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Commission des affaires étrangères

Mardi 30 septembre 2014

Séance de 16 heures 30

Compte rendu n° 92

présidence de Mme Elisabeth Guigou, Présidente

– Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, sur la situation en Irak

Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, sur la situation en Irak.

La séance est ouverte à seize heures trente.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Je remercie M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, d’être à nouveau parmi nous pour cette audition consacrée à la Syrie et à l’Irak, et qui n’est pas ouverte à la presse.

Les terroristes de Daech souhaitent instaurer un État sur les territoires irakien et syrien et étendre leur emprise sur le Liban, la Jordanie et la Palestine. Ce mouvement a lancé une vaste offensive dans les zones kurdes de Syrie. Monsieur le ministre, comment la situation évolue-t-elle sur les plans militaire et humanitaire ? Quel est l’état des forces en présence, qu’il s’agisse de Daech, de l’armée irakienne, des combattants kurdes irakiens et syriens, des milices chiites – qui auraient été mobilisées en Irak – ou encore de l’Armée syrienne libre (ASL), que nous soutenons en lui livrant des armes, et des forces se reconnaissant dans l’opposition syrienne modérée ?

La coalition internationale a commencé à se constituer, sous l’impulsion des États-Unis et de la France, et ses rangs grossissent chaque jour. Sur le plan militaire, les Américains ont entamé le 8 août dernier une campagne de bombardements aériens contre les positions de Daech en Irak. Nous les avons rejoints dans cet effort le 18 septembre avec le lancement de l’opération Chammal. Cette intervention, menée sur le territoire irakien à la demande des autorités de Bagdad, a pour but d’affaiblir Daech, comme l’a indiqué le Président de la République à l’ONU. Nous avons mené deux séries de frappes aériennes, les 19 et 25 septembre : quels objectifs ont été détruits ? Comment ont-ils été choisis ? Comment s’effectue la coordination avec les forces armées kurdes et irakiennes sur le terrain ? Comment garantissons-nous l’autonomie de notre renseignement et de notre action par rapport aux Américains ? L’opération Chammal est-elle appelée à monter en puissance ? Devrions-nous renforcer notre dispositif militaire à Abou Dhabi ?

La Belgique, les Pays-Bas, le Danemark et le Royaume-Uni viennent d’annoncer leur participation aux frappes aériennes en Irak. Cet engagement est-il déjà effectif ? Comment s’opérera le partage des tâches et la coordination, notamment pour la définition des cibles et des frappes ? Doit-on s’attendre à une intensification des bombardements ?

Dans le même temps, les pays du Golfe – Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Bahreïn, Jordanie et Qatar – se sont engagés aux côtés des États-Unis dans une campagne de bombardements aériens contre les bastions de Daech en Syrie, mais aussi contre le Front al-Nosra, affilié à Al-Qaïda.

La France ne prend pas part aux frappes en Syrie – bien que le ministre des affaires étrangères et du développement international ait rappelé aux Nations unies qu’il n’y avait pas d’obstacle juridique à ces offensives – car elle souhaite, comme l’a indiqué le Président de la République, concentrer ses attaques en Irak. Néanmoins, elle livre des armes à l’opposition syrienne modérée, ainsi qu’aux peshmergas kurdes. Pourriez-vous nous faire le point sur ces livraisons : quels armements ont été fournis et en quelle quantité ? Comment nous assurons-nous que ces armes tombent dans les bonnes mains ? Les forces au sol disposent-elles du savoir-faire nécessaire pour les utiliser de manière autonome ? Pourriez-vous également faire le point sur l’appui humanitaire que nous apportons aux populations locales ?

Le soutien apporté par la coalition internationale a-t-il déjà commencé à porter ses fruits ? Vous avez souligné la nécessité d’un engagement inscrit dans la durée : à combien de temps l’estimez-vous ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. J’articulerai mon exposé autour de quatre axes : l’histoire de Daech, le contexte dans lequel ce mouvement évolue en Syrie et en Irak, la nature de notre réponse au sein de l’effort international qui ne cesse de s’amplifier et les modalités de notre action militaire contre Daech.

Daech tire son origine du réseau terroriste qu’Abou Moussab al-Zarqaoui, qui avait prêté allégeance à Al-Qaïda en 2004, dirigeait en Irak sous le nom d’Al-Qaïda en Mésopotamie. Ce groupe concentrait, en lien avec Oussama ben Laden, ses attaques contre les forces américaines et ces dernières, lors d’une frappe ciblée, ont tué Abou Moussab al-Zarqaoui en 2006. En octobre de cette même année, l’État islamique en Irak (EII) est fondé par Al-Qaïda en Mésopotamie en y adjoignant d’autres factions de djihadistes locaux. À partir de 2011 et du départ des Américains, l’EII s’organise en réseau en Irak contre la prédominance chiite et crée une branche syrienne, le Front al-Nosra – ou Jabat al-Nosra.

Une rupture importante se produit en avril 2013, car Ayman al-Zaouahiri, leader d’Al-Qaïda depuis la mort d’Oussama ben Laden, refuse la fusion de l’EII et de Jabhat al-Nosra au sein de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL). Après s’être séparé d’Al-Qaïda, l’EIIL conquiert des territoires en Syrie contre les rebelles, contre l’armée de Bachar el-Assad et contre Al-Qaïda. Le mouvement se radicalise, mais il bénéficie du renoncement américain à frapper le régime de M. el-Assad.

En janvier 2014, allié aux tribus sunnites irakiennes, l’EIIL lance une première attaque contre les forces irakiennes et prend Falloujah – située à 75 kilomètres de Bagdad – ainsi qu’une partie de Ramadi. Dans le même temps, il s’empare de Raqqa en Syrie, qui va devenir son fief. Il prend progressivement l’ascendant sur les autres groupes islamistes de cette région. Le 9 juin dernier, il mène une offensive de grande ampleur contre Mossoul et les abords du Kurdistan autonome, qui lui permet de contrôler le quart nord-ouest de l’Irak, de tenir la frontière avec la Syrie – qui, dans son esprit, n’existe plus – et de consolider ses positions face aux forces irakiennes et aux peshmergas kurdes.

Le 29 juin, Abou Bakr al-Baghdadi, leader incontesté de ce qui s’appelle dorénavant Daech, proclame le retour du califat, ce qu’il faut considérer comme un événement de lourde portée. Etant donné, en effet, que le Calife est le lieutenant de Dieu sur terre, Abou Bakr le premier successeur du prophète, et que le nom d’al-Baghdadi renvoie à celui de la capitale abbasside, tous les croyants sont censés prêter respect et allégeance à Abou Bakr al-Baghdadi, dont le nom comporte une référence politique et territoriale qu’Oussama ben Laden, qui se prévalait uniquement du titre d’émir, n’avait jamais utilisée. Nous récusons pour notre part la référence au califat – employée comme instrument de mobilisation – et préférons l’acronyme Daech, qui a semble-t-il en arabe quelque chose de péjoratif, à l’appellation d’État islamique, car nous ne reconnaissons pas un tel État et ne pouvons accepter que ces terroristes usurpent le nom de l’islam.

Ce groupe terroriste déploie des moyens militaires d’une nouvelle ampleur et une violence sans frein, tout en développant une prétention territoriale étendue et hégémonique. Une seconde génération de djihadistes, postérieure à celle d’Oussama ben Laden et composée d’extrémistes radicaux, aguerris par les combats menés en Irak depuis 2003 et en Syrie depuis 2011, anime ce mouvement.

Daech a tendance à monter en puissance, notamment en raison du montant de la solde versée aux combattants et du soutien des tribus sunnites irakiennes, que le gouvernement de M. al-Maliki a tenues à l’écart du pouvoir, ainsi que d’anciens partisans de Saddam Hussein. L’organisation dispose d’équipements modernes dont elle sait se servir.

L’organisation, forte de ses succès militaires, attire de nombreux combattants qui souhaitent contribuer à la restauration du califat et qui reçoivent une « formation » susceptible d’être mise en pratique une fois de retour dans leur pays d’origine.

Daech se montre capable de conduire des opérations de terrorisme classique, de guerre conventionnelle, de guérilla urbaine et même de guerre informatique. Cette force peut en outre mener des actions de communication et de médiatisation sophistiquées et performantes.

Daech se situe aujourd’hui au-devant de la scène, dans le cadre d’une menace terroriste d’inspiration djihadiste et d’ampleur mondiale, qui dessine un arc allant du Waziristan au golfe de Guinée, partout où les États sont faibles. Ces foyers multiples font ainsi croître le risque d’actions contre nos intérêts et contre notre territoire, et nous devons lutter contre la jonction de ces différentes activités terroristes.

Les Soldats du Califat en terre algérienne, auteurs de l’assassinat d’Hervé Gourdel, ont récemment rompu avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ; ils sont dirigés par un ressortissant algérien, Abdelmalek Gouri, considéré jusqu’alors par nos services comme l’un des bras droits de l’émir Drouk-dal qui coordonne l’action d’AQMI depuis le lancement de l’opération au Mali. Cela montre l’avancée des mouvements de rapprochement et de connexion que nous redoutons. Les autorités marocaines et espagnoles ont d’ailleurs procédé au démantèlement d’une cellule terroriste chargée de recruter des combattants pour Daech.

Une forme de « labellisation » du sordide se développe, l’exemple le plus frappant étant ces décapitations auxquelles procède Daech et qui ne faisaient pas partie du mode opératoire d’AQMI.

En Syrie, le rapport de forces militaire ne permet à aucune des parties de l’emporter. Le régime, appuyé par le Hezbollah et par des milices chiites irakiennes, reste soutenu par ses alliés russe et iranien ; il contrôle la Syrie « utile », à savoir les villes de Damas, Deraa, Homs, le pays alaouite, et menace Alep. L’armée de Bachar el-Assad est bien moins présente ailleurs, même si elle essaie de contrôler les villes. Face à elle, l’opposition syrienne, dite modérée, s’avère fragmentée : elle se trouve en effet composée de l’ASL du Front révolutionnaire syrien et du Front islamique, ces deux derniers mouvements n’étant pas structurés. Le nouveau président de la coalition, M. Hadi al-Bara, tente de créer une organisation commune en instaurant un commandement militaire unique. Je n’inclus évidemment pas Jabhat al-Nosra dans les rangs de cette coalition.

Dans ce contexte, Daech a rapatrié d’Irak des équipements militaires de qualité très supérieure à ceux détenus par les ennemis du président el-Assad, ce qui lui permet de consolider ses positions à l’est du pays – notamment à Deir ez-Zor –, d’éliminer la frontière, de renforcer sa mainmise sur la zone de Raqqa et de menacer Alep. Ces derniers jours, Daech s’est déployé dans le nord du pays, près d’Ayn al-Arab – Kobané en kurde –, ce qui a provoqué l’exode de 100 000 Kurdes vers la Turquie, exode qui pose des problèmes aux autorités de ce pays.

La France aide l’ASL en livrant du matériel d’armement à certains katibat qu’elle connaît bien, afin de s’assurer que ces équipements ne sont pas récupérés par d’autres groupes.

En Irak, les forces de sécurité irakiennes (FSI) restent l’acteur majeur et sont censées rassembler un million d’hommes ; en fait, ce chiffre reste théorique, même si l’armée gouvernementale bénéficie du soutien de milices chiites qui représentent une part importante de la capacité offensive terrestre de l’État. Ces forces sont mal organisées, mal utilisées et peu aguerries, comme leur fuite de la province de Ninive à l’arrivée de Daech l’a montré. Elles cherchent à sanctuariser la capitale et les zones chiites, et connaissent un redressement depuis le début des frappes américaines en août dernier. Le nouveau premier ministre, M. Haïder al-Abadi, qui a remplacé M. al-Maliki, veut reconstituer et réorganiser l’armée irakienne, et souhaite unir les différentes communautés – kurdes, chrétiennes, yézidies, sunnites et chiites – comme le prouve la composition de son gouvernement. Sa détermination à inscrire cette action dans le long terme a impressionné le Président de la République et moi-même lorsque nous lui avons rendu visite le 12 septembre dernier.

Les peshmergas, soldats du Kurdistan, héritiers de divers mouvements de résistance kurde, collaborent avec les autorités irakiennes. Aguerris, ils conduisent en ce moment des attaques, qui semblent efficaces, dans le nord du pays.

Des forces sunnites de résistance à Daech se sont constituées, enjeu capital pour la suite des événements, car l’ensemble des communautés doivent être associées aux solutions militaires et politique du conflit. Ces milices doivent se coordonner avec le gouvernement irakien, ce rapprochement constituant un test des intentions de M. al-Abadi, même si l’on peut faire preuve d’optimisme et penser qu’il traduira ses engagements en actes.

La progression de Daech est contenue, mais la ligne de front s’étend sur plus de 1 000 kilomètres. Les zones de Falloujah, de Salaheddine, de Tikrit et du sud de Bagdad sont les plus disputées, mais Daech ne semble plus en mesure de prendre Bagdad.

Daech déploie des méthodes militaires adaptées à la nouvelle situation, en conduisant des actions asymétriques au moyen d’engins explosifs improvisés – qui ont fait des victimes dans les rangs des FSI et des peshmergas – et de véhicules-suicide. Par ailleurs, ses membres tentent de se fondre dans la population pour contrarier les frappes aériennes de la coalition internationale.

Daech s’avère un acteur hors norme, du fait de la violence de son action, de sa puissance et de sa détermination ; il sait jouer de l’effet de surprise stratégique et dispose d’une forte capacité d’influence et de recrutement. Des combattants étrangers rejoignent en permanence ses rangs, attirés notamment par le succès de l’organisation ; ce phénomène est générateur de risques à long terme pour de nombreux pays, y compris la Russie. Il convient de briser la dynamique de victoires de Daech, mais l’action militaire ne suffira pas.

La communauté internationale a apporté une vaste aide humanitaire à la population irakienne, dont près de deux millions de membres ont été déplacés, principalement vers le Kurdistan. Un fort consensus s’est dessiné aux Nations unies autour de la résolution 2170 du 15 août dernier, de la déclaration du 19 septembre du président du Conseil de sécurité et de la résolution 2178 du 27 septembre. Sur le plan économique, nous tentons d’assécher les sources de financement de Daech ; Bahreïn organisera prochainement une conférence internationale pour lutter contre les flux financiers occultes dont il bénéficie, notamment ceux provenant du pétrole.

Les États-Unis ont pris l’initiative de frappes dès le mois d’août, la nuit du 22 au 23 septembre ayant été la plus intense en la matière. Les pays du Conseil de coopération des États arabes du Golfe – Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Qatar, Bahreïn et Koweït – et la Jordanie ont rejoint la coalition et lancé des offensives dans le nord de la Syrie contre les infrastructures pétrolières et gazières, afin de tarir le financement de Daech. La Belgique, les Pays-Bas, le Danemark, le Royaume-Uni et l’Australie font également partie de la coalition. À la suite de la libération des otages turcs de Mossoul, le président de la République de Turquie, M. Recep Tayyip Erdoğan, a annoncé que son pays intégrerait la coalition, un projet de mandat devant être discuté au parlement d’Ankara le 2 octobre.

La France a agi dans le domaine humanitaire en effectuant six livraisons, d’un total d’une centaine de tonnes, depuis le milieu du mois d’août. Par ailleurs, nous avons renforcé, en lien avec les autorités irakiennes, notre coopération militaire avec les peshmergas kurdes, à qui nous fournissons des armes. Nous ne déploierons pas de troupes au sol.

Sur le plan politique, la France a organisé la conférence internationale de Paris, coprésidée par les présidents François Hollande et Fouad Massoum, qui a contribué à structurer la communauté internationale.

Dans le domaine militaire, nous avons engagé l’opération Chammal, demandée officiellement par les autorités irakiennes en vertu de l’article 51 de la charte des Nations unies, et dont le but vise à affaiblir Daech pour permettre aux FSI et aux peshmergas de restaurer leur contrôle du territoire irakien. Il faudra du temps pour atteindre cet objectif, car une cohorte d’avions de chasse ne règlera pas le problème en quelques jours, mais nous fournissons un appui aérien aux troupes irakiennes pour les aider à reconquérir leur pays. Nous avons d’abord dû conduire des opérations de renseignement – nous n’étions en effet plus présents en Irak depuis la première guerre du Golfe – afin de posséder une autonomie de décision pour les frappes ; ensuite, nous avons renforcé notre potentiel opérationnel et nous nous sommes appuyés sur nos forces stationnées à la base d’Al Dhafra aux Émirats arabes unis. Il existe deux types de frappes : les frappes d’opportunité, pour lesquelles le pays de la coalition prenant son tour peut décider d’une frappe qui se présente au cours de sa mission, et les frappes délibérées, qui répondent à une identification préalable de cibles lourdes – dépôts logistiques ou centres de commandement. Nous menons ces frappes avec le souci permanent d’éviter les dégâts collatéraux.

La coalition n’intervient à ce stade qu’en territoire irakien et en réponse à la sollicitation des autorités irakiennes.

Je me rendrai après-demain aux États-Unis pour évoquer ces questions avec mon homologue, M. Chuck Hagel, et pour m’entretenir aux Nations Unies de notre engagement au Mali et en République Centrafricaine, pays où la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA) sont en train de prendre notre relais.

M. Pouria Amirshahi. La doctrine de la France, reposant sur le diptyque de la sécurité et du développement, boîte car le pilier sécuritaire prime, les Nations unies, nos alliés et nous-même n’ayant pas engagé suffisamment de moyens pour la reconstruction d’États fragiles, proies de ces groupes terroristes pour le malheur des populations.

L’objectif ne peut être que d’éradiquer Daech, et non pas simplement de limiter son influence ; or, depuis quinze à vingt ans, nous luttons contre de tels groupes – comme les talibans en Afghanistan – sans succès. Pourquoi réussirions-nous mieux contre Daech ?

Dans cette galaxie de groupes islamistes radicalisés, certains se trouvent en concurrence avec Daech tout en étant animés d’intentions également détestables : comment pouvons-nous nous assurer que des membres de la coalition internationale ne les alimentent pas ?

L’Arabie saoudite et certains de ses alliés arabes comptent-ils s’impliquer dans la reconstruction de l’Irak, et ne pas se contenter de lutter contre un Califat qui menace leur autorité politique et religieuse ?

Des discussions politiques portant sur les revendications territoriales et non sur la simple demande d’autonomie des Kurdes irakiens – qui ont déjà obtenu des avancées dans les années précédentes – ont-elles lieu, ou sont-elles reportées à la fin du conflit ?

S’appuyer sur des milices communautaires – sunnites principalement – s’avère peut-être nécessaire en temps de guerre, mais ne nourrit-on pas ainsi le morcellement des autorités qui rendra encore plus difficile le recouvrement par l’État irakien de sa souveraineté ?

Comment traite-t-on la déstabilisation des États de la région induite par le déplacement de réfugiés qui se comptent par millions ? Les conséquences de cette situation seront terribles, car ces personnes, outre leur appauvrissement et leurs difficultés d’accès aux soins, constituent des cibles potentielles.

Enfin, quel est le coût des opérations ?

M. Jean-Luc Bleunven. Il y a une autre guerre, économique celle-là : a-t-on des informations sur la capacité de Daech à extraire et à acheminer le pétrole ? Le cas échéant, est-on en mesure de les en empêcher ? Peut-on faire pression sur la Turquie, qui apparaît comme le maillon faible à cet égard ?

M. Alain Marsaud. Mon opposition complète à notre intervention en Irak et en Syrie est connue : je n’y reviens pas.

L’opération d’armement du Liban, via un fonds d’investissement saoudien doté de 3 milliards de dollars, semble bloquée, pour des raisons qui tiendraient à des pressions d’Israël, inquiet de voir des armes tomber aux mains du Hezbollah. Y-a-t-il néanmoins une lueur d’espoir ? Le Liban, ne l’oublions pas, fait face à une offensive de l’État islamique à sa frontière, notamment dans la plaine de la Bekaa.

M. Gérard Charasse. Des Kurdes de Kobané manifestent actuellement près de notre assemblée pour se plaindre du désintérêt dont ils sont victimes, et réclament des armes pour se défendre contre Daech – ce que l’on peut comprendre étant donné leurs relations avec la Turquie. Que pouvez-vous leur répondre ?

Par ailleurs, où en sont nos interventions au Mali et en Centrafrique ?

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Je comprends, mon cher collègue, que vous souhaitiez profiter de la présence du ministre pour élargir le champ de nos échanges, mais je rappelle que la présente réunion est consacrée à la situation en Irak.

M. Michel Vauzelle. À l’époque du président Mitterrand, les critiques étaient les mêmes qu’aujourd’hui : que la France s’engage seule, on la jugeait isolée ; qu’elle le fasse au côté des États-Unis, ses dirigeants s’exposaient alors au reproche de trahir, par suivisme, le message du général de Gaulle.

Notre pays, à travers son intervention en Irak et peut-être en Syrie, est à la hauteur de ce qu’on attend de lui, à l’intérieur et en dehors de ses frontières, au Sahel comme en Irak. Les précautions qui s’imposent sont prises avec le plan Vigipirate ; reste qu’en Provence-Alpes-Côte d’Azur cohabitent une communauté juive et des milliers de Français d’origine maghrébine ou de confession musulmane : à cet égard, une politique sociale et ethnique de long terme, fondée sur la continuité de l’espace qui s’étend jusqu’au Maghreb et aux régions de la Méditerranée, n’est-elle pas également nécessaire, y compris sur les questions de défense ? Au sein d’une même famille dont une partie habite à Alger et l’autre à Marseille, des messages sont transmis directement depuis l’Irak – en passant par Gaza, Jérusalem et Tunis – jusqu’en région parisienne. La nécessité d’une politique assurant la coexistence des communautés n’est peut-être pas assez soulignée auprès des Français, qui nourrissent quelques craintes à l’égard d’un environnement parfois jugé dangereux.

M. Meyer Habib. La France, avec l’opération Chammal, a pris la bonne décision. Face au traumatisme que représente Daech, la tentation existe de s’appuyer sur ses ennemis jurés que sont la Syrie, l’Iran et le Hezbollah. La question posée lors d’une récente émission sur France 24, à laquelle je participais avec notre ancien ambassadeur en Iran, était celle de l’intégration de ce pays dans la coalition. Où en serions-nous si Daech disposait d’armes non conventionnelles ou même de l’arme nucléaire ? Or l’Iran, il faut le rappeler, est un État islamiste et terroriste, directement impliqué, par l’intermédiaire de sa branche armée, le Hezbollah, dans l’attentat du Drakkar, qui avait tué plusieurs de nos soldats, ainsi que dans l’assassinat, en 1981, de notre ambassadeur Louis Delamare. Depuis des années, ce même pays nous roule dans la farine, passez-moi l’expression, dans sa quête de l’arme nucléaire.

Mon intime conviction est que le terrorisme s’apparente à un arbre ramifié en mouvances diverses : Daech, bien entendu, mais aussi le Hezbollah, le Hamas, Boko Haram, Al-Qaïda et bien d’autres. Pris de court, nous n’avons pas de stratégie globale et c’est bien ce qui m’inquiète : la guerre est à nos portes, on l’a vu il y a deux ans, avec l’assassinat de plusieurs de nos femmes et enfants, à Paris et à Toulouse. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner l’assurance que cette guerre, nous ne la mènerons pas au côté d’un État tel que l’Iran ? Par ailleurs, comment s’engager dans une guerre en excluant par principe l’intervention de forces terrestres ? Enfin, comment être sûrs que nous n’aurons pas à intervenir en Syrie ?

Mme Valérie Fourneyron. Comment s’organise concrètement la coordination entre les différents pays de la coalition, en particulier pour les frappes ?

Il y a un nombre significatif de Français parmi les troupes de Daech ; la plupart d’entre eux, on le sait, sont passés par la Turquie, pays avec lequel la coordination a récemment posé quelques problèmes. On sait aussi que des enjeux pétroliers se posent. Enfin, la position adoptée par la Turquie suite à la libération de ses otages soulève quelques interrogations. Comment mieux coordonner nos relations avec ce pays ?

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Nous pourrons interroger M. Cazeneuve à ce sujet lors de son audition, le 8 octobre prochain.

M. Jean-Claude Guibal. On a évoqué les frappes aériennes et l’action politique et diplomatique. N’oublie-t-on pas l’éventualité d’une intervention au sol ? Les peshmergas et l’opposition syrienne pourraient-ils assumer cette tâche ?

La Turquie ne s’inquiète-t-elle pas des mouvements de populations kurdes et d’un risque de contagion, sur son territoire, des droits qui leur sont conférés en Irak ?

Enfin, quel est le rôle des officiers de l’ancien état-major de Saddam Hussein au sein de Daech ?

M. Philippe Baumel. Quid de l’articulation entre, d’une part, les deux opérations menées au Sahel et en Centrafrique et, de l’autre, l’opération Chammal ?

Je m’étonne de la faiblesse des moyens engagés en Irak – six avions de chasse, un avion espion et un avion ravitailleur – pour des frappes de haute visibilité, dont l’exactitude peut laisser sceptique. La France, qui désire à juste titre rester maîtresse de ses choix opérationnels, pèse-t-elle vraiment au sein d’une constellation militaire aussi hétéroclite ?

Malheureusement, la liste des pays où agissent des groupes islamistes ne cesse de s’allonger : elle comprend désormais la Libye, la Tunisie, le Liban, le Nigéria et même le Cameroun, que l’on regardait jusqu’alors comme un pôle de stabilité. Comment rétablir l’ordre et la sécurité dans ces pays ? S’agissant enfin du Moyen-Orient, jusqu’où nos Rafale iront-ils ? S’arrêteront-ils à la frontière syrienne, ce qui aurait quelque chose d’ubuesque au regard de nos objectifs quant à l’État islamique ?

M. François Loncle. Les exemples du Mali et de la Centrafrique le montrent, une intervention militaire n’a aucune chance de succès sans une solution politique, dont l’absence a d’ailleurs plongé la Libye dans le chaos que l’on sait. Une telle solution est une urgence ; elle doit être recherchée avec détermination, non seulement sur le terrain, mais aussi avec les pays engagés militairement.

Depuis dix ans, la politique syrienne de la France n’est qu’une accumulation d’erreurs et de contradictions. Il y a deux ans, on annonçait le départ de Bachar el-Assad sous huitaine ; l’an dernier, la France se déclarait prête à frapper ; aujourd’hui, elle refuse de suivre les États-Unis dans cette option. Un excellent ancien ministre des affaires étrangères – Hubert Védrine pour ne pas le nommer – déclarait récemment : « Il me semble que la France continue d’espérer la chute du régime et veut donc aider l’opposition démocratique, qui est très faible ! » – on peut même dire fantomatique. « Notre position », poursuivait M. Védrine, « est honorable sur le plan des principes, mais elle risque de laisser aux États-Unis la détermination de la politique future vis-à-vis de Damas en surmontant cette contradiction. Peut-être même avec les Russes ? » Bref, je ne comprends pas cette politique, et je ne suis pas le seul, à gauche comme à droite.

Ma dernière observation est un peu désespérée. L’engagement français, pour le moins salutaire et honorable, se fait sans l’Europe. L’Allemagne, dont nous accueillerons dans deux jours le ministre des affaires étrangères, nous donne chaque jour des leçons d’économie, mais sa capacité, si j’ose dire, à l’inaction et au refus du moindre effort financier devient tragique. Elle nous laisse agir seuls, et en tire évidemment tous les avantages.

M. Jean-Paul Bacquet. Ma question sera simple, voire simpliste. L’armée de Daech, dont vous avez souligné les qualités quant à l’équipement, à la formation et à l’encadrement, est-elle née par génération spontanée ? Sinon, le renseignement n’avait-il rien vu ?

Mme Marie-Louise Fort. Quelles précautions la France prend-elle pour livrer des armes à l’opposition syrienne, dont certains membres ne paraissent guère plus fréquentables que le régime en place ? Ne faudrait-il pas hiérarchiser les urgences ? L’un de nos compatriotes vient d’être décapité dans des conditions épouvantables en Algérie, et l’on sait que des djihadistes opèrent aussi au Maroc. Quel élan donner à nos relations avec ces pays afin de protéger nos ressortissants ? Enfin, comment le monde civilisé peut-il répondre au marketing de l’horreur qui sévit sur les réseaux sociaux ? Ne devons-nous pas aussi mener la guerre de l’image ? Les médias français, rappelons-le, n’ont pas diffusé les images de la décapitation de notre compatriote, ce qui est un progrès. Mais beaucoup reste à faire.

M. Gwenegan Bui. Ya-t-il une volonté, notamment de la part de la France et des États-Unis, d’élargir la coalition aux pays du Sud-Est ? En Indonésie, où Jean-Jacques Guillet et moi venons de nous rendre, l’opinion publique et le Gouvernement suivent la situation de très près car le problème de l’islamisme se pose aussi dans la région.

M. le ministre. Alors qu’Al-Qaïda menait des actions ponctuelles, Daech, c’est sa nouveauté, entend occuper un territoire et l’étendre jusqu’à la Jordanie et au Liban, reconstituant le grand Califat abbasside ; c’est là un changement d’échelle, du point de vue de la détermination et des moyens comme de la visée stratégique. L’Arabie saoudite ne peut évidemment accepter cette volonté expansionniste, et s’inquiète également de la présence de certains de ses ressortissants auprès de Daech. La rapidité des succès de ce mouvement s’explique, monsieur Bacquet, par l’engagement à ses côtés de groupes immédiatement opérationnels, même si l’on était loin d’imaginer que l’armée irakienne, les Kurdes mis à part, opposerait une résistance aussi faible.

Notre engagement répond, non à celui des États-Unis, mais à une demande officielle des autorités irakiennes : il est justifié par notre statut de membre permanent du Conseil de sécurité, par la nécessité de protéger des pays amis et par les déclarations mêmes de Daech, qui a identifié la France comme l’un de ses principaux adversaires et compte en son sein plusieurs de nos compatriotes, désireux de venir porter le terrorisme sur notre sol. Les autres pays de la coalition, en tout cas occidentaux, ont accédé à la demande des autorités irakiennes pour des raisons proches des nôtres.

Cela n’aurait cependant pas été possible, monsieur Loncle, sans le nouvel accord politique mis en œuvre par M. al-Abadi. La solution politique, nécessairement inclusive, prendra la forme que choisiront les Irakiens eux-mêmes. Ce pourrait être, par exemple, une fédération entre Chiites, Sunnites, Kurdes et chrétiens, puisque les territoires sont, par le fait, liés à l’appartenance ethnique ou religieuse. La France est prête à apporter son aide pour cette solution, qui passe aussi par la formation d’une armée elle-même représentative de chacune des composantes. En Syrie, le départ de Bachar el-Assad est un préalable, même si je partage vos interrogations sur l’opposition et sa faiblesse : c’est aussi la responsabilité de la communauté internationale que de lui donner la cohérence qu’elle cherche depuis deux ans.

Contrairement à ce que j’ai pu lire ici ou là, on ne s’appuiera ni sur Bachar el-Assad, ni sur l’Iran pour combattre Daech, monsieur Habib. Entre un terrorisme sanguinaire et une dictature sanguinaire, on ne choisit pas : telle est la position du Président de la République. Si l’Iran souhaite apporter son aide à l’Irak, en plus de ses combattants présents dans la région de Bassora, qu’il le fasse – je rappelle au passage que le Président irakien, M. Massoum, est un Kurde, et que le Premier ministre, M. al-Abadi, est d’origine chiite –, mais sans imaginer que c’est là un moyen de régler la question nucléaire.

Tous les volontaires sont les bienvenus au sein de la coalition, monsieur Bui ; il n’est d’ailleurs pas exclu que l’Indonésie ait intérêt à la rejoindre, à l’instar de l’Australie, dont certains ressortissants sont venus grossir les troupes de Daech. Sa participation s’explique donc, outre la solidarité avec l’Occident, par des préoccupations pour sa sécurité ; c’est aussi, on ne le répétera jamais assez, ce qui justifie la nôtre au premier chef.

Quant à la coordination, Madame Fourneyron, elle est assurée à Tampa pour la stratégie générale, à El-Oudeïd, au Qatar, pour les moyens d’action aérienne, à Bahreïn pour les moyens d’action navale et au Koweït pour les moyens d’action terrestre. Elle réunit des États et ne s’inscrit en rien dans le cadre de l’OTAN ; si elle s’opère dans des instances sous responsabilité américaine, nos officiers y prennent toute leur part et nous définissons nos propres cibles.

Six Rafale sont aujourd’hui engagés, au même titre que huit avions de chasse australiens, six britanniques, huit hollandais, six belges et sept danois : cela compose un ensemble suffisant au regard de la mission, non de destruction d’un territoire, mais d’appui aérien à l’armée irakienne. S’agissant de l’Allemagne, elle a livré, pour la première fois depuis l’après-guerre, des armes aux combattants, notamment kurdes, qu’elle contribue aussi à former.

Lors du déplacement du Président de la République à Riyad l’an dernier, entre Noël et le jour de l’An, monsieur Marsaud, ce n’est pas Daech qui inquiétait le plus les autorités saoudiennes et une partie des libanaises. Aux termes de l’accord tripartite qui fut alors conclu, l’Arabie saoudite devait financer le dispositif, la France assurer des livraisons de matériels et l’armée libanaise en faire usage. Cela se fait sans l’opposition d’Israël. La liste ayant été officiellement validée par les trois parties, il ne manque plus que la signature financière de l’Arabie saoudite.

M. Alain Marsaud. D’où vient le blocage ?

M. le ministre. J’aimerais le savoir... La question, en tout cas, agite la presse libanaise. De notre point de vue, les choses sont claires : l’accord doit s’appliquer, même si certains semblent tentés de revenir sur tel ou tel de ses aspects. Quoi qu’il en soit, la signature des Saoudiens devrait intervenir rapidement.

M. Alain Marsaud. Peut-on espérer des livraisons avant la fin de l’année ?

M. le ministre. Sans doute pas en grande quantité : seule une partie des matériels est déjà disponible ; les autres devront être fabriqués.

L’envoi de troupes au sol, monsieur Guibal, n’est pas dans les objectifs de la coalition, comme l’ont réaffirmé ses membres en se réunissant en marge du sommet de l’OTAN. Notre mission est d’aider les forces locales dans la reconquête du territoire. Nous ne sommes au demeurant pas responsables, cela va sans dire, de la situation actuelle : elle tient à la mauvaise gestion des suites de l’intervention américaine, à commencer par la liquidation de l’armée irakienne. L’ancien Premier ministre, M. al-Maliki, avait de surcroît fait preuve de sectarisme en excluant du pouvoir certaines composantes de la nation irakienne. Le but, à ce stade, est de former les forces du pays, en associant toutes les composantes ethniques et religieuses, afin de les épauler dans une reconquête qui, à terme, passe par les batailles de Mossoul et de Falloujah. Cela prendra sans doute plusieurs mois ; mais, je le répète, la coalition s’est donné les moyens d’atteindre ses objectifs, avec des frappes occidentales en Irak et arabes en Syrie.

La Turquie a pris la décision d’intégrer la coalition et en tire les conclusions qui s’imposent. Quant au Qatar, sa position diplomatique a connu une inflexion avec l’arrivée au pouvoir du nouvel émir. Ce pays est partie prenante de la coalition, et a mis plusieurs avions à sa disposition.

Les capacités d’action de la coalition se trouveront bien entendu renforcées par la participation de la Turquie, même s’il faut attendre le vote de son Parlement. Les relations entre le président Erdoğan et les Kurdes de son pays ont connu des hauts et des bas ; au reste, la position des Kurdes de Syrie n’est pas non plus sans conséquences. Ceux de Kobané, monsieur Charasse, ont reçu le soutien aérien de forces américaines et arabes, même si beaucoup d’entre eux ont dû se réfugier en Turquie.

Le Kurdistan irakien, dont le Gouvernement régional est présidé par M. Barzani, s’est acquis une large autonomie ; lors de notre déplacement à Erbil, le 12 septembre, il nous a en tout cas déclaré ne pas solliciter l’indépendance. Les Kurdes se divisent en quatre formations ayant chacune des aspirations propres, et deux partis se partagent le contrôle du Kurdistan politiquement structuré, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK).

Je suis convaincu, monsieur Vauzelle et madame Fort, du rôle crucial de l’arme de la communication, qui relève moins de ma compétence propre que de celle du Gouvernement tout entier. Nous devons être en mesure de répondre à la multiplication des provocations sur internet. Cette guerre, les communautés doivent aussi y répondre, et je me réjouis, de ce point de vue, des manifestations de la communauté musulmane après l’assassinat de notre compatriote en Algérie.

La sécurité, à l’intérieur comme à l’extérieur, ne se marchande pas : il faut effectivement le dire à l’ensemble de nos compatriotes, monsieur Vauzelle. La cohésion nationale est la meilleure réponse ; elle implique un travail de proximité qui n’est pas de la responsabilité directe du ministre de la défense, même si je reste préoccupé par les possibles jonctions entre les conflits. Il ne vous a pas échappé, par exemple, que la proclamation du Califat par Abou Bakr al-Baghdadi a été suivie par celle de Boko Haram dans le Nord du Nigéria et le Nord du Cameroun, frontalier avec la Centrafrique, où un vide sécuritaire serait dès lors gros de tous les risques possibles, et ce jusqu’à la Corne de l’Afrique, qui abrite les shebab. Il est donc impératif de stopper la progression de Daech en Irak et d’épauler, grâce à notre appui aérien, le gouvernement irakien dans la reconquête du territoire.

Quant au surcoût, il reste aujourd’hui limité au matériel de frappe, compte tenu du prépositionnement de nos avions de chasse à Al-Dhafra.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Monsieur le ministre, je vous remercie. La guerre des images sera bien entendu un sujet à évoquer avec M. Cazeneuve mercredi prochain.

La séance est levée à dix-huit heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mardi 30 septembre 2014 à 16 h 30

Présents. - M. Pouria Amirshahi, M. Jean-Paul Bacquet, M. Christian Bataille, M. Philippe Baumel, M. Jean-Luc Bleunven, M. Gwenegan Bui, M. Gérard Charasse, M. Guy-Michel Chauveau, M. Michel Destot, Mme Marie-Louise Fort, Mme Valérie Fourneyron, M. Jean-Claude Guibal, Mme Élisabeth Guigou, M. Meyer Habib, M. François Loncle, M. Noël Mamère, M. Alain Marsaud, M. Michel Vauzelle

Excusés. - Mme Danielle Auroi, M. Jean-Claude Buisine, Mme Seybah Dagoma, M. Serge Janquin, M. Lionnel Luca, Mme Marion Maréchal-Le Pen, M. Jean-René Marsac, M. François Rochebloine, Mme Odile Saugues