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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mardi 7 octobre 2014

Séance de 18 heures 30

Compte rendu n° 6

Présidence de Mme Patricia Adam, présidente

— Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, sur le projet de loi de finances pour 2015.

La séance est ouverte à dix-huit heures trente.

Mme la présidente Patricia Adam. Je suis heureuse d’accueillir à nouveau M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, pour poursuivre l’audition sur le projet de loi de finances pour 2015.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense. Je souhaite résumer au préalable les entretiens que j’ai eus aux États-Unis avec mon homologue M. Chuk Hagel, secrétaire d’État à la Défense, Mme Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale, M. Ban Ki-moon, secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, et M. Hervé Ladsous, ambassadeur de France, secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix.

Contrairement aux craintes que l’on pouvait nourrir au vu de la difficulté du théâtre centrafricain, la mise en place de la MINUSCA (Mission intégrée multidimensionnelle de stabilisation des Nations unies en République centrafricaine) se déroule de façon très satisfaisante. Au total, 10 000 militaires seront assez rapidement déployés, ainsi que des policiers. Des actions concrètes sont déjà menées sur le terrain. Je précise que la mission de la MINUSCA n’est pas que militaire : elle doit aussi travailler à une mise en synergie politique. La jonction avec la force de l’Union européenne, l’EUFOR, dont la mission a été prolongée de trois mois, se fera donc dans de bonnes conditions.

Dans le prolongement de cette opération, M. Ban Ki-moon souhaite une mission de formation des FACA (forces armées centrafricaines), qui sont dans un état plus que complexe. L’Union européenne pourrait assumer cette formation comme elle le fait au Mali.

Notre désengagement, vous le voyez, devrait pouvoir débuter dans un délai relativement bref.

Pour ce qui est maintenant de la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali), une réapparition du risque terroriste est signalée au nord du pays. Neuf militaires nigériens ont été tués la semaine dernière aux environs de Gao par le groupe terroriste Al-Mourabitoune, activé principalement par le Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO). Quelques jours auparavant, cinq militaires Tchadiens avaient été tués à Aguelhok, plus au nord.

Cette fragilité nouvelle est une conséquence de la réduction de la présence de nos forces, mais aussi du fait que les FAMA se sont effondrées à la suite de leur erreur majeure du début d’année et que la MINUSMA ne dispose pas de toutes les capacités souhaitables. En outre, la poursuite des pourparlers d’Alger suscite des jeux d’influence. Les groupes s’interpénètrent de plus en plus. Ajoutons à cela que tous les groupes armés exploitent la possibilité de se ressourcer en Libye.

Cela étant, la présence très active des Néerlandais, basés à Gao, et celle des Suédois à Tombouctou devraient renforcer la capacité d’allonge de la MINUSMA, notamment en matière de soutien logistique et de mobilité.

J’ai alerté mes interlocuteurs sur la montée des dangers dans le sud de la Libye. À l’Assemblée générale des Nations unies, M. Ban Ki-moon a abordé lui-même le sujet lors d’une réunion spécifique consacrée à la Libye. L’ONU a envoyé un émissaire, M. Bernardino León, pour encourager la mise en place d’un dispositif gouvernemental inclusif et rapprocher les deux pouvoirs installés l’un à Tobrouk, l’autre à Tripoli. Son travail commence à porter ses fruits, mais, au-delà de la solution politique qu’il faudra bien trouver en coopération avec les autres pays de la zone, la question du Sud demeure et il faut que la communauté internationale s’en préoccupe.

Concernant l’Irak et la Syrie, mon sentiment est que la coalition contre Daech est en train de se cristalliser, mais qu’elle n’est pas encore aboutie. Bien qu’ils aient annoncé leur participation, certains pays tardent à la rejoindre. Pour les États-Unis, les temps de l’action se définissent ainsi : d’abord contenir la progression de Daech ; ensuite aider les forces irakiennes et kurdes à reconquérir le territoire tombé aux mains des terroristes – je crois qu’en l’occurrence il conviendrait de parler d’« armée terroriste », une armée forte de près de 30 000 hommes et dotée de puissants moyens militaires. Cette deuxième phase, qui supposera un règlement politique en Irak, est en cours de préparation. Ce dont je suis convaincu, c’est qu’elle n’aura pas lieu avant l’année prochaine. Quant au containment de la première phase, il faudra encore du temps pour l’assurer entièrement. Une réunion des chefs d’état-major de la coalition se tiendra dans quelques jours. Je ne suis pas certain qu’elle permettra d’approuver la planification : sans doute faudra-t-il attendre le mois de novembre. En tout état de cause, il ne s’agit pas d’une guerre éclair. Nous sommes sur du temps long.

Mme la présidente Patricia Adam. Nous en revenons aux questions sur le projet de loi de finances.

M. Joaquim Pueyo. La France réfléchit avec l’Allemagne au renforcement de la surveillance du cessez-le-feu en Ukraine au moyen de drones, dans le cadre de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Pourriez-vous faire le point sur ce projet ?

L’étau djihadiste se resserre autour de la ville kurde de Kobané. Les Kurdes d’Europe réagissent et des incidents violents se produisent en Turquie. Ce pays ne souhaite pas s’engager militairement pour l’instant. Quelle est votre analyse ?

Les djihadistes sont fortement armés. D’où ces armes souvent sophistiquées proviennent-elles ?

Pourriez-vous faire le point sur le programme Scorpion, dont le lancement est imminent ? Le séquençage prévu dans la loi de programmation militaire (LPM) sera-t-il respecté ?

Mme Édith Gueugneau. L’industrie de la défense rayonne sur tous nos territoires. Elle contribue au dynamisme économique et à la compétitivité internationale de la France. Malgré les difficultés actuelles, elle fait vivre de nombreuses familles qui sont aujourd’hui dans l’incertitude. J’ai bien entendu, monsieur le ministre, vos propos sur la réalisation de certains programmes comme Scorpion ou les avions multi-rôles. Mais, plus globalement, quelles assurances donner à ces familles quant au respect des engagements de l’État dans les contrats d’armement ? Ces contrats impliquent beaucoup de PME, aujourd’hui menacées alors qu’elles constituent le socle sur lequel nous devons prendre appui pour redresser le pays.

M. Alain Marty. Vous semblez considérer, monsieur le ministre, qu’il n’y a pas de problème d’effectifs et que la situation actuelle peut s’inscrire dans le cadre du Livre blanc. Pourtant, le général de Villiers vient de nous expliquer que le contexte sécuritaire a beaucoup évolué en peu de temps. La remise en cause des frontières ukrainiennes n’était pas envisagée au moment de l’élaboration du Livre blanc, pas plus que notre engagement pour lutter contre le virus Ebola. Et la situation en Syrie et en Irak est devenue beaucoup plus complexe que ce que l’on imaginait.

Nous avons environ 20 000 hommes hors de métropole, dont des forces prépositionnées et des forces de souveraineté. Si l’on ajoute 10 000 hommes pour renouveler les effectifs en opérations extérieures (OPEX), 15 000 hommes, comme il est prévu au Livre blanc, pour les opérations en coalition, les effectifs nécessaires au renouvellement de la FIRI (force interarmées de réaction immédiate), soit 5 000 hommes, et les 10 000 hommes dont le Livre blanc prévoit le maintien sur le territoire français pour faire face à une crise majeure, on atteint les 60 000. Or la cible fixée par le Livre blanc et la LPM est de 66 000 hommes à la fin de la période.

M. le ministre. Pour l’armée de terre.

M. Alain Marty. En effet. Cela représente néanmoins une proportion importante de l’effectif total.

Pour ma part, je plaide pour un format moins réduit. Par deux fois, d’ailleurs, le général de Villiers a affirmé que nous avons le devoir de ne pas baisser la garde.

Ne trouvez-vous pas choquant qu’une nébuleuse comme l’État islamique soit capable d’avoir une armée de 30 000 hommes – voire 40 000, selon certains – et que la France, État de droit, cinquième puissance mondiale, envisage d’engager 15 000 hommes seulement dans une coalition ?

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Où en est la procédure de remplacement du système LOUVOIS ? Le titre 2 sera-t-il de nouveau affecté en 2015 par des dépenses dues aux dysfonctionnements de ce logiciel ?

M. le ministre. Lors d’une réunion spécifique à l’occasion du sommet de l’OTAN de Newport, le président Hollande et la chancelière Merkel ont posé le principe d’une initiative franco-allemande de drones pour aider l’OSCE à remplir sa mission de surveillance du cessez le feu dans l’est de l’Ukraine. Le projet met un certain temps à se concrétiser, du fait du fonctionnement de l’OSCE, mais aussi de notre refus d’amener dans cette zone des militaires qui ne soient pas armés. Du côté allemand, la ministre fédérale de la Défense s’est également heurtée à des difficultés, qui semblent se résoudre.

Nous sommes maintenant d’accord sur le concept, sur les moyens et sur les effectifs, et nous sommes d’accord avec l’OSCE. L’engagement dépend d’une décision définitive de l’Allemagne, qui a envoyé aujourd’hui même une mission de vérification sur zone. J’estime que la réalisation de cette opération dans une configuration franco-allemande aurait du sens et de la force.

M. Alain Marty. Quel serait l’effectif engagé ?

M. le ministre. Nous prévoyons 200 hommes pour la durée de la surveillance.

Après cette audition, je rencontrerai le président de la République pour évoquer la lutte contre l’État islamique et les événements qui viennent d’avoir lieu à Kobané. Je dirai notamment au président qu’il est nécessaire de clarifier la stratégie d’ensemble de la coalition avec tous ses membres. Un grand quotidien français a relevé à juste titre que ceux-ci n’avaient pas tous les mêmes objectifs. Il faut faire en sorte que tel soit désormais le cas : il s’agit d’une condition indispensable pour réussir. La prochaine réunion des chefs d’état-major sera une étape, mais elle ne sera pas suffisante. Maintenant que nous savons qui fera partie de la coalition, nous devons mener une réflexion commune sur les objectifs et sur la stratégie. Car d’autres Kobané peuvent tomber.

Le programme Scorpion sera engagé très rapidement, dans les jours ou les semaines qui viennent : la discussion avec l’industriel est sur le point de s’achever. Ce n’est pas nous qui avons souhaité attendre, et il est temps d’aboutir : Scorpion est une nécessité pour l’armée de terre ; il permettra de renouveler l’ensemble de nos moyens, notamment de remplacer les véhicules de l’avant blindés (VAB) et les AMX 10 RC. Il sera lancé et exécuté conformément aux prévisions de la LPM.

La renégociation de l’ensemble des contrats avec les industries de défense est presque achevée. Je ferai en sorte que les contrats soient intégralement respectés. De plus, les grands industriels ont tous signé le pacte Défense PME, qui comprend quarante mesures visant à placer les PME dans une position de coopération plutôt que de sous-traitance vis-à-vis de ces grands groupes. J’ai pu constater que le pacte était mis en œuvre. L’ensemble des industries de défense, y compris les PME, bénéficient du dynamisme des exportations d’armement : en 2013, celles-ci ont augmenté de plus de 40 % par rapport à 2012 ; en 2014, elles devraient s’établir au moins à leur niveau de 2013, voire au-delà. Ces contrats sont très importants et les perspectives sont bonnes.

Monsieur Marty, les crédits d’investissement du ministère de la Défense progresseront en 2015 : ils atteindront 16,7 milliards d’euros contre 16,4 milliards en 2014. Je rappelle, en outre, la méthode que j’ai utilisée pour préparer la LPM. Le point de départ a été de faire admettre aux autorités chargées d’arbitrer que nous étions arrivés à un niveau de dépenses militaires incompressible. Je me réjouis que cette ligne de défense – qui n’a d’ailleurs pas varié – ait été validée, même s’il convient de rester en permanence vigilant. Le montant nominal des dépenses – 31,4 milliards d’euros – doit donc rester le même. En d’autres termes, la contribution faciale du ministère de la Défense au redressement des comptes public se résume à la non-compensation de l’inflation. Cette norme étant validée, il me revenait d’arbitrer la répartition de cette enveloppe de 31,4 milliards. Il était d’abord nécessaire de renforcer la préparation opérationnelle des forces et le maintien en condition opérationnelle (MCO), sur lesquels on avait tendance à rogner auparavant. Je tiens à ce que les crédits consacrés à la préparation opérationnelle progressent de manière sensible chaque année : ils augmenteront de 4,5 % en 2015. Il est en effet essentiel pour le moral des troupes de maintenir la préparation opérationnelle et le MCO à un niveau suffisant. Ensuite, il fallait engager un certain nombre d’actions indispensables, notamment en matière de forces spéciales, de renseignement, de drones et de cyberdéfense. Une fois ces dépenses imputées sur l’enveloppe de 31,4 milliards, j’en ai déduit le chiffre de déflation des effectifs, et non l’inverse.

Il est vrai que les menaces se sont concrétisées, mais elles avaient toutes été identifiées dans le Livre blanc et dans la LPM, tant les « menaces de la force » que « les risques de la faiblesse » et la menace terroriste. Le modèle d’armée et les moyens affectés en tiennent donc compte. À la fin de l’exercice de déflation des effectifs, l’armée française sera toujours la première armée européenne. Elle sera plus opérationnelle et plus cohérente, avec des militaires formés et performants. Comme les chefs militaires, je souhaiterais que les effectifs soient un peu plus élevés. Néanmoins, nous sommes aujourd’hui en mesure d’intervenir conformément à nos choix stratégiques, sans que cela entraîne de difficulté particulière : nos soldats sont à l’œuvre, ils sont bien formés et agissent de manière cohérente et avec professionnalisme. De même, lorsque nous avions passé en revue l’ensemble de nos prépositionnements dans le cadre du Livre blanc et de la LPM, nous avions décidé de maintenir en l’état notre base d’Al-Dhafra à Abou Dabi. Au vu des développements en Irak, il est heureux que nous ayons fait un tel choix.

Je vous ai déjà fait part de notre évaluation concernant l’armement – chars, véhicules blindés à quatre roues motrices, lance-roquettes, etc. – dont dispose l’armée terroriste en Irak et en Syrie. L’essentiel de ces armes a été pris aux armées irakienne et syrienne. Il s’agit de matériel américain ou russe de bonne qualité. À la différence d’autres groupes terroristes, les combattants de l’État islamique savent s’en servir. En revanche, heureusement, ils ne disposent que d’une capacité sol-air marginale, avec laquelle ils ont néanmoins réussi à toucher un hélicoptère.

M. le ministre. Les expérimentations que nous avons menées avec les acteurs concernés par le logiciel LOUVOIS, y compris avec ses concepteurs, ont montré qu’il n’était pas possible de le réparer. La situation devenait dramatiquement absurde : lorsque l’on corrigeait tel ou tel défaut, une panne se produisait ailleurs. J’ai donc décidé, en décembre dernier, d’arrêter le projet et d’en développer un nouveau. Il n’y avait pas d’autre solution. J’avais déjà décidé auparavant, je le rappelle, de ne pas étendre le système LOUVOIS à l’armée de l’air et à la gendarmerie. Comme il faut repartir de zéro, cela prendra du temps. J’ai demandé à mes collaborateurs de mener ce projet comme une opération d’armement : « un chef, une mission, des moyens », le responsable désigné disposant de toute l’autorité nécessaire. Trois prototypes seront prêts à la fin de l’année, le meilleur d’entre eux sera retenu début 2015 et sera progressivement testé en parallèle du système actuel. Il faut qu’il soit crédible et qu’il bénéficie de la confiance des militaires.

Chaque fois que je rends visite à une unité, je fais un point spécifique sur les problèmes – soit des moins-perçus, soit des trop-perçus – posés par LOUVOIS. Nous avons donné délégation aux chefs de corps pour régler, au cas par car, certaines situations de moins-perçus. Ce dispositif continue à fonctionner. Quant aux trop-perçus, parfois très élevés, ils ont souvent été pris pour des primes par le militaire concerné ou par son conjoint, et donc dépensés en conséquence. Il est en effet extraordinairement difficile de lire les bulletins de solde ! Nous allons d’ailleurs les simplifier. En cas de trop-perçu, nous demandons donc un remboursement étalé dans le temps, adapté à chaque cas. Nous réglons également les problèmes qui peuvent se poser avec les centres des impôts, les banques et les caisses d’allocations familiales. Compte tenu du nombre d’acteurs mobilisés, c’est très complexe. Nous nous efforcerons de remédier à toutes les difficultés d’ici à l’abandon définitif – que tout le monde souhaite – de ce système absurde et, pour tout dire, lamentable. Chacun peut observer que je n’ai jamais polémiqué sur le sujet : cela n’aurait pas été convenable à l’égard des militaires.

M. Nicolas Dhuicq. Je suis étonné que nous envoyions en Ukraine des drones qui seraient plus utiles ailleurs. Je ne pense pas que la situation en Ukraine menace la sécurité de l’Europe. Les sanctions contre la Russie sont absurdes : elles vont coûter, au bas mot, 600 millions d’euros à l’économie française, en particulier à l’agriculture. Enfin, je suis inquiet que le chef de l’État n’ait que des contacts informels avec le président russe.

Quelle est notre pensée stratégique en matière d’OPEX ? Je ne la vois pas. La Turquie, en particulier le président Erdogan – dont chacun devrait lire les discours –, a intérêt à ce que les Kurdes se fassent massacrer : il n’a pas du tout envie que la Turquie devienne une fédération. Nous risquons donc d’assister à la fin des Kurdes. Quant à l’intervention turque, elle sera très mesurée, pour peu que M. Erdogan cède aux injonctions américaines. D’ailleurs, que faudra-t-il lui donner en échange ?

Vous parlez, monsieur le ministre, d’objectifs communs, mais l’Arabie Saoudite et le Qatar, nous le savons, ont toujours eu deux agendas. Au passage, mes collègues et moi-même avons reçu de l’ambassadeur du Qatar une brochure de 200 pages qui vante les performances du pays en matière de droits de l’homme. Tenons-nous-le pour dit : nous sommes associés avec un État qui défend les droits de l’homme ! Les travailleurs immigrés au Qatar apprécieront !

En Irak et en Syrie, nous sommes confrontés à des forces qui ont le culte de la mort, et l’avantage technologique dont nous disposions depuis la Renaissance se réduit. À cela s’ajoutent la baisse des effectifs militaires, l’usure des matériels, la diminution de la taille des régiments, la disparition du lien entre les territoires et les forces armées, compte tenu des fermetures d’implantations qu’impliquent nos efforts de rationalisation. Au lieu de favoriser la création de richesses, nous cédons au dogme de la réduction de la dette et nous augmentons les impôts ! Notre politique est complètement incohérente !

Le Pacifique Sud présente un intérêt stratégique et économique majeur pour la France, notamment du point de vue de l’accès aux matières premières. Or, en raison de ce qui va se produire en Nouvelle-Calédonie dans les années à venir, il n’est plus guère question de cette zone : on ne s’intéresse plus aux nodules polymétalliques ni aux mines de nickel, alors que les Chinois vont probablement ouvrir une mine importante dans le secteur dit indépendantiste. En Afghanistan, où nous avons mené une opération, la plus grande mine de cuivre du pays sera là aussi chinoise. À mon grand désespoir, le Livre blanc ne contient qu’une brève phrase sur l’accès aux matières premières, et encore n’y est-il question que des métaux rares. Quelqu’un se préoccupe-t-il de l’accès aux matières premières dans le Pacifique Sud ?

M. Serge Grouard. Quelle est, à ce stade de l’année, la consommation estimée des crédits ouverts au titre de la loi de finances initiale pour 2014 ?

Les reports de charges s’élèvent à près de 3,5 milliards d’euros. Quel en est le détail ? Comment comptez-vous les réduire ?

Lorsque je vous avais interrogé sur le casernement militaire, monsieur le ministre, vous aviez vous-même reconnu que certaines situations étaient inacceptables, voire honteuses. J’avais proposé que les casernes soient éligibles aux crédits distribués par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). Les villes ont reçu des centaines de millions, voire des milliards d’euros pour renouveler leurs quartiers, ce qui était justifié, mais je ne vois pas pourquoi des jeunes qui paient le prix du sang ne pourraient pas bénéficier également de ces fonds ! Pourquoi n’avez-vous pas donné suite à ma proposition ou pourquoi le Gouvernement ne l’a-t-il pas prise en compte ?

Lors de l’audition de la semaine dernière, vous avez évoqué la création d’une société de projet. Pouvez-vous préciser quelles seraient ses missions ? D’après ce que nous avons compris, elle pourrait acquérir du matériel militaire non seulement pour en faciliter l’exportation, mais aussi pour le mettre à la disposition de l’armée française. Comment cela fonctionnerait-il ? Quel serait le statut juridique de cette société ? Quel serait son capital et comment serait-il abondé, notamment par l’État ? Cela signifie-t-il que l’armée française en viendrait non plus à acquérir du matériel, mais à le louer ? Quelle serait la méthode utilisée ? Une forme de leasing ? Enfin, la création de cette société est-elle un moyen de faire face à l’éventuelle non-réalisation des 2,3 milliards de recettes exceptionnelles prévues ?

Mme Marie Récalde. La semaine dernière, la Cour des comptes a publié un rapport sur le MCO des matériels militaires, intitulé « des efforts à poursuivre ». Les constats qu’elle fait sont d’ailleurs partagés par un grand nombre d’entre nous : les matériels sont hétérogènes et souvent vieillissants ; leur répartition est très inégale sur l’ensemble du territoire ; ils sont très sollicités dans le cadre des OPEX. Vous venez de rappeler, monsieur le ministre, votre attachement au MCO : il n’est pas une variable d’ajustement et des efforts sont réalisés en la matière. Néanmoins, la Cour des comptes estime que la dispersion des implantations, qui s’ajoute à celle des forces, constitue un frein à l’industrialisation des processus et complique la gestion des contraintes logistiques.

À cet égard, qu’en est-il du rapprochement des ateliers et des sites de maintenance des matériels, dont nous connaissons les bénéfices, même si la technique des plateaux se heurte à certaines limites structurelles ? Cette recommandation de la Cour des comptes rejoint d’ailleurs ce que nous entendons lorsque nous rencontrons le personnel militaire, qui nous interpelle régulièrement sur la question des contrats. D’autre part, une meilleure intégration de la chaîne logistique du MCO est-elle envisagée ? Si oui, à quelle échéance ? Une telle intégration permettrait de réaliser des économies substantielles.

M. Yves Fromion. S’agissant du programme Scorpion, le volume et le calendrier des commandes seront-ils conformes à ce qui avait été annoncé initialement ? Les anciens matériels seront-ils bien remplacés en temps et en heure ? L’écart entre nos capacités nominales et la réalité de nos moyens ne cesse de se creuser, notamment du fait des OPEX.

Enfin, avez-vous pris une décision concernant les effectifs de la base de Djibouti ?

M. Christophe Guilloteau. La protection radar du territoire présente, semble-t-il, des « trous » très importants. Dans le cadre du programme de modernisation par étapes SCCOA – système de commandement et de conduite des opérations aérospatiales – lancé en 1993, il était prévu d’acquérir dix radars – six GM-403 et quatre GM-200 – avant la fin de l’année 2014. Cette opération fait-elle toujours partie de vos projets d’investissement ?

M. Philippe Meunier. Nous vous avons interrogé sur le programme Scorpion à plusieurs reprises depuis un an, et vous nous avez répondu chaque fois que la signature était imminente. Ce décalage d’un an – peu importe qu’il soit de votre fait ou de celui de l’industriel – aura-t-il des conséquences sur les dates de livraison des matériels, telles qu’elles ont été programmées dans la LPM ?

Combien de djihadistes français ont été tués en Irak ?

Pouvez-vous nous donner des informations sur la livraison du premier BPC Mistral à la Russie ?

Pouvez-vous nous rappeler quelle est la date ultime avant laquelle la France doit avoir vendu des Rafale à l’export pour qu’il n’y ait pas de conséquences sur la programmation militaire ?

S’agissant des événements à Kobané, le président de la République a-t-il demandé aux autorités turques de faire le nécessaire pour éviter un massacre à leurs frontières ? Nous avons l’impression de revivre le massacre des habitants de Varsovie, lorsque Staline a refusé d’entrer dans la ville pour laisser les troupes hitlériennes éliminer l’élite polonaise ! C’est inacceptable ! Il convient d’intervenir très rapidement auprès des Turcs, qui jouent un jeu trouble depuis le début du conflit en Syrie. Il y a quelques mois, nous le savons, ils ont laissé des islamistes pénétrer dans la localité de Kassab et y massacrer des chrétiens. Il faut désormais les mettre au pied du mur pour qu’ils prennent conscience de la situation.

M. le ministre. Ainsi que je l’ai indiqué, je vais participer tout à l’heure à une réunion à l’Élysée concernant la situation à Kobané. Je ne souhaite donc pas m’exprimer sur ce sujet à ce stade. Néanmoins, je partage en grande partie les inquiétudes que vous avez exprimées.

À ce jour, trente-sept djihadistes français ont été tués en Irak depuis le début des opérations.

Chaque fois que j’ai été interrogé sur le programme Scorpion, j’ai en effet indiqué que la signature était proche. Cependant, le décalage n’est pas de notre fait : n’allez pas penser que le ministère de la Défense a, en l’occurrence, des problèmes de fin de mois ! Les discussions avec l’entreprise sont presque bouclées, et le programme Scorpion sera intégralement respecté comme annoncé dans la LPM : la cible finale est de 2 080 véhicules blindés multi-rôles (VBMR) – dont 980 au titre de l’étape 1 – et de 248 engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) – dont 110 au titre de l’étape 1 – pour remplacer les AMX 10 RC.

M. Yves Fromion. Qu’entendez-vous par « étape 1 » ?

M. le ministre. Les chiffres que j’ai cités sont ceux qui sont inscrits dans la LPM. Nous exécutons toute la LPM, rien que la LPM.

M. Serge Grouard. Toutefois, certains financements prévus en 2014 ne seront-ils pas reportés à 2015 ? Il y a bien un décalage financier.

M. le ministre. Non, nous respecterons intégralement les échéances de la programmation.

S’agissant du programme SCCOA, monsieur Guilloteau, la commande de radars sera passée en 2014.

M. Christophe Guilloteau. Portera-t-elle bien sur dix radars ?

M. le ministre. Elle sera conforme à la LPM.

Concernant la base de Djibouti, monsieur Fromion, j’ai décidé de tenir compte des observations que vous avez formulées dans l’excellent rapport d’information que vous avez rédigé avec Gwendal Rouillard : la diminution du format de nos forces prépositionnées à Djibouti sera moindre que celle qui était initialement envisagée.

M. Yves Fromion. Nous avons proposé un effectif de 1 300 hommes.

M. le ministre. Le format n’est pas encore définitivement arrêté, mais il sera de cet ordre-là.

M. Yves Fromion. La composante aérienne sera donc maintenue ?

M. le ministre. Oui.

Votre analyse sur le Pacifique Sud est juste, monsieur Dhuicq. J’ai pris le parti de me rendre chaque année à Singapour pour rencontrer l’ensemble des acteurs de la zone. Nous sommes heureux de contribuer comme un acteur régulier au sein de ce forum. La France est un pays du Pacifique. Nous travaillons de manière étroite avec l’ensemble des acteurs. Certains d’entre eux sont en effet inquiets de la convoitise que suscitent leurs ressources minières. Je n’ai absolument pas oublié cette question, même si elle n’était pas prioritaire dans mon ordre du jour ces deniers temps. Je me rendrai à nouveau dans la zone au début du mois de novembre.

Les drones mobilisés pour la surveillance de la zone tampon en Ukraine ne sont ni des Reaper ni des Harfang, mais des drones tactiques SDTI – système de drone tactique intermédiaire.

Monsieur Grouard, mon objectif est de dépenser l’intégralité des crédits ouverts au titre de la LFI pour 2014, soit 31,4 milliards d’euros.

Le report de charges atteint, j’en suis conscient, un niveau à la limite du supportable, mais ce n’est pas nouveau.

M. Serge Grouard. Il ne cesse d’augmenter.

M. le ministre. En effet, mais nous cherchons à le maîtriser. Il concerne essentiellement les investissements du programme 146 « Équipement des forces ». En tout cas, c’est un point sur lequel nous sommes très vigilants.

S’agissant de la société de projet, je souhaite préciser les informations que je vous ai communiquées la semaine dernière, afin d’éviter toute incompréhension. Les ressources exceptionnelles sont définies par l’article 3 de la LPM complété par le paragraphe 5.1 du rapport annexé : il s’agit du produit des cessions immobilières, des ressources issues du programme d’investissements d’avenir (PIA), du produit de la mise aux enchères de la bande de fréquences autour de 700 mégahertz et du produit des cessions de participations d’entreprises publiques. Le produit de la vente de la bande des 700 mégahertz est bien destiné au ministère de la Défense, mais nous ne sommes pas certains de le percevoir en 2015. Nous devons donc organiser un plan de sécurisation. En vertu de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), le produit des cessions de participations ne peut être mobilisé par le ministère de la Défense que sous forme d’investissement en capital. La solution que j’ai instruction d’appliquer consiste à créer une société de projet, dont une partie du capital serait apportée par l’État à partir du produit des cessions de participations. Cette société achèterait à l’État des matériels militaires qu’elle louerait au même État.

M. Serge Grouard. C’est de la petite cavalerie budgétaire !

M. le ministre. Non, c’est la bonne manière d’utiliser le produit des cessions de participations, sans dilapider le capital de l’État. D’ailleurs, certains de mes prédécesseurs, de sensibilité politique différente, avaient tenté la même opération, et je l’avais déjà jugée intelligente à l’époque. Ils ont cependant été bloqués. Je ne suis en mesure de vous préciser aujourd’hui ni les montants ni le montage juridique, mais tous ces éléments seront communiqués au Parlement, ainsi que je l’ai déjà indiqué. En tout cas, j’ai obtenu une décision de principe favorable, ce qui n’était pas une mince affaire.

Madame Récalde, je suis conscient des difficultés du MCO et je partage presque toutes les observations de la Cour des comptes : multiplicité des acteurs ; dispersion des sites, des compétences et des matériels. J’ai pris la décision importante de confier au chef d’état-major de l’armée de l’air le MCO de l’ensemble de notre flotte aérienne. Il n’a pas été simple de rendre cet arbitrage, chacune des trois armées disposant par exemple de ses propres hélicoptères. Nous n’avons procédé à aucune externalisation. Je fonde beaucoup d’espoirs sur cette chaîne désormais intégrée de l’ensemble du dispositif. Le chef d’état-major de l’armée de l’air s’est beaucoup mobilisé sur ce sujet.

Je suis favorable à la mesure que vous proposez concernant le casernement, monsieur Grouard, mais je n’ai pas obtenu gain de cause. Je vous ferai part des réponses qui m’ont été apportées. Concernant les problèmes de casernement et de vie quotidienne, j’ai identifié 700 « points noirs ». J’ai lancé la semaine dernière un programme de rénovation qui concernera dans un premier temps 300 de ces points. Certains des équipements concernés sont chers, d’autres sont peu coûteux, mais leur absence empoisonnait la vie quotidienne des militaires.

S’agissant des Rafale, onze ont été commandés pour livraison en 2015 et quatre pour 2016. Pour que la chaîne de production soit maintenue jusqu’aux livraisons de la LPM suivante, notamment pour remplacer les Mirage , il faut que d’autres appareils soient commandés en 2015, et nous avons fait l’hypothèse que ce sera à l’export, et nous la confirmons.

Pour ce qui est du porte-hélicoptères Mistral, je répète ce que je vous ai déjà indiqué : il n’y a eu ni rupture ni suspension du contrat. Au début du mois de septembre, le président de la République a déclaré que les conditions pour qu’il donne l’autorisation d’exporter n’étaient « pas réunies à ce jour », compte tenu de l’absence de cessez-le-feu et de solution politique pérenne en Ukraine. La décision finale relève du président de la République. Elle devrait être prise entre la fin de ce mois et la mi-novembre.

M. Jean Launay. Je prolonge la question posée par Serge Grouard à propos de la société de projet. Le mécanisme que vous êtes autorisé à mettre en place permettra de suppléer à l’absence de recettes exceptionnelles issues de la cession de la bande de fréquences autour de 700 mégahertz. Les services de Bercy, que nous avons rencontrés lors d’un contrôle sur place au printemps dernier, avaient manifesté quelques réticences sur ce mécanisme, mais vous êtes sans doute parvenu à les surmonter. Dans la mesure où l’objectif est de percevoir et d’employer les recettes au cours de l’année 2015, ne faudrait-il pas établir ensemble un calendrier précis afin de s’assurer que toute la LPM sera bien exécutée ?

M. le ministre. Je suis tout à fait d’accord avec cette orientation : maintenant que j’ai obtenu l’autorisation d’agir – l’arbitrage a été rendu au plus haut niveau, les « quelques réticences » que vous avez mentionnées étant très marquées –, il convient d’établir un calendrier le plus rapidement possible. Ainsi que je l’ai indiqué, je serai transparent avec vous : je mettrai tout sur la table.

Mme la présidente Patricia Adam. Quand pourrez-vous nous présenter ce calendrier ?

M. le ministre. Probablement avant la fin du mois. Il faut que nous puissions percevoir les recettes avant la fin de l’année 2015, ce qui n’est d’ailleurs pas nécessairement contradictoire avec le fait de toucher le moment venu le produit de la cession de la bande de fréquences autour de 700 mégahertz.

M. Damien Meslot. Il semble que Daech ait accès à des financements importants et diversifiés. Nous sommes surpris que les États de la coalition n’arrivent pas mieux, avec tous les moyens dont ils disposent, à identifier et à bloquer ces sources de financement.

M. Jean-Jacques Candelier. La Cour européenne des droits de l’homme vient de reconnaître de nouveaux droits aux armées. Le ministère de la Défense en a pris acte. Il va devoir mener une expertise et légiférer. Avez-vous pu prendre connaissance du dossier, monsieur le ministre ? Avez-vous déjà établi un calendrier ?

M. Philippe Folliot. Lors d’une précédente audition, vous aviez estimé que l’absence de troupes au sol en Libye avait nui à la stabilisation du pays et expliquait en partie la situation que nous connaissons aujourd’hui. En Irak, face à un adversaire bien plus redoutable, les frappes aériennes n’auront qu’un effet à court terme et ne permettront pas de résoudre le problème. Il faudra donc que quelqu’un – je ne dis pas que cela doit être nous – intervienne au sol à un moment donné. Or l’armée irakienne est en déroute ; les peshmergas kurdes ne disposent pas des moyens nécessaires ; il serait indécent de demander à Bachar el-Assad d’agir ; l’Iran, puissance régionale, aura peut-être des réserves à s’engager ; et on peut s’interroger sur l’opportunité de solliciter les monarchies du Golfe. Dès lors, qui interviendra ?

La manœuvre ressources humaines est difficile à mener pour vous comme pour vos prédécesseurs. J’ai interrogé tout à l’heure le chef d’état-major des armées sur le rebasage des effectifs dans les régiments. D’après lui, la mesure générale qui consisterait à supprimer une compagnie par régiment n’est opportune ni sur le plan tactique ni sur le plan organisationnel. Selon vous, faudra-t-il néanmoins en passer par là ? Ou bien la réduction des effectifs se fera-t-elle par une diminution du nombre d’emprises et une concentration des unités ?

Mme Marianne Dubois. Quelle est l’implication de l’armée française dans la lutte contre l’épidémie de fièvre Ebola ?

M. le ministre. L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme a été suscité par l’Association de défense des droits des militaires (Adefdromil). La Cour a condamné la France parce qu’elle n’autorise pas les militaires à créer des associations dont la vocation serait de défendre leurs intérêts professionnels. Dont acte. Cette interdiction est une réalité. La Cour a fait référence à l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui pose le principe de la liberté d’association, mais qui stipule aussi : « Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées. » Nous allons expertiser la décision de la Cour, puis réfléchir aux inflexions nécessaires, tout en conservant, comme le permet l’article 11, des restrictions à la liberté d’association, afin de tenir compte notamment de la neutralité des armées, de l’activité opérationnelle et du statut des militaires. Je répète ce que j’ai indiqué dimanche soir à la télévision : la syndicalisation des armées n’est pas à l’ordre du jour.

M. Gilbert Le Bris. Ce n’est d’ailleurs pas ce que les militaires ont demandé.

M. le ministre. Cet arrêt concerne non seulement le ministère de la Défense, mais aussi la gendarmerie. Nous allons essayer de faire preuve d’imagination. Vous pouvez d’ailleurs vous-mêmes travailler sur cette question.

Si l’on excepte l’épisode du pillage de la banque centrale à Mossoul, pour lequel il n’y a plus rien à faire, Daech se finance essentiellement par la contrebande de pétrole, qui emprunte des voies diverses, et les taxes. Les pays de la coalition tiendront une conférence dans quelques jours à Bahreïn pour évoquer les moyens de bloquer les financements de Daech, notamment d’éventuelles interventions au niveau des banques. La France y sera représentée.

S’agissant de la cohérence entre les objectifs des différents pays, je considère pour ma part que l’entrée de la Turquie dans la coalition est, sous réserve d’inventaire, plutôt une bonne chose. J’espère notamment que cela se traduira par une meilleure sécurisation des frontières.

Il faudra en effet des troupes au sol, monsieur Folliot. En Irak, nous considérons qu’il s’agira de l’armée irakienne et des peshmergas kurdes. C’est la seule solution, mais elle prendra du temps : il faut former ces troupes. Ce travail est mené avant tout par les États-Unis. Nous y contribuons en fournissant des armes et des formateurs aux peshmergas. En Syrie, nous soutenons fermement les katibats de l’Armée syrienne libre (ASL) depuis un certain temps déjà et nous continuerons à le faire. Je suis conscient de la faiblesse de l’ASL, qui doit s’organiser différemment afin de peser davantage et de représenter une alternative. Nous ne sommes pas au bout du chemin.

Nous sommes au rendez-vous dans la lutte contre l’épidémie de fièvre Ebola : nous fournissons une assistance logistique, des capacités d’évacuation sanitaire et de transport aérien – notamment une liaison directe avec la Guinée-Conakry –, du personnel soignant ainsi que des experts. Un établissement d’accueil équipé par la Croix-Rouge a été implanté à Macenta, en Guinée forestière. Un partage des rôles s’est fait. J’espère que nous pourrons enrayer l’épidémie. En ce qui concerne sa progression, les chiffres varient d’un expert à l’autre, mais nous sommes tous très préoccupés. J’ai rencontré le président Alpha Condé la semaine dernière à ce sujet. Il m’a d’ailleurs fait part d’un élément qui m’a frappé : le Gouvernement guinéen paie les guérisseurs pour qu’ils disent qu’ils ne sont pas capables de soigner la fièvre Ebola. C’est apparemment la seule solution pour convaincre les malades de se rendre dans les établissements d’accueil prévus à cet effet, qui seront au nombre de quatre en Guinée.

M. Alain Marty. Combien de militaires français sont mobilisés par la lutte contre l’épidémie ?

M. le ministre. À ce jour, quelques dizaines.

S’agissant de la manœuvre ressources humaines, monsieur Folliot, nous ne pourrons pas procéder uniquement à un échenillage ni uniquement à des fermetures : nous devrons faire les deux. Ma tâche est donc difficile.

Mme la présidente Patricia Adam. Merci, monsieur le ministre.

La séance est levée à vingt heures.

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Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Patricia Adam, M. Olivier Audibert Troin, M. Daniel Boisserie, M. Jean-Jacques Bridey, M. Jean-Jacques Candelier, Mme Catherine Coutelle, M. Nicolas Dhuicq, Mme Marianne Dubois, M. Philippe Folliot, M. Yves Fromion, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Serge Grouard, Mme Edith Gueugneau, M. Christophe Guilloteau, M. Marc Laffineur, M. Jacques Lamblin, M. Gilbert Le Bris, M. Frédéric Lefebvre, M. Bruno Le Roux, M. Jean-Pierre Maggi, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Alain Moyne-Bressand, M. Philippe Nauche, Mme Émilienne Poumirol, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Gwendal Rouillard, M. Philippe Vitel

Excusés. - Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Yves Foulon, M. Éric Jalton, M. Jean-Yves Le Déaut, M. François de Rugy, M. Michel Voisin

Assistait également à la réunion. - M. Jean Launay