉMA TRÈS PERTINENT QUI POURRAIT ÊTRE REPRODUIT DANS LE CADRE DU PALAIS DE JUSTICE 42

VII. LE CAMPUS CONDORCET : UN PROJET STRATÉGIQUE DONT LA CONDUITE SUSCITE DES RÉSERVES 42

1. Un projet qui vise à donner aux sciences humaines et sociales une visibilité internationale 42

2. Mais qui n’a de sens que dans sa totalité et qui appelle un engagement plus fort des universités 44

3. Le calendrier de libération des sites parisiens doit être précisé 44

VIII. LES AUTRES OPÉRATIONS SUR 2014 44

A. L’INSTITUT CULTUREL DE BERLIN : UN PATRIMOINE CULTUREL PRÉSERVÉ 44

B. LE 36 QUAI DES ORFÈVRES SERA CONSERVÉ DANS LE PATRIMOINE DE L’ÉTAT 45

C. LE MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR 45

1. La consolidation du périmètre Beauvau 45

2. Le projet Garance : la première étape d’une logique de regroupement 45

3. Un regroupement de Lumière et de Garance dans un site unique à l’horizon 2023. 46

4. L’immobilier de la gendarmerie 46

D. LE REGROUPEMENT À BALARD DES ÉTATS-MAJORS ET DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 49

1. La libération d’une quinzaine d’emprises parisiennes 50

2. Des adaptations par rapport au projet initial qui restent limitées 50

3. Le financement de Balard 50

E. PARIS-SACLAY : UN PROJET STRATÉGIQUE ET UN DEVOIR DE RÉUSSITE 51

1. Les constats : les failles d’une gouvernance par projets 52

2. Les recommandations : des prises de décisions rapides et cohérentes, le respect du calendrier, une bonne coordination des acteurs 53

F. PICPUS : UN NOUVEAU CAMPUS DE 35 000 M2 EN PLEIN PARIS 53

1. Une opération immobilière d’opportunité dont l’exemplarité n’est pas avérée 54

2. Des dépenses avaient été engagées par le ministère de l’Agriculture à hauteur de 28 millions 54

G. L’ÎLOT SÉGUR FONTENOY 54

EXAMEN EN COMMISSION 57

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 59

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 80 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION

La politique immobilière de l’État a pour ambition de rationaliser, d’entretenir et de moderniser les bâtiments occupés par les administrations et les opérateurs de l’État, ainsi que de permettre une connaissance aussi exhaustive que possible du patrimoine immobilier détenu par ces acteurs. Elle vise tout particulièrement à :

– permettre aux administrations de disposer d’un parc immobilier adapté à leurs missions et aux réformes qu’elles doivent conduire, en bon état, aux normes notamment en matière d’accessibilité et répondant aux objectifs d’un « État exemplaire »,

– disposer d’un parc immobilier moins coûteux, valoriser les immeubles inadaptés ou inutiles et participer au désendettement de l’État,

– favoriser l’offre de logements sociaux grâce à la mobilisation du foncier public à l’occasion des cessions,

– préserver le patrimoine historique et culturel de l’État français.

Malgré d’indéniables progrès, des efforts sont encore nécessaires pour progresser dans cette voie.

Le Gouvernement, le ministre du Budget, France Domaine, représentant unique de l’État propriétaire, et le Conseil immobilier de l’État (CIE) se montrent parfaitement conscients des tâches restant à accomplir en termes de réduction des coûts d’entretien, d’optimisation des surfaces et de rationalisation des implantations.

Plusieurs principes ont été formulés en ce sens : une norme maximale d’occupation de 12 m² de surface utile nette par poste de travail, un plafond de loyer économique pour toute prise à bail de 400 euros par m² à Paris intra muros et par an ainsi qu’une gestion active de l’immobilier de l’État tendant à la fois à renforcer la mobilisation du foncier public en faveur du logement, en particulier du logement social, et à valoriser les biens devenus inutiles et coûteux. L’État met en œuvre une politique active de renégociation des baux dans le privé : en Ile-de-France et en région Rhône Alpes, ces mesures ont permis de réaliser une économie de 30 millions d’euros par an. Enfin, 30 % du produit des cessions, sous réserve des dispositions applicables au ministère de la Défense et au ministère des Affaires étrangères, est affecté au désendettement de l’État et contribue ainsi à la maîtrise de l’endettement public. Ces efforts doivent désormais prendre une nouvelle dimension.

Le Conseil de l’immobilier de l’État veut faire franchir de nouvelles étapes

à la politique immobilière de l’État

Les avis du CIE sur les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) devraient être mieux pris en compte et le conseil manque de réels moyens pour imposer la culture de l’immobilier de l’État. Cette instance, qui marque son opposition ou formule des recommandations quand certaines décisions ne lui paraissent pas rationnelles, ne dispose aujourd’hui d’aucun moyen de coercition si elle n’est pas entendue.

Le CIE doit ainsi régulièrement rappeler le caractère obligatoire des normes de la politique immobilière de l’État telles que le plafond de surface utile nette de 12 m2 de bureau par poste de travail. Les normes d’occupation en vigueur ne sont pas suffisamment considérées comme contraignantes par les administrations occupantes.

Le CIE entend également mettre en valeur la contribution de l’immobilier de l’État au programme de 50 milliards d’euros d’économie d’ici 2017 auquel le Gouvernement s’est engagé, en concrétisant les marges d’économies de la fonction immobilière, en particulier par le biais de politiques de restructuration puissantes.

Dans le cadre du CIE, présidé par votre Rapporteur spécial, des experts de la gestion immobilière, issus du secteur public comme du secteur privé, ont approuvé, en 2013, 50 propositions qui seraient de nature, si elles étaient appliquées, à en améliorer le pilotage. Plusieurs d’entre elles portaient sur :

– la bonne connaissance du patrimoine, de son utilisation et de ses enjeux financiers, prérequis à la mise en œuvre d’une politique immobilière ;

Le parc immobilier de l’État est évalué à 63,1 milliards d’euros au 31 décembre 2013 (Compte général de l’État) et les biens des opérateurs à 54 milliards d’euros, ce qui représente un total de 117,1 milliards d’euros. Le parc immobilier de l’État est composé de terrains à hauteur de 2,4 milliards d’euros. La valeur du parc immobilier non spécifique s’élève à 48,3 milliards d’euros, celle du parc immobilier spécifique à 10,2 milliards d’euros et enfin celle du parc immobilier historique et culturel à 2,2 milliards d’euros.

– le renforcement de la capacité de pilotage et d’ingénierie de France Domaine ;

Le principe a été posé d’un État propriétaire représenté par France Domaine et de ministères occupants que le paiement de loyers budgétaires doit responsabiliser et sensibiliser au coût de l’immobilier.

Le Rapporteur spécial ne reviendra pas sur la question du statut de France Domaine qui n’est pas appelé à évoluer rapidement. Mais il faut que France Domaine soit confirmé dans son rôle de pilote de la politique immobilière et puisse imposer aux ministères des normes de bonne gestion. Si le travail effectué par France Domaine doit être salué, le mode d’organisation et les attributions de l’État propriétaire ne lui permettent pas d’assumer ses missions avec toute l’efficacité requise. On peut regretter qu’aucune des nombreuses instances sur la politique immobilière de l’État ne soit présidée par France Domaine.

– le renforcement des compétences de France Domaine en matière de maîtrise d’ouvrage public et de professionnalisation de la fonction immobilière. Le Rapporteur spécial se félicite du prochain recrutement par France Domaine de six stratèges immobiliers contractuels pour renforcer sa capacité d’ingénierie ;

– l’évolution de la fonction d’évaluation de France Domaine. Il n’est pas satisfaisant qu’une même structure soit responsable de l’évaluation et de la cession d’un même bien. Les services de l’État propriétaire devraient se concentrer sur leurs seules missions. Il n’est pas non plus satisfaisant qu’à l’heure de la décentralisation, les services de l’État procèdent à l’évaluation des biens des collectivités territoriales,

– l’indispensable sanctuarisation des crédits consacrés à l’entretien des bâtiments.

Enfin, le Rapporteur spécial tient à saluer le travail d’élaboration du document de politique transversale effectué par France Domaine. En raison de sa transmission très récente, il sera amené à formuler plus tard ses observations auprès du secrétaire d’État au Budget. Il lui paraîtrait utile en termes de méthode que ce document soit transmis plus tôt afin qu’il puisse être exploité pleinement dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances.

Chiffres clés

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État retrace les produits des cessions et les dépenses immobilières qu’ils financent.

Depuis sa création, 5,13 milliards d’euros de cessions ont ainsi été réalisés.

La plus belle vente de l’année 2014 a été la vente de l’ensemble Penthemont Bellechasse vendu en site occupé en juin 2014 pour un montant de 137 millions d’euros.

Une prévision d’encaissement de produits de cession à hauteur de 521 millions d’euros est inscrite en projet de loi de finances pour 2015.

La contribution au désendettement de l’État est fixée sans limitation de durée à 30 % du produit retiré de ces cessions. Elle est estimée à 108 millions d’euros pour 2015, alors qu’elle n’est estimée qu’à 80 millions sur 2014. Cette forte augmentation est due pour l’essentiel à la contribution minimale forfaitaire de 25 millions d’euros que va verser pour la première fois le ministère des Affaires étrangères. Ce versement interviendrait chaque année jusqu’en 2017.

Les dépenses immobilières bénéficient d’une dotation de 418,8 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et de 413 en crédits de paiement (CP), alors que sur 2014 elles s’élevaient respectivement à 485 et 470 millions d’euros.

L’objectif maximum des 12 mètres carrés de surface utile nette par bureau n’est pas atteint.

Le programme 309 Entretien des bâtiments de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit une légère diminution de crédits qui avaient été fortement réduits l’année dernière. Pour 2015, les AE s’élèvent à 156 millions d’euros contre 158,8 millions en 2014 et les CP à 166 millions contre 168,8 en 2014.

Cette contraction des crédits doit s’accompagner d’une vigilance soutenue pour ne pas nuire à la préservation des bâtiments de l’État.

I. LE COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DE L’ÉTAT

Le compte d’affectation spéciale (CAS) Gestion du patrimoine immobilier de l’État comprend deux programmes, le programme 721 Contribution au désendettement de l’État et le programme 723 Contribution aux dépenses immobilières.

1° En recettes sont inscrites :

a) Le produit des cessions des biens immeubles de l’État ainsi que des droits à caractère immobilier attachés aux immeubles de l’État ;

b) Les versements du budget général ;

c) Les fonds de concours ;

2° En dépenses sont inscrites :

a) Les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées à des opérations immobilières réalisées par l’État sur des biens immobiliers dont l’État est propriétaire ou, lorsqu’il n’en a pas la propriété, sur des biens immobiliers figurant à l’actif de son bilan, sous réserve que ces dépenses soient directement liées à des opérations concourant à une gestion performante du parc immobilier de l’État ;

b) Les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées à des opérations de cession, d’acquisition ou de construction d’immeubles du domaine de l’État réalisées par des établissements publics et autres opérateurs de l’État, sous réserve que ces dépenses soient directement liées à des opérations concourant à une gestion performante du parc immobilier de l’État ;

c) Les versements opérés au profit du budget général ;

d) Les versements opérés au profit du budget annexe Contrôle et exploitation aériens.

Si le solde des opérations du CAS a été négatif en 2013 (- 164,5 millions d’euros) du fait d’une surévaluation des recettes et de dépenses en augmentation, ce déficit a été absorbé par les réserves qu’il a constituées au cours des années précédentes.

L’État utilise les recettes du compte spécial pour financer des dépenses immobilières. Afin que les ministères soient incités à céder des biens immobiliers, le Gouvernement a décidé que les ministères cédant des biens percevraient les recettes correspondantes après prélèvement d’un pourcentage affecté au programme Contribution au désendettement de l’État.

Pour permettre la rétrocession du produit des cessions aux ministères, le compte spécial est divisé en autant de budgets opérationnels de programme qu’il y a de ministères concernés.

A. UNE POLITIQUE DE CESSIONS ACTIVE MALGRÉ UNE DIMINUTION DU NOMBRE ET DE LA VALEUR DES BIENS À VENDRE

La politique de cessions immobilières de l’État franchit un nouveau seuil dans le projet de loi de finances pour 2015 avec un objectif de 521 millions d’euros de cessions.

Le Rapporteur spécial tient à rappeler qu’une cession n’est jamais un but en soi, mais constitue l’aboutissement d’une réflexion sur la rationalisation des implantations du parc immobilier. Les cessions immobilières doivent permettre de réaliser des économies de fonctionnement durables, par le relogement des administrations sur un nombre de sites réduit dans un parc fonctionnel et aux normes, notamment environnementales.

Au 9 septembre 2014, les 614 cessions réalisées depuis le 1er janvier 2014 représentent 300 millions d’euros de produits de cessions. Depuis le début de l’année, 370,7 millions d’euros ont été comptabilisés sur le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l’État, correspondant aux cessions réalisées en 2014 et aux restes à encaisser des exercices antérieurs. Au regard des cessions qui demeurent programmées en 2014 (867 cessions représentant un produit potentiel de 328 millions d’euros), la prévision inscrite en loi de finances pour 2014 (470 millions d’euros) devrait être atteinte.

Pour 2015, 901 cessions sont programmées, représentant un produit global de 778 millions d’euros. Les exercices de simulation des cessions programmées, au regard notamment de la difficulté à les réaliser, ont abouti à une prévision de recettes de 521 millions d’euros inscrite en projet de loi de finances pour 2015, soit un montant en augmentation de plus de 10 % par rapport à 2014.

Si le nombre de biens de l’État reste globalement important, il faut toutefois indiquer que :

– le volume des biens de l’État à vendre tend à diminuer, au fur et à mesure que le parc se rationalise : au 1er janvier 2011, le programme prévisionnel des cessions immobilières comportait plus de 2 300 opérations, tandis que ce chiffre s’établissait à environ 2 200 au 1er janvier 2013 et à 2 100 biens au 1er janvier 2014 ;

– le pourcentage de biens difficiles à vendre augmente, le marché de l’immobilier étant actuellement peu porteur dans de nombreuses régions, en particulier pour des immeubles de bureaux anciens ;

– les biens exceptionnels à forte valeur, qui constituent traditionnellement la plus grande partie (en valeur) des produits de cession, tendent à se raréfier. La valeur moyenne des biens à vendre tend ainsi à diminuer, ce qui nécessite un nombre de procédures plus important pour atteindre un même résultat : en 2012, ce sont près de 1 300 cessions qui ont été signées pour un montant total de 507 millions d’euros, alors qu’en 2013, les 1 234 cessions réalisées ont représenté seulement 391 millions d’euros.

La plus belle vente de l’année 2014 a été celle de l’ensemble Penthemont-Bellechasse qui a été une opération exemplaire faite avec beaucoup de professionnalisme. L’ensemble Bellechasse-Penthemont, dont certaines parties sont classées au titre des monuments historiques, a été vendu en juin 2014 pour un montant de 137 millions d’euros. Il restera occupé par la direction générale des systèmes d’information et de communication du ministère de la Défense jusqu’en 2016. L’acquéreur est la société foncière des 6ème et 7ème arrondissements.

Le prix de vente a été beaucoup plus élevé que l’estimation, ce qui ne veut pas dire que l’estimation était trop faible, l’estimation étant une probabilité du prix qui ne tient pas compte du prix de convenance. Une très grande publicité a été faite et 85 visites ont regroupé plus de 500 visiteurs. Dix offres ont été présentées dont une très nettement supérieure aux autres.

Depuis la création du CAS en 2006, 5,13 milliards d’euros de cessions ont ainsi été réalisés.

B. LA CONTRIBUTION AU DÉSENDETTEMENT DE L’ÉTAT : TROIS MESURES PROROGÉES DANS LE CADRE DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2015

1. La prorogation de la contribution des cessions de biens immobiliers de l’État au désendettement

L’article 22 du projet de loi de finances pour 2015 proroge, sans limitation dans le temps, la contribution des cessions des biens immobiliers de l’État au désendettement. Cette contribution reste fixée à 30 % du produit retiré de ces cessions.

Il convient de rappeler qu’en application de l’article 47 de loi de finances pour 2006, les produits tirés des cessions immobilières de l’État étaient affectés à son désendettement à hauteur d’un minimum de 30 % en 2014 (cette part, initialement fixée à 15 %, a été progressivement portée à 20 % en 2012, puis 25 % en 2013).

Si la participation du produit des cessions immobilières au désendettement de l’État est confirmée, elle est appelée à rester limitée au regard du poids de la dette.

a. Une contribution au désendettement minorée par les exonérations

L’estimation de cette contribution pour 2015 se calcule en appliquant le taux de 30 % aux prévisions de recettes pour 2015, déduction faite de la part relative aux cessions des administrations exonérées de contribution au désendettement, et en ajoutant la contribution minimale forfaitaire annuelle versée par le ministère des Affaires étrangères au titre de 2015.

Ce taux de contribution est fortement minoré par les exonérations accordées aux ministères ou aux budgets annexes. On estime que le taux effectif de retour ne sera en 2014 que de 17 % soit 80 millions d’euros. Si le retour à 100 % des produits de cession aux ministères concernés a été acté comme justifié étant donné les efforts demandés au ministère de la Défense ou au regard des spécificités et de l’émiettement du parc immobilier à l’étranger, l’effort consacré au désendettement devrait toutefois être considéré comme prioritaire et il faut s’interroger sur la prolongation de ces mécanismes dérogatoires.

À plusieurs reprises, la Cour des comptes a regretté la faiblesse relative des montants alloués in fine au désendettement de l’État. Dans sa note sur l’exécution budgétaire du CAS en 2013, publiée en mai 2014, elle soulignait ainsi que « les exonérations conférées au ministère de la défense, aux immeubles situés à l’étranger et à la DGAC devraient être strictement limitées à quelques opérations immobilières structurantes, voire entièrement supprimées. »

b. Mais qui devrait augmenter de 30 millions en 2015

Compte tenu des exonérations précitées, le taux de contribution 2015 a été évalué à 16 % des 521 millions d’euros de recettes estimées. La contribution correspondante est donc de 83 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 25 millions d’euros correspondant à la contribution minimale forfaitaire annuelle du ministère des Affaires étrangères. La contribution totale pour 2015 est donc estimée à 108 millions d’euros, alors qu’elle n’est estimée qu’à 80 millions sur 2014.

Au titre de l’exercice 2013, la contribution de la politique immobilière au désendettement de l’État s’est établie à 69,4 millions d’euros. Rapportée au montant des cessions immobilières encaissées au 31 décembre 2013, 391,3 millions d’euros, le taux effectif de cette contribution représentait 18 % des produits de cessions 2013.

La différence entre le montant de cette contribution et le total des crédits exécutés sur le programme résulte du fait que la partie de la contribution au désendettement relative aux produits des cessions de 2012 encaissés au dernier trimestre de l’année, a été versée en 2013 et que, a contrario, la contribution au désendettement des produits des cessions encaissés au dernier trimestre de l’année 2013 n’est versée que début 2014.

Ainsi, au total, le montant de la contribution au désendettement payée sur la gestion 2013 s’est élevé à 76,1 millions d’euros (dont 26,8 millions étaient relatifs aux produits de cessions encaissés au cours du dernier trimestre 2012), pour une contribution initialement prévue de 82,5 millions d’euros.

2. La prorogation des mesures d’exemption accordées aux cessions réalisées par le ministère de la Défense

a. Un taux de retour à 100 % indispensable à l’équilibre de la loi de programmation militaire 2014-2019

Le ministère de la Défense bénéficie d’un taux de retour de 100 % des recettes réalisées à l’occasion de la vente de ses biens immobiliers jusqu’au 31 décembre 2014. L’article 22 du projet de loi de finances pour 2015 proroge cette exemption jusqu’au 31 décembre 2019. Cette disposition traduit les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation militaire pour la période 2014-2019.

Les produits des cessions immobilières sont essentiels à l’équilibre budgétaire prévu par la loi de programmation militaire, puisqu’ils représenteront une part significative des ressources exceptionnelles attendues pour les années 2014-2016 (soit environ 200 millions d’euros par an).

PRODUIT DES CESSIONS IMMOBILIÈRES ENTRANT DANS LES RESSOURCES EXCEPTIONNELLES PRÉVUES PAR LA LPM 2014-2019

(en millions d’euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Total

210

200

200

50

0

0

660

Source : ministère de la Défense.

L’intégralité des produits des cessions immobilières réalisées sur la période 2014-2019 sera affectée à la poursuite des restructurations menées au sein du ministère de la Défense.

Les cessions prévues dans le cadre de la loi de programmation militaire se répartissent ainsi :

– des cessions des immeubles parisiens qui deviendront inutiles dès lors que le regroupement de l’ensemble des états-majors et des directions de service sur le site de Balard sera effectif ;

– plus d’une centaine de cessions immobilières hors région parisienne, la majeure partie concernant des emprises libérées dans le cadre des mesures de restructurations opérées sur la période 2009-2014. Les recettes attendues figurent au tableau suivant.

PRÉVISIONS DES PRODUITS DE CESSION DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

SUR LA PÉRIODE 2014-2016

(en millions d’euros)

 

2014

2015

2016

TOTAL

Emprises parisiennes

284

161

85

530

Emprises hors Paris

58

46

40

144

TOTAL

342

207

125

674

Source : ministère de la Défense.

Les encaissements relatifs aux cessions opérées au titre de la précédente loi de programmation militaire 2009-2014 doivent atteindre 1 053 millions d’euros (exécution et prévision pour les années 2013 et 2014).

b. Des procédures de cession dérogatoires

L’article 29 bis de la loi de programmation militaire 2014-2019 a prolongé jusqu’au 31 décembre 2019 les procédures de cession dérogatoires dont bénéficie la Mission de réalisation des actifs immobiliers du ministère de la Défense pour la vente de certains types d’immeubles.

Les dispositions de droit commun, codifiées à l’article L. 3211-1 du code général de la propriété des personnes publiques, ne sont pas applicables au ministère de la Défense (pas de condition de non-utilisation par les services et établissements publics de l’État, procédure qui s’avère souvent longue et complexe et peut aboutir à une dépréciation du prix du bien). De plus, dans un certain nombre de cas, la cession peut être consentie à l’amiable sans appel à la concurrence.

Ces procédures de cessions dérogatoires permettent de simplifier et d’accélérer les procédures de vente et constituent un facteur important de reconversion des anciens sites de la défense et de redynamisation des territoires sur lesquels ceux-ci sont implantés.

3. Une prorogation des mesures d’exemption sous conditions pour le ministère des Affaires étrangères

Le ministère des Affaires étrangères bénéficie d’un taux de retour de 100 % des recettes réalisées à l’occasion de la vente de ses biens immobiliers situés à l’étranger jusqu’au 31 décembre 2014.

L’article 22 du projet de loi de finances pour 2015 prolonge ce régime dérogatoire jusqu’au 31 décembre 2017, mais en le conditionnant :

– au versement d’une contribution minimale forfaitaire de 25 millions d’euros. Ce versement interviendrait chaque année jusqu’en 2017.

– à l’occupation par le ministère des Affaires étrangères des biens cédés.

Le maintien d’une exemption partielle répond, selon l’évaluation préalable du présent article, à un « besoin de financement identifié » qui ne fait pas l’objet d’une présentation plus détaillée. Il permet certes d’inciter à une gestion dynamique du parc immobilier du ministère à l’étranger, mais on peut se demander si les restructurations d’ambassade doivent être financées au détriment du désendettement de l’État.

Le Rapporteur spécial se félicite de cette première avancée qui permet de rapprocher progressivement le ministère des Affaires étrangères du régime de droit commun, mais il souhaite que soit envisagée dans un avenir proche la suppression définitive de l’exemption à l’effort de désendettement dont bénéficie ce ministère.

C. UNE CONTRIBUTION AUX DÉPENSES IMMOBILIÈRES DE L’ÉTAT AJUSTÉE AUX PRODUITS DE CESSION

Le programme 723 Contribution aux dépenses immobilières enregistre la partie financée à partir des produits de cessions d’actifs immobiliers.

Les dépenses immobilières bénéficient d’une dotation de 418,8 millions d’euros en AE et de 413 en CP, alors que sur 2014 elles s’élevaient respectivement à 485 et 470 millions d’euros. Les CP à hauteur de 413 millions d’euros correspondent aux recettes attendues (521 millions d’euros), une fois déduite la part correspondant à la contribution au désendettement de l’État (108 millions d’euros).

1. L’utilisation sur 2014 de l’enveloppe mutualisée

Fin août 2014, le montant des dépenses financées depuis l’enveloppe mutualisée des produits de cession est de 29,37 millions d’euros en AE et 29,5 en CP. Le principal poste de dépenses est la contribution au financement des investissements des cités administratives à hauteur de 21,4 millions d’euros. Les crédits restants portent sur les actions de modernisation de la politique immobilière de l’État.

2. Les principaux projets sur 2015

Plusieurs opérations de regroupements qui s’inscrivent dans la modernisation de l’action publique, sont poursuivies : regroupement à partir de 2015, sur le site Balard, des services et des états-majors de l’administration centrale du ministère de la Défense, lancement des travaux de rénovation de la paroi Sud de l’Arche de la Défense dans le cadre du regroupement de l’administration centrale du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie et du ministère du Logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.

Les autres opérations, sous réserve de validation par les Comités de politique immobilière organisés entre les ministères, France Domaine et la direction du Budget, pourraient être les suivantes :

– ministère des Affaires étrangères : la programmation 2015 est présentée à titre indicatif sous réserve des modifications qui seraient soumises à l’avis de la commission interministérielle sur les opérations immobilières de l’État à l’étranger (CIME). Il s’agit de la relocalisation de l’ambassade et de la résidence à Helsinki, la réorganisation du « cœur de réseau » du Quai d’Orsay et la relocalisation de l’institut et du consulat avec rénovation de l’Hospice Wallon à Amsterdam,

– ministère de l’Intérieur : rationalisation du site d’implantation d’administration centrale constitué par le pôle « Beauvau » ; poursuite des opérations de réhabilitation lourde de certaines casernes de la Gendarmerie nationale,

– ministères financiers : poursuite à Metz de l’opération de relogement de l’INSEE,

– ministère de l’Éducation nationale : poursuite à Lille de l’opération de relogement du rectorat,

– ministère de la Justice : acquisition du site Millénaire III pour le relogement de l’administration centrale du ministère, construction d’un centre de semi-liberté à Saint-Martin les Boulogne,

– ministère de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt : travaux de densification et de remise aux normes du site de l’avenue de Lowendal à Paris.

Le Rapporteur spécial rappelle qu’il a plaidé à plusieurs reprises pour la disparition du mécanisme de « retour » aux ministères au profit d’une mutualisation des recettes des cessions qui peut seule permettre d’arbitrer les vraies priorités. Le service France Domaine, incarnation de l’État propriétaire, pourrait ainsi jouer son rôle et véritablement piloter les opérations immobilières des ministères. Le maintien de la règle de « retour » aux ministères, même réduite à 50 %, maintient ces derniers dans une attitude de quasi-propriétaire en les laissant maîtres de leurs budgets d’investissement. France Domaine examine toutefois la conformité des opérations projetées par les ministères aux orientations de la nouvelle politique immobilière de l’État, en étudiant la performance immobilière de ces opérations.

II. POURSUIVRE LA RATIONALISATION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DE L’ÉTAT

1. Le retard pris dans la signature des conventions d’utilisation devrait se résorber

Les conventions d’utilisation entérinent la distinction entre propriétaire et occupant. Les deux parties à cette convention, que sont le représentant de l’État propriétaire et le service utilisateur en tant qu’occupant, s’engagent réciproquement devant le préfet du département, représentant de l’État, sur les conditions de mise à disposition du bâtiment domanial. Les conventions d’utilisation sont des contrats traduisant l’occupation par un service de l’État ou un établissement public national d’un bien appartenant à l’État.

Le stock des biens à passer sous convention d’utilisation (biens domaniaux occupés par des services de l’État ou des établissements publics nationaux bénéficiant d’arrêtés d’affectation ou de remise en dotation) s’établit à 91 933, en intégrant les biens de l’État à l’étranger. Conformément au décret n° 2014-808 du 16 juillet 2014, le délai de passation de ces conventions a été prorogé au 31 décembre 2016.

Le dernier recensement trimestriel effectué au 30 juin 2014 indique que 78 181 occupations font actuellement l’objet d’un projet de convention d’utilisation finalisé et proposé à la signature des services utilisateurs. Sur ces projets, 46 549 conventions, soit 60 %, ont effectivement été signées à la même date. Cet écart, qui tend progressivement à se réduire, permet d’identifier l’avancement conséquent, eu égard au stock global de 91 933, réalisé par les services France Domaine et la marge de progression, côté utilisateur, pour réduire le délai de signature.

L’élaboration des conventions d’utilisation, ainsi que la gestion de leur cycle de vie (gestion des événements contractuels, contrôles triennaux, clôtures des contrats) est aujourd’hui effectuée au moyen d’outils bureautiques au sein de France Domaine.

2. Les obstacles à la généralisation du dispositif des loyers budgétaires

Le tableau des loyers budgétaires acquittés par les ministères met en exergue des disparités de paiement selon le ministère occupant. Certains impayés relèvent toutefois de problèmes techniques liés à une mauvaise utilisation de Chorus, et non d’un défaut de paiement. Afin de régulariser cette situation, des groupes de travail ont été lancés conjointement entre France Domaine, l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) et les administrations concernées (principalement les services du Premier ministre).

a. Un recensement difficile des immeubles soumis au dispositif

L’assujettissement des seuls immeubles propriétés de l’État constitués majoritairement de bureaux exige de déterminer, en lien avec les occupants, quels sont les immeubles qui remplissent ces critères, ce qui peut poser des problèmes pratiques. Cette question est étroitement liée à celle de la définition et de la fiabilisation des mesurages de surfaces utiles nettes (SUN) et de surfaces utiles brutes (SUB) des immeubles inventoriés dans l’outil Chorus RE-FX. La campagne 2013 de fiabilisation des données du parc de bureaux permet de cibler les immeubles relevant à tort du périmètre des immeubles soumis à loyers budgétaires et, a contrario, ceux devant être dorénavant assujettis. Une nouvelle campagne de fiabilisation est prévue afin de réajuster l’enveloppe globale du montant des loyers budgétaires du parc immobilier de la Défense, principal concerné.

Les services locaux du domaine identifient régulièrement des immeubles non intégrés dans le recensement initial. La mise en place du nouveau loyer budgétaire ne peut se faire qu’en laissant un délai à l’occupant, ce qui implique souvent de décaler l’entrée en vigueur du loyer au 1er janvier de l’année suivante.

b. Un suivi des impayés imparfait

Le non-paiement du loyer ou le retard de paiement des échéances trimestrielles de loyer n’entraîne pas, en pratique, d’application des sanctions financières prévues dans la convention d’utilisation. Le dispositif de relance est également imparfait : en l’absence de relance automatique dans l’outil Chorus, France Domaine envoie trimestriellement des synthèses faisant figurer les loyers impayés. L’extension du champ de relance automatique lors d’impayés dans Chorus RNF fait l’objet d’une étude selon les modalités de gouvernance des évolutions Chorus. Par ailleurs, l’outil Chorus ne permet pas d’établir un lien entre le module relatif au loyer budgétaire et le module d’inventaire immobilier (RE-Fx), ou d’obtenir des restitutions complètes et exhaustives sur l’état des impayés de l’année en cours et des années passées. Un nouvel outil, l’outil de gestion des contrats immobiliers, prévu début 2016, devrait pallier l’absence de lien entre Chorus RNF et Chorus RE-Fx, ce qui permettrait d’assurer un suivi des impayés complet et exhaustif.

La circulaire du 31 mars 2011 du ministre du Budget prévoit un dispositif de sanction en cas de non-respect des engagements de performance immobilière (mise en place d’un surloyer) ou d’incitation financière en cas d’optimisation des surfaces occupées (diminution du montant du loyer budgétaire).

3. La gestion des logements de fonction : un devoir d’exemplarité

La meilleure gestion des logements de fonction, qui s’inscrit dans une démarche d’exemplarité de l’État, vise à réduire le nombre de concessions de logements d’environ 20 %.

Les logements concernés sont ceux relevant directement des ministères, en excluant ceux occupés par des gendarmes, des militaires, ou encore ceux des établissements scolaires qui relèvent des collectivités locales.

Le ministère en charge du domaine a appliqué, ministère par ministère, de nouvelles règles destinées à rationaliser et clarifier l’attribution de logements. N’ont droit à un logement de service que les fonctionnaires tenus par leur mission à une disponibilité totale, tandis que ceux qui ont soumis à des obligations d’astreinte voient la moitié de leur loyer pris en charge, sous réserve du respect de critères de surface précis.

La quasi-totalité des arrêtés interministériels listant les fonctions bénéficiaires de logements de fonction a été publiée. Le Rapporteur spécial souhaite que lui soit communiqué le montant des économies ou recettes supplémentaires attendues de cette réforme.

4. L’année 2015 sera marquée par l’expérimentation des schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR)

a. Les schémas pluriannuels de stratégie immobilière ont rarement permis de faire émerger une vision régionale

Les schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI) ont été conçus pour permettre aux administrations centrales et déconcentrées, ainsi qu’aux opérateurs, de se doter d’objectifs de moyen terme pour piloter leur politique immobilière.

Ils ont d’abord été établis par l’administration centrale de chaque ministère pour la partie concernant les services centraux, puis étendus, sous l’autorité des préfets, et dans le cadre de la réforme de l’administration territoriale de l’État, à l’ensemble des services déconcentrés de l’État installés dans les départements.

Ces schémas pluriannuels ont rarement permis de faire émerger une vision régionale, dans la mesure où les schémas régionaux ont juxtaposé, sans les intégrer, les différents schémas des départements de la région considérée et les schémas des administrations restées « autonomes ».

b. Une nouvelle génération de schémas territoriaux

Lors de son intervention devant les membres du Conseil de l’immobilier de l’État le 15 mai 2013, le ministre a proposé de définir la stratégie immobilière de l’État au niveau régional. Dans ce cadre, les schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR), placés sous la responsabilité du préfet de région, seraient initiés et validés au plan local en associant l’ensemble des acteurs locaux, puis validés et appuyés au niveau national dans le cadre d’une instance à définir. Le comité interministériel de modernisation de l’action publique (CIMAP) du 18 décembre 2013 a posé le principe d’une expérimentation des SDIR dans quatre régions.

La décision n° 9 du CIMAP traduit les orientations du ministre chargé du domaine au niveau interministériel. Cette décision a fait l’objet d’un travail approfondi de déclinaison en 2014 : une circulaire du Premier ministre relative aux schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR) devrait être publiée prochainement en vue du lancement de l’expérimentation. Ils seront expérimentés dans trois régions de métropole (Rhône-Alpes, Limousin, Pays de Loire) et une région d’Outre-mer (La Réunion) en 2015.

Ces schémas directeurs reposeront sur une analyse économique approfondie et comporteront des volets relatifs à l’accessibilité et à la performance énergétique. Ils intégreront l’ensemble des administrations déconcentrées et associeront les opérateurs de l’État, afin d’identifier toutes les possibilités de rationalisation et de mutualisation.

Le SDIR devrait permettre d’assurer la cohérence régionale entre les différents schémas départementaux et la mise en œuvre d’une stratégie immobilière globale à l’échelle du parc immobilier de l’État et de ses opérateurs.

Le Rapporteur spécial constate que, 12 mois après la décision du CIMAP, cette réforme n’est toujours pas mise en œuvre.

5. L’évaluation de la performance du compte d’affectation spéciale

a. La qualité des évaluations domaniales évaluée sur la durée moyenne de vente d’un bien immobilier

L’objectif d’amélioration de la qualité des évaluations domaniales a pour indicateur la durée moyenne de vente d’un bien immobilier.

Dans le cadre de la simplification du suivi de la performance, les indicateurs relatifs aux écarts entre les prix de cessions et les estimations domaniales ont été abandonnés. L’indicateur sur la durée moyenne de vente est désormais rattaché au programme 721.

L’objectif de cet indicateur pour 2015 vise à affirmer une nouvelle étape dans sa progression en s’appuyant sur les actions de modernisation et de professionnalisation engagées dans le cadre des évaluations domaniales et de la démarche de commercialisation des actifs.

b. L’objectif des 12 m² de surface utile nette par bureau n’est pas atteint

S’agissant des indicateurs de performance du programme 723, la maquette de performance a évolué dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015. Dans un souci de simplification, un seul indicateur rattaché à l’objectif « Optimiser le parc immobilier de l’État » est désormais retenu pour évaluer la progression du programme. Il porte sur le rendement d’occupation des surfaces, c’est-à-dire le nombre de m² de surface utile nette (SUN) par poste de travail.

Le résultat obtenu en 2013 (14,36 m²) montre une tendance baissière certaine (16 m² en 2012), mais indique que l’effort doit être maintenu et approfondi. Le service France Domaine va donc maintenir et amplifier en 2015 ses efforts et sa mobilisation auprès des ministères utilisateurs pour tendre vers le ratio cible de 12 m² maximum : l’objectif de 14 m² pour 2015 est déterminé sur cette base.

L’objectif de l’État de parvenir à 12 m²/agent maximum dans les immeubles de bureau n’est pas encore satisfait. Sur ce point, le Gouvernement a retenu une cible de 15,37 m² pour 2014. En réalité ce chiffre recouvre une réalité contrastée : dans les services déconcentrés la cible SUN (surface utile nette/poste exprimé en ETPT) est de 21,5 m²/agent, une performance qui semble se dégrader car la baisse des effectifs de l’ordre de 3 % par an est plus rapide que la diminution des surfaces de l’ordre de 2 % par an.

La réduction des effectifs s’accompagne souvent d’une dégradation de la performance d’occupation et d’une augmentation des coûts immobiliers par poste de travail.

Afin de s’intégrer dans la stratégie mise en place dans le cadre de la modernisation de l’action publique, il importe que les suppressions de postes, la réingénierie des missions et des corps, la réforme de l’administration territoriale de l’État, se traduisent concrètement par une diminution des emprises immobilières, de façon à converger vers l’objectif de 12 m² par agent pour les bureaux.

Le Rapporteur spécial rappelle que cet objectif a été fixé en 2009 ; il est donc indispensable que son respect soit assuré au plus tard en 2017. Un délai de près de 10 ans pour respecter une instruction du Premier ministre et prendre les mesures d’adaptation nécessaires lui paraît long.

La projection 2015-2017 indique clairement la volonté de dynamiser le ratio d’occupation, en s’appuyant notamment sur les opérations structurantes : les nouveaux projets immobiliers, ainsi que les prises à bail, doivent s’inscrire systématiquement en deçà du ratio de 12 m², qui constitue un « plafond » et non un plancher du point de vue de la politique immobilière de l’État. Cet objectif est particulièrement suivi dans le cadre de la prochaine expérimentation des schémas directeurs immobiliers en région (SDIR), qui doit décloisonner la gestion immobilière de l’État, en vue de mutualiser l’ensemble des opportunités. Enfin, la déclinaison de la politique immobilière de l’État à ses opérateurs s’appuie, notamment, sur le suivi de ce ratio de performance immobilière.

III. LE PROGRAMME 309 ENTRETIEN DES BÂTIMENTS : UNE OPTIMISATION DES CRÉDITS INCONTOURNABLE

Le programme 309 a été constitué en 2009 pour sensibiliser les administrations à la nécessité d’entretenir de manière régulière leur patrimoine immobilier, et améliorer la lisibilité de l’utilisation des crédits. Les crédits de ce programme sont employés pour réaliser l’entretien lourd des bâtiments possédés ou contrôlés par l’État, et en priorité ceux soumis à loyer budgétaire, c’est-à-dire ceux propriété de l’État, constitués majoritairement de bureaux et occupés par des services de l’État.

1. La séparation des fonctions de propriétaire et d’occupant

La séparation des fonctions de propriétaire et d’occupant constitue le fondement de la nouvelle politique immobilière de l’État, telle que développée avec la création du service France Domaine.

Le programme Entretien des bâtiments de l’État regroupe les crédits d’entretien relevant du propriétaire. La charte de gestion du programme identifie ainsi clairement la liste des équipements dont les travaux relèvent du propriétaire ou de l’occupant. De manière générale, la règle de répartition des charges d’entretien se base sur une affectation au propriétaire des éléments dont le fonctionnement est nécessaire en l’absence d’occupation du site, le locataire assurant l’entretien des éléments nécessaires en raison de sa présence.

Pour 2015, les AE s’élèvent à 156 millions d’euros contre 158,8 en 2014 et les CP à 166 millions d’euros contre 168,8 en 2014.

Une part de ces crédits est confiée aux ministères pour leur permettre d’assurer l’entretien de leur parc d’administration centrale soumis à loyer budgétaire.

2. Les préfets de régions ont des responsabilités de plus en plus étendues en matière de politique d’entretien du patrimoine de l’État

La part relative à l’entretien du parc déconcentré est confiée aux préfets de région depuis 2010. La mise en place d’une politique d’entretien du patrimoine de l’État constitue l’un des volets de sa fonction de représentant de l’État-propriétaire au plan local. Depuis 2013, la régionalisation a été étendue aux services déconcentrés de la DGFiP, des douanes et de la Justice, renforçant ainsi la mutualisation des moyens.

Les compétences nécessaires à la mise en place d’une politique d’entretien immobilier sont mutualisées dans chaque région. Des cellules régionales de suivi de l’immobilier de l’État (CRSIE) ont été mises en place pour assister les préfets de région. Elles sont constituées du secrétariat général des affaires régionales (SGAR), du responsable régional de la politique immobilière de l’État et des responsables plan Bâtiment du ministère de l’Écologie. Certaines cellules associent ponctuellement d’autres administrations occupantes pour bénéficier notamment de leurs compétences immobilières (antennes immobilières des ministères financiers, SGAP, services régionaux du service des achats de l’État, etc.). Ces cellules régionales coordonnent leurs travaux sous l’autorité de la cellule nationale de suivi de l’immobilier de l’État (CNSIE) dont la création et la composition sont formalisées au sein d’une convention conclue par le ministre de l’Écologie et le ministre du Budget, chargé du domaine.

Les objectifs donnés aux ministères et aux préfets de régions pour l’emploi des crédits du programme Entretien des bâtiments sont les suivants :

– assurer l’entretien du patrimoine du point de vue du propriétaire, tout en sécurisant les biens et en veillant à la satisfaction des occupants ;

– développer la part de maintenance préventive des bâtiments, sources d’économies sur le long terme, et s’assurer de la réalisation des contrôles réglementaires sur le parc concerné ;

– contribuer à l’atteinte des objectifs de performance énergétique et à la mise en accessibilité des bâtiments publics ;

– mutualiser la ressource en interministériel via la régionalisation des crédits (renforcée en 2013), la professionnalisation des cellules immobilières régionales et la mise en place de marchés mutualisés (contrôles réglementaires, maintenance etc.).

3. Une diminution des crédits qui permettra d’assurer essentiellement les opérations liées à la sécurité des personnes

Comme l’ensemble des programmes du budget de l’État, hors missions prioritaires, le programme Entretien des bâtiments participe à l’effort de rétablissement des comptes publics. Le seul objectif porte sur l’optimisation du coût de l’entretien relevant du propriétaire par la mise en place d’une maintenance préventive et la réalisation des contrôles réglementaires.

Le Rapporteur spécial regrette que les réductions budgétaires soient opérées au détriment des postes d’entretien et de maintenance des immeubles, ce qui ne peut constituer une politique durable et est en contradiction avec les recommandations du CIE.

En raison de la baisse des crédits, conforme à la trajectoire de redressement des comptes publics, une optimisation de leur utilisation est nécessaire. On continue à dépenser trop sur le rattrapage, l’objectif est de faire du préventif.

Les crédits budgétaires sont trop limités pour réaliser l’ensemble des travaux de rénovation et d’amélioration de la performance énergétique nécessaires sur le parc immobilier de l’État.

Les besoins réels sont considérables en termes de remise à niveau et de mise aux normes du fait des obligations relatives à l’accessibilité et au Grenelle de l’environnement (respectivement en 2015 et 2020.)

Depuis 2012, le programme 309 comporte cinq actions :

– Contrôles réglementaires

– Diagnostic-audit-expertise

– Maintenance préventive

– Maintenance corrective

– Travaux lourds

La création de ces actions permet de décomposer l’utilisation de crédits selon les grands types d’opérations hébergées sur le programme. Elle permet par ailleurs de suivre l’avancement d’indicateurs clés dont la mise en place résulte de plusieurs constats :

– d’une part, il a été constaté que, historiquement, l’État maintenait son patrimoine immobilier pour l’essentiel par le biais d’opérations correctives, aux dépens de l’entretien préventif. Pourtant, selon les critères retenus par les professionnels de l’immobilier, la maintenance préventive permet généralement de réduire le coût global de l’entretien ;

– d’autre part, les contrôles réglementaires n’étaient pas systématiquement réalisés, alors qu’ils permettent de s’assurer de la mise en sécurité des biens et des personnes ;

– enfin, l’état technique du parc était insuffisamment connu. Pourtant, une meilleure connaissance des bâtiments est un préalable nécessaire à l’élaboration d’une stratégie immobilière. Cette connaissance passe par la réalisation d’audits (état du bâtiment, bilan énergétique, degré d’accessibilité…) mais aussi par des diagnostics plus ponctuels, utiles pour déterminer en amont la pertinence d’une opération lourde.

En 2013 et 2014, la consommation dédiée aux opérations de maintenance préventive et de contrôles réglementaires a augmenté. Cette progression est notamment rendue possible par la mise en place de marchés mutualisés interministériels. La programmation comporte néanmoins majoritairement des opérations de remise en état et de remise en conformité des immeubles. Ce constat s’explique essentiellement par le déficit d’entretien des immeubles avant la mise en place du programme, et le nécessaire « rattrapage » des retards accumulés.

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

4. La mise en œuvre du Grenelle de l’environnement dans les bâtiments publics : un sujet stratégique

Le programme Entretien des bâtiments ne distingue pas spécifiquement les dépenses liées aux objectifs de performance énergétique, car il s’agit pour l’instant d’une partie accessoire à son contenu dédié à l’entretien lourd du propriétaire. Toutefois une enquête menée en 2013 a permis d’estimer la part climat des actions du programme 309 : elle s’élève à un peu moins de 20 % des crédits du programme.

Pour mener à bien cette politique, il est indéniable qu’un effort budgétaire sera nécessaire, mais les difficultés de financement ne doivent pas servir de prétexte à l’inaction. En ce domaine, les changements de comportement et les réductions de superficie sont un levier aussi efficace que les lourds travaux de restructuration.

IV. AMÉLIORER LE SYSTÈME D’INFORMATION DE LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE

Créée pour définir et mettre en œuvre la stratégie informatique financière de l’État, l’Agence pour l’informatique financière de l’État (AIFE) regroupe l’ensemble des applications financières des administrations centrales et déconcentrées. Elle a construit le système d’information Chorus – outil d’exécution des dépenses, des recettes non fiscales, de tenue des comptabilités générale et budgétaire et de production des comptes de l’État – et exerce ses missions au service de tous les ministères, sous l’autorité d’une instance interministérielle, le Comité d’orientation stratégique du système d’information financière de l’État (COS SIFE).

À la suite d’une décision du comité, le recensement physique et comptable du patrimoine immobilier de l’État dans Chorus a été initié en juin 2007. Il s’est basé sur une reprise des données issues du serveur du tableau général des propriétés de l’État (TGPE), des applications G2D (ministère de la Défense) et GEAUDE (Gendarmerie), ainsi que de l’application SEQUOIA (Office national des forêts).

Ainsi, depuis 2009 :

– Le module RE-Fx permet de suivre l’inventaire physique immobilier et les données relatives à l’occupation des immeubles, la nature, la fonction, la localisation et la description des biens. Il regroupe l’ensemble des biens gérés par l’État et ses opérateurs, quel que soit le mode juridique de l’occupation (immeubles domaniaux, biens propres, prises à bail, mises à disposition) et quelle que soit la nature des immeubles (bureau, logement, bâtiments techniques, terrains, etc.).

– Le module FI-AA constitue l’outil de suivi de la comptabilité auxiliaire des immobilisations. Les biens immobiliers qui sont contrôlés par l’État sont gérés dans ce module de comptabilité auxiliaire, et inscrits au bilan de l’État pour une valeur correspondant à leur valeur vénale ou spécifique.

1. La fiabilisation des données a conduit la Cour des comptes à lever ses réserves sur l’inventaire du parc immobilier

Les très importants travaux menés par France Domaine, en liaison étroite avec l’AIFE, entre 2010 et 2013, en vue de fiabiliser les données de l’inventaire physique portées par Chorus et de sécuriser les processus (contrôle interne, renforcement de la formation des acteurs, etc.), notamment pour les besoins de la comptabilité patrimoniale de l’État, ont permis une amélioration significative de la qualité des données de l’inventaire du parc immobilier. Les travaux de fiabilisation du référentiel physique ont conduit la Cour des comptes à lever la réserve sur le patrimoine immobilier, successivement lors de la certification des comptes de l’État de 2012 (réserve substantielle) et 2013 (autres réserves).

La Cour a reconnu que des progrès ont été accomplis dans le champ du recensement et de l’évaluation du parc immobilier de l’État. Elle recommande de poursuivre les efforts importants consentis par la Direction générale des finances publiques, notamment pour l’immobilier situé à l’étranger.

Les données de l’inventaire immobilier ainsi fiabilisées constituent un socle d’information indispensable à la mise en œuvre et au développement de la politique immobilière de l’État.

La nécessité de mettre en place un système d’information immobilier performant, couvrant les besoins fonctionnels de l’État-propriétaire et partagé avec les ministères, a été réaffirmée lors du CIMAP du 18 décembre 2013. En application de sa décision n° 9, France Domaine devrait être doté des outils informatiques métiers nécessaires à une meilleure connaissance du parc et à la professionnalisation de son action.

2. Disposer d’un système d’information opérationnel

Compte tenu du coût de la fonction immobilière de l’État, un outil de programmation immobilière efficace constitue un enjeu financier considérable.

La mise à jour du référentiel concernant les opérateurs est effectuée par les garants du référentiel immobilier des opérateurs (GRIO), au sein des services locaux du Domaine, en liaison avec les gestionnaires immobiliers des opérateurs. La comptabilité est gérée dans les systèmes comptables spécifiques de ces opérateurs. S’agissant de la situation locative des services de l’État et des opérateurs, le module RE-Fx de l’application Chorus permet de disposer de données exhaustives. Le service France Domaine de la DGFiP dispose maintenant d’un Infocentre qui lui permet d’accéder aux données immobilières contenues dans RE-Fx via une interface ergonomique. Par ailleurs, un outil de gestion des contrats immobiliers (dont les prises à bail) est en cours de développement par l’AIFE pour le compte de France Domaine, et sera déployé courant 2016. Le déploiement de ces nouveaux outils statistiques, qui est accompagné d’une campagne de fiabilisation des données existantes, permettra à terme à l’État de disposer en temps réel de données sur la situation de ses baux.

Dans le cadre des travaux sur Chorus, le comité d’orientation stratégique du projet a retenu, en juin 2007, l’utilisation de modules du progiciel de gestion intégré de SAP pour permettre le remplacement du tableau général des propriétés de l’État (TGPE) et la mise en place progressive de fonctionnalités avancées de gestion de l’immobilier de l’État. Le démarrage du module immobilier de Chorus est intervenu le 6 avril 2009.

Cette application concerne l’ensemble des gestionnaires de biens immobiliers de tous les ministères, situés sur l’ensemble du territoire en France et à l’étranger et les agents de la DGFiP (services locaux du Domaine et comptables en charge des opérations permettant l’établissement du bilan de l’État). Le parc immobilier géré par le ministère de la Défense et celui géré par les opérateurs de l’État ont été basculés dans le nouveau module. Aujourd’hui près de 1 700 utilisateurs, dont 150 agents des services locaux du Domaine, bénéficient d’une connexion au module immobilier de Chorus.

Plusieurs nouvelles fonctionnalités ont été ou vont être déployées : la gestion de l’inventaire physique du parc immobilier des opérateurs, la gestion des données afférentes à la mise en place des schémas pluriannuels de stratégie immobilière et la gestion des conventions d’utilisation et des loyers budgétaires.

Ainsi, depuis 2009, le module RE-Fx permet de suivre l’inventaire physique immobilier et les données relatives à l’occupation des immeubles, la nature, la fonction, la localisation et la description des biens. Il regroupe l’ensemble des biens gérés par l’État et ses opérateurs, quel que soit le mode juridique de l’occupation (immeubles domaniaux, biens propres, prises à bail, mises à disposition) et quelle que soit la nature des immeubles (bureau, logement, bâtiments techniques, terrains, etc..).

Les chantiers actuellement en cours concernant les fonctionnalités avancées de gestion de l’immobilier dans Chorus portent sur la création d’un outil de gestion des contrats immobiliers, la comptabilité bâtimentaire et l’Infocentre.

3. La création d’un outil de gestion des contrats immobiliers

Cet outil, pour lequel une procédure d’appel d’offres est en cours, a pour objet de permettre, au sein du système d’information Chorus l’élaboration et le suivi des types de contrats suivants :

– conventions d’utilisation – gestion de leur cycle de vie, détermination des échéanciers et des factures internes – et amélioration de la gestion des loyers budgétaires éventuellement associés (facturation interne à l’État) ;

– titres d’occupation du domaine public ou du domaine privé de l’État, dont la gestion des redevances domaniales associées ;

– prises à bail (prises en location par l’État de biens immobiliers auprès d’un bailleur externe).

Des enjeux immobiliers et budgétaires forts s’attachent à la réalisation de cet outil :

– la généralisation à l’ensemble du territoire d’une démarche efficace de renégociation des baux de l’État (1,3 milliard d’euros par an de loyers externes),

– le parachèvement du dispositif des conventions d’utilisation et des loyers budgétaires,

– la rationalisation de l’utilisation du parc immobilier,

– l’optimisation du circuit et des modalités de recouvrement des redevances.

Cet outil a vocation à être utilisé par :

– France Domaine (en administration centrale et dans le réseau – services locaux du Domaine et responsables de la politique immobilière de l’État, au sein des directions régionales et départementales des finances publiques (DRFiP/DDFiP)) ;

– les services des préfectures, au niveau régional et départemental ;

– les ministères occupants (acteurs de l’immobilier en administration centrale et en déconcentré).

Dans l’optique de préparer le projet de sa mise en œuvre et de lancer une consultation, l’AIFE a élaboré à partir de septembre 2013 un programme fonctionnel détaillé, correspondant au cahier des charges des fonctionnalités attendues de la solution. Ce document a été élaboré à partir des ateliers de travail menés avec France Domaine et des ministères pilotes, puis partagé avec l’ensemble des ministères.

L’AIFE a initié en mai 2014 une procédure de dialogue compétitif, qui doit se poursuivre jusqu’à la fin de l’année 2014, afin de sélectionner le fournisseur d’une solution applicative pour la gestion des contrats immobiliers.

L’avis d’appel public à la concurrence relatif à l’outil de gestion de contrats immobiliers a été publié le 24 mai 2014.

Sur la base de l’évaluation des critères fixés dans le règlement de consultation, les trois candidatures qui ont été retenues pour participation aux phases suivantes du dialogue compétitif sont les suivantes :

• NETiKA, proposant la solution NETiKA RI

• SOPRA GROUP, proposant la solution ULIS

• IBM, proposant la solution TRIRIGA

Sous réserve d’arbitrage budgétaire, le projet relatif à l’outil de gestion des contrats immobiliers devrait débuter en janvier 2015, pour une durée de projet estimée de seize mois.

4. Deux études relatives au système d’information de l’immobilier de l’État doivent donner lieu à des arbitrages

a. Une étude sur la comptabilité relative aux bâtiments

La mise en place d’une comptabilité relative aux bâtiments a pour objectif de mettre en œuvre une comptabilité analytique de l’objet immobilier (site, bâtiment ou terrain), prenant en compte les dépenses d’investissement et les charges, ainsi que certaines recettes. Elle devrait permettre une meilleure connaissance et donc une maîtrise par l’État de son parc immobilier, en tant qu’État-propriétaire mais aussi en tant qu’occupant de ce parc. Les travaux d’études, menés avec la DGFiP (service France Domaine, service comptable de l’État) et la direction du budget, sont en cours d’achèvement, et devront donner lieu à arbitrages.

Depuis la campagne de fiabilisation 2013, l’information relative au parc de bureaux contenue dans Chorus RE-Fx constitue le socle de la réalisation du diagnostic immobilier des schémas pluriannuels de stratégie immobilière (SPSI). En effet, les formulaires de diagnostic SPSI sont pré-alimentés de données relatives aux bâtiments issues du référentiel immobilier RE-Fx.

En retour, une fois enrichies et modifiées si nécessaire par les utilisateurs des biens, ces données ont été injectées en masse dans RE-Fx en deux vagues (automne 2013 et printemps 2014).

b. Une étude sur l’Infocentre

L’Infocentre est un outil de gestion des données immobilières. Les données afférentes à la mise en place des schémas pluriannuels de stratégie immobilière y sont stockées et restituées. Un certain nombre d’indicateurs (ratios d’occupation, respect des plafonds de loyers, etc..) qui seront modélisés dans l’outil de gestion des contrats immobiliers seront restituables aussi dans l’infocentre immobilier Chorus si celui-ci est étendu.

L’étude Infocentre immobilier Chorus porte sur l’extension des fonctionnalités infocentre aujourd’hui proposées dans le cadre de la solution Chorus, tant en termes d’analyse du parc immobilier, que de suivi comptable et financier lié à ce parc. Une telle extension permettrait d’organiser et présenter la comptabilité bâtimentaire, en associant à celle-ci les données relatives au parc et à son occupation.

L’ensemble de ces travaux est en cours d’achèvement et devra donner lieu à arbitrages.

Le Rapporteur spécial constate que nombre des projets évoqués précédemment demeurent en attente ou ont des calendriers longs, voire très longs, de réalisation. Il ne méconnaît pas les contraintes techniques et budgétaires pesant sur ces différents projets. Il souligne toutefois que, dix ans après la publication du rapport d’information de MM. Georges Tron, Yves Deniaud et Augustin Bonrepaux sur la gestion et la cession du patrimoine immobilier de l’État et des établissements publics, l’État ne s’est toujours pas doté de systèmes d’information opérationnels en matière immobilière. Il souhaite que les administrations responsables prennent conscience du caractère stratégique et désormais urgent de ces dossiers pour contribuer à améliorer la gestion publique.

V. RENDRE EFFECTIVE LA MOBILISATION DU FONCIER PUBLIC EN FAVEUR DU LOGEMENT

Si l’on en juge par le nombre très limité d’opérations réalisées à ce jour, la loi sur la mobilisation du foncier public en faveur du logement ne semble pas encore produire les effets escomptés.

Toutes les mesures nécessaires ont été prises en moins de six mois : textes d’application (décret en Conseil d’État du 15 avril 2013, circulaires du 29 mars, du 26 mai et du 13 juin 2013), recensement des terrains (constitution d’un vivier de 350 emprises cessibles permettant la constitution des listes régionales de biens mobilisés), formation spécifique des agents du service France Domaine aux méthodes d’évaluation élaborées avec l’administration centrale du ministère du Logement.

Ces travaux préparatoires ont notamment permis aux préfets de région, après consultation du comité régional de l’habitat et des collectivités concernées comme le prévoit la loi, d’inscrire sur les listes régionales près de 250 biens que l’État s’engage à céder en faveur du logement, et qui peuvent faire l’objet d’une décote de droit en cas construction de logements sociaux (étant rappelé qu’une décote peut être accordée par l’État même sur les biens ne figurant pas sur les listes).

Au-delà du travail de recensement sur la base des biens déclarés inutiles par les administrations occupantes, le ministre chargé du domaine a demandé aux autres ministres de recenser, au sein des biens encore occupés par leurs administrations et situés en zone de tension foncière, ceux qui pourraient être libérés, afin d’anticiper sur leur éventuelle mobilisation en faveur du logement.

1. Seuls trois terrains ont fait l’objet d’un acte de cession définitif et soixante dossiers sont en cours d’instruction

En termes de procédures de cession, une soixantaine de dossiers sont en cours d’instruction conjointe par les services en charge du logement et du domaine, pour une cession à échéance 2014/2015. Au 1er septembre 2014, trois biens avaient fait l’objet d’un acte de cession définitif :

– la caserne Martin à Caen (Calvados), d’une valeur vénale de 4,3 millions d’euros, et dont le prix de cession définitif (tenant compte du reclassement de la ville de Caen en zone de pression foncière) s’établit à 3,1 millions d’euros, soit une décote de 1,2 million d’euros, ou 28 %. Il y sera réalisé un programme de 157 logements, dont la moitié sociaux, ainsi que des équipements publics. Cette opération avait donné lieu, dès le 17 mai 2013, à la signature d’un protocole par le Président de la République ;

– un terrain d’une superficie de 10 600 m² au sein de la zone d’aménagement concertée (ZAC) Flaubert à Grenoble (Isère), d’une valeur vénale de 3,7 millions d’euros, cédé 1 million d’euros, soit une décote de 2,7 millions d’euros, ou 73 %. Il y sera réalisé un programme de 151 logements, dont 127 sociaux, avec également des équipements publics ;

– l’ancien commissariat de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), d’une valeur vénale de 1 million d’euros, cédé 120 000 euros, soit une décote de 880 000 euros ou 85 %. Il y sera réalisé 15 logements sociaux.

Outre les actes de cession définitifs, une dizaine de protocoles ont été conclus par l’État en vue de préparer une cession prochaine. C’est le cas notamment du centre d’essai aéronautique de Toulouse, un protocole ayant été signé le 9 janvier 2014 par le Président de la République pour préparer la cession d’une première tranche de 9,5 hectares permettra la construction d’environ 500 logements.

Comme le montrent ces premiers dossiers, et conformément aux dispositions législatives et réglementaires régissant le dispositif de décote, plus le programme de logement est social et situé en zone de forte pression foncière, plus la décote est élevée. Ce constat est confirmé par la vingtaine de dossiers de demande de cession déjà instruits par les services en charge du logement et du domaine, qui vont permettre des cessions avec une décote pouvant atteindre 50 %, voire 75 % de la valeur vénale du foncier. Une décote de 100 % sera même prochainement octroyée dans le cadre de la cession d’une emprise lilloise, pour un programme de construction intégralement consacré au logement très social.

2. De nombreux obstacles à la concrétisation des programmes de construction

En termes de bilan d’application, le nombre très limité de cessions effectives, qui contraste avec le volume plus important de dossiers dont les conditions financières ont d’ores et déjà été calculées et arrêtées par la direction départementale des finances publiques, est révélateur de l’existence de nombreux obstacles à la concrétisation de programmes de construction de logements sociaux, indépendamment de la question de la rareté ou du coût du foncier.

La signature de cessions pourtant instruites par l’administration peut ainsi devoir être différée en raison de difficultés relatives à la situation des sols (nécessité de dépollution, risque d’inondation), à des procédures d’expulsion d’occupants irréguliers, à des recours de riverains, à des conditions suspensives exigées par certains acquéreurs en matière de purge des permis de construire, à des discussions sur les droits de réservation de l’État et des collectivités sur les futurs logements sociaux, ou encore à des réticences de certains acquéreurs à voir figurer dans les actes définitifs les engagements en termes de construction sur lesquels reposent les décotes consenties par l’État.

Par ailleurs, une large proportion des emprises foncières mobilisées par l’État n’a encore fait l’objet, de la part des collectivités ou des porteurs de projet de construction, d’aucune demande de cession décotée ou marque d’intérêt. La récente période des élections municipales a contribué à freiner l’émergence ou la concrétisation de projets. Dans certains cas, les collectivités se montrent désireuses d’acquérir les emprises pour bénéficier de la décote, mais dans une optique de constitution de réserves foncières, donc sans présenter de projet de construction finalisé. Or le dispositif de décote, dont l’objectif est de favoriser et d’accélérer la construction de logement social, ne peut s’appliquer dans cette hypothèse. Cette exigence d’un programme de construction précis, sur la base duquel est calculée la décote en fonction du contenu du programme et de sa composition en logements sociaux, génère ainsi un « effet tunnel » inévitable entre l’identification du foncier cessible et sa cession effective pour la création de nouveaux logements. Ainsi, les cessions réalisées ou les plus avancées correspondent soit à des projets engagés depuis plusieurs années, soit à des programmes d’ampleur limitée pour lesquels la phase de maturation par la collectivité et le porteur de projet est moins longue.

3. Les ministres du Logement et du Domaine ont demandé aux préfets de région d’identifier des dossiers prioritaires

Un courrier du 19 août 2014 adressé par la ministre du Logement et le secrétaire d’État au Budget aux préfets de région a invité ces derniers à procéder à un bilan circonstancié de la mobilisation du foncier public en faveur du logement dans leur région, et à concentrer leurs efforts sur un nombre restreint de terrains prioritaires pour faire émerger rapidement des projets de construction.

Il leur est demandé d’identifier cinq terrains prioritaires sur lesquels une cession pourra être obtenue avant fin 2015. Il leur est aussi demandé de signaler au président de la Commission nationale pour l’aménagement urbain et foncier (CNAUF), M. Thierry Repentin, les facteurs de blocage des dossiers, afin que des solutions opérationnelles ou des pistes d’évolutions législatives et réglementaires puissent être identifiées. À partir des bilans régionaux adressés par les préfets de région, un bilan national sera présenté avant la fin de l’année.

4. Un équilibre à trouver entre deux priorités : la construction de logements sociaux et le désendettement

Il existe une contradiction entre une politique raisonnée de désendettement et les priorités gouvernementales en matière de construction de logements sociaux : en effet l’article 3 de la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement dispose que « pour la part (…) destinée aux logements sociaux (…), la décote consentie peut atteindre 100 % de la valeur vénale du terrain. ». Cette pratique de décote qui peut déboucher jusqu’à la gratuité de la cession aux collectivités locales nuit à une valorisation des opérations de cessions propices au désendettement.

Dans certains quartiers de grandes métropoles, il peut être légitime de s’interroger sur l’efficacité d’une politique d’implantation de logements sociaux en mesurant le rapport coût/bénéfices entre le prix du terrain compte tenu de sa situation et l’insertion d’une population sous condition de ressources.

Le projet de cession de l’ancienne bibliothèque de l’INALCO : une politique d’intervention en faveur du logement social très onéreuse et peu efficace

L’immeuble rue de Lille à Paris, qui abritait autrefois la bibliothèque de l’Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), doit être vendu. La ville souhaite y construire 18 logements sociaux sur une surface de plancher de 1 560 m2. Ce bâtiment a été inscrit par le préfet sur la liste des propriétés « décotables » et son prix est en cours de fixation. Selon les indications de France domaine, la proposition de l’État serait de 2,1 millions d’euros, soit un taux de décote de 66 %. La ville de Paris aurait indiqué ne pouvoir proposer que 0,52 million d’euros compte tenu de l’importance des travaux à effectuer pour la reconversion des locaux en logements.

Ce dossier n’a pas suscité de vraie discussion sur son opportunité, mais seulement sur les conditions dans lesquelles il serait ou non possible de répondre aux demandes de la ville de Paris.

France Domaine estime qu’une cession hors loi Duflot permettrait une valorisation à 6,3 millions d’euros ; la décote Duflot conduit à une perte de recettes pour l’État de 4,21 millions d’euros et si les demandes de la ville de Paris étaient suivies à une perte de 5,8 millions d’euros pour le seul foncier et pour seulement 18 logements (PLUS et PLS).

Si la construction de logements sociaux dans les quartiers centraux de Paris est une vraie question, cet exemple montre clairement les limites d’une politique d’intervention très onéreuse, qui s’inscrit à contre-courant d’une participation plus active de la politique immobilière au désendettement de l’État, et qui est envisagée uniquement parce qu’elle est en apparence indolore puisqu’il s’agit d’une perte de recettes et non d’une inscription de dépenses.

5. le rachat par la ville de Paris de la caserne de Reuilly

La caserne militaire de Reuilly est cédée à la Ville de Paris. Le projet porte sur la réhabilitation 400 à 500 logements dont la moitié sera consacrée au logement social. Pour s’être engagée à construire la moitié de logements sociaux, la Ville de Paris bénéficie, conformément à la loi du 18 janvier 2013 précitée, d’une décote de 24,5 millions d’euros. Le prix de cession a été fixé à 40 millions d’euros.

VI. L’HÔTEL DE LA MARINE

Situé sur la place de la Concorde à Paris, au croisement des perspectives urbaines les plus célébrées au monde, l’hôtel de la Marine, chef-d’œuvre d’Ange-Jacques Gabriel, un des architectes les plus renommés de la fin du XVIIIème siècle, constitue un élément remarquable du patrimoine national. Depuis 1789, il n’a cessé d’être le siège du commandement et de l’administration de la Marine et abrite aujourd’hui l’état-major de la Marine nationale.

La décision prise en 2009 de transférer cet état-major dans les nouveaux bâtiments du ministère de la Défense à Balard a posé avec acuité la question du changement d’usage du monument et de son avenir.

L’état-major de la Marine doit quitter l’Hôtel au plus tard le 31 décembre 2015 pour rejoindre le nouveau ministère de la Défense en construction à Balard. L’ouverture au public de l’Hôtel est prévue pour le printemps 2017.

A. PLUSIEURS PROJETS N’ONT PAS VU LE JOUR

Inspiré par le souci d’une valorisation financière maximale du site, un premier projet consentait à un investisseur privé un bail emphytéotique, à charge pour cet investisseur de rénover l’Hôtel et d’y implanter des activités de nature économique et culturelle. Ce projet a été abandonné devant les nombreuses critiques qu’il a suscitées.

M. Nicolas Sarkozy, alors Président de la République, a confié à M. Valéry Giscard d’Estaing la présidence d’une commission de sages et d’experts, chargée de faire de nouvelles propositions sur l’avenir de l’Hôtel.

Cette commission a affirmé les trois grands principes que devait respecter tout projet :

– veiller à la garantie de la qualité patrimoniale et culturelle de cet ensemble immobilier exceptionnel qui doit demeurer dans son intégralité propriété de l’État et ne faire l’objet d’aucune aliénation ni d’aucun démembrement ;

– ouvrir le plus largement possible au public ce monument remarquable, compte tenu de sa qualité et de ses caractéristiques ;

– respecter l’équilibre économique de l’opération en veillant à la préservation des intérêts patrimoniaux et financiers de l’État. L’exploitation du monument doit générer des ressources susceptibles de financer la restauration du site et son fonctionnement sans mettre de dépenses supplémentaires à la charge de l’État.

Sur la base des principes, le Louvre avait été dans un premier temps pressenti pour être, avec l’appui de la Caisse des dépôts et consignations, l’opérateur de l’Hôtel de la Marine, mais à l’automne 2013 il renonce au projet. Le ministère de Culture demande alors au Centre des monuments nationaux (CMN) de présenter un projet alternatif, respectueux des principes de la Commission Giscard d’Estaing et présentant des garanties de simplicité et de sécurité juridiques supérieures au projet du Louvre.

B. UN PROJET EXEMPLAIRE DU CENTRE DES MONUMENTS NATIONAUX

À l’occasion des journées européennes du patrimoine le 21 septembre 2014, le Président de la République a confirmé avoir confié l’Hôtel de la Marine en gestion dans sa totalité au Centre des monuments nationaux.

L’Hôtel de la Marine restera propriété pleine et entière de l’État. Il conservera son nom. Le drapeau tricolore continuera de flotter sur ce bâtiment public.

Doté de la capacité d’exercer la maîtrise d’ouvrage de travaux de restauration et d’entretien, le Centre des monuments nationaux assurera la conservation de l’ensemble du bâtiment, dans le respect des législations ou réglementations applicables aux usages dont l’Hôtel est susceptible de faire l’objet, et notamment de la protection des monuments historiques classés.

La mise en œuvre de l’intégralité du dispositif proposé entrant pleinement dans les compétences statutaires du Centre des monuments nationaux, elle n’exigera l’adoption d’aucune mesure législative, ni la prise d’aucun texte réglementaire, non plus que la création d’aucun organisme de droit public ou privé spécifique.

1. Un monument exceptionnel rendu au public

Dès son origine, l’Hôtel de la Marine était ouvert au public, puisque ce dernier pouvait accéder au Garde-Meuble de la Couronne pour voir les éléments les plus remarquables des collections royales, mais cette ouverture était très parcimonieuse. Aujourd’hui, l’état-major de la Marine autorise les visites, à l’occasion de certaines manifestations ou réceptions, ainsi que pendant les journées du patrimoine : on estime à environ 10 000 visiteurs par an la fréquentation du monument, dont 5 000 pendant les seules journées du patrimoine. L’Hôtel de la Marine reste donc un monument largement inaccessible.

L’ambition principale reste donc un fort élargissement de son ouverture au public, ainsi que l’a affirmé avec force la commission présidée par M. Valéry Giscard d’Estaing.

L’ouverture des appartements historiques et de la salle de commandement de la Marine constituera le point central d’un projet scientifique et culturel ambitieux et cohérent pour lire le monument et son histoire.

La visite permettra d’appréhender les espaces ouverts de manière chronologique, tout en facilitant la circulation des flux de visiteurs : appartements du XVIIIème siècle des intendants du Garde-Meuble, sur la rue Saint-Florentin, appartements d’apparat du XIXème siècle, avec accès à la loggia, bureaux du chef d’état-major, poste de commandement (XXème siècle).

Elle pourrait se prolonger par des locaux d’exposition temporaire aménagés dans l’ancien appartement du garde général, sur le côté ouest de la grande cour, et dans l’ancienne galerie des tapisseries du Garde-Meuble, sur le côté nord de cette même cour. Ces expositions temporaires pourraient traiter de sujets historiques, de thèmes relatifs aux arts décoratifs, à l’histoire des mentalités et du goût ainsi qu’à l’urbanisme parisien.

2. Une répartition judicieuse des surfaces entre espaces ouverts au public et espaces professionnels

Dans l’étude sur la valeur patrimoniale de l’Hôtel de la Marine qu’il a remise en décembre 2009, l’architecte en chef des monuments historiques a insisté sur la nécessité de respecter la conception architecturale du monument dans le choix des affectations des différents locaux et de veiller à la cohérence des affectations futures par rapport aux affectations historiques.

Les espaces ouverts au public représenteront environ 4 400 m2 de surface utile brute sur les 12 900 qu’offre l’Hôtel, soit 35 % des espaces. Ils se répartissent ainsi :

– espaces patrimoniaux ouverts à la visite du public (appartements historiques du premier étage, de la loggia, du centre opérationnel de la Marine avec la salle de commandement et salles d’expositions temporaires, soit un total de 2 000 m2 de surface utile brute environ (16 % des espaces totaux)).

– espaces d’accueil du public et de service (billetterie, librairie boutique…),

– espaces de restauration.

Les espaces professionnels correspondent pour l’essentiel aux quatrième, troisième et deuxième étages dans leur totalité et représentent au total 8 400 m2 environ (65 % du bâtiment). S’agissant de locaux qui ont toujours fait l’objet d’une utilisation technique ou administrative, leur affectation, qui pourra varier selon le scénario étudié (bureaux à usage administratif ou privé, espaces de séminaires ou de réunions...), ne les dénaturera pas.

3. Un programme de travaux à réaliser

Afin de mettre en œuvre le schéma d’ensemble, il est prévu un programme de travaux – d’un montant de l’ordre de 60 millions d’euros – nécessaires pour la remise à niveau structurelle du bâtiment, l’ouverture au public et l’aménagement des parties offertes à la valorisation économique.

Après étude, c’est l’usage de bureaux qui a semblé le mieux convenir à la valorisation économique des parties de l’Hôtel de la Marine non ouvertes au public. Le principe de la mise à disposition d’une coque vide a été retenu, à charge pour les occupants de réaliser les aménagements propres qui leur sont nécessaires.

Responsable de la maîtrise d’ouvrage de l’ensemble des travaux, le Centre des monuments nationaux reçoit par voie de conséquence la responsabilité de les financer pour leur totalité, ce qui pose la question de la soutenabilité de ce dispositif au regard de son modèle économique.

4. L’équilibre de la gestion des espaces ouverts au public

La prévision de recettes de la billetterie a été basée sur un objectif de fréquentation de 700 000 visiteurs par an et correspond à une ouverture du monument neuf heures par jour pendant 340 jours par an, pour un chiffre d’affaires annuel estimé à 4 millions d’euros.

Les autres ressources d’exploitation sont les activités culturelles et les concessions attribuées à des espaces de restauration dont les redevances pourraient atteindre 630 000 euros par an. Il est en effet prévu d’accorder des concessions de restauration sur une surface d’environ 1 500 m2. La nécessité d’un équilibre financier renforce l’intérêt des espaces de restauration qui constituent une source de revenus stable et significative.

5. Une valorisation économique assise sur la location de bureaux

La plus grande attention a été apportée à la soutenabilité financière de l’opération pour les finances publiques.

L’Hôtel de la Marine se situe dans ce qui est appelé le quartier central des affaires (QCA), qui constitue le principal pôle immobilier tertiaire de Paris. Il correspond à la partie centrale de l’ensemble formé par les 1er, 2ème, 8ème, 9ème, 16ème et 17ème arrondissements de Paris, Il a rassemblé en 2013 près de 47 % de la demande placée de bureaux à Paris.

La Cour des comptes a renoncé à s’installer dans l’Hôtel de la Marine, ce dont le Rapporteur spécial se félicite.

Située à proximité du bâtiment, la Cour des comptes avait envisagé d’installer « une partie de ses effectifs, aujourd’hui logés dans deux bâtiments de l’État qui auraient alors été cédés, au sein de la partie banale, à usage de bureaux, de l’Hôtel de la Marine », rappelle-t-elle. La prise en compte des besoins de la Cour entraînerait un déséquilibre financier de l’ensemble de l’opération, reconnaît celle-ci qui a confirmé en juillet qu’elle renonçait à occuper des bureaux dans l’Hôtel de la Marine.

Le Rapporteur spécial estime que la décision du Gouvernement de ne prévoir l’implantation d’aucune administration dans ce site afin d’assurer l’équilibre financier de l’opération est une très bonne chose.

Les premières hypothèses de commercialisation : une zone attractive et ciblée.

Une étude de marché a visé à définir les cibles de locataires potentiels, qui permettraient à la fois d’optimiser les valeurs locatives tout en respectant l’image et l’identité de l’Hôtel de la Marine. L’analyse fait émerger des profils spécifiques comme les cabinets d’avocat ou les banques d’affaires qui recherchent fonctionnalité, confort, et répartition efficace entre espaces de prestige et de bureaux classique. Si la surface de 8 400 m2, le prestige et la vue exceptionnelle sur les sites et monuments parisiens sont des atouts incontestables, ils devront être complétés par des réponses à des attentes exigeantes en termes d’accès, de sécurité et de services.

Le scénario proposé est fondé sur une hypothèse médiane à 700 euros/m2 hors charges, qui permet de générer un chiffre d’affaires annuel de 6,7 millions d’euros.

6. Le financement de l’opération

L’estimation des travaux s’élève à 60 millions d’euros. 25 millions vont être financés par les fonds propres du CMN ; 35 millions feront, après l’accord du Gouvernement, l’objet d’un emprunt par le CMN auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

La recette financière des surfaces valorisables permettra au CMN de rembourser son emprunt et de reconstituer le fonds de roulement. Elle est estimée à 7 millions d’euros par an.

Le CMN apporterait sur ses ressources le financement des travaux effectués sur les parties ouvertes au public ainsi que celui de la quote-part des travaux de remise à niveau structurelle correspondant à ces parties, soit 19 millions d’euros à prélever sur son fonds de roulement.

Pour le surplus, le recours à l’emprunt serait la seule manière de surmonter l’obstacle des préfinancements des travaux. La charge financière du remboursement de cet emprunt est compatible avec l’équilibre du dispositif et les charges du CMN.

Le changement d’usage de l’Hôtel de la Marine constitue pour l’État une double opportunité : celle de réaliser une opération culturelle ambitieuse en rendant au public un élément important du patrimoine national, situé en plein cœur de la capitale et jusqu’à alors inaccessible ; celle aussi de réaliser ce projet dans des conditions compatibles avec l’état des finances publiques, grâce à une gestion raisonnée des espaces offerts par ce monument.

La gestion de l’Hôtel de la Marine et de l’ensemble des activités qui s’y déroulent par un opérateur unique accroît les chances d’atteindre rapidement le seuil de rentabilité de l’opération. En effet, la maîtrise des délais et des coûts de travaux constitue un enjeu majeur de l’équilibre budgétaire dans la mesure où l’ouverture rapide après le départ des militaires permettrait un retour à l’équilibre financier dans un délai raisonnable.

C. UN SCHÉMA TRÈS PERTINENT QUI POURRAIT ÊTRE REPRODUIT DANS LE CADRE DU PALAIS DE JUSTICE

L’Hôtel de la Marine constitue un exemple de monument qui génère lui-même la recette de sa survie.

Dans le cadre de son avis sur le schéma pluriannuel de stratégie immobilière (SPSI) de l’École nationale de la magistrature (ENM), le Conseil de l’immobilier de l’État relevait que le projet d’occupation du Palais de justice de Paris après le départ du Tribunal de grande instance de Paris en 2017 constituerait un projet d’envergure nécessitant une implication forte de l’État propriétaire. Il soulignait que ce projet avait vocation à être piloté dans le cadre d’un schéma global immobilier du centre de Paris afin d’optimiser l’usage d’un site prestigieux, offrant des surfaces importantes. Le Conseil considérait que l’immobilisation de superficies conséquentes pour des salles de formation de l’ENM dans l’hyper-centre de Paris mérite une décision explicite des responsables de l’État propriétaire, particulièrement dans le contexte actuel des finances publiques.

Ces observations formulées en 2013 sont plus que d’actualité aujourd’hui.

Le Rapporteur spécial estime que les principes d’exploitation du Palais de justice pourraient s’inspirer de ceux de l’Hôtel de la Marine, c’est-à-dire maintien de la propriété de l’État, extension des ouvertures au public, schéma immobilier de valorisation. Le projet pourrait aussi permettre l’amélioration de la circulation des flux des visiteurs entre la Sainte-Chapelle et la Conciergerie.

VII. LE CAMPUS CONDORCET : UN PROJET STRATÉGIQUE DONT LA CONDUITE SUSCITE DES RÉSERVES

Le Campus Condorcet vise à doter les sciences humaines et sociales d’un équipement de visibilité internationale afin d’augmenter le rayonnement national et international des sciences humaines et sociales françaises et de participer à la clarification du paysage universitaire français.

1. Un projet qui vise à donner aux sciences humaines et sociales une visibilité internationale

Ce projet s’inscrit dans une dynamique scientifique partagée par les neuf fondateurs : l’École des hautes Études en sciences sociales (EHESS), l’École nationale des Chartes (ENC), l’École pratique des hautes études (EPHE), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), la Fondation Maison des sciences de l’homme (FMSH), l’Institut national d’études démographiques (INED), l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, l’Université Paris VIII Vincennes-Saint-Denis et l’Université Paris XIII Nord. Le projet rassemble plus d’une centaine d’unités de recherche.

La réalisation du Campus est pilotée par une fondation de coopération scientifique créée en décembre 2009 et sera assurée par un établissement public de coopération scientifique en cours de création, qui reprendra les droits et obligations de la Fondation.

Sur le plan scientifique, le projet vise à l’émergence de quatre pôles de visibilité européenne et internationale : sciences de l’histoire, sciences des textes, sciences des territoires, sciences sociales.

L’activité de l’établissement public de coopération scientifique (EPCS) Campus Condorcet et de ses fondateurs est appelée à se développer autour de huit axes :

– histoire des sociétés et intelligence du contemporain,

– les aires culturelles dans la longue durée,

– études du religieux,

– érudition, traditions textuelles et histoire des textes,

– arts et littérature, images, création et communication,

– espaces, territoires, environnement,

– population santé,

– économie.

Le Campus Condorcet concernera plus de 15 000 personnes, dont 4 500 doctorants dans l’état actuel de la programmation. Campus « transpériphérique », il sera localisé sur deux sites, à Paris, porte de La Chapelle, et à Aubervilliers, dans la Plaine Saint-Denis. Le site d’Aubervilliers, le plus vaste, constituera un campus de recherche unique en France en matière de sciences humaines et sociales, accueillant les étudiants à partir du master. Sur le site de La Chapelle seront accueillis des étudiants de licence et de master pro de l’Université Paris I.

Le projet a bénéficié de la mobilisation forte et rapide des collectivités territoriales ce qui a permis la mise à disposition du foncier et le développement des transports en commun, atouts importants pour la réussite du projet.

Le Rapporteur spécial rappelle que le CIE a pris acte de la volonté politique de donner une nouvelle impulsion aux sciences humaines et sociales et de « les placer au cœur du projet politique d’une société de la connaissance responsable et interdisciplinaire sociales », il a recensé les incertitudes d’ordre scientifique, opérationnel et financier de ce dossier.

2. Mais qui n’a de sens que dans sa totalité et qui appelle un engagement plus fort des universités

Si la totalité du foncier est acquise, le projet actuellement financé ne prévoit que la réalisation de la première phase du site d’Aubervilliers alors même que le projet n’a de sens que s’il est réalisé dans la totalité. Le Conseil de l’immobilier de l’État insiste donc sur la nécessité de garantir la réalisation de la seconde phase qui doit avoir un caractère irréversible.

Seul l’INED s’est engagé à s’installer en totalité sur le site Condorcet alors que les autres établissements, en voulant conserver une partie de leurs implantations actuelles, perpétuent l’émiettement de leurs moyens et contribuent peu au projet.

Le CIE recommande que l’implantation des sièges des établissements soit effectuée lors de la première phase alors qu’elle n’est prévue qu’en seconde phase. Il regrette qu’une solution unique de réalisation n’ait pas été retenue. La mise à disposition de locaux supplémentaires au nord de Paris et le maintien des implantations dans Paris entraînent des frais de fonctionnement importants.

3. Le calendrier de libération des sites parisiens doit être précisé

Certains établissements n’ont toujours pas indiqué la situation actuelle de leur immobilier. Cette opération a démarré sans vision sur le devenir des emprises libérées qui n’ont pas encore fait l’objet de décisions explicites.

Le campus est constitué essentiellement de surfaces nouvelles qui, au stade actuel, n’ont que très peu de contreparties en abandon de locaux permettant de réaffecter les coûts de fonctionnement. Le Rapporteur spécial considère que le projet doit être notablement amélioré sur ce point dans un souci de saine gestion des finances publiques.

VIII. LES AUTRES OPÉRATIONS SUR 2014

A. L’INSTITUT CULTUREL DE BERLIN : UN PATRIMOINE CULTUREL PRÉSERVÉ

La France a renoncé à se séparer du bâtiment qui abrite son institut culturel à Berlin. M. Laurent Fabius a annoncé en janvier 2014 le maintien de l’institut français de Berlin dans le bâtiment de la Maison de France. Cette décision permettra à l’institut de continuer à jouer pleinement son rôle au service de la diffusion de la culture française à Berlin.

Le Rapporteur spécial, qui s’était opposé à cette vente, rappelant que le souci d’économies budgétaires ne pouvait entraîner le risque de fragiliser le rayonnement linguistique et culturel de notre pays, se félicite de cette décision.

B. LE 36 QUAI DES ORFÈVRES SERA CONSERVÉ DANS LE PATRIMOINE DE L’ÉTAT

La direction centrale de la police judiciaire qui est actuellement 36 quai des Orfèvres doit déménager au printemps 2017 dans un nouveau quartier général implanté dans le quartier des Batignolles où se regrouperont le futur Palais de justice et les services de police judiciaire. Le principe de la conservation du bâtiment dans le patrimoine de l’État est acquis parce qu’il est indissociable du reste de l’île de la Cité, mais aucune affectation n’est aujourd’hui arrêtée.

C. LE MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR

La stratégie immobilière du ministère de l’Intérieur sur la période 2009-2013 s’est efforcée de ne localiser auprès du ministre au sein de l’îlot Beauvau que les seules fonctions stratégiques et d’état-major opérationnel et de regrouper progressivement l’ensemble des directions transversales et services de soutien sur un second site, le temps de rechercher une emprise domaniale pérenne susceptible d’accueillir l’intégralité d’un grand pôle transversal d’ici 2023. Son objectif est de procéder à des mutualisations de moyens et développer de meilleures synergies entre les directions métiers.

1. La consolidation du périmètre Beauvau

L’ensemble immobilier de Beauvau, qui compte 56 000 m² de surfaces développées pour environ 2 700 postes de travail, est constitué de treize immeubles en domanialité, et d’un en location.

L’îlot Beauvau est maintenu dans son intégralité afin de ne pas affaiblir la sécurité du ministère. Il sera conforté par la renégociation du bail de l’immeuble Miromesnil qui ferme l’îlot et garantit la sécurité de l’hôtel ministériel. L’idée est de ne garder dans l’îlot Beauvau que les services dont la présence auprès du ministre est indispensable.

Un projet d’acquisition ou de bail de longue durée porte sur l’immeuble Miromesnil qui a une vue directe sur le jardin et l’Hôtel du ministre, la directive nationale de sécurité imposant de prendre des dispositions de protection spécifique des « points d’intérêt vital » dont fait précisément partie l’Hôtel de Beauvau.

2. Le projet Garance : la première étape d’une logique de regroupement

Pour poursuivre le regroupement des directions transversales hors du périmètre Beauvau, il est envisagé l’acquisition d’un immeuble de bureaux (projet Garance) de 26 000 m2 en 2015. L’appel d’offres pour le crédit-bail immobilier a été lancé en juillet 2014. Le choix des directions qui vont s’y installer a été arbitré.

Dans le cadre du schéma de financement de l’opération Garance, le ministère de l’Intérieur libérerait onze implantations actuelles. Deux immeubles satellites devraient être vendus : le 4 rue Cambacérès et le 8 rue de Penthièvre respectivement estimés à 13,5 et 49 millions d’euros.

Un appel d’offres a été lancé aux côtés de France Domaine pour la recherche d’un site susceptible d’accueillir 1 350 agents. Le projet de l’immeuble Garance a été retenu comme l’offre la mieux disante. Il porte sur la prise à bail de 26 000 m2 pour neuf ans avec option d’achat. Cette prise à bail a permis de lancer une procédure de crédit-bail immobilier et l’option sera levée en novembre 2014, la solution d’acquisition étant la seule économiquement souhaitable. L’acte de vente en l’état futur d’achèvement sera signé avant fin 2014.

L’objectif est une sortie à l’horizon 2023, échéance du bail du contrat « Lumière ». Ce site, loué par le ministère en 2012 dans le 12ème arrondissement de Paris, répondait avant tout à l’impératif de ne pas prolonger la location du site Nélaton eu égard aux sérieuses carences de l’immeuble.

Dans l’hypothèse d’une acquisition, l’immeuble « Garance » constituerait l’apport nécessaire à la réalisation de l’opération immobilière sur un site unique.

3. Un regroupement de Lumière et de Garance dans un site unique à l’horizon 2023.

Parallèlement une étude est lancée pour la recherche dans un second temps d’un site domanial pérenne à l’horizon 2023-2026, correspondant à l’échéance du bail « Lumière » et qui regrouperait l’ensemble des directions transversales et de support.

Un comité de pilotage a été créé pour réfléchir au contour du projet immobilier qui pourrait prendre place sur le foncier disponible du centre administratif départemental des Hauts de Seine à Nanterre. Participent notamment à ce comité la ville de Nanterre, l’EPAD et France Domaine.

4. L’immobilier de la gendarmerie

Depuis le 1er janvier 2009, la gendarmerie est rattachée au ministère de l’Intérieur qui a vu passer ses effectifs de 285 000 à 385 000 ETPT.

Le siège central de la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) est situé à Issy-les-Moulineaux dans un bâtiment moderne, dont le Rapporteur spécial a pu constater la très grande qualité et qui répond aux normes environnementales. Cette nouvelle implantation a permis de réunir au même endroit la quasi-totalité des directions et services de la gendarmerie, auparavant répartis sur douze sites dans et autour de Paris, dans le but d'optimiser les fonctionnalités et de faciliter les liaisons entre les services.

En revanche, une grande partie du parc immobilier de la gendarmerie est un parc ancien, souvent dégradé, parfois à la limite de l’insalubrité et qui n’a pas fait l’objet de l’entretien nécessaire au maintien de conditions de vie décentes pour les gendarmes et leurs familles.

a. Le plateau de Satory : une réhabilitation jugée indispensable et urgente par le Rapporteur spécial

Le Rapporteur spécial s’est rendu sur le site de Satory le 8 juillet dernier. Il a pu constater l’état extrêmement dégradé des quartiers Delpal, Koupa et Fesch qui offrent des conditions de logement indécentes aux gendarmes. Ces logements qui datent de 1935 sont très vétustes.

Dans le cadre du projet du grand Paris, la commune de Versailles, relayée par la préfecture des Yvelines, a engagé une réflexion sur la reconversion du plateau de Satory et particulièrement de ces quartiers.

La gendarmerie a envisagé en première hypothèse de construire de nouveaux logements dans la partie sud au moyen d’un retour de cessions de la vente de la partie nord. Après étude, le retour de cession estimé s’est révélé très insuffisant au regard du coût du programme de construction évalué à 76 millions d’euros. Le nombre de logements nécessaire est de 373.

En janvier 2014, le ministère de l’Intérieur a saisi le service constructeur de la Préfecture de police de Paris afin de conduire une étude générale sur la faisabilité technique, juridique et financière d’un montage de type partenariat public-privé de valorisation et, d’autre part, sur l’exploration de solutions alternatives comme le bail emphytéotique administratif de valorisation, le crédit-bail ou la cession bail. Il leur a été demandé d’affiner le bilan économique des scénarios envisagés (réhabilitation ou reconstruction) et d’estimer les perspectives de valorisation issues de la location ou de l’accession à la propriété des logements ou autre actifs réalisés sur le foncier disponible.

Les résultats des études devraient être connus avant la fin de l’année. La gendarmerie sera alors en mesure de privilégier une des hypothèses étudiées et de déterminer un calendrier de financement, en fonction du montant du projet retenu et des ressources budgétaires.

b. Les conséquences en matière d’immobilier du rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur

Le changement de ministère de tutelle de la gendarmerie nationale a eu pour conséquence une modification des règles de versement sur le compte d’affectation spéciale des produits de cession de ses biens immobiliers.

Les cessions de la gendarmerie, qui bénéficiaient d’un retour de 100 % jusqu’en 2009, sont désormais minorées de 30 % au profit du désendettement de l’État. Le retour des cessions au profit de la gendarmerie est donc de 70 % depuis 2012. Les produits de cession des biens immobiliers de la gendarmerie nationale sont versés sur le programme Contribution aux dépenses immobilières.

Compte tenu de la particularité du parc immobilier de la gendarmerie, de son état et du volume du besoin financier pour l’entretenir, le Rapporteur spécial s’interroge sur les moyens de financer sa remise à niveau, la perte de ressources évoquée n’étant que partiellement compensée par la contribution à hauteur de 70  millions d’euros pendant trois ans du programme 152 Gendarmerie nationale au plan de relance de l’investissement immobilier.

De plus, la loi de mobilisation du foncier public pour le logement génère des décotes sur certaines cessions. En outre, certaines emprises peuvent être mises à disposition d’autres services de l’État, tandis que les préfets peuvent utiliser les produits de cession de la réorganisation de l’administration territoriale de l’État à travers des projets d’initiative locale.

Les recettes issues de cessions d’immeubles par la gendarmerie sont les suivantes :

– 2013 : 21,5 millions d’euros ;

– 2014 : 2,8 millions d’euros au 22 juillet 2014. Du 23 juillet au 31 décembre 2014, le montant prévisionnel des retours de cessions est évalué à 3,5 millions d’euros (données extraites du même outil de suivi).

– pour 2015, le montant prévisionnel des retours de cessions est estimé à 21 millions d’euros (données extraites du même outil de suivi).

c. Une gestion dynamique de l’immobilier dans la gendarmerie, en particulier grâce au système d’information Géaude

Le Rapporteur spécial s’est rendu au siège de la gendarmerie à Issy-les-Moulineaux. Le système d’information des affaires immobilières Géaude qui constitue un outil de pilotage majeur du budget immobilier de la gendarmerie lui a été présenté. Le système d’information Géaude est désormais étendu à l’ensemble du parc immobilier de la Défense.

Le domaine des affaires immobilières est particulièrement important au sein de l’institution gendarmerie car il compte environ 75 000 logements et plus de 4,5 millions de m2 de locaux de services répartis sur tout le territoire national. Le parc immobilier est constitué à 25 % d’immeubles appartenant à l’État et à 75 % d’immeubles pris en location essentiellement auprès de collectivités territoriales.

L’application Géaude du ministère de l’Intérieur est interfacée à Chorus depuis le 1er janvier 2011 sur l’envoi et la modification des prises à bail concernant les logements des gendarmes ainsi que sur les demandes de paiement des loyers relatifs à ces prises à bail (demande de paiement sur engagement juridique). Ces modalités d’échange ont été validées avec la Direction du budget et la Direction générale des finances publiques.

D. LE REGROUPEMENT À BALARD DES ÉTATS-MAJORS ET DES SERVICES CENTRAUX DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

Le regroupement des états-majors et services centraux du ministère de la Défense sur le site de Balard contribuera à l’amélioration de la gouvernance du ministère, à la rationalisation des emprises parisiennes et à une réduction des coûts de soutien de l’administration centrale. Il permettra d’améliorer le cadre de travail des états-majors et de l’administration centrale.

L’essentiel du déménagement du ministère aura lieu entre mars et novembre 2015.

En l’absence du projet Balard, le ministère aurait dû investir des sommes importantes pour la remise en état des bâtiments existants et des réseaux de systèmes d’information et de communication. Le projet Balard représente 270 000 mètres carrés. Le loyer sera de 150 000 euros par an.

Limité à 9 300 postes de travail, le site de Balard ne peut pas accueillir l’ensemble des services de l’administration centrale. Le fort de Montrouge constituera le second pôle de l’administration centrale en termes d’effectifs et le fort de Vanves accueillera les organismes ayant des besoins particuliers en termes de sécurité.

Le projet est réalisé dans le cadre d’un contrat de partenariat public/privé intégrant la conception architecturale et technique, la construction ou la rénovation des bâtiments, l’entretien et la maintenance, les services et la réalisation et la maintenance des réseaux informatiques et téléphoniques, y compris la fourniture et l’entretien des postes informatiques pendant une durée de cinq ans.

Le ministère finance le projet Balard sur la totalité de son périmètre (investissement, frais financiers, entretien-maintenance, fonctionnement, services) pour le coût actuel de fonctionnement de l’administration du ministère sur le même périmètre.

Ce projet va fortement contribuer au développement socio-économique du quartier puisqu’il va permettre l’arrivée de 10 000 employés du ministère et de 4 500 personnes dans les bureaux de la Corne Ouest. 500 emplois permanents ont été créés par Opale Défense pour le bon fonctionnement du ministère.

1. La libération d’une quinzaine d’emprises parisiennes

Le projet s’accompagne de la libération d’une quinzaine d’emprises parisiennes abritant des services d’administration centrale appelés à se regrouper sur le site unique. Certaines de ces emprises parisiennes sont ou vont être cédées (Îlot Saint-Germain, Saint Thomas d’Aquin, Penthemont-Bellechasse). Ces ventes ne financeront pas le projet Balard réalisé en partenariat public-privé, dont la redevance contractuelle est entièrement gagée par les économies induites par les effets conjugués du regroupement en un seul site et de l’externalisation.

Les produits des cessions constitueront des recettes exceptionnelles qui bénéficieront à la politique immobilière du ministère de la Défense.

L’interlocuteur du ministère de la Défense pour le suivi du contrat de partenariat est la société Opale Défense dont la Caisse des dépôts et consignations est l’actionnaire principal avec minorité de blocage.

2. Des adaptations par rapport au projet initial qui restent limitées

Depuis la signature du contrat, un certain nombre d’événements et d’aléas sont venus en perturber l’exécution et ont généré des surcoûts (traitement de pollutions résiduelles des sols, désamiantages complémentaires dans les bâtiments existants, travaux complémentaires à réaliser à la demande du ministère).

Les adaptations par rapport au projet initial sont dues aux restructurations et à l’évolution des besoins du ministère, évolution qui reste limitée et ne génère pas de besoins de surfaces supplémentaires. Les évolutions nécessaires ont surtout porté sur les systèmes d’information et de communication.

Les conséquences financières des événements ayant conduit aux reports de dates de mises à disposition ont fait l’objet de l’avenant « surcoûts » du 9 juillet 2014. Il s’élève à 43,9 millions d’euros dont 31,6 sur crédits budgétaires et 11,3 sur crédits bancaires.

Un accord sur le décalage des dates de mise à disposition a été signé entre le ministère et Opale Défense. L’essentiel des bâtiments mis à disposition le 28 février 2015, au lieu du 30 septembre 2014.

3. Le financement de Balard

Les redevances se répartissent ainsi :

– une redevance immobilière de 54 millions d’euros, qui inclut les frais financiers, sera versée pendant toute la durée d’exploitation de 2015 à 2041,

– une redevance « systèmes d’information et de communication » de 42,5 millions d’euros pour une durée de cinq ans, puis de 29 millions d’euros jusqu’au terme du contrat,

– une redevance « services et mobilier » de 34 millions d’euros versée pendant toute la durée d’exploitation,

– une redevance « maintenance » et une redevance « renouvellement » respectivement de 20 et 9 millions d’euros.

– une redevance « énergie » estimée à 5,5 millions d’euros.

Les ressources nécessaires au financement de ces redevances sont assurées par le redéploiement des crédits budgétaires actuels. Le ministère finance le projet Balard sur la totalité de son périmètre pour le coût actuel de fonctionnement de l’administration du ministère sur le même périmètre.

E. PARIS-SACLAY : UN PROJET STRATÉGIQUE ET UN DEVOIR DE RÉUSSITE

Lancé en 2009 dans le cadre des investissements d’avenir, le projet Saclay a pris le 13 décembre 2013 un tournant décisif : l’État et ses partenaires ont voté la construction de logements et l’installation d’activités économiques. L’objectif est d’édifier une ville universitaire de 15 000 habitants.

L’ambition de l’État est de créer et de développer un pôle d’innovation industrielle et scientifique de dimension mondiale, un cluster, classé parmi les huit premiers pôles d’innovation.

Cette opération d’intérêt national sera localisée sur 7 700 hectares dont 3 100 de terres agricoles, entre les vallées de l’Yvette et de la Bièvre, à moins de 20 km de Paris.

Le périmètre d’action de l’établissement public Paris-Saclay couvre quarante-neuf communes, quatre intercommunalités regroupant 650 000 habitants, 350 000 emplois, 700 PME, deux universités, de nombreux établissements de recherche publics et privés, concentrant 20 % des effectifs de la recherche française sur une superficie trois fois et demie plus vaste que celle de Paris intra-muros. Les actions de l’établissement sont concentrées sur deux grandes zones d’aménagement : la première en Essonne sur la frange sud du plateau avec le projet du campus ville qui s’étend entre le Commissariat à l’énergie atomique et Polytechnique sur sept kilomètres et la seconde dans les Yvelines avec les villes de Versailles-Satory et Saint-Quentin Est.

Le projet Paris-Saclay représente :

– une opération d’intérêt national conduite par l’État en concertation avec les partenaires locaux, financée à hauteur de 5 milliards d’euros sur le programme d’investissements d’avenir, le plan campus et le Grand Paris,

– une concentration scientifique exceptionnelle par son ampleur et sa diversité disciplinaire, avec la création de l’université Paris-Saclay, de rang mondial, appelée à devenir la première université de France avec 10 500 chercheurs et 48 000 étudiants, née du rapprochement de vingt-deux établissements dont deux universités, onze grandes écoles, sept organismes de recherche,

– un projet économique autour de PME innovantes et de grandes entreprises avec des centres de recherche qui aboutira à la création de 4 000 à 6 000 emplois par an,

– un projet majeur d’aménagement urbain de 1 700 000 m² avec une offre de logements étendue, desservi par un réseau de routes et de transports en commun dont le Grand Paris Express, connecté aux pôles d’habitations et d’activités.

La particulière importance du volet immobilier dans tous ses aspects des bâtiments universitaires, de recherche sans composantes de bureau ou de logement conduit le Rapporteur spécial à rappeler plusieurs constats et recommandations formulés par le Conseil de l’immobilier de l’État.

1. Les constats : les failles d’une gouvernance par projets

Plusieurs constats peuvent être faits :

– le projet est ancien, ambitieux, porté par le pouvoir politique qui a mis en place d’importants moyens législatifs, réglementaires et financiers tant dans l’immobilier académique que dans des investissements scientifiques et de recherche,

– l’opération Paris-Saclay, ambition nationale, doit contribuer au redressement de la compétitivité et de l’appareil économique et scientifique, ce qui implique un devoir de réussite et une obligation de résultat pour ces acteurs,

– lesdits acteurs, particulièrement le fonds de coopération scientifique et l’établissement public de Paris-Saclay font preuve d’un volontarisme remarquable qui se heurte toutefois aux difficultés nées de la dérive dans la gouvernance des projets,

– la gouvernance par projets choisie pour conduire cette opération a éclaté et dilué les responsabilités et a retardé les prises de décision,

– le calendrier des différentes opérations manque de cohérence,

– la visibilité en termes de coûts est délicate à appréhender.

2. Les recommandations : des prises de décisions rapides et cohérentes, le respect du calendrier, une bonne coordination des acteurs

Les principales recommandations portent sur :

– la nomination d’un coordonnateur auprès du Premier ministre pour pallier les inconvénients d’une gouvernance par projets, pour suivre l’ensemble des opérations, mobiliser les différents acteurs, lever les difficultés et favoriser les prises de décision rapides et cohérentes ;

– la mise en œuvre formelle dans les meilleurs délais des décisions prises en réunion interministérielle, notamment celle relatives au financement et à la mise en œuvre de la contre-expertise des dossiers relatifs aux établissements scientifiques et universitaires ;

– une attention accrue, s’agissant des financements sur cessions, aux conséquences des décisions unilatérales des collectivités locales ;

– s’agissant du projet universitaire, la création rapide de l’université Paris-Saclay grâce à l’action fédératrice de la fondation de coopération scientifique « campus de Saclay », née du rapprochement université-grandes écoles, avec la mise en place d’une gouvernance forte, la définition d’une stratégie immobilière et du statut juridique des biens fonciers et des bâtiments ;

– s’agissant du projet d’aménagement d’intérêt national, la complémentarité et la coordination des différents acteurs publics (centraux, régionaux et territoriaux) et des acteurs privés pour l’aménagement réussi du campus urbain, véritable défi du projet ;

– le respect du calendrier pour l’arrivée des transports en commun, priorité absolue pour la réussite de l’opération.

F. PICPUS : UN NOUVEAU CAMPUS DE 35 000 M2 EN PLEIN PARIS

Ce sont des motifs budgétaires qui ont incité le Gouvernement à ne pas poursuivre l’opération Picpus de regroupement immobilier des services centraux de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. L’abandon de ce projet a été acté lors de la réunion interministérielle du 11 janvier 2013. Le ministère a procédé aux négociations en vue de résilier les marchés en cours et procède à la libération progressive du site.

Le ministère chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche reprendra le site de Picpus le 1er janvier 2016 pour la construction de l’université Paris III.

1. Une opération immobilière d’opportunité dont l’exemplarité n’est pas avérée

Ce projet, qui permettra de réunir la totalité des implantations de Paris III sur un campus urbain de 36 000 mètres carrés dans Paris intra-muros, est apparu comme une solution opérationnelle et rapide au problème du bâtiment très dégradé du site de Censier. Ce site représente un problème de santé publique majeur et ses matériaux amiantés rendent son entretien difficile et coûteux.

En octobre 2013, le ministère a annoncé le lancement du chantier. Il devrait accueillir les 18 000 étudiants de l’université de Paris III. Les étudiants iront rue de Picpus, mais la présidence de l’université restera dans le bâtiment de la Sorbonne.

2. Des dépenses avaient été engagées par le ministère de l’Agriculture à hauteur de 28 millions

France Domaine indique que les projets engagés sur le projet Picpus par le ministère de l’Agriculture (études techniques et travaux engagés sur un bâtiment classé) ont été entièrement valorisés par le ministère chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Compte tenu de la différence des projets, le Rapporteur spécial s’interroge sur la capacité de ce dernier à réutiliser les études antérieures du ministère de l’Agriculture. Il estime, en l’état de ses informations, le coût de l’abandon du projet proche de 28 millions d’euros.

G. L’ÎLOT SÉGUR FONTENOY

L’État a décidé de restructurer l’ensemble immobilier Ségur Fontenoy afin d’y accueillir un « centre de Gouvernement ». Cette opération a pour objectif de regrouper une partie des services du Premier ministre et un ensemble d’autorités administratives indépendantes.

L’ensemble immobilier restructuré accueillera au moins 2 300 postes de travail sur une superficie de 46 000 m² surfaces utiles brutes de surfaces utiles brutes (SUB).

Par arrêté du 24 mai 2013, l’État a transféré à la SOVAFIM les droits réels immobiliers attachés à ce site, pour un montant de 32,8 millions d’euros. Cette société anonyme, dont l’État détient la totalité du capital, assure directement la maîtrise d’ouvrage des travaux de restructuration de l’ensemble immobilier.

Par protocole signé le même jour, la SOVAFIM s’est engagée à mettre l’immeuble à la disposition de l’État, dans le cadre d’un bail en l’état futur d’achèvement d’une durée de douze ans à compter de l’achèvement des travaux de restructuration. La durée prévisionnelle des travaux, études comprises, est de 48 mois à compter du 24 mai 2013.

Le programme de travaux de restructuration sera réalisé dans le cadre d’un contrat de promotion immobilière et d’exploitation-maintenance signé par la SOVAFIM en février 2014 avec la société Horizons, programme que le dialogue compétitif a permis d’améliorer. La livraison de l’immeuble interviendra en deux étapes : au deuxième semestre 2016 s’agissant de l’immeuble Fontenoy pour permettre l’installation anticipée des autorités administratives indépendantes regroupées sur le site, et au début du deuxième semestre 2017 pour l’immeuble Ségur hébergeant les services du Premier ministre.

Conformément au protocole locatif signé concomitamment à l’arrêté de transfert le 24 mai 2013, l’État a signé un bail avec la SOVAFIM le 23 mai 2014. Ce bail prévoit un loyer annuel de 20,1 millions d’euros, net de tous les impôts et charges du propriétaire. Si la durée du transfert des droits réels a été fixée à 34 ans pour assurer à la SOVAFIM une durée effective d’exploitation après travaux de trente ans, l’État ne s’est engagé à louer les locaux que sur une durée initiale de douze ans.

À ce loyer s’ajoutera le montant de la taxe foncière, la taxe sur les bureaux, le gros entretien et les assurances payées par la SOVAFIM, estimés à 5,2 millions d’euros, ce qui portera le loyer annuel dû par l’État à la SOVAFIM à 25,3 millions d’euros. L’État assumera par ailleurs un certain nombre de dépenses courantes, dont le montant total est estimé à ce stade également à 5,2 millions d’euros. L’État a été tenu informé du dépôt du permis de construire le 20 mai 2014.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Christian Eckert, secrétaire d’État en charge du Budget (voir le compte rendu de la commission élargie du 7 novembre 2014 à 9 heures 30 (1)), la commission des Finances examine les crédits des missions Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Provisions et Régimes sociaux et de retraite, ainsi que les comptes spéciaux Gestion du patrimoine immobilier de l’État et Pensions.

Suivant l’avis favorable de Mme Karine Berger, de MM. Jean-Louis Dumont et Michel Pajon et malgré l’avis défavorable de M. Camille de Rocca Serra, rapporteurs spéciaux, la Commission adopte les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines.

Puis, suivant l’avis favorable de M. Michel Pajon rapporteur spécial, la Commission adopte les crédits de la mission Provisions et suivant l’avis favorable de M. Jean-Louis Dumont rapporteur spécial, elle adopte les crédits du Compte spécial Gestion du patrimoine immobilier de l’État.

Enfin, la Commission adopte suivant l’avis favorable de M. Yves Censi, rapporteur spécial, les crédits de la mission Régimes sociaux et de retraite et du compte spécial Pensions.

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ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère du Budget

– M. Arnaud Lunel, conseiller au cabinet du secrétaire d’État au Budget

France Domaine

– Mme Nathalie Morin, administrateur général des finances publiques, chef du service France Domaine

Centre des monuments nationaux

– M. Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux

Ministère de l’Intérieur

– M. Thibault Sartre, conseiller budgétaire au cabinet du ministre, aujourd’hui directeur de l'évaluation de la performance et des affaires financières et immobilières, M. Olivier Du Cray, sous-directeur des affaires immobilières, M. Jean-François Bouton, chef du bureau de la gestion des sites d’administration centrale, M. Marc Abadie, chef de l’IGA

Gendarmerie nationale

– Le général de corps d’armée Carmichael, M. Philippe Debrosse, directeur des soutiens et des finances à la Direction générale de la gendarmerie nationale, le colonel Éric Marchal, chef du bureau des affaires immobilières de la gendarmerie nationale

Ministère de la Défense

– M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général de l’administration du ministère de la Défense

© Assemblée nationale

1 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/