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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mardi 17 juillet 2012

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 05

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mardi 17 juillet 2012

La séance est ouverte à seize heures quinze.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation procède à l’audition, ouverte à la presse, de Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative.

M. le président Patrick Bloche. Madame la ministre, j’ai d’autant plus de plaisir à vous accueillir que vous étiez, durant la précédente législature, membre de cette Commission, et que vous serez pour nous un des ministres référents. Je vous souhaite de rester le plus longtemps possible à votre poste, afin que nous puissions construire une relation à la fois efficace et durable. En effet, les mandats de vos prédécesseurs – qu’ils aient été en charge des sports (5 en 5 ans) ou de la jeunesse (7 en 10 ans) – ont battu tous les records en matière de précarité.

Les questions abordées seront nombreuses. Sur la jeunesse, tout d’abord, puisque le Président de la République a souhaité donner priorité aux politiques publiques qui lui sont destinées. Sur le sport pour tous, ensuite – vous avez vous-même érigé en priorité de votre ministère deux grands oubliés du quinquennat précédent, la promotion du sport pour le plus grand nombre et l’éducation populaire.

Une loi-cadre pour le sport a été annoncée par le Président de la République : peut-être pouvez-vous nous préciser le calendrier de son adoption ?

Nous savons également que vous souhaitez assurer le renouveau du soutien au secteur associatif, qui en a bien besoin. Compte tenu de ses implications budgétaires, il est par ailleurs inévitable d’aborder la question du service civique.

Sous la précédente législature, nous nous étions beaucoup mobilisés tous les deux, sur les bancs de l’opposition, pour que les pratiques féminines du sport ou certaines disciplines sportives peu médiatisées bénéficient d’un meilleur traitement à la télévision, notamment sur les chaînes du service public. Vous ne serez donc pas surprise que je vous interroge à ce sujet.

Enfin, peut-être pourriez-vous évoquer l’influence du marché des droits sportifs sur l’évolution du sport et du paysage audiovisuel ?

Vous avez trouvé un ministère en grande détresse, notamment sur le plan budgétaire et social. L’absence d’inscription au projet de loi de finances pour 2012 des crédits correspondant aux primes olympiques est à cet égard un exemple parmi d’autres.

Votre entrée en fonction s’accompagne par ailleurs d’une actualité sportive intense : l’Euro 2012, les Jeux olympiques, et enfin le Tour de France, qui amène à nouveau sur le devant de la scène la question de la lutte contre le dopage.

Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. Monsieur le Président, mesdames, messieurs les députés, c’est un grand plaisir d’intervenir au sein d’une Commission à laquelle, vous l’avez rappelé, j’ai appartenu pendant la treizième législature. Je me réjouis de retrouver mes anciens collègues et les administrateurs, et je tiens à féliciter les nouveaux élus, ainsi que les membres du bureau, à commencer par vous, monsieur le président.

Les auditions ministérielles sont toujours des moments importants, car elles participent à la qualité de la construction législative et sont l’occasion d’assurer la transparence en permettant l’évaluation de l’action publique. En outre, les échanges au sein de cette Commission ont toujours été de qualité.

Il est sans doute encore trop tôt pour que je puisse vous présenter une vision détaillée de toutes les questions relevant de mes attributions, mais sachez que je serai toujours disponible pour approfondir, à l’oral ou à l’écrit, les aspects qui le mériteraient.

Le Président de la République et le Premier ministre m’ont en effet confié une responsabilité étendue et cohérente en regroupant dans un même ministère de plein exercice le sport, la jeunesse, l’éducation populaire et la vie associative. Un tel périmètre n’avait pas existé depuis 1944.

Vous avez rappelé la situation qui prévalait avant ma nomination. Cinq ministres chargés des sports se sont succédé en moins de cinq ans. Le ministère de la jeunesse a connu sept changements depuis 2002 et des rattachements variables – à l’éducation nationale, à la santé ou aux solidarités actives, quelquefois en association avec les sports, quelquefois non. Quant à l’éducation populaire, elle avait totalement disparu.

Certains se sont gaussés de cette appellation comme si l’éducation populaire n’était qu’un gadget ou une figure de style. Elle irrigue pourtant nos vies quotidiennes, par ses innovations passées comme par son action présente. À côté de l’école ou de la famille, elle est un lieu pour s’émanciper, se construire, bâtir un parcours ou une autonomie. Elle concerne 134 000 associations, plus de 6 millions de bénévoles et 650 000 emplois : centres sociaux, ciné-clubs, maisons des jeunes et de la culture, mouvements de scoutisme, JOC – Jeunesse ouvrière chrétienne –, foyers de jeunes travailleurs, Union française des œuvres laïques d’éducation physique… L’« éduc’ pop’ » est au cœur de notre société et du vivre ensemble ; elle est souvent, pour les jeunes, le premier lieu d’acquisition de l’autonomie et de rencontre avec la vie collective et associative.

Dans tous les champs de compétences qui me sont confiés, je mesure l’importance de combiner les ressources financières et humaines offertes par le ministère et ses services déconcentrés avec un gros travail interministériel, un contrat de confiance avec les collectivités et un partenariat avec les associations, afin d’établir une relation de « co-construction » des politiques publiques.

J’en viens à l’exécution, pour l’exercice 2012, des programmes de la loi de finances relatifs à mon ministère. S’agissant du programme « Sports », ou programme 219, les crédits s’établissent à 255,4 millions d’euros : 71 millions d’euros pour le soutien aux fédérations, 78 millions d’euros pour le financement des CREPS – centres de ressources, d'expertise et de performance sportives –, des écoles nationales et du musée, 33 millions d’euros pour l’INSEP – Institut national du sport, de l'expertise et de la performance –, 11 millions consacrés au partenariat public-privé destiné à la rénovation de l’INSEP, et 12 millions au Stade de France.

Le CNDS – Centre national pour le développement du sport –, lui, bénéficie de crédits affectés : prélèvements sur les mises de la Française des Jeux et les paris sportifs, produit de la taxe dite « Buffet » sur les droits d’exploitation télévisuelle. En raison d’une diminution des recettes de cette dernière taxe, le niveau de ressources prévu pour l’exercice 2012 – 272 millions d’euros – ne sera malheureusement sans doute pas atteint.

De son côté, le programme 163 – « Jeunesse et vie associative » – est doté de crédits s’élevant à 230 millions d’euros, dont 134 millions, soit plus de 60 %, sont consacrés au service civique. Le reste sert à financer le Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, le FONJEP – à hauteur de 25 millions d’euros –, les services déconcentrés – 16 millions –, l’action internationale – 13 millions –, le Fonds de développement de la vie associative, FDVA – 11 millions – et la contractualisation avec les associations d’éducation populaire – 9 millions.

Il convient d’y ajouter un programme support, le programme 124, mutualisé avec les affaires sanitaires et sociales. Enfin, s’agissant des personnels, le budget finance plus de 7 000 équivalents temps plein, dont environ 2 000 concernent les opérateurs extérieurs – INSEP, Agence du service civique, CNDS, etc.

Je souhaite maintenant détailler, pour chacun des secteurs concernés, l’état de la situation, notre méthode et les enjeux.

En ce qui concerne le sport, la situation financière est extrêmement délicate. À quelques jours de l’ouverture des Jeux olympiques de Londres, et à quelques semaines de celle des Jeux paralympiques, le 29 août, alors que la France enverra des délégations de respectivement 332 et 164 athlètes, notre première décision a été de permettre une valorisation des primes des médaillés.

Après avoir entendu beaucoup de choses à ce sujet ces derniers jours, je tiens à rappeler tout d’abord que plus de 95 % des sportifs concernés ont de très petits revenus, et ensuite que ces primes dites « à la médaille » datent de 1984, leur financement ayant toujours été inscrit en loi de finances initiale. C’était le cas dans la loi du 30 décembre 2005 pour les Jeux de Turin ; dans celle du 24 décembre 2007 pour les Jeux de Pékin ; dans celle du 30 décembre 2009 pour ceux de Vancouver. Malheureusement, la loi de finances initiale pour 2012 n’a rien prévu à ce sujet. Les sénateurs Lozach et Martin avaient parlé de « petite bombe » placée sur le bureau du futur ministre des sports ; ils avaient raison, puisqu’il m’a fallu prendre en compte cette dépense. J’espère cependant que la somme en question – qui ne sera pas prélevée sur les autres budgets – sera la plus élevée possible.

D’un point de vue financier, un certain nombre d’opérations engagées ne sont pas couvertes : travaux à l’INSEP et dans les CREPS, à hauteur de 6 millions d’euros ; disposition sur la retraite des sportifs de haut niveau, supposée s’appliquer depuis le 1er janvier 2012, et dont le coût s’élève entre 6 et 8 millions d’euros ; travaux engagés en faveur du Musée du sport, qui nécessitent, dès 2012, une inscription de 1,3 million d’euros, auxquels il faudra ajouter 6 millions en 2013.

S’y ajoute la situation assez dégradée du Centre national de développement du sport, à qui on a demandé successivement de participer au financement des stades de l’Euro 2016 – en plus des 120 millions d’euros issus du prélèvement supplémentaire de 0,3 % sur les mises de la Française des jeux –, de financer les arenas – dans des conditions parfois étonnantes, notamment pendant la période préélectorale –, de financer l’application des conventions d’objectifs des fédérations, selon une procédure critiquée par la Cour des comptes, ou encore l’organisation des grandes manifestations… Tout cela au moment où le CNDS connaît une perte de rendement en raison de la diminution du produit de la taxe Buffet. Ainsi, à la fin de l’année 2012, le Centre aura accumulé, au titre des engagements hors bilan, une dette de 443 millions d’euros. L’exercice budgétaire va se solder par un déficit de plus de 30 millions d’euros et un fonds de roulement quasi nul.

Dans ce contexte, nous n’avons pas moins souhaité porter, avec le Président de la République, certaines ambitions, comme la réduction des inégalités d’accès au sport ou la promotion du sport-santé.

Nous avons en effet besoin d’indiquer le « sport tout au long de la vie », de prescrire le sport en tant que moyen de prévention primaire contre les maladies liées à la sédentarité ou au vieillissement, car souvent, la pratique du sport est préférable à la consommation d’une longue liste de médicaments. L’Institut national du cancer n’a-t-il pas montré qu’une activité physique régulière permettait aux femmes ayant eu un cancer du sein ou aux hommes ayant eu un cancer du côlon de réduire de 30 % le risque de récidive ?

Sur ces sujets, mais aussi sur le rayonnement de la France à travers ses sportifs de haut niveau, sur la construction de leur parcours d’excellence – mais aussi leur parcours de femmes et d’hommes –, sur l’après-carrière, j’ai entamé de nombreuses consultations : avec le CNOSF – le Comité national olympique et sportif français –, avec les fédérations, avec les mutuelles, les organisations syndicales… Un travail interministériel a été engagé, associant la ministre de la santé, le ministre de l’éducation nationale, la ministre en charge des personnes handicapées et la ministre en charge de l’enseignement supérieur. Enfin, une consultation est menée avec les associations d’élus.

Cette réflexion partagée sur les missions respectives de l’administration et des opérateurs doit déboucher sur une meilleure organisation des intervenants publics œuvrant dans le domaine du sport, une meilleure articulation entre les différents acteurs du service public du sport, une plus grande autonomie du mouvement sportif, la constitution d’assemblées régionales du sport avec les collectivités, qui connaissent le mieux les priorités en matière de soutien aux clubs de leur territoire ou en termes d’aménagements et d’équipements sportifs. De même, il conviendra de recentrer le CNDS sur sa mission d’origine – le développement du sport pour tous et des équipements pour tous – et de permettre aux CREPS de reprendre toute leur place dans la politique de service public du sport.

Ce travail, auquel je souhaite que les parlementaires soient largement associés – et je sais pouvoir compter sur de nombreuses compétences au sein de cette Commission – doit nous conduire à l’adoption d’une loi-cadre de modernisation du sport à la fin de l’année 2013.

Une consultation sera également ouverte sur les missions qui pourraient être confiées à une assemblée nationale du sport. L’actuelle conférence nationale du sport a le même objectif que cette assemblée : partager la gouvernance du sport et permettre à l’État de s’entourer d’acteurs diversifiés pour mieux orienter ses politiques publiques. Mais le pourcentage d’élus et de représentants de l’État y est beaucoup plus important que dans l’ancien conseil national des activités physiques et sportives – le CNAPS. En outre, sa composition laisse une faible place aux femmes – 5 seulement sur un total de 31 membres, alors que le ministère des sports a la responsabilité de veiller à une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans l’ensemble de ses instances. La composition de cette instance doit donc être largement revue, de façon à donner une plus grande place au collège des pouvoirs publics – mais en l’élargissant aux autres ministères et aux collectivités locales – ,  à côté d’un collège des associations, d’un collège des acteurs économiques et sociaux intéressés par le sport – qui permettra aux représentants syndicaux de participer au dialogue sur les politiques publiques du sport – et d’un collège des personnalités qualifiées.

À l’occasion de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2013, nous nous interrogeons sur les recettes affectées du CNDS, et particulièrement sur la taxe Buffet. Deux pistes de réflexion sont suivies. Tout d’abord, l’assiette de la taxe, aujourd’hui limitée aux organisateurs de manifestations sportives françaises, pourrait être étendue aux compétitions internationales dont les télévisions françaises achètent les droits de retransmission. Ensuite, la taxation pourrait s’appliquer au diffuseur plutôt qu’à l’organisateur de compétitions.

Lors de ma nomination, j’ai dû reprendre quelques dossiers urgents qui, en dépit de certaines déclarations préélectorales pour le moins optimistes, étaient loin d’être réglés. Il en est ainsi du retour en France d’un grand prix de Formule 1, de la rénovation de stades pour l’Euro 2016 – la Commission européenne doit être saisie afin de s’assurer de la validité des subventions versées –, de la convention avec le Consortium Stade de France, ou des Jeux de la francophonie de Nice, qui doivent accueillir, en septembre 2013, cinquante-cinq États francophones, huit compétitions sportives et des acteurs culturels relevant de sept domaines artistiques. Pour cette dernière manifestation, la création du groupement d’intérêt public a enfin été débloquée il y a quelques jours, le 9 juillet.

La sincérité des résultats, essence même de la pratique sportive, fait également partie de nos sujets de préoccupation. Le décret sur la préfiguration du « passeport biologique » est rédigé ; un symposium avec l’Agence mondiale antidopage sera organisé en France en novembre 2012 ; et avec l’ARJEL, l’Agence de régulation des jeux en ligne, nous avons contribué à la conclusion de l’accord partiel élargi au Conseil de l’Europe sur les paris truqués.

Les deux comités d’éthique poursuivent leurs travaux, qu’il s’agisse du comité du supportérisme présidé par l’ancien député Éric Berdoati, et dont la composition devra évoluer, ou du comité permanent de lutte contre les discriminations, présidé par Laura Flessel, et qui travaille actuellement avec la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme.

Nous devrions être amenés assez rapidement à aborder la question récurrente des normes relatives aux équipements sportifs, en prenant appui sur le rapport du sénateur Doligé et la réflexion de la Commission nationale des normes.

Par ailleurs, il convient d’avancer sur la modification du décret d’application de la directive « Télévision sans frontière », afin de permettre la diffusion sur des chaînes de télévisions en accès gratuit de manifestations ne faisant pas, actuellement, l’objet de propositions d’achat. Aujourd’hui, ces chaînes font une place beaucoup trop faible au sport féminin.

Enfin, dans le cadre de la consultation sur la refondation de l’école, un travail a été entrepris avec le ministère de l’éducation nationale sur la formation des enseignants et des professeurs des écoles dans le domaine de l’éducation physique et sportive – EPS. Après la perte de 3 000 postes d’enseignants d’EPS depuis 2007, un effort supplémentaire de recrutement est consenti dès cette année s’agissant du nombre de postes offerts au CAPES.

J’en viens au secteur de la jeunesse, de la vie associative et de l’éducation populaire, dont j’ai rencontré, depuis ma prise de fonction, les principaux représentants, tels les responsables du CNAJEP – Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire –, qui représentent 72 associations. J’ai également installé le Forum français de la jeunesse, lequel regroupe 17 organisations de jeunes – mouvements syndicaux, politiques, mutuelles, associations de réseaux de jeunesse, etc. –, afin que la France ne soit plus l’un des seuls pays d’Europe à être privé d’une instance capable de représenter les associations de jeunes au niveau de l’Union. J’ai aussi consulté les coordinateurs de l’appel « pour un big bang des politiques jeunesse » – 65 organisations –, ainsi que des représentants de l’INJEP – Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire – et de l’Agence du service civique.

J’ai eu par ailleurs l’occasion d’intervenir devant le Conseil économique, social et environnemental sur la question de l’accès aux droits sociaux, qui restent peu lisibles pour les jeunes.

Le constat est partout le même : la précarité de la jeunesse s’est accrue. La tranche d’âge des 16-25 ans est aujourd’hui celle qui connaît le plus fort taux de pauvreté : un jeune sur six n’a pas de mutuelle, 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans qualification. Un tel constat rend légitime la priorité donnée à la jeunesse dans le projet présidentiel, afin que les jeunes vivent mieux en 2017 qu’en 2012.

Le message envoyé par les jeunes est le suivant : « Ne faites pas cette politique pour nous, faites-la avec nous ». Cela implique notamment une cohérence de l’action interministérielle, sous l’autorité du Premier ministre. Nous avons donc pris toute notre place dans les groupes de travail réunis dans le cadre de la consultation sur la refondation de l’école, en souhaitant que les réseaux d’éducation populaire y soient associés, à cause de l’importance du temps périscolaire. De même, nous intervenons en matière de logement – les étudiants sont parmi les premiers concernés par le décret de Cécile Duflot sur le blocage des loyers –, d’emploi – au sujet des contrats d’avenir et des contrats de génération – et sur l’enseignement supérieur – à propos de l’allocation d’études et de formation sous conditions de ressources.

À plusieurs reprises, je suis allée à la rencontre de la Conférence permanente des coordinations associatives, la CPCA, notre interlocuteur privilégié sur la vie associative. Nous avons par ailleurs décidé de réactiver la charte des engagements réciproques, signée entre l’État et les associations regroupées au sein de la CPCA à l’occasion du centenaire de la loi de 1901 sur les associations, et de lui donner des déclinaisons thématiques et régionales.

J’ai en outre saisi le Haut conseil à la vie associative sur le congé d’engagement, sur lequel nous travaillons avec M. Benoît Hamon, le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, ainsi que sur le financement privé de la vie associative. Les bénévoles sont 16 millions dans notre pays ; il convient de les aider à concilier leur vie professionnelle et leurs engagements associatifs.

Nous sommes également très mobilisés, en ce début d’été, en faveur de la qualité des accueils collectifs de mineurs : 2,5 millions d’enfants vont en effet partir cet été, dont 1 million seront pris en charge par des structures avec hébergement. Nous connaissons, dans ce domaine, l’importance prise par les collectivités et les réseaux d’éducation populaire, la qualité des programmes pédagogiques et la rigueur des obligations liées à la sécurité de l’encadrement, même si elles ne permettent pas d’éviter tous les drames, comme nous l’avons vu encore récemment.

En 2012, un peu moins de 20 000 jeunes sont volontaires du service civique. Leurs missions, qui durent huit mois en moyenne, sont effectuées à 15 % dans des collectivités, et à 85 % dans des associations agréées. Dans le cadre du programme pluriannuel 2013-2015, nous travaillons actuellement à la création des conditions d’une montée en charge de ce dispositif, conformément aux engagements du Président de la République.

Je terminerai mon propos en évoquant les personnels de mon ministère, qui ont payé un lourd tribut à la RéATE – réforme de l’administration territoriale de l’État – et la RGPP – révision générale des politiques publiques. Les effectifs sont en forte baisse : 1 000 agents en moins entre 2007 et 2012, une réduction de 12 % du nombre de professeurs de sport, de 13 % de celui des inspecteurs, et de 7 % des conseillers d’éducation populaire et de jeunesse.

Il est difficile de disposer de données fiables sur des effectifs relevant de mon ministère, en raison de la mutualisation des services support avec le ministère chargé de la santé. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai réclamé une meilleure lisibilité sur ce sujet dans le projet de loi de finances pour 2013. Il n’en demeure pas moins que ces personnels d’une grande qualité connaissent une situation très difficile. Au moment où doit être consenti, dans la justice, un important effort collectif, j’ai souhaité engager dès ma prise de fonction une réflexion sur l’adéquation des missions et des moyens des services et établissements. Ses conclusions nous permettront – compte tenu de la perspective d’une nouvelle étape dans le processus de décentralisation – de définir un fonctionnement de l’administration à même de redonner de l’envie à son personnel et de servir au mieux l’usager.

J’ai donc saisi l’inspection générale de la jeunesse et des sports d’une mission dont le rapport me sera remis, après consultation des organisations syndicales, fin juillet. J’ai également mis en place un groupe de travail associant le secrétariat général du Gouvernement, le ministère de l’intérieur, le ministère de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, le secrétariat général des affaires sociales, des représentants de l’administration centrale, de nos services déconcentrés et de nos établissements, ainsi que les syndicats. Ses conclusions sont attendues à l’automne.

Tels sont les grands enjeux auxquels il convient de répondre, avec méthode et en associant le Parlement.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie, madame la ministre, pour cette présentation exhaustive et je donne à présent la parole aux orateurs des groupes.

Mme Brigitte Bourguignon. Au nom du groupe SRC, je vous remercie, madame la ministre, de cet exposé brillant sur la politique que vous souhaitez mener. Vous devez travailler dans un contexte budgétaire contraint, ce dont nous prenons acte. Nous savons par ailleurs dans quelle situation se trouve votre ministère : elle résulte de la valse des ministres, de l’absence de cohérence gouvernementale, des changements incessants dans les attributions de vos prédécesseurs, d’un manque de professionnalisme évident dans la préparation budgétaire – le financement de nombreuses réformes annoncées à grand renfort de publicité, comme la retraite des sportifs de haut niveau, n’a ainsi pas été inscrit dans la loi de finances – et enfin de la mise en avant du sport professionnel et du sport spectacle au détriment du monde amateur et associatif.

Je me réjouis des orientations prises par votre ministère, notamment en faveur d’un égal accès aux pratiques sportives ou d’une association des collectivités territoriales – aujourd’hui principaux financeurs – dans la réflexion sur la politique publique du sport en France. Dans ce contexte, nous devrons nous montrer innovants et trouver des moyens moins onéreux de mener cette politique.

Vous avez évoqué le projet d’une politique de santé par le sport, qui ne doit pas, elle, en rester au stade du slogan mais être vraiment efficiente. Pensez-vous associer à cet objectif les organismes de mutuelle et le corps médical ? Est-il envisageable d’inscrire la « prescription sport » dans les programmes régionaux de santé ? Une telle prescription aurait pour but de prévenir, mais aussi de guérir : on sait en effet aujourd’hui que le sport peut avoir un effet curatif sur certaines pathologies. En outre, cette politique serait non seulement peu coûteuse, mais elle pourrait même être une source d’économie pour l’assurance-maladie.

Par ailleurs, l’après-carrière des sportifs de haut niveau et leur devenir sur le plan de la santé ne devraient-ils pas faire l’objet d’une plus grande attention de la part de votre ministère ?

M. Gérald Darmanin. Au nom du groupe UMP, je tiens à vous féliciter pour votre nomination. J’espère très sincèrement, pour le sport français, que votre action sera couronnée de succès. Vous allez bientôt rejoindre nos athlètes à Londres : sachez que la France tout entière sera sensible à chaque exploit sportif.

Sans doute par manque de temps, vous n’avez effectué qu’un bilan partiel de l’action de vos prédécesseurs. Permettez-moi donc de le compléter.

Il est surprenant que vous ayez commencé par l’aspect financier, dans la mesure où vous dites vous-même, avec raison, que tout ne peut pas se réduire à un bilan comptable. Mais si nous devons parler chiffres, il faut rappeler que le budget consolidé du sport représente 870 millions d’euros en 2012, contre 480 millions d’euros en 2002. Le financement de la politique du sport a connu une augmentation de 58 % en dix ans : je ne suis pas sûr que beaucoup de vos collègues puissent se targuer d’avoir bénéficié d’une amélioration aussi significative de leur budget.

Vous avez précisé le rôle du CNDS, qui est une sorte de « tirelire » du sport français. Son soutien en faveur des équipements sportifs des collectivités territoriales, hors stades de l’Euro 2016, est passé de 61 millions d’euros en 2006 à 105 millions en 2012, tandis que le montant des subventions aux associations a crû de 120 à 142 millions d’euros. On peut également citer les 42 millions d’euros consacrés aux grands équipements olympiques qui permettront peut-être à la France d’accueillir les Jeux et donnent, à tout le moins, la possibilité à ses athlètes de se préparer – le vélodrome de Saint-Quentin, la base nautique de Vaires-sur-Marne ou le Centre aquatique d’Aubervilliers, qui tous ont pour point commun d’être construits dans des communes de gauche –, ainsi que les 50 millions d’euros destinés aux arenas.

Le sport pour tous n’a pas été oublié : les crédits en faveur des personnes handicapées ont doublé en cinq ans, les crédits du CNDS pour l’accompagnement éducatif ont été augmentés de 20 millions d’euros, les habitants des quartiers situés en zone prioritaire se sont vus réserver 15 % des financements du CNDS, et de nombreux contrats d’emplois aidés ont été signés par le ministère des sports.

En matière de pratique sportive, le nombre de licenciés a augmenté de 1,5 million entre 2006 et 2010. Et même si la pratique féminine reste trop faible, à 19 %, elle était de 16 % en 2006.

Enfin, jamais un gouvernement n’avait organisé ou obtenu autant d’événements sportifs de grande valeur que celui de François Fillon : songeons à la Coupe du monde de rugby, au Championnat du monde de handball, à l’Euro 2016, à la Ryder Cup, aux Jeux équestres mondiaux, dont nos collègues élus en Normandie savent à quel point les retombées économiques peuvent être importantes.

S’agissant du prétendu trou de 50 millions d’euros, vos interventions sont certes moins virulentes devant cette Commission que devant la presse, mais vous êtes trop imprécise pour faire impression. En outre, la répétition d’un mensonge ne fait pas une vérité.

En ce qui concerne le fonds de roulement du CNDS, vous avez en partie raison : il est quasi nul. Mais, et c’est là que se situe notre différence, j’estime que cela vaut mieux, car si cette somme n’avait pas été dépensée, dans le contexte budgétaire actuel, elle aurait fini par bénéficier à un autre secteur que le sport. Par ailleurs, lorsque vous évoquez la dette du CNDS, vous oubliez de préciser que le budget a été élaboré sur cinq ans. Or on ne peut pas réaliser en une année ce qui a été prévu pour cinq ans.

Il existe en outre des sources potentielles d’économies, par exemple du côté des stades de l’Euro 2016, dont la rénovation est parfois mal engagée. Ainsi, qu’allez-vous faire des 12 millions d’euros destinés au stade Bollaert, qui est déjà, en proportion, le plus aidé de tous les stades sélectionnés pour l’Euro 2016 – 15 % du coût total, contre 9 % en moyenne ? Cette somme reviendra-t-elle au CNDS pour financer d’autres activités sportives ou aider d’autres stades ?

De même, votre prédécesseur avait refusé d’attribuer 10 millions d’euros au Parc des princes pour financer sa rénovation, considérant qu’il serait anormal de subventionner un club déjà aidé par un actionnaire qui dispose d’importantes possibilités d’investissement. Allez-vous confirmer cette décision ?

S’agissant du consortium gestionnaire du Stade de France, le précédent ministre des sports avait signifié à M. Martin Bouygues et M. Xavier Huillard que l’État ne paierait pas, cette année, les 12 millions d’euros de pénalités correspondant à l’absence de club résident. Allez-vous maintenir cette position, ce qui permettrait d’augmenter d’autant le montant de votre budget ? La Fédération française de football semble vouloir renoncer à jouer ses cinq matchs au Stade de France lors de la prochaine saison. Dans cette hypothèse, l’État devrait dépenser en compensation 1 million d’euros supplémentaire. Êtes-vous prête à signer l’avenant à la convention qui le lie au consortium, malgré le coût que cela occasionnerait pour nos finances ?

À vous entendre, vous êtes favorable à un État fort dans le domaine sportif, en termes de moyens comme de personnels. Mais nous avons cru comprendre que le CNDS serait régionalisé dans le cadre de l’acte III de la décentralisation – autrement dit, une partie des moyens du CNDS irait aux régions. Par ailleurs, le programme de François Hollande prévoit de donner la préparation olympique au CNOSF. Dans ces conditions, que reste-t-il de l’État fort ?

Par ailleurs, qu’en est-il de l’éventuelle fusion entre l’Agence française de lutte contre le dopage et l’ARJEL ?

Enfin, je serais curieux de savoir comment vous comptez instituer la prescription médicale en faveur de la santé par le sport. Sa mise en place serait en effet une grande avancée et permettrait probablement de réaliser des économies, même si elle s’annonce très compliquée. Cette préoccupation n’est-elle pas cependant contradictoire avec le fait d’avoir donné, en tant que maire, le nom de Kindarena au Palais des sports de Rouen ? Car la santé passe aussi par l’alimentation.

Mme Barbara Pompili. Le groupe écologiste vous remercie, madame la ministre, pour cette présentation très claire et très complète des grandes orientations que vous comptez prendre.

Je concentrerai mon propos sur les associations, un secteur essentiel de notre tissu économique et social, mais fort mal en point depuis quelques années. En dépit du travail qu’elles effectuent quotidiennement, elles sont méprisées, rencontrent des difficultés et ont subi d’énormes coupes dans leurs subventions. Je salue donc le changement d’approche du Gouvernement à leur égard, qui était très attendu. Je pense en particulier à la volonté de redynamiser la charte des engagements réciproques, de façon à renouer le dialogue et à bâtir un nouveau cadre général de travail commun à l’ensemble des acteurs, à votre déclaration récente selon laquelle la subvention ne devait pas être l’exception, et à votre appel à préserver la capacité d’indépendance et d’initiative des associations. Je pense en effet qu’il est très important de permettre la « co-construction » des politiques publiques et de cesser de stigmatiser le financement public des associations.

De même, une réflexion doit être menée sur le financement des fonctions support et des têtes de réseau. Vous avez cité la CPCA, qui joue un rôle très important d’information et d’aide aux structures associatives. Plus largement, il est nécessaire de définir un cadre clair et de simplifier les modes de financement.

Dans ce contexte, il convient de revenir sur la procédure des marchés publics en raison des risques qu’elle comporte, notamment celui, assez fréquent, d’exclure les associations ayant initialement identifié le besoin et apporté une première réponse. Certains y voient une façon de réserver les activités rentables au secteur privé en laissant les non-rentables aux associations ; d’autres, un moyen de réduire les associations à de simples prestataires de services, au risque de perdre le caractère innovant de leurs initiatives. Or, bien souvent, le recours à cette procédure résulte d’une interprétation erronée de la réglementation. Il est donc nécessaire de clarifier les choses.

Une autre demande du tissu associatif concerne l’emploi, qu’il convient, d’une manière générale, de mieux valoriser. Comment le dispositif des emplois d’avenir s’articulera-t-il avec l’existant – emplois solidaires, emplois tremplin ? Il serait souhaitable qu’il ne concerne pas seulement des personnes non qualifiées, car les associations ont également un grand besoin de personnels qualifiés.

Enfin, la simplification administrative constitue un réel enjeu pour les associations, notamment sur le plan financier. La recherche de financement, en particulier, constitue pour elles un véritable casse-tête. Simplifier les démarches permettrait donc de dégager des moyens humains et financiers pour mener à bien des projets sur le terrain au service de la population, ce qui est la mission première des associations.

M. Thierry Braillard. « Nous vivons des temps sans mémoire », disait Valéry Giscard d’Estaing. Je tiens donc à rafraîchir celle de notre collègue de l’UMP : il y a cinq ans, il avait fallu attendre six mois pour que les sports soient dotés d’un secrétariat d’État. C’est donc un vrai plaisir de vous recevoir aujourd’hui, madame la ministre.

Le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste estime nécessaire de constituer un groupe de travail sur l’Euro 2016, car les projets sélectionnés suscitent des inquiétudes : surcoûts dans les partenariats public-privé, retard dans les constructions, etc. Quelles sont vos intentions à ce sujet ?

Il convient de louer la loi Buffet qui a apporté de la transparence dans les relations entre les collectivités et le sport professionnel. Mais certains recours judiciaires ont mis les collectivités en difficulté en matière de soutien ou d’achat de prestations de services. Peut-on envisager de moderniser la loi ?

Le soutien financier des collectivités permet aux associations sportives de recourir aux services d’entraîneurs diplômés en échange d’une légère rémunération. Mais il suffit d’un contrôle de l’URSSAF pour voir ces activités requalifiées en travail salarié, alors qu’il ne s’agit pas de cela. Comptez-vous vous pencher sur la question ?

En 2005, le Gouvernement avait décidé de suspendre tout soutien aux emplois aidés, ce qui a conduit nombre de régions à créer les emplois tremplin, destinés à la vie associative. Des inquiétudes s’expriment aujourd’hui sur ce qu’ils vont devenir. Par ailleurs, il est vrai que de nombreuses associations souhaiteraient bénéficier de soutiens pour des emplois plus qualifiés.

Enfin, on peut se demander comment réagir lorsque l’on lit qu’un club professionnel de football, soutenu par le Qatar, s’apprête à recruter un joueur en lui offrant un salaire net de 14 millions d’euros. Un tel événement ne peut vous laisser insensible.

M. Rudy Salles. Au nom du groupe Union des démocrates et indépendants, je vous félicite, madame la ministre, pour votre nomination.

Le sport est un sujet qui devrait rassembler et non diviser, et nous saurons apprécier vos décisions dès lors qu’elles vont dans le bon sens. Les déclarations de représentants de la majorité selon lesquelles certains d’entre nous aimeraient le sport et d’autres non sont grotesques. Il existe des approches différentes, mais sur le long terme, nous saurons distinguer ce qui est bien ou moins bien. Comme tous les ministres, vous connaîtrez votre part de réussite et votre part d’échec.

Vous avez évoqué les conséquences de la RGPP sur les moyens et les personnels consacrés au sport. Mais votre ministère n’est pas sanctuarisé, comme ceux de la justice, de l’intérieur ou de l’éducation nationale. Au lieu de remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, va-t-on n’en remplacer qu’un sur trois dans certains ministères, comme je l’ai entendu dire ? Comment comptez-vous améliorer les moyens qui vous sont attribués ?

Le Musée national du sport est un très beau projet. Pouvez-vous nous confirmer qu’il bénéficiera, dans le budget 2013, de crédits à hauteur de 6 millions d’euros ?

M. le président Patrick Bloche. Nous en venons aux autres orateurs inscrits.

M. Pascal Deguilhem. Je souhaite rappeler à M. Darmanin qu’il n’est plus directeur de cabinet, mais député. En outre, les chiffres qu’il a cités ne sont pas bons, car ils correspondent à des périmètres budgétaires complètement différents. Nous sommes tous intéressés par le sport, mais en cinq ans, nous n’avons eu aucune politique publique à nous mettre sous la dent : seulement des dispositions concernant les agents sportifs, les jeux en ligne, les stades de l’Euro 2016 ou la responsabilité civile des sportifs. Il convient aujourd’hui de poser les bases d’une véritable politique publique du sport.

Vous n’avez fait qu’effleurer la question du sport à l’école. Or celui-ci se trouve à l’articulation des mondes du sport et de l’éducation. Augmenter le nombre de postes est une bonne chose, mais nous devrons êtres attentifs aux cadres de l’UNSS – Union nationale du sport scolaire –, car ils sont un élément indispensable de développement de la pratique sportive.

Il est exact que depuis 1984, les primes en faveur des médaillés olympiques ont toujours été inscrites dans le budget. Elles ne l’ont pas été cette année, alors même que votre prédécesseur, M. Douillet, en avait bénéficié en son temps, à l’instar d’un autre ministre médaillé olympique, M. Lamour !

Vous avez rappelé que 60 % des crédits de la jeunesse étaient consacrés au service civique : c’est une équation financière difficile à résoudre. En attendant, nous devons réfléchir à la gouvernance du système, à l’évaluation des missions, mais aussi à la valorisation de ce service dans le cursus universitaire et le parcours des étudiants.

M. Frédéric Reiss. Les associations sont en effet un lieu irremplaçable pour l’apprentissage du vivre ensemble. Lors de la session de 2011 du Parlement des enfants, les députés juniors, notant la diversité et la richesse de leurs origines, avaient émis le souhait de voir combattue toute discrimination dans le sport. Quelle importance accordez-vous à la lutte contre les discriminations dans les différentes fédérations ? Comment comptez-vous sensibiliser les associations à cette question, y compris dans les petites communes rurales ?

Élu d’une circonscription frontalière, je constate qu’il reste beaucoup à faire en matière d’échanges entre jeunes de France et d’Allemagne. Alors que nous nous apprêtons à fêter les cinquante ans du traité de l’Élysée, il convient de donner à la jeunesse toute sa place dans cette commémoration. Allez-vous donner une nouvelle impulsion à l’OFAJ, l’Office franco-allemand pour la jeunesse, afin d’améliorer la perception de la citoyenneté européenne ?

Mme Colette Langlade. Vos rencontres avec les représentants d’organisations de jeunes, le lancement du Forum français de la jeunesse, le souhait d’améliorer l’accès des jeunes aux droits sociaux, tout cela traduit votre préoccupation en faveur de la jeunesse, ce dont je me félicite. Pensez-vous réactiver le Comité interministériel de la jeunesse, qui ne s’est réuni que deux fois en vingt ans ?

La jeunesse et la vie associative ont été sacrifiées pendant les dix dernières années : les crédits ont diminué, les personnels ont été décimés par la RGPP. En outre, les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » ont été phagocytés – à hauteur de 70 % – par le service civique, alors qu’il y a tant d’autres tâches à accomplir. Quelles solutions proposez-vous pour que la jeunesse, la vie associative et le service civique disposent enfin des moyens qu’ils méritent ?

En ce qui concerne le service civique, de nombreux dysfonctionnements sont à déplorer en matière de formation et d’agrément des associations qui accueillent les volontaires. Certaines tendent à confondre ces derniers avec des stagiaires ou des employés des services de l’État. Le Président de la République a annoncé sa volonté de relancer cette belle idée qu’est le service civique. Comment allez-vous vous y prendre ?

M. Benoist Apparu. Le Président de la République a fait de la jeunesse une de ses priorités. L’idée d’une allocation universelle pour la jeunesse figurait parmi ses propositions électorales, mais je ne crois pas vous avoir entendu l’évoquer. Qu’en est-il ?

Après avoir entendu mes collègues de la majorité évoquer les dégâts causés par la RGPP, j’imagine que votre intention est d’inverser la tendance. De combien sera augmenté le budget consacré aux associations ? Dans quelle mesure allez-vous compenser la perte de postes au sein de votre ministère, alors que trois ministères seulement sont présentés comme prioritaires, la réduction des emplois publics devant être assumée par tous les autres ?

Enfin, quelque chose me gêne à propos du service civique. On affirme qu’il s’agit de valoriser l’engagement des jeunes au service de la société, mais au vu des publics concernés, l’objectif sur le terrain semble plutôt d’aider ces jeunes à s’insérer dans la vie active. Quelle est votre philosophie en la matière ?

M. Michel Ménard. Je suis heureux de voir l’éducation populaire faire partie de vos attributions. Susciter la curiosité, éveiller les consciences, développer l’esprit critique, aller contre les idées préconçues, construire du collectif, du vivre ensemble, de la solidarité, là réside l’essentiel des défis pédagogiques de l’éducation populaire et des courants de pensée qui lui sont associés. Parfois, les mouvements d’éducation populaire sont caricaturés, considérés comme dépassés. Ils sont pourtant des précurseurs. Malheureusement, l’incertitude des financements affaiblit ces associations.

L’application de la réglementation européenne sur les appels d’offres pose souvent problème. Il est impératif de prendre des dispositions pour éviter la requalification en contrats à titre onéreux ayant pour objet la fourniture d’une prestation de service social de tous les partenariats entre les pouvoirs publics et les mouvements d’éducation populaire. Les secteurs des loisirs, de la jeunesse, de l’aide sociale, du développement local, en particulier, devraient être exclus du champ d’application des marchés ou concessions.

J’espère que les mouvements d’éducation populaire seront désormais mieux considérés et que leur activité, dont le rôle est essentiel, sera sécurisée. Quels sont les projets du Gouvernement en ce domaine ?

M. Ary Chalus. Comme tous mes collègues, je vous félicite pour votre nomination, madame la ministre, et j’espère que nous ferons ensemble du bon travail tout au long de la législature.

En organisant, en 2010, les états généraux de la jeunesse dans ma ville, nous avons auditionné près de 1 000 jeunes dont plus de 50 % voulaient se former aux métiers du sport. La commune leur a payé leur formation, à l’issue de laquelle plusieurs d’entre eux ont réussi leur brevet d’État d’éducateur sportif dans différentes disciplines – foot, basket, athlétisme. Plus de 80 % ont par la suite trouvé un emploi dans une association sportive, aidée par la commune et la collectivité, tandis que les 20 % restants sont devenus auto-entrepreneurs, dispensant des cours de gym dans les quartiers ou pour les comités d’entreprise. Nous avons plusieurs types de contrat d’insertion. Ne serait-il pas souhaitable d’obliger les jeunes des sections sport à passer le brevet d’État, qui est l’équivalent du bac ?

Nous avons été la première commune à mettre en place le service civique outre-mer, et nous avons, avec l’accord de l’État, conclu avec une vingtaine de titulaires du brevet d’État un contrat civique. Ils sont désormais à la disposition d’associations, et, depuis près de trois ans, la violence des jeunes a pratiquement disparu de notre ville qui compte 30 000 habitants.

Mme Marie-Odile Bouillé. La progression de la pratique sportive féminine ne se reflète nullement dans les retransmissions télévisées. Vu l’importance de ce média pour les jeunes générations, montrer des matchs où s’illustrent de jeunes femmes pourrait donner envie de faire du sport, surtout que leur attitude est souvent plus correcte que celle de certains footballeurs. Comment changer les choses ?

De même, comment s’y prendre pour développer les engagements volontaires au titre du service civique ?

M. Mathieu Hanotin. Le précédent gouvernement se vantait de son plan de rattrapage sportif en faveur des territoires en difficulté. Mais, après les effets d’annonce, il s’est réduit comme peau de chagrin. Ainsi, le conseil général de Seine-Saint-Denis a lancé un grand plan d’investissement en équipements sportifs comprenant notamment la construction d’une piscine dans un collège de Clichy-sous-Bois dont le financement devait être paritaire. Finalement, nous ne toucherons quasiment rien. Que va devenir, madame la ministre, cet effort national ? En matière d’équipements sportifs, le retard de mon département est considérable et, si nous avons décidé de consacrer plus de 50 millions d’euros à cette piscine, c’est parce qu’il n’y en avait aucune dans la zone Clichy-Montfermeil, et que les jeunes n’avaient aucune possibilité d’apprendre à nager.

En Seine-Saint-Denis, nous nous préoccupons du sort des jeunes footballeurs amateurs qui se frottent au sport professionnel. Comment mieux réglementer leurs relations avec les clubs professionnels, notamment le pré-recrutement ? Et comment développer des structures spécialisées, au niveau du collège, en collaboration avec le ministère de l’éducation nationale ? Il me semble qu’élargir aux clubs de National la possibilité d’ouvrir un centre de formation serait une piste très intéressante puisque, en Île-de-France, il n’existe que celui du Paris-Saint-Germain, qui ne suffit pas à satisfaire la demande.

M. Paul Salen. J’espère, madame la ministre, qu’à l’heure du bilan, tous les sportifs et tous les jeunes pourront se féliciter de votre action.

Le président Patrick Bloche nous a parlé de la « détresse » sociale du ministère des sports. Compte tenu des priorités du Gouvernement, aurez-vous les moyens de vos ambitions et pouvez-vous nous assurer que votre ministère ne servira pas de variable d’ajustement ? S’agissant des bénévoles, pourtant indispensables à la vie sportive et à l’éducation de nos jeunes, vous n’avez cité que leur nombre – 16 millions – sans jamais évoquer les signes de reconnaissance que vous souhaitez leur adresser. Que faire pour encourager les bénévoles ?

Mme Annie Genevard. Il existe un lien pour moi évident entre mon rôle de parlementaire et celui de maire d’une petite commune rurale, chacun éclairant l’autre. C’est pourquoi je voudrais insister sur la place des collectivités locales dans la mise en œuvre de vos priorités, madame la ministre. Les communes sont les premiers financeurs du monde associatif, dont la richesse et le dynamisme sont un bien précieux pour notre pays. Toutes les décisions que vous prendrez concernant les équipements sportifs auront inévitablement une incidence sur les finances locales, en particulier les normes – pas toujours indispensables – sur les conséquences budgétaires desquelles l’Association des maires de France a d’ailleurs alerté à de nombreuses reprises.

L’éducation populaire – une dénomination à mon sens désuète : quelle est la mesure éducative qui n’aurait pas vocation à être « populaire », c'est-à-dire à s’adresser à tous ? – n’est plus depuis longtemps l’apanage du monde associatif avec lequel les communes partagent l’ambition d’une éducation la plus large possible.

Les emplois aidés – qu’ils le soient par l’État ou par les régions par le biais des emplois tremplin associatifs – ont fait sensiblement évoluer la vie de nos associations. En favorisant leur indispensable professionnalisation, nous avons développé chez les parents une forme de consumérisme, au détriment de l’investissement bénévole qui doit être maintenu de façon à préserver un subtil équilibre. Par ailleurs, se pose désormais le problème de la pérennisation de ces emplois. Une fois qu’ils sont arrivés à échéance, les associations se tournent vers les collectivités qui ne peuvent pas suivre.

Mme Sandrine Doucet. Il est indispensable, avez-vous dit, madame la ministre, de réhabiliter la pratique régulière du sport, et plus généralement, de toutes les activités qui contribuent à l’émancipation. Sur le terrain, les citoyens s’interrogent sur les grands stades, qui sont si loin de leurs préoccupations. Qu’apportent-ils aux populations et contribuent-ils à la pratique du sport ? Une évaluation ne pourrait-elle pas être menée au niveau européen ?

Comment assurer aux associations un financement pérenne ? Il est très difficile en effet de s’adresser à des publics précaires avec des ressources qui le sont tout autant.

La pratique du sport à l’école peut-elle être prise en compte dans l’aménagement des temps scolaires ? Sera-t-elle encadrée par les professeurs des écoles ou par les professeurs d’EPS qui verront augmenter leur volume d’heures ? Les collectivités territoriales seront-elles sollicitées ?

M. Dominique Le Mèner. Je n’ai pas décelé dans vos propos, madame la ministre, un attachement particulier à la vie associative, pas plus d’ailleurs que quand vous étiez députée de l’opposition.

Plusieurs études démontrent que le problème ne vient pas tant du bénévolat que de son encadrement, faute d’un statut du dirigeant associatif. Il n’est pas nécessaire de donner encore de l’argent, mais il faudrait mieux accompagner les dirigeants. Que comptez-vous faire ?

M. Régis Juanico. Les premières annonces du Gouvernement font état de la création d’une soixantaine de postes d’enseignant d’EPS, qui en appelleront d’autres dans les cinq années à venir. Voilà des mesures conformes aux objectifs du « sport tout au long de la vie » et du « sport santé ».

La note de la Cour des comptes sur l’exécution budgétaire de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour l’exercice 2011 confirme que les crédits de paiement ont diminué de 7 % entre 2010 et 2011, ce que contestait pourtant le ministre de l’époque. Surtout, elle relève une irrégularité budgétaire, que vous dénoncez également, madame la ministre, à savoir le recours au CNDS par voie de fonds de concours, en méconnaissance de l’autonomie de l’établissement et du droit budgétaire, à hauteur de 16 millions d’euros en 2011, et vraisemblablement de 19,5 millions en 2012. Il s’agit, je le rappelle, de subventions qui vont, en vertu de conventions d’objectifs, aux fédérations sportives. Nous avions, dans le passé, dénoncé ce procédé d’autant que le CNDS accusait une perte de 20 millions d’euros en 2011, perte qui se montera sans doute à 30 millions cette année. Comment rendre au CNDS sa vocation initiale, qui est d’accompagner le sport pour tous dans tous les territoires, en particulier en subventionnant les équipements de proximité ?

La Cour des comptes pointe aussi du doigt les difficultés d’évaluation de la montée en charge du service civique. Il bénéficiait de 45 % environ des crédits de la mission « Jeunesse et vie associative » en 2011, soit près de 90 millions. Ce pourcentage devrait monter à 60 % en 2012. Cette montée en charge du service civique est donc manifestement sous-évaluée et les dépenses sous-budgétées. Comment privilégier la qualité des missions confiées aux jeunes sur la quantité ?

M. Lionel Tardy. Le ministère du budget envisage de ramener de 60 % à 30 % la déduction d’impôt sur les bénéfices des sommes allouées par les entreprises à des associations dans le cadre du mécénat d’entreprise. Nombreux sont ceux qui s’alarment des conséquences graves de cette décision sur le tissu associatif : la diminution de ses ressources, donc de sa capacité d’action et d’intervention. À 95 % ; le mécénat sportif est le fait de PME et les 120 millions qu’il draine profitent surtout à des clubs locaux. Les entreprises seront incitées à privilégier plutôt le sponsoring. Or le mécénat vise des associations dont le champ d’action dépasse souvent le seul sport, et s’étend au social, à l’éducation, à la santé, voire la culture. Les entreprises engagées dans ce type d’action soutiennent donc la citoyenneté et la transmission de valeurs sportives. Dans un contexte où les difficultés de financement des associations sportives s’aggravent et où les subventions publiques reculent, une telle décision contredirait les orientations du Président de la République et du Premier ministre. Qu’en pensez-vous, madame la ministre ?

Mme Isabelle Attard. J’espère, madame la ministre, que votre nomination mettra fin à la ronde des ministres des sports et que vous resterez longtemps en poste. Le candidat François Hollande a pris des engagements en faveur de la jeunesse, mais il avait accordé peu de place à l’« éduc’ pop’ ». Un récent sondage montre que l’éducation se situe au deuxième rang des préoccupations des Français. Vous avez assisté au lancement de la campagne « Éducation populaire en fête ». Même si le terme n’est pas très actuel, il dit bien ce qu’il veut dire et l’éducation populaire demeure, aux côtés de l’école et de la famille, un acteur important des apprentissages sociaux. Comment allez-vous donner corps à cette politique ? Avez-vous une ambition globale structurante ?

Mme Virginie Duby-Muller. Le 11 février dernier, François Hollande prenait trente engagements pour le sport, et je ne peux que m’en réjouir. Mais comment pourra-t-il les tenir dans le contexte actuel ? Où irez-vous chercher les moyens financiers ? Sur quels leviers jouerez-vous ?

À la veille des Jeux olympiques de Londres, pouvez-vous dresser un panorama de l’équipe de France et de la France olympique ? Ne peut-on pas regretter que les Jeux paralympiques soient relégués après les autres ?

Dans votre discours d’intronisation devant David Douillet et Jeannette Bougrab dont je salue le travail, vous avez annoncé le renforcement du service civique, un dispositif en faveur des jeunes qui souhaitent s’engager et que nous avons mis en place. Il est bien préférable à ce qu’avait proposé votre candidat qui suggérait d’utiliser des subventions publiques pour cantonner les jeunes dans des emplois précaires ou les orienter sur des voies de garage. Quels objectifs concrets vous êtes-vous fixés ? Avez-vous prévu d’évaluer ce dispositif ? L’un des enjeux du service civique est de sensibiliser les jeunes au bénévolat qui décline dans notre pays, du fait du statut et de la responsabilité des bénévoles. Comment améliorer leur sort ?

Enfin, les associations s’inquiètent de leur financement. Que proposez-vous pour le pérenniser ? Que va devenir le mécénat d’entreprise et le régime fiscal des dons ?

Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. Je vous remercie tous car le nombre et la qualité des interventions montrent l’importance du ministère que j’ai l’honneur de diriger au sein de notre projet pour la nation.

Madame Bourguignon, la retraite des sportifs de haut niveau, qui avait été oubliée dans le budget 2012, sera inscrite dans le projet de loi de finances pour 2013. Pour ce qui concerne le sport santé, toutes les études accumulées ces dernières années soulignent combien la pratique de l’activité physique et sportive contribue à la prévention primaire, secondaire et tertiaire. Il va donc falloir passer à la phase opérationnelle en mettant en cohérence toutes les initiatives indépendantes qui se sont organisées sur le territoire. Ainsi les agences régionales de santé pourraient-elles inclure dans leur schéma de prévention la pratique de l’activité physique. À Strasbourg, l’ordre des médecins prescrit l’activité physique et sportive aux hypertendus et les mutuelles sont prêtes à prendre en charge la licence des patients souffrant d’une affection de longue durée. Des démarches peuvent être menées dans le cadre scolaire… Les acteurs, notamment le secteur mutualiste, nous demandent désormais de trouver un « modèle économique », des mesures concrètes d’économies et de prise en charge, et d’en évaluer l’impact sur les comptes sociaux. Pour ce faire, nous allons nous appuyer sur la démarche du Fonds d’expérimentation pour la jeunesse.

L’après-carrière des sportifs de haut niveau est la première question que j’ai posée quand nous avons fait le point sur la préparation des Jeux olympiques et paralympiques. Il faut dès à présent que l’INSEP et le mouvement sportif anticipent les questions que se posent les sportifs dont la carrière s’interrompra à l’issue des Jeux, en envisageant avec les intéressés un certain nombre d’hypothèses au-delà même du double projet car le service public du sport ne s’arrête pas à la remise de la dernière médaille.

Monsieur Darmanin, même si votre façon de présenter les chiffres pour valoriser les politiques que vous avez menées auprès de mon prédécesseur ne me surprend pas, j’aurais attendu un peu plus d’humilité de votre part ! Surtout qu’elles se résumaient souvent à des déclarations destinées à masquer le vide. Je suis prête à en faire la liste avec vous : le lycée de Font-Romeu à 20 millions d’euros promis quelques jours avant du premier tour des élections présidentielles, et je ne dis rien de l’arena d’Orléans ou du grand prix de Formule 1… En outre, vous avez su préparer votre élection puisque 20 % de l’enveloppe ministérielle a été consacrée à deux circonscriptions. La ville de Tourcoing a même été placée dans l’Eure-et-Loir pour ménager les apparences ! Il est temps de prendre du recul et de sortir de l’invective.

Il n’est pas certain que la majorité de l’UMP partage votre opposition au stade de la Fédération française de rugby. Je rappelle que le sport français a déjà versé 115 millions d’euros au Consortium Stade de France. Les négociations bilatérales sont une catastrophe pour l’État car le Consortium, d’un côté, et la fédération sportive concernée, de l’autre, finissent toujours par s’entendre sur son dos, le montant de la redevance le prouve. La situation actuelle n’est pas satisfaisante : le modèle économique de la Fédération française de rugby repose surtout sur le public et il est normal qu’elle cherche à le conforter par un équipement adapté. Pour l’instant, elle a choisi un site, mais n’a pas pris de décision définitive. De toute façon, le projet ne verrait pas le jour avant 2018 ou 2019. La convention avec la Fédération française de rugby se terminant en 2013, il faudra donc trouver une solution dans l’intervalle. La Fédération de football, qui a renégocié sa convention avec le Stade de France en 2010, n’est pas satisfaite non plus. Et la concession du stade a fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité et de procédures contentieuses. Pour ces raisons, nous avons souhaité tout mettre à plat avec les parties pour que les négociations ne se fassent pas au détriment de la politique du sport dans notre pays. La concession arrivera à échéance en 2025 et nous ne pouvons pas nous désintéresser des négociations avec la Fédération de rugby, indépendamment du calendrier de son grand stade éventuel.

Les crédits aux associations ont chuté de 30 % en 2012 et de 16 % depuis 2010, hors service civique. Mon objectif est donc que sa montée en puissance ne se fasse pas au détriment des associations. Sans elles, il n’y aurait plus de service civique puisqu’elles portent 85 % des contrats.

Ensuite, le rapport parlementaire sur la mise en œuvre du service civique évoque un pilotage insuffisamment collectif, un besoin d’éclaircissement des missions confiées, l’insuffisance de mixité sociale et, parfois, du tutorat et de la formation. Les services déconcentrés ont du mal à se repérer dans les agréments qui sont délivrés au plan national. Dans la perspective de l’augmentation du nombre de jeunes impliqués, le dispositif du service civique devra être amélioré.

S’agissant des relations avec le secteur associatif, certaines collectivités ont tendance, pour se protéger, à multiplier les appels d’offres alors que la subvention reste possible. Une réflexion communautaire est en cours à propos du paquet Almunia-Barnier concernant les services d’intérêt économique général et nous devons dans ce cadre faire valoir le principe de la subvention, surtout pour tout ce qui concerne le secteur périscolaire et l’éducation populaire.

Vous avez également insisté, madame Pompili, pour que le dispositif des emplois d’avenir ne se limite pas aux personnes non qualifiées. Je partage votre préoccupation, surtout dans les quartiers en difficulté. En dépit de leurs qualifications, les jeunes qui en sont originaires n’ont que très difficilement accès à l’emploi et les priver d’un tel recours serait doublement pénalisant.

Monsieur Braillard, la première étape de la préparation de l’Euro 2016 – le choix des sites et le lancement de leur modernisation –  s’achève, mais il manque l’équivalent du fonds Fernand Sastre de 1998. Il est hors de question que notre participation à de grandes manifestations internationales se limite à la construction de grandes infrastructures. Nous devons exiger un retour concret pour le sport – pas seulement le football – et nos territoires. Pour l’instant, il n’est question que d’investissements mais nous devons porter un projet sportif autour de l’Euro qui, pour le moment, profite beaucoup à l’UEFA, et dans une moindre mesure à la Fédération française de football.

Comment rester insensible aux salaires des footballeurs, même si leurs niveaux, pour nous, ne correspondent plus à rien ? Quoi qu’il en soit, il faut une fiscalité juste. Quand on a des revenus supérieurs à 1 million d’euros par an, la solidarité doit être à la hauteur.

Les moyens humains de mon ministère ont été réduits de plus de 70 % de 2009 à 2011, avec la suppression de plus de 1 330 postes. On est loin de la RGPP et du non-remplacement d’un départ sur deux. Il s’agit d’une véritable saignée. Mais c’est précisément parce que nous ne sommes pas dans un ministère prioritaire qu’il faut éviter une application aveugle de la règle, et partir des missions prioritaires pour adapter ensuite les moyens. L’effort doit aussi aller au-delà des services de l’État, et les opérateurs tels que les établissements publics et les agences doivent aussi y participer.

Le Musée national du sport, pour le moment, est abrité par le ministère, dans des locaux loués mais dans lesquels nous avons investi plus de 5 millions d’euros sans que les collections, d’une richesse exceptionnelle, soient mises en valeur. Un travail a été mené avec la ville de Nice en vue d’accueillir ce musée dans le stade qui sera construit pour l’Euro 2016. Des expertises sont encore nécessaires. Est-il pertinent d’implanter un musée dans un stade de foot situé en dehors de la ville ? Et, sur le plan financier, il manque 7,4 millions pour les exercices 2012 et 2013. Enfin, le montage en vertu duquel la collectivité territoriale met à disposition les mètres carrés et l’État prend en charge 100 % des investissements, des frais de personnel et des frais de fonctionnement, et apporte par-dessus le marché 20 millions pour la réalisation du stade, mérite d’être examiné car il a de quoi faire rêver bien des collectivités ! Des réunions avec la municipalité sont prévues pour aborder ces questions.

M. Deguilhem a eu raison de rappeler que les primes des médaillés aux Jeux olympiques et paralympiques auraient dû être inscrites en loi de finances. S’agissant de leur fiscalisation, qui est la règle depuis Vancouver, notre démarche est guidée par l’idée de justice devant l’impôt. Nous ne reviendrons donc pas sur le principe : les sportifs, comme les autres, seront fiscalisés en fonction de leurs revenus. Mais nous prendrons une mesure en loi de finances rectificative en faveur des personnes en situation de handicap de sorte que leurs primes ne viennent pas les pénaliser au regard de l’allocation adulte handicapé ou de la prestation de compensation. Le code des impôts permet en outre un lissage des revenus exceptionnels, applicable aux primes.

Monsieur Reiss, les associations ont été atteintes dans leurs moyens alors qu’elles doivent participer aux politiques publiques. Et il n’est pas anodin que le Président de la République se soit exprimé devant le Conseil économique, social et environnemental, rappelant ainsi la force des corps intermédiaires et du secteur associatif, si méprisé jusque-là.

Accompagner les bénévoles est une nécessité et, dans ce but, 11 millions d’euros sont affectés au Fonds national de développement de la vie associative. Nous entamons une réflexion avec le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire autour du congé d’engagement. Enfin, monsieur Salen, nous entendons accompagner les bénévoles des petits clubs en simplifiant certaines procédures – je pense à celles du CNDS – et en facilitant les déplacements, l’une des premières préoccupations en milieu rural et dans les zones urbaines sensibles, par exemple via l’acquisition de minibus. Dans ce but, des partenariats avec les collectivités pourraient voir le jour.

Le sport a encore beaucoup à faire pour lutter contre les discriminations. Le comité permanent de lutte contre les discriminations, présidé par Laura Flessel, travaille à un guide juridique pour accompagner les petits clubs et les associations qui, faute d’outils, sont souvent démunis face aux actes de discrimination de genre, de race, ou d’homophobie.

La célébration du cinquantième anniversaire du traité de l’Élysée sera marquée par trois moments forts : à Ludwigsbourg, à Berlin et à Paris, pour les cinquante ans de l’OFAJ en juillet prochain. Nous travaillons avec l’Office et le Conseil de l’Europe pour réunir des jeunes. Leur présence est indispensable pour poursuivre le dialogue.

En dehors de ceux de l’OFAJ et de l’Office franco-québécois, beaucoup de dispositifs existent pour favoriser la mobilité internationale – les programmes européens Jeunesse en action, le programme « Jeunesse » au sein du ministère… La stratégie pourrait être plus lisible, surtout qu’ils se superposent aux initiatives des collectivités locales. On a parfois l’impression que la cohérence est ce qui manque le plus.

Le Comité interministériel de la jeunesse, madame Langlade, qui ne s’est réuni que deux fois depuis 1990, sera le cadre de l’action interministérielle du Gouvernement à destination de la jeunesse.

Nous travaillons, monsieur Apparu, avec le ministre de l’enseignement supérieur, autour d’une allocation de formation sous condition de ressources.

À M. Ménard qui s’inquiète des moyens de l’éducation populaire, je rappelle que la nécessaire montée en puissance du service civique ne doit pas se faire au détriment des autres politiques de jeunesse, notamment des grands réseaux d’éducation populaire, le FDVA ou le FONJEP. Sans doute pourra-t-on amorcer une mutualisation des outils pour mieux porter les actions.

Je remercie M. Chalus d’avoir donné un bel exemple de formation aux métiers du sport. Le brevet d’État est indispensable, mais il est, pour certains jeunes, d’un niveau un peu élevé. Aussi envisageons-nous un parcours en amont, destiné à offrir des débouchés dans l’emploi sportif à des jeunes qui ont décroché. Aujourd'hui, le secteur est plutôt fermé alors que des offres existent, je pense notamment à l’emploi de coach athlé santé développé avec la Fédération française d’athlétisme et les entreprises.

La pratique sportive féminine est partout un combat, madame Bouillé ! C’est pourquoi je voudrais faire évoluer le décret « Télévision sans frontière », pour faire plus de place aux équipes féminines. Nous avons tout de même eu la satisfaction, pendant que nos footballeurs donnaient l’image que l’on sait, de voir valorisé par une chaîne le foot féminin, qui a obtenu de bons taux d’audience. Le moment est venu et je ne doute pas que les Jeux olympiques et paralympique seront l’occasion de faire une meilleure place au sport féminin. Le projet de chaîne de télévision numérique terrestre (TNT) porté par le Comité national olympique et le journal L’Équipe devrait également rendre plus visible le sport féminin. J’en profite pour rappeler que nous avons des efforts à faire en faveur des personnes en situation de handicap. Les prochains Jeux paralympiques de Londres nous permettront de faire un peu mieux puisque la cérémonie d’ouverture sera retransmise en direct sur France Ô, et qu’un reportage quotidien sera consacré aux épreuves.

Monsieur Hanotin, à cause des besoins qui s’expriment dans les banlieues, nous avons besoin de réorienter le paquebot du CNDS qui a viré de bord en finançant les grands équipements comme les arenas, les grandes manifestations sportives, et le comité stratégique à l’international alors que ce n’est pas du tout sa vocation puisqu’il devait initialement favoriser les territoires et les petits clubs. Il faut donc changer de cap. Nous avons besoin d’un schéma national des grandes infrastructures mais il faut faire confiance aux territoires, qui sont les mieux placés pour connaître les besoins en équipements de proximité. Dans le cadre de la préparation d’une loi-cadre sur le sport, nous réfléchissons à une assemblée régionale du sport à qui seraient confiés des moyens déconcentrés. Je précise par ailleurs que se déroule, en ce moment, partout en France, l’opération « Savoir nager » qui contribue à l’accessibilité de nos équipements.

Le football comporte toujours, par le biais de ses structures de formation, des enjeux éducatifs et citoyens. Mais il reste du travail pour mettre un peu d’éthique dans ce royaume de l’argent, dans lequel les agents ont beaucoup trop de place et où les jeunes évoluent trop précocement. Le secteur nous échappe en partie mais nous pouvons agir sur la double rémunération des agents et le cumul des fonctions d’agent et d’entraîneur.

En milieu rural, les équipements sont plus difficilement accessibles à cause des déplacements. Il faut faire confiance aux collectivités. J’étais il y a peu maire d’une grande ville et je sais combien le financement du sport repose sur elles. Dans ces conditions, la contractualisation s’impose pour maintenir un équilibre.

Il faut en effet, madame Doucet, travailler en amont de l’Euro 2016 pour appréhender mieux le projet qui est derrière un grand équipement. Cette proposition sera reprise dans l’analyse demandée à la fois par le ministère des sports et le Comité national olympique sur les trois échecs successifs de la candidature de la France aux Jeux olympiques. Il ne s’agit pas seulement de construire des équipements, il faut porter un projet pour la nation. Le slogan britannique Inspire a generation fédère autour d’un projet pour la jeunesse, et pas seulement autour d’une grande manifestation sportive. Il faudrait s’inspirer, en l’élargissant, de l’exemple de la Fédération française de golf qui a su emmener l’ensemble des licenciés pour organiser la Ryder Cup.

Quant au sport à l’école, une réflexion est en cours sur la formation des professeurs des écoles. L’éducation physique et sportive doit y avoir sa place. Commençons par préserver les trois heures d’animation, dit forfait UNSS, des enseignants d’EPS, avant d’accroître les horaires, et faisons en sorte que ces heures soient effectives. D’ailleurs, des postes d’enseignants d’EPS figurent parmi les postes prioritaires ouverts dans le projet de loi de finances rectificative pour 2012, en cours d’examen par l’Assemblée nationale.

Pour accompagner les dirigeants associatifs, nous travaillons au congé d’engagement, à l’aide à la formation des bénévoles et à la simplification des procédures administratives.

Monsieur Juanico, vous avez raison, utiliser les fonds de concours pour récupérer 19,5 millions d’euros auprès du CNDS plutôt que directement le budget de l’État est une irrégularité que la Cour des comptes a relevée. Mais il faudra être attentifs, au cours des arbitrages, à respecter les procédures tout en conservant nos moyens, et en ramenant le CNDS à ses missions initiales.

Concernant le mécénat sportif, le dispositif d’abord envisagé a été écarté et toute modification du financement des associations doit faire l’objet d’une saisine du Haut conseil à la vie associative. C’est donc ce que j’ai fait au sujet de la fiscalité privée des associations. Nous avons tous conscience que, dans un contexte de réduction des moyens publics, la place du mécénat est d’autant plus importante. Il n’en demeure pas moins qu’il nous a manqué un outil d’évaluation correct du mécénat sportif.

Je remercie Mme Attard d’avoir souligné l’importance de l’éducation populaire. Les plus grandes inégalités ne se manifestent pas à l’école mais dans le temps périscolaire qui mobilise les réseaux d’éducation populaire et les collectivités.

Enfin, pour ce qui concerne les Jeux olympiques de Londres, il me semble que le rôle du ministre des sports n’est pas de fixer le nombre de médailles à rapporter. J’espère qu’il sera le plus élevé possible et que les sportifs qui y participeront seront récompensés à la hauteur de leur investissement personnel. Nous avions été un peu déçus des résultats obtenus à Pékin. À Londres, la France sera représentée dans vingt-quatre disciplines sur vingt-six et j’y trouve déjà une grande satisfaction.

M. le président Patrick Bloche. Avoir été parlementaire est un avantage pour un ministre. Vous êtes rodée à un exercice certes classique, mais qui a permis à la représentation nationale d’appréhender toute l’étendue de votre ministère et de mesurer l’importance du projet politique que vous portez pour le sport, la jeunesse, l’éducation populaire et la vie associative. Sachez que vous avez, ici, des députés qui vous accompagneront et vous soutiendront en vue d’atteindre les objectifs que le Gouvernement s’est fixés.

La séance est levée à dix-huit heures trente-cinq.

Présences en réunion

Réunion du mardi 17 juillet 2012 à 16 heures 15

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, Mme Isabelle Attard, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, M. Thierry Braillard, M. Emeric Bréhier, M. Xavier Breton, Mme Isabelle Bruneau, M. Ary Chalus, Mme Dominique Chauvel, Mme Valérie Corre, M. Yves Daniel, M. Gérald Darmanin, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Dessus, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, Mme Françoise Dumas, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mme Michèle Fournier-Armand, M. Michel Françaix, Mme Annie Genevard, M. Mathieu Hanotin, Mme Colette Langlade, M. Dominique Le Mèner, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Lucette Lousteau, M. Michel Ménard, Mme Maud Olivier, Mme Barbara Pompili, M. Michel Pouzol, M. Frédéric Reiss, M. Franck Riester, Mme Dolores Roqué, M. Paul Salen, M. Rudy Salles, Mme Claudine Schmid, M. Jean Jacques Vlody

Excusés. – M. Jean-Louis Borloo, Mme Sonia Lagarde, Mme Martine Martinel, M. François de Mazières, Mme Michèle Tabarot

Assistaient également à la réunion. – M. Régis Juanico, M. Bernard Lesterlin, M. Lionel Tardy