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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mercredi 6 novembre 2013

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 11

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Projet de loi de finances pour 2014 (seconde partie) :

• Examen pour avis et vote, ouverts à la presse, des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles :

- Audiovisuel ; Avances à l’audiovisuel public (M. Stéphane Travert, rapporteur pour avis)

- Presse (M. Rudy Salles, rapporteur pour avis)

- Livre et industries culturelles (Mme Brigitte Bourguignon, rapporteure pour avis)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 6 novembre 2013

La séance est ouverte à neuf heures trente.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine, pour avis, les crédits pour 2014 de la mission « Médias, livre et industries culturelles » sur le rapport de M. Stéphane Travert (Audiovisuel ; Avances à l’audiovisuel public), M. Rudy Salles (Presse), et de Mme Brigitte Bourguignon (Livre et industries culturelles).

M. Patrick Bloche. Nous risquons d’avoir un débat analogue à celui que nous avons eu hier soir en commission élargie. Aussi, j’évoquerai, avec le bureau de la Commission, les améliorations que nous pourrions apporter à la procédure d’examen du projet de loi de finances (PLF) l’année prochaine.

D’autre part, contrairement à ce qui était prévu, la discussion du budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » en séance publique s’est tenue hier soir en même temps que la réunion de la commission élargie sur les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Certains de nos collègues ont donc été contraints de faire des allers-retours entre la salle Lamartine et l’hémicycle. De telles situations nuisent à la qualité du travail parlementaire. Je soulèverai cette question lors de la prochaine réunion de la Conférence des présidents : il convient d’éviter, à l’avenir, qu’une commission soit confrontée à l’examen concomitant de deux budgets qui relèvent de sa compétence.

Mme Marie-George Buffet. Je prends bonne note de vos propos, monsieur le président. La situation a en effet été quelque peu compliquée à gérer hier soir. Comme vous, j’estime essentiel que notre Commission écoute les rapporteurs et mène des débats de fond à partir du travail qu’ils ont réalisé. Le problème ne vient pas de notre Commission mais d’une circonstance indépendante de votre volonté, monsieur le président : nous faisons en séance publique exactement le même travail qu’en commission élargie ! Les présidents des groupes politiques devraient évoquer cette question avec le président de l’Assemblée nationale, en vue d’améliorer la procédure d’examen du PLF l’année prochaine.

M. le président Patrick Bloche. Nous avons en effet reproduit en séance publique les débats que nous avons eus en commission élargie, en particulier pour les crédits de la mission « Enseignement scolaire » : les mêmes orateurs sont intervenus et les mêmes questions ont été posées au ministre de l’Éducation nationale.

Ce matin, nous examinons trois rapports sur les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Je remercie les trois rapporteurs pour avis pour leur travail approfondi, en particulier pour les auditions qu’ils ont menées : il est indispensable que notre Commission entende les personnalités responsables dans les différents domaines de sa compétence et que le résultat de ce travail d’écoute se retrouve dans les rapports pour avis.

La Commission examine pour avis, sur le rapport de M. Stéphane Travert, les crédits du programme 313 « Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

M. Stéphane Travert, rapporteur pour avis. Nous avons eu l’occasion d’évoquer longuement les crédits de l’audiovisuel public en commission élargie hier soir. Je consacrerai donc mon intervention de ce matin au thème que j’ai retenu : l’offre régionale du service public audiovisuel.

La proximité est au cœur de la mission du service public audiovisuel. Cette mission est d’autant plus essentielle que les autres médias locaux – presse quotidienne régionale et chaînes locales privées – traversent aujourd’hui une crise si grave que leur pérennité ne paraît pas garantie.

Cependant, pour son offre régionale de service public audiovisuel, la France a fait le choix, historiquement, d’un modèle très centralisé : une chaîne nationale avec des fenêtres régionales. Le projet d’avenant au contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions souligne à juste titre le caractère limité de cette offre par rapport à celle qui existe dans des pays comparables tels que l’Allemagne et l’Espagne. C’est pourquoi la ministre de la culture et de la communication a décidé d’engager une réflexion poussée sur l’avenir de l’offre régionale de France 3. À cette fin, elle a confié une mission à Mme Anne Brucy, ancienne directrice du réseau France Bleu. J’espère que cette réflexion permettra d’apporter une réponse durable à cette question.

Avant de formuler des propositions, je dresserai un état des lieux.

Premier constat : le réseau de France 3 constitue un immense potentiel insuffisamment exploité. Avec 1 500 journalistes, France 3 dispose de la plus grande rédaction d’Europe. Son maillage est exceptionnel : elle compte 113 implantations – vingt-quatre antennes régionales complétées par des rédactions locales et des bureaux d’information de proximité.

La mission de proximité requiert par définition des moyens importants. Le budget des antennes régionales de France 3 s’élève ainsi à 419 millions d’euros en 2013. Les effectifs additionnés des antennes régionales représentent environ 3 500 équivalents temps plein sur un total de 10 200 pour France Télévisions. Les programmes régionaux représentent 18,5 % du coût de grille total du groupe. L’information représente 80 % de l’activité des antennes, ce qui explique que les frais de personnel représentent près de 64,3 % de leurs charges d’exploitation contre environ 30 % pour le groupe en son entier.

L’offre régionale de France 3 constitue l’exemple le plus marquant d’une insuffisante exploitation à l’antenne de programmes qui mobilisent des moyens importants. En effet, la part de l’offre régionale dans les programmes de France 3 est réduite à la portion congrue : 11,5 % seulement en 2012. Surtout, les programmes régionaux sont diffusés sur des créneaux qui ne leur sont guère favorables : le matin ou tard le soir, avec peu de visibilité et de promotion.

La nouvelle direction a souhaité accroître le volume des programmes régionaux : selon les chiffres qui nous ont été communiqués, il est passé de 13 200 heures diffusées en 2010 à 19 800 en 2012. Cette hausse spectaculaire s’explique pour partie par une nouvelle organisation des décrochages régionaux qui permet de proposer des émissions régionales – les informations locales – différentes sur les vingt-quatre antennes. Elle résulte également de l’ouverture d’une nouvelle case le matin entre neuf et onze heures.

Cependant, ces chiffres doivent être nuancés dans la mesure où un même programme peut être diffusé plusieurs fois ou sur plusieurs antennes. Dans ce cas, le volume horaire des programmes régionaux diffusés augmente sans que l’offre ait été réellement améliorée. Surtout, cette progression importante du volume horaire n’est que faiblement ressentie car elle porte sur des créneaux peu exposés.

Les prises d’antenne événementielles demeurent insuffisantes et diminuent après un pic en 2010. En 2013, les 270 prises d’antenne événementielles ont représenté un total de 359 heures de diffusion. Ce chiffre s’établissait à 439 heures en 2012 – pour 268 prises d’antenne – et à 726 heures en 2010, pour 576 prises d’antenne.

Dans le même temps, l’audience a continué de se dégrader. Ainsi, entre 2008 et 2012, la part d’audience de France 3 est passée de 15 % à 9,7 %. À la fin de l’année 2011, la chaîne a cédé à M6 son statut de troisième chaîne du paysage audiovisuel. La concurrence ne saurait expliquer à elle seule cette régression : selon l’Observatoire européen de l’audiovisuel, France Télévisions figure parmi les groupes publics européens qui ont été les moins performants entre 2001 et 2011.

À l’instar de l’audience de France 3, celle de ses programmes régionaux se réduit, et l’âge moyen des téléspectateurs augmente de manière inquiétante. Si l’information continue d’enregistrer de très bonnes performances – en particulier l’édition régionale du 19/20 en semaine, avec 17,9 % de part d’audience en moyenne –, les autres programmes régionaux tels que les magazines, les documentaires ou les programmes de divertissement réalisent des scores d’audience plus faibles : entre 2 et 5 % de part d’audience en moyenne nationale. Cependant, les faibles résultats et l’évolution de la structure de l’audience peuvent aussi s’expliquer par le confinement des programmes régionaux dans des tranches horaires peu accessibles.

La création de l’entreprise unique s’est accompagnée d’une réorganisation du réseau dont je propose un premier bilan. Les treize directions régionales ont été regroupées en quatre « pôles de gouvernance », destinés à rationaliser et à mutualiser les moyens humains et financiers. Dans le même temps, les vingt-quatre rédactions régionales sont devenues des « antennes de proximité » produisant informations et programmes. Elles demeurent complétées par un maillage plus fin constitué par les rédactions locales et les bureaux d’information de proximité.

L’objectif affiché par la direction du groupe était de renforcer les liens de proximité de la chaîne avec ses téléspectateurs et de valoriser les identités régionales. Les vingt-quatre antennes de proximité devaient multiplier les interventions exceptionnelles sur les événements régionaux dignes d’intérêt. Elles devaient produire des programmes plus riches en documentaires et magazines, dont la diffusion sur les antennes devait être accrue. Elles devaient également développer des contenus multi-supports, en particulier vingt-quatre télévisions en ligne. Les pôles étaient conçus comme des « facilitateurs » au service des antennes, dont la responsabilité éditoriale devait être renforcée.

Au regard de ces objectifs, le bilan apparaît très négatif. Pour ce qui est de la gestion et de la planification de l’activité, les résultats sont à confirmer et à approfondir. Si la nouvelle organisation a permis de mieux maîtriser le recours à l’emploi non permanent depuis le deuxième semestre de 2012, cet effort fait suite à un dérapage en la matière en 2011 et au premier semestre de 2012, qui a accompagné l’augmentation du volume des programmes.

D’une manière générale, les performances restent très inégales selon les antennes. Surtout, la réforme a été globalement dévoyée. Ainsi, en contradiction avec ses objectifs, elle s’est traduite par un relâchement du lien avec les territoires et une forte réduction de la responsabilité éditoriale des antennes. De fait, les pôles sont devenus une entité éditoriale à part entière. En outre, la coordination éditoriale s’est accompagnée d’une importante mutualisation, qui a entraîné une perte de proximité : le journal régional est devenu interrégional, ce qui l’a éloigné plus encore de son public.

Les délégués régionaux et les syndicats que nous avons auditionnés estiment qu’il est particulièrement difficile aujourd’hui d’obtenir une prise d’antenne événementielle, ce qui entraîne frustration et découragement des équipes. Nous constatons également que la fermeture temporaire d’éditions locales devient une façon de réguler l’activité. En effet, les éditions locales jouent de facto un rôle de variable d’ajustement à l’évolution des ressources du groupe. Les syndicats estiment, à juste titre, qu’il s’agit là d’un procédé inacceptable puisqu’il entraîne une rupture de la continuité du service public.

En somme, le pôle, qui devait être un « facilitateur », est vécu comme un frein par les équipes des antennes régionales. Celles-ci font état d’un sentiment d’infantilisation, d’autant plus marqué que l’organisation, les circuits de décision et la chaîne hiérarchique sont kafkaïens. Les interlocuteurs auditionnés ont décrit une organisation « ahurissante », caractérisée par la lourdeur et la complexité des chaînes hiérarchiques et l’illisibilité des organigrammes. M. Patrick de Carolis avait souhaité mettre en place une organisation horizontale de l’entreprise. Son successeur, M. Rémy Pflimlin, a décidé de rétablir plus de verticalité et de décentralisation mais il en résulte que dans l’organisation actuelle du réseau de France 3, les deux logiques, verticale et horizontale, se superposent ! Je vous laisse méditer sur les organigrammes qui figurent dans mon rapport.

Ainsi, les antennes régionales paient très cher le modèle de l’entreprise unique voulu par la direction précédente. Dans un contexte budgétaire contraint, l’optimisation des moyens semble tenir lieu de projet stratégique et l’insuffisante exploitation du réseau ne fait qu’alimenter les interrogations sur son utilité et son coût. Les équipes ont le sentiment que les arbitrages se font systématiquement au détriment de l’offre de proximité et que l’absence de projet témoigne d’une stratégie non avouée : mettre purement et simplement un terme aux formats régionaux.

Pour l’avenir, deux options sont envisageables afin d’améliorer la place des programmes régionaux : soit créer de véritables chaînes régionales de plein exercice, soit revoir la place des programmes régionaux au sein de la grille de France 3.

L’expérience de Via Stella, chaîne régionale de service public de plein exercice consacrée à la Corse et à la Méditerranée, est intéressante. Son bilan est globalement positif, mais il s’agit d’un modèle coûteux, répondant à un objectif politique et culturel, et qui est adapté à une population à forte identité culturelle.

Si l’on opte pour un modèle de télévisions régionales de plein exercice, la question de leur nombre se pose immédiatement. En créer vingt-quatre ne paraît pas réaliste. Les contraintes budgétaires conduiraient à envisager la création d’environ huit chaînes interrégionales mais alors la notion de proximité deviendrait toute relative. Le modèle de Via Stella ne paraît donc pas transposable en l’état. C’est pourquoi je préfère la seconde option, qui permettrait également de clarifier l’identité de France 3.

Le constat est largement partagé : France 3 n’a pas bénéficié d’un véritable plan stratégique de long terme et souffre aujourd’hui d’un déficit d’identité. Les lignes éditoriales de France 2 et France 3, deux chaînes généralistes à gros budget, n’apparaissent pas suffisamment distinctes. Un projet éditorial doit être clair, compréhensible et mobilisateur. À cet égard, les priorités stratégiques définies pour France 3 par l’avenant au COM pour la période 2011 à 2015 peinent à convaincre.

Je propose d’inverser la logique pour faire de France 3 une chaîne régionale avec des décrochages nationaux, sur le modèle de la radio France Bleu, laquelle a démontré la pertinence d’une offre de proximité et d’information locale. Sur France Bleu, le rapport entre offre nationale et offre régionale est inversé : les décrochages sont nationaux. En outre, à la différence des pôles du réseau de France 3, les structures de gestion du réseau France Bleu – les délégations régionales – n’interviennent pas dans la définition de la ligne éditoriale. Enfin, contrairement à l’information nationale diffusée sur France 3, celle que diffuse France Bleu est constituée de l’addition des contributions des antennes régionales. Au lieu de transmettre le point de vue parisien sur l’actualité, il conviendrait aussi d’inverser la logique, en transmettant le point de vue régional sur l’information nationale et internationale. C’est un autre état d’esprit : celui de l’ouverture des territoires à ce qui se passe à proximité, en Europe et dans le monde.

D’une manière générale, les antennes régionales doivent alimenter davantage la grille nationale. Ce n’est pas assez le cas actuellement, ce qui créé, là encore, des insatisfactions.

Enfin, je suggère que France 3 se dote toute la journée, dans chacune des régions, d’un habillage « France 3 région », à l’instar des antennes de France Bleu. Cette mesure fortement symbolique permettrait au téléspectateur de mieux identifier la chaîne à sa région.

La réflexion sur l’avenir du réseau de France 3 doit s’accompagner d’une analyse de la notion de proximité et d’une évaluation des attentes des téléspectateurs en la matière, dans un nouveau contexte médiatique marqué par l’accroissement de la demande de proximité. Sur ce point, un syndicaliste interviewé par Le Monde en 1975 faisait le constat suivant : « Il y a ce que l’on voudrait faire et ce que l’on ne peut pas faire. Pour nous, la vie de la région, c’est ce qui se passe aujourd’hui dans un contexte défini. Cela suppose que l’on aborde un certain nombre de problèmes liés à un contexte économique, social et politique. Mais là interviennent une série de blocages, plus ou moins conscients, mais qui constituent une forme de censure. C’est plutôt l’aspect folklorique de la région qui apparaît en général à l’écran – les violettes, le cassoulet, les pommes, le bel canto –, un aspect très passéiste qui existe, il est vrai, mais la réalité des régions n’est pas là. » On peut regretter que la situation n’ait pas fondamentalement changé depuis près de quarante ans ! L’excès de folklore et de consensualisme – que l’on retrouve dans la priorité stratégique « privilégier une approche positive et bienveillante » fixée par le COM à France 3 – débouche sur une vision artificielle et trop patrimoniale de la région, qui ne saurait toucher le jeune public.

La télévision régionale doit, au contraire, promouvoir la réussite des territoires, la recherche, l’innovation technologique et culturelle, mais aussi la vie quotidienne de nos concitoyens et des élus qui, chaque jour, construisent l’avenir de nos territoires et de notre pays.

Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, toute initiative tendant à conforter la place des programmes régionaux au sein de France 3 risque de susciter des objections d’ordre financier : éventuel surcoût des programmes régionaux, accroissement des effectifs, diminution des recettes publicitaires…

Je souhaite formuler à cet égard plusieurs observations. D’abord, des marges de productivité importantes existent. Ce que les équipes déplorent n’est pas un manque de moyens mais de créneaux et de projet stratégique. L’exemple de Via Stella est, de ce point de vue, édifiant : le projet a suscité l’adhésion et fortement mobilisé les équipes, dont la productivité est aujourd’hui la plus élevée du groupe. Il est intéressant de noter que France 3 Corse et Via Stella ont diffusé en moyenne 2,3 fois plus d’heures d’information que les autres stations régionales de France 3 en 2012. L’ensemble des observateurs le constatent : les antennes régionales pourraient produire beaucoup plus à moyens constants.

S’agissant, ensuite, du risque de diminution des recettes publicitaires, rappelons que la suppression de la publicité en soirée avait précisément pour objectif d’affranchir le groupe de cette contrainte. En outre, il est indispensable de réaliser une étude d’impact sur le potentiel de développement d’un marché publicitaire local. Quoi qu’il en soit, le renforcement de la mission de proximité constitue une priorité. Si le coût de ce renforcement le justifie, nous pourrons légitimement nous interroger sur la diffusion de la publicité à certaines heures et sur le maintien de certaines chaînes au sein du bouquet de France Télévisions.

La recherche de moyens nouveaux pose également la question de l’opportunité d’un financement accru par les collectivités territoriales et d’une coopération renforcée avec d’autres acteurs. Sur ce point, il convient néanmoins d’être prudent car nous devons garantir l’indépendance éditoriale des chaînes régionales et maintenir le pluralisme.

Enfin, il nous faut rattraper de toute urgence le retard pris en matière de développement numérique. Il a été particulièrement tardif au sein du réseau régional de France 3 et demeure beaucoup trop faible au regard des enjeux. Les études montrent en effet que le numérique joue un rôle fondamental en termes de proximité : sur l’Internet, la consommation d’offre locale est largement majoritaire. Or, il semblerait que France 3 ait décroché par rapport à ces nouveaux outils.

Depuis 2012, des efforts certains ont été réalisés pour combler le retard, notamment avec la création, en 2012, des vingt-quatre sites régionaux. Cependant des progrès importants restent à accomplir. Le Syndicat national des journalistes reconnaît d’ailleurs qu’Internet n’est pas suffisamment valorisé dans les rédactions de France 3. L’animation du site Internet n’occuperait en moyenne, dans chacune d’entre elles, que deux à trois personnes, pour un objectif de cinq. Le numérique, loin d’être au cœur des rédactions, serait plutôt marginalisé. Cela se traduit par des chiffres de fréquentation des sites de France 3 particulièrement faibles, notamment par rapport aux sites de la presse quotidienne régionale. L’évolution de l’offre numérique doit donc être au cœur des réflexions du groupe de travail sur l’avenir de l’offre régionale du service public audiovisuel qui sera installé d’ici à quelques semaines.

J’en viens à ma conclusion. M. Michel Boyon, président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) déclarait le 20 septembre 2012 sur Europe 1 que France 3 représentait un « problème majeur » de France Télévisions et que son organisation n’était pas « éternellement viable ». Cette affirmation suscite une réelle interrogation : si le service public ne remplit pas ses missions fondamentales, son existence ne risque-t-elle pas d’être remise en question ?

Ma conviction – que vous partagerez, je l’espère – est que le réseau de France 3, loin de constituer le « problème majeur » de France Télévisions, constitue plus que jamais – à condition que l’on se décide à le valoriser réellement – son atout majeur, tant est grande la qualité de celles et ceux qui font vivre ses chaînes au quotidien.

Loin de « ringardiser » la notion de proximité, les nouveaux médias lui donnent une dimension nouvelle. Le moment est venu de refonder France 3. Faute de réforme, la question de l’existence d’un réseau de proximité se posera rapidement, de même que, plus largement, celle de la spécificité de l’offre du service public.

Je donne, bien sûr, un avis favorable à l’adoption des crédits de l’audiovisuel public.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie, monsieur le rapporteur pour avis. Il y a là matière à un débat approfondi sur France 3, d’autant plus nécessaire que nous sommes régulièrement, les uns et les autres, sollicités sur ce point.

M. Marcel Rogemont. Je vous remercie, monsieur le rapporteur pour avis, d’avoir consacré votre rapport à France 3. Au fil des années, les stratégies de France Télévisions à propos de France 3 se sont accumulées comme un limon ! Comme vous l’avez relevé, cette absence de direction claire a eu pour conséquence une baisse du taux de pénétration de la chaîne : il est aujourd’hui de 9,3 %, contre 11,8 % en 2009 et 14,7 % en 2005. Une telle chute d’audience est anormale, quelle qu’ait pu être l’évolution du paysage audiovisuel français. Certes, de nouvelles chaînes sont arrivées sur le marché, mais France 3 présente une singularité qu’il convient de conforter.

Je vous remercie également d’avoir lancé le débat sur la création d’une véritable télévision régionale de proximité. À cet égard, la question des moyens ne paraît pas insurmontable. France 3 Bretagne, dont le coût de grille s’établit actuellement à 17,5 millions d’euros, pourrait, avec 8 millions d’euros supplémentaires, soit un surcoût de moins de 50 %, doubler les programmes régionaux qu’elle diffuse.

D’autre part, comme vous le soulignez, le renforcement du caractère régional de France 3 implique le maintien d’une grille nationale, afin de permettre un dialogue entre les régions. Il ne faudrait pas – comme certains collègues semblent le souhaiter parfois – cantonner France Télévisions dans un rôle prédéterminé, en particulier France 3 dans sa vocation régionale. Quant aux régions, elles contribuent déjà au financement de France 3 en participant à la production de documentaires ou de fictions créées localement. Enfin, nous devons intégrer les chaînes locales à notre réflexion : leur offre doit être complémentaire de celles des antennes régionales de France 3.

Dans l’attente du rapport que rendra Mme Brucy, le vôtre, monsieur le rapporteur pour avis, nous fournit déjà des éléments pour mener une réflexion aboutie sur l’avenir de France 3.

Le groupe socialiste votera les crédits de l’audiovisuel public.

M. Franck Riester. Tel ne sera pas le cas du groupe UMP. Nous saluons néanmoins votre travail approfondi, monsieur le rapporteur pour avis. La réforme de France 3 est un véritable serpent de mer ! Vous analysez avec justesse la situation actuelle de la chaîne et il est en effet nécessaire de lui fixer un cap clair. Les pistes que vous évoquez ont le mérite d’ouvrir le débat mais doivent être examinées de plus près. Comme l’a relevé M. Rogemont, vous fournissez les éléments permettant à notre Commission et, plus largement, à l’ensemble des députés de réfléchir, avec le Gouvernement, à l’organisation future de France 3.

En revanche, nous ne pouvons souscrire à la politique menée par le Gouvernement, avec le soutien de la majorité, à l’égard de l’audiovisuel public : elle consiste à diminuer à nouveau les dotations accordées à France Télévisions sans définir de stratégie claire pour le groupe. Celui-ci se retrouve dans une situation financière délicate sans savoir où il va. Je l’ai dit hier à la ministre de la culture et de la communication : dans un tel contexte, il n’est pas justifié de demander, comme elle le fait, des comptes à la direction de France Télévisions.

De plus, comme je l’ai également indiqué hier, la modification du mode de nomination du président de France Télévisions rendra la gouvernance du groupe illisible et compliquera la définition de sa stratégie. En effet, à la tutelle de l’État s’ajoutera désormais celle du CSA. Son président l’a d’ailleurs annoncé : le CSA recevra tous les quinze jours les dirigeants de France Télévisions pour faire le point avec eux sur la situation de l’entreprise.

Je reviens sur la question de l’Institut national de l’audiovisuel (INA) évoquée hier en commission élargie. Sous la direction de M. Emmanuel Hoog puis de M. Mathieu Gallet, les équipes de l’INA ont préparé un projet immobilier d’envergure, qui permettra de sécuriser à court terme les réserves et les archives de l’institut et, au-delà, de répondre aux enjeux qui se posent à lui à moyen et long termes. Ce projet, plébiscité par les équipes de l’INA et les élus locaux, s’inscrit dans un plan d’urbanisme plus large à Bry-sur-Marne, conforme à l’esprit du Grand Paris et à l’objectif de rééquilibrage entre l’Est et l’Ouest parisiens. Pourtant, la ministre ne le juge pas pertinent et le balaie d’un revers de main. En effet, alors même que l’INA a négocié avec succès le virage du numérique, respecté ses COM successifs et, chacun l’admet, bien géré ses moyens, le Gouvernement a décidé de diminuer sa dotation de 19 millions d’euros en 2014, ce qui signifie – la ministre l’a d’ailleurs reconnu – l’abandon de son projet immobilier.

Au nom du groupe UMP et de M. Gilles Carrez, député de la circonscription où ce projet doit être réalisé, j’ai demandé hier à la ministre de revenir sur cette décision qui aura de graves conséquences pour l’avenir de l’INA. Nous suggérons que notre Commission reçoive la direction de l’INA, afin que celle-ci nous présente son projet et que chacun d’entre nous puisse se faire une idée de sa pertinence. Il conviendrait ensuite de relancer le débat avec la ministre.

M. le président Patrick Bloche. L’audition annuelle des présidents de France Télévisions et de Radio France sur l’exécution des COM par notre Commission et par la commission des finances correspond à une obligation légale ; nous allons d’ailleurs organiser ces réunions avant la fin de l’année. En revanche, il n’existe pas d’obligation de cette nature s’agissant de l’INA. Notre Commission a auditionné pour la dernière fois un président de l’INA en 2010. Je reprends donc votre suggestion à mon compte, monsieur Riester : je proposerai au bureau de la Commission d’auditionner prochainement M. Mathieu Gallet sur l’exécution du COM de l’INA. Nous aurons alors l’occasion d’aborder la question que vous avez soulevée.

M. Rudy Salles. Je vous félicite à mon tour, monsieur le rapporteur pour avis, pour votre excellent travail sur France 3. Nous nous interrogeons tous sur la spécificité de cette chaîne, mais aussi de chacune des cinq autres du service public. Certes, nous pouvons attribuer à chacune quelques émissions phares, mais elles ne suffisent pas à définir leur caractère propre. Personne n’ose aborder franchement ce débat, car nous pourrions en conclure que les chaînes du service public sont trop nombreuses ! Il faudra pourtant le faire un jour.

Vous relevez à juste titre, monsieur le rapporteur pour avis, la baisse d’audience des programmes régionaux et le vieillissement de leur public. C’est d’autant plus préoccupant que se manifeste une importante demande d’information régionale. Mais ce paradoxe tient, en réalité, à l’absence d’une véritable télévision régionale. Bien que France 3 dispose, avec ses antennes régionales, ses rédactions locales et ses bureaux d’information de proximité, d’une implantation analogue à celle de la presse quotidienne régionale, ses programmes ne correspondent pas aux attentes du public. Il existe certes des décrochages régionaux, mais à des horaires peu propices – qui peut regarder le journal télévisé à dix-neuf heures ? En outre, ils sont concurrencés sur leur créneau – celui du traitement instantané de l’information – par des médias plus performants, notamment sur l’Internet. Ils ne parviennent donc pas à intéresser un public jeune.

Surtout, ces programmes ne traitent pas des sujets de fond et ne montrent pas la population qui vit dans nos régions. À la différence de ce qui se fait dans d’autres pays, il n’existe guère d’émissions régionales dans lesquelles les gens sont invités sur un plateau ou dans lesquelles les journalistes vont à leur rencontre sur le terrain. Dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, une chaîne locale privée récemment créée sur la télévision numérique terrestre propose ce type d’émissions. Elles intéressent le public, qui se reconnaît ainsi dans la chaîne.

Le groupe UDI n’approuvera par le budget de l’audiovisuel public.

Mme Marie-George Buffet. Je vous félicite à mon tour, monsieur le rapporteur pour avis, d’avoir consacré votre rapport à France 3. La baisse d’audience de la chaîne est liée à la valse-hésitation concernant sa mission même. En outre, la France 3 apparaît – du moins son personnel le ressent-il ainsi – comme la variable d’ajustement au sein du groupe France Télévisions : la définition de ses champs de compétence résulte souvent de compromis budgétaires. Comme vous, monsieur le rapporteur pour avis, j’estime que la chaîne et son personnel constituent un atout pour l’audiovisuel public, qu’il est nécessaire de pérenniser ses moyens et, surtout, de clarifier son identité. À cet égard, vous proposez que sa vocation régionale devienne l’essentiel de sa mission. Une telle clarification doit se traduire dans le COM, à l’issue d’un véritable débat avec le personnel et avec les usagers.

D’autre part, il me paraît tout à fait normal que l’État et notre Assemblée assument respectivement leur rôle de tutelle et de contrôle sur le service public audiovisuel. En revanche, la convocation de la direction de France Télévisions tous les quinze jours devant le CSA ne me paraît guère correspondre à un besoin. Il conviendrait au contraire de donner des responsabilités à la direction du groupe, afin qu’elle remplisse les missions qui lui ont été assignées par le COM.

Enfin, comme l’a dit M. Rogemont, France 3 doit permettre un échange entre les différentes régions. Je pousse même le raisonnement : loin de devenir un instrument de repli sur les intérêts locaux, la chaîne doit, grâce à son ancrage régional, nourrir la République de tout ce qui se réalise dans les territoires.

Je me félicite que notre Commission auditionne prochainement la direction de l’INA. Nous pourrons ainsi mieux évaluer la qualité du projet immobilier, sa nécessité et ses besoins de financement.

Les salariés de France Télévisions manifesteront demain pour défendre les chaînes publiques. Nous pouvons tous aller les saluer à cette occasion. Je rappelle que le COM prévoit la suppression de 650 postes au sein du groupe. Je m’étonne d’ailleurs que nos collègues de l’opposition se plaignent de la baisse des dotations, alors même qu’ils estiment que le Gouvernement ne va jamais assez loin en matière de réduction des dépenses publiques. Pour sa part, le groupe GDR s’inquiète de cette diminution et n’approuvera pas, pour cette raison, le budget de l’audiovisuel public.

M. Jean-Pierre Le Roch. Je salue la qualité de votre travail, monsieur le rapporteur pour avis. Votre rapport constitue une contribution notable à la réflexion engagée par le Gouvernement sur l’offre de proximité du service public audiovisuel après 2015. France 3 dispose d’un réseau au maillage exceptionnel qui devrait lui permettre de répondre à la très forte demande d’information locale. Cependant, les chaînes locales mentionnées par M. Rogemont pourraient devenir de sérieuses concurrentes pour la chaîne dans les années à venir. Comme vous, je suis convaincu que le réseau de France 3 ne constitue pas un problème mais un atout pour le groupe France Télévisions. Ce constat est d’ailleurs largement partagé.

France 3 subit une nette érosion de ses audiences et son identité trop peu marquée est critiquée. Dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons, les missions du service public doivent être réaffirmées. Je souscris à votre proposition, monsieur le rapporteur pour avis : il convient d’inverser la logique et de donner à la chaîne une dominante régionale. Comme vous l’indiquez, contrairement à l’information nationale diffusée sur France 3, celle que diffuse le réseau France Bleu est constituée de l’addition des contributions des antennes régionales. Comment procéder, selon vous, pour que les antennes régionales de France 3 alimentent davantage la grille nationale et relaient ainsi le point de vue régional sur l’information nationale et internationale ?

M. Patrick Hetzel. Je vous remercie à mon tour, monsieur le rapporteur pour avis, d’avoir consacré votre rapport à France 3. Il conviendrait, dites-vous, d’inverser la logique pour faire de France 3 une chaîne régionale avec des décrochages nationaux. Est-ce réalisable au regard des moyens dont dispose la chaîne ? Comment procéder ? Comment inscrire cette réforme dans les objectifs ? À quelle échéance interviendrait-elle ?

M. Thierry Braillard. Je vous félicite à mon tour, monsieur le rapporteur pour avis. Les représentants de la direction de France Télévisions pensent souvent détenir la vérité et ont du mal à entendre ce que l’on peut avoir à leur dire. À cet égard, vos recommandations ont le mérite d’être écrites et très claires. Je souscris à l’idée principale que vous défendez : inverser la logique et faire de France 3 une chaîne régionale avec des décrochages nationaux. J’avais d’ailleurs signalé au président de France Télévisions que France 3 « nationale » n’avait pas vocation à organiser une soirée spéciale pour l’élection présidentielle, comme elle l’a pourtant fait.

D’autre part, les antennes régionales de France 3 disent avoir de plus en plus de mal à obtenir l’aval de la rédaction parisienne pour couvrir telle ou telle manifestation. Dès lors, ne conviendrait-il pas de pousser la réforme plus avant que vous le proposez, en procédant à une véritable déconcentration au sein de France 3 ?

Mme Annie Genevard. Dans un rapport parlementaire récent sur le projet d’avenant au COM de France Télévisions, on reprochait à son président de ne pas parvenir à réduire les coûts, en particulier la masse salariale – alors qu’une telle réduction serait dénoncée si elle se produisait dans le secteur privé. De manière paradoxale, on fustige France Télévisions pour ses efforts de gestion insuffisants alors que, dans le même temps, on réduit son budget, ce qui ne manquera pas de dégrader ses performances. Et on déplorera sans doute dans le même temps que le groupe de presse Centre France-La Montagne supprime 230 emplois dans le cadre d’un vaste plan de restructuration. Tout cela n’est pas cohérent !

D’autre part, le président du CSA met sous tutelle France Télévisions en demandant qu’un représentant de la société vienne s’expliquer, tous les quinze jours, sur la politique financière, économique et sociale du groupe. Le CSA critique notamment la part insuffisante des programmes régionaux. C’est la quadrature du cercle : on exige toujours plus de France Télévisions tant en matière de nouveaux programmes que d’économies à réaliser tout en réduisant ses moyens et sans lui permettre de faire un plan social. Confrontée aux mêmes difficultés que France Télévisions, la BBC a fait le choix d’une autonomie renforcée dans la définition de ses priorités. À l’opposé, le Gouvernement a mis France Télévisions sous la tutelle du CSA. Est-ce vraiment la bonne stratégie ?

M. Patrick Lebreton. Je vous félicite à mon tour, monsieur le rapporteur pour avis.

Mon collègue Jean-Jacques Vlody et moi-même avons travaillé sur la situation du Réseau outre-mer première et, plus particulièrement, de France Ô, qui constitue pour nous un sujet de préoccupation. En effet, compte tenu des orientations stratégiques adoptées par le groupe France Télévisions, le statut de France Ô est devenu une énigme : alors qu’elle est souvent qualifiée de « chaîne des outre-mer » ou de « chaîne de la diversité », il s’agit en réalité d’une chaîne fourre-tout qui diffuse ou rediffuse de vieilles séries, des programmes relatifs aux cultures urbaines et, la nuit, les journaux de différentes stations des outre-mer.

Dans le contexte de restructuration en cours, des questions légitimes se posent quant à la politique menée par France Télévisions à l’égard des outre-mer : qu’en est-il du recentrage de la ligne éditoriale de France Ô ? Quel sera l’avenir des stations régionales concurrencées par des chaînes privées performantes, en particulier à la Réunion ? Que deviendra le personnel ultramarin du groupe dans cette restructuration, et notamment les cadres, qui devraient être les plus touchés ? Au moment où le Premier ministre m’a confié une mission sur la régionalisation de l’emploi dans les outre-mer, ces annonces tombent mal.

M. Christian Kert. Je m’associe aux louanges décernées au rapporteur pour avis, mais, s’agissant de France Télévisions dans son ensemble, le rapport me semble quelque peu sévère. Peut-être aurait-il fallu préfigurer ce que doit être son identité dans un paysage audiovisuel en profonde mutation et saluer les progrès réalisés par France 5, dont on pouvait se demander il y a trois ou quatre ans quelle était sa vocation, mais qui a su trouver sa voie – par opposition à France 4, dont la mission n’est toujours pas très claire.

En ce qui concerne France 3, nous devrions réfléchir aux véritables besoins d’information de proximité – on connaît les difficultés de la presse régionale. Quant à l’exemple de France Bleu, est-il transposable à la télévision ? Que voulons-nous, en somme : plus d’information régionale ou plus de production régionale ? Le succès des grandes chaînes d’information semble inciter à développer l’information régionale, ce qui appelle une nouvelle structuration. Le rapporteur souhaite-t-il la création de sociétés régionales ou la décentralisation de la société unique ? Son rapport ne tranche pas entre ces deux options, alors que le choix est décisif.

Sur un autre plan, comment France Télévisions pourrait-elle mieux servir l’audiovisuel extérieur de la France en tissant avec lui des liens plus tangibles ? Cela permettrait de satisfaire les attentes de ceux qui, dans le monde, attendent de notre pays une information de bonne qualité.

Monsieur le rapporteur pour avis, je comprends que vous nous appeliez à voter ces crédits, mais ce que vous nous avez dit du fonctionnement de France Télévisions devrait nous dissuader de le faire sans réserve. En particulier, nous devrions demander à la ministre de s’intéresser de plus près à France Télévisions avant d’accorder notre satisfecit à ce budget.

M. Hervé Féron. France Télévisions doit contribuer à l’acte III de la décentralisation et répondre à la demande croissante de proximité, en s’appuyant sur France 3 et le réseau Outre-mer Première et en s’inspirant de la réussite du réseau de France Bleu – où la qualité et la proximité de l’information pâtissent toutefois, comme ailleurs, des économies de moyens.

Aujourd’hui, faute de ressources et faute d’une structuration adaptée, France 3 Régions n’est plus une chaîne de proximité. En outre, le passage à la TNT a compromis l’accès de certaines catégories de population aux programmes, ce qui nuit non seulement à la qualité de l’information mais aussi à la cohésion sociale.

M. Rémy Pflimlin, président de France Télévisions, et M. Alain Rousset, président de l’Association des régions de France, s’étaient dits favorables à une participation des régions au financement des antennes locales de France 3, mais la ministre de la culture s’est opposée à ce projet, qui suscitait la méfiance des rédactions. Comme vous, monsieur le rapporteur, je partage cette méfiance : en la matière, il convient d’être vigilant.

M. Frédéric Reiss. Je salue l’excellent travail accompli par notre rapporteur pour avis sur France 3. La création des pôles de gouvernance a effectivement complexifié l’organisation du réseau et l’on ne perçoit aucune volonté de revaloriser ni d’enrichir les programmes régionaux. Lorsque ces derniers existent, il s’agit souvent de programmes diffusés sur tout le territoire mais qui ne répondent pas aux attentes des téléspectateurs. Or, comme l’a dit Rudy Salles, l’audience baisse mais la demande de télévision régionale s’accroît. Il faut par conséquent rendre aux régions une place centrale. L’inversion qui consiste à faire de France 3 une chaîne régionale avec décrochages nationaux est donc intéressante, mais avec quels moyens y parviendrons-nous ? Le rapporteur pour avis s’intéresse surtout aux moyens financiers, et l’on ne peut que déplorer la diminution des budgets. Mais la qualité d’une chaîne dépend aussi des hommes et des femmes qui la font vivre. Monsieur le rapporteur pour avis, vous êtes-vous intéressé à l’ancrage régional des salariés de France Télévisions ? Pour bien parler d’une région, il faut en connaître la culture, l’histoire, les problèmes.

M. Jean Jacques Vlody. Je félicite le rapporteur de son travail, qui m’aidera à expliquer à mes collègues la situation de France Ô et des télévisions d’outre-mer, puisque l’on peut leur transposer tout ce qui a été dit à propos de France 3, en particulier la nécessité de développer la proximité. Avec le passage à la TNT, RFO, devenue France Ô, est désormais diffusée gratuitement sur tout le territoire français, ce qui aurait pu permettre au grand public de découvrir les territoires d’outre-mer et leurs cultures. Mais cet espoir a été déçu : la transformation de RFO en France Ô et le changement de ligne éditoriale qui l’a accompagnée n’ont au contraire cessé d’éloigner la chaîne – les contenus comme ceux qui les produisent – des territoires ultramarins.

La situation est grave : les chaînes ultramarines n’ont même plus la main sur la programmation et la diffusion des informations au niveau local ; tout se décide à Paris, au point qu’un décalage technique affecte parfois la diffusion. On ne demande absolument plus aux chaînes locales d’alimenter les reportages : les choix éditoriaux sont faits à Paris, et les seuls programmes produits localement et diffusés sur France Ô sont des journaux télévisés retransmis… entre quatre et six heures du matin.

Bref, France Ô n’est plus une chaîne du service public dédiée aux outre-mer ; elle ressemble bien plutôt à Discovery ou à France 4, alors qu’elle devrait être la chaîne des outre-mer, faite par les outre-mer. Je vous propose donc, monsieur le rapporteur pour avis, de lui étendre l’objectif de régionalisation de la production et de la diffusion que vous prônez pour France 3 ; ainsi pourra-t-elle redevenir une chaîne de diffusion nationale des productions ultramarines.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour avis. À vous écouter, mes chers collègues, je me croirais presque sur France 3 : ici aussi, les programmes sont rediffusés – puisque j’ai entendu ce matin des propos déjà tenus hier soir – voire multi-diffusés, car je les réentendrai certainement dans l’hémicycle la semaine prochaine…

Nous, élus locaux, sommes viscéralement attachés à France 3, qui est notre lien avec le service public audiovisuel. La chaîne est riche d’un maillage exceptionnel et d’équipes qu’animent un fort esprit « maison », la passion du métier et la volonté de faire d’elle un véritable outil d’information régional. C’est une forme de déconcentration de l’organisation et, surtout, de l’éditorial qu’il s’agit d’opérer, car c’est dans les territoires, dans les régions que réside l’identité de France 3, par différence avec France 5, la chaîne des savoirs – une jeune chaîne dont on peut en effet saluer le succès et la capacité à trouver son public. Alors que la création des quatre pôles nationaux était censée fluidifier l’organisation technique et administrative, ce sont désormais eux qui font la vie éditoriale des chaînes. Quant au périmètre des pôles, quel lien peut-il y avoir entre France 3 Cherbourg, par exemple, et France 3 Vanves – où l’on traite l’actualité francilienne – , de sorte qu’y coexistent une rédaction nationale et une rédaction locale qui peine à trouver ses marques ? S’inspirer du modèle de France Bleu, c’est vouloir irriguer la République par les territoires, pour reprendre la belle métaphore de Marie-George Buffet. Ce maillage exceptionnel dont nous disposons, nous devons l’utiliser. Il y a dans les territoires des forces vives qui peuvent fournir, en s’appuyant sur les innovations culturelles et technologiques, des sujets exploitables par la chaîne régionale.

Selon les informations communiquées par la chaîne, le volume de diffusion de programmes régionaux a singulièrement augmenté. Encore faut-il que les horaires de diffusion tiennent compte du public visé : comment, entre neuf et onze heures du matin, toucher les jeunes, les étudiants, les chefs d’entreprise, les actifs ? De même, il est regrettable que les informations locales ne soient plus rediffusées en deuxième partie de soirée, car cela prive la population active, qui peut difficilement regarder le journal télévisé à dix-neuf heures, d’une information de proximité.

Le CSA, doté par la loi d’un pouvoir de nomination, mais aucunement de tutelle, doit impérativement se recentrer sur ses missions, qui sont nombreuses. L’audition à laquelle nous avons procédé le montre : le CSA ne connaît pas France 3. Doit-il y consacrer plus de moyens, plus d’attention ? On peut même se demander s’il s’intéresse, de près ou de loin, à l’avenir de cette chaîne qui concerne les territoires, bien loin de Paris.

À la suite des conclusions de la mission confiée à Mme Anne Brucy, la réforme de France 3 devra faire l’objet d’un engagement résolu du président de France Télévisions et être inscrite au cœur du prochain mandat. En outre, le futur président devra être évalué sur la mise en œuvre de cette réforme.

S’agissant des outre-mer, je suis d’accord avec mes collègues Jean Jacques Vlody et Patrick Lebreton : France Ô est totalement marginalisée au sein de France Télévisions, son audience est confidentielle, ses contenus ne sont pas produits par les outre-mer, et elle fournit à France Télévisions une excuse pour ne parler sur aucune autre chaîne des outre-mer, pourtant parties intégrantes de la République.

Nous devons fixer un cap clair à France Télévisions et faire qu’elle dispose des effectifs nécessaires. Les équipes nous l’ont dit, elles sont freinées dans leur élan alors qu’elles pourraient produire des programmes plus nombreux et meilleurs à moyens constants.

M. le président Patrick Bloche. Merci, monsieur le rapporteur pour avis, de cet excellent travail qui a suscité des appréciations convergentes. Il sera publié avec le compte rendu de notre réunion et je lui souhaite de bénéficier d’un large écho, car il devrait être utile au Gouvernement, tutelle de France Télévisions, ainsi qu’au régulateur, le CSA, nanti des nouveaux pouvoirs que nous avons voulu lui donner.

La Commission en vient à l’examen des crédits du programme 180, « Presse ».

M. Rudy Salles, rapporteur pour avis. La presse écrite est prise dans une spirale extrêmement préoccupante. La crise semble même s’être récemment aggravée, ce qui laisse craindre les pires difficultés à court et moyen termes.

Or, alors que le Président de la République s’était engagé pendant la campagne électorale à refondre totalement les aides à la presse, non pour les remettre en cause mais pour « mieux les cibler vers le lecteur citoyen », le projet de loi de finances pour 2014 fait l’exact inverse. Les aides à la presse subissent ainsi un recul spectaculaire de 27,6 %, passant de 395 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2013 à 285 millions d’euros dans le présent projet de loi. Dans le dossier de presse qui accompagne le projet, on peut lire que « la réforme des aides à la presse se met en place dès 2014 avec pour objectif de mieux accompagner les mutations rapides du secteur et de renforcer le ciblage des aides ». Affirmation pour le moins surprenante, car le ciblage ne progresse aucunement, comme le montrent clairement les indicateurs, et le projet se borne à réduire brutalement les aides, ce qui se traduira inéluctablement par des arrêts de titres et des suppressions d’emplois.

Cette baisse soudaine touche en particulier l’aide au transport postal de la presse. Pour soutenir celle-ci face à l’aggravation de la situation économique, l’ancien Président de la République avait décidé en janvier 2009 un allégement du coût du transport postal sous la forme d’un moratoire sur les augmentations des tarifs postaux, financé par l’État. La remise en cause de ce moratoire se traduit à compter de 2014 par une diminution brutale de 31,8 millions d’euros de l’aide postale, alors que le secteur connaît une crise profonde et avant même que ne soit envisagée une réforme globale des aides à la distribution. Cette mesure, qui aura de très graves conséquences sur le secteur, a été décidée sans étude d’impact. Le ministère de la culture indique d’ailleurs ne pas en connaître l’impact par famille de presse. Au moment de voter les crédits de ce programme, souvenons-nous qu’aucune entreprise ne saurait sortir indemne de telles augmentations du coût de la distribution dans l’état actuel du marché, très détérioré depuis 2009.

Les crédits de l’aide postale – principale aide à la presse –, en diminution de 40 %, sont intégralement évacués vers la mission « Économie », Mme la ministre l’a confirmé devant nous hier soir. L’on ne peut que déplorer ce tour de passe-passe budgétaire ; il montre que les impératifs d’affichage du ministère de la culture l’ont malheureusement emporté sur l’objectif de transparence et de lisibilité de la politique de soutien à la presse.

Parallèlement au renchérissement du transport postal, le soutien au portage, alternative d’avenir à ce dernier, régresse encore. En deux ans, il aura diminué de 20 %. Alors que le Président de la République s’est engagé à maintenir cette aide cruciale à 37,6 millions d’euros jusqu’en 2015, elle a été ramenée à 28,3 millions en 2013, après mesures de gel budgétaire, ce qui correspond à une diminution de 37 % par rapport à 2012.

L’accompagnement de la mutation numérique est présenté comme une priorité, mais la presse en ligne reste pénalisée par l’application d’une TVA de 19,6 %, qui passera à 20 % à compter de janvier prochain. Il faut remédier au plus vite à cette situation intenable. La ministre a pris hier soir des engagements en ce sens : acceptons-en l’augure.

Alors que le fonds stratégique pour le développement de la presse, principale aide à la modernisation, est également présenté comme une priorité budgétaire, 35,8 % de ses crédits sont gelés en 2013 et son montant baisse de plus de 20 % en deux ans pour être ramené à quelque 30 millions d’euros. Le groupe de travail sur les aides à la presse auquel a participé notre collègue Michel Françaix, et qui a rendu ses conclusions en avril dernier, a préconisé de faire de ce fonds l’instrument central du soutien public à la presse ; on en est loin.

Ce groupe de travail a également proposé de supprimer la réduction du tarif SNCF pour le transport de la presse et d’en reverser les crédits – 4,5 millions d’euros – au fonds stratégique. Or, si la réduction du tarif SNCF est bien supprimée, les crédits correspondants ne bénéficient malheureusement pas à l’aide à la modernisation du secteur.

La fusion annoncée des trois sections du fonds stratégique afin de « supprimer tout cloisonnement entre les projets aidés » constitue une mesure de simplification bienvenue, mais c’est aussi l’unique mesure de réforme issue d’une année de réflexion sur la refonte des aides à la presse.

Quant à la presse quotidienne régionale (PQR), sur laquelle j’ai souhaité faire le point dans le cadre de cet avis, elle bénéficie d’atouts importants mais traverse une crise majeure, comme le reste du secteur.

Chaque année, la PQR diffuse 1,7 milliard d’exemplaires, ce qui représente 70 % des exemplaires diffusés par la presse d’information politique et générale et 44 % des exemplaires diffusés par l’ensemble de la presse française. Ainsi constitue-t-elle, aujourd’hui encore, le principal vecteur d’information du pays. L’information de proximité, régionale et locale, demeure son principal atout. En outre, elle n’est pas soumise au même système coopératif de distribution que la presse quotidienne nationale, aujourd’hui en grande difficulté. Enfin, contrairement à ce que l’on entend parfois, la PQR a engagé d’importantes réformes pour s’adapter aux mutations de son environnement. Elle représente déjà un acteur majeur du numérique, grâce à une croissance de 40 % par an de l’audience de ses 45 sites, qui totalisent 16 millions de visiteurs uniques par mois.

Néanmoins, sa mutation numérique est lourdement entravée, comme celle des autres familles de presse, par le taux de TVA applicable à la presse en ligne, dont nous pouvons toutefois espérer qu’il évolue. Elle se heurte en outre à l’absence de modèle économique du développement numérique, qui génère à peine 10 % de son chiffre d’affaires. La diffusion papier demeure donc vitale, comme les aides afférentes.

Malgré les atouts dont elle dispose, la PQR traverse une crise grave, qui s’est aggravée au cours des deux dernières années. En huit ans, de 2004 à 2012, sa diffusion a perdu 800 000 exemplaires imprimés – l’équivalent du tirage d’Ouest-France – et l’érosion s’accélère depuis 2012. En outre, son chiffre d’affaires publicitaire connaît une baisse brutale depuis 2009 ; il a diminué de 21 % depuis 2007, ce qui représente une perte de 227 millions d’euros.

Or, mon rapport le montre, le système des aides à la presse n’est pas du tout favorable à la PQR. Alors que celle-ci diffuse 70 % des exemplaires de presse d’information politique et générale, elle a bénéficié en 2012 de seulement 25 % des aides directes. En particulier, elle ne touche qu’environ 15 % de l’aide postale, source principale d’aide, et n’est pas concernée par l’aide à la distribution des quotidiens nationaux. C’est dire l’importance de l’aide au portage pour cette famille de presse qui déclare 85 % des volumes portés.

L’Humanité, La Croix et Libération touchent respectivement 48, 32 et 27 centimes d’aide par exemplaire diffusé ; Le Monde et Le Figaro bénéficient respectivement de 19 et de 17 centimes, et les hebdomadaires d’information politique touchent de 20 à 30 centimes. Les aides à la PQR sont très inférieures : elles varient de 4 à 7 centimes selon les titres, qui sont donc moins aidés que les magazines de programmes de télévision ou que le magazine Elle, par exemple, qui touche 16 centimes par exemplaire.

Cette répartition inéquitable doit être rectifiée d’urgence. En 2012, La Poste a bénéficié d’une compensation d’environ 40 millions d’euros pour diffuser 10 % de la PQR, alors que celle-ci percevait, pour 50 % de sa diffusion, une aide au portage de 30 millions d’euros. L’aide au transport postal représente donc en moyenne 24 centimes par exemplaire, contre 5 centimes pour l’aide au portage.

Comme l’indique la Cour des comptes dans son rapport de juillet 2013 sur les aides de l’État à la presse écrite, « d’une manière générale, l’existence d’aides au portage, au transport postal, au transport par la SNCF ou d’aides au système de distribution au numéro, sans conception d’ensemble ni cohérence globale, a conduit avec le temps à rendre certains modes de diffusion moins chers que d’autres, sans réelle justification ni considération tenant à la qualité du service rendu. Elle a induit, auprès des éditeurs de presse, des décisions contraires à ce qu’aurait été un choix économiquement rationnel ». Une politique plus neutre pourrait donc se substituer à l’actuelle politique de soutien spécifique à chaque mode de diffusion et de tarifs administrés. Elle pourrait prendre la forme d’une aide unique et globale à l’exemplaire diffusé, ne portant pas sur un mode de diffusion particulier mais laissant les entreprises de presse libres de choisir ceux leur paraissant les plus adaptés à leurs besoins. Ces aides pourraient être ciblées sur la presse qui n’est pas purement récréative.

Cette option n’étant pas retenue pour l’instant, il convient à court terme de veiller à tout le moins à ce que le calcul de l’aide au portage n’aggrave pas les défauts du système. Or mon rapport montre que ses modalités, inutilement complexes, induisent d’importantes distorsions contraires à l’équité. Alors que l’aide au transport postal a été d’emblée définie comme une aide structurelle poursuivant un objectif d’intérêt général – la diffusion de la presse –, l’aide au portage a été conçue comme une mesure hybride, à la fois structurelle et transitoire. Cette confusion, qui explique la complexité des modalités de calcul, a nourri une polémique stérile et inaboutie sur son bilan et sur la bonne répartition entre l’aide au flux – l’incitation à la transition du postage au portage – et l’aide au stock – l’aide structurelle à la diffusion par portage. Les conditions d’attribution de l’aide ont ainsi été modifiées chaque année afin de limiter l’aide au stock, accusée d’entraîner un effet d’aubaine au profit de la PQR – ce qui n’a pas de sens puisque celle-ci déclare 85 % des volumes portés mais n’a perçu que 70 % de l’aide en 2012.

Le mode de calcul de l’aide au portage conduit à des écarts très marqués par exemplaire porté qui ne sont pas favorables à la PQR : les titres de PQR qui ne bénéficient pas des aides au pluralisme touchent 2,7 centimes en moyenne, contre 20,7 centimes pour les quotidiens nationaux qui perçoivent ces aides. Ces distorsions résultent notamment de la valorisation excessive du flux et de la prise en considération du portage de journaux par paquets. Si effet d’aubaine il y a, ce n’est pas à la PQR qu’il a bénéficié, mais à la presse quotidienne nationale, dont le portage est effectué en grande partie par paquets dans des hôtels et des aéroports et non au domicile des abonnés.

La ministre a annoncé une revalorisation supplémentaire de l’aide au flux et une bonification en faveur du portage multi-titres. De telles mesures risquent d’accentuer encore les distorsions que je viens d’évoquer et de rendre encore plus inéquitable et illisible la répartition des aides à la diffusion. Comment transformer aussi profondément une filière lorsque le cadre incitatif qui la sous-tend est imprévisible ? Pourquoi un éditeur instaurerait-il un service de portage qu’il ne serait pas assuré de maintenir durablement ?

Enfin, comme les acteurs de la PQR, je regrette vivement la suppression, dans la loi de finances initiale pour 2013, de l’opération « Mon journal offert », qui permettait d’aider la presse citoyenne à relever le défi que constitue la reconquête du jeune public, enjeu majeur.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur les crédits du programme « Presse » de la mission « Médias, livres et industries culturelles ».

M. Michel Pouzol. Le basculement en cours de l’imprimé vers le numérique et la crise larvée que connaît le secteur depuis plusieurs décennies obligent à optimiser les aides de l’État, à l’heure où de plus en plus de lecteurs, saisis par la culture de l’immédiateté, se détournent de la presse traditionnelle, qu’elle soit nationale ou régionale. Le « monde ancien de la presse papier », selon la formule issue du rapport sur les aides à la presse rendu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013 par notre collègue Michel Françaix, subit une mutation profonde et qui perdure. La mission à laquelle notre collègue a participé a dressé un bilan clair de la situation économique du secteur et proposé une évolution des aides d’État dont il bénéficie. Le PLF pour 2014 tient compte de certaines de ses préconisations afin de garantir aux acteurs de la presse le soutien de l’État, qui doit permettre de conforter son pluralisme, de contribuer au développement de sa diffusion et d’encourager la modernisation de ses entreprises.

Nous l’avions constaté l’an dernier : toute tentative de réforme de ces aides, notamment de celles qui touchent à la distribution, se heurte à bien des conservatismes et nourrit un climat anxiogène pour un secteur fragilisé jusque dans son modèle. L’une des préconisations de la mission était de soutenir la profession par un régime uniforme de TVA au taux de 2,1 % et d’aligner le régime de la presse en ligne sur celui de la presse imprimée. Le PLF pour 2014 maintient le taux « super-réduit » de TVA dont bénéficie l’ensemble de la presse. Par ailleurs, afin de remédier à une situation paradoxale, le Gouvernement s’est engagé à ramener à 2,1 % en 2014 le taux de TVA appliqué à la presse en ligne, qui s’élève actuellement à 19,6 %. La ministre prouve ainsi sa détermination à soutenir activement un métier en pleine évolution.

L’État continuera également d’accompagner la restructuration de Presstalis, qui aurait sans doute cessé son activité sans son intervention. La médiation qui a été menée et l’accord qui en a découlé l’année dernière ont évité une catastrophe à la filière et préservé les 30 000 marchands de journaux, essentiels au système de vente traditionnel au numéro, qui dépendent de la distribution par Presstalis. Le pluralisme reste donc garanti, de même que la liberté de la presse écrite distribuée sur notre territoire. Toutefois, comme dans tout le secteur de la distribution, la vigilance reste de mise : les équilibres sont fragiles et les dispositifs doivent être clarifiés.

Le rapport de la mission coordonnée par Roch-Olivier Maistre suggérait également de réformer le fonds stratégique pour le développement de la presse, chargé d’attribuer les aides aux investissements, afin de favoriser les projets d’avenir, l’innovation et la mutualisation. De fait, les différentes sections du fonds seront fusionnées. L’idée est de réunir plusieurs types d’aides, aujourd’hui éparses, pour en faire le principal levier d’aide à la transformation des éditeurs de presse.

J’appelle particulièrement votre attention sur la rémunération des kiosquiers et marchands de journaux, très pénalisés par la baisse des ventes et qui peinent à maintenir leur activité à l’ère du tout numérique. En 2012, 1 182 points de vente – maisons de la presse, kiosques, espaces dédiés à la presse dans les commerces – ont disparu, et les neuf premiers mois de 2013 n’ont pas été plus reluisants. Certes, le solde des fermetures et des ouvertures aboutit à une ouverture nette de 234 points de vente, ce qui laisse entrevoir une inversion de la tendance ; mais, en réalité, les points de vente spécialisés ferment et le phénomène s’aggrave. Ainsi, depuis le début de l’année, 81 librairies-papeteries incluant des espaces presse ont fermé, et les enseignes de presse ont perdu 56 points de vente. Le découragement de la profession, l’une des moins rentables du commerce de détail, appelle des mesures d’urgence. Afin de la soutenir, 4 millions d’euros sont inscrits dans le projet de loi de finances ; c’est une nouvelle encourageante, même s’il faudra réfléchir à des sources de financement plus pérennes.

L’année 2013 est par ailleurs marquée par la renégociation du contrat d’objectifs et de moyens de l’AFP. Il s’agit en particulier de clarifier les relations financières entre l’État et l’Agence, en distinguant, dans le soutien public qui lui est apporté, les abonnements proprement dits de la compensation des missions d’intérêt général que la loi « Warsmann » lui a confiées. Nous attendons donc avec impatience les conclusions du rapport de la mission parlementaire confiée à Michel Françaix en septembre dernier et chargée de proposer un nouveau modèle qui permette à l’AFP de garantir son indépendance éditoriale et de trouver des sources de financement durables.

Nous ne pouvons que nous réjouir d’un budget qui donne toute sa chance au numérique, qui préserve la diffusion de la presse écrite par tous les canaux, encourage l’innovation et la mutualisation, instaure des outils de gestion, améliore la transparence et le contrôle. Il faudra réfléchir plus avant à l’avenir de notre presse, sans idées préconçues ni tabou : c’est le chantier qui nous attend pour les années à venir. Pour l’heure, le groupe SRC votera naturellement ces crédits.

Mme Virginie Duby-Muller. Pour le groupe UMP, la mission « Médias » est victime de la baisse globale du budget du ministère de la culture, qui devait pourtant être sanctuarisé. Le programme 180 n’échappe pas à cette tendance, puisqu’il est doté de 258,06 millions euros en autorisations d’engagement, contre 265,4 millions en 2013. On le voit, les aides à la presse sont dans le viseur du Gouvernement comme de la Cour des comptes. Le Président de la République, qui avait promis de refondre ces aides sans pour autant les remettre en cause, n’a, une fois de plus, pas tenu parole.

Les crédits alloués à l’AFP, versés cette année encore sous la forme d’abonnements souscrits par les administrations, augmentent de 3,4 millions d’euros et les aides à Presstalis sont sanctuarisées à hauteur de 18,9 millions environ. Mais il ne s’agit que d’exceptions. L’exercice 2014 est marqué par la fin de la compensation par l’État du moratoire sur l’augmentation des tarifs postaux issue des accords Schwartz, ainsi que par la fin des aides SNCF, ce qui représente une baisse de près de 55 millions d’euros de crédits.

L’ouverture d’une réflexion sur la complémentarité des modes de diffusion – postage, portage et vente au numéro – ne compensera nullement la hausse considérable du coût du postage pour un grand nombre de parutions qui ne peuvent être acheminées autrement que par voie postale, notamment dans les zones rurales. La suppression annoncée va donc se traduire par une hausse prohibitive du coût du postage rapporté au chiffre d’affaires de ces parutions. C’est notamment le cas de la presse d’information spécialisée, presque entièrement diffusée par voie postale dans le cadre d’abonnements. Nous regrettons que cette décision, dont les conséquences pour l’emploi risquent d’être lourdes alors que le secteur est déjà en crise, n’ait fait l’objet d’aucune étude d’impact. La diffusion a diminué de 4,4 % en un an et le mois d’octobre s’est révélé particulièrement sombre pour le secteur des médias où, si l’on cumule les annonces récentes, au moins un millier d’emplois sont menacés, selon un article paru dans Le Monde le 26 octobre dernier.

Le Gouvernement prend également acte de la fin de la politique de soutien au portage. Pourtant, à en croire le rapport sur les aides à la presse remis à la ministre le 2 mai dernier par un groupe d’experts animé par M. Roch-Olivier Maistre, « le basculement vers le portage constitue l’un des changements majeurs à réussir, au même titre que la mutualisation ou la mutation numérique ». L’étude sur le bilan de l’aide au portage commandée en mars dernier par la Direction générale des médias et des industries culturelles au cabinet Arthur D. Little et citée par Rudy Salles dans son rapport confirme que le portage est le meilleur canal de distribution de l’abonnement, offrant un meilleur taux de fidélisation qu’auprès des abonnés postés. Mais l’aide au portage diminue et ne bénéficie pas des crédits issus de la suppression du moratoire. Cela témoigne d’une profonde incohérence.

La presse papier a pourtant fait des efforts considérables en s’adaptant à l’apparition du numérique, qui apporte plus d’interactivité et correspond aux nouvelles exigences du lectorat. De multiples offres d’abonnement fondées sur le principe de la complémentarité éditoriale sont désormais proposées, au-delà d’une simple présentation du format papier sous format PDF.

Comme le montre très bien le rapport, la presse quotidienne régionale, premier vecteur d’information de proximité, subit elle aussi la baisse des recettes publicitaires et du nombre de lecteurs, mais a su s’adapter aux mutations de son environnement. Toutefois, le système d’aide actuel, rapporté à l’exemplaire diffusé, lui est très défavorable : les aides devraient être plus équitablement réparties, car les disparités sont importantes, comme en attestent les exemples cités par notre rapporteur.

En conclusion, la crise de la presse et le développement d’Internet appellent un nouveau modèle, propre à garantir la survie du secteur. Le gel et le surgel de l’aide au portage, canal incontournable d’acheminement de la presse, révèlent l’absence de stratégie et l’incohérence du ministère de la culture : pour protéger l’avenir de la presse écrite, il aurait fallu au contraire assurer au portage un financement pérenne et pluriannuel.

M. Thierry Braillard. Au nom du groupe RRDP, je félicite M. Rudy Salles pour son rapport, et je m’émerveille de son art consommé du maniement des chiffres.

Selon une étude récente, pour s’informer, les Français âgés de plus de 40 ans combinent presse écrite, télévision et Internet ; ceux qui sont âgés de 20 à 40 ans s’en tiennent principalement à la télévision et à Internet, les moins de 20 ans se contentant d’Internet. Ces résultats ne peuvent qu’inquiéter les défenseurs de la presse écrite que nous sommes.

Certains estiment que la presse écrite ne serait pas assez rentable parce qu’elle ne se serait pas tournée assez rapidement vers l’Internet ; mais, en réalité les sites Internet des journaux, certes indispensables pour répondre à la demande des lecteurs, ne sont pas rentables. En effet, le manque de flexibilité de la convention collective nationale des journalistes conduit souvent à confier à de nouvelles recrues la rédaction des contenus en ligne, ce qui engendre un coût que les recettes publicitaires supplémentaires suffisent rarement à couvrir.

En d’autres termes, toute la presse est fragilisée, ce qui justifie pleinement l’aide que nous lui apportons. À ce sujet, le rapporteur pour avis signale à nouveau l’opacité de la répartition des aides. Elle est effectivement opaque, au point que j’ai dû renoncer à m’en procurer la liste, mais les chiffres cités montrent qu’elle n’est ni juste ni équitable. Toutefois, si l’aide à la presse quotidienne nationale perd 500 000 euros, le montant de l’aide à la presse quotidienne régionale reste stable. Elle ne représente toutefois que 12,5 % de l’aide au pluralisme – 25 % si l’on y ajoute l’aide aux hebdomadaires régionaux, ce qui montre le peu de considération dont bénéficie la presse régionale dans son ensemble.

Nous voterons en faveur des crédits du programme, mais les questions soulevées par le présent rapport et par celui de Michel Françaix devront être débattues.

Mme Marie-George Buffet. Au nom du groupe GDR, je félicite à mon tour le rapporteur pour avis de son travail et de son choix d’étudier plus particulièrement la PQR à l’heure où des journaux aussi anciens que Nice Matin sont touchés et alors que le groupe Centre France-La Montagne vient d’annoncer la suppression de 230 emplois.

La presse écrite n’est pas un malade condamné dont nous devrions accompagner la longue agonie : notre rôle est d’aider la profession à identifier les complémentarités entre le journal écrit, porté, acheté, et le numérique.

Nous devrions agir plus particulièrement dans trois domaines. Premièrement, l’accord relatif à Presstalis a permis d’éviter la disparition de l’entreprise, qui aurait porté un coup fatal à la distribution, mais l’équilibre sera impossible à atteindre aussi longtemps que coexisteront deux messageries concurrentes dont l’une choisit les magazines les plus rentables pendant que l’autre est astreinte à distribuer la presse quotidienne. Il faut aller vers la constitution d’une coopérative unique.

Ensuite, comme l’a dit le rapporteur pour avis, il faut cibler les aides : on ne peut continuer d’aider de la même manière les magazines de télévision et la presse citoyenne d’intérêt général. Il convient donc de réaffecter les aides sans en réduire le montant global.

Enfin, nous devons aider les diffuseurs – ce qui n’est pas contradictoire avec l’aide au portage –, notamment en rapprochant points de vente et clients.

Avec notre collègue Michel Françaix et toutes les organisations professionnelles et syndicales du secteur, j’ai organisé à l’auditorium du Monde, au printemps, une réunion qui a permis d’élaborer une proposition de loi sur le sujet. J’en appelle au Gouvernement afin que notre réflexion débouche sur un texte législatif réformant les aides en vigueur.

M. Hervé Féron. Le contraste entre l’ancrage territorial de la PQR et l’audience mondiale d’Internet suffit-il à expliquer les difficultés de ce secteur à passer au numérique ? Comment lui permettre de retrouver en ligne les spécificités qui ont fait son succès ?

Vous proposez, monsieur le rapporteur, de reconquérir le lectorat jeune par une nouvelle opération aménageant les modalités du projet « Mon journal offert ». Ne peut-on le faire par d’autres moyens ?

Mme Dominique Nachury. Le PLF pour 2014 met fin à la compensation du moratoire sur l’augmentation du coût du transport postal décidé en 2009. Le 10 juillet dernier, la ministre a annoncé une mesure spécifique de sortie supportable du moratoire pour la presse d’information politique et générale. De quoi s’agit-il ? N’aurait-il pas été logique de reverser à l’aide au portage les crédits dégagés par la suppression du moratoire ?

M. Rudy Salles, rapporteur pour avis. Monsieur Pouzol, notre collègue Michel Françaix, qui appartient à votre groupe, a dressé l’année dernière un état des lieux intéressant, au terme duquel il appelait avec raison à une refonte totale du dispositif. Or le PLF ne prévoit aucune réforme, se contentant de réduire le montant des aides. Quant à la fusion des trois sections du fonds stratégique, c’est une mesure de simplification qui est surtout cosmétique, hélas. Enfin, la situation des diffuseurs est préoccupante, comme en atteste la fermeture de nombreux points de vente, mais la réduction de l’aide postale ne contribuera pas à revaloriser leur rémunération, qui pâtit de la crise des niveaux 1 et 2 du système de distribution. Sur ce point, notre inquiétude demeure donc vive.

S’agissant du basculement vers l’Internet, la presse est au milieu du gué, contrainte de se moderniser et d’être inventive pour préserver l’attrait du journal papier, mais aussi de proposer des sites Internet performants, ce qui suppose des investissements considérables, sans la moindre garantie de rentabilité, faute de modèle économique. En outre, les recettes publicitaires de la presse papier baissent et la publicité en ligne est faiblement rémunérée. La presse papier va-t-elle disparaître ? Nul ne le sait, nul ne maîtrise le calendrier.

La ministre nous a assuré hier soir que l’on irait vers une TVA à 2,1 %, sur la presse en ligne ce qui résorbera fort heureusement un écart considérable.

La nécessité d’une plus grande transparence dans la répartition des aides a été évoquée. Des efforts ont été réalisés – ainsi la direction générale des médias et des industries culturelles du ministère publie-t-elle désormais en ligne le montant des aides directes par titre – mais il faut aller plus loin et rendre public les montants des aides indirectes et les montants rapportés au nombre d’exemplaires diffusés. Cela mettrait en évidence les distorsions que j’ai évoquées précédemment.

Je ne peux conclure sans lancer l’alarme. Les entreprises de presse sont extrêmement inquiètes quant à leur avenir et nous avons lieu de l’être également. La presse, fenêtre de la démocratie, est en danger. Elle affronte la révolution numérique et son lectorat vieillit sans que nul ne sache s’il se renouvellera. Nous devons faire preuve de la plus grande vigilance pour que la presse française continue d’exister.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie, monsieur Salles, d’avoir mis en exergue ce sujet fédérateur, qui doit nous mobiliser tous, quelles que soient nos appartenances politiques.

La Commission en vient à l’examen des crédits du programme 334 « Livres et industries culturelles ».

Mme Brigitte Bourguignon, rapporteure pour avis. Je présenterai d’abord, brièvement, les grandes lignes du budget du programme 334, « Livres et industries culturelles ». Dans un contexte budgétaire contraint, ce programme connaît une légère diminution – de 2 % – de ses crédits de paiements, mais l’essentiel des actions est préservé et la majeure partie des subventions sont reconduites. Cet effort doit être salué.

Le programme 334 comprend deux actions. La première, Livre et lecture, vise à favoriser le développement de la création littéraire par l’entremise du Centre national du livre (CNL), dont le budget s’élèvera à 36,4 millions d’euros en 2013, et à encourager la pratique de la lecture. Dans ce domaine, l’État soutient un maillage dense de bibliothèques sur tout le territoire et joue un rôle pilote, par l’intermédiaire de deux bibliothèques nationales : la Bibliothèque nationale de France (BnF) et la Bibliothèque publique d’information (BPI). Les crédits de la BnF sont consacrés d’une part à la rénovation du quadrilatère Richelieu, dont le coût ne cesse de croître en raison de travaux imprévus, d’autre part à la numérisation des œuvres détenues dans ses collections afin de les rendre accessibles au plus grand nombre ; en juillet 2012, la bibliothèque numérique Gallica contenait 1,8 million d’ouvrages. La subvention de la BPI pour charges de service public est stable.

La seconde action de ce programme, Industries culturelles, finance les politiques transversales en faveur du cinéma, du jeu vidéo et de la musique enregistrée, ainsi que la lutte contre le piratage des œuvres culturelles en ligne, par l’intermédiaire d’une autorité publique indépendante, HADOPI. La forte diminution des crédits de paiements – en baisse de 15,3 % – tient à réduction de la subvention versée à HADOPI ; elle ne saurait occulter la reconduction des crédits en faveur de la musique enregistrée, du jeu vidéo et du cinéma.

J’ai souhaité consacrer la seconde partie de mon rapport au soutien à la chaîne du livre et à l’accès à la lecture. Le soutien à la chaîne du livre se caractérise par un ambitieux plan de soutien à la librairie, dont je me félicite. Nous savons, depuis que s’est tenue la commission élargie, qu’il ne s’agit pas d’un effet d’annonce : des engagements ministériels ont été pris et ce plan est financé. Il cible les aides vers les deux domaines dans lesquels les demandes sont les plus importantes : les besoins ponctuels de trésorerie des libraires et la transmission des fonds de commerce. Ainsi les librairies rencontrant des difficultés pour accéder au crédit bancaire pourront-elles disposer d’un fonds d’avances en trésorerie par le biais de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC). D’autre part, le fonds de soutien à la transmission des commerces créé en 2008 et géré par l’Association pour le développement de la librairie de création (ADELC) sera renforcé, car de nombreux libraires partiront en retraite. Cela permettra notamment que les librairies du réseau Chapitre puissent, en certains lieux, trouver des repreneurs.

J’en viens à l’accès à la lecture, sujet sur lequel j’ai choisi d’insister. En cette année où la lutte contre l’illettrisme, qui touche 3,1 millions de nos compatriotes – sachant que près de 10 % des jeunes ont des difficultés de lecture, et que 2 % ne savent pas lire –, a été érigée en grande cause nationale, il m’a semblé important de rappeler combien le développement de la lecture publique participe de l’insertion sociale et de la prévention de la précarité.

Bien que les politiques de lecture publique relèvent majoritairement des collectivités territoriales et principalement des communes, l’État conserve un rôle d’impulsion dynamique et d’accompagnement dans ce domaine. Il s’est attaché à nouer un partenariat avec les collectivités territoriales et les associations. Ce dialogue fructueux s’est traduit en particulier par un dispositif qui rencontre un vif succès : les contrats territoire-lecture. En 2013, 1,3 million d’euros ont été mobilisés à cet effet par le biais des directions régionales des affaires culturelles (DRAC). À titre d’exemple, dans le Pas-de-Calais, 61 millions ont été budgétés en 2013. Dans ce département durement frappé par la précarité, les acteurs de la vie politique et culturelle ont bien compris l’intérêt de la lecture pour lutter contre l’exclusion. Ces partenariats entre l’État et les collectivités territoriales permettent de mobiliser tous les acteurs de la lecture sur un territoire.

L’État soutient également les associations qui, telles, ATD Quart Monde et ses bibliothèques de rue, ou Lis avec moi et ses activités de lecture à voix haute, s’investissent pour donner le goût de la lecture à des publics défavorisés, empêchés ou souffrant de handicap – notamment de cécité. Je me réjouis que, malgré la contrainte budgétaire, les subventions à ces associations, qui font des miracles avec peu de moyens, aient été reconduites ; elles sont cruciales pour elles.

Le réseau des bibliothèques municipales et départementales demeure le levier principal du développement de la lecture publique. Avec 7 100 bibliothèques et 9 200 points d’accès au livre, soit 16 300 établissements de lecture publique, la France peut s’enorgueillir d’un maillage dense et actif, ce qui participe de l’exception culturelle. Selon les données d’activité des bibliothèques municipales recensées en 2011, 55 millions de Français peuvent accéder à un établissement de lecture publique ; 83 % ont accès à une bibliothèque et 17 % à un point d’accès au livre. Entre 2008 et 2012, 623 nouveaux établissements ont été mis en service. Une réserve cependant : le maillage est insatisfaisant dans les départements d’outre-mer.

Mais ce formidable service public culturel de proximité doit évoluer pour s’adapter aux usages. Pour répondre aux attentes, les bibliothèques ne doivent plus être seulement des lieux de savoir et d’études mais aussi des lieux de vie. Pour qu’elles deviennent plus attrayantes et plus accessibles, une mutation, sinon une révolution culturelle, sera nécessaire dans ces établissements. Selon une étude réalisée par le conseil général du Val d’Oise, pour qu’une bibliothèque crée son public, plusieurs critères doivent être remplis : une localisation attractive, un agencement convivial des espaces et une bonne amplitude des horaires d’ouverture ; il importe aussi de diversifier l’offre documentaire au-delà des livres. Un nouveau métier s’offre aux bibliothécaires : la médiation. À l’heure de l’Internet, les informations sont facilement accessibles, mais encore faut-il savoir où les chercher, comment les canaliser et comment se les approprier. C’est là que le bibliothécaire a toute sa place. Cela signifie aussi que la qualification du personnel doit être renforcée. Dans le Pas-de-Calais, la formation a été étendue aux bénévoles, très actifs dans le fonctionnement des petites bibliothèques en zones rurales.

Les bibliothèques sont aussi le lieu de l’apprentissage de la citoyenneté car elles peuvent aider à la formation, à la recherche de l’emploi, à l’insertion des populations précaires. La BPI en est l’exemple le plus abouti. Salle d’études et bibliothèque encyclopédique, elle offre aussi des ateliers d’autoformation : apprentissage des langues ou du code de la route, ateliers d’initiation à l’Internet pour les personnes âgées, rencontres avec des associations d’étrangers ou de personnes sans domicile fixe pour les aider à rechercher un emploi…

Enfin, les bibliothèques doivent relever doublement le défi du numérique en s’informatisant et en proposant des services et des collections de documents numériques. La possibilité de s’inscrire en ligne et d’effectuer les opérations de réservation et de renouvellement d’ouvrages à distance doit progresser. La bibliothèque de demain devra offrir l’accès à des collections numérisées d’imprimés, de manuscrits, de documents iconographiques et l’accès à la presse en ligne et aux livres numériques. La lecture doit être accessible en tous lieux du territoire, à tous publics, sans appréhension, avec envie et plaisir.

En conclusion, je vous invite, chers collègues, à émettre un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 334 « Livres et industries culturelles ».

Mme Sophie Dessus. En traitant, excellemment, de l’accès à la lecture, notre rapporteure pour avis nous rappelle qu’à travers les âges, l’écrit s’est adapté à des supports successifs : parois des grottes, papyrus, papier, et maintenant liseuses. Le groupe SRC constate que le budget proposé marque la volonté de soutenir la création littéraire, de promouvoir la diffusion et la pratique de la lecture partout et pour tous, tout en accompagnant les mutations technologiques. Le législateur devra pour cela résoudre les questions de l’accès à l’édition numérique pour les médiathèques dans le respect du droit de la propriété intellectuelle ; la ministre a indiqué hier qu’une étude était en cours à ce sujet, dont les conclusions seront connues en août prochain.

Tous les territoires de la République doivent être harmonieusement irrigués. Cela implique de soutenir l’ensemble du réseau local de diffusion du livre, de la BnF aux bibliothèques départementales de prêt, sans oublier le rôle social joué par les points livres ou les dépôts dans les plus petites communes : ils sont essentiels, même si la bibliothèque municipale se résume à quelques livres placés sur une étagère derrière le bureau de la secrétaire de mairie. Cette volonté transparaît dans le budget qui nous est proposé.

Mais que serait le réseau des bibliothèques sans celui des libraires qualifiés, qui conseillent et animent les territoires ? Nous nous félicitons donc du soutien apporté par l’État à cette profession essentielle, par le biais du plan Livre, qui mobilise une enveloppe de 18 millions d’euros. L’aide va aussi aux éditeurs régionaux, au développement de la lecture par le soutien à la formation des responsables des petites bibliothèques rurales, qui sont très souvent des bénévoles, ainsi qu’aux salons du livre, des plus petites manifestations locales à la Foire du livre de Brive-la-Gaillarde qui rassemblera, à la fin de cette semaine, tout ce que la France compte d’écrivains et d’éditeurs.

Enfin, développer la lecture, c’est s’adresser à tous les publics, et c’est pourquoi des budgets iront aux crèches et aux prisons, aux handicapés et aux déshérités, aux amoureux du livre et à ceux qui le craignent. Le livre est une passerelle avec toute l’industrie culturelle et avec toutes les formes d’art. C’est l’accès à la connaissance et donc à l’égalité et la liberté. Comment ne pas voter un budget porté par cette philosophie ?

Mme Dominique Nachury. Je salue le sérieux du travail accompli par la rapporteure pour avis. Je vois dans le rapport un hommage implicite aux politiques en faveur du livre et de la lecture menées pendant le précédent quinquennat.

La France compte 2 500 librairies indépendantes, dont 538 sont labellisées « librairie indépendante de référence ». Ce réseau dense, à la rentabilité certes fragile, résiste plutôt mieux que les chaînes ou les points de vente de la grande distribution. La politique du Gouvernement suit celle du Gouvernement précédent, notamment pour ce qui est de la transmission des fonds de commerce. Cette politique est heureusement renforcée, mais ce plan en faveur des librairies demeure modeste au regard du nombre de celles qui sont concernées et des difficultés économiques qu’elles connaissent.

Un autre motif de satisfaction résulte de politiques passées judicieuses : notre réseau performant de 7 100 bibliothèques et 9 200 points d’accès au livre offre un maillage satisfaisant qui permet l’accès à la lecture publique de 55 millions de personnes. De 2008 à 2012, 623 nouveaux établissements ont été subventionnés et le personnel a gagné en professionnalisme.

Les contrats  territoire-lecture  ont été salués. Je déplore l’abandon, faute de financement, de l’opération « Premières pages », pourtant utile dans la lutte contre l’illettrisme et l’« illectronisme ».

Enfin, il est bien de reconnaître le rôle joué par les communes, mais la baisse de leurs investissements fragilise l’édifice.

Dire, comme il est fait dans le rapport, qu’après trois ans le bilan des quatorze propositions pour la lecture est jugé « contrasté » paraît très surprenant, tout comme la preuve qui en est donnée : affirmer que la proposition d’étendre les horaires d’ouverture pour les cinquante bibliothèques les plus importantes s’est révélée décevante, n’est-ce pas chercher à voiler la réussite générale de la politique précédemment suivie ?

Le groupe UMP ne votera pas les crédits du programme « Livres et industries culturelles ».

M. Ary Chalus. Mes remerciements vont à notre rapporteure pour avis. Je me félicite qu’elle ait mentionné les graves insuffisances du réseau de bibliothèques outre-mer ; je souhaite que chacun prenne la mesure de l’ampleur du problème, dans des territoires qui comptent un très grand nombre d’illettrés.

Sur le plan général, le groupe RRDP constate avec satisfaction que le Gouvernement et la majorité interviennent particulièrement en faveur de la filière du livre, en faisant du soutien à son économie et du maintien au réseau de librairies indépendantes ses priorités. À l'heure des nouvelles pratiques de lecture et de l'essor du commerce électronique, nous constatons la disparition progressive des librairies, ce qui a des répercussions sur l’ensemble du secteur par l’amoindrissement du catalogue des éditeurs et la réduction de l'offre aux lecteurs. À cela, le ministère ne reste pas indifférent. Des moyens supplémentaires seront accordés pour permettre au livre de subsister : ainsi, en 2014, il est prévu d’allouer 315,9 millions d'euros en autorisations d'engagement au programme Livre et industries culturelles contre 260 millions d'euros en 2013 ; l'action Livre et lecture représentent 96,7 % des crédits, et une politique déconcentrée sera mise en œuvre en direction des librairies.

La mission du CNL, qui intervient dans toute la chaîne du livre, est essentielle. Il favorisera la transition numérique à hauteur de 8,5 millions d'euros, soit 31 % de son budget d'intervention.

Une politique d'accompagnement est également mise en œuvre pour promouvoir la lecture publique. Elle vise les territoires où l'offre de lecture est la plus réduite, et aussi les jeunes ; pour cela, 109 contrats territoire-lecture ont été conclus pour trois ans. Par ailleurs, les contrats numériques permettent aux bibliothèques, en collaboration étroite avec les collectivités territoriales, de développer progressivement leur offre numérique.

Soutien déconcentré aux librairies, aux éditeurs et à la création littéraire : cette politique ne peut que susciter notre adhésion.

M. Hervé Féron. Je félicite à mon tour notre rapporteure pour avis. La presse régionale rapportait ce matin une anecdote ubuesque qui en dit long sur la nécessité d’harmoniser les politiques publiques pour permettre l’accès à la lecture pour tous. L’association Lecturique met des livres à la disposition des habitants des quartiers les plus défavorisés de l’agglomération nancéienne, un accueil convivial étant organisé dans un autobus dénommé « Chocolecture » offert par la communauté urbaine du Grand Nancy, qui a été superbement décoré par un artiste plasticien. Il y a deux ans, cette association a reçu une amende pour n’avoir pas payé la taxe à l’essieu ; après que sa bonne foi eut été reconnue, l’amende a été réduite, mais non supprimée. Une fois l’amende payée, il est apparu que l’autobus n’était pas autorisé à rouler faute d’avoir été déclassé : l’administration exige que cet ancien véhicule de transport en commun soit désormais considéré comme un camion. Or, cette affectation purement réglementaire doit être agréée par le constructeur, qui s’y oppose au motif que cela nuirait à son image de marque… L’autobus ne peut donc plus rouler alors qu’il est en parfait état et que l’association Lecturique mène une activité d’utilité publique en faveur de la culture et du renforcement de la cohésion sociale. Une cohérence plus réfléchie des politiques publiques transversales est à l’évidence indispensable pour permettre que ces nobles objectifs soient atteints.

M. Christian Kert. Madame la rapporteure pour avis, le dispositif prévu pour conduire les jeunes à la lecture vous paraît-il suffisant ? N’est-il pas nécessaire d’établir des ponts entre les bibliothèques et l’Éducation nationale ?

Madame la rapporteure pour avis. Je suis surprise, madame Nachury, que vous ne donniez pas un avis favorable à l’adoption de crédits dont vous nous dites pourtant qu’ils ne font que prolonger une politique voulue par l’ancienne majorité !

L’extension des horaires d’ouverture des bibliothèques vise à attirer un nouveau public. Une expérience d’ouverture le dimanche, conduite à Toulouse, a eu pour effet l’arrivée d’un nouveau public, plus familial, qui ne serait pas venu à un autre moment.

On peut certes toujours faire mieux et plus pour les librairies ; toutefois, le plan que j’ai mentionné s’ajoute aux aides existantes accessibles par le CNL. Il ne s’agit pas de saupoudrage mais d’un ciblage précis, approuvé par le Syndicat de la librairie française.

L’anecdote que vous nous avez rapportée, monsieur Hervé Féron, est effectivement fâcheuse, et d’autres formes d’empêchement le sont tout autant. Les associations qui interviennent dans les prisons expliquent ainsi que les punitions consistent parfois à priver les détenus de l’accès à la bibliothèque, et aussi que, en raison de la surpopulation carcérale, l’espace consacré aux livres se restreint sans cesse. Tout cela entrave le développement de la lecture chez les détenus, un public qui en a pourtant sérieusement besoin, et auprès duquel les actions menées donnent parfois un résultat tangible : le goût du livre. Certaines procédures doivent manifestement être revues, mais ce qu’il faut retenir en premier lieu de ce projet de budget, c’est le maintien des aides aux associations.

Pour attirer la jeunesse dans les bibliothèques, nous pourrions, monsieur Christian Kert, nous inspirer de ce qui a été fait à Amsterdam par exemple, où le réaménagement des bibliothèques en lieux particulièrement attrayants a conduit à un grand essor de leur fréquentation. La BPI cherche également à attirer les jeunes gens dans les bibliothèques, mais il va sans dire que si les lieux ne sont pas modernisés et si les nouvelles technologies ne sont pas accessibles, ces efforts n’aboutiront pas ; de nombreux bibliothécaires ont en effet relevé que l’on amène les jeunes générations vers le livre par le biais des nouvelles technologies. Il faudra, bien sûr, établir des ponts avec l’Éducation nationale. Sans vouloir rouvrir la polémique relative aux rythmes scolaires, je rappelle que bien des activités périscolaires ont permis d’amener la bibliothèque à l’école ; le chemin inverse peut se faire également et de nombreuses villes ont déjà établi les ponts nécessaires.

Enfin, je pense comme vous, monsieur Ary Chalus, que nous devons renforcer le réseau des bibliothèques publiques dans les territoires d’outre-mer ; la densité du maillage actuel n’est pas satisfaisante.

M. le président Patrick Bloche. Madame la rapporteure pour avis, je vous remercie.

La commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2014 de la mission Médias, livre et industries culturelles.

La séance est levée à douze heures cinq.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 6 novembre 2013 à 9 heures 30

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, Mme Isabelle Attard, M. Luc Belot, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, M. Malek Boutih, M. Thierry Braillard, M. Xavier Breton, Mme Marie-George Buffet, M. Ary Chalus, Mme Dominique Chauvel, Mme Valérie Corre, M. Yves Daniel, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Dessus, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, M. William Dumas, Mme Françoise Dumas, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Vincent Feltesse, M. Hervé Féron, Mme Michèle Fournier-Armand, Mme Annie Genevard, M. Franck Gilard, Mme Claude Greff, M. Mathieu Hanotin, M. Michel Herbillon, M. Patrick Hetzel, M. Guénhaël Huet, M. Christian Kert, Mme Colette Langlade, M. Pierre Léautey, M. Dominique Le Mèner, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Lucette Lousteau, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, Mme Maud Olivier, Mme Barbara Pompili, M. Michel Pouzol, M. Frédéric Reiss, M. Franck Riester, M. Marcel Rogemont, M. Paul Salen, M. Rudy Salles, Mme Claudine Schmid, Mme Julie Sommaruga, M. Claude Sturni, Mme Sylvie Tolmont, M. Stéphane Travert, M. Jean Jacques Vlody

Excusés. – Mme Huguette Bello, M. Jean-Louis Borloo, M. Bernard Debré, M. Michel Françaix, M. Jean-Pierre Giran, Mme Sonia Lagarde, M. François de Mazières, Mme Michèle Tabarot

Assistaient également à la réunion. – M. Patrick Lebreton, M. François Vannson