Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF


N
°  4132

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 2016.

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI (n° 4061)
de
finances pour 2017

TOME XIII

SÉCURITÉ

PAR M. Yves GOASDOUÉ

Député

——

Voir le numéro : 4125-III-43

En application de l’article 49 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les réponses au questionnaire budgétaire devaient parvenir au rapporteur pour avis au plus tard le 10 octobre 2016 pour le présent projet de loi de finances.

À cette date, l’intégralité des réponses était parvenue à votre rapporteur pour avis, qui remercie les services du ministère de l’Intérieur de leur collaboration.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

PREMIÈRE PARTIE : LES CRÉDITS DE LA SÉCURITÉ POUR 2017 7

I. UN BUDGET QUI CONNAIT UNE NOUVELLE HAUSSE SENSIBLE 7

A. PRÉSENTATION DES CRÉDITS INSCRITS EN PLF 7

1. Les crédits du programme Police nationale 7

2. Les crédits du programme Gendarmerie nationale 10

B. LE PROTOCOLE POUR LA VALORISATION DES CARRIÈRES, DES COMPÉTENCES ET DES MÉTIERS DANS LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES 11

1. Police nationale 11

2. Gendarmerie nationale 13

II. UN PREMIER BILAN POSITIF DES PLANS DE RENFORCEMENT DES MOYENS DES FORCES DE L’ORDRE ANNONCÉS DEPUIS 2015 15

A. LE PLAN DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME (2015-2017) 15

1. Les effectifs 15

2. Les moyens 16

B. LE PACTE DE SÉCURITÉ (2016-2017) 17

1. Les effectifs 17

2. Les moyens 18

C. LE PLAN DE LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION CLANDESTINE (2016) 20

SECONDE PARTIE : LA FORMATION AU SEIN DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE NATIONALES 23

I. DES DISPOSITIFS DE FORMATION INITIALE EN PLEINE ÉVOLUTION 23

A. L’ORGANISATION DE LA FORMATION INITIALE DES POLICIERS ET DES GENDARMES 23

1. Police nationale 23

a. La création d’une nouvelle direction centrale du recrutement et de la formation de la Police nationale 23

b. Les dispositifs de formation professionnelle initiale des personnels actifs 25

2. Gendarmerie nationale 27

3. Rapprocher les formations de la police et de la gendarmerie ? 31

a. La formation initiale 31

b. La formation continue 31

B. L’IMPACT DES ÉVÈNEMENTS DE 2015–2016 SUR LE CONTENU DE LA FORMATION INITIALE 33

1. Le raccourcissement de la durée de certaines formations 33

2. L’introduction de nouveaux modules 34

3. L’entrainement au tir 35

II. UN EFFORT SANS PRÉCÉDENT EN FAVEUR DE LA FORMATION INITIALE 36

A. UNE MONTÉE EN CHARGE RAPIDE DES EFFECTIFS DES ÉCOLES DE POLICE ET DE GENDARMERIE 36

1. Une augmentation des postes offerts aux différents concours 36

2. L’organisation d’un concours exceptionnel de gardiens de la paix 37

3. Une attractivité stabilisée à un niveau élevé dans la police et dans la gendarmerie 38

B. … QUI CRÉE DES DIFFICULTÉS DE GESTION TEMPORAIRES : LA FORMATION CONTINUE ET LES CADETS DE LA RÉPUBLIQUE 39

1. Des écoles surchargées, parfois en mauvais état 39

a. Des structures surchargées 39

b. Des écoles en relatif mauvais état 41

2. La formation continue, parent pauvre de la formation initiale ? 43

3. Les cadets de la République, un nombre divisé par trois en 2016 43

EXAMEN EN COMMISSION 45

PERSONNES ENTENDUES 83

DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS 87

«L’intérêt bien compris d’une démocratie commande d’élever le niveau de la police et non de l’abaisser. L’homme qui peut tenir dans sa main la liberté, la réputation, la fortune d’un autre homme n’aura jamais l’âme trop haute, ni la conscience trop soucieuse d’équité.» M. le préfet de Police Célestin Hennion, 1914.

Mesdames, Messieurs,

Face à des menaces en constante évolution et à la diversité des enjeux, qu’il s’agisse de terrorisme, de criminalité organisée ou de délinquance, la formation des policiers et des gendarmes est un élément clé de l’efficacité des forces de l’ordre, au même titre que les moyens humains ou matériels. Votre rapporteur pour avis a donc fait le choix, cette année, dans son rapport budgétaire, de mettre l’accent sur cet enjeu essentiel.

En effet, les attentats terroristes perpétrés en 2015 ainsi que la nécessité de lutter plus efficacement contre l’immigration irrégulière ont amené le Gouvernement et la majorité parlementaire à consentir des efforts sans précédent pour renforcer les effectifs de la Police et de la Gendarmerie nationales. Cela représente un défi pour les écoles de formation, qui doivent loger, former et intégrer des élèves en un temps resserré :

– à la suite des attentats de janvier 2015, le Premier ministre a décidé la mise en place d’un plan triennal (2015-2017) de renforcement des moyens pour lutter contre le terrorisme, le plan de lutte anti-terroriste (PLAT) ;

– le Président de la République a annoncé un plan supplémentaire de renforcement des moyens en novembre 2015 : le pacte de sécurité, sur la période 2016-2017 ;

 par ailleurs, pour la seule année 2016, le plan de lutte contre l’immigration clandestine (PLIC) renforce les effectifs des services engagés dans la lutte contre l’immigration irrégulière.

Le ministre de l’Intérieur a en outre annoncé, le 26 octobre dernier, un plan pour la sécurité publique, prolongement et amplification de la politique de sécurité menée par le Gouvernement, dont le coût s’élève à 250 millions d’euros.

Le projet de loi de finances pour 2017 traduit cette mobilisation, avec une hausse sur un an de 4,75 % (+ 472 millions d’euros) des crédits du programme Police nationale et de 4,05 % (+ 342 millions d’euros) des crédits du programme Gendarmerie nationale.

Dans un contexte budgétaire marqué par la réduction des dépenses de l’État afin de replacer la France sur une trajectoire soutenable, l’effort consenti est donc majeur : il autorisera, l’an prochain encore, la création de 2 031 emplois nouveaux pour la Police nationale et de 402 pour la Gendarmerie nationale. Il permettra aussi, entre autres équipements, de financer le remplacement de près de 4 000 véhicules dans les deux forces.

Pour significatifs qu’ils soient, ces chiffres ne suffiront pas à combler les conséquences des choix des deux précédents quinquennats, marqués par le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), la fermeture d’écoles de formation initiale et plus généralement par un sous-investissement chronique, dont les effets continuent de peser sur les matériels, flottes automobiles ou le parc immobilier.

Outre les créations nettes d’emplois intervenues depuis 2013, la conjugaison de ces dispositifs permet d’augmenter sensiblement le potentiel opérationnel de la police et de la Gendarmerie nationales avec une accélération significative de l’arrivée des élèves dans les services. Ainsi, un effort conséquent a été mis en œuvre en 2016 avec près de 4 735 gardiens de la paix et 4 135 adjoints de sécurité incorporés. Le caractère exceptionnel de ces mesures, a nécessité de nombreux aménagements, en particulier de la durée de la formation initiale des gardiens de la paix et du cadencement de la scolarité.

C’est dans ce contexte que le ministre de l’Intérieur a esquissé le 2 juin 2016 les grandes orientations d’une importante réforme de la formation de la Police nationale, pour mieux préparer les policiers aux évolutions de la société, des techniques, du droit et des phénomènes criminels.

PREMIÈRE PARTIE : LES CRÉDITS DE LA SÉCURITÉ POUR 2017

I. UN BUDGET QUI CONNAIT UNE NOUVELLE HAUSSE SENSIBLE

Le budget des deux programmes Police nationale et Gendarmerie nationale connait une augmentation sensible pour l’année 2017 (A), dans le prolongement des trois plans gouvernementaux de renforcement des effectifs et des moyens (B).

A. PRÉSENTATION DES CRÉDITS INSCRITS EN PLF

1. Les crédits du programme Police nationale

Présentation générale

Les crédits du programme Police nationale demandés pour 2017 atteignent 10,42 milliards d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 10,28 milliards d’euros en crédits de paiements (CP) contre 9,95 milliards d’euros ouverts en loi de finances initiale pour 2016 en AE comme en CP. Cela représente une hausse de 4,75 % pour les AE (+ 472 millions d’euros) et 3,37 % pour les CP (+ 335 millions d’euros).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME N° 176 POLICE NATIONALE

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programme / action

Ouverts en LFI 2016

PLF 2017

Ouverts en LFI 2016

PLF 2017

176 Police nationale

9 947 622 820

10 419 784 815

9 950 153 384

10 285 662 723

01 Ordre public et protection de la souveraineté

1 168 042 923

1 330 424 696

1 168 042 923

1 330 424 696

02 Sécurité et paix publiques

3 011 348 811

2 986 185 941

3 011 348 811

2 986 185 941

03 Sécurité routière

461 958 785

452 670 269

461 958 785

452 670 269

04 Police des étrangers et sûreté des transports internationaux

749 221 052

811 565 876

749 221 052

811 565 876

05 Missions de police judiciaire et concours à la justice

2 527 606 520

2 599826 504

2 527 606 520

2 599 826 504

06 Commandement, ressources humaines et logistique

2 029 444729

2 239 111 529

2 031 975

2 104 989 437

Source : projet annuel de performance annexé au PLF 2017.

La répartition des crédits entre les différentes actions du programme montre une hausse pour :

– l’action 1 Ordre public et souveraineté (+ 16 % en deux ans) ;

– l’action 4 Police des étrangers et des transports internationaux, (+ 161 millions d’euros, soit + 25 % en AE en deux ans), compte tenu des augmentations d’effectifs liés au plan de lutte contre l’immigration clandestine (PLIC) ;

– l’action 5 Police judiciaire et concours à la justice ( 5,5 % sur un an) ;

– l’action 6 Commandement, ressources humaines, logistique (+ 433 millions d’euros d’AE, soit + 24 %), sous l’effet d’une progression sensible des crédits d’investissement.

En revanche, deux actions enregistrent une baisse relative liée à la modification des effectifs policiers au profit des actions 1, 4, 5 et 6 :

– l’action 2 Sécurité et paix publiques (– 4,39 %) ;

– l’action 3 Sécurité routière (– 9,66 %).

Le ministre de l’Intérieur a annoncé, le 26 octobre dernier, un plan pour la sécurité publique, prolongement de la politique de sécurité menée par le Gouvernement qui prévoit en particulier, outre la suppression de tâches indues :

– l’affectation prioritaire des nouveaux effectifs sortant des écoles de police et de gendarmerie à la sécurité publique ;

– le rehaussement de l’équipement des compagnies départementales d’intervention et des compagnies de sécurisation ;

– le renforcement de l’équipement des véhicules ;

– le passage de deux à trois fonctionnaires dans les patrouilles intervenants dans les zones particulièrement difficiles ;

– la hausse des moyens affectés à l’entretien du parc immobilier et aux travaux de maintenance.

Le financement de ces mesures, dont le coût s’élève à 250 millions d’euros, devrait faire l’objet d’amendements dans le cadre de la discussion budgétaire.

Les dépenses de personnel

Le plafond d’emploi demandé pour 2017 atteint 149 079 ETPT contre 147 076 en 2016. La hausse s’établit à 2 031 emplois à périmètre constant, soit + 1,38 %.

Aux 300 ETP prévus en loi de programmation des finances publiques, s’ajoutent les 366 ETP alloués au titre du plan de lutte contre le terrorisme et les 1 365 ETP au titre du pacte de sécurité.

Les créations d’emplois et les mesures salariales et indemnitaires formalisées par le protocole du 11 avril 2016, mesures intégralement financées, expliquent la hausse importante des dépenses de titre 2 : 9,18 milliards d’euros demandés pour 2017, en hausse de 337,2 millions d’euros soit + 3,81 %. La part de la masse salariale dans l’ensemble des crédits de la mission passe de 88,9 % en 2016 à 89,3 % en 2017 mais reste en retrait par rapport à 2015 (89,9 %) ce qui témoigne de l’effort en matière d’investissement et de fonctionnement fourni au cours des deux dernières années.

LA REFONTE DE L’AVANTAGE SPÉCIFIQUE D’ANCIENNETÉ (ASA)

En application de l’article 11 de la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives à la fonction publique et de l’article 1er du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l’avantage spécifique d’ancienneté accordés à certains agents de l’État affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles, l’avantage spécifique d’ancienneté (ASA) a été mis en œuvre à compter de 2000 au profit des fonctionnaires des corps actifs de la Police nationale. Un arrêté du 17 janvier 2001 a fixé la liste des secteurs ouvrant droit au dispositif (soit les seuls SGAP de Paris et de Versailles).

Saisi d’un premier contentieux, le Conseil d’État a jugé, par deux décisions, que le bénéfice de l’ASA devait être appliqué rétroactivement, à compter du 1er janvier 1995, et être étendu aux fonctionnaires des corps administratifs, techniques et scientifiques.

Ces décisions ont conduit l’administration à reconstituer la carrière de 44 230 personnels des corps actifs de la Police nationale, ainsi que de 9 199 personnels administratifs, techniques et scientifiques. En 2014, 7 millions d’euros ont été consommés au lieu des 18,9 millions d’euros prévus en LFI. L’enveloppe 2015 a été réduite à 10 millions d’euros au lieu des 19 millions d’euros initialement prévus, dont 5 millions d’euros ont été reportés sur 2016 pour prendre en compte d’éventuels retards dans les mises en paiement.

Plus récemment, le Conseil d’État a remis en cause les zones d’éligibilité à l’ASA dans un nouvel arrêt CE, 16 mars 2011, « Mme Leducq ». La Haute Juridiction a en effet considéré que l’arrêté du 17 janvier 2001, ne visant que les SGAP de Paris et de Versailles, était illégal. Depuis cette décision, plus de 11 000 nouveaux recours ont été déposés devant les tribunaux administratifs tandis que 2 878 jugements ont condamné le ministère de l’Intérieur à réexaminer la situation des requérants.

Les textes réglementaires permettant de sortir de ce contentieux de masse ont été rédigés au cours de l’année 2016 pour, d’une part, identifier, sur l’ensemble du territoire national et non plus seulement sur celui des SGAP de Paris et de Versailles, les circonscriptions de police éligibles à l’ASA et, d’autre part, créer une surprime de la prime de fidélisation accordée aux agents qui interviennent majoritairement dans les quartiers urbains difficiles sans y être expressément affectés (agents des directions de la préfecture de police de Paris en particulier).

Les dépenses d’investissement et de fonctionnement

Les dépenses d’investissement (titre 5) s’élèvent à 296,7 millions d’euros en AE en 2017, en hausse de 15,5 % par rapport à 2016. Les dépenses de fonctionnement (titre 3) connaissent en 2017 une hausse de près de 12 % par rapport à 2016, s’élevant à 897,8 millions d’euros.

Des moyens importants ont en particulier été alloués à la protection individuelle des fonctionnaires de police et à l’adaptation des matériels pour les rendre plus efficaces et résistants face aux risques. Un effort substantiel a été consenti pour le renouvellement du parc automobile, qui était très vieillissant.

2. Les crédits du programme Gendarmerie nationale

Présentation générale

Les crédits du programme Gendarmerie nationale demandés pour 2017 atteignent 8,8 milliards d’euros en AE et 8,58 en CP contre 8,45 milliards d’euros ouverts en loi de finances initiale pour 2016 en AE et 8,3 en CP. Cela représente une hausse de 4 % en AE (+ 342 millions d’euros) et 3,54 % en CP (+ 293 millions d’euros).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT DU PROGRAMME

N° 152 GENDARMERIE NATIONALE

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programme / action

Ouverts en LFI 2016

PLF 2017

Ouverts en LFI 2016

PLF 2017

152 Gendarmerie nationale

8 452 963 474

8 795 070 677

8 295 535 705

8 589 242 435

01 Ordre et sécurité publics

3 225 626 783

3 347 381 055

3 216 066 453

3 347 381 055

02 Sécurité routière

745 968 783

744 779 288

745 968 710

744 779 288

03 Missions de police judiciaire et concours à la justice

1 911 227 235

2 023 812 206

1 911 227 235

2 023 812 206

04 Commandement, ressources humaines et logistique

2 436 946 000

2 543 993 395

2 289 078 561

2 338 165 153

05 Exercice des missions militaires

133 194 746

135 104 733

133 194 746

135 104 733

Source : projet annuel de performance annexé au PLF 2017.

Les dépenses de personnel

Le plafond d’emploi s’élève à 100 192 ETPT, en hausse de 402 emplois nets des transferts. Il faut souligner en outre que l’écart entre les effectifs prévus et les effectifs réalisés, lié à l’insuffisance de crédits de titre 2, devrait se réduire en 2017, grâce au financement de l’entrée des nouveaux effectifs. Les effectifs réalisés atteindront 98 557 emplois, contre 95 488 en 2015. Pour remplacer les départs en retraite et pourvoir les emplois créés, 5 500 sous-officiers ont intégré les écoles de gendarmerie en l’espace d’un an.

ÉVOLUTION DE L’ÉCART ENTRE LES EFFECTIFS PRÉVUS ET RÉALISÉS

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Plafond d’emplois

95 858

97093

97167

97215

99 790

100 192

Réalisation

95 168

95283

95195

95 488

96 085

98 557

Écart (en poste)

690

1 810

1 972

1 727

3 705

1 635

Évolution de l’écart (en postes)

+ 1 120

+ 162

- 245

+ 1 978

- 2 070

taux de réalisation du plafond d’emploi

99,28%

98,14%

97,97%

98,22%

96,29%

98,37%

Évolution du taux de réalisation (en points)

- 1,14

- 0,17

+ 0,25

- 1,94

+ 2,08

Source : DGGN.

Le budget de la Gendarmerie nationale est marqué par des dépenses de fonctionnement importantes, liées à l’immobilier – logement en caserne – et aux déplacements : 1,34 milliard d’euros d’AE en 2017 (+ 4%). La contrainte s’exerce fortement sur le budget d’investissement qui connait une légère baisse en 2017, 174 millions d’euros pour les AE, soit – 2,43% et 139 pour les CP, soit
– 7,1% mais reste en forte hausse par rapport à 2015  (+ 38% pour les AE et + 64% pour les CP).

B. LE PROTOCOLE POUR LA VALORISATION DES CARRIÈRES, DES COMPÉTENCES ET DES MÉTIERS DANS LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES

Le 22 octobre 2015, le Président de la République s’est engagé à « mieux valoriser les carrières de ceux qui s’engagent au service de la sécurité de leurs concitoyens. » À cet effet, un protocole pour la « valorisation des carrières, des compétences et des métiers » a été signé le 11 avril 2016 entre le ministre de l’Intérieur et :

– pour la Gendarmerie nationale, le secrétaire général du conseil de la fonction militaire gendarmerie (CFMG) et le secrétaire du groupe de liaison du CFMG ;

– pour la Police nationale, les organisations syndicales.

1. Police nationale

Le protocole transpose, dès 2017 (au lieu de 2018 dans la fonction publique d’État), les mesures du protocole « parcours professionnel, carrières, rémunérations » (PPCR) de la fonction publique pour les personnels de la Police nationale en revalorisant les grilles indiciaires, d’une part, et en permettant la conservation du différentiel positif des grilles indiciaires précédemment détenues si tel était le cas, d’autre part.

Il vise également à redonner des perspectives de carrière à l’ensemble des fonctionnaires de la Police nationale pour lesquels le précédent accord, conclu en 2004, avait montré ses limites avec notamment un engorgement des parcours de carrière. Chaque corps actif se voit ainsi donner de nouvelles perspectives de carrière :

– création d’un 3ème grade à accès fonctionnel (GRAF) pour le corps de conception et de direction, avec une montée en charge sur six ans, accompagnée d’un repyramidage favorable du corps ;

– accès progressif entre 2017 et 2022 à la grille dite du « A type » pour les officiers, avec la création également d’un grade sommital à accès fonctionnel ;

– résorption en quatre ans du vivier de titulaires de qualifications professionnelles pour « l’avancement brigadier » ;

– nouveau pyramidage et augmentation des postes de débouchés pour le corps d’encadrement et d’application (CEA) ;

– mise en œuvre d’un plan de requalification pour les agents spécialisés de la police technique et scientifique (PTS) à raison de 300 agents sur cinq ans.

Il vise aussi à reconnaître et valoriser les métiers, les sujétions et les compétences spécifiques de la Police nationale :

– revalorisation de la police judiciaire, au travers de la majoration progressive de la prime liée aux attributions d’officier de police judiciaire (OPJ) qui passera de 600 à 1 080 € annuels au 1er octobre 2018, et la revalorisation indemnitaire de la filière scientifique de la police, avec en particulier la création d’une indemnité ouvrant droit à retraite ;

– s’agissant des personnels de la filière administrative et technique, amplification de la politique de substitution pour les cinq années à venir en tenant compte d’une cartographie des emplois ;

– revalorisation de l’indemnité d’exercice et indemnisation du travail de nuit des adjoints de sécurité (ADS).

Parallèlement, le PPCR doit réconcilier les grades et les missions. À ce titre, il comporte des mesures relatives à la refonte de la nomenclature de commandement.

Enfin, le protocole prévoit des mesures transversales dont la plus importante financièrement est la revalorisation de l’indemnité de sujétion spéciale police (ISSP) de 2 points en quatre ans.

Le coût total du protocole (2016-2022) a été estimé à 264,5 M€ (hors CAS pension et en excluant également l’enveloppe consacrée au GRAF des commissaires et à l’indemnité journalière d’absence temporaire) et sera cadencé de la façon suivante :

• 2016 : 4,5 M€ ;

• 2017 : 71,2 M€ ;

• 2018 : 60,0 M€ ;

• 2019 : 80,8 M€ ;

• 2020-2022 : 48,0 M€.

Le protocole a nécessité pour sa mise en œuvre un travail lourd sur le plan normatif. En effet, l’entrée en vigueur de la totalité de ces mesures, la plupart en janvier 2017, voire dès octobre 2016 pour certaines, a supposé de prendre ou de modifier 37 textes dont une loi, 9 décrets en Conseil d’État, 7 décrets simples, 20 arrêtés interministériels ou ministériels avec le recueil des avis de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) et de la direction du budget.

2. Gendarmerie nationale

D’un montant total de 215 M€, dont 68,31 M€ dès 2017, le protocole comprend :

– la transposition du PPCR de la fonction publique d’État aux personnels militaires de la gendarmerie ;

– la mise en œuvre de l’avancement semi-automatique au grade d’adjudant à 25 ans de service ;

– la revalorisation de l’indemnité de sujétion spéciale de police (ISSP) ;

– l’extension des primes de qualification aux militaires des corps de soutien ;

– la revalorisation de la prime liée aux attributions d’OPJ ;

– la revalorisation de l’allocation des missions judiciaires de la gendarmerie (AMJG) allouée aux militaires qui servent en brigade territoriale ;

– l’instauration d’un régime unique de l’indemnité pour temps d’activité et d’obligation professionnelle complémentaire (ITAOPC) pour toutes les unités et formations de la gendarmerie ;

– la revalorisation de l’indemnité spécifique spéciale (ISS) allouée aux gendarmes adjoints volontaires ;

– la rénovation des dispositifs de l’avantage spécifique d’ancienneté (ASA) ;

– la nouvelle bonification indiciaire (NBI) attribuée au titre de la politique de la ville, qui viendra compenser les sujétions particulières des militaires de la gendarmerie affectés dans les unités plus particulièrement exposées aux problématiques urbaines ;

– la reconnaissance des qualifications détenues et des responsabilités exercées, qui se traduit par l’augmentation du contingent de primes de haute technicité (PHT) ;

– l’assimilation du corps des sous-officiers du corps de soutien technique et administratif de la Gendarmerie nationale (CSTAGN) aux corps de catégorie B de la fonction publique ;

– la valorisation de l’encadrement supérieur de la Gendarmerie nationale, désormais reconnu comme faisant partie de la haute fonction publique dès le grade de lieutenant-colonel ou de chef d’escadron pour les officiers de ce grade occupant un emploi de responsabilités supérieures.

II. UN PREMIER BILAN POSITIF DES PLANS DE RENFORCEMENT DES MOYENS DES FORCES DE L’ORDRE ANNONCÉS DEPUIS 2015

À la suite des attentats de janvier 2015, le Premier ministre a annoncé la mise en place d’un plan triennal (2015-2017) de renforcement des moyens pour lutter contre le terrorisme, le plan de lutte contre le terrorisme (PLAT) (A). En novembre 2015, le Président de la République a décidé de compléter le PLAT par un plan de renforcement des moyens, intitulé Pacte de sécurité, sur la période 2016-2017 (B). Par ailleurs, pour la seule année 2016, le plan de lutte contre l’immigration clandestine (PLIC) renforce les effectifs des services engagés dans la lutte contre l’immigration irrégulière (C).

Ces trois plans prévoient un accroissement des moyens et des effectifs des forces de police et de gendarmerie pour les années 2015, 2016 et 2017.

Au 1er septembre 2016, 85,4 % de l’ensemble des plans ont été réalisés en ce qui concerne le corps d’encadrement et d’application, principal corps concerné par les hausses d’effectifs.

A. LE PLAN DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME (2015-2017)

1. Les effectifs

Le plan de lutte contre le terrorisme, mis en place au mois de janvier 2015 par le Gouvernement, vise un renforcement, en trois ans, de 1 400 personnels pour le ministère de l’Intérieur, dont 1 156 seront dévolus à la Police nationale.

S’agissant de la police, la décomposition de ces renforts, tous corps confondus, par service et par année est la suivante :

 

2015

2016

2017

Effectifs supplémentaires

DGSI

100

200

200

500

SCRT

150

100

100

350

DCPJ

60

30

16

106

PP

50

25

25

100

DCPAF

10

25

25

60

SDLP

35

5

0

40

Total

405

385

366

1 156

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Pour l’année 2015, le PLAT a été réalisé à 100 %. Pour 2016, 92 % des renforts destinés au corps d’encadrement et d’application (CEA) ont été réalisés au 1er septembre, le solde devant l’être d’ici le 31 décembre 2016.

En 2015, la gendarmerie a, quant à elle, bénéficié d’une création de 100 postes au titre du PLAT :

– 50 postes dans 25 antennes du renseignement territorial (ART) au niveau de certaines compagnies et brigades pour déceler au plus tôt les phénomènes de radicalisation ;

– 50 postes en unités opérationnelles pour renforcer les capacités d’observation, de surveillance, d’analyse et de lutte contre les cyber-menaces.

En 2016, la gendarmerie a bénéficié d’une création de 55 postes au titre du PLAT dont 50 personnels répartis dans 25 nouvelles ART pour un coût moyen annuel de 2,2 M€.

S’agissant de la réserve, le PLAT a en outre permis le financement de près de 100 000 jours de réserve supplémentaires en 2015, dotation reconduite en 2016 et 2017.

Enfin, une demande supplémentaire de 63 M€ pour monter à l’emploi de 3000 réservistes/jour devrait faire l’objet d’un amendement du Gouvernement dans le cadre du PLF 2017.

2. Les moyens

Les moyens dégagés au bénéfice de la Police nationale au titre du PLAT sont constitués à la fois de crédits dégelés en 2015 et de crédits supplémentaires sur trois ans pour le triennal en AE/CP, comme le montre le tableau ci–dessous :

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Pour 2016, l’ouverture de crédit - à hauteur de 24,69 M€ - permet de financer :

– les travaux et la sécurisation du site d’Asnières de la DGSI pour 5 M€ ;

– les projets des services de l’information et de la communication (SIC) à hauteur de 10,65 M€ ;

– le renforcement de la vidéo-protection de la Préfecture de police pour un montant de 2,3 M€ ;

– les primo équipements des élèves admis en école et le fonctionnement opérationnel des services à hauteur de 6,74 M€.

S’agissant de la gendarmerie, 78 M€ ont été abondés et consommés en 2015. La priorité a été donnée dans un premier temps au renforcement de la protection des forces de sécurité à hauteur de 23 M€. L’effort a également porté sur les moyens mobiles (18 M€ pour les véhicules légers et blindés) ainsi que sur la modernisation des moyens informatiques et de transmission (13 M€).

Le PLAT a aussi prévu un abondement de 5,2 M€ en 2016 et de 5,6 M€ en 2017 de manière à financer :

– le renforcement de la présence des forces de l’ordre sur le terrain via la création d’effectifs supplémentaires et le financement de la réserve opérationnelle ;

– le financement de moyens informatiques.

B. LE PACTE DE SÉCURITÉ (2016-2017)

1. Les effectifs

Le 16 novembre 2015, le Président de la République a annoncé la mise en œuvre d’un pacte de sécurité (PDS). Il prévoit le recrutement pour la police de 2 731 effectifs, dont la répartition se décompose comme suit :

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Les arrivées dans les services des policiers supplémentaires recrutés au titre du PDS interviendront entre le 16 août 2016 et le 3 avril 2017.

Pour 2016, les besoins en personnels supplémentaires ont donc été estimés à 1 366 agents, dont 1 216 pour le corps d’encadrement et d’application (CEA). 976 CEA ont déjà été affectés dans les services entre avril et septembre 2016, par le biais de mutations ou de sorties d’école. De la même manière, le reliquat sera réalisé avant la fin de l’année 2016.

En 2016, la gendarmerie bénéficie d’une création de 1 763 postes au titre du pacte de sécurité :

– 484 postes pour la création d’un 5ème peloton au sein de 22 escadrons de gendarmerie mobile ;

– 86 postes pour la création de 3 antennes du GIGN ;

– 30 postes pour la création d’une antenne du GIGN à Mayotte ;

– 400 postes pour renforcer 150 pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) qui seront spécialement entraînés et équipés pour devenir progressivement des PSIG Sabre sur la période 2016-2018 ;

– 180 postes créés dans les groupes d’observation et de surveillance (45 postes) et les cellules départementales d’observation et de surveillance (135 postes) ;

– 583 postes créés pour la mission de contrôle des flux.

Par ailleurs, la mise en place du pacte de sécurité a encore renforcé la réserve opérationnelle par le financement de 137 000 jours de réserve supplémentaires en 2016, dotation reconduite en 2017.

2. Les moyens

Pour 2016, le programme Police nationale a bénéficié d’une ouverture de crédits par amendement lors du débat parlementaire à hauteur de 116,4 M€. Elle permet de financer les postes suivants :

– surcoût lié aux effectifs (« sac à dos ») : 26,15 M€. Il s’agit de financer les paquetages habillement pour 5,2 M€, le coût de formation pour 12 M€ et les surcoûts liés au fonctionnement opérationnel des services ;

– renfort d’équipement de la DGSI : 5 M€. Il permet de financer la modernisation des IMSI catcher pour 2,91 M€, la mise en place d’un service d’investigation numérique pour 1 M€, la surveillance internet pour 400 k€, la modernisation des équipements photographiques pour 400 k€ et le développement des outils de géolocalisation pour 284 k€ ;

– protection et armement : 20,7 M€. Il s’agit de l’achat de gilets pare-balles individuels pour les réservistes à hauteur de 3,5 M€, de lanceurs de balles de défense pour 5,9 M€, des nouveaux fusils mitrailleurs de calibre 5.56 pour 6,1 M€, d’armes et de munitions à hauteur de 3,7 M€ et de matériels et de munitions spécifiques nécessaires au RAID et ses antennes pour 1,5 M€ ;

– renouvellement automobile : 21,7 M€, destinés à l’acquisition de 17 véhicules pour le service de la protection (SDLP) pour 400 k€, à la fin du programme « petit véhicule protégé » pour 900 k€ et au renfort de 1 000 véhicules pour 20,4 M€ ;

– renforcement des moyens d’investigation de la PTS : 4,42 M€ ;

– travaux immobiliers : 19 M€, destinés à financer les travaux de sécurisation des sites police du ressort des secrétariats généraux pour l’administration du ministère de l’Intérieur (SGAMI) pour 9 M€ ainsi que les travaux de remise à niveau des écoles de police pour 10 M€ ;

– moyens liés aux risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques : 175 k€ ;

– renforcement de la coopération internationale : 990 k€ ;

– modernisation des systèmes d’information et de la communication : 7,4 M€. Il s’agit de financer le système d’information NSIS pour 400 k€, l’évolution du logiciel de rédaction des procédures pour 750 k€, la modernisation des outils pour les missions de contrôle aux frontières pour 300 k€, la modernisation du fichier des personnes recherchées (FPR) pour 677 k€, le blocage des sites internet faisant l’apologie du terrorisme pour 2 M€, le projet cyber-crime pour 1,1 M€, les évolutions de l’outil d’état-major de la DGPN pour 600 k€, les équipements discrets pour 600 k€, l’aménagement de la salle du centre d’information de la Police nationale pour 650 k€, le projet Luxid (logiciel d’analyse sémantique) pour 173 k€, le projet STCL LAPI (lecture automatique des plaques d’immatriculation) pour 150 k€ ;

– renforcement de la vidéo-protection et lutte anti-drone de la préfecture de police : 9,45 M€, destinés à financer les caméras pour 7,85 M€, la lutte anti-drone pour 1,1 M€ et la sphère de confinement pour 460 k€ ;

– extension du système PARAFE : 1,4M€.

S’agissant de la gendarmerie, le pacte de sécurité prévoit un abondement de 93,4 M€ en 2016 et 73,4 M€ en 2017. Il permettra de financer en particulier :

– le déploiement du projet NEOGEND ;

– la poursuite de la remise à niveau du parc automobile ;

– l’acquisition de véhicules supplémentaires pour le contrôle des flux ;

– l’acquisition de moyens de protection et d’intervention pour les personnels ;

– l’adaptation des infrastructures de la nouvelle école de Dijon.

Allocation des moyens issus du PDS

 

2016

2017

(Prévision)

Moyens de protection, d’intervention et armement

24,8 M€

7,9 M€

Véhicules

33,3 M€

27,9 M€

Moyens informatiques et de transmission

6,3 M€

21,3 M€

Moyens CFAGN

0,4 M€

0,4 M€

Infrastructures

9,2 M€

4,3 M€

Moyens NRBC

5,0 M€

0,2 M€

École de Dijon

3,7 M€

-

Moyens de fonctionnement

10,7 M€

11,5 M€

Total

93,4 M€

73,4 M€

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

C. LE PLAN DE LUTTE CONTRE L’IMMIGRATION CLANDESTINE (2016)

Le plan de lutte contre l’immigration clandestine, mis en œuvre depuis le premier semestre 2016, renforce de 530 effectifs les services engagés dans la lutte contre l’immigration irrégulière et se décompose comme suit pour la police :

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Au 1er septembre 2016, le PLIC est réalisé à hauteur de 82,3 % en ce qui concerne le CEA. D’ici la fin de l’année 2016, 92 sorties d’école sont prévues afin d’alimenter ce plan.

En 2016, la gendarmerie a quant à elle bénéficié d’une création de 370 gendarmes mobiles, dont 110 personnels affectés à la création d’un nouvel escadron à Rosny sous-bois et d’un abondement de 7,1 M€ en 2016 décliné ci-après :

 

2016

Moyens de protection, d’intervention et armement

1,3 M€

Véhicules

1,4 M€

Moyens informatiques et de transmission

0,1 M€

Moyens de fonctionnement

4,3 M€

Total

7,1 M€

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

SECONDE PARTIE : LA FORMATION AU SEIN DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE NATIONALES

I. DES DISPOSITIFS DE FORMATION INITIALE EN PLEINE ÉVOLUTION

Si les dispositifs de formation initiale sont organisés selon des logiques distinctes dans la Police et la Gendarmerie nationales (A), ils ont tous deux connus des évolutions récentes et rapides pour tenir compte des conséquences des évènements de 2015–2016 (B).

A. L’ORGANISATION DE LA FORMATION INITIALE DES POLICIERS ET DES GENDARMES

Dans la police, le recrutement, la formation et la gestion des personnels sont confiés à la direction des ressources et des compétences de la Police nationale (DRCPN). S’y ajoutent les services territoriaux, respectivement les secrétariats généraux pour l’administration du ministère de l’Intérieur (SGAMI), les directions régionales du recrutement et de la formation (DRRF) et les écoles de police (ENP) (1).

Dans la gendarmerie, la direction des personnels militaires de la Gendarmerie nationale (DPMGN) « connaît de toutes les questions touchant au personnel militaire de la gendarmerie. Elle recrute, forme et gère l’ensemble des militaires servant dans la Gendarmerie nationale. » (1) La DPMGN détermine également la politique des ressources humaines relative aux personnels civils servant en gendarmerie, assure le pilotage des effectifs et anime le dialogue social en liaison avec la direction des ressources humaines du ministère de l’Intérieur (2).

Si, en matière de formation, il existe un comité technique commun à la DGGN et à la DGPN, il n’apparait pas pertinent d’envisager de mutualiser les formations initiales de la Police et de la Gendarmerie nationales (3).

1. Police nationale 

a. La création d’une nouvelle direction centrale du recrutement et de la formation de la Police nationale

La réforme annoncée par le ministre de l’Intérieur le 2 juin 2016 se traduit notamment par la création d’une nouvelle direction centrale du recrutement et de la formation de la Police nationale (DCRFPN).

La décision de re-créer une direction de plein exercice pour assurer la formation des policiers (une telle direction a existé jusqu’en 2010) s’appuie sur le constat largement partagé de l’éclatement des « opérateurs » de formation au sein de la Police nationale. Ainsi, outre la sous-direction de la formation et du développement des compétences de l’actuelle DRCPN, existent diverses autres structures de formation, relevant des directions actives de la direction générale de la Police nationale (DGPN), de la sous-direction de la formation de la préfecture de police de Paris, de l’École nationale supérieure de la police (ENSP). Cet éclatement a pour conséquence une absence de cohérence dans les formations, tant dans le contenu que par corps, et donc une stratégie de formation au sein de la Police nationale qui reste embryonnaire dont la ligne directrice n’est pas clairement définie.

De plus :

– le recueil des besoins de formation est lacunaire, ce qui accroît la difficulté à construire une stratégie ;

– la formation continue reste largement optionnelle en dehors des passages de grade et de l’obtention de la qualité d’officier de police judiciaire;

– l’évaluation des dispositifs de formation demeure non codifiée et très limitée ;

– le lien entre la formation et la gestion des ressources humaines n’a jamais véritablement été mis en place, alors même que la création de la DRCPN, qui a fusionné l’ancienne direction de l’administration de la Police nationale (DAPN) et celle de la formation (DFPN), avait comme ambition de prendre en compte la formation comme outil de gestion des carrières ;

– le lien avec la recherche et l’ouverture à l’international sont insuffisant ou relève d’initiatives non coordonnées.

La DCRFPN devra :

– élaborer la stratégie de la formation en impliquant l’ensemble des directions actives de la DGPN, la préfecture de police de Paris et l’ENSP ;

– professionnaliser les acteurs de la formation, au-delà de ceux de la seule direction centrale, en les formant et en les évaluant régulièrement ;

– instituer des liens fonctionnels avec les structures de formation de l’ENSP, des directions actives de la DGPN et de la préfecture de police de Paris ;

– assurer le pilotage des ressources des formations disponibles à travers une cartographie partagée des ressources humaines et matérielles ;

– renforcer le caractère obligatoire de la formation continue ;

– faire de la formation un outil essentiel de la gestion des ressources humaines.

Elle exercera son autorité sur l’ensemble du réseau de recrutement et de formation, incluant le ressort de la préfecture de police de Paris, ainsi que la tutelle sur l’ENSP.

Cette réforme doit aussi se traduire par une plus grande ouverture de la Police nationale vers l’extérieur, notamment en recourant plus largement au concours de l’université ou de la société civile, tout en tirant encore davantage profit des compétences qui existent au sein de la Police nationale (tutorat…).

La DCRFPN devrait être créée d’ici le mois de décembre 2016. Votre rapporteur a rencontré, dans le cadre de son travail d’auditions, M. Philippe Lutz, inspecteur général de la Police nationale, préfigurateur de cette nouvelle direction centrale.

b. Les dispositifs de formation professionnelle initiale des personnels actifs

Les formations initiales sont conçues par les services de la sous-direction de la formation et du développement des compétences, avec le concours des directions actives. L’ENSP conçoit et met en place les formations des commissaires et des officiers de police.

Les délégations interrégionales au recrutement et à la formation (DIRF) délivrent les formations des autres corps (gardiens de la paix, adjoints de sécurité et cadets de la République), via les écoles nationales de police (ENP) et les centres régionaux de formation (CRF) de leur zone.

●  La formation des commissaires a fait l’objet d’évolutions récentes. Le décret n° 2016-1039 du 28 juillet 2016 modifiant le décret n° 2005-939 du 2 août 2005 portant statut particulier du corps de conception et de direction de la Police nationale et l’arrêté du 28 juillet 2016 portant organisation des périodes de formation initiale des élèves commissaires et commissaires stagiaires à l’ENSP ont réduit la durée de la formation à 22 mois (au lieu de 24) et précisé les règles s’appliquant à la formation initiale.

Depuis 2014, un travail de refonte de la scolarité a été entrepris avec comme double objectif de passer d’une formation de contenu divisée en modules de formation initiale à une formation par objectifs et de permettre une meilleure individualisation des parcours. De 963 heures de face à face pédagogique l’école est passée à 1295 heures, soit 332 heures supplémentaires (+35 %), sans obérer le temps passé en stage d’alternance.

L’École Nationale Supérieure de la Police (ENSP)

L’ENSP est un établissement public national à caractère administratif chargé d’une mission d’enseignement supérieur et de recherche, créé en 2013, placé sous la tutelle du ministre de l’Intérieur. Sa mission principale est la formation initiale et continue des commissaires de police (corps de conception et de direction de la Police nationale) et des officiers de police (corps de commandement).

Elle organise également deux classes préparatoires intégrées et des stages de formation continue à destination d’autres fonctionnaires de police, d’élus et de cadres supérieurs d’administrations ou d’entreprises ainsi qu’un dispositif de formation initiale ou continue des auditeurs et stagiaires étrangers.

●  La formation des officiers est d’une durée de 18 mois. Les élèves suivent une formation en alternance : les deux tiers du temps sont passés à l’école. Le reste est effectué sous forme de stages dans des services de police ou dans d’autres administrations.

●  Les formations initiales des gardiens de la paix, adjoints de sécurité et cadets de la République sont organisées de la façon suivante :

 

Gardiens de la paix

Adjoints de sécurité

Cadets de la République

Durée de la formation en structure Police nationale

30 semaines

12 semaines

12 semaines en établissement de l’éducation nationale

28 semaines en structure Police nationale*

Durée de l’alternance ou du stage

4 semaines

 

7 semaines

Durée totale de la formation

34 semaines

+ stage d’adaptation sur site (selon la direction d’emploi)

12 semaines

+ 2 semaines en stage d’adaptation sur site

52 semaines (1 an)

*300 à 400 heures d’enseignement général dans un établissement relevant de l’éducation nationale

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

De 2012 à 2015, 27 569 élèves gardiens de la paix, adjoints de sécurité et cadets de la République ont été formés au sein du réseau de la formation. Pour l’année 2016, ce nombre s’élève à 12 491.

Le métier de formateur généraliste au sein de la Police nationale

La Police nationale a fait le choix d’une formation tant initiale que continue dispensée très largement par des policiers expérimentés, sélectionnés sur leurs aptitudes et formés pour être en charge de fonctions pédagogiques durant quelques années. La formation s’appuie donc sur des policiers qui bénéficient d’une double légitimité fondée à la fois sur leur expérience professionnelle et sur leurs compétences pédagogiques.

Le recrutement des formateurs généralistes s’effectue via une commission de sélection. Ils suivent ensuite une formation au sein de l’institut national de la formation de la Police nationale (INFPN) de Clermont–Ferrand. Cette formation de huit semaines non consécutives se déroule en trois phases : un apprentissage théorique suivi d’une mise en situation d’animation de formation en école, une période d’alternance au sein de la future structure d’affectation et un approfondissement du contenu de la formation. Au terme de cette formation, le formateur généraliste dispose de compétences pour élaborer, animer une séance de formation, assurer l’encadrement d’un groupe d’élèves.

La durée d’affectation en formation est limitée à quatre ans, renouvelable une fois. Le formateur doit se soumettre à des évaluations pédagogiques périodiques par des personnes habilitées.

2. Gendarmerie nationale

La formation est théorique et technique, au travers de la transmission des socles de la militarité et du droit.

Le métier de formateur au sein de la Gendarmerie nationale

La formation des formateurs de la Gendarmerie nationale a fait l’objet d’une rénovation profonde initiée en 2011, achevée en 2014. Cette démarche correspond à la volonté de professionnaliser l’ensemble de la chaîne de formation. Elle comprend une formation centralisée en présentiel, une formation tutorée et une formation à distance. Le formateur est évalué et doit acquérir un certain nombre de compétences inscrites dans un référentiel des activités et des compétences. Lorsque le niveau requis est atteint, le formateur se voit attribuer un code savoir et peut prétendre, via une validation des acquis d’expérience (VAE), au titre enregistré au répertoire national des certifications professionnelles de « formateur de la sécurité intérieure ». La formation des formateurs concerne l’ensemble des militaires, officiers et sous-officiers, affectés dans un emploi de formateur et dure deux semaines. Les cadres permanents des écoles et centres de la gendarmerie ne bénéficient d’aucun régime indemnitaire particulier. Ils sont rémunérés en fonction du grade et de l’échelon atteints. Il convient cependant de préciser que les commandants d’écoles, de centre et les commandants de compagnie d’instruction sont éligibles à l’indemnité de fonction et de responsabilité.

La formation est assurée à la fois par des formateurs permanents et des formateurs détachés des unités opérationnelles.

Les officiers formateurs sont affectés au sein des écoles dans le cadre du plan annuel de mutations, à partir des besoins exprimés chaque année par le commandement des écoles de la Gendarmerie nationale (CEGN), en général pour une durée de quatre ans avec la possibilité d’une prolongation d’une année.

Les sous-officiers formateurs répondent à un appel annuel à candidatures du CEGN et sont recrutés sur la base du volontariat. La formation demandant un investissement physique important, ils doivent être médicalement aptes et satisfaire aux épreuves du contrôle de la condition physique des militaires (CCPM). Les dossiers des candidats sont collationnés par le CEGN, puis transmis pour avis aux écoles et centres autonomes. Le CEGN prononce la décision de recrutement. Leur temps de séjour en école est de 5 ans en principe. À titre dérogatoire, un maintien d’une année supplémentaire, renouvelable une fois, peut être accordé par le CEGN aux formateurs détenant des compétences techniques rares et qu’il est difficile de remplacer (exemples : maître de chien, plongeur autonome, ...).

En outre, les écoles bénéficient du renfort ponctuel de formateurs occasionnels détachés pour emploi dans les écoles et centres autonomes. Ils interviennent à la fois au profit de la formation initiale, de la formation continue et des formations d’expertise. La durée de ces détachements va de quelques jours à plusieurs mois.

●  Les officiers de gendarmerie

Les officiers de gendarmerie ont vocation à occuper prioritairement des emplois opérationnels tandis que les officiers du corps technique et administratif seront positionnés exclusivement sur des postes dans le domaine du soutien (logistiques, finances et ressources humaines). La formation se déroule à l’École des officiers de gendarmerie, à Melun.

Effectif global au 1er septembre 2016

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

De nombreux modules, en particulier dans le domaine de la formation militaire et de la formation professionnelle, sont cependant communs à la formation des élèves-officiers des deux statuts. En revanche, l’aspect professionnel technique et pratique diffère pour s’adapter aux spécificités de chaque emploi en sortie d’école.

Conduite sur deux années, la formation initiale prépare les élèves-officiers à leur premier emploi de commandant d’unité élémentaire en gendarmerie départementale ou en gendarmerie mobile ainsi qu’aux étapes ultérieures de leur carrière.

Elle s’articule, dès lors, autour de quatre axes majeurs, et est composée de quatre semestres :

– 1er semestre : formation militaire ;

– 2e semestre : formation professionnelle ponctuée de stages de découvertes des différentes dominantes ;

– 3e semestre : formation académique, validée par un Master II « droit et stratégies de la sécurité » ou par un MBA « management de la sécurité» ;

– 4e semestre : spécialisation dans une dominante professionnelle (sécurité publique générale, sécurité routière, maintien de l’ordre, police judiciaire).

Deux mois sont dédiés à l’apprentissage de l’intervention professionnelle. Un stage de commandement en intervention professionnelle, au centre national d’entraînement des forces de gendarmerie – centre d’excellence européen en matière d’ordre public – vient parachever la formation et la sanctionner par l’obtention d’un monitorat d’intervention professionnelle.

Une fois affectés en unité, les élèves disposent d’un accompagnement de type tutorat.

●  Les sous–officiers de gendarmerie

La formation initiale des sous-officiers de gendarmerie, d’une durée de douze mois, est dispensée au sein des écoles de gendarmerie de Montluçon (Allier), Chaumont (Haute-Marne), Chateaulin (Finistère), Dijon (Bourgogne) et Tulle (Corrèze).

DÉroulÉ de la formation des sous–officiers de gendarmerie

Phase 1 (12 semaines)

Formation militaire

Le gendarme militaire

Phase 2 (18 semaines)

Formation technique

Le gendarme soldat de la loi

Phase 3 (21 semaines)

Formation territoriale

Le gendarme acteur de la sécurité des territoires

Source : http://www.gendarmerie.interieur.gouv.fr/cegn/Formation-initiale/Formation-des-sous-officiers-de-gendarmerie

●  Les gendarmes adjoints volontaires (GAV)

Les gendarmes adjoints volontaires sont employés dans les filières opérationnelles, techniques ou administratives :

– les GAV agents de police judiciaire adjoints (APJA) secondent les sous-officiers de gendarmerie dans la plupart de leurs missions (prévention de la délinquance, police route...). Ils ont vocation à intégrer le corps des sous-officiers de gendarmerie ;

– les GAV emploi particulier (EP) ou détenant une qualification de haut niveau occupent, en fonction de leur formation professionnelle, des postes à compétences spécifiques dans des domaines très variés (agent d’accueil et de sécurité, employé de bureau, entretien des casernes...). Ils ont vocation à rejoindre le corps des sous-officiers du corps technique et administratif de la Gendarmerie nationale.

Ils bénéficient de 13 semaines de formation initiale. Eu égard aux fortes contingences de la formation pour l’année 2016, la période a été ramenée à 9 semaines.

Les formations initiale et complÉmentaire des GAV

GAV

Formation initiale

Formation complémentaire en unité

Durée

Contenu

Durée

Diplôme délivré

APJA

13 semaines

Délivrance du certificat technique de qualification GAV-APJA dans les conditions suivantes :

- obtention d’une moyenne générale supérieure ou égale à 10 sur 20,

- aptitude à l’emploi du pistolet automatique de dotation reconnue.

En cas d’inaptitude définitive à l’emploi du pistolet automatique (trois échecs successifs), le commandant d’école propose la dénonciation du contrat pour inaptitude à l’emploi de GAV.

12 semaines

Délivrance du diplôme de gendarme adjoint volontaire - agent de police judiciaire adjoint (DGA-APJA) dans les conditions suivantes :

- détenir les compétences professionnelles nécessaires à l’exercice des fonctions tenues.

L’échec à ce diplôme a pour conséquence le retrait immédiat du militaire de l’emploi à caractère opérationnel.

Ce titre est nécessaire pour prétendre à l’avancement aux grades de brigadier et de brigadier-chef.

EP

12 semaines

Deux modules :

- un stage en école de gendarmerie de six semaines. L’obtention d’une moyenne supérieure ou égale à 10 sur 20 à l’issue du stage en école conditionne l’affectation des candidats en unité. Dans le cas contraire, le contrat de volontariat peut être dénoncé

- une formation d’adaptation à l’emploi de six semaines en unité

12 semaines

Délivrance du diplôme de gendarme adjoint volontaire à la condition suivante :

- donner satisfaction dans la manière de servir à l’issue de la période de 12 semaines.

Cette délivrance peut être différée pour les gendarmes adjoints dont l’appréciation comporte des restrictions.

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Les mesures incitatives À présenter les concours de la gendarmerie

Le concours de sous-officiers de gendarmerie (SOG) comprend une voie interne, pour un maximum de 40 % des postes proposés au recrutement. Cette voie interne est réservée aux gendarmes adjoints volontaires ou adjoints de sécurité justifiant d’un an de contrat en cette qualité, aux militaires des autres armées justifiant de quatre ans de services ainsi qu’aux réservistes de la Gendarmerie nationale. Les GAV titulaires du baccalauréat peuvent aussi se présenter au concours externe.

Pour préparer le concours de SOG, les GAV bénéficient d’une préparation en unité et d’un module de formation en ligne spécifique. Par ailleurs, leur dernière notation est prise en compte par le jury du concours.

De 2012 à 2015, 5 240 GAV figurent parmi les 12 437 lauréats des concours de SOG, ce qui représente 42,13 % de ces lauréats. Par ailleurs, 149 GAV figurent parmi les 413 lauréats de la sélection des sous-officiers du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie et représentent donc 36 % de ces lauréats.

Ces deux taux sont en augmentation constante, attestant de la capacité d’évolution et de promotion interne au sein de la Gendarmerie nationale.

Les GAV qui ne sont pas retenus en qualité de sous-officier ou qui souhaitent choisir une autre orientation professionnelle peuvent faire valoir, auprès de futurs employeurs, l’expérience acquise au sein de la Gendarmerie nationale et bénéficier du dispositif de reconversion2.

3. Rapprocher les formations de la police et de la gendarmerie ?

Le sujet des mutualisations en matière de formation est co-piloté par la DGPN et la DGGN depuis 2012 au travers d’un comité technique subdivisé en douze groupes de travail thématiques.

a. La formation initiale

Votre rapporteur pour avis estime que les formations initiales n’ont pas vocation à être mutualisées, celles des militaires de la Gendarmerie nationale présentant un caractère identitaire lié principalement au statut militaire. Cet apprentissage spécifique donne du sens à l’engagement individuel des candidats, tout comme il participe de l’acceptation des contraintes militaires nécessaires au bon fonctionnement de la gendarmerie.

Toutefois, durant la scolarité initiale des gendarmes et des gardiens de la paix, un module de présentation des forces de sécurité intérieure est programmé. Un stage de découverte en unité opérationnelle, en brigade ou en commissariat, d’une durée de deux jours, complète cette formation théorique. D’autre part, un officier supérieur de gendarmerie présente l’institution durant trois heures aux élèves de l’ENSP.

b. La formation continue

De nombreuses formations sont mutualisées, notamment dans les domaines de la police judiciaire, du maintien de l’ordre et de la linguistique. On peut ici en citer quelques-unes :

– dans le domaine de la sûreté, la formation nationale « référent sûreté » à destination des deux forces de sécurité intérieure a été créée en mars 2007. Dispensée par des intervenants policiers, gendarmes ou experts de la société civile, elle est destinée aux policiers et gendarmes expérimentés affectés en sécurité publique, à la préfecture de police de Paris ou en gendarmerie. La formation des référents sûreté est confiée depuis 2016 à l’ENSP et se déroule sur le site Cannes-Écluse, qui offre une capacité d’accueil de 90 stagiaires référents sûreté chaque année ;

– dans le cadre du plan ministériel de lutte contre les cyber-menaces et sur instructions de la DGPN, une journée de sensibilisation sur la thématique de la cybercriminalité a été organisée par les services de la formation de la Police nationale dans chaque région métropolitaine, entre octobre 2015 et juin 2016, pour permettre aux policiers et gendarmes référents sûreté et/ou référents intelligence économique de répondre aux premières attentes des chefs d’entreprises en matière de prévention sur ce sujet et diriger, si nécessaire, ces derniers vers les services spécialisés territorialement compétents (339 policiers et gendarmes ont été sensibilisés) ;

– une formation relative au fichier national judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes a été conçue par les services de la formation de la police nationale. Le premier module de la mallette pédagogique a été communiqué à la Gendarmerie nationale à sa demande. Le second module, relatif aux exercices pratiques, est ouvert aux gendarmes dans les délégations interrégionales au recrutement et à la formation (DIRF) ;

– s’agissant de l’examen technique OPJ, la commission unique police / gendarmerie a été mise en place le 1er octobre 2016, dans un objectif de rapprochement des processus. Des travaux ont été menés en étroite collaboration avec la DGPN, la DGGN et la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice. Cette commission fusionnée est dorénavant en charge de choisir les sujets, fixer la date des examens et avaliser la liste des candidats admis ;

– dans le domaine informatique, police et gendarmerie ont conçu ensemble une formation en e-learning pour l’application FOVes (fichier des objets et véhicules signalés), hébergée sur la plate-forme de l’INFPN, chaque force ayant conçu des modules ;

– des formations techniques sont en cours d’harmonisation : le centre national d’instruction de ski et d’alpinisme de la gendarmerie (CNISAG) et le centre national d’entraînement à l’alpinisme et au ski de la direction centrale des compagnies républicaines de sécurité ont ainsi rédigé un référentiel commun pour le secours en montagne. Un référentiel commun de motocycliste a également été réalisé.

Conscient de l’attachement des policiers et des gendarmes à l’identité et aux traditions de leurs corps d’appartenance, votre Rapporteur pour avis ne juge pas souhaitable de rapprocher les écoles de formation initiale ; en revanche, une démarche beaucoup plus volontariste devrait présider au rapprochement des structures de formation continue. Ceci devrait être un objectif prioritaire pour la future DCRFPN.

B. L’IMPACT DES ÉVÈNEMENTS DE 2015–2016 SUR LE CONTENU DE LA FORMATION INITIALE

1. Le raccourcissement de la durée de certaines formations

L’aspect exceptionnel des mesures de recrutement prises à la suite des évènements de 2015 a également nécessité un aménagement de la durée de la formation initiale des gardiens de la paix et un nouveau cadencement adapté de la scolarité.

C’est ainsi qu’à titre temporaire (à compter de la 237ème promotion incorporée en décembre 2015 et jusqu’à la 245ème promotion), deux nouvelles formes de scolarité ont été mises en place pour les gardiens de la paix :

– la première, d’une durée de 9 mois et demi (pour les lauréats du concours national), se compose de séquences pédagogiques et d’un mois de stage au sein des services d’affectation ;

– la seconde, raccourcie à 6 mois (sans alternance) à titre exceptionnel pour trois promotions d’élèves issus du second concours (réservé aux adjoints de sécurité et aux gendarmes adjoints volontaires) : les 240, 241, 242, et 243èmes promotions. Le programme de cette formation a été élaboré en tenant compte à la fois des contenus de la formation des adjoints de sécurité et des connaissances pouvant être acquises en situation professionnelle.

Les formations sont construites en plusieurs étapes pédagogiques :

– six fondamentaux (institution / déontologie policière / droit pénal et procédure pénale / technique d’intervention / secourisme / compétences relationnelles) constituant le socle des connaissances nécessaires ;

– seize situations et six séquences d’approfondissement permettant aux élèves d’aborder les volets judiciaires et routiers. Les approfondissements permettent en outre une ouverture sur la société (religion, environnement sociétal…).

Ces enseignements sont complétés par des matières spécifiques (informatique, armement, tir, technique de sécurité et d’intervention etc.) qui sont notées et interviennent dans le classement final.

Des heures de soutien sont également inscrites à l’emploi du temps des élèves. Ces temps sont assurés par des formateurs de la structure.

La formation sur 6 mois reprend les mêmes enseignements qui ont fait l’objet d’un réajustement et parfois de fusion afin de pouvoir être dispensés, laissant une part plus importante à l’auto–formation. Même si cette formation reste globalement satisfaisante, elle peut poser question à raison du parcours professionnel parfois hétérogène de certains ADS ou GAV.

S’agissant des sous–officiers de gendarmerie, pour l’année 2016, la formation a été repensée de manière à prévoir 6 ou 8 mois de présence en école en fonction de l’origine du recrutement – interne ou externe – complétés par 6 ou 4 mois de stage en unité opérationnelle. Cette adaptation récente, qui module la durée de la formation en tenant compte de l’expérience déjà acquise par les anciens GAV, a permis de mettre en œuvre le pacte de sécurité.

2. L’introduction de nouveaux modules

La formation initiale se veut « généraliste », puisqu’elle a vocation, avant tout, à former des professionnels de la sécurité intérieure et non des techniciens ou des experts dans un domaine particulier, d’autant plus que les futurs policiers et gendarmes seront appelés à exercer leurs missions dans des contextes très différents et au sein de plusieurs dominantes d’emploi en cours de carrière.

Toutefois, les programmes font l’objet d’aménagements et de révisions permanents afin d’intégrer les diverses évolutions législatives ou doctrinales consécutives aux événements d’actualité.

Ainsi, le nouveau schéma national d’intervention des forces de sécurité, présenté le 19 avril 2016 par le ministre de l’Intérieur, implique qu’en cas d’urgence absolue, l’immédiateté prime sur le concept de zone de compétence territoriale. De même, l’article 51 de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale a introduit un nouveau cas d’irresponsabilité pénale en faveur des forces de l’ordre dans le cadre du périple meurtrier (3).

Ces différentes évolutions ont conduit les responsables de la formation initiale des élèves à renforcer les modules techniques et tactiques. La Gendarmerie nationale a mis en place un « pack terrorisme » et la Police nationale a renforcé les cours de techniques et sécurité en intervention.

L’arrêté du 27 juillet 2015 (abrogeant l’arrêté du 28 août 2000) relatif à la formation continue aux techniques et à la sécurité en intervention des personnels actifs de la Police nationale et des adjoints de sécurité précise les évolutions en matière de techniques et de sécurité en intervention. Ces dernières portent sur l’entraînement au tir et aux pratiques professionnelles en intervention, ainsi que sur le maintien de la condition physique opérationnelle.

Par ailleurs, l’évolution technologique nécessite l’étude de matières spécifiques telle que la sécurité économique et la cybercriminalité. Une chaire, à ce titre, y est spécifiquement dédiée à l’EOGN.

3. L’entrainement au tir

À titre liminaire, votre rapporteur pour avis tient à saluer la très grande qualité de l’enseignement en matière de doctrine d’emploi des armes. Tant les policiers que les gendarmes admettent parfaitement la restriction de l’usage des armes à feu aux seuls cas de légitime défense ou d’état de nécessité. Ceci explique la grande maitrise des forces de Police et de Gendarmerie françaises dans les situations d’extrême dangerosité. Ce professionnalisme doit être salué car il épargne à la Nation les dérapages que connaissent malheureusement d’autres pays industrialisés, en particulier les États-Unis.

Il existe en France une réelle situation d’abstention des agents vis-à-vis de leur arme de dotation car ils ont intégré les règles rigoureuses de la légitime défense, parfois au péril de leur vie. Les mises en situation effectuées dans certaines écoles avec des magistrats en formation ont montré que ceux-ci avaient, dans l’action, une conception moins restrictive de la notion de légitime défense que les professionnels de la sécurité. Ceci devrait ouvrir le débat, non pas sur la notion de légitime défense, mais sur sa contextualisation s’agissant de l’emploi de l’arme par les forces de gendarmerie ou de police.

Si les nombreux déplacements que votre rapporteur a effectué l’ont persuadé que les élèves gendarmes et policiers s’entrainent suffisamment au tir – en moyenne une fois par semaine – les auditions laissent en revanche perplexe sur la formation continue en la matière, alors même que cette dernière parait indispensable dans le cadre du nouveau schéma national d’intervention, véritable révolution copernicienne, qui va conduire les primo–intervenants à intervenir sur site face au risque terroriste.

Alors que le référentiel de la Police nationale oblige à trois séances de tir de 30 cartouches par an, il semblerait que trop souvent, cet objectif ne soit pas atteint, en raison en particulier de nombreuses annulations de séances pour nécessités de service. Ceci pourrait être source de contentieux en cas d’emploi du feu par un personnel ne satisfaisant pas pleinement aux obligations réglementaires de formation continue.

Votre rapporteur pour avis déplore en outre le fait que les stands de tir soient si peu nombreux. Il a pu constater, au moins dans un cas, qu’un stand construit dans un commissariat et en état quasi opérationnel n’était pas achevé et donc inutilisé. La Police nationale ne dispose que de 140 stands, forçant souvent les élèves à des déplacements de plus d’une heure pour se rendre à cet exercice obligatoire dans le cadre de leur formation. En outre, on dénombre seulement 14 stands de la Police nationale habilités aux nouvelles armes longues, les HK–G36. Votre rapporteur estime qu’il faut mener une vraie réflexion immobilière portant sur :

– la construction de stands de tirs, dont le coût à l’unité s’élève à 1,4 million d’euros ;

– la mutualisation des stands entre la Police nationale et la Gendarmerie nationale – qui est déjà en cours – et le ministère de la Défense – qui reste largement perfectible ;

– la mutualisation des stands avec les clubs de tirs privés, ou les stands appartenant à des collectivités locales. Cette mutualisation est aujourd’hui embryonnaire.

II. UN EFFORT SANS PRÉCÉDENT EN FAVEUR DE LA FORMATION INITIALE

Les attentats terroristes perpétrés en 2015 ainsi que la nécessité de lutter plus efficacement contre l’immigration irrégulière ont amené le Gouvernement à consentir des efforts sans précédent pour renforcer les effectifs de la Police nationale, multipliant par dix le nombre d’élèves par rapport à celui d’il y a encore cinq ans (A). Cette démarche nécessaire, outre des difficultés logistiques, a produit un effet d’éviction, temporaire, à l’encontre des stagiaires de la formation continue et des cadets de la République (B).

A. UNE MONTÉE EN CHARGE RAPIDE DES EFFECTIFS DES ÉCOLES DE POLICE ET DE GENDARMERIE

1. Une augmentation des postes offerts aux différents concours

● Police nationale

Entre 2007 et 2013, la Police nationale a perdu 7 648 emplois. Depuis 2013, et en incluant le budget 2017, les créations d’emplois dans la Police nationale atteindront 6 890 postes. En 2017, la hausse des effectifs provient de plusieurs facteurs:

– du schéma d’emploi initial qui prévoit le remplacement des départs à la retraite et la création de 300 postes supplémentaires ;

– des effets supplémentaires des trois plans exceptionnels de renforts décidés en 2015 pour prendre en compte les besoins opérationnels lies à la lutte anti-terroriste et à la lutte contre l’immigration clandestine (4).

En conséquence, en 2016, 4 700 élèves gardiens de la paix sortiront des écoles de police contre 488 en 2012, ce qui correspond à une multiplication par dix des recrutements. En 2017 les écoles formeront près de 4 600 élèves gardiens de la paix.

Nombre de postes offerts aux concours de fonctionnaires de police

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

● Gendarmerie nationale

L’année 2016 est une année exceptionnelle pour l’ensemble des recrutements en gendarmerie, en particulier suite aux créations d’emplois dans le cadre des plans gouvernementaux de lutte contre le terrorisme et l’immigration clandestine :

– plus de 7 000 postes sont offerts aux concours de sous-officiers de mars et septembre 2016 (la norme pour une année étant entre 2 500 et 3 000 postes proposés) ;

– 7 000 postes sont offerts pour le recrutement des gendarmes adjoints volontaires.

2. L’organisation d’un concours exceptionnel de gardien de la paix

Afin de couvrir la totalité des besoins en effectifs, un concours exceptionnel et temporaire de gardien de la paix pour un recrutement de 3 112 postes a été organisé en mars 2016 et s’est achevé le 15 juillet 2016 (arrêté du 11 décembre 2015 fixant les modalités de ce recrutement).

Ce concours a été organisé sans différenciation de l’épreuve d’admissibilité externe (premier concours) et interne (second concours) et avec allègement des épreuves, permettant ainsi de réduire la durée du concours.

À l’issue des épreuves d’admission, 3 035 candidats ont été admis (35 583 inscrits).

Votre rapporteur salue l’organisation de ce concours exceptionnel, même s’il s’étonne que l’épreuve de « gestion du stress » ait été supprimée, dans un contexte où les gardiens de la paix sont de plus en plus confrontés à des interventions en milieu hostile.

3. Une attractivité stabilisée à un niveau élevé dans la police et dans la gendarmerie

Ces montées en effectif ne peuvent s’effectuer à niveau égal des reçus que grâce à la très grande attractivité des forces de sécurité intérieure. Les perspectives de carrière de la Gendarmerie et de la Police nationales ainsi que les garanties consacrées par les statuts des différents corps sont de nature à susciter des candidatures, en dépit de la difficulté de la sélection et des contraintes.

● Gendarmerie nationale

Au 30 juin 2016, le bureau du recrutement de la Gendarmerie nationale avait déjà traité plus de 55 000 candidatures – pour 8 490 postes (officiers, sous officiers, volontaires), alors que ce chiffre se situait entre 60 000 et 65 000 candidatures les années précédentes.

● Police nationale

Le nombre de personnes qui se renseignent dans les carrefours carrières, lors des forums destinés à l’orientation des étudiants ou qui se rendent directement dans les commissariats et les unités d’information sur les métiers est important en 2015 :

– 141 077 personnes renseignées par le réseau du recrutement et de la formation ;

– 4 088 réponses données par mail aux demandes des internautes ;

– 10 776 appels au numéro vert recrutement (0800 22 0800) ;

– plus de 2 848 795 visiteurs sur le site lapolicenationalerecrute.fr.

Cette attractivité se confirme par le nombre de présents aux concours de recrutement qui a encore augmenté par rapport à 2015.

Au concours exceptionnel de mars 2016, le concours de gardien de la paix a présenté un taux de sélectivité très contrasté :

– le concours externe national a affiché une sélectivité de 1/25 (ratio présents/admis) ;

– les autres recrutements ont affiché un moindre taux : 9 candidats pour 1 poste à l’externe en Île-de-France et pour les recrutements internes 1/5 au niveau national et 1/4 pour l’affectation Île-de-France.

B. … QUI CRÉE DES DIFFICULTÉS DE GESTION TEMPORAIRES: LA FORMATION CONTINUE ET LES CADETS DE LA RÉPUBLIQUE

En lien avec la diminution importante du nombre d’emplois dans la Police et la Gendarmerie nationale, il a été décidé de fermer un certain nombre d’écoles de formation. Lors des décisions récentes de forte augmentation des effectifs, des problèmes logistiques d’hébergement des nouveaux élèves se sont donc posés (1) et ont conduit à accorder la priorité à la formation initiale des gardiens de la paix et des sous–officiers, au détriment de la formation continue (2) et des cadets de la République (3).

1. Des écoles surchargées, parfois en mauvais état

a. Des structures surchargées

La montée en charge des effectifs des écoles a été un succès grâce à l’organisation mise en place par les directions de la formation et des compétences dans des conditions pourtant difficiles. En effet, la RGPP a conduit à la fermeture de 8 centres de formation et de 4 écoles de police et les écoles étaient déjà en 2012 « au taquet » du nombre d’élèves qu’elles pouvaient accueillir, pour reprendre une expression employée par certaines organisations syndicales.

Structures de formation de la Police nationale en 2010

Source : DGPN

Structures de formation de la Police nationale en 2016 

Source : DGPN

Quant à la gendarmerie, la création d’une nouvelle école à Dijon pouvant accueillir 124 élèves soulage le dispositif mais ne peut suffire à absorber le nombre important de nouveaux élèves.

L’arrivée massive de nouveaux élèves a donc été un véritable défi logistique. Votre rapporteur pour avis a ainsi souvent pu entendre les expressions suivantes : « On ne peut pas pousser les murs », « il n’existe pas de lits superposés à trois étages ».

b. Des écoles en relatif mauvais état

Votre rapporteur pour avis a été très surpris par l’état de l’immobilier dans certaines écoles. Si certaines, comme le site de Saint–Cyr au Mondor de l’ENSP lui ont paru tout à fait acceptables, d’autres mettent en lumière les lacunes de l’État en tant que propriétaire immobilier. Ainsi, à l’EOGN, dans le bâtiment qui reçoit les élèves étrangers, les chambres sont, pour certaines, à la limite de l’insalubrité. À Nîmes, école pourtant relativement récente puisqu’elle a été ouverte en 1998, un bâtiment a dû être fermé en raison de la présence de punaises de lits.

À Cannes–Écluse, si l’état des infrastructures est bien meilleur que les auditions ne le lui laissaient craindre, votre rapporteur a pu constater que la tuyauterie était en si mauvais état que les élèves devaient très régulièrement se doucher à l’eau froide pendant un ou deux jours, et que les jours suivants, l’eau était d’une couleur maronnasse.

Lors des auditions, de nombreuses voix se sont élevées pour décrire et condamner le mauvais état général du site. Votre rapporteur pour avis s’est donc rendu sur place le 19 octobre dernier. Il lui a été indiqué que les travaux à Cannes–Écluse ont été estimés en 2013 à 26 millions d’euros. Votre rapporteur, tout comme les responsables du site, estime qu’il s’agit là d’une estimation haute, correspondant à la rénovation totale du site. La rénovation du réseau d’eau chaude sanitaire, qui, de l’avis de tous, est le problème principal ne coûterait « que » 1,5 million d’euros. Une remise en état des bétons extérieurs et une isolation thermique pourrait être envisagée, à l’évidence, pour un coût bien inférieur à celui aujourd’hui estimé.

Il s’interroge, eu égard à la faiblesse des recrutements d’officiers et de commissaires au cours des dernières années et à la création d’un établissement public rassemblant les deux écoles, sur la pertinence de rassembler les élèves officiers et commissaires, sur le même site.

Cela permettrait, d’une part, de concrétiser la création d’une école des cadres de la sécurité Intérieure, sans remettre en cause la distinction entre les deux corps et, d’autre part, de consacrer, une fois rénové, le site de Cannes-Écluse, à la formation continue des policiers.

L’avenir du site de Cannes–Écluse

Cannes–Écluse est l’un des deux sites de l’École nationale supérieure de la police. Il forme les officiers de police et accueille par ailleurs de nombreux stages de formation continue ainsi que trois centres nationaux :

– le centre national de formation des unités cynotechniques de la Police nationale (CNFUC) ;

– le centre national d’éducation physique et sportive (CNEPS) ;

– le centre national de formation aux techniques de transmission.

Ce site est le seul d’Ile–de–France à rassembler de telles capacités d’hébergement (525 lits) et dispose d’infrastructures en bon état :

– 18 salles de cours ;

– 2 amphithéâtres ;

– 2 laboratoires de langue ;

– 4 salles techniques ;

– 4 structures de simulation ;

– 1 bibliothèque ;

– 1 gymnase ;

– 3 salles de sport ;

– 1 terrain de football ;

– 1 terrain de rugby ;

– 1 stand de tir ;

– 1 simulateur d’intervention de police.

2. La formation continue, parent pauvre de la formation initiale ?

S’agissant de la formation continue, il a été répété à de nombreuses reprises à votre rapporteur pour avis qu’elle avait été la variable d’ajustement de la formation initiale. Dès lors que cette dernière avait été déclarée prioritaire, afin de permettre l’arrivée massive de « bleu » sur la voie publique, les places, on l’a vu limitées, dans les écoles ont été réservées à la formation initiale. C’est particulièrement prégnant au Centre régional de formation de Draveil et sur le site de Cannes–Écluse que votre rapporteur a visités.

Les centres de formation se sont adaptés aussi bien que possible à ces contraintes qui leur échappent, en particulier en développant la formation à distance. Il s’agit d’une piste intéressante, mais qui ne peut être qu’un adjuvant pour les stagiaires, dont il a été souvent souligné qu’ils apprennent mieux et plus rapidement en étudiant dans un milieu fermé.

3. Les cadets de la République, un nombre divisé par trois en 2016

La Police nationale est souvent citée comme un exemple d’ouverture à la diversité, même s’il est plus difficile de recruter dans certaines zones malgré les nombreuses campagnes et actions de communication. Une réelle dynamique est en particulier observée dans les dispositifs d’égalité des chances et les emplois jeunes. Ainsi, pour les recrutements des cadets de la République, 4 812 dossiers ont été déposés pour 900 postes en 2015.

Les cadets de la République dans la Police nationale

Le statut de cadet de la République n’existe que depuis 2005 dans la Police nationale. Les cadets sont des adjoints de sécurité qui reçoivent pendant un an une formation qualifiante pour passer le concours interne de gardien de la Paix.

Les cadets de la République possèdent le même statut que les adjoints de sécurité et sont amenés à effectuer les mêmes missions. Ils assistent les gardiens de la paix et les officiers de police dans les actions de prévention et de répression de la délinquance. Les cadets remplissent aussi des missions de surveillance et d’assistance générale aux victimes de crimes et délits.

Le titre « cadet de la République » est attribué seulement à des élèves en formation pour préparer le concours de gardien de la paix. La formation leur permet d’ailleurs de se présenter immédiatement, et sans condition de diplôme, à un concours spécifique de gardien de la paix. Ce concours est celui réservé aux adjoints de sécurité comptant deux ans d’ancienneté. Sans tenir compte de ces résultats aux concours, aux termes des douze mois de formation, le cadet de la république exercera la fonction d’adjoint de sécurité et sera rémunéré en tant que tel.

Les conditions pour pouvoir être recruté en tant que cadet de la République sont les suivantes :

– être de nationalité française ;

– avoir entre 18 et 26 ans ;

– mesurer au moins 1,60 m pour les femmes et 1,68 m pour les hommes ;

– jouir de ses droits civiques ;

– avoir un casier judiciaire vierge ;

– satisfaire aux conditions de moralité exigées par la Police nationale (enquête) ;

– être en situation régulière par rapport au service national ;

– avoir une bonne condition physique et une bonne acuité visuelle.

Les candidats sont présélectionnés sur dossier par une commission composée de membres de la Police nationale et de l’Éducation nationale, présidée par le directeur de l’école ou le centre de formation de la Police nationale. Ils passent alors une série de tests psychotechniques.

L’épreuve suivante est un entretien, présidé par le préfet ou son représentant.

Les candidats qui passent cet entretien avec succès font ensuite l’objet d’une vérification de leurs aptitudes physiques et subissent une enquête administrative avant de pouvoir signer leur contrat.

Ils intègrent ensuite une formation de douze mois dans l’une des structures de formation de la Police nationale. Cette formation alterne les cours théoriques en école de police et en lycée professionnel. Les cadets de la République perçoivent pendant leur formation une allocation d’études d’un montant mensuel brut de 597 euros.

Votre rapporteur observe avec une certaine inquiétude que pour l’année 2016, 3 758 personnes se sont présentées pour seulement 300 places. Le nombre de places a ainsi été divisé par trois en un an. Mme Michèle Kirry, directrice des ressources et des compétences de la Police nationale, a indiqué, lors de son audition, que cette baisse du nombre de cadets était tout à fait temporaire et n’avait pas vocation à être reconduite. Votre rapporteur le souhaite, évidemment. Mais il attire toutefois l’attention du Gouvernement sur le fait que ce dispositif fait intervenir d’autres partenaires que la Police nationale, au premier rang desquels l’Éducation nationale et que renouer des partenariats après une interruption peut s’avérer long.

EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du vendredi 28 octobre 2016, la Commission procède, en commission élargie à l’ensemble des députés, dans les conditions fixées à l’article 120 du Règlement, à l’audition de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, sur les crédits de la mission « Sécurités » pour 2017.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Monsieur le ministre de l’intérieur, je suis heureuse de vous accueillir, en compagnie de Dominique Raimbourg, président de la commission des lois, et de Philippe Nauche, vice-président de la commission de la défense, pour vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2017 consacrés à la mission « Sécurités ».

La Conférence des présidents a reconduit les modalités d’organisation de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances.

Je rappelle les règles qui président à nos débats en commission élargie : je donnerai d’abord la parole aux rapporteurs des commissions, qui interviendront pendant cinq minutes ; après la réponse du ministre, les porte-parole des groupes s’exprimeront pendant cinq minutes ; puis ce sera au tour de tous les députés qui le souhaiteront, pendant deux minutes.

M. Philippe Nauche, président. Nous avons auditionné, le 18 octobre dernier, le général Richard Lizurey, nouveau directeur général de la gendarmerie nationale. Notre commission étant très attachée au statut militaire des gendarmes, elle s’est saisie pour avis des crédits de la gendarmerie nationale et a souhaité, à ce titre, participer aux débats sur la mission « Sécurités ».

M. Yann Galut, rapporteur spécial de la commission des finances pour la police, la gendarmerie, la sécurité routière, le contrôle de la circulation et du stationnement routiers. La mission « Sécurités » engage des moyens considérables pour faire face à la menace terroriste qui, depuis 2015, a causé la mort de 237 victimes dans notre pays.

Quelque 1,1 milliard d'euros ont été ajoutés en deux ans aux budgets des deux forces de sécurité. Le budget pour 2017 prévoit, en crédits de paiement, 335 millions d'euros de plus pour la police nationale, et 293 millions d'euros de plus pour la gendarmerie, soit 3,5 % de plus que l’an dernier. Ces moyens prolongent un effort budgétaire continu depuis le début de la législature.

Le constat est sans appel pour les recrutements : 8 900 emplois créés depuis 2013 pour les deux forces, après la destruction de 13 000 emplois entre 2007 et 2012. Les entrées massives dans les écoles en attestent : pour la police, 5 300 élèves gardiens de la paix incorporés cette année, contre seulement 500 en 2012. En deux années, plus de 28 000 policiers et gendarmes sont arrivés sur le terrain pour compenser tous les départs à la retraite et augmenter les effectifs.

Les créations de postes appuient une organisation et une stratégie profondément renouvelées en matière de renseignement et de déploiement des forces d'interventions.

Le plan de lutte antiterroriste et le pacte de sécurité ont apporté plus de 700 millions d'euros pour acquérir de nouveaux équipements et moderniser les infrastructures.

Depuis deux ans, les personnels ont été mobilisés sur tous les fronts : la menace terroriste, les conséquences de la crise migratoire, le maintien de l'ordre public dans un contexte particulièrement tendu, la lutte contre les formes violentes de la délinquance...

Ce budget traduit dans les faits la reconnaissance de la nation envers ses policiers et ses gendarmes. Il finance les engagements sans précédent des protocoles sociaux du 11 avril 2016. L'effort, sur la durée, atteint 865 millions d'euros pour améliorer les carrières et mieux rémunérer les sujétions des personnels. En 2017, ce sont 77 millions d'euros de plus pour les policiers et 70 millions pour les gendarmes.

Mais des attentes immenses restent à satisfaire.

Les personnels font face à des niveaux élevés d'engagement et s'exposent à des risques croissants, l'odieuse attaque de Viry-Châtillon vient une nouvelle fois de le montrer.Pour autant, le quotidien d'un grand nombre d'entre eux ne s'améliore pas assez vite. Ils subissent les effets de nombreuses années de sous-investissement et de mauvais entretien de leurs lieux et outils de travail.

Même si les deux forces peuvent désormais acquérir, chaque année, un tiers de véhicules de plus que par le passé, les contraintes restent fortes sur les budgets de fonctionnement courant.

Monsieur le ministre, vous avez répondu à la colère exprimée par de nombreux policiers. Vous avez engagé une concertation de grande ampleur et présenté, sans attendre, un plan de sécurité publique. Il doit accélérer le déploiement de nouveaux équipements et permettre aux personnels actifs d'être libérés de tâches qui les détournent aujourd'hui encore de leurs missions premières. Pouvez-vous préciser quel sera le financement de ce plan de sécurité publique ? Quelle part proviendra des hausses conséquentes de crédits déjà inscrites au budget ? Envisagez-vous des apports de crédits supplémentaires par amendements ?

Je terminerai par deux questions sur des points précis du budget 2017.

Il s'agit d'abord de l'indemnité journalière d'absence temporaire (IJAT), qui indemnise les déplacements des forces mobiles de la police et de la gendarmerie. À sa création, dans les années soixante, cette indemnité n'a, comme il se doit, pas été fiscalisée, mais sans base juridique.J'avais appelé votre attention, il y a quelques semaines, sur le risque d'une fiscalisation pour les revenus des CRS et des gendarmes mobiles. La semaine dernière, l'Assemblée nationale a adopté un amendement au projet de loi de finances, qui affranchit de l’impôt ce revenu, ce qui est un grand soulagement. Je vous alerte cependant sur le fait qu'il faut encore prévoir l'exonération des prélèvements sociaux. Il est essentiel qu'une exonération ou une compensation permettent de maintenir intégralement les rémunérations dès janvier 2017. Pouvez-vous confirmer que ce sera bien le cas ? Je rappelle que l'IJAT fait l'objet d'un plan de revalorisation significative depuis deux ans.

Ma dernière question a trait au financement de la nouvelle garde nationale. En 2017, le ministère de l'intérieur devra déployer 4 000 réservistes par jour, issus de la gendarmerie comme de la police.

Ces objectifs sont ambitieux, mais à notre portée. La police nationale peut d'ailleurs compter sur une nouvelle voie d'accès à la réserve civile, pour les anciens adjoints de sécurité, créée par la dernière loi prorogeant l'état d'urgence. Cependant, des surcoûts de plusieurs dizaines de millions d'euros ne semblent pas couverts, à ce stade, par le projet de budget, pour rémunérer les nouveaux réservistes et pour les équiper.

La garde nationale doit rapprocher encore la population, et particulièrement la jeunesse, des forces de sécurité. Si les crédits ne sont pas suffisants, la gendarmerie et la police nationales risquent de devoir refuser des candidatures en cours d'année 2017. Nous ne pouvons pas courir ce risque. L'État doit être pleinement au rendez-vous. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter toutes les garanties à cet égard ?

M. Michel Lefait, rapporteur spécial de la commission des finances pour la sécurité civile. J’ai l’honneur de rapporter devant vous les propositions de crédits affectés à la sécurité civile pour 2017, crédits qui sont inscrits, depuis le budget 2014, dans la mission d’ensemble « Sécurités ».

Le projet de loi de finances propose de faire passer les autorisations d’engagement de 414,29 millions d’euros en 2016 à 438,32 millions d’euros en 2017. Les crédits de paiement connaissent le même mouvement puisque le projet de loi de finances prévoit de les porter de 448,61 millions d’euros en 2016 à 467,37 millions d’euros en 2017.

Cette évolution positive doit être particulièrement soulignée, car nous savons tous l’importance qu’ont les actions de l’État dans le domaine essentiel de la sécurité civile et l’obligation qui nous est faite de consacrer des moyens significatifs à la protection des populations au quotidien ou lors de catastrophes majeures, qu’elles soient naturelles ou technologiques.

Tout d’abord, monsieur le ministre, je voudrais saluer l’action ferme et courageuse que vous avez su conduire en des circonstances dramatiques, et l’efficacité et la générosité dont font preuve, chaque, jour, les nombreux intervenants de la sécurité civile.

J’en viens à mes questions.

Premièrement, le problème majeur que connaît aujourd’hui notre pays est incontestablement celui de la lutte contre le terrorisme. Nous savons la part décisive qu’ont eue dans les événements récents de 2015 et 2016 les intervenants habituels de la sécurité civile : services de secours, agents de prévention des risques nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques et explosifs, agents du déminage, associations. Pouvez-vous nous donner des précisions sur la politique suivie par le Gouvernement dans cette matière essentielle ? Quels progrès, selon vous, restent à réaliser ?

Deuxièmement, la question des moyens aériens affectés par l’État à la lutte contre les feux de forêt est essentielle, et emblématique de notre politique de sécurité civile. Comment va s’opérer le transfert de la base de Marignane vers Nîmes, prévu, en principe, en mars 2017 ? Pouvez-vous nous rappeler, par ailleurs, les conditions de remplacement, à l’horizon 2022, des bombardiers d’eau Tracker ? Quelles réflexions sont menées à plus long terme sur le remplacement des autres bombardiers d’eau, les Canadair et les Dash ?

Troisièmement, quelles remarques pouvez-vous faire sur une autre composante très importante de la sécurité civile de notre pays, les hélicoptères, dont nous avons tous pu mesurer la réactivité permanente et les capacités « multimissions » ?

Quatrièmement, nos concitoyens saluent régulièrement le courage et la compétence de nos sapeurs-pompiers. Notre pays connaît pourtant, depuis le début des années 2000, une érosion du volontariat, préjudiciable à la pérennité même de notre système de secours, qui doit pouvoir continuer à être le premier service public en France et à nous protéger des risques à un coût raisonnable.

Une loi importante a été votée en 2011. Des engagements solides ont été pris ensuite pour encourager le volontariat sapeur-pompier en 2013. Où en sommes-nous précisément ? Après une reprise en 2014, il semble que le nombre de sapeurs-pompiers volontaires stagne à nouveau. Comment expliquer plus largement, selon vous, cette légère désaffection pour le volontariat ? A-t-on mené des études suffisamment précises sur cette question ?

Cinquièmement, plusieurs grands programmes d’investissement ont connu un développement important au cours des dernières années, qu’il s’agisse du programme ANTARES, qui vise à l’interopérabilité des réseaux de communication des intervenants publics en matière de sécurité civile, du nouveau système d’alerte et d’information des populations (SAIP), ou de ces instances que sont le Centre national civil et militaire de formation et d’entraînement aux risques nucléaire, radiologique, biologique, chimique et explosive (NRBC-E) ou le Centre d’alerte aux tsunamis. Quel est aujourd’hui l’état de concrétisation de ces programmes, dont le contexte actuel montre bien tout l’intérêt ?

Sixièmement, nos outre-mer sont exposés à toutes sortes de difficultés naturelles : cyclones, éruptions volcaniques, feux de forêts, séismes, tsunamis. Comment celles-ci sont-elles prises en compte ?

Enfin, les événements dramatiques que nous avons vécus ont rappelé l’importance d’une association forte des Françaises et des Français à la politique de sécurité. Quelle politique conduire, selon vous, en direction des associations et du public, des jeunes en particulier ? Je demande, dans mon rapport, que soit accentuée, dans notre pays, dès le début du cursus scolaire, la formation aux gestes de premiers secours et, en particulier, à l’usage des défibrillateurs, qui se sont révélés très utiles pour sauver des vies.

M. Daniel Boisserie, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour la gendarmerie nationale. Je ne dirai que quelques mots du budget prévu pour 2017, pour me concentrer sur mes questions et remarques.

Il s'agit d'un bon budget, avec des crédits de paiement en augmentation de 3,5 %. Il s'agit surtout d'un budget nécessaire et mérité, compte tenu de l'intensité opérationnelle et de l'engagement que les pouvoirs publics et les Français exigent de nos gendarmes.

Ma première question, monsieur le ministre, porte sur la fin de gestion 2016. Je crois savoir que 100 millions d'euros environ sont encore gelés. Au regard du contexte sécuritaire et de la mobilisation sans faille qui est demandée aux forces de l'ordre, je pense qu'il faudrait dispenser du gel l'ensemble des programmes qui participent à la sécurité des Français. Ils disposeraient alors de l'ensemble de leurs ressources dès le début de l'année, ce qui me semble la moindre des choses. Y êtes-vous favorable ?

À plus long terme, je m'interroge sérieusement sur une modification de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Il faut permettre au Gouvernement d'appliquer des taux de mise en réserve différents, en fonction des contraintes pesant sur les différentes administrations, mais aussi, et surtout, en fonction des priorités décidées par le politique. Je suis sûr que l'ancien ministre chargé du budget sera sensible à une telle suggestion...

Ma deuxième question concerne la directive européenne sur le temps de travail, dont la transposition aux forces de l'ordre et aux forces armées constitue un sujet de préoccupation majeur.

Ses dispositions relatives aux périodes minimales de repos sont totalement incompatibles avec l'exigence de disponibilité inhérente au statut militaire et avec la réalité opérationnelle. Est ainsi prévu un repos quotidien de onze heures toutes les vingt-quatre heures. Autre exemple, la durée maximale hebdomadaire de travail ne doit pas excéder quarante-huit heures, heures supplémentaires comprises.

Je comprends l'objectif de protection minimale qu'il s'agit de garantir à l'ensemble des travailleurs européens. Je ne veux évidemment pas nier tout droit social aux acteurs de la sécurité publique et de la défense. Mais concrètement, de telles dispositions sont inapplicables dans ces deux domaines. Les opérationnels sont d'ailleurs les premiers à le souligner.

Une exemption de principe avait été prévue pour les forces de sécurité et les forces armées. Mais, en 2006, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) lui a pratiquement ôté toute portée en interprétant les textes de manière trop restrictive. La transposition pourrait avoir un impact de l'ordre de 3 % à 5 % des effectifs totaux de la gendarmerie, sans compter les difficultés en termes d'organisation du travail.

Ma suggestion est la suivante : les États membres ne pourraient-ils pas s'accorder entre eux et avec la Commission européenne pour suspendre le processus de transposition ? Je rappelle que la saisine de la Cour de justice pour manquement n'est qu'une possibilité, pas une obligation. Les États pourraient ensuite renégocier certaines dispositions du texte, cette fois, de manière suffisamment précise. Cela éviterait qu'une interprétation de la Cour de justice vienne fragiliser un régime spécifique qu'il est indispensable de maintenir pour les forces de l’ordre et les forces armées.

Le contexte sécuritaire global auquel font face l'ensemble des pays européens, et notamment la France, plaide en ce sens. Notre pays pourrait prendre la responsabilité d'une telle initiative. Cette fois, c'est peut-être l'ancien ministre chargé des affaires européennes qui sera sensible à cette suggestion !

Je ferai au passage deux courtes observations, très pratiques, sur lesquelles je souhaiterais avoir votre sentiment. Il me semble que les zones de compétence des forces de l'ordre doivent dépasser les limites administratives et s'adapter à la réalité des bassins de vie, et donc, de délinquance. Je pense notamment aux pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) en zone rurale. Cela nécessiterait une coordination avec la Chancellerie pour adapter la compétence territoriale des tribunaux. Une telle souplesse opérationnelle me paraît indispensable et urgente.

Pour finir, un mot sur les polices municipales. Elles montent en puissance et sont sans doute amenées à jouer un rôle plus important à l'avenir. Il faudrait approfondir leurs relations avec la gendarmerie nationale, notamment au niveau de la formation. Certaines initiatives existent, mais je pense qu'il faudrait développer les protocoles d'accord entre la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). La gendarmerie pourrait alors assurer tout ou partie de la formation des effectifs de police municipale travaillant en zone rurale.

Enfin, je veux saluer les derniers engagements du Gouvernement, qui sont dans le prolongement et l’amplification d’une politique résolue pour la sécurité de nos concitoyens.

M. Yves Goasdoué, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité. Je me suis particulièrement intéressé aux questions de formation initiale et continue, tant pour ce qui concerne la gendarmerie que pour ce qui concerne les forces de police. Les recrutements sans précédent que vous avez initiés, monsieur le ministre, justifient pleinement ce choix.

De nombreux déplacements et de nombreuses auditions me conduisent à vous poser des questions précises. Auparavant, je tiens à dire qu’il est patent que le Gouvernement et la majorité parlementaire consentent, depuis le début du quinquennat, des efforts considérables pour renforcer les effectifs de la police et de la gendarmerie.

Vous avez annoncé, avant-hier, un plan de sécurité publique, prolongeant et amplifiant la politique conduite par le Gouvernement et votée par le Parlement. Il s’agit de l’affectation prioritaire des nouveaux effectifs sortant des écoles de police à la sécurité publique, du rehaussement de l’équipement des compagnies départementales d’intervention et des compagnies de sécurisation et d’intervention, du renforcement de l’équipement des véhicules, du passage de deux à trois fonctionnaires pour les patrouilles à risque.

Dans ce cadre, l’effort consenti est majeur. Il autorisera, l’an prochain encore, la création de 2 031 emplois pour la police nationale et de 402 emplois pour la gendarmerie nationale. Il permettra, entre autres, de financer le remplacement de près de 4 000 véhicules dans les deux forces.

L’aspect exceptionnel de ces mesures a nécessité de nombreux aménagements, s’agissant notamment de la durée de certaines formations initiales et du cadencement de la scolarité.

Je voudrais vous poser plusieurs questions en lien avec la formation.

Monsieur le ministre, il me semble essentiel de prendre une décision stratégique, s’agissant du site de Cannes-Écluse. Ce site, qui accueille en formation initiale les officiers de l’École nationale supérieure de la police (ENSP), nécessite des travaux pour le remettre à niveau. Ses élèves n’ont pas toujours de l’eau chaude, par exemple, et, lorsqu’ils en ont, elle est souvent d’une couleur un peu particulière…

Puisque l’ENSP est désormais un seul et unique établissement public pour les commissaires et les officiers, ne serait-il pas opportun de rassembler ces élèves sur le même site, par exemple à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or, sans fusionner les corps, et de dédier entièrement Cannes-Écluse, site francilien qui offre des possibilités d’accueil exceptionnelles puisqu’il compte plus de 500 couchages, à la formation continue ?

Cela me conduit à ma deuxième question. Comment s’assurer que la formation continue ne soit pas le parent pauvre, au regard de l’effort formidable consenti depuis trois ans en faveur de la formation ? Les élèves sortant de l’École sont aujourd’hui dix fois plus nombreux qu’en 2012.

Si les nombreux déplacements que j’ai effectués m’ont persuadé que les élèves gendarmes et policiers s’entraînaient suffisamment au tir, les auditions que j’ai menées me laissent perplexe sur la formation continue en la matière. Monsieur le ministre, comment allez-vous intégrer le renforcement des exercices de tir, qui paraît indispensable dans le cadre du nouveau schéma national d’intervention ? On m’a parlé de nombreuses annulations de séances pour nécessités de service. Enfin, le ministère dispose-t-il de suffisamment de stands de tir adaptés au fusil d’assaut HK G36 ? Tous les stands, en effet, ne le sont pas.

Par ailleurs, pouvez-vous nous assurer que le dispositif des cadets de la République retrouvera, dès 2017, un niveau de 900 élèves ? Garder ce dispositif, qui a fait ses preuves, au niveau de 300 élèves, comme en 2016, c’est courir le risque de décourager l’éducation nationale.

Ensuite, est-il envisagé de réformer de manière durable la durée des formations des policiers et des gendarmes, au-delà de la période extraordinaire que nous connaissons ?

Enfin, monsieur le ministre, vous avez annoncé, le 2 juin 2016, une importante réforme de la formation de la police nationale, pour mieux préparer les policiers aux évolutions de la société, des techniques, du droit et des phénomènes criminels. Pouvez-vous nous préciser le calendrier de mise en œuvre de cette réforme ? Ce mouvement de balancier – une telle direction ayant déjà existé par le passé et jusqu’en 2010 – était-il nécessaire pour assurer pilotage et cohérence de la formation, en lien avec la gestion prévisionnelle des emplois et des carrières ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur pour avis de la commission des lois pour la sécurité civile. Le programme « Sécurité civile » nous permet, cette année encore, de rendre hommage aux sapeurs-pompiers, qui risquent leur vie au service de la communauté et font preuve, au quotidien, d’un dévouement, d’un altruisme et d’un courage éminemment admirables. En 2015, les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) ont réalisé près de 4,5 millions d’interventions et traité près de 4 400 départs de feux.

Les crédits du programme « Sécurité civile » sont en hausse de près de 7,9 % dans le projet de loi, s’établissant à 476 millions d’euros. Toutefois, en excluant les nouvelles dépenses liées à la mise en œuvre du pacte de sécurité, ces crédits sont, en réalité, en baisse de 1,3 %.

Le modèle français de sécurité civile repose sur le volontariat et le maillage territorial de ses centres d’incendie et de secours. Mais ces deux piliers paraissent aujourd’hui s’éroder considérablement. Force est de constater que de nombreux centres d’incendie et de secours ont fermé au cours de la dernière décennie : 121 centres ont encore disparu au cours de l’année 2015. Entre 2002 et 2015, ce sont 1 700 centres qui ont fermé.

Aucune modification du maillage territorial de ces centres ne devrait être décidée brutalement, sur la seule base des économies budgétaires qu’elle est supposée dégager. Il est ici question de garantir à tous, et notamment aux populations rurales, un service de proximité pour les soins urgents. Je propose que soit obligatoirement recueilli l’avis de la Conférence nationale des services d’incendie et de secours (CNIS) avant une fermeture décidée conjointement par le préfet et le président du conseil départemental.

Force est de constater également que les effectifs de sapeurs-pompiers volontaires ont fortement diminué au cours de la dernière décennie et qu’ils ont stagné en 2015, malgré toutes les actions entreprises – je rappelle la loi de 2011, dont j’ai été l’initiateur –, dans le cadre de l’Engagement national pour le volontariat, que j’ai moi-même signé au nom de l’Association des maires de France (AMF).

L’objectif de 200 000 sapeurs-pompiers volontaires en 2017, annoncé par le Président de la République, est aujourd’hui inatteignable. Est-il nécessaire de rappeler que les sapeurs-pompiers volontaires représentent plus de 80 % des effectifs de sapeurs-pompiers français, qu’ils réalisent près de 70 % des interventions, mais qu’ils représentent seulement 15 % de la masse salariale ?

Quelles mesures prendrez-vous, monsieur le ministre, pour permettre une meilleure reconnaissance matérielle des pompiers volontaires, au-delà de la réforme du financement de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) et de la simplification de la procédure de revalorisation annuelle de l’indemnité horaire ?

Par ailleurs, de nombreux volontaires éprouvent des difficultés à concilier leur mission avec les impératifs de leur vie professionnelle. Ces contraintes sont souvent mises en avant pour expliquer le non-renouvellement d’un engagement. De plus, les employeurs considèrent trop souvent encore les pompiers volontaires comme une charge financière.

Quelles mesures incitatives entendez-vous prendre, monsieur le ministre, en faveur des employeurs, notamment lorsqu’il s’agit de petites communes, de petites entreprises ou d’artisans ? La loi relative au mécénat n’est pas suffisante. Elle est complexe, et Bercy est incapable de dire quels sont les crédits d’impôt dégagés au niveau des employeurs pour les aider à laisser partir des jeunes en mission.

En outre, les dépenses d’investissement des SDIS ont régulièrement diminué au cours des dernières années. C’est notamment le cas en Lozère, où le département refuse de financer le remplacement urgent de véhicules vétustes. La faiblesse des investissements dans les équipements menace l’efficacité des secours et met en danger la vie des citoyens et celle des pompiers.

Si j’en crois ce qu’il s’est passé dans l’Hérault, on s’interroge aujourd’hui sur la vétusté des camions. Le décès d’un homme et les trois blessés graves interpellent fortement sur le renouvellement des flottes.

La loi de départementalisation a vingt ans : il devient indispensable de financer le renouvellement des équipements des SDIS.

Sur les 30 millions d’euros économisés grâce à la réforme de la PFR, 20 millions serviront au financement de nouveaux investissements des SDIS. Ces 20 millions seront consacrés à de grands projets structurants, notamment au système national de gestion opérationnelle, qui paraît prioritaire et qui est mené par le préfet Lambert. Mais rien n’est prévu, s’agissant des investissements dans des équipements de proximité, comme le renouvellement des véhicules de sapeurs-pompiers.

Les 10 millions d’euros restants pourront-ils être réaffectés au titre du Fonds d’aide à l’investissement (FAI), afin de permettre le renouvellement de l’équipement des centres d’incendie et de secours ?

Par ailleurs, l’utilisation de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) pour le renouvellement des véhicules vous paraît-elle envisageable dans les zones rurales ? J’en ai fait la demande expresse au préfet de mon département, mais, pour l’instant, je n’ai pas de réponse. Je souhaiterais avoir la position du ministre sur ce sujet.

Plus généralement, s’agissant du financement des services départementaux d’incendie et de secours, envisagez-vous, monsieur le ministre, de leur verser directement, et non plus par l’intermédiaire des départements, la contribution de l’État issue de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA), afin que l’intégralité de cette dotation leur revienne ?

J’en arrive à la concurrence entre les flottes héliportées des établissements de santé et de la sécurité civile. Quelles mesures allez-vous prendre, monsieur le ministre, pour mieux encadrer et coordonner les implantations et les activités des hélicoptères de la sécurité civile et des établissements de santé ? Là aussi, cela pose problème. Le ministère des affaires sociales et de la santé a interrogé les agences régionales de santé (ARS), lesquelles interrogent à leur tour les établissements de santé. Un peu de coordination serait nécessaire.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Il y a dans ces interventions, toutes extrêmement riches, des interpellations concernant la cohérence globale du budget et des questions précises. Si vous le permettez, je répondrai d’abord sur les orientations et les équilibres du budget que je présente à votre délibération exigeante, et je répondrais ensuite plus précisément aux questions des rapporteurs.

Ce budget montre que, dans un contexte budgétaire contraint, la sécurité des Français demeure une priorité du Gouvernement. Pour la mission « Sécurités », les autorisations d’engagement sont en hausse de 838 millions d’euros et s’élèvent à 19,692 milliards d’euros ; les crédits de paiement progressent de 657 millions d’euros pour atteindre 19,390 milliards d’euros. Sur ces sommes globales, qui augmentent fortement par rapport à l’année précédente, 16,635 milliards d’d’euros représentent des crédits de titre 2 (T2), ce qui montre que nous poursuivons les créations d’emploi conformément aux engagements pris par le Gouvernement.

Entre 2013 et 2017, près de 9 000 créations nettes d’emplois auront été effectuées dans la gendarmerie et la police nationale ; entre 2007 et 2012, 12 519 emplois avaient été détruits dans les forces de sécurité. En 2017, la gendarmerie bénéficiera de 255 créations d’effectifs, après 2 443 créations en 2016 ; dans la police nationale, les créations nettes vont atteindre 2 031, dont 1 731 au titre du plan antiterroriste et du pacte de sécurité.

Après les événements tragiques du 14 juillet, le Président de la République et le Gouvernement ont aussi décidé d’accélérer la montée en puissance de la réserve civile de la police et de la réserve opérationnelle de la gendarmerie, en créant une véritable garde nationale. Le nombre de réservistes mobilisés dans ce cadre sera de 38 700 en 2017 et de 44 700 en 2018. Les moyens de cette garde nationale seront inscrits dans le budget 2017 au cours de la discussion parlementaire, de manière à ce qu’il n’y ait pas de problème de financement.

Ce budget est aussi un plan sans précédent de revalorisation pluriannuel, dans le cadre de la feuille de route sociale que j’ai signée le 11 avril et qui a été présentée au Président de la République le 12 avril. Cette feuille de route sociale prévoit des mesures indiciaires – un gain moyen de 15,4 points contre 13,2 points pour la fonction publique. Elle contient aussi des mesures statutaires et catégorielles : une augmentation de 80 % de la prime d’officier de police judiciaire ; une revalorisation de deux points en quatre ans de l’indemnité spécifique de sujétions particulières (ISSP) ; une augmentation, cher monsieur le rapporteur Galut, de 30 % l’indemnité journalière d’absence temporaire (IJAT) qui n’avait pas été augmentée depuis près de quinze ans. Elle comporte enfin des mesures visant à améliorer le quotidien et les conditions de travail.

Au total, les mesures catégorielles sur la période 2012-2020 représentent un effort de 865 millions d’euros. Il y a pu y avoir des efforts d’un montant comparable par le passé, mais ils étaient financés par des suppressions d’emplois. Nous créons des emplois et nous finançons des mesures de revalorisation catégorielles pour un montant significatif.

Le budget 2017 conforte également une hausse importante des crédits hors titre 2 (HT2). Alors que le budget de fonctionnement et d’investissement de la police nationale avait diminué de 16 % entre 2007 et 2012, il aura été renforcé de 15 % entre 2012 et 2017. Quant au budget de fonctionnement et d’investissement de la gendarmerie nationale, qui avait diminué de 18 % entre 2007 et 2012, il aura été renforcé de 10,5 % entre 2012 et 2017.

Ces moyens ont permis de relancer l’investissement pour consolider, développer et moderniser les capacités opérationnelles des unités. Les plans ont permis d’adapter l’équipement des personnels en protections individuelles et en armement. Ils ont permis d’atteindre les cibles d’achat de véhicules : 1 800 véhicules ont été commandés, 100 sont en attente de dégel de crédits et 3 000 ont été livrés dans la police nationale ; 3 000 véhicules ont été commandés et 1 200 ont été livrés dans la gendarmerie nationale.

Ces crédits supplémentaires permettront de poursuivre l’adaptation des capacités opérationnelles à la lutte contre le terrorisme tout comme à la lutte contre la délinquance du quotidien. Pour être précis, les crédits HT2, qui s’établissent à 3 milliards d’euros d’autorisations d'engagement et à 2,755 milliards d’euros de crédits de paiement, progressent respectivement de 196 millions d’euros et de 15 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2016.

Le renforcement des crédits HT2 depuis 2012 a permis d’amorcer une indispensable remise à niveau des équipements qui avaient été laissés en déshérence pendant des années pour ne pas dire des décennies. Dans le contexte de menace terroriste extrêmement élevé auquel notre pays est confronté, il était normal de privilégier la reconstruction de notre renseignement intérieur – près de 2 000 postes ont été créés dans le cadre de plusieurs plans antiterroristes – et l’équipement des primo-intervenants. Les brigades anti-criminalité (BAC) et les pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG), dont une bonne partie a été transformée en « PSIG-Sabre », sont des unités particulièrement exposées lors d’attaques terroristes. La modernisation de ces unités sera poursuivie jusqu’à leur rééquipement complet, à travers le plan pour la sécurité publique qui les concerne plus particulièrement. Ce plan, que j’ai annoncé avant-hier aux organisations syndicales, représente une enveloppe globale de 250 millions d’euros, qui sera financée grâce aux décisions budgétaires prises par le Gouvernement, notamment dans le cadre de la loi de finances pour 2017.

Depuis plusieurs semaines, les policiers expriment leurs inquiétudes et leurs attentes. Le Gouvernement – et plus particulièrement le ministre de l’intérieur dont c’est le rôle – les entend et les comprend. Il s’emploie à leur répondre depuis quatre ans à travers les décisions que je viens de rappeler, en tenant compte des défis auxquels les forces de l’ordre sont confrontées. Un effort supplémentaire est nécessaire en vue de poursuivre la modernisation de nos forces. Ce plan n’est pas né des circonstances puisque le budget a été élaboré bien avant la survenue des événements récents. Il est le prolongement, l’amplification de la politique globale et résolue en faveur de la sécurité des Français, qui a été menée par ce gouvernement depuis 2012.

Dès que possible, je vous proposerai un amendement visant à demander, au titre des mesures immédiates sur la mission « Sécurités », l’ouverture de 100 millions d’euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement pour abonder en HT2 l’enveloppe de crédits supplémentaires déjà prévue au titre du PLF. Ces moyens HT2 supplémentaires sont répartis de la manière suivante : 80 millions d’euros sont destinés à renforcer les équipements et protections des effectifs de sécurité publique ; 20 millions d’euros serviront à assurer l’entretien du parc immobilier et les travaux de maintenance les plus urgents dans les commissariats de police et les casernes de gendarmerie.

Le premier volet de ce plan de sécurité publique répond à l’exigence de mesures concrètes exprimée par les forces de l’ordre. Il prévoit un rehaussement de leurs équipements : casque balistique, gilet pare-balles, gilet porte-plaques, fusil d’assaut HK G36 et bouclier balistique souple. Il tend à améliorer leurs protections en équipant les véhicules de vitrages renforcés, d’extincteurs et de couvertures anti-feu, et en leur fournissant des tenues résistantes au feu. J’ai donné des instructions aux chefs de service pour que, dans les zones particulièrement difficiles, des patrouilles à trois fonctionnaires soient immédiatement et systématiquement mises en place. Ce volet prévoit aussi de consacrer des moyens au renouvellement du parc automobile : 6 380 véhicules neufs seront livrés à la police nationale et la gendarmerie en 2017.

Le deuxième volet permet de recentrer les missions des forces de l’ordre sur leur cœur de métier en les débarrassant enfin de nombreuses tâches indues.

Enfin, le troisième volet du plan vise à répondre à l’exigence de respect à l’égard des policiers. Les conditions d’évolution de la légitime défense vont être étudiées au sein d’un groupe de travail dont j’ai confié la présidence à la magistrate Hélène Cazaux-Charles qui dirige l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) après avoir été conseillère de Manuel Valls au ministère de l’intérieur puis à Matignon. Je veux que l’on revoie le régime juridique de l’outrage envers les agents dépositaires de l’autorité publique pour l’aligner sur celui de l’outrage à magistrat. Je souhaite également que l’on prenne des mesures législatives permettant l’anonymisation des policiers. Nous leur devons cette protection, compte tenu des événements récents.

Ce plan de sécurité publique est donc extrêmement précis. J’aurai l’occasion de revenir devant votre commission des lois, si son président m’y autorise, afin de vous en donner les détails une fois qu’ils seront définitivement arrêtés, c'est-à-dire dans dix jours. J’ai donné des instructions pour que les mesures de ce plan soient mises en œuvre immédiatement. Certaines concernent la substitution de gardes dynamiques à des gardes statiques, d’autres le passage de conventions avec la médecine de ville, destinées à décharger les policiers du transfert vers les hôpitaux des gardés à vue en situation d’ivresse manifeste. Au vu des rapports des inspections générales, j’ai aussi demandé à accélérer le rythme de la réforme sur le transfèrement de détenus, afin que le ministère de la justice prenne plus rapidement le relais du ministère de l’intérieur. Pour résumer, nous menons à marche forcée une action très volontariste.

J’éprouve à l’égard des policiers – et ils le savent – un profond respect, une immense considération et beaucoup de gratitude. Je n’ignore pas ce qu’a été l’engagement des policiers, des gendarmes et des sapeurs-pompiers lors des événements récents. Au cours de la concertation que j’ai engagée depuis lundi, tous les policiers, du sommet de la hiérarchie dans les départements jusqu’à la base, pourront exprimer leurs attentes. D’ici à six semaines, je rassemblerai tous les fruits de cette concertation et je rendrai des arbitrages supplémentaires.

Pour autant, comme ministre de l’intérieur, je ne peux pas accepter que des policiers en service utilisent des véhicules sérigraphiés pour manifester leur mécontentement. De même, avec beaucoup de calme mais aussi de fermeté, j’indique que je ne peux pas accepter certains propos qui circulent sur les réseaux sociaux et dont le contenu est très éloigné de la retenue et du respect qui doivent prévaloir dans la République. Je dis cela parce que, précisément, je souhaite que le respect soit le principe. Dans le contexte actuel, la police est d’autant plus forte que chacun de ses mots renvoie à l’essentiel, c'est-à-dire au respect des valeurs de la République. Aussi longtemps que je serai ministre de l’intérieur, je rappellerai cela dans tous mes déplacements, à chaque policier, avec l’empathie, le respect et la fermeté qui s’attachent à ma mission. C’est mon honneur de le faire. Si nous ne sommes pas capables de rappeler ces principes-là, alors il n’y a plus de République, il n’y a plus d’État.

Si je souhaite discuter avec les représentants des organisations syndicales, dont c’est le rôle, et si je souhaite que le dialogue s’engage avec tous les policiers dans les commissariats à l’occasion de cette concertation, c’est parce que j’estime qu’il n’appartient pas à des leaders autoproclamés, qui ne sont pas ou plus dans la police, de porter la parole des policiers. Sur ce sujet, je veux être extrêmement clair et net. Ne pas le dire serait manquer de respect à ceux qui souhaitent exprimer leurs revendications en conformité avec les règles et principes qui doivent régir les forces de sécurité dans notre pays.

S’agissant de la sécurité civile, je tiens à préciser que l’action du Gouvernement ne se résume pas aux seules mesures intégrées aux crédits budgétaires qui vous sont soumis aujourd’hui. Je pense notamment au confortement du volontariat et au développement des synergies opérationnelles entre les services d’incendie et de secours et les autres services publics. Je pense aussi à une réforme statutaire emblématique que vous n’avez pas évoquée, messieurs les rapporteurs : la création d’une catégorie « A+ » de sapeurs-pompiers professionnels, qui va donner de nouvelles perspectives de carrière à l’encadrement supérieur des services d’incendie et de secours. Les pompiers avaient manifesté une très forte volonté de réforme des emplois supérieurs de direction. Cette réforme appelait la mise en œuvre de mesures fonctionnelles et statutaires, certaines nécessitant des modifications législatives. C’est ce gouvernement qui les aura prises et, si nous partageons un minimum de bonne foi, nous devons tous reconnaître que ce qui reste en discussion ne peut pas occulter tout ce qui a été fait.

En ce qui concerne les crédits budgétaires du programme « Sécurité civile », j’ai tenu à ce que les moyens de fonctionnement et d’investissement soient accrus pour faire face aux risques et menaces dans les meilleures conditions. Ainsi, les crédits augmentent de 28 millions d’euros par rapport à l’année dernière, c'est-à-dire de 6 %.

Pour 2017, les principales priorités du programme portent sur la poursuite ou l’achèvement de plusieurs chantiers importants de modernisation des moyens nationaux. Citons d’abord le transfert de la base avions de la sécurité civile de Marignane vers Nîmes, lequel sera effectif en mars 2017, et l’acquisition d’un nouvel avion multirôles, pour 25 millions d’euros. Citons aussi la modernisation du service du déminage – le plan « Déminage 2020 » – grâce au renforcement des centres en moyens humains et matériels, à l’évolution de la formation et à l’amélioration de la coopération avec les autres forces de sécurité intérieure. Citons enfin la modernisation des matériels majeurs, notamment l’équipement des avions en moyens radio. Par ailleurs, l’État accompagnera les services d’incendie et de secours dans la mise en œuvre de projets structurants d’intérêt national par le biais de la création d’une nouvelle dotation d’investissement, abondée à hauteur de 20 millions d’euros.

Enfin, je veux dire un mot de la sécurité routière, en rappelant que la violence routière tue plus de 3 000 de nos concitoyens chaque année. Pour faire face à ce fléau, le Gouvernement a pris des mesures fortes relevant de la prévention, du contrôle et de la répression. Elles ont été élaborées dans le cadre du plan de mobilisation en faveur de la sécurité routière de janvier 2015 et du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) qui s’est tenu il y a un an sous la présidence du Premier ministre.

Les vingt-six mesures que j’avais décidées en janvier 2015 sont entrées en application et commencent à produire leurs effets. Mentionnons l'abaissement du seuil de consommation d’alcool pour les conducteurs novices ou l’interdiction du port de tout dispositif émettant du son à l'oreille en conduisant. Sur les cinquante-cinq mesures décidées par le CISR, quatorze sont déjà en vigueur. Les onze mesures prévues dans la loi pour la modernisation de la justice du XXIsiècle seront, quant à elles, appliquées dès la promulgation prochaine du texte. Dans quinze jours, nous publierons les statistiques d’octobre, ce qui nous permettra d’avoir une idée de la manière dont les choses se présentent pour l’ensemble de l’année.

M. Galut m’a posé diverses questions et notamment l’une sur l’IJAT. En cette période où beaucoup de contrevérités circulent et où des acteurs s’emploient à jeter de l’huile sur le feu, je redis ici solennellement que, premièrement, nous avons augmenté l’IJAT de 30 %, deuxièmement, nous l’avons totalement défiscalisée, et, troisièmement, nous avons procédé à une hausse supplémentaire en la faisant passer de 39 euros à 42,50 euros pour que les cotisations sociales soient intégralement compensées.

M. Lefait m’a interrogé sur la préparation des acteurs du secours aux nouvelles menaces. Un effort important de formation, d’équipement et d’investissement a été réalisé par l’État et les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) pour adapter la réponse des secours aux nouvelles réalités de la menace. La stratégie d’adaptation des secours aux nouvelles menaces terroristes repose sur la planification, l’achat de matériels spécifiques et la formation des acteurs.

En ce qui concerne la planification, de nombreuses mesures ont été prises et je vous propose de vous en envoyer la liste précise. Je vais en évoquer quelques-unes : intégration d’un volet « attentat » dans les plans « Organisation de la réponse de sécurité civile » (ORSEC), destinés à porter secours à de nombreuses victimes, au terme des retours d'expérience (RETEX) qui ont été élaborés ; politique soutenue d’exercices antiterroristes dans lesquels sont mobilisées fortement les forces de sécurité civile ; diffusion par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion de crises, en juin 2016, d’une doctrine opérationnelle d’intervention en cas de tuerie de masse ; rédaction d’un vademecum pour préciser le positionnement des bénévoles des associations agréées.

L’effort d’investissement dans les équipements de détection, d’intervention et de protection est massif. Il y a l’équipement de détection et d’intervention nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC). Il faut savoir que les SDIS arment quotidiennement 114 cellules mobiles d'intervention face aux risques chimiques et cinquante-quatre cellules mobiles d’intervention face aux risques radiologiques. L’État met à la disposition des SDIS des matériels spécifiques pour couvrir l’ensemble du territoire : des véhicules de laboratoire, de détection et d’identification des engins NRBC, 64 chaînes de décontamination. Au total, l’État aura consacré 2 millions d’euros à l’achat de ces équipements NRBC en 2016, et il prévoit une enveloppe complémentaire de 1,4 million d’euros en 2017. Des casques et des gilets pare-balles ont été achetés pour les secouristes intervenant sur les lieux d’attaques terroristes. Des moyens sont aussi prévus pour former les acteurs du secours à leur nouvel environnement d’intervention. Tout cela est mis en œuvre de façon extrêmement méticuleuse.

Qu’en est-il des Tracker ? Ces avions ont en moyenne cinquante-huit ans, c'est-à-dire cinq ans de plus que moi. Il faut donc procéder à leur renouvellement, ce qui n’est pas encore tout à fait mon cas. (Sourires.) Nous avons besoin de six appareils multirôles. Le renouvellement du premier Tracker est déjà programmé : l’avis d’appel public à la concurrence a été publié le 16 juillet 2016 ; la notification du marché interviendra en 2017 et la livraison de l’appareil aura lieu dix mois plus tard. Les autres appareils seront programmés par tranches, en fonction des autorisations d'engagement. Nous prévoyons 25 millions d’euros dans le budget de 2017. Les douze Canadair et les deux Dash de sécurité civile n’ont pas besoin d’être changés pour le moment. La priorité est le renouvellement des neuf Tracker.

À Nîmes, nous avons un groupement d’hélicoptères : 300 agents, 218 pilotes et mécaniciens opérateurs de bord, un échelon de commandement, un centre de maintenance. Il y a 35 hélicoptères, déployés sur 23 bases – 20 en métropole et trois outre-mer. À ces bases s’ajoutent sept détachements saisonniers dans les régions montagneuses. C’est ainsi que 20 appareils sont déployés en permanence en base opérationnelle, et ce nombre peut monter jusqu’à 29 en fonction des périodes d’activation et de détachement. Le reliquat est réparti entre le centre de formation et le centre de maintenance de Nîmes.

M. Lefait et M. Morel-A-l’Huissier m’ont interrogé sur le volontariat chez les sapeurs-pompiers. Soyons précis. Le nombre de volontaires a baissé de manière continuelle pendant dix ans : entre 2004 à 2014, nous avons perdu 10 000 sapeurs-pompiers volontaires. À Chambéry, en 2013, nous avons signé un plan d’action de 25 mesures en faveur du volontariat. L’année suivante, nous avions 1 500 sapeurs-pompiers volontaires de plus. Quand j’entends dire parfois que le Gouvernement ne fait rien dans ce domaine, alors que 24 des 25 mesures prévues à Chambéry sont d’ores et déjà en application et que nous avons inversé la courbe du recrutement de volontaires pour la première fois depuis dix ans, je me dis que certains ont des progrès à faire en matière de bonne foi. En 2015, le chiffre est resté stable autour de 194 000 et nous voulons poursuivre les efforts pour atteindre le nombre de 120 000.

Les mesures prises à Chambéry visent à faciliter le volontariat par divers moyens : la signature avec de grands employeurs de conventions nationales qui rendent compatible l’activité professionnelle avec l’engagement volontaire ; la présence d’un officier de sapeurs-pompiers volontaires dans les équipes de direction des SDIS ; des campagnes de communication. Notre objectif est d’élargir le vivier pour recruter davantage de femmes – qui ne représentent que 17 % des volontaires – et de jeunes. De nombreuses initiatives ont été lancées à cet effet, telles que la généralisation des classes des cadets de la sécurité civile et l’extension des missions de sécurité civile aux SDIS. Et les travaux doivent se poursuivre.

S’agissant de la garde nationale, notre objectif est de faire en sorte que le Parlement, dans le cadre de la discussion pour 2017 ou en loi de finances rectificative, soit amené à voter les budgets nécessaires pour compléter son financement : l’idée est de doubler le montant de 62 millions d’euros initialement prévu, pour que sa montée en puissance ne se fasse pas grâce à des redéploiements.

Les outre-mer bénéficient de dispositifs particuliers de sécurité civile, qui s’ajoutent à toutes les politiques nationales en la matière. Lorsque je me suis rendu dans les outre-mer il y a trois semaines, j’ai pu vérifier les conditions dans lesquelles les plans étaient mobilisés, notamment le plan « séisme » dans les Antilles, qui fait l’objet d’un copilotage entre le ministère de l’intérieur et le ministère des outre-mer. Le préfet de la zone étudie les modalités d’alerte – adaptées aux risques de l’urbanisme – des populations. Un effort est porté sur la culture du risque particulier. À La Réunion, un Dash est pré-positionné pendant la saison des feux. En Nouvelle-Calédonie, des projets de sécurité civile vont bénéficier d’un financement de 5 millions d’euros en 2017.

Monsieur Lefait, vous avez évoqué l’adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours (ANTARES). Ce système d’alerte couvre désormais 95 % du territoire national ; 71 SDIS y seront raccordés entre 2013 et 2017 ; 24,8 millions d’euros de travaux sont programmés pour achever la couverture du territoire.

Je me suis exprimé sur les jeunes et la sécurité civile. J’aurais beaucoup de choses à rajouter et je vous propose de vous les transmettre par écrit pour que mon propos ne soit pas trop long.

Monsieur Boisserie, vous m’avez interrogé sur la mise en réserve de la révision de la LOLF. La mise en réserve concernant les forces de sécurité fait l’objet d’une négociation annuelle en fin de gestion. Durant cette négociation extrêmement dure, les policiers et les gendarmes exercent sur moi les pressions qui vont bien, de façon à obtenir les meilleurs résultats. Cela fait partie du jeu. Même lorsque j’étais ministre du budget, je recevais le directeur général de la gendarmerie nationale dans mon bureau, venu ajouter sa propre pression à celle de son ministre. C’est au ministère du budget que j’ai découvert ce qu’étaient les contraintes, difficultés et spécificités de la gendarmerie. Sachant bien comment un ministre du budget gèle les crédits de la gendarmerie, je sais parfaitement comment il peut les dégeler… Nous obtenons donc un niveau exceptionnel de dégel des crédits de la gendarmerie : les deux tiers. Notre objectif est de faire en sorte que ce niveau de performance ne soit pas démenti. Je suis sûr que les membres de la commission des finances de l’Assemblée nationale, qui ne manquent pas de témoigner de leur reconnaissance aux forces de l’ordre, m’aideront dans cette tâche, avec l’engagement, la détermination et la bienveillance qui les caractérisent. Je me souviens que vous saviez faire mouvement sur les sujets essentiels, lorsque j’étais ministre des finances. Je vous sens déjà en mouvement. (Sourires.)

J’en viens à la transposition aux forces armées de la directive sur le temps de travail. La France respectera ses engagements. L’objectif du Gouvernement est clair : il s’agit de se mettre en conformité avec le droit communautaire, tout en préservant la capacité opérationnelle de nos forces armées et, pour ce qui me concerne, de la gendarmerie. Nous travaillons actuellement avec le directeur général de la gendarmerie nationale. Nous avons prévu une série de réunions destinées à organiser cette compatibilité, ce qui me conduira d’ailleurs, compte tenu des conséquences de cette directive sur le plan opérationnel, à revoir un certain nombre d’organisations territoriales envisagées. Il s’agit de faire en sorte que la directive sur le temps de travail ne se traduise pas par une diminution du nombre de gendarmes sur le territoire. Ils doivent rester au moins aussi nombreux, si ce n’est plus. Dans quelques semaines, je rendrai publiques les modifications que j’aurai apportées aux organisations territoriales afin d’atteindre les objectifs.

La gendarmerie est en effet impliquée dans la formation des polices municipales, monsieur Boisserie. Elle se charge de la formation d’unités motocyclistes et équestres, et elle assure la formation des moniteurs au maniement des armes. Depuis juin 2016, des travaux de révision des protocoles liant la gendarmerie aux polices municipales sont en cours, sous la direction des services compétents.

En ce qui concerne l’école de Cannes-Écluse, c’est plus compliqué qu’il n’y paraît. Quand on multiplie par dix le nombre d’élèves dans les écoles, il est difficile d’en fermer. Notre objectif est d’adapter la capacité des écoles à l’augmentation très significative du flux d’élèves, ce qui ne nous prive pas d’engager des réflexions prospectives sur l’organisation globale du maillage des écoles, en y intégrant la création de la direction centrale de la formation qui répond à la nécessité d’avoir des policiers bien formés – et en continu – compte tenu des défis nouveaux auxquels ils sont confrontés. La direction des ressources et des compétences de la police nationale (DRCPN) a fait un remarquable travail. Je salue sa directrice, Mme la préfète Michèle Kirry, à laquelle on doit beaucoup, notamment le protocole de 850 millions d’euros de mesures catégorielles que j’ai précédemment évoqué. Avec Mme Kirry et le directeur général de la police nationale, nous avons décidé de créer cette direction centrale de la formation, qui est en cours de préfiguration, parce que la formation est pour moi une priorité. Pour augmenter les capacités et améliorer la qualité, il faut avoir une réflexion prospective. Au début de l’année 2017, la direction centrale de la formation aura pour mission de proposer les orientations adéquates concernant les sujets sur lesquels vous avez appelé mon attention.

En matière d’exercices de tir, la formation initiale est convenable mais il faut permettre aux gendarmes et aux policiers de s’entraîner en continu. La demande est forte et nous allons y répondre dans le cadre des dispositifs relatifs à la formation que je viens d’évoquer et grâce à des investissements dans des stands de tir.

Je souhaite répondre aux questions précises de M. Morel-A-l’Huissier. Je l’ai déjà fait en ce qui concerne le volontariat. S’agissant de l’abondement grâce aux économies de la prime de fonctions et de résultats (PFR), j’entends dire que nous profiterions de cette réforme pour mettre de l’argent de côté : cela ne correspond pas à la réalité. L’État a décidé de réinvestir dans le système de sécurité civile l’intégralité des économies réalisées sur la PFR au profit des SDIS, avec la création d’une nouvelle dotation d’investissement structurant de 20 millions d’euros. Il est prévu que la somme de 32 millions d’euros correspondant à la dotation de l’État soit redistribuée dans le cadre du PLF 2017 de la façon suivante : 20 millions pour la nouvelle dotation aux investissements structurants dont je viens de vous parler, 5 millions destinés au financement des projets de sécurité civile en Nouvelle-Calédonie, et le reste, soit 7 millions, au financement de la part prise en charge par l’État de la PFR II en 2017 ainsi qu’au financement des réserves de sécurité civile. Dès lors, toutes les économies réalisées sur la PFR sont bien réutilisées en faveur de la sécurité civile – à l’euro près. Vous pouvez informer ceux qui vous ont dit autre chose qu’ils se trompent.

L’utilisation de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) pour l’achat de matériel pour les SDIS est aussi un sujet régulièrement évoqué. La dotation d’équipement des territoires ruraux est destinée à cofinancer les investissements structurants des collectivités locales. Elle peut donc servir au financement de la modernisation des emprises immobilières. Il y a d’ailleurs des endroits, notamment en outre-mer, où nous utilisons la DETR, les « systèmes Barnier », pour abonder les efforts de financement des collectivités locales. En revanche, on ne peut faire l’achat de matériel roulant ni d’équipement courant pour les SDIS parce qu’ils n’entrent pas dans les cadres légaux d’utilisation de ces fonds. Ce matériel et cet équipement doivent par conséquent continuer à relever des SDIS. Si on réutilise une partie de la PFR – 20 millions d’euros – à destination des SDIS, c’est pour leur permettre de répondre à la préoccupation que vous exprimiez à l’instant.

Vous m’avez parlé de la TSCA. Les présidents de conseil départemental considèrent la TSCA non pas comme un fléchage vers les départements de fonds de l’État destinés à financer les SDIS, mais comme une compensation générale au bénéfice des départements, résultant de la départementalisation. Ce n’est pas du tout mon approche : la TSCA a été mise en place dans le cadre de la départementalisation pour financer des investissements de sécurité civile. Au titre du versement de cette TSCA, l’État peut légitimement affirmer ses prérogatives en matière de sécurité civile aux côtés des départements. Nous devons absolument créer les conditions d’un nouvel équilibre sur ce sujet. J’y suis absolument favorable, je l’ai dit dès mon arrivée au ministère de l’intérieur. Nous devons continuer, dans les années qui viennent, à renforcer considérablement la présence de l’État dans la définition des enjeux de sécurité civile. La question de la transparence dans l’utilisation de la TSCA est pour moi un sujet fondamental et l’État n’a pas à considérer qu’en matière de sécurité civile, il n’a rien à dire ni rien à faire. Il doit au contraire profiter du fait que près d’un milliard est fléché vers les départements pour assurer la direction des questions de sécurité civile, autant que les départements.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Dans la suite logique de vos réponses, j’aurai trois questions à vous poser, avant de donner la parole aux représentants des groupes.

Vous avez annoncé, dans le cadre du nouveau plan, 250 millions d’euros en faveur de la sécurité, parmi lesquels 20 millions seront fléchés vers l’entretien du parc immobilier…

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Pour la seule année 2016. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi je souhaite procéder ainsi. Il y a depuis des années des petits travaux qui ne sont pas faits dans les commissariats, ce qui empoisonne la vie des policiers. Je veux les engager tout de suite. Je propose donc que sur les 250 millions, une disposition soit prise pour la fin de l’année 2016 afin d’affecter immédiatement, de façon déconcentrée, des sommes aux DDSP.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Je voulais réagir à cette annonce : 20 millions, c’est un premier pas, mais la nécessité est immense car aucune majorité, quelle qu’elle soit, n’a accordé la priorité aux locaux de nos fonctionnaires de sécurité. La dégradation de ces locaux s’est donc amplifiée avec le temps. Je note cet effort de 20 millions mais j’imagine que vos services ont déjà calculé ce qu’il faudrait investir dans les prochaines, années pour remettre à niveau l’ensemble du parc immobilier.

S’agissant ensuite des SDIS, vous avez évoqué le montant de 20 millions d’euros de dotations d’investissements structurants en 2017. Il y a quelques temps, on se réunissait une fois par an au sein d’une commission de sécurité, en présence du préfet de région, au sujet des dotations des programmes d’investissements structurants des SDIS. Avez-vous l’intention de flécher ces 20 millions d’euros soit pour la fin d’ANTARES, soit pour de gros équipements structurants pour des feux de forêt ?

Enfin, les départements sont aujourd’hui dans une difficulté financière colossale au quotidien, liée à plusieurs facteurs : la contribution au redressement des finances publiques, mais aussi la progression des dépenses d’action sociale font que nous aurons, dans les années à venir, de vraies difficultés à maintenir à niveau nos investissements au profit des SDIS. Or, il va bien falloir accompagner nos sapeurs-pompiers.

M. Pascal PopelinNous sommes appelés, pour la dernière fois de cette législature, à examiner les crédits que le Gouvernement propose de consacrer à la protection de nos compatriotes pour l’année à venir.

C’est l’occasion, dans un contexte difficile pour nos forces de l’ordre, de remettre en perspective les orientations mises en œuvre par le Gouvernement et sa majorité depuis 2012. L’examen des décisions et des chiffres est en effet la seule réponse qui vaille à certaines caricatures indécentes. L’autorité de l’État, la sécurité, les moyens dédiés à nos forces ne sont pas des fonds de commerce électoraux. Ces sujets devraient nous rassembler dans la dignité, avec le souci de la vérité, si chacun voulait bien considérer leur gravité.

En vérité, jamais aucun gouvernement n’avait eu, au moins durant les trois dernières décennies, à affronter un contexte de menace terroriste d’une telle intensité et d’une telle violence. Le Parlement y a répondu avec fermeté et responsabilité. Trois lois renforçant nos dispositifs de lutte contre le crime organisé et le terrorisme ont été adoptées depuis le début de la législature. Un cadre juridique moderne, démocratique et adapté a été donné à l’action de nos services de renseignement. L’état d’urgence, avec les mesures spécifiques qu’il autorise, est en vigueur. Toutes ces décisions ont trouvé une traduction budgétaire concrète, et le projet de loi de finances pour 2017 en est une nouvelle fois la démonstration puisque les efforts mobilisés y sont encore amplifiés. Jamais une majorité n’aura dû autant agir pour réparer un service public de la sécurité fragilisé par des décisions antérieures malheureuses, qu’il s’agisse de questions d’effectifs, de moyens ou d’organisation.

Au-delà du renforcement des outils de lutte contre le terrorisme, il fallait aussi agir pour faire reculer la délinquance du quotidien, celle qui empoisonne la vie de nombre de nos compatriotes dans les quartiers populaires comme dans les zones rurales. Voilà pourquoi ont été créées dès 2012 les zones de sécurité prioritaires (ZSP). Voilà pourquoi a été déployé en 2013 le plan de lutte anti-cambriolages.

Ponctionnés de plus de 13 000 postes durant le précédent quinquennat, les effectifs ont été augmentés de 9 000, ce projet de loi de finances consacrant la montée en charge que rend nécessaire le temps de formation des nouveaux policiers et gendarmes. Le renseignement de proximité, décapité en 2009, reprend progressivement forme sur le terrain. Le retard, accumulé durant dix ans en matière de renouvellement des véhicules et de dotation de matériels se comble progressivement depuis quatre ans. Nous savons qu’il reste beaucoup à faire. Ce projet de loi de finances s’y attache une fois de plus. Les annonces de mercredi soir amplifieront les possibilités de répondre à cette nécessité. Depuis le début de cette législature, les crédits affectés à la sécurité ont augmenté de manière continue pour atteindre aujourd’hui une progression de 15 % pour la police et de 10 % pour la gendarmerie, quand ils avaient diminué d’autant durant le précédent quinquennat.

Ne nous voilons cependant pas la face. Le retard était tel que ces efforts ne sont pas encore ressentis partout sur le terrain. Parce qu’il a fallu investir dans de nouveaux champs pour répondre à la menace terroriste, la sécurité de voie publique en particulier continue de souffrir. Et, il est vrai – je vous l’ai récemment écrit, monsieur le ministre – que nous peinons à voir la traduction des effectifs supplémentaires dont nous votons la création, dans la politique d’affectation pour les commissariats de nos circonscriptions.

Il me semble que, pour relever les défis qui demeurent devant nous, rien de sert de gesticuler, de verser tout à la fois dans l’amnésie du passé et dans l’outrance d’un futur illusoire. La constance des actes, l’écoute et la recherche des meilleures voies réalistes d’amélioration me semblent être bien davantage les preuves souhaitables de la considération et du soutien que nous désirons témoigner à l’égard de toutes celles et tous ceux qui exposent leur intégrité pour protéger la nôtre, celle de nos enfants et de nos familles.

Avant de conclure, je veux aussi saluer, au nom de mes collègues du groupe socialiste, écologiste et républicain, votre détermination jamais départie de calme et de sens de l’État, monsieur le ministre de l’intérieur. Elle fait honneur à l’idée que je me fais de ce que ne devrait jamais cesser d’être notre République. Nous voterons donc naturellement ce budget de progression avec la conviction de bien agir pour la France et les Français. Avec la conviction, aussi, que ces efforts devront continuer d’être durablement amplifiés au cours des prochaines années.

M. Daniel GibbesJe tiens tout d’abord à excuser mon collègue Éric Ciotti qui n’a malheureusement pu se libérer pour intervenir au sein de cette commission élargie.

Confrontés à une insécurité nouvelle, les effectifs de police et de gendarmerie sont plus que jamais sollicités sur l’ensemble du territoire de la République. L’année 2016 aura été une année terrible pour les forces de l’ordre avec l’intensification de la menace terroriste, le déchaînement des violences contre les policiers et gendarmes, la difficile gestion d’une pression migratoire en forte augmentation ou encore la multiplication des mouvements sociaux incarnés par l’opposition à la loi sur le travail et le mouvement Nuit debout. Alors que la sécurité des Français est notre priorité, la sécurité de ceux qui nous protègent n’a jamais été aussi menacée. Ces violences ont atteint leur paroxysme avec le drame de Viry-Châtillon. Je profite de cette intervention pour saluer le travail des policiers et des gendarmes, leur professionnalisme et leur importance dans le cadre des missions qu’ils exercent, parfois au péril de leur vie.

L’examen des crédits alloués à la mission « Sécurités » s’inscrit donc dans un contexte de vives tensions renforcées par les manifestations actuelles des policiers. Pour l’année 2017, le Gouvernement annonce une hausse de 3,5 % des crédits de paiement de cette mission. Par ailleurs, vous venez d’annoncer, monsieur le ministre, une enveloppe supplémentaire de 250 millions d’euros dédiée à la police et à la gendarmerie pour financer de nouveaux équipements. Nous ne pouvons que saluer cet effort budgétaire tant l’augmentation des effectifs, la hausse des moyens et l’amélioration des conditions de travail des forces de sécurité est indispensable.

Toutefois, lorsqu’on analyse le budget que vous nous présentez, certaines questions restent encore en suspens. Le Président de la République s’y était engagé : son quinquennat devait être marqué par la création de 9 000 postes de policiers et gendarmes. Un chiffre loin de la réalité puisque, selon les calculs de la Cour des comptes – et plus précisément selon un rapport d’exécution budgétaire publié en juin 2016 –, seuls 390 emplois ont été créés au cours de la période 2012-2015. Non seulement les effectifs ont quasiment stagné, mais la Cour des comptes révèle que les plafonds d’emplois pour 2015, c’est-à-dire les emplois inscrits au budget qui étaient de 242 412, se sont soldés in fine par 2 865 emplois de moins que prévu.

Par ailleurs, le budget présente selon nous plusieurs imprécisions s’agissant des réponses concrètement apportées au malaise des forces de l’ordre. Pourtant, les chiffres sont criants. Entre 2010 et 2015, le nombre de policiers blessés pendant leurs missions a augmenté de 25 %. Ces violences progressent, hélas, de manière encore plus spectaculaire en 2016. Sur les six premiers mois de l’année, 3 267 fonctionnaires étaient concernés par des agressions ou blessures pendant leur service. Ces chiffres rendent compte d’une augmentation de 14 % des violences contre les policiers par rapport au premier semestre de l’année 2015. Quand bien même ces chiffres souffriraient d’une certaine approximation, comment le Gouvernement entend-il répondre à cette réalité préoccupante des violences commises sur les forces de l’ordre ?

Au-delà de la question des moyens, il nous faut donner plus de prérogatives aux policiers pour assurer leur sécurité. Nous ne pouvons regretter que la proposition de notre groupe, de permettre aux policiers de tirer après deux sommations, dans certaines situations, ait été balayée d’un revers de main par la majorité gouvernementale C’est pourtant une disposition de bon sens, indispensable pour permettre aux policiers en situation de légitime défense de faire plus facilement usage de leur arme à feu.

Je ferai quelques remarques concernant le programme « sécurité routière ». Les chiffres de la mortalité routière repartent à la hausse depuis 2014, d’une façon qui nous inquiète tout particulièrement, et ne semblent pas s’infléchir en 2016. Le nombre de morts sur les routes françaises a augmenté de façon spectaculaire : ils sont en hausse de 30,4 % en septembre 2016 par rapport à la même période, l’année précédente. Monsieur le ministre, vous avez tenté de prendre des mesures afin d’inverser cette tendance, en ayant notamment recours aux radars, aux leurres et aux éthylotests antidémarrage. Or, malgré le spectre d’une troisième année d’affilée d’augmentation des chiffres de la mortalité routière, non seulement vos mesures paraissent trop inefficaces mais de surcroît, les crédits alloués à cette mission sont en baisse pour la troisième année consécutive. Comment le justifiez-vous ?

Enfin, pouvez-vous nous apporter un éclairage particulier sur la sécurité dans nos territoires ultramarins ? Le Gouvernement a mis sur pied un plan « sécurité outre-mer », mesure plus que nécessaire au regard des situations de délinquance et de criminalité sur des territoires comme la Guadeloupe ou Saint-Martin. Un plan spécifique pour Mayotte a également vu le jour : le territoire a été le théâtre d’émeutes ces derniers mois. Pouvez-vous faire le point sur la situation actuelle de Mayotte et nous dire si des moyens supplémentaires vont être mobilisés pour les outre-mer ?

M. Gabriel ServilleVous connaissez aussi bien que moi le contexte particulier de la région Guyane en matière d’insécurité et de délinquance. Vous ne m’en voudrez donc pas de cantonner mon intervention à ce territoire que j’ai l’honneur de représenter, en ayant une pensée particulière pour les policiers et gendarmes de Guyane, qui doivent faire face à une criminalité toujours plus violente. Je souhaite ici leur témoigner toute ma sympathie et mon soutien sans faille.

Monsieur le ministre, depuis mon arrivée à l’Assemblée en 2012, je n’ai cessé de lancer des appels afin que notre Gouvernement se penche sur ce territoire qui sombrait chaque jour un peu plus dans un climat de délinquance, désormais banalisé. L’absence d’un véritable électrochoc d’initiative gouvernementale nous laissait perplexes tandis que la moindre attaque à main armé à Marseille ou ailleurs faisait l’objet de toutes les attentions. Quatre ans plus tard, et par votre biais, monsieur le ministre, la représentation nationale commence à prendre conscience de l’ampleur des événements qui se trament sur cette partie du territoire de la République.

Mais la situation n’a cessé de se dégrader. Ainsi, en un an, on aura noté une augmentation des atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes, avec un pic de +13 % au cours des six derniers mois. Les violences physiques et crapuleuses ont aussi augmenté de 22 %. Concernant les homicides, les chiffres sont tout aussi négatifs puisque, depuis le début de l'année, 36 personnes ont été tuées par arme à feu ou arme blanche, dont cinq au cours du seul mois août. Je rappelle que la Guyane est peuplée d’à peine 280 000 habitants, ce qui signifie que le taux d’homicides y dépasse allégrement 10 pour 1 000. Les atteintes aux biens ne sont pas en reste : +4,5 %. Bref, comme on dit : ça urge !

Toutefois, je dois reconnaitre les efforts qui sont réalisés par nos forces de police et de gendarmerie en vue de sécuriser le territoire. Votre déplacement d’il y a quelques jours témoigne de la prise de conscience du Gouvernement ainsi que de votre détermination à endiguer ces phénomènes de violence. En effet, pour inverser la tendance observée depuis des mois, vous avez promis l’arrivée de soixante policiers à très court terme, auxquels viendront s’ajouter une centaine d’autres d’ici à juin 2017. Ainsi, trois postes de fonctionnaires en police technique et scientifique doivent être ouverts afin de remettre à niveau cette branche de la police en Guyane et permettre d’agir contre les cambriolages, les homicides et les vols avec violence.

Il s’agit aussi de mieux lutter contre les réseaux liés au trafic de stupéfiants puisque, depuis quelques temps, l’aéroport de Cayenne s’est transformé en véritable plaque tournante de la drogue entre les producteurs sud-américains et les consommateurs européens. C’est dans le cadre de la lutte contre ce fléau que vous avez également annoncé la création sur place d’une antenne de l’Office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS). Outre des effectifs renforcés, vous avez également décidé la création d’une zone de sécurité prioritaire à Saint-Laurent-du-Maroni et l’arrivée de nouveaux matériels – armes, casques et véhicules – à disposition des forces de l’ordre. Autant d’annonces qui ont été accueillies favorablement par la population.

Pourtant, je dois vous avouer mon inquiétude à la lecture du budget que vous nous présentez aujourd’hui qui, s’il a le mérite d’être en légère hausse d’un peu moins de 2 % par rapport à l’année dernière, pourrait difficilement traduire les annonces ambitieuses faites à Cayenne. Et pour cause : le programme 176 « police nationale » augmente d’un peu plus de 3 millions d’euros mais on voit mal comment cette somme permettra de couvrir non seulement l’arrivée des soixante policiers prévus mais également le renforcement matériel annoncé. Le programme 152 « gendarmerie » accuse, quant à lui, une baisse de ses crédits alors que les effectifs des brigades mobiles sont annoncés à la hausse avec l’arrivée de dix-sept gendarmes supplémentaires en 2017 à Macouria, Saint-Laurent-du-Maroni et Kourou, portant à 1 000 leur nombre sur le territoire guyanais.

Monsieur le ministre, vous le savez, la polémique gronde depuis les révélations d’un média local selon lequel trente-deux gendarmes affectés sur le Haut-Maroni ont été réaffectés en Guadeloupe pour faire face à la violence qui règne également dans ce département d’outre-mer. Les Guyanais sont aujourd’hui d’une extrême méfiance en raison des annonces et promesses gouvernementales dont les concrétisations se font attendre, discréditant en cela la parole publique que nous portons collectivement. Depuis quelques temps les appels à la création de milices privées, pour se faire justice soi-même, pullulent sur les réseaux sociaux, accompagnant pêle-mêle des incitations à la haine raciale et xénophobe – autant de pratiques que je condamne avec la plus grande fermeté.

Aussi, monsieur le ministre, sans jamais mettre en doute votre détermination à régler définitivement ces problèmes – qui traduisent par ailleurs d’autres difficultés ne pouvant être imputées à votre ministère –, je vous demande solennellement de bien vouloir rasséréner les potentielles victimes, et me rassurer quant à la budgétisation, dès l’année 2017, de toutes les mesures annoncées en faveur de la lutte contre l’insécurité en Guyane. La solidarité de mes collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine pourrait alors s’exprimer par le biais d’un vote pleinement significatif de satisfaction ou de déception.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Je commencerai par répondre à M. Gabriel Serville. Je me suis rendu dans les départements et territoires d’outre-mer il y a trois semaines et j’y ai fait plusieurs annonces. Je n’ai pas pour habitude de ne pas tenir les engagements que je prends. C’est un sujet trop grave pour qu’on dise des choses approximatives. Le budget que je présente ne comporte absolument pas les chiffres que vous venez de citer. Il est en augmentation, en ce qui concerne les forces de sécurité, de près de 830 millions d’euros – j’ignore donc d’où viennent vos chiffres – et j’ai indiqué tout à l’heure, dans mon propos introductif, les augmentations de crédits dont bénéficieraient la police et la gendarmerie, tant au sein du titre 2 qu’en dehors de celui-ci. J’ai notamment précisé le nombre de créations d’emplois qui interviendraient sur l’ensemble du territoire national, y compris dans les départements et territoires d’outre-mer, pour la gendarmerie et la police. Ces chiffres sont significatifs. En 2017, 402 emplois seront créés dans la gendarmerie et 3 216 dans la police, soit, au total, 3 618 emplois créés. C’est sur ces chiffres issus des documents budgétaires qu’il faut appuyer le raisonnement et sur rien d’autre.

Ensuite, j’ai annoncé, lors de ma venue en Guyane des effectifs précis pour la police comme pour la gendarmerie : 60 personnels en gendarmerie territorialisée – en substitution des gardes mobiles – et dix personnels dans la police judiciaire dont quatre affectés à l’Office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS) et cinq à la ZSP de Saint-Laurent-du-Maroni. À ces effectifs de gendarmerie s’ajoutent les effectifs de police que j’ai annoncés. Vous me dites que la colère gronde parce que trente-deux gendarmes mobiles sont partis. Mais je vous rappelle que les gendarmes mobiles, comme leur nom l’indique, ont vocation à se mobiliser là où il y a des crises et à repartir ensuite, une fois que les crises ont cessé. J’ai annoncé, parmi mes propositions, la substitution à ces gendarmes mobiles de gendarmes qui seront définitivement affectés en Guyane de manière à ce que vous n’ayez pas à subir constamment ces allers-retours de gendarmes mobiles. J’ai fait des annonces précises. Je me suis déplacé pour cela. J’ai pris des engagements. Je sais qu’au moment où je me trouvais en Guyane, certains médias guyanais ont essayé de lancer des polémiques sur ce sujet. C’est leur affaire mais je suis un responsable gouvernemental qui tient les engagements pris. Nous sommes dans une période où la rationalité du raisonnement doit l’emporter sur le vacarme de ceux qui parlent sans savoir. Je ne parle pas de vous, monsieur le député, avec qui j’ai des relations de confiance, mais de médias que vous connaissez parfaitement.

Monsieur Gibbes, je souhaiterais clarifier deux points.

Tout d’abord, vous contestez la création des effectifs par le Gouvernement, vous appuyant sur un rapport de la Cour des comptes qui nous est constamment opposé. Je serai donc clair et précis. On ne peut, parce qu’il y a une élection primaire, faire dire aux documents budgétaires absolument n’importe quoi. Je vous en communiquerai le contenu de manière à ce qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. Ces documents traduisent ce qu’a été l’évolution du plafond d’emplois voté par le Parlement dans la police et la gendarmerie entre 2007 et 2017 : ce plafond était de 149 965 en 2007, de 148 563 en 2008, de 146 180 en 2009, de 144 790 en 2010, de 145 434 en 2011 et de 143 689 en 2012. Cela signifie que ce plafond a été réduit respectivement, dans la gendarmerie et la police : de 967 et de 1 402 emplois en 2007, de 1 625 et de 2 383 emplois en 2008, de 1 354 et de 1 390 emplois en 2009, de 1 087 et de 644 emplois en 2010-2011, de 1 210 et de 1 745 emplois en 2011-2012. Ainsi, au cours de la période allant de 2007 à 2012, les emplois ont diminué de 6 243 dans la gendarmerie et de 6 276 dans la police nationale.

Voici maintenant les plafonds d’emplois dans la police nationale depuis 2013 : 142 317 en 2013, 143 606 en 2014, 145 197 en 2015, 145 863 en 2016, 149 079 en 2017. Ainsi, entre 2012 et 2017, ont été créés 4 334 emplois dans la gendarmerie nationale et 5 390 dans la police nationale.

À l’instar d’un ancien Président de la République apparemment à court d’arguments, vous ressortez en permanence un rapport de la Cour des comptes pour essayer de masquer ces 13 000 emplois supprimés et ces 9 000 emplois créés. Je vais donc tenter de clore une fois pour toutes ce débat.

M. Philippe GoujonVous aurez du mal !

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. À contrecarrer votre mauvaise foi, sans doute, car elle est incommensurable,…

M. Philippe Goujon. Vous êtes trop aimable !

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. …mais à rétablir la vérité, pas du tout.

M. Vachia, qui a rédigé ledit rapport de la Cour des comptes, a été entendu le 1er juin dernier par la commission compétente dans le cadre d’une audition dont le compte rendu est public. M. Marleix, qui voulait faire la démonstration que vous venez de tenter, l’a alors interrogé à propos du nombre d’emplois créés. Voici très exactement sa réponse : « Vous évoquez le chiffre de 9 000 créations d’emplois. Page 137 du rapport général sur l’exécution du budget, nous nous sommes interrogés sur l’accumulation des créations d’emplois en loi de finances initiale puis en loi de finances rectificative et en cours d’année à la faveur des PLAT 1 et 2. Elle a abouti à ce qu’il y ait plus de créations d’emplois que prévu, toutes choses égales par ailleurs. Si vous faites la somme entre 2015 et 2017 des emplois dont la création a été prévue en loi de finances, des recrutements visés dans les PLAT 1 et 2 et de ceux qui prennent place dans le cadre du plan “migrants”, on aboutit à 8 132 emplois, un total qui s’approche du chiffre que vous citiez. » Le solde des créations d’emplois permettant d’atteindre l’objectif de 9 000 concerne les services de préfecture en charge de la lutte contre la radicalisation, le contrôle des armes, la lutte contre la fraude aux documents d’identité. En dépit de la réponse qui lui a été apportée, M. Marleix continue de tenir les mêmes propos que vous.

M. Daniel GibbesCe n’est pas la réponse qu’a donnée M. Migaud.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Vous disposez par ailleurs de documents budgétaires qui montrent le nombre d’emplois créés en fonction des plafonds d’emplois annuels.

Je ne me fais aucune illusion : vous allez continuer à dire ce que vous dites aujourd’hui, puisque ce qui compte, ce n’est pas la réalité, mais votre incapacité à assumer un bilan qui inclut la suppression de 13 000 emplois dans la police et la gendarmerie, comme à reconnaître nos propres efforts. En matière de sécurité, vous pensez que les discours litaniques sur votre capacité et l’incapacité des autres à agir vous permettront d’obtenir de bons résultats lors de votre primaire ; nous verrons bien ce qu’il adviendra.

Je n’en tenais pas moins à vous dire très nettement ce qu’il en est, parce qu’à un moment donné, quand les contre-vérités sont égrenées quotidiennement, y compris par des acteurs politiques qui ont exercé les plus grandes responsabilités au ministère de l’intérieur et dans l’appareil d’État, il faut dire : stop ! Sur des questions aussi difficiles, on est en droit d’attendre des débats de qualité, fondés sur des faits.

En ce qui concerne la délinquance, j’ai là un document qui vient du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), piloté par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE)…

M. Philippe GoujonC’est un service du ministère de l’intérieur !

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Non. On ne peut pas proférer des mensonges sur tous les sujets, monsieur Goujon. Nous avons mis en place un service statistique ministériel piloté selon les méthodes de l’INSEE, parce qu’il fut un temps où l’on arrêtait de recueillir les statistiques de la délinquance le 15 du mois lorsqu’elles atteignaient un niveau comparable à celui du mois précédent ! Avec le Premier ministre, nous y avons mis bon ordre et nous avons eu raison de le faire.

En ce qui concerne les cambriolages de logements, on observe une stabilisation après cinq années consécutives de hausse entre 2009 et 2013 ; en ce qui concerne les vols liés à l’automobile, une tendance à la baisse, qui se poursuit, sauf pour les vols à la roulotte ; le nombre de vols avec violences contre les personnes est en baisse ; les homicides sont stables, hors impact des attentats.

Ces statistiques incontestables disent l’exact contraire de ce que vous affirmez à chaque question au Gouvernement, laissant penser qu’en matière de lutte contre l’insécurité les résultats se seraient dégradés, ce qui est faux. Je tiens à profiter de la discussion budgétaire sur ces sujets pour remettre les pendules à l’heure, car je crois qu’en politique la vérité compte, et que face à des entreprises de dissimulation, ici particulièrement grossières, il faut la rétablir.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Je donne maintenant la parole à ceux de nos collègues qui souhaitent intervenir, en commençant par M. Goujon.

M. Philippe GoujonMalgré les primaires, je vais peut-être avoir maintenant l’autorisation de parler…

L’intervention du ministre de l’intérieur frisait – le mot est faible – l’autosatisfaction. Nous y sommes habitués.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Cela s’appelle le rétablissement de la vérité, monsieur Goujon. Il n’y a là aucune autosatisfaction.

M. Philippe GoujonVous pouvez toujours m’interrompre, mais j’aimerais pouvoir m’exprimer. C’est déjà assez difficile quand on ne dispose que de deux minutes, alors que vous avez parlé trois quarts d’heure. Je reprends ; merci de décompter mon temps de parole à partir de maintenant, madame la présidente.

Votre intervention, monsieur le ministre, frisait l’arrogance, si vous préférez. Mais les policiers sont dans la rue : c’est donc que tout ne va pas pour le mieux dans votre ministère, contrairement à vos affirmations péremptoires, assorties de leçons de morale permanentes. (Protestations sur les bancs de la majorité.) Je revendique mes propos, même s’ils ne vous plaisent pas, mes chers collègues ! Nous avons bien eu droit, pendant de longues minutes, à des leçons de morale et de vertu. Pour notre part, nous laissons cela au ministre de l’intérieur.

M. le ministre ne l’a pas dit, mais lorsque nous avons quitté le pouvoir en 2012, il y avait le même nombre de policiers qu’en 2007 car, entretemps – cela n’a pas été davantage dit –, plus de 13 000 policiers ont été recrutés pour compenser l’effet dévastateur des trente-cinq heures dans la police. Cela vous dira peut-être quelque chose, mes chers collègues, même si cela semble être sorti de votre mémoire ! Entre 2007 et 2012, l’insécurité a reculé de 16 %. Quant aux recrutements qui ont eu lieu par la suite, nous en prenons acte, bien sûr, quelles que soient les contestations – le président Migaud est revenu sur les propos du rapporteur de la Cour des comptes que vous avez cités. Mais ils étaient dus à l’état d’urgence, à l’état de guerre, au terrorisme qui n’existaient pas au cours du précédent mandat, et dans lesquels vous n’êtes évidemment pour rien.

En ce qui concerne les charges indues, vous évoquez la suppression de gardes statiques, qui est une bonne chose. J’ai notamment entendu parler de 21 gardes statiques supprimées dans les préfectures et les tribunaux de grande instance (TGI). Mais le garde des sceaux nous a dit hier que le futur TGI de Paris, aux Batignolles, nécessiterait 389 policiers pour sa surveillance. Elle était jusqu’à présent assurée par la gendarmerie et la garde républicaine sur l’île de la Cité, où des locaux devront continuer d’être gardés par ces mêmes agents. Ces policiers seront donc prélevés sur les effectifs de la préfecture de police ; à moins que vous n’ayez une autre solution et, si oui, laquelle ?

Vous avez évoqué rapidement les transfèrements de détenus ; pourriez-vous être un peu plus précis sur ce point ? Le garde des sceaux nous a dit des choses qui n’allaient pas dans le même sens.

Mme Françoise Descamps-CrosnierJe tiens tout d’abord à saluer l’importante augmentation des crédits de cette mission budgétaire essentielle à plus d’un titre, ainsi que la poursuite des efforts en matière de lutte contre le terrorisme.

J’ai été membre de la commission d’enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes, dont notre collègue Patrick Mennucci était rapporteur et qui a rendu son rapport en juin 2015. Je vous avais interrogé l’an dernier, monsieur le ministre, sur les suites données à ses préconisations ; vous aviez souligné que plusieurs d’entre elles étaient déjà prises en considération, en cours de réalisation ou sur le point d’être réalisées. Où en est-on plus d’un an après la remise du rapport ? Je songe notamment à l’appui aux cellules départementales de prévention de la radicalisation et, de manière générale, aux outils de proximité dans ce domaine particulier de politique publique qui nous incombe désormais.

Ma deuxième question, également ancrée dans la réalité territoriale, concerne les zones de sécurité prioritaire (ZSP). Le projet annuel de performances de la mission budgétaire mentionne les bons résultats obtenus dans ces zones et précise que, pour y faire reculer efficacement et durablement la délinquance, l’accent restera mis sur la lutte contre l’économie souterraine – vols, recels, infractions à la législation sur les stupéfiants, blanchiment et non-justification des ressources. On apprend notamment à sa lecture que le montant des saisies patrimoniales en ZSP s’élevait à plus de 22 millions d’euros en 2015 et à 20 millions en 2014, dont la moitié en biens mobiliers. Disposez-vous d’autres données dans ce domaine ? Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous souhaitez donner la priorité à ce volet dans les temps à venir ?

Enfin, où en sommes-nous quant à la possibilité, ouverte par la loi du 3 juin 2016, d’expérimentation des « caméras-piétons » pour les policiers municipaux ? Elle est subordonnée à l’existence d’une convention de coordination, au fait que la commune ou l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) soit volontaire, mais aussi à un décret qui n’a, à ma connaissance, pas encore paru. Savez-vous à quelle date il sera publié ?

M. Pierre Morel-A-L'HuissierMonsieur le ministre, vous avez parlé de « bonne foi » à propos du nombre de sapeurs-pompiers volontaires (SPV), soit 193 756. Nous ne contestons pas l’augmentation de l’année dernière, mais le Président de la République en avait promis 200 000. Le problème est aujourd’hui de faire évoluer ce nombre.

Vous m’avez répondu s’agissant de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR). La fédération nationale des sapeurs-pompiers ne m’avait pas donné cette information et la direction de la sécurité civile m’avait indiqué que le financement du système de gestion opérationnelle était prévu, mais que l’affectation aux SDIS n’était pas possible.

En ce qui concerne la TSCA, j’ai pris note de votre volonté de transparence s’agissant du milliard d’euros.

En ce qui concerne la DETR, je regrette un peu votre réponse.

S’agissant de la sécurité, je note avec réserve et retenue l’existence de manifestations spontanées récurrentes et d’attentes. Concernant la police municipale, j’aimerais une position claire sur l’armement, sur les gilets pare-balles et sur le statut, peu valorisant. Quant aux agents de surveillance de la voie publique (ASVP), ils n’ont malheureusement pas de véritable statut.

M. Daniel BoisserieMonsieur le ministre, votre réponse concernant le dégel des crédits va dans le bon sens. Les crédits gelés concernant surtout les loyers, comment va-t-on faire pour en verser la totalité aux communes et aux bailleurs ?

J’aimerais également vous interroger sur les PSIG interdépartementaux. Je souhaite vraiment une évolution en ce sens.

Enfin, je me permets de le dire dans la mesure où cela fait vingt ans que je siège dans cette Assemblée, j’ai du mal à supporter l’arrogance ; nous sommes collègues, même si nous n’avons pas nécessairement les mêmes idées, et nous pouvons agir dans le calme et la sérénité. Tout ce qui est excessif est dérisoire.

M. Yves GoasdouéMonsieur le ministre, j’aimerais vous interroger sur l’évolution des emplois du service du déminage. Au rôle classique de désamorçage, de mise en sécurité et de destruction de munitions historiques, l’actualité du terrorisme ajoute des missions nouvelles de prévention, de surveillance et de neutralisation d’objets laissés à l’abandon, mais aussi d’intervention. Comment pensez-vous réorganiser ce service en conséquence ?

J’aimerais ensuite revenir sur les sapeurs-pompiers volontaires (SPV), en particulier sur la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR). Je crois comprendre que c’est à tort que l’on lie sa réforme aux 20 millions d’euros d’investissements prévus, mais qu’il s’agit d’une profonde réforme qui fait passer d’un régime de capitalisation à un régime de mutualisation. Pouvez-vous nous la décrire ? Aura-t-elle un effet sur les cotisations des SPV, sur la prestation elle-même, sur les contributions qui seront demandées aux départements ?

M. Patrick LebretonAlors que nous examinons le dernier projet de loi de finances de la législature, je ne crois pas inutile de dresser un bilan partiel concernant la sécurité civile dans les outre-mer, même si le sujet a été effleuré.

Je salue l’action du Gouvernement en vue de remettre à niveau la sécurité civile dans nos territoires. J’en veux pour preuve le prépositionnement permanent, depuis 2012, du Dash 8 à La Réunion dès la fin de la saison des feux dans l’Hexagone et son début dans l’océan Indien. Nous nous rappelons les dramatiques incendies du Maïdo, en 2011, et le mépris et le désintérêt dont nous avions alors fait l’objet.

Au-delà de cet engagement majeur, on observe une véritable prise de conscience des réalités et des risques spécifiques à nos territoires ; c’est pour moi une avancée importante.

Bien entendu, il reste beaucoup à faire. Comme rapporteur spécial, je milite en particulier, depuis plusieurs années, pour que l’on accroisse significativement les moyens de secours héliportés, notoirement insuffisants dans nos territoires, singulièrement à La Réunion. Pour pallier le manque tout en adoptant une approche budgétaire raisonnable, la mutualisation de ces moyens entre la sécurité civile, la gendarmerie et le service d’aide médicale urgente (SAMU) est expérimentée en Guyane depuis 2014 ; il s’agit des fameux hélicoptères « bleu-blanc-rouge ». Monsieur le ministre, pouvez-vous nous présenter un retour d’expérience à ce sujet ? Où en est le travail en cours avec le ministère de la santé sur la mutualisation des moyens héliportés, qui seraient alors « blanc-rouge » ? Quels outils de coordination entre les différents services sont envisagés ? Une généralisation est-elle possible à moyen terme ?

Enfin, pouvez-vous nous indiquer quand le réseau ANTARES sera pleinement opérationnel en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion, où son déploiement s’est poursuivi en 2015 et 2016 ?

M. Ibrahim AboubacarLe 29 octobre 2015, dans cette même salle, lors du même exercice à propos du projet de loi de finances pour 2016, j’appelais l’attention de la commission élargie sur la situation sécuritaire dans le département de Mayotte.

Depuis, les événements qui s’y sont produits ont eu un retentissement que nul n’ignore et qui marqueront durablement les relations humaines sur l’île. Le territoire a traversé un premier semestre 2016 difficile, avec des épisodes dramatiques pour beaucoup de personnes. Heureusement, le Gouvernement a réagi fortement pour redresser la situation. Un « plan sécurité Mayotte » global, a été arrêté par vous-même, monsieur le ministre, et par votre collègue ministre de l’outre-mer le 2 juin dernier. Il comporte 25 mesures dans plusieurs domaines, de nature à renforcer la sécurité au sein de la société mahoraise. Certaines ont été immédiatement mises en œuvre, tandis que diverses missions venaient sur place évaluer la situation. Celle-ci s’est stabilisée, d’une certaine façon apaisée, mais demeure tendue et fragile.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire le point sur la mise en œuvre de ce plan et sur la manière dont il se traduit le cas échéant dans la présente mission budgétaire ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Monsieur Goujon, nous parlons de sujets graves et, lorsque quelque chose de faux circule, il est de mon devoir de rétablir la vérité. Connaissant l’état de notre société, il me semble important de rappeler la réalité des faits, avec un objectif : apaiser. Si j’étais aujourd’hui dans l’opposition, par esprit de responsabilité, je chercherais à apaiser.

S’agissant des emplois créés, la lecture des documents budgétaires apporte des réponses sur la réalité des efforts que nous consentons en crédits hors titre 2. Quand je constate qu’un décalage existe entre certains propos et les décisions que nous prenons, je me contente de rétablir les faits, sans arrogance, dans un souci de vérité et de précision.

Vous avez affirmé que 13 000 emplois avaient été créés lors du quinquennat précédent : où puis-je les trouver ? L’ensemble des documents budgétaires dont nous disposons nous montrent, au contraire, que 13 000 emplois ont été supprimés. S’il en existe d’autres qui « ressuscitent » ces emplois perdus, n’hésitez pas à me les montrer !

M. Philippe GoujonJe parlais du quinquennat antérieur à celui que vous évoquez !

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Si la politique de la précédente majorité a consisté à créer 13 000 emplois dans un premier quinquennat pour les supprimer dans un second, il faudra m’en expliquer la cohérence et l’intérêt !

Pour notre part, nous en créons 9 000, et notre objectif est de continuer d’en créer, sans jamais en supprimer, car nous considérons que l’état du pays, les formes de violence auxquelles nous sommes confrontés, et la lutte contre le terrorisme le justifie.

Vos questions portaient sur les charges indues qui incombent aux services. Les tâches concernées sont de plusieurs types.

Les gardes statiques ont vocation à sécuriser les locaux de certaines organisations et institutions. Nous voulons leur substituer des gardes dynamiques. Ces dernières sont d’abord beaucoup plus efficaces dans la lutte contre le terrorisme et en termes de protection policière, car le terroriste peut craindre à chaque instant de tomber sur une patrouille, alors qu’il sait où sont postées les gardes fixes. Elles permettent ensuite de dégager 220 équivalents temps plein afin de renforcer le dispositif de présence sur le terrain. J’ai d’ores et déjà donné des instructions pour que, devant certains édifices publics comme les préfectures, la substitution entre garde statique et garde dynamique s’effectue dès la semaine prochaine.

Aujourd’hui, les forces de sécurité sont aussi dans l’obligation d’assurer le transfèrement vers les hôpitaux des gardés à vue en cas d’ivresse manifeste. J’ai dégagé un crédit qui permettra de passer une convention avec la médecine de ville et avec SOS Médecins afin que les médecins se déplacent dans les commissariats. Je souhaite que ce dispositif conventionnel se mette en place dans les meilleurs délais. J’ai donné hier des consignes aux préfets et aux directeurs départementaux de la sécurité publique (DDSP) pour qu’ils prennent contact avec la médecine de ville dès le début de la semaine prochaine afin que nous puissions dégager des ressources rapidement.

Par ailleurs, chaque semaine, en France, on compte quelque 300 hospitalisations de détenus. Chacune d’entre elles mobilise deux policiers. Sur ce point, l’évolution ne peut pas être aussi rapide que sur les deux précédents, mais un travail de plus long terme doit être mené avec le ministère de la santé pour que les dispositifs de soins dans les locaux des hôpitaux soient moins mobilisateurs de forces de l’ordre. Nous pourrons progresser sur ce sujet en 2017.

Concernant les transfèrements, un dispositif conventionnel a été mis en place avec le ministère de la justice. Il porte sur un total de 1 200 équivalents temps plein, et traite du cadencement du transfert et de la capacité du ministère de la justice à ne plus faire appel à celui de l’intérieur. Une inspection générale commune aux deux ministères a été commandée sur le sujet. Le garde des sceaux a réaffirmé, devant les organisations syndicales de la police et devant l’instance de dialogue de la gendarmerie, que nous étions favorables à l’accélération de la mise en œuvre de l’accord passé entre nos deux ministères sur ce sujet.

Un accord existe également concernant le nouveau palais de justice de Paris. On sait que trois cent soixante policiers et gendarmes seront mobilisés pour assurer sa sécurité, alors que l’ancien palais conservera une partie importante de son activité – celle des assises sera même amenée à augmenter. Cela nécessitera le maintien des deux tiers des effectifs chargés de la surveillance du site de l’île de la Cité. J’ai demandé un audit à l’Inspection générale de l'administration (IGA) sur le transfert du Palais de justice : je considère que le volume d’effectifs nécessaire pour assurer la sécurité des deux palais n’est pas supportable par le ministère de l’intérieur, compte tenu de ma préoccupation relative aux charges indues. J’ai en conséquence demandé un complément d’étude à l’IGA sur les conditions dans lesquelles nous pourrions avoir recours à de la sécurité privée de manière à maintenir la disponibilité des effectifs de police à Paris pour des missions qui relèvent de nos priorités, comme la lutte contre le terrorisme.

Madame Descamps-Crosnier, nous avions mis en place en avril 2014, avec la garde des sceaux de l’époque, un dispositif de lutte contre la radicalisation. Depuis cette date, la plateforme de signalement, adossée à une plateforme téléphonique gérée par l’unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT), qui se trouve au ministère de l’intérieur, a enregistré 5 600 signalements. Le nombre de signalements effectués par ailleurs par les services de renseignement intérieur ou par le renseignement territorial à partir des enquêtes qu’il diligente sur les territoires est légèrement supérieur. Au total, nous avons donc « en portefeuille » un peu plus de 10 000 cas de personnes radicalisées.

Le dispositif en place consiste, dès le signalement, à transmettre les identités des personnes concernées au procureur de la République et au préfet du département de résidence des individus radicalisées. Un comité se réunit autour du préfet et du procureur de la République mobilisant l’ensemble des acteurs ministériels et locaux en vue d’engager des actions de déradicalisation. Jusqu’à présent, elles ont été mises en œuvre pour 2 000 personnes.

Nous avons décidé de mettre en place des équipes mobiles qui se déplaceront sur le territoire pour assurer la formation des agents des collectivités ou des associations qui œuvrent à la déradicalisation, ce qui augmentera le nombre de dossiers traités. Dans le cadre des prochains contrats de ville, nous avons aussi souhaité qu’un volet « déradicalisation » permette de financer l’action des associations ou des acteurs de santé mentale qui peuvent accompagner l’État dans le plan d’action contre la radicalisation et le terrorisme, présenté par le Premier ministre au mois de mai dernier.

Madame la députée, des dispositions relatives à l’expérimentation de l’usage des « caméras piétons » ont été adoptées dans la loi du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale. Nous avons saisi la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ainsi que le Conseil d’État du décret en préparation sur ce sujet. J’ai rencontré hier le nouveau président de la section de l’intérieur du Conseil d’État de manière à ce que nous ne perdions pas de temps dans l’avancement de ce dossier.

Vous m’interrogez enfin sur les données dont nous disposons dans la lutte contre l’économie souterraine dans les zones de sécurité prioritaire (ZSP). Nous mobilisons dans ce combat l’ensemble des services de chaque direction départementale de la sécurité publique (DDSP), comme les comités opérationnels départementaux anti-fraude (CODAF). En 2015, les services ont été très sollicités pour lutter contre les trafics de stupéfiants, avec des résultats très positifs puisque 1 516 interpellations ont eu lieu cette année-là, au lieu de 1 400 en 2014. Les saisies de drogue, en particulier de cocaïne, ont fortement augmenté, ainsi que celles d’avoirs criminels, en hausse de 16,67 %. Les premières remontées relatives à l’année 2016 prouvent que l’effort se poursuit, et qu’il s’inscrit dans la durée avec des résultats toujours très positifs. La lutte contre la délinquance dans les quartiers doit reposer sur la coopération très étroite entre l’ensemble des services du ministère de l’intérieur, notamment la police judiciaire, la sécurité publique, et le renseignement. Nous tentons aussi de faire en sorte que les délégués à la cohésion police-population, qui sont répartis dans les ZSP, soient bien présents. La communication entre la police et la population constitue un élément essentiel de la lutte contre ces trafics et contre l’économie souterraine qui en résulte.

Monsieur Morel-A-l’Huissier, la réponse que j’ai apporté à votre question relative à la DETR vous déçoit, mais elle est conforme à ce que prévoient les textes. Malgré mon immense désir de vous être agréable, je ne peux pas vous dire que je ferai ce que les textes m’interdisent. Je ne peux pas vous donner satisfaction sans les modifier, ce qui serait très lourd pour atteindre un objectif qui peut l’être autrement. Le financement pourrait, par exemple, provenir des 20 millions d’euros de la PFR. Les textes ne me permettent pas de vous faire une autre réponse que celle-là.

Je vous ai indiqué les mesures que nous avons prises pour parvenir à un effectif total de 200 000 sapeurs-pompiers volontaires. Il faut que nous continuions à travailler sur les divers viviers de recrutement. Nous devons notamment progresser du côté des femmes qui ne représentent aujourd’hui que 17 % des sapeurs-pompiers volontaires. Des outils, comme les cadets de la République, doivent aussi permettre de faire en sorte qu’à terme, le nombre de sapeurs-pompiers volontaires soit plus élevé. Nous y travaillons, et les campagnes de communication apportent aussi une aide en la matière.

Vous m’avez interrogé, ainsi que Mme Dalloz, sur la dotation d’investissement aux services départementaux d’incendie et de secours, d’un montant de 20 millions d’euros. Ces fonds sont destinés à des projets structurants d’équipement qui permettront aux SDIS, confrontés à des risques majeurs, de renouveler leurs matériels. L’État prendra sa part dans le débat qui aura lieu à ce sujet, car il souhaite que ces 20 millions ne fassent pas l’objet d’un saupoudrage, mais qu’ils aillent bien au renouvellement d’équipements dont les SDIS ont besoin pour remplir au mieux leur mission de sécurité publique. Parce que les départements rencontrent des problèmes financiers, il est essentiel que nous parvenions à flécher les sommes que nous mobilisons pour les aider à remplir leurs missions, afin qu’elles soient utilisées dans des conditions optimales.

Monsieur Goasdoué, dans le cadre de la mise en œuvre du « pacte de sécurité », le bureau de déminage voit ses effectifs augmenter de 36 personnes sur deux ans, soit 30 démineurs et six renforts administratifs. Les recrutements prévus pour 2016 ont été effectués. Des crédits sont aussi mis à la disposition des services de déminage pour la sécurisation de leurs propres sites. Nous sécurisons également le système d’information opérationnel destiné à assurer l’intégrité des communications des démineurs. J’ai par ailleurs demandé une réorganisation des implantations des centres de déminage. Cette décision qui a parfois fait l’objet de débats, vise à ce que l’octroi d’effectifs supplémentaires s’accompagne d’une organisation du service permettant une intervention plus efficace, compte tenu du nombre de sollicitations.

Monsieur Lebreton, vous m’interrogez sur la mutualisation de la maintenance des hélicoptères de la gendarmerie nationale, de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), et du ministère de la santé. Nous avons pris des dispositions avec la ministre des affaires sociales et de la santé visant à réarticuler l’intervention de ceux que l’on appelle les « rouges » et les « blancs », afin d’éviter les conflits entre intervenants. Je suis convaincu que des progrès considérables peuvent encore être accomplis. La mutualisation de la gestion des flottes d’hélicoptères constitue une source d’économies significative alors que l’éparpillement des centres de maintenance est une perte en termes d’efficience.

En matière de secours en montagne, je tiens également à ce qu’une bonne coordination soit assurée afin que les acteurs de la sécurité civile, notamment les sapeurs-pompiers, ne soient pas éloignés des secours en montagne là où se trouvent des forces de sécurité intérieure. Une articulation efficace doit permettre que personne ne soit écarté.

Monsieur Aboubacar, nous avons engagé, comme vous l’avez rappelé, une action très volontariste à Mayotte. Vous avez appelé de façon extrêmement forte l’attention du Gouvernement à plusieurs reprises sur la nécessité d’une hausse des moyens dont dispose l’archipel. Nous vous avons entendu, et, dans le cadre de l’élaboration d’un dispositif de sécurité global concernant Mayotte et associant les collectivités territoriales, de nouveaux effectifs viendront rejoindre ceux ont déjà été renforcés. Entre juin et septembre 2016, 76 policiers et 26 adjoints de sécurité sont arrivés à Mayotte. Cela aboutira, au sein de la DDSP, à la création d’un groupe de sécurité de proximité, et la compagnie départementale d’intervention recevra le renfort de cinq policiers. Une brigade canine sera également créée en 2017, et une étude technique relative à la construction d’un nouvel hôtel de police à Mamoudzou sera lancée. Je tiens beaucoup à ce projet, et j’aimerais que les fondements en soient posés avant la fin du quinquennat.

En termes d’effectifs, les engagements que j’avais pris ont été tenus, et même dépassés. J’avais annoncé 102 arrivées ; on en compte 106. Ces efforts seront poursuivis afin que la totalité du plan que j’ai présenté avec la ministre des outre-mer, qui s’est rendue à Mayotte le mois dernier pour confirmer ces engagements, soit scrupuleusement appliquée. Je n’exclus pas de me rendre moi-même de nouveau à Mayotte, avant la fin de la législature, non seulement pour examiner les conditions dans lesquelles ces engagements sont tenus, mais aussi pour constater comment nous avons modernisé l’administration et les moyens de la politique d’accueil et de traitement des étrangers sur ce territoire.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Monsieur le ministre, je vous remercie.

*

* *

À l’issue de l’audition de M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, la Commission examine pour avis les crédits de la mission « Sécurités » (M. Yves Goasdoué, rapporteur pour avis « Sécurité », et M. Pierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur pour avis « Sécurité civile »).

Conformément aux conclusions de M. Yves Goasdoué, mais contrairement à l’avis de M. Pierre Morel-A-L'Huissier, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sécurités » pour 2017.

PERSONNES ENTENDUES

• Table ronde Syndicats affiliés à Force ouvrière

—  M. Dominique Lacoste, secrétaire national adjoint (SNPC/FO/Gendarmerie)

—  M. Eddy Camuzeaux, délégué zonal (SNPC/FO/Gendarmerie Ile-de-France)

—  M. Franck Fievez, secrétaire national et M. Sébastien Watiotienne (Unité SGP Police-FO)

—  M. Hervé Emo, secrétaire général (Union des Officiers)

• Table ronde Fédération autonome des syndicats du ministère de l’Intérieur (FASMI), UNSA FASMI affiliée à l’UNSA

—  Mme Céline Berthon, secrétaire générale (SCPNM)

—  Mme Ophélie Cohen, déléguée nationale (UNSA POLICE)

—  M. Paul Afonso, secrétaire général (UNSA INTÉRIEUR ATS)

––  M. Jean-Luc Taltavull, secrétaire général adjoint (SCPNM)

—  M. Samuel Remy, secrétaire général (SNPPS)

—  M. Jean-Dominique Chat (UNSA OFFICIERS)

––  Mme Laetitia Khadri (UNSA OFFICIERS)

—  M. Bernard Antoine (FASMI)

• Direction des ressources et des compétences de la Police nationale (DRCPN)

—  Mme Michèle Kirry, préfète, directrice des ressources et des compétences de la Police nationale

––  M. Sébastien Daziano, sous-directeur des finances et du pilotage

––  M. Luc Chalon, sous-directeur de la formation et du développement des compétences

• Table ronde Associations professionnelles de militaires de la Gendarmerie nationale

• Groupe de liaison du Conseil de la Fonction Militaire de la Gendarmerie (CFMG)

—  M. Patrick Beccegato, gendarme

—  M. Francis Bouliol, gendarme

—  M. Raoul Burdet, adjudant

—  M. Hervé Dupe, capitaine

––  M. Emmanuel Franchet, major

––  M. Christophe Le Jeune, adjudant

––  M. Stéphane Rivier, capitaine

––  M. Gregory Rivière, gendarme

––  Mme Nadège Tirel, adjudante

––  M. Erick Verfaillie, adjudant

––  M. Michel Vuillerminaz, gendarme

––  M. Bruno Arviset, colonel, secrétariat général du CFMG

• Association le Trèfle

—  M. Edmond Buchheit, général de corps d’armée, président

• Fédération nationale des retraités de la gendarmerie (FNRG)

—  M. Francis Lamblin, major

—  M. André Dosset, président national adjoint

• Fédération nationale des réservistes opérationnels et citoyens de la Gendarmerie nationale (ANORGEND)

—  M. Stéphane Vitrac, lieutenant (R), secrétaire général adjoint, chargé des études

—  M. Ludovic Molinier, lieutenant (R), chancelier, chargé de mission au groupe de travail « formation »

—  M. Dany Mahadzere, lieutenant (R), chargé de mission au groupe de travail « Formation »

• Confédération Française d’Associations de Retraites et Pensionnés de la Gendarmerie (CFARPG)

—  M. Jean-Jacques Vichery, colonel

• Union nationale du personnel en retraite de la Gendarmerie (UNPRG)

—  M. Jean-François Stephan, vice-président

• Syndicat SCSI

—  M. Yannick Le Barre, secrétaire Zonal Ouest

—  M. Denis Jacob, secrétaire général d’Alternative-Police

• Table ronde Syndicats affiliés à la CFE¬CGC

—  M. Pascal Disant, chargé de mission (Alliance Police nationale)

––  Mme Sylvie Voitot, déléguée nationale adjointe formation (Alliance Police nationale)

––  Mme Claire Couyoumdjian, secrétaire nationale adjointe des personnels scientifiques Alliance des personnels administratifs, techniques, scientifiques et infirmiers du ministère de l’Intérieur (SNAPATSI)

• Direction des ressources et des compétences de la Police nationale

––  M. Philippe Lutz, inspecteur général de la Police nationale

Audition commune des rapporteurs de la commission des Finances, M. Yann Galut, et de la commission des Lois, M. Yves Goasdoué

• Direction générale de la Police nationale (DGPN)

—  Mme Michèle Kirry, préfète, directrice des ressources et des compétences de la Police nationale

––  M. Régis Castro, conseiller budgétaire au cabinet du directeur général de la Police nationale

––  M. Sébastien Daziano, sous-directeur des finances et du pilotage à la direction des ressources et des compétences à la Police nationale

• Direction générale de la Gendarmerie nationale (DGGN)

––  M. Richard Lizurey, général de corps d’armée, directeur général de la Gendarmerie nationale

—  M. Laurent Bernard, colonel, chef du bureau de la synthèse budgétaire

––  Mme Delphine-Caroline Bessi, commandante

DÉPLACEMENTS EFFECTUÉS

• École nationale supérieure de la police – site de Saint-Cyr-Au-Mont-d’Or

––  M. Luc Presson, inspecteur général, directeur de l’école nationale supérieure de la police

––  M. Philippe Justo, contrôleur général, directeur adjoint, directeur adjoint, directeur de la stratégie, des formations et de la recherche

––  Mme Maria-Julia Aranda, commissaire divisionnaire, chef du département des formations professionnelles des commissaires

––  Mme Laurence Lemoigne, commissaire divisionnaire, adjointe au chef du département des formations professionnelles des commissaires, chargée de la formation initiale

––  M. Jean Bazin, secrétaire général

• École nationale supérieure de la police – site de Cannes–Écluse

––  M. Marc Kechichian, commissaire divisionnaire, chef du site de Cannes-Écluse, chef du département des formations professionnelles des officiers

––  M. Eric Mayen, commissaire de police, adjoint au chef du site

––  Mme Séverine Dillon, secrétaire générale

• Centre régional de formation de Draveil

––  M. Emmanuel Ponsard, commissaire divisionnaire, adjoint au sous-directeur de la SDFDC

––  M. Denys Bansront, commandant de police à l’emploi fonctionnel, adjoint au chef de la division formation des personnels actifs (DFPA) de la SDFDC et chef de l’unité de conception des formations et des évaluations

––  Mme Nathalie Maffrand, commissaire principal, déléguée adjointe à la délégation au recrutement et à la formation (DRF) de Paris - Ile de France

––  Mme Agnès Balancon, commandant à l’emploi fonctionnel, chef du centre de formation (CRF) de Draveil

––  M. Laurent Marcheval, capitaine de police, adjoint au chef du CRF de Draveil et chef de l’unité de formation et du conseil

––  M. Vincent Nezot, brigadier-chef, chef d’unité pédagogique pour les formations initiales de cadets et d’ADS

• École des officiers de la Gendarmerie nationale

––  Mme Isabelle Guion de Méritens, général, directrice de l’école

––  M. Gilles Sorba, colonel, commandant en second de l’école

––  M. Laurent Vidal, colonel, directeur adjoint du centre de recherche de l’école

––  M. Gilles Le Gal, lieutenant–colonel, officier professeur au centre d’enseignement supérieur de la Gendarmerie nationale

• Centre national de formation du Corps de soutien technique et administratif de la Gendarmerie nationale (CNF CSTAGN)

––  M. Hervé Flammant, colonel, commandant du centre

––  M. Jacques Meillard, lieutenant-colonel

• Déplacement à Flers et à Argentan

—  M. Pierre Baillargeat, lieutenant-colonel, commandant du groupement de gendarmerie de l’Orne

––  M. Gilbert Grinstein, directeur départemental de la sécurité publique de l’Orne

––  M. Bernard Kraska, chef de la circonscription de sécurité publique de Flers

––  M. Sébastien Moissy, commandant de la compagnie de gendarmerie d’Argentan–Alençon

––  M. Philippe Tonnelier, commandant, chef de la circonscription de sécurité publique d’Argentan

© Assemblée nationale

1 () Circulaire n° 300 du 16 avril 2012 relative à l’organisation de la direction générale de la Gendarmerie nationale.

2 Sous réserve d’une période de quatre ans de service révolus.

3 () Article. 122-4-1 du code pénal : « N'est pas pénalement responsable le fonctionnaire de la police nationale, le militaire de la Gendarmerie nationale, le militaire déployé sur le territoire national dans le cadre des réquisitions prévues à l'article L. 1321-1 du code de la défense ou l'agent des douanes qui fait un usage absolument nécessaire et strictement proportionné de son arme dans le but exclusif d'empêcher la réitération, dans un temps rapproché, d'un ou plusieurs meurtres ou tentatives de meurtre venant d'être commis, lorsque l'agent a des raisons réelles et objectives d'estimer que cette réitération est probable au regard des informations dont il dispose au moment où il fait usage de son arme. »

4 () Ces plans prévoient :

– plan de lutte anti-terrorisme : 1 156 effectifs supplémentaires sur 2015-2017, dont 366 en 2017 ;

– plan de lutte contre l’immigration clandestine : 530 effectifs supplémentaires en 2016 ;

– pacte de sécurité : 2 731 effectifs supplémentaires en 2016-2017, dont 1 365 en 2017.