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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mardi 15 octobre 2013

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n° 12

Présidence de Mme Patricia Adam, présidente

— Audition de M. Jacques Feytis, directeur des ressources humaines du ministère de la Défense, sur le projet de loi de programmation militaire et le projet de loi de finances pour 2014.

La séance est ouverte à dix-sept heures quinze.

Mme la présidente Patricia Adam. Nous accueillons aujourd’hui M. Jacques Feytis, directeur des ressources humaines (DRH) du ministère de la Défense, pour l’entendre sur le projet de loi de programmation militaire (LPM) et le projet de loi de finances (PLF) pour 2014.

M. Jacques Feytis, directeur des ressources humaines du ministère de la Défense. Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale élabore la stratégie de défense de la France, laquelle définit un modèle d’armée qui doit remplir les contrats opérationnels et dont découle un modèle de ressources humaines.

Le projet de LPM traduit les orientations définies dans un contexte budgétaire contraint. Notre travail consiste à poursuivre l’effort de maîtrise des dépenses publiques demandé à la nation, dans le respect des contrats opérationnels et du modèle d’armée.

Lors de l’élaboration de la précédente LPM, le ministère avait lancé des audits techniques dans l’ensemble du ministère : ces analyses fonctionnelles avaient mis en évidence des postes susceptibles d’être « rendus ». Cette analyse a abouti à définir une déflation de 54 000 postes, nombre qui se révèle insuffisant compte tenu des nouvelles contraintes budgétaires qui pèsent sur nous et de l’effort demandé au ministère pour contribuer au redressement des finances publiques.

Ce n’est pas cette approche qui a été retenue pour la future LPM. La capacité que le pays pourrait consacrer à la défense et le modèle d’armée ont été déterminés en conseil de défense, et c’est sur cette base qu’a été fixé le nombre des emplois et effectifs que nous devrons atteindre en fin de LPM. Après cinq années d’effort il s’avérait nécessaire de commencer par une étape de dialogue et d’échange avant de commencer à lancer des analyses fonctionnelles. Sans doute avons-nous un peu tardé pour lancer des analyses fonctionnelles – elles aboutiront à la fin de l’année –, mais cette nouvelle méthode de travail a permis d’apaiser les tensions au sein du ministère. Il était important de ne pas se précipiter dans la construction technique de la réforme. Par exemple, nous avons pu, dès les travaux du Livre blanc, associer les organisations syndicales à la discussion sur les évolutions nécessaires.

J’aborderai le volet ressources humaines de la nouvelle LPM sous l’angle de quatre enjeux majeurs : la conduite d’une déflation, assortie d’une démarche de dépyramidage ; les restructurations nécessaires à la déflation, qui supposent un accompagnement social ; une nouvelle gouvernance pour les ressources humaines, avec un objectif de maîtrise de la masse salariale ; et le nécessaire équilibre entre personnels militaires et personnels civils.

Du point de vue des ressources humaines, la mesure la plus visible de la LPM est la déflation des effectifs. Cette déflation devra être conduite en même temps qu’une manœuvre de suppression de postes qui relève plus particulièrement des employeurs. Pour la LPM 2014-2019, la déflation est de 23 500 postes, auxquels s’ajoutent les 10 175 postes restants de l’exercice précédent, soit un total de 33 675 postes et effectifs, pour un effectif global du ministère de 235 900 personnes en 2019.

Comme pour la précédente LPM, nous souhaitons préserver autant que possible les forces opérationnelles. Par conséquent, l’effort portera sur l’environnement des forces, périmètre sur lequel se pencheront l’essentiel des analyses fonctionnelles. Sur la durée de la LPM, les forces opérationnelles contribueront à l’effort à hauteur de 8 000 emplois ; le soutien, les structures organiques et l’environnement contribueront à hauteur de 14 500 emplois ; et les forces prépositionnées et l’outre-mer contribueront à hauteur de 1 000 emplois. La répartition entre armées sera connue à la fin de l’année, lorsque les analyses fonctionnelles auront abouti. Chaque armée sera concernée au titre des forces et de l’environnement. L’administration et la Direction générale de l’armement (DGA) contribueront au titre de l’environnement.

Cette déflation s’accompagne d’un objectif ambitieux, le dépyramidage. En 2008, les officiers, tous corps confondus – officiers d’encadrement, mais aussi officiers ingénieurs de l’armement ou officiers médecins –, représentaient moins de 15,5 % de l’effectif militaire ; ils sont aujourd’hui 16,75 %. Les causes de ce pyramidage ont été décrites et expliquées dans un rapport de l’inspection générale des finances et du contrôle général des armées il s’explique essentiellement par l’envoi de nombreux officiers et sous-officiers à l’OTAN, au titre des nouvelles fonctions que la France souhaitait y remplir, mais aussi par la régulation des effectifs qui s’est effectuée de manière plus importante sur le bas de la pyramide puisqu’il s’agit d’une population servant essentiellement sous contrat ainsi que par l’allongement des limites d’âge introduit par la loi sur les retraites.

D’après l’objectif que nous ont assigné le ministre et son cabinet, nous devons parvenir en fin de LPM à un taux d’encadrement de 16 % – soit le taux constaté à la fin de l’année 2010. Les officiers sont ainsi la cible principale de la déflation, avec une diminution en valeur absolue de 5 778 postes – 1 000 en 2014, 1 050 en 2015 et 2016, 1100 en 2017 et 2018, et enfin 478 en 2019. Pour tenir cet objectif ambitieux, nous appliquerons une méthode d’analyse fonctionnelle, armée par armée ; à cet effet, une trentaine de chantiers sont d’ores et déjà animés par le secrétaire général, le major général des armées et le DGA. Cependant, nous souhaitons préserver l’encadrement des unités opérationnelles.

En veillant à une répartition équilibrée entre les cadres, nous verrons se bâtir un nouveau modèle d’armée, dont les travaux de définition ont commencé par un travail conjoint entre le SGA et le MGA.

Les restructurations ont été annoncées le 3 octobre dernier. Lors de la précédente LPM, un plan d’accompagnement a été négocié avec les organisations syndicales. Ce plan a montré son efficacité. Les organisations syndicales sont conscientes de l’appui particulier dont nous bénéficions pour pouvoir supporter cet effort. Pour la nouvelle LPM, cet effort s’élève à 933 millions d’euros pour l’ensemble des personnels du ministère.

Cet effort se traduira par un renforcement de la reconversion du personnel militaire – et tout particulièrement des officiers. Il se traduira également par des mesures financières d’incitation au départ, qui concerneront près de 1 500 militaires et 400 civils par an, ainsi que des mesures d’incitation à la mobilité.

Nous souhaitons également promouvoir les reclassements de militaires dans les fonctions publiques, avec un potentiel supérieur à 2 100 postes par an. Néanmoins, cet objectif sera difficile à atteindre dans la mesure où les autres ministères se restructurent eux-mêmes. Nous sommes donc les premiers à recruter des personnels civils anciens militaires grâce au dispositif prévu à l’article L. 4139-2 du code de la défense.

En outre, nous devrons imaginer pour nos personnels civils et militaires de nouvelles mesures, si possible peu coûteuses, visant à améliorer leurs conditions de vie. Je suis chargé de travailler avec le major général des armées pour que le ministre puisse faire des annonces lors de la prochaine session du conseil supérieur de la fonction militaire, en décembre prochain. Nous travaillons actuellement sur le logement, préoccupation très importante pour nos militaires soumis à la mobilité. Nous continuerons nos efforts en matière de garde d’enfants, particulièrement pour les familles touchées par le divorce. Nous envisageons de bâtir un compte épargne permissions, afin que les permissions non utilisées par nos militaires ne soient pas perdues. Enfin, au titre de l’amélioration de l’administration, des efforts seront entrepris en matière de dématérialisation afin de permettre aux agents civils et militaires du ministère d’accéder plus facilement à leur dossier.

Nos mesures d’incitation au départ, figurant aux articles 23 à 26 de la LMP, sont de quatre natures.

La première est le pécule d’incitation au départ. Le dispositif précédent, le pécule d’incitation à une deuxième carrière, bâti en 2007, comportait deux versements, le premier au moment du départ, le second au plus tard 24 mois après et soumis à reprise d’activité. Avec cette nouvelle mesure, les deux fractions seront versées en un seul pécule à hauteur de 90 % de l’ancien.

Cette mesure nous a semblé insuffisante, car la déflation introduite par la nouvelle LPM concerne des officiers pour une part très importante. Nous avons donc mis en place deux nouvelles mesures et modernisé une troisième.

Nous avons créé la promotion fonctionnelle, qui s’adresse à des officiers et à des sous-officiers de bon niveau, mais qui ne peuvent pas, du fait de la rétractation du volume de postes, atteindre le niveau de responsabilité qu’ils auraient pu espérer. Si, il y a quelques années, un officier breveté devenait au moins colonel en fin de carrière, c’est déjà moins le cas aujourd’hui et cela le sera certainement encore moins à l’avenir. Pourtant, le potentiel et la qualité des services rendus sont les mêmes. La nouvelle mesure permettra donc à un officier d’occuper un poste de colonel, par exemple chef de bureau dans un état-major ou une administration : en contrepartie, il devra quitter le service au bout de deux ou trois ans.

Nous avons créé la pension afférente au grade supérieur : le militaire ne changera pas de grade, mais sa pension passera, au moment de son départ, à l’équivalent de celle du grade supérieur.

Enfin, nous avons rénové le dispositif « disponibilité », peu utilisé jusqu’à présent. Il s’agit de réduire sa durée à cinq ans maximum mais en augmentant la rémunération avec notamment le versement d’une solde à 50 % la première année. Ce dispositif, particulièrement adapté aux personnes intéressées par la reprise d’entreprise ou la création d’activité, leur offre un filet de sécurité, puisque ceux qui le désirent peuvent revenir en fin de disponibilité.

Je souhaite que ces mesures soient votées à la fin de l’année, afin que les militaires puissent en bénéficier dès le début de l’année 2014. Nous espérons qu’elles nous permettront de tenir les objectifs de déflation. Le ministre et son entourage n’ont pas souhaité avoir recours à des dispositifs contraignants. Les militaires conservent donc le choix du déroulement de leur carrière, y compris des modalités de leur sortie.

La gouvernance des ressources humaines est un sujet qui fait couler beaucoup d’encre. Dans le cadre des négociations interministérielles, nos interlocuteurs de Bercy et de Matignon ne manquent jamais de critiquer notre gestion de la masse salariale. Il fallait donc faire en sorte que le ministère décide de l’évolution de sa masse salariale, au lieu de la subir. C’est cette problématique qui a justifié les évolutions dans la gouvernance du ministère. En plus, l’affaire Louvois a mis en évidence un réel problème de gouvernance : tout le monde s’interroge encore pour savoir qui en était responsable – désormais, en tout cas, on saura que c’est le DRH… Les Allemands eux-mêmes appliquent le principe « une seule cravate » : un sujet, une cravate…

Ainsi, dès l’automne 2012, il nous a été demandé de travailler à un modèle selon lequel la DRH assure directement la mission de coordination de l’ensemble des gestionnaires. À mon arrivée en juillet 2012, mon interlocuteur principal était le sous-chef ressources humaines de l’EMA, et je n’avais pas accès aux directions des ressources humaines des armées et des services. Aujourd’hui, le nouveau système me permet, grâce à un dialogue avec l’ensemble des DRH des armées, d’avoir une vision suffisamment fine de l’ensemble du ministère pour me permettre d’exercer correctement mes nouvelles responsabilités de gestion de la masse salariale. Il permet de proposer au ministre et au comité exécutif des arbitrages bâtis sur une meilleure connaissance de la réalité. Dans ce nouveau schéma dit « d’autorité fonctionnelle renforcée de la DRH », le dialogue direct avec mes homologues des armées me permet d’obtenir davantage d’informations. Nous avons ainsi pu commencer à préparer les déflations 2014 dans un bon climat.

Ainsi, le principal rôle dévolu à la DRH est un rôle de coordination. Des dispositions réglementaires devront permettre de s’assurer que notre masse salariale ne dépassera pas les prévisions – aussi les volumes de recrutement devront-ils certainement être signés par le DRH.

Nous projetons de modifier l’architecture budgétaire relative à la masse salariale, ce que l’on appelle le titre 2. Aujourd’hui ce sont les employeurs qui ont la responsabilité de la masse salariale. Ainsi, par exemple, chaque armée n’est responsable, en tant qu’employeur, que d’une partie de la masse salariale de ses militaires – uniquement ceux qui servent effectivement dans leur armée, les autres étant pris en compte par les budgets des autres employeurs, le plus souvent interarmées. Pour les mêmes raisons un employeur comme la DIRISI est responsable de la masse salariale de l’ensemble des agents civils et militaires issus des différentes armées. Demain, la responsabilité de la masse salariale reviendra à ceux qui recrutent et gèrent les femmes et les hommes. Ainsi le DRH d’une armée sera responsable de la masse salariale de l’ensemble des militaires de son armée quel que soit son employeur. Ce DRH sera responsable non seulement des leviers, mais aussi des conséquences budgétaires de ceux qu’il aura utilisés. Cette approche centrée sur les gestionnaires, souhaitée par le ministre, me semble pertinente dans la période actuelle où la rigueur est une nécessité.

Tous les budgets opérationnels de programme des divers employeurs seront regroupés au sein d’un seul programme, vraisemblablement le programme 212 « Soutien de la politique de la défense ». Dès l’année 2014, nous devrons nous efforcer de fonctionner selon ce modèle, même si l’objectif est de le mettre en place pour l’année budgétaire 2015. Il s’agira de bâtir un dialogue de gestion qui permettra, aux uns, d’exprimer clairement un besoin et, aux autres, de le traduire en effectifs et en compétences, mais aussi en impact sur la masse salariale.

Enfin, la démarche de civilianisation – l’équilibre entre personnels militaires et personnels civils du ministère – suscite, elle aussi, beaucoup de commentaires et n’est pas toujours bien comprise. Ces dernières années, le ratio personnels militaires/personnels civils du ministère est passé de 75 %/25 % avant la réforme précédente à 78 %/22 % aujourd’hui. Cette évolution s’explique par les difficultés à conduire la déflation simultanée des deux populations, mais aussi à nos difficultés à organiser correctement la mobilité du personnel civil. Je m’empresse de dire que la mobilité n’est pas prévue dans le statut du personnel civil, lequel est d’ailleurs en pratique beaucoup plus mobile qu’on ne le pense. Lors des restructurations, certains postes prévus pour le personnel civil n’ont pu être honorés, et les armées ont alors pourvu certaines places disponibles par du personnel militaire afin d’assurer le fonctionnement.

Nous souhaitons rééquilibrer les choses, mais sans fixer un ratio cible qui crisperait les relations entre les deux populations qui vivent en bonne intelligence. Comme il est écrit dans le rapport annexé de la LPM, il faut définir de manière objective les emplois ayant vocation à être exclusivement tenus par des militaires, d’une part, et des civils, d’autre part ; les emplois mixtes devront demeurer réduits en volume. Conformément à la lettre de mission que m’a confiée le ministre, je dois élaborer une méthodologie pour trouver, avec la totalité des employeurs, la bonne répartition fonction par fonction. Ensuite, nous devrons consentir des efforts en matière de formation afin que les personnes qui n’ont pas la compétence requise pour occuper un poste disponible puissent l’acquérir.

Au total, en ayant mieux défini les postes strictement militaires et ceux où le statut militaire n’est pas forcément nécessaire – on peut penser par exemple aux métiers dits d’administration générale et de soutien commun –, nous pourrons, sans dogmatisme ni brutalité, trouver un équilibre pour le fonctionnement du ministère et la réalisation du contrat opérationnel. Pour l’instant, le travail sur ce sujet est dépourvu de tensions. Certes, les inquiétudes exprimées par les chefs d’état-major, qui ne souhaitent pas que la civilianisation se traduise par un effort supplémentaire sur les militaires, sont compréhensibles. Nous travaillons, avec les armées directions et services, pour décrire au mieux les besoins.

D’autres chantiers sont en préparation, mais seront ouverts d’ici à la fin de l’année. Je pense principalement à la rénovation de la concertation.

M. Joaquim Pueyo. Monsieur le directeur, vous n’avez pas parlé des sous-officiers, dont plus de 11 000 postes devraient être supprimés. Des mesures sont-elles prévues pour eux ?

La dernière LPM avait prévu des mesures en faveur de la reconversion des militaires. Pouvez-vous en dresser un premier bilan ?

Les primes sont très nombreuses – 174 au total – et coûteuses en termes de gestion. Ne pensez-vous pas qu’un toilettage s’impose, mais qu’il ne doit avoir aucune incidence sur les bulletins de solde ?

Enfin, beaucoup d’inquiétudes s’expriment sur le terrain à propos de la nouvelle LPM. Quelles dispositions comptez-vous prendre pour bien communiquer auprès des officiers, mais aussi des sous-officiers ?

M. Damien Meslot. La clarification au sein du ministère – ce que vous avez appelé le principe d’« une seule cravate » – constitue une avancée importante : elle nous évitera probablement les déconvenues du passé.

Pouvez-vous faire le point sur le logiciel Louvois ? Il semble que des difficultés persistent.

On a évoqué la possibilité de fixer un temps limité pour qu’un officier ou un sous-officier passe au grade supérieur, et que ceux qui n’y parviennent pas soient rayés des cadres, selon un dispositif qui reste à imaginer. Cela fait-il partie des pistes qui ont été abandonnées ?

M. Jacques Feytis. Les mesures que j’ai évoquées sont applicables aux personnels de carrière, officiers comme sous-officiers. Seule la pension afférente au grade supérieur n’est pas valable pour les majors, lesquels sont déjà au sommet du grade de sous-officier. Nous enregistrons aujourd’hui de bons résultats en matière de reconversion de nos militaires du rang et de nos sous-officiers. De mémoire, les taux de retour à l’emploi sont supérieurs à 70 %. Néanmoins, dans le contexte économique actuel, nous constatons une légère augmentation de nos dépenses d’allocation chômage.

Notre centre militaire de formation professionnelle, situé à Fontenay-le-Comte, où une trentaine de métiers sont enseignés aux militaires en reconversion, s’appuie sur un partenariat avec l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), avec laquelle nous avons conclu un accord il y a de nombreuses années. Nous avons accès aux 200 centres de l’AFPA répartis sur le territoire. En outre, nous travaillons sur la base d’une convention historique passée avec l’Association pour le développement de la formation dans les transports et la logistique-Institut de formation aux techniques d’implantation et de manutention (AFT-IFTIM). Notre offre de formation est très large et nos dispositifs statutaires permettent aux militaires d’avoir droit à un congé de reconversion sur les six derniers mois de leur parcours, qui pourra être encore prolongé grâce au futur compte épargne permissions.

L’enjeu est de bâtir une offre particulièrement adaptée aux officiers, catégorie qui a le plus de mal à se reconvertir puisqu’ils partent généralement à un âge moins favorable que les autres militaires. Les militaires du rang partent jeunes ; les sous-officiers, souvent des techniciens, partent en milieu de carrière. Les officiers avec un profil technique arrivent en général à se reconvertir sans trop de difficultés. Nous devrons en revanche faire porter l’effort sur ceux au profil plus généraliste afin de les accompagner vers une deuxième carrière en valorisant notamment leurs capacités de management. Avec l’Agence de reconversion de la défense, nous devons bâtir des programmes particuliers. À cet effet, nous travaillons, avec les DRH d’armée, à la description des profils des officiers qui partiront dans les années à venir, afin d’évaluer leurs compétences et de leur apporter la formation qui leur permettra de répondre aux besoins des entreprises.

Les 174 primes sont le fruit de l’histoire. Un toilettage s’impose, certaines étant très désuètes. Avec l’aide de la Cour des comptes, nous classerons ces primes en trois paquets. Celles qui coûtent peu et n’ont plus de sens devront être supprimées. Les primes coûteuses en termes de gestion, mais qui ont encore du sens, pourront être regroupées en fonction de leurs objectifs, par exemple celles concourant à la compensation des sujétions de l’état militaire et celles relatives à l’attractivité des métiers militaires. Il sera plus difficile de traiter les primes et indemnités liées au cœur de l’activité, mais qui peuvent être très différentes d’une armée à l’autre.

Toutes ces mesures seront d’autant plus faciles à mettre en œuvre que nos personnels comprendront le sens de l’effort qui nous est demandé. Le ministre s’est attaché à expliquer les raisons de la réforme. Il appartient maintenant au commandement d’informer les militaires des outils que je viens d’évoquer, sachant que les déflations devront être réalisées de la façon la plus harmonieuse possible.

Le système d’information Louvois, je l’avoue, a subi peu d’évolutions matérielles même si plusieurs changements de version ont été incrémentés. En revanche nos équipes techniques ont été renforcées. C’est un système que nous avons développé nous-mêmes, il a donc été conçu avec des logiques un peu anciennes et, qui plus est, il n’est pas documenté, si bien que les vingt-cinq techniciens supplémentaires doivent entrer dans le système pour bien le comprendre ! De nouvelles versions sont régulièrement déployées : les prochaines ne le seront pas avant le mois de janvier, en effet les soldes d’octobre, novembre et de décembre sont calculées en même temps à partir de maintenant afin de garantir une solde la meilleure possible pour la fin de l’année. Pour l’heure, des équipes du Commissariat et des centres d’expertise des ressources humaines et de la solde (CERHS) apprennent à mieux utiliser le système actuel. Le travail relatif aux soldes commence beaucoup plus tôt, les écarts sont mesurés, les erreurs sont constatées un mois avant le paiement des soldes et peuvent donc être corrigées. Finalement, sur 180 000 soldes, les erreurs de paiement sont au nombre de 200 par mois.

M. Damien Meslot. Qu’en est-il du stock de trop-perçus, pour lequel on a parlé de 130 millions d’euros ?

M. Jacques Feytis. L’évaluation des trop versés a été réalisée sur la base des éditions de Louvois, qui a indiqué un total d’erreurs de 106 millions d’euros sur 2012 et janvier 2013 pour 65 000 militaires. En réalité, nous pensons que 30 % environ des erreurs signalées par le système n’en sont pas – nous aurons donc sans doute moins de trop versés que ce que nous imaginions. Bien évidemment, les courriers sont envoyés pour les erreurs avérées, et non de manière automatique. C’est l’occasion pour moi de rendre hommage aux équipes qui réalisent ce travail particulièrement ardu.

Après des travaux préliminaires et des échanges interministériels, la décision politique s’est orientée vers une déflation sans mesure coercitive. La LPM n’en comporte donc pas. Deux mesures de ce type avaient été imaginées. La première visait à fixer par statut une limite de durée de service pour un grade, par exemple de quinze ans, assortie de compensations – retraite à jouissance immédiate, pécule. La seconde fixait une limite d’âge inférieure et une limite d’âge supérieure, à l’image du dispositif applicable aux sous-officiers en vigueur jusqu’en 1993. Le premier dispositif aurait pu être recevable en interministériel ; le second n’était pas suffisamment abouti d’un point de vue technique. Pour ma part, je préfère une déflation avec des mesures incitatives, et je pense que nous y parviendrons.

M. Daniel Boisserie. Monsieur le directeur, quelle est la durée des contrats des militaires du rang et quelles sont les mesures d’incitation au retour à l’emploi ? Je pense que la communication pourrait être améliorée en direction des collectivités locales ; par exemple, un sous-officier peut devenir un excellent policier municipal après formation.

Vous avez évoqué le logement. Êtes-vous affecté par la loi Duflot s’agissant de la cession de sites ? Quels sont vos problèmes de logement ?

Enfin, en matière d’évolution de carrière, les avantages sont-ils identiques chez les personnels civils et les personnels militaires ?

M. Alain Chrétien. L’idée de la gratuité du service des réservistes a été évoquée il y a quelques mois. Or il est prévu de faire passer le nombre de réservistes de 16 000 à 22 000, pour faire face à la baisse des effectifs professionnels. Pouvez-vous faire le point sur la situation ? N’y a-t-il pas une contradiction ?

M. Jacques Feytis. La durée des contrats des militaires du rang est très variable, avec des différences selon les armées, la moyenne étant comprise entre six et sept ans.

En matière d’incitation, nous avons un large éventail d’aides : des primes d’engagement, des primes pour inciter certaines personnes à partir et des primes de technicité pour en inciter d’autres à rester. Cela ne facilite pas les discussions en interministériel et suscite une certaine incompréhension chez nos interlocuteurs de la direction du Budget. Néanmoins, je pense que l’utilisation de ces leviers est pertinente et que nos DRH d’armée ont une grande expertise dans la gestion des militaires du rang sous contrat.

Nous avons parfois des difficultés à bien échanger avec les collectivités territoriales. Néanmoins, l’Agence de reconversion de la défense travaille avec les centres de gestion et le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), sans grand rendement il est vrai. Il faut savoir que le niveau de salaire demandé par les militaires est un peu élevé – la fonction territoriale ne rémunère pas toujours comme la fonction publique d’État. Nous les incitons donc à ne pas être trop exigeants.

M. Daniel Boisserie. Maire depuis plus de trente ans, je n’ai jamais lu une lettre du ministère de la Défense nous incitant à embaucher des militaires reconvertis.

M. Jacques Feytis. Nous avons intérêt à améliorer notre dispositif à l’égard des collectivités territoriales.

Nous sommes confrontés à des problèmes de logements dans les grandes villes, avec deux zones noires, l’Île-de-France et Toulon.

En Île-de-France, ces problèmes sont aggravés par la mobilité. Une fois implanté dans cette région, le personnel civil ne veut plus partir, car il y trouve de nombreux avantages, notamment en matière d’éducation. Pour les personnels militaires, nous proposons des dispositifs d’accueil des célibataires géographiques, dont le nombre est en augmentation constante, afin de leur permettre de se loger dans des conditions décentes.

À Toulon, où la vie est chère, nous avons du mal à honorer des postes très intéressants pour le personnel civil.

Il est très difficile de comparer les évolutions de carrière des personnels militaires et des personnels civils, car ce sont deux logiques très différentes. Un officier commence comme sous-lieutenant et acquiert des qualifications qui lui permettent de progresser, avec la grande étape de l’École de guerre. Le personnel civil comporte deux corps, les attachés et les administrateurs civils, et les premiers sont sélectionnés pour passer attachés principaux, sans compter que la nomination au tour extérieur est très sélective. Par conséquent, il est fréquent que les personnels civils réalisent tout leur parcours comme attaché, puis attaché principal – ce qui pourrait correspondre au grade de commandant. Ainsi, j’ai tendance à penser que les militaires bénéficient d’une plus grande progression de carrière. En revanche, la mobilité est pour eux plus contraignante.

Je sais que les deux populations s’observent ; on entend dire que les administrateurs civils sont mieux traités que les officiers. Certes, un administrateur civil recruté par la voie de l’ENA pourra occuper immédiatement des responsabilités qu’un lieutenant-colonel ou un colonel pourrait se voir confier. Néanmoins, sur un peu plus de 200 administrateurs civils au ministère de la Défense, moins du quart est issu de l’ENA – ils sont pour l’essentiel des anciens officiers ou des anciens attachés du tour extérieur.

S’agissant des réservistes, je pense qu’il y a eu des maladresses dans la communication. Comme je l’ai indiqué devant le Conseil supérieur de la réserve militaire, nous n’avons jamais voulu faire servir les réservistes sans les rémunérer. Un réserviste est un militaire à temps partiel, mais, quand il est en activité, il est militaire comme les autres. Il est donc rémunéré, excepté lors de la formation initiale et pour les activités ne relevant pas de l’engagement à servir dans la réserve (ESR), comme les cérémonies, les conférences, les remises de prix. Le principe est clair, je l’ai rappelé récemment aux employeurs : une activité de service est un ESR et est donc rémunérée. En tant que DRH, je ne peux pas accepter que l’on joue sur le coût des réservistes : tout travail mérite salaire.

M. Alain Chrétien. La masse salariale sera la même : il y aura donc plus d’effectifs, mais moins de rémunérations.

M. Jacques Feytis. On peut jouer sur la durée… D’ailleurs, c’est l’état-major des armées qui a la responsabilité de gestion en la matière …

M. Jean-Michel Villaumé. Ma circonscription, qui comporte une base aérienne, est concernée par les restructurations. Monsieur le directeur, quels moyens complémentaires seront mis en place après la décision de dissolution d’escadrons ?

M. Jacques Lamblin. Monsieur le directeur, quel est le coût unitaire d’un militaire du rang ?

Le bruit court selon lequel on pourrait jouer sur la longueur des contrats des officiers de façon à exonérer l’institution militaire de ses obligations en matière de droit à pension anticipée. Qu’en est-il ?

Les effectifs ont diminué d’environ un sixième, mais le nombre d’officiers a augmenté dans la même proportion. Cette évolution explique-t-elle l’augmentation de la masse salariale ?

M. Jacques Feytis. S’agissant du coût des militaires du rang, nous vous ferons parvenir les éléments ultérieurement. Les annonces qui ont été faites il y a quelques jours concernant Varennes-sur-Allier ont pu être mal interprétées, notamment par l’équipe locale d’une organisation syndicale. En effet, les moyens particuliers évoqués à cette occasion sont en réalité un dispositif d’accompagnement économique. Il n’y a pas d’autres moyens supplémentaires que les 933 millions d’euros du plan d’accompagnement des restructurations dont je vous ai parlé.

Jouer sur la durée des contrats pour nous exonérer d’une obligation en matière de pension relève du fantasme. Les militaires du rang doivent être jeunes pour exercer leur métier ; c’est la raison pour laquelle nous souhaitons qu’ils partent tôt. Quelques-uns, les meilleurs, dépassent la durée de contrat qui permet de toucher la pension à jouissance immédiate, mais ce n’est pas la vocation des militaires du rang de rester longtemps. Je vais vous donner un exemple qui prouve notre bonne foi en la matière. Jusqu’en 2010, les fonctionnaires civils et les militaires bénéficiaient du droit à liquider une pension à partir de quinze ans, puis ce seuil a été abaissé à deux ans pour les fonctionnaires, alors qu’il est resté à quinze ans pour les militaires. Nous avons donc demandé que la loi portant réforme des retraites comporte une disposition afin d’aligner la situation des militaires sur celles des fonctionnaires. Vous le voyez : nous faisons notre possible pour que nos militaires puissent disposer de droits à pension et nous n’avons pas l’intention de jouer sur la durée des contrats pour essayer de nous exonérer.

M. Jacques Lamblin. Ma question portait sur les officiers sous contrat, et non sur les militaires du rang.

M. Jacques Feytis. Les officiers sous contrat peuvent aller jusqu’à vingt ans.

M. Jacques Lamblin. Certains craignent que cela puisse ne plus être le cas.

M. Jacques Feytis. Il est certain que des officiers sous contrat partiront avant d’atteindre les vingt ans. Pour l’instant, les instances de concertation ne nous ont pas fait part du point que vous évoquez, mais je vais étudier le sujet. Les politiques de gestion sont différentes selon les armées. En tout cas, sur le plan ministériel, nous n’avons donné aucune consigne pour jouer sur les limites, ce qui ne serait pas acceptable humainement.

La pente de diminution de la masse salariale est un peu moins forte que celle des effectifs sur la précédente LPM. Pourtant, comme l’a bien montré le rapport de l’inspection des finances et du contrôle général des armées, la part du pyramidage est extrêmement réduite dans la contribution à cette évolution de la masse salariale. En effet, même si le coût moyen d’un officier est supérieur au coût moyen d’un militaire du rang ou d’un sous-officier n’est pas la raison principale de cette évolution. En particulier le plan d’accompagnement des restructurations est compté sur la masse salariale et il est vraiment nécessaire ! D’autre part lors de la précédente LPM de nombreuses mesures catégorielles ont été utilisées : elles se sont élevées certaines années à 84 millions d’euros, voire à 100 millions d’euros et sont comptés bien sûr sur la masse salariale. Les mesures générales ont également eu un impact sur la masse salariale, je pense à la revalorisation du point d’indice des 300 000 agents du ministère. Ces dernières ont représenté 115 millions d’euros en 2009, 95 millions d’euros en 2010, et 53 millions d’euros en 2011. Aujourd’hui, le contexte a bien changé et il y a très peu d’évolution en la matière. !

Cela dit, je ne prétends pas que nous avons été totalement exemplaires. Le dépyramidage n’était pas engagé, ce qui contribue à une moindre baisse de la masse salariale. Enfin, si le glissement vieillissement technicité (GVT) est maîtrisé pour le personnel civil, il l’est moins pour le personnel militaire : nous avons été très dynamiques dans les parcours de carrière d’officiers et les promotions ont bénéficié à des jeunes. Cependant, les cumuls de GVT, entre 23 et 47 millions d’euros, ne trahissent pas un scandale absolu au regard d’une masse salariale annuelle de 12 milliards d’euros.

M. Philippe Folliot. Monsieur le directeur, votre fonction est très importante, mais difficile, car, avec ces 34 000 suppressions d’emploi, vous allez devoir gérer le plus grand plan social de ces prochaines années. Il fait suite à un autre plan qui avait concerné 44 000 emplois. Derrière les chiffres, il y a des réalités humaines avec des fermetures de bases, de régiments et de services dans les territoires. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur l’accompagnement ?

Lors d’une précédente audition, il a été indiqué que d’autres administrations - intérieur, justice - pourraient embaucher des officiers. Qu’en est-il de ces passerelles ? Que faut-il faire pour que ces administrations embauchent nos officiers, qui ont de grandes qualités ?

Vous avez indiqué que 1 000 emplois seraient supprimés dans les forces prépositionnées et les forces de souveraineté. Combien seront supprimés pour chacune d’elles ? J’insiste sur l’importance des forces de souveraineté, qui constituent un signal politique fort de notre volonté d’assumer nos fonctions de défense dans les territoires ultramarins.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Compte tenu des difficultés de Louvois et de son éventuel remplacement, allez-vous mettre en place le système d’information des ressources humaines unique dénommé SOURCE ?

Quelle méthodologie allez-vous utiliser pour la civilianisation, notamment au regard des référentiels des effectifs en organisation (REO) ? La répartition entre postes civils et postes militaires ou entre postes opérationnels et postes non opérationnels sera-t-elle confiée aux seuls DRH d’armée, ou des civils participeront-ils à cette analyse ?

M. Jacques Feytis. Ma mission est difficile, mais j’ai servi à Castres dans un très bon régiment, et j’ai été bien formé. (Sourires.)

J’ai largement présenté les mesures d’accompagnement. S’agissant des passerelles avec les autres administrations, les trois ministères dits prioritaires le sont uniquement sur leur cœur de métier. Le ministère de l’Intérieur est prioritaire pour recruter des policiers et des gendarmes, mais pas dans le domaine qui pourrait correspondre aux compétences de nos militaires. Il doit mener des déflations dans les préfectures. Peut-être pourrions-nous y placer des officiers et des sous-officiers, mais c’est au ministère de l’intérieur de dire quels sont ses besoins.

Comme je l’ai dit à ma collègue de l’Éducation nationale, les militaires pourraient très bien être embauchés dans son ministère. Elle a besoin de recruter des enseignants, mais nous en aurons peu à proposer – certains militaires sont titulaires d’un master, mais ils sont peu nombreux. En revanche, je pourrai lui proposer des cadres supérieurs ou intermédiaires dans la gestion et l’encadrement, mais sa priorité n’est pas là, car elle doit également soutenir des efforts de restructuration. Quant au ministère de la Justice, il a besoin de gardiens de prison, mais je ne peux que constater que peu de candidats se présentent pour ce métier Bref, il n’est pas évident de trouver des volumes significatifs dans les autres ministères. Ce travail est délicat. Je consulte inlassablement mes homologues pour leur faire part des qualités de nos militaires.

Je ne suis pas compétent pour vous répondre sur la répartition de l’effort entre forces prépositionnées et forces de souveraineté. Les analyses en cours aboutiront à la fin de l’année, et je ne peux pas me permettre de porter une appréciation : ce sont les employeurs qui définissent leurs besoins. Plus on donne de compétences au DRH pour coordonner la fonction RH, plus il doit veiller à rester à sa place et ne pas vouloir jouer se substituer aux employeurs.

Dans l’éventualité d’un remplaçant à « Louvois » nous devrons bien évidemment regarder l’impact sur le système SOURCE, c’est-à-dire le système d’information RH unique qui remplacera les quatre systèmes d’information RH des armées et services et du personnel civil. J’ai un besoin absolu de SOURCE, car, pour piloter correctement la masse salariale, je dois avoir une vision fine de la réalité de l’ensemble de nos ressources humaines. Actuellement, ce n’est pas le cas, mais le système d’information unique me le permettra. Néanmoins, vous le comprendrez, il n’y a pas un mouvement d’enthousiasme généralisé pour m’aider à bâtir le système SOURCE… Il faudra que j’y mette beaucoup d’énergie.

Lorsque nous étudierons un successeur de Louvois, et comme nous avons rencontré quelques problèmes avec l’articulation entre SIRH et calculateur, nous serons très vigilants sur la préparation de cette interface. Nous ne pourrons éviter de refaire une partie du travail déjà réalisé pour la préparation de SOURCE, afin d’être bien en phase avec le futur calculateur soldes. Ainsi, SOURCE prendra certainement un peu de retard, mais ce travail est nécessaire.

S’agissant de la civilianisation, nous n’avons pas une bonne vision de l’évolution des personnels : notre information est un peu moins nette pour les militaires que pour les civils. Ce sera l’un de nos axes de travail. Nous devons également avoir une vision plus synthétique des REO, et c’est une responsabilité qui a été confiée à la DRH au titre de la nouvelle gouvernance. Pour ce faire, nous disposons d’un outil d’information, CREDO. Une autre démarche consiste à analyser les besoins métier par métier, selon huit familles professionnelles. Ainsi, CREDO indique que, dans la « famille achats », on compte 30 % de personnels militaires et 70 % de personnels civils ; c’est aux employeurs de dire ensuite si cette répartition est appropriée. Pour la fonction restauration, la proportion est inverse : il convient d’étudier cette proportion pour déterminer si elle est adaptée.

M. Yves Fromion. Y a-t-il une interaction entre civilianisation et externalisations ?

J’ai cru comprendre que, si une étude en amont a permis, dans le cadre de la précédente LPM, de déterminer la masse des postes à déflater, un a priori a prévalu sur l’enveloppe de la future LPM, si bien que vous devez à présent mener un travail d’analyse fonctionnelle pour juger si la déflation sera compatible avec les missions du ministère de la Défense. Ai-je bien compris votre propos ?

Mme Sylvie Pichot. Quelle est la politique menée en direction du corps des ouvriers d’État, en matière de recrutements, d’avancement, d’indemnités ?

M. Christophe Guilloteau. M. Feytis a parlé de la loi sur les retraites. Notre commission n’aurait-elle pas pu être saisie pour avis sur les dispositions touchant à la Défense ?

Monsieur le directeur, les militaires s’interrogent beaucoup sur le reclassement, plus particulièrement dans la fonction publique. Êtes-vous optimiste en la matière ?

Vous avez indiqué que le dépyramidage toucherait tout le monde, mais vous n’avez pas parlé du contrôle général des armées, dont les quatre-vingt-deux contrôleurs ne sont pas les plus mal lotis du ministère de la Défense… Seront-ils concernés par la déflation ?

M. Jacques Feytis. Effectivement, il y a une interaction entre civilianisation et externalisations. Néanmoins, je ne pense pas que nous soyons dans une logique d’externalisations forcenées. Il n’y a pas de projets majeurs. Dans le domaine de l’habillement, des velléités ont existé, puis nous nous sommes orientés vers une logique de régie rationalisée optimisée, dont les impacts RH sont bien moindres.

L’externalisation implique de payer la TVA sur la prestation et de couvrir la marge du prestataire. En outre, quid du personnel ? Il peut rejoindre le prestataire dans le cadre de la mise à disposition, mais cela n’a pas rencontré un franc succès. En définitive, chaque opération d’externalisation s’ajoute à la déflation. Si elle présente un intérêt sur le plan économique elle peut ne pas en avoir si on intègre le coût des personnels qui finalement resteront et que nous devrons rémunérer, alors que nous paierons le prestataire.

Externaliser une prestation qui mobilise essentiellement des personnels militaires contribuera à la manœuvre RH militaire et ne dégradera pas le ratio civils/militaires. À l’inverse, externaliser une prestation avec beaucoup de personnels civils me pose problème, car, s’ils partent, cela fait du personnel civil en moins, et s’ils ne partent pas – c’est en général le cas –, je devrai les payer alors que je ne peux plus les employer.

Les propos que j’ai tenus en préambule sont strictement techniques et traduisent une différence de méthode entre la révision générale des politiques publiques (RGPP) et la modernisation de l’action publique (MAP). La RGPP présentait l’avantage de fournir une méthodologie pour la conduite des réformes, mais elle s’est assez peu embarrassée d’un effort de communication et sans doute n’avons-nous pas suffisamment préparé le terrain pour les agents – nous avons pansé les plaies avec un grand nombre de mesures catégorielles… La MAP nécessite plus de temps. Néanmoins, les choses ont été bien comprises au sein du ministère. Il est logique que les analyses fonctionnelles ne viennent qu’après cette première étape, et cela explique un premier train de restructurations en 2014.

Le ministère de la Défense comprend 20 000 ouvriers d’État qui constituent le cœur de la compétence technique de notre personnel civil. Le ministre a souhaité redonner une visibilité à cette catégorie de personnel en autorisant des recrutements – 105 recrutements au titre de l’année 2014. Malgré les besoins en compétences, nous avions décidé de suspendre les recrutements au cours des dernières années. Il faut reconnaître que les ouvriers d’État ont un coût de rémunération élevé – leur bordereau de salaire est indexé sur l’évolution de la grille des salaires de la métallurgie parisienne –, et par ailleurs le calcul de leur pension de retraite est avantageux.

M. Yves Fromion. Et ils sont inamovibles.

M. Jacques Feytis. On ne peut pas dire qu’ils soient plus inamovibles que les fonctionnaires : les reconversions ont montré qu’ils avaient fait preuve de mobilité.

Certains prétendent qu’ils sont privilégiés, mais leur rémunération est gelée depuis quatre ans. Par conséquent, leur prime de rendement, indexée sur la rémunération de base, n’évolue pas non plus. Ainsi, depuis quatre ans, chaque année de gel du bordereau de salaire ouvrier (BSO) représente 17 millions d’euros d’économies sur la masse salariale. Le gel de la rémunération sera prolongé en 2014. On ne peut donc pas parler de gabegie.

En outre, le recrutement sera limité à quatre métiers : les opérateurs en maintenance aéronautique, les pyrotechniciens, les diésélistes et les frigoristes. Ces dernières années, nous avons recruté 300 contractuels, notamment dans la maintenance aéronautique, avec des conditions de salaire équivalentes à celles des ouvriers de l’État. Dans la mesure où les recrutements vont reprendre, nous allons proposer à ces 300 opérateurs de devenir ouvriers de l’État, mais nous mènerons cette transformation de manière raisonnable, c’est-à-dire en prenant en compte la réalité de leurs quelques années de carrière – sachant qu’il n’y aura pas d’évolution salariale !

Il est compliqué d’être totalement optimiste dans la mesure où ce sont des femmes et des hommes qui doivent quitter l’institution. Nous sommes suffisamment affectifs au ministère de la Défense pour n’être jamais vraiment satisfaits, quand bien même une manœuvre RH de ce type est réussie. Avec les gestionnaires, nous pensons pouvoir y arriver techniquement, mais en utilisant des leviers douloureux : réduction des recrutements, incitations au départ, mais aussi limitation des avancements, comme nous l’avons fait en 2013. Le véritable enjeu se situe dans l’articulation entre l’organisation et la RH, mais encore faut-il que les services fonctionnent. Les analyses fonctionnelles doivent identifier les postes où nous pouvons nous permettre des déflations et ceux que nous souhaitons conserver. Incontestablement, le ministère va encore souffrir. Nos agents, civils ou militaires, abordent avec courage et tristesse cette nouvelle étape qui est inévitable.

Enfin, la gestion des contrôleurs des armées est assurée, non par moi-même, mais par le chef du contrôle général des armées. Il est parfaitement conscient que le corps doit montrer l’exemple, car il n’y a aucune de raison qu’il ne participe pas à la déflation à la mesure de ses effectifs. Le contrôle n’est pas toujours apprécié, et c’est en un sens normal ; mais s’il n’existait pas, l’Inspection des finances ou la Cour des comptes se chargerait de son travail… Au moins sommes-nous pour la plupart d’anciens officiers des armes ou des services et connaissons-nous plutôt bien le ministère.

Mme la présidente Patricia Adam. Merci beaucoup, monsieur le directeur.

La séance est levée à dix-neuf heures trente.

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Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Patricia Adam, M. Daniel Boisserie, M. Alain Chrétien, M. Philippe Folliot, M. Jean-Pierre Fougerat, M. Yves Foulon, M. Yves Fromion, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Christophe Guilloteau, M. Jacques Lamblin, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jacques Moignard, Mme Sylvie Pichot, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Gwendal Rouillard, M. Jean-Michel Villaumé

Excusés. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Jean-Jacques Candelier, M. Bernard Deflesselles, M. Éric Jalton, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Frédéric Lefebvre, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. François de Rugy, M. Philippe Vitel