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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 4 juillet 2012

Séance de 11 heures 30

Compte rendu n° 3

Présidence de M. Gilles Carrez, Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Pierre Moscovici, ministre de l'Économie et des finances et de M. Jérôme Cahuzac, ministre du Budget, sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2011 (n° 3), sur le rapport préalable au débat d’orientation des finances publiques et sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012

–  Présences en réunion

La Commission procède à l’audition de M. Pierre Moscovici, ministre de l'Économie et des finances et de M. Jérôme Cahuzac, ministre du Budget, sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2011 (n° 3), sur le rapport préalable au débat d’orientation des finances publiques et sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012.

M. le président Gilles Carrez. Nous accueillons maintenant, après le premier Président de la Cour des Comptes Didier Migaud, M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, et M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des finances, chargé du budget. L’ordre du jour est consistant puisqu’il comporte successivement le projet de loi de règlement, le rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l’État pour l’exercice 2011, le rapport préalable au débat d’orientation des finances publiques 2012 et le projet de loi de finances rectificative, second collectif budgétaire de 2012. Messieurs les ministres, nous sommes très heureux de vous accueillir.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie, des finances. Je suis très heureux et honoré d’être auditionné par votre commission. Je souhaiterais rendre hommage au député Olivier Ferrand qui aurait dû siéger dans vos rangs et qui aurait constitué un élément de talent au sein de la commission.

Nous posons, dès les premiers jours de cette nouvelle législature, les premiers jalons de la politique économique de « redressement dans la justice » voulue par le Président de la République. L’ordre du jour est effectivement chargé : le projet de loi de règlement présente un panorama détaillé – plutôt sombre d’ailleurs – de la situation financière du pays ; le débat d’orientation des finances publiques offre une perspective d’ensemble et permettra au Parlement d’apporter son soutien aux inflexions nécessaires pour redresser les comptes et l’économie du pays ; enfin, le projet de loi de finances rectificative constituera la première étape de notre plan d’ajustement des comptes publics et de justice fiscale.

Le Parlement sera pleinement associé à ce chantier crucial qui doit allier, dans la durée, crédibilité budgétaire et changement. Jérôme Cahuzac a brillamment assuré la présidence de votre commission dont j’étais un modeste membre sous la précédente législature. Il connaît et respecte donc la rigueur et la qualité de vos travaux. En tout état de cause, nous partageons la même volonté d’échange avec chacun de ses commissaires. Le Gouvernement se doit de cultiver le dialogue, l’écoute et la pédagogie à l’égard des députés afin qu’ils soient pleinement associés à la conduite du changement, dans un contexte économique très difficile.

La situation économique est marquée par une croissance atone, de 0,3 % en 2012, et un taux de chômage touchant 10 % de la population active, et plus particulièrement les jeunes et les seniors. Selon le diagnostic de la Commission européenne, de l’Inspection générale des finances et d’autres instances de contrôle, la France fait face à un triple déficit tandis que les tensions demeurent très vives dans la zone euro. Le premier déficit affecte la croissance et la compétitivité. Il trouve en partie sa source chez certains de nos partenaires européens, contraints de mener des politiques d’austérité en l’absence de solution d’ensemble à la crise des dettes souveraines. En outre, la consommation des ménages étant faible, elle ne joue plus suffisamment son rôle de moteur historique de la croissance. Ce déficit s’explique enfin par une perte de compétitivité sans précédent puisque nos parts de marché à l’exportation ont reculé de 20 % au cours des cinq dernières années.

Le deuxième déficit concerne la crédibilité de notre économie : nos comptes publics dérivent au point qu’une agence de notation nous a retiré notre « triple A ». La dette publique a augmenté de 800 milliards d’euros depuis 2002. En 2011, le déficit public demeure supérieur à 100 milliards d’euros, ainsi que l’a montré la Cour des Comptes. Or, la crise ne peut à elle seule tout expliquer. Ne confondons pas gestion et malchance : confrontée à la même crise et utilisant la même monnaie, l’Allemagne a su ramener son déficit public à un niveau proche de l’équilibre en 2011.

Enfin, il en découle un déficit de confiance en l’action publique, sapée par l’instabilité, les remises en question permanentes et la confusion dans les objectifs. Certaines décisions – que nous estimons injustes, car en faveur des plus privilégiés – ont aussi entamé notre cohésion sociale.

Lors de l’élection présidentielle de mai et des élections législatives de juin, les Français ont voté pour un changement de cap : une stratégie résolue en faveur de la croissance et de la solidarité, tant à l’échelon national qu’européen, et le redressement des comptes dans la justice.

Au niveau européen, des avancées majeures pour restaurer la croissance ont été enregistrées lors du sommet des 28 et 29 juin derniers : grâce, en particulier, aux efforts de la France et au message porté par le Président de la République, la croissance a été replacée au cœur de la construction européenne. Les chefs d’État et de Gouvernement ont adopté un plan ambitieux s’élevant à 1 % du produit intérieur brut – PIB –, c'est-à-dire 120 milliards d’euros, l’équivalent du budget communautaire, comprenant de nouvelles ressources et orientant vers la croissance l’ensemble des politiques européennes.

Ils ont également adopté des mesures de stabilité financière. Avant la fin de l’année, sera mise en place une supervision financière intégrée pour mieux contrôler le système financier et contenir l’impact des crises sur les finances publiques. Les banques en difficulté pourront être recapitalisées, en réponse notamment à la situation espagnole, sans que les prêts consentis par le Mécanisme européen de stabilité – MES – et le Fonds européen de stabilité financière – FESF – reçoivent le bénéfice de la séniorité. Des interventions sur les marchés obligataires primaire et secondaire seront possibles, la Banque centrale européenne intervenant alors comme opérateur pour le compte des fonds de secours mobilisés au profit d’États ayant déjà fait des efforts importants pour redresser leur déficit structurel.

Enfin, une feuille de route a été tracée en vue d’une intégration solidaire. Cela prouve que l’Union européenne n’est pas uniquement synonyme de restrictions budgétaires et que l’on peut obtenir des résultats au niveau européen lorsque l’on formule des propositions tout en étant respectueux de ses engagements.

Au niveau national, des mesures d’urgence ont déjà été adoptées en faveur de la justice, de l’emploi et du pouvoir d’achat et nous les assumons pleinement : le décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l’âge d’ouverture du droit à pension de vieillesse, dit décret sur les retraites, la hausse de l’allocation de rentrée scolaire, le coup de pouce au SMIC et la création de contrats aidés supplémentaires. Ces mesures nécessaires, tant sur le plan social que sur le plan économique, ont été entièrement financées par des hausses de recettes ou des économies supplémentaires.

Les textes budgétaires de cette session visent à préserver la croissance. Le projet de loi de finances rectificative traduira ainsi, dans notre fiscalité, la priorité que nous accordons à l’emploi et à l’investissement, par exemple celui des bénéfices plutôt que leur distribution. Le collectif prévoira la suppression de certains avantages consentis aux plus petites entreprises qui n’ont pas contribué à la baisse du chômage. Il s’agit de la première étape d’un mouvement qui se poursuivra. Ainsi, au second semestre 2012 et au premier semestre 2013, nous proposerons une série de réformes ambitieuses pour redresser l’économie en permettant aux entreprises d’investir et en mettant la finance davantage au service de l’économie réelle. Il s’agira notamment d’apporter un soutien aux petites et moyennes entreprises – PME –, aux très petites entreprises – TPE –, aux entreprises de taille intermédiaires – ETI – ; et à l’investissement grâce à une réforme de l’impôt sur les sociétés – IS – et du crédit d’impôt recherche – CIR –.

Plusieurs réformes du financement de l’économie seront conduites en parallèle, avec, pour principaux axes, la création d’une banque publique d’investissement, la réforme bancaire, la réforme de l’épargne réglementée et celle de la fiscalité de l’épargne.

La fiscalité, rendue plus lisible, plus juste et plus efficace, favorisera les investissements au détriment des entreprises qui délocalisent. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault l’a indiqué lors de sa déclaration de politique générale devant cette assemblée : être juste, c’est aussi reconnaître l’apport des créateurs, des innovateurs et des entrepreneurs. En d’autres termes, le volet compétitivité de ces réformes est essentiel. L’équité suppose également une maîtrise, voire une baisse de certains prix, notamment celui du logement, et un soutien affirmé à notre commerce extérieur.

Le soutien à l’activité ne doit pas contrecarrer le redressement de nos comptes publics – une nécessité absolue, tant pour respecter nos engagements européens que pour demeurer souverain vis-à-vis des marchés financiers, restaurer la confiance et, surtout, pour dégager des marges de manœuvre en faveur de la croissance. Le poids de la dette est désormais écrasant : l’État verse chaque année à ses créanciers plus de 50 milliards d’euros, ce qui fait désormais du service de la dette notre premier poste de dépense budgétaire. Une telle situation ne pouvant perdurer, il convient de réduire la part de la dette publique dans le PIB. Le constat de la Cour des Comptes est d’ailleurs particulièrement clair à cet égard. Si les déficits ont effectivement été réduits à 5,2 % en 2011, leur niveau spontané dérivait vers 5 % en 2012. Il fallait donc opérer dès cette année des choix structurels.

Nous avons choisi la sincérité, en commençant par bâtir notre stratégie budgétaire et fiscale sur des prévisions de croissance réalistes – 0,3 % en 2012, soit un taux très légèrement inférieur à la prévision de l’INSEE mais conforme au consensus établi par les économistes, et 1,2 % en 2013. Le retour de la croissance sera donc graduel. Le principe de sincérité suppose également que nous définissions de manière parfaitement claire nos objectifs et les moyens d’y parvenir. Nous visons à contenir le déficit budgétaire à 4,5 % en 2012, à le ramener à 3 % en 2013 grâce à un effort très important, puis à poursuivre ce redressement afin d’atteindre l’équilibre des comptes publics en 2017. Ce cadre apportera de la visibilité à tous les acteurs qui investissent, consomment et exportent. Nos engagements, rappelés à plusieurs reprises par le Gouvernement, y compris à nos partenaires européens, seront tenus tout en menant une politique de justice.

Le redressement économique implique des efforts significatifs que nous souhaitons répartir équitablement : entre recettes et dépenses, dans le temps, entre le secteur privé et le secteur public, au sein du secteur public, et entre ménages et entreprises. Les ménages les plus aisés et les grandes entreprises dont les taux d’imposition sont les plus faibles seront mis à contribution. L’efficacité économique doit rejoindre l’exigence politique et sociale.

Premier élément de cette politique de redressement, le projet de loi de finances rectificative – LFR – que Jérôme Cahuzac va vous présenter vise à sécuriser l’objectif de 4,5 % de déficit public à la fin de l’année sans briser une croissance vacillante. Il nous faut, pour ce faire, calculer au plus juste l’effort à fournir : il consiste en 7 milliards d’euros de recettes supplémentaires et en des économies de dépenses. En outre, nous souhaitons soutenir le pouvoir d’achat des Français. Enfin, la LFR replacera la justice sociale au cœur du système fiscal en revenant sur les mesures que nous considérons comme les plus injustes et, au demeurant, les plus inefficaces de la législature précédente : la TVA dite « sociale » ou anti-compétitivité...

Mme Valérie Pécresse. « Anti-délocalisation » !

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. ...qui n’a été ni sociale ni efficace. Quel que soit le nom donné à cette hausse de TVA, elle n’en aurait pas moins bridé la consommation des ménages les plus populaires et des couches moyennes, qui constitue le moteur de la consommation, déjà ralenti alors qu’il est au fondement de notre modèle productif, à la différence du modèle allemand. Au relèvement de la TVA, s’ajoutait l’allègement de l’impôt de solidarité sur la fortune et des droits de succession.

Redresser le pays, redresser l’Europe, redresser les comptes publics : voilà l’objectif que nous pouvons atteindre, au terme d’une course de fond.

Trois principes nous guideront : la sincérité, la concertation et le pragmatisme. La sincérité des comptes et des prévisions de croissance est la condition pour remettre en ordre nos finances publiques. Nous rompons avec la pratique des hypothèses exagérément optimistes. La concertation suppose l’association des partenaires sociaux et des collectivités territoriales à notre politique de redressement économique, sans stigmatiser les dépenses sociales. Elle se concrétisera lors de la grande conférence sociale des 9 et 10 juillet. Enfin, le pragmatisme implique de renoncer à l’ajustement mécanique du volume d’effectifs de la fonction publique, au fondement de la revue générale des politiques publiques – RGPP –, et de redéployer les moyens en fonction des besoins au sein de chaque ministère.

L’ancienne majorité nous reproche tantôt d’être trop laxistes, tantôt d’être trop austères. Or, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault met en œuvre une politique à la fois de redressement des comptes et de soutien de la croissance, tâche difficile et équation restée sans solution lors de la législature précédente. Nous avons pris la mesure du défi que nous souhaitons relever et notre démarche est à la fois cohérente, sérieuse et ambitieuse.

M. le président Gilles Carrez. Avant de céder la parole au ministre Jérôme Cahuzac, je salue en lui l’excellent président de la commission des finances qu’il a été ces deux dernières années.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Je constate avec amusement les glissements de certains membres de la commission, tels que votre président, M. Gilles Carrez, passé de ma droite à ma gauche, ou encore M. Charles de Courson, qui s’est rapproché de la présidence. J’exprime devant mes anciens collègues tout le plaisir que j’ai à les retrouver, et souhaite bonne chance à tous les nouveaux commissaires tout en affichant la certitude qu’ils accompliront un travail de qualité. J’ai une pensée émue pour Olivier Ferrand que je connaissais bien. Il manquera à la majorité et au Parlement dans son ensemble.

Le projet de loi de règlement prend acte de la diminution du déficit budgétaire de l’État en 2011, par rapport à 2010, ainsi que de celle du déficit public. Selon la Cour des comptes, qui nous sert en quelque sorte de juge de paix, le déficit budgétaire a diminué de 59 milliards d’euros entre 2010 et 2011, dont seulement 14 milliards de réduction structurelle. Compte tenu du remboursement à l’État des aides au secteur automobile, l’amélioration du déficit budgétaire n’est en fait que de 10 milliards d’euros, ce qui correspond au niveau de croissance spontanée des recettes.

Quant au déficit public, il a diminué d’1,9 % du PIB, mais la Cour n’évalue la diminution structurelle qu’à 0,8 point de PIB, correspondant exclusivement à des gains en recettes. Sur ces 1,9 %, 0,8 % correspond à des baisses exceptionnelles qui, par définition, ne se renouvelleront pas : 0,4 % au titre de l’extinction du plan de relance, 0,2 %, provenant de l’arrêt de l’équipement militaire, et 0,2 %, de la fin de réforme de la taxe professionnelle et à hauteur de 0,5 % de mesures strictement conjoncturelles. La Cour des comptes estime même qu’en dépenses, la politique conduite a abouti à une contribution négative, de – 0,2 %, à la maîtrise de la dépense.

Le projet de loi de finances rectificative s’inscrit donc dans un contexte économiquement tendu. Le texte n’est pas consécutif au rapport de la Cour des comptes qui partage néanmoins les diagnostics établis par les ministères de l’économie et des finances et du budget et, par conséquent, les mesures que nous soumettons au Parlement. Le Gouvernement a constaté pour 2012 des insuffisances de recettes que la Cour estime entre 6,5 et 10 milliards d’euros, et que le Gouvernement estime pour sa part à 7,1 milliards d’euros.

Tout d’abord, 3,4 milliards d’euros proviennent d’insuffisance de recettes au titre de l’impôt sur les sociétés. En effet, les recettes issues de cet impôt ont été surestimées dans la mesure où l’augmentation du bénéfice fiscal, évaluée à 5,4 %, n’aura finalement été que de 2 %, soit une erreur de plus du simple au double. La contribution exceptionnelle à l’impôt sur les sociétés, votée par la majorité précédente, rapportera 500 millions d’euros de moins que prévu. Ces éléments sont confirmés par la Cour des comptes. La deuxième insuffisance de recettes concerne la TVA, à hauteur d’1,4 milliard d’euros, dont 0,4 milliard de nature conjoncturelle, la croissance ayant été plus faible que ne l’espérait le précédent Gouvernement, et 1 milliard correspondant à une surestimation probablement délibérée puisqu’elle a été réalisée alors que tous les remboursements de TVA n’avaient pas encore été effectués. En outre, il manque 1 milliard de recettes au titre des droits de mutation à titre onéreux. Un tel écart est compréhensible tant cette recette est sensible à la conjoncture. Enfin, on constate une insuffisance de recettes d’1 milliard d’euros au titre des cotisations de sécurité sociale, également d’ordre conjoncturel. À cela s’ajoute l’effet masse des décisions relatives à la Grèce, à hauteur de 300 millions d’euros.

Entériner une telle insuffisance de recettes équivaudrait à accepter de ne pas tenir notre engagement de réduire notre déficit public à 4,5 % du PIB. Des mesures complémentaires sont donc nécessaires, d’autant plus qu’un contentieux, jusqu’alors ignoré des parlementaires, a été découvert. Il a débuté il y a plusieurs années, en 2007 au plus tard et probablement plus tôt encore. Tous les juristes et autres personnalités consultés par le Gouvernement précédent avaient prédit que ce contentieux serait perdu par la France. Cette année, il nous coûtera 1,5 milliard d’euros et 5 milliards d’ici à 2014, compte tenu des intérêts moratoires de près de 20 % que la France devra verser, précisément parce que ce contentieux fut ignoré. S’ajoute à cela – et la Cour des Comptes le confirme – un dérapage des dépenses d’1 à 2 milliards d’euros, phénomène assez peu surprenant car constaté d’année en année et justifiant l’existence d’une réserve de précaution de 5,4 milliards d’euros. Elle a été maintenue et complétée par le gel d’1,5 milliard de crédits supplémentaire.

La LFR propose donc des recettes complémentaires à hauteur de 7,2 milliards d’euros afin de compenser ce manque de recettes et de régler une partie du contentieux précité, dit contentieux « OPCVM ». Je me tiens à disposition des parlementaires souhaitant en savoir davantage sur la manière tout à fait confidentielle dont il a été traité, malheureusement sans succès, par le Gouvernement précédent, et sur la manière dont nous espérons, en gestion, pouvoir étaler ces 1 à 2 milliards d’euros de dérapage dans la dépense. Cette année, nous constatons comme au cours des précédentes, une sous-budgétisation des opérations militaires extérieures, des primes de Noël, du Plan sécheresse et du dixième mois de bourse étudiante, qui fut annoncé mais qui ne fut qu’à moitié financé et qui coûtera cette année 120 millions d’euros pris sur la réserve de précaution.

Si ce PLFR est adopté par le Parlement, non seulement l’objectif de 4,5 % sera respecté mais une partie du programme présenté aux électeurs lors de la campagne présidentielle puis législative sera mise en œuvre. En effet, afin de rétablir les finances publiques, nous sollicitons à part quasi-égale les ménages – pour 53 % – et les entreprises – pour 47 % –, jusqu’alors plutôt épargnés par les politiques économique et fiscale. S’agissant des ménages, nous proposons une taxe rétablissant le rendement de l’impôt de solidarité sur la fortune – ISF – que l’État aurait perçu si cet impôt n’avait pas été réformé l’année dernière. Concernant les entreprises, nous proposons de taxer à 3 % les dividendes, suivant la volonté du Président de la République de traiter de façon différenciée les entreprises qui investissent et celles qui distribuent des dividendes. D’autres mesures sont plus ponctuelles, qu’il s’agisse de la contribution exceptionnelle sur la valeur des stocks de produits pétroliers, de la contribution exceptionnelle sur les établissements de crédit, ou de la taxe sur les transactions financières, dont l’assiette et un taux avaient été votés sous la majorité précédente. Nous nous voyons contraints de doubler ce taux afin d’assurer le rendement attendu initialement. Quant à la contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés, créée par la majorité précédente, nous proposons d’en percevoir le produit de manière anticipée à la fin de cette année plutôt que l’année prochaine. Enfin, nous proposons de réviser les droits de succession. Lors du célèbre paquet fiscal de l’été 2007, la franchise avait été portée à 150 000 euros par enfant et par parent avec un délai de reprise de six ans, ensuite fixé à dix ans en loi de finances rectificative, à la fin de la précédente législature. Nous proposons de l’allonger de dix à quinze ans en abaissant le montant libre de droits à 100 000 euros par parent et par enfant. Ainsi, pour un couple ayant deux enfants, ce montant correspond, en une fois, à 400 000 euros, en deux fois, c’est-à-dire en trente ans, au double. Cela ne concerne donc pas le patrimoine des classes moyennes.

M. le président Gilles Carrez. Ma première question porte sur l’article 2 du PLFR, supprimant les allègements sociaux liés aux heures supplémentaires. Contrairement à certaines déclarations ambiguës, ces exonérations ne seront pas maintenues pour les salariés des entreprises de moins de vingt salariés, compte tenu du principe d’égalité devant l’impôt. Ainsi, l’ensemble des salariés effectuant des heures supplémentaires verront ces exonérations supprimées. Confirmez-vous les chiffres de 2,8 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales patronales et d’1,4 milliard d’euros au titre de l’exonération d’impôt sur le revenu – IR –, laquelle n’interviendra qu’en 2013, du fait du décalage d’un an du prélèvement de l’IR ? La suppression des exonérations, à hauteur de 4,2 milliards d’euros, touche un peu plus de 8 millions de salariés, diminuant donc leur pouvoir d’achat de 500 euros en année pleine. Classez-vous ces salariés parmi les catégories les plus aisées ? L’exposé des motifs précise que la suppression interviendra le 1er septembre 2012 pour les salariés du secteur privé mais au 1er janvier 2013 pour ceux du secteur public, notamment les enseignants qui effectuent beaucoup d’heures supplémentaires : pourquoi une telle différence de traitement ?

Ma seconde question porte sur l’augmentation de deux points du prélèvement sur les revenus du patrimoine, le taux ayant été porté, depuis le 1er juillet, de 13,5 à 15,5 %. Ce dispositif, qui rapporte 2,6 milliards d’euros, contribuait à la réduction du coût du travail dans les entreprises confrontées à un grave problème de compétitivité. Si le volet TVA est supprimé, en revanche, cette augmentation de 2 % ne l’est pas. Pourquoi ne pas avoir choisi d’affecter ces 2,6 milliards à l’indispensable baisse du coût du travail dans nos entreprises ?

Enfin, le contentieux relatif à la retenue à la source supportée par les organismes de placement collectif en valeurs mobilières – OPCVM – non-résidents a été correctement traitée : elle a fait l’objet, en comptabilité générale, d’une provision d’1,6 milliard d’euros, et de l’inscription, en 2012, de 900 millions en comptabilité budgétaire. Si l’on doit dépenser 1,5 milliard d’euros cette année, il manquera certes 600 millions d’euros. Cela étant, la question a été traitée dans mes rapports. On ne traite les contentieux en trésorerie, c’est-à-dire en décaissements, qu’une fois le jugement définitif. Dans le collectif budgétaire de juillet 2011, nous avons comptabilisé 500 millions de dépenses budgétaires liées à l’achèvement du contentieux relatif aux frégates de Taiwan. Ces contentieux étaient donc connus et ont été traités sur deux plans : en comptabilité générale et en comptabilité budgétaire.

M. Henri Emmanuelli. Nous n’avons jamais entendu parler de 5 milliards d’euros !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Notre président oublie qu’il existe deux contentieux distincts : le contentieux relatif au précompte mobilier et celui relatif aux OPCVM non-résidents, qui fut totalement absent de tous les documents budgétaires.

La loi de règlement retrace les effets de quatre mesures datant de 2007 : la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat qui a coûté 11,7 milliards d’euros de dépenses fiscales en 2011 ; la TVA à taux réduit dans le secteur de la restauration dont la facture a dépassé 3 milliards en 2011, ce qui correspond à huit ans d’application de la règle dite du « un sur deux ». Quant à la réforme de la taxe professionnelle, elle aura coûté environ 7 milliards d’euros en 2007. On dépasse ainsi les 20 milliards d’euros et l’on frôle les 25 milliards d’euros si l’on y ajoute la réforme de l’ISF dont l’impact est difficile à effectuer pour l’année 2011 puisque l’impôt a été remplacé par des recettes complémentaires dont les assiettes sont différentes. Quelques éléments exceptionnels ont permis au précédent Gouvernement d’améliorer la situation, notamment dans les comptes d’affectation spéciale, retraçant le contrôle de la circulation routière et la gestion des fréquences hertziennes.

Je félicite le ministre d’avoir retenu, dans le PLFR, comme prévision de croissance un taux rabaissé à 0,3 %, alors qu’au cours des derniers jours, un taux de 0,4 % était généralement évoqué. Voilà un signe de prudence et de transparence qui marque un changement. Quel sera le coût du bouclier fiscal en 2012, et son coût cumulé depuis sa création ? Le Gouvernement a-t-il réfléchi aux modalités permettant de mettre fin à cette dépense le plus tôt possible ?

Le Gouvernement a l’intention de reporter la réforme de l’impôt sur le revenu à la loi de finances initiale pour 2013. Cependant, puisque les exonérations de cotisations sociales sur les heures supplémentaires ont été supprimées, pourquoi ne pas être allé au bout de la démarche en remettant également en cause l’exonération fiscale liée au coût des heures supplémentaires ?

La TVA à taux réduit dans le secteur de la restauration coûte près de 3 milliards d’euros pour un bénéfice relativement faible. L’objectif du Gouvernement consistant à corriger les injustices les plus flagrantes, pourquoi ne pas revenir sur cette mesure dans ce collectif budgétaire ?

Enfin, en matière de dépenses, la RGPP se résumait à un coup de rabot uniforme aux effets désastreux en termes d’égalité territoriale. Je suggère, à l’instar de la Cour des Comptes, d’aborder le sujet de manière globale en réfléchissant, d’une part, aux missions relevant de la compétence de l’État ; d’autre part, à la manière de les exercer – soit directement ou en partenariat avec les collectivités, soit en les déléguant à ces mêmes collectivités ou à des opérateurs. Il importe de répartir les missions de service public entre les différents acteurs du pays puis d’en envisager le financement à l’aide d’impositions relevant de chaque niveau de compétence. Ce travail pourrait être engagé parallèlement à la réflexion relative à l’acte supplémentaire de décentralisation. Des économies seront alors possibles en supprimant les doublons qui subsistent.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. En effet, monsieur le rapporteur général, notre prévision de croissance est prudente ; elle est également réaliste. D’autres sont plus optimistes, mais nous avons préféré nous fonder sur le consensus des économistes afin d’être sûrs de tenir l’objectif d’un déficit public à 4,5 % du PIB, étape indispensable pour parvenir à l’équilibre en 2017. Nous nous efforcerons de procéder toujours ainsi.

Vous avez évoqué plusieurs réformes à venir. Le présent projet de loi de finances rectificative indique des orientations – l’efficacité économique, la justice sociale –, mais les réformes plus structurelles sont renvoyées au projet de loi de finances initiale.

Il est exact, monsieur le président, que la seule exonération maintenue pour les entreprises de moins de vingt salariés est patronale. Cela résulte d’une exigence constitutionnelle particulière qui interdit de faire varier l’exonération salariale en fonction de la taille de l’entreprise, au nom de l’égalité de traitement. En revanche, selon les chiffres dont je dispose, l’exonération salariale représente 2,8 milliards d’euros, ce qui, pour 9 millions de salariés, correspond plutôt en moyenne à 300 euros par an et par salarié.

M. le président Gilles Carrez. J’avais ajouté l’exonération fiscale.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. En outre, une majorité de salariés n’en bénéficiait pas, notamment les salariés à temps partiel, et cette exonération était proportionnelle au salaire, donc d’autant plus avantageuse que le revenu était élevé.

J’en viens enfin à votre suggestion relative aux missions de l’État, monsieur le rapporteur général. J’ai évoqué l’équilibre auquel nous souhaitons parvenir à différents niveaux, notamment entre les recettes et les dépenses. Entre les ménages et les entreprises, au demeurant, l’équilibre n’est pas loin d’être atteint par ce PLFR qui sollicite à 53 % les premiers et à 47 % les secondes. Pour l’année suivante, le séminaire gouvernemental a donné des indications sur la progression des dépenses – 0 % en valeur. C’est aussi une progression maîtrisée en volume – sans doute de 0,8 % – au cours des années à venir qui sera présentée dans le cadre du débat d’orientation budgétaire. En d’autres termes, la dépense doit être très sérieusement maîtrisée. Et cette maîtrise concerne tous les agents publics : l’État, les collectivités locales, les organismes de sécurité sociale et les différents opérateurs publics. Le changement de méthode est manifeste par rapport à une norme qui toisait chaque dépense et chaque ministère, à l’aveugle. En outre, il ne s’agit plus de supprimer les emplois publics mais d’en stabiliser les effectifs sur la durée de la législature, en ménageant des priorités que vous connaissez. Dans ce contexte, il est nécessaire de réexaminer, comme vous le proposez, les différentes compétences afin d’éviter les doublons et d’accroître l’efficacité de la dépense publique, c’est-à-dire d’engager une modernisation fine, concertée et intelligente. Il faudra articuler cette démarche à la réflexion annoncée hier par le Premier ministre en vue d’un nouvel acte de la décentralisation.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. En ce qui concerne les exonérations de cotisations sociales, la divergence de vues n’est pas neuve : depuis l’été 2007, l’opposition de l’époque n’a eu de cesse de convaincre l’ancienne majorité d’y renoncer. Aujourd’hui majoritaires, nous revenons sur cette mesure : je conçois que l’opposition désapprouve cette décision, mais non qu’elle s’en étonne.

Monsieur le rapporteur général, le bouclier fiscal va coûter 400 millions d’euros aux finances de l’État en 2012, auxquels il faut ajouter 350 millions au titre du rattrapage des années précédentes. Le coût est donc de 750 millions d’euros en 2012. Au total, le bouclier fiscal aura coûté 3,6 milliards sur la durée de la précédente législature.

Initialement, il était destiné à protéger les revenus du travail ; or l’on s’est aperçu que le bouclier fiscal ne protégeait que les revenus du patrimoine. Il s’agissait de convaincre les Français que leur contribution à la charge publique n’excéderait pas un euro gagné sur deux ; en réalité, sur le nombre extrêmement réduit de personnes concernées – un peu plus de 10 000 –, moins de 5 000 ont bénéficié de 90 à 95 % du coût du dispositif, de sorte que les Français n’étaient pas véritablement touchés par la mesure. Enfin, il fallait mettre un terme à ce que l’on appelait l’exode fiscal et convaincre ceux qui étaient partis de revenir. Ainsi, en juillet 2007, la ministre de l’économie et des finances donnait-elle fort obligeamment aux députés de l’opposition les horaires de l’Eurostar pour qu’ils puissent aller accueillir ces exilés de retour au bercail. Ce fut bien inutile : ils ne sont pas rentrés. En somme, on a dépensé 3,6 milliards d’euros sur cinq ans pour n’atteindre aucun des objectifs que l’on s’était assignés : c’est beaucoup ! Voilà sans doute pourquoi la majorité précédente, qui avait instauré le dispositif, a décidé d’y mettre fin, mais de manière un peu honteuse puisque malgré sa suppression, il faudra le payer pendant encore deux ans.

La contribution exceptionnelle sur la fortune, qui conserve l’assiette de l’ancien ISF et en modifie à peine le barème, nous permet de récupérer cette année une partie de ce que le bouclier fiscal aura coûté aux finances de l’État en 2012, à défaut de pouvoir recouvrer tout ce que nous estimons avoir été perdu en vain. Mais le non-plafonnement de cette taxe restitue quelque 400 millions d’euros, soit le coût du bouclier fiscal pour la seule année 2012.

Quant à la TVA sur la restauration et à la défiscalisation stricto sensu des heures supplémentaires, il a été décidé de renvoyer leur éventuel examen à la loi de finances initiale, qui réformera l’impôt sur le revenu. En effet, une réforme de l’impôt sur le revenu survenue en 2012 ne pouvant produire d’effets fiscaux avant 2013, il eût été inutile de la soumettre au Parlement en plein été. Le présent projet de loi de finances rectificative n’a donc qu’un but : procéder, après la correction démocratique que vient de connaître notre pays, à une correction budgétaire.

M. Hervé Mariton. Au nom du groupe de l’Union pour un mouvement populaire, je donne acte au Gouvernement d’un changement formel : la couleur rouge de la jaquette du document, et la novlangue puisque « augmentation d’impôts » se dit « première étape de la réforme fiscale dans la justice ». Les engagements du Président de la République sont numérotés, mais nous attendons avec intérêt la liste de ceux qui ne seront pas honorés. Ainsi le Premier ministre a-t-il évoqué hier l’« augmentation » du plafond du livret A, terme plus pudique que celui de « doublement » que les Français ont entendu il y a quelques semaines.

Quant au fond, messieurs les ministres, sur la TVA sociale, vous présentez une contre-réforme. C’était, il est vrai, prévisible, comme l’a dit M. Cahuzac. Mais M. Moscovici a souligné à juste titre le déficit de compétitivité de notre pays et l’urgente nécessité d’y remédier. Or la TVA sociale était une mesure intelligente et nouvelle permettant justement d’améliorer la compétitivité. Vous allez donc continuer de dépenser beaucoup d’argent, notamment pour financer une ribambelle d’agences destinées à promouvoir nos entreprises et notre industrie à l’étranger, au lieu de reconduire des mesures structurelles adaptées à votre objectif ! En outre, en instaurant la TVA sociale, on avait créé un compte de concours financiers qui sécurisait les circuits de financement de la protection sociale. Si l’on peut comprendre le choix idéologique qui vous conduit à abroger la TVA sociale, comment accepter que vous supprimiez aussi ce dispositif sans rien proposer en échange ?

Deuxièmement, le président l’a dit, la suppression de l’exonération de la part salariale représente une perte de pouvoir d’achat de 2,8 milliards d’euros pour certains de nos concitoyens qui n’appartiennent manifestement pas aux catégories les plus favorisées. Une dose supplémentaire d’1,5 milliard d’euros est à prévoir dans le budget pour 2013, ce qui représente au total 4,3 milliards de pouvoir d’achat en moins ! Voilà une information parfaitement claire qui ressort du projet de loi de finances rectificative. Comment de telles mesures pourraient-elles contribuer à la relance de la consommation dont vous parlez tant ?

Enfin, votre fascination pour l’impôt produit ici les effets désastreux que l’on pouvait redouter. Après avoir entendu tout à l’heure les représentants de la Cour des comptes, nous disposons maintenant de vos chiffres. Le projet de loi de finances rectificative représente 7,2 milliards d’euros de charges supplémentaires pour 90 millions non d’économies, mais de redéploiements sous forme de crédits supplémentaires destinés à l’éducation. Pour le cas où nos concitoyens n’auraient pas une idée claire de nos positions respectives : lorsqu’il s’agit de redresser les finances publiques, nous sommes plutôt favorables aux économies sur les dépenses quand vous privilégiez les impôts. On peut d’ailleurs en débattre, sans pratiquer le « tout ou rien ». Mais ici, c’est tout ou rien : 7 milliards d’euros d’augmentation de charges, pour 90 millions de réaffectation de dépenses ! La répartition de ces 90 millions n’est pas dénuée d’intérêt. Un tiers concerne par exemple la défense, dont le budget représente, rappelons-le, 10 % des autorisations d’engagement ; en d’autres termes, pour s’en tenir à ce modeste exemple, la défense paie trois fois sa part. Pourquoi le Gouvernement s’éloigne-t-il à ce point des préconisations de la Cour des comptes quant à l’équilibre entre recettes nouvelles et économies ?

Quelques questions pour finir. Nombre de dépenses annoncées par le Gouvernement ne figurent pas dans le projet de loi de finances rectificative car elles relèvent du volet social. Le Gouvernement s’engage-t-il à présenter un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative ? Dans le cas contraire, pourquoi ? Car il serait bien dommage de ne pas le faire.

J’ai cru par ailleurs comprendre, messieurs les ministres, que l’alourdissement de l’ISF avait fait tiquer le Conseil d’État, qui craint une mesure inconstitutionnelle car confiscatoire. Par quel raisonnement juridique le Gouvernement en justifie-t-il la constitutionnalité ?

Parmi les recettes de poche et les travers traditionnels des présentations du budget, convenez que les 800 millions d’euros que vous récupérez au titre du versement anticipé de l’impôt sur les sociétés ne sont qu’une facilité de trésorerie pour 2012, et ne doivent rien à la vertu.

J’aimerais en dernier lieu que l’on m’éclaire sur un point que je n’ai pas bien compris dans le discours que le Premier ministre a prononcé hier. Y a-t-il un seul mot de différence entre le traité sur la stabilité, la coopération et la gouvernance dont vous allez soumettre la ratification à l’autorisation du Parlement et celui qui a été signé par le précédent gouvernement ?

M. Pierre-Alain Muet. Je m’exprimerai au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen. Vous l’avez rappelé, monsieur le ministre des finances, le déficit de nos finances publiques atteint 5,2 % en 2011, contre 1 % en Allemagne. Pourquoi cet écart alors que les deux pays étaient en déficit excessif en 2005 ? L’audition des représentants de la Cour des comptes l’a montré : l’Allemagne a réduit son déficit avant la crise, avant l’été 2008, alors que la France l’a laissé dériver. Il en est résulté cinq années de déficit structurel compris entre 3,3 % et près de 5 %, ce qui ne s’était jamais vu – je rappelle que le déficit structurel correspond au déficit que nous aurions connu sans la crise.

Par le présent PLFR, le Gouvernement dessine la voie étroite qui permet de réduire les déficits tout en soutenant la croissance et l’emploi. Vous corrigez ainsi de 7,2 milliards d’euros la dérive de l’année 2012, messieurs les ministres, par des mesures qui soutiennent la croissance et l’emploi tout en supprimant des dispositifs injustes et inefficaces comme les niches fiscales. Ces mesures représentent 13 milliards d’euros de réduction des déficits en année pleine, ce qui constitue la première étape d’une politique de redressement dans la justice.

Vous supprimez des niches fiscales et sociales qui ont pour effet de miter nos impôts et de les rendre profondément injustes.

Vous supprimez un dispositif qui nuit lourdement à la croissance : la TVA « sociale » ou « anti-délocalisation » – peu importe le nom dont on l’affuble –, dont nous avons longuement débattu ici même et qui consistait pour l’essentiel, comme vous l’avez dit, à saupoudrer des recettes sur un secteur non concurrentiel puisque 8 milliards d’euros allaient aux services, contre 3,3 milliards seulement à l’industrie. En outre, l’effet de la mesure est profondément dépressif. Je ne connais pas l’évaluation qu’en livre aujourd’hui Bercy, mais j’ai souvenir, dans la longue histoire de la TVA sociale, d’un ministre des finances qui expliquait en 2004 devant la commission des finances du Sénat, dont le président était un passionné de ce dispositif, qu’un point de TVA représentait selon ses services 0,9 % de croissance en moins et que l’allègement de cotisations correspondant n’aboutissait qu’à 0,4 % de croissance en plus, si bien qu’un point de TVA équivalait à un demi-point de croissance en moins. Ce ministre s’appelait Nicolas Sarkozy. Je ne sais si d’autres évaluations ont été réalisées depuis ; mais à l’heure où notre croissance est limitée par l’augmentation insuffisante du revenu, la suppression de la TVA sociale – neutre du point de vue budgétaire, voire susceptible de rapporter un peu d’argent – est bienvenue car elle permet de la stimuler.

Vous supprimez également cette arme de destruction massive de l’emploi qu’est la subvention des heures supplémentaires. Comment a-t-on pu appliquer des années durant, alors que le chômage augmentait, une mesure qui aurait pu avoir un sens au temps du plein-emploi, dans les années cinquante, mais qui est totalement absurde dans le contexte actuel ? Comme l’expliquent fort bien les instituts de conjoncture, en période de chômage, elle n’a d’autre effet que de substitution : ce que l’on croit gagner sur le pouvoir d’achat de ceux qui occupent un emploi, on le perd sur le pouvoir d’achat de ceux qui n’en ont plus. En annulant ce dispositif, non seulement vous recouvrez des recettes, mais vous mettez fin à une mesure qui revenait à supprimer quelque 90 000 emplois selon les évaluations d’instituts privés.

Le projet de loi de finances rectificative taxe la rente en instaurant une contribution sur les produits pétroliers, en augmentant la taxe bancaire de risque systémique et en revenant sur la réforme des droits de succession contenue dans la loi TEPA – autant de mesures destinées à orienter l’épargne vers l’investissement. Et la contribution de 3 % sur les dividendes distribués favorise l’investissement, comme l’a dit M. Cahuzac.

Jointes aux mesures de revenu que sont la hausse du SMIC et celle de l’allocation de rentrée scolaire, ces dispositions constituent les premiers éléments d’une politique économique qui tend à réduire le déficit, à réorienter notre pays vers la croissance et l’emploi et à rétablir la confiance. De même que celle-ci constitue, comme l’a dit M. le ministre des finances, un facteur essentiel de croissance, de même une politique de justice sociale est une source majeure d’efficacité économique. Voilà qui résume bien ce projet de loi de finances rectificative.

M. Charles de Courson. Au nom de l’Union des démocrates et indépendants, je félicite nos jeunes ministres d’avoir retenu des hypothèses de croissance aussi réalistes – 0,3 % pour 2012, 1,2 % pour 2013. En revanche, l’objectif de 2 % en 2014, 2015 et 2016 me paraît imprudent car trop incertain. Je vous félicite également, messieurs les ministres, d’avoir repris les thèses du précédent gouvernement, en projetant de stabiliser en valeur, comme lui, les dépenses de l’État hors dette ainsi que les concours de l’État aux collectivités locales, et en prévoyant comme lui d’étendre à tous les opérateurs publics les règles que s’impose l’État. Comme lui encore, vous comptez maîtriser la dépense sociale, en fixant l’ONDAM à 2,7 % – un niveau déjà difficile à tenir.

Quelques points appellent toutefois la critique. D’abord, la stabilité des effectifs dans la fonction publique d’État. Vous ne pouvez mener une telle politique de gestion du personnel. Il faut donc revenir à la baisse raisonnable des effectifs que nous avions entreprise, de quelque 30 000 postes par an. En effet, comment expliquerez-vous aux fonctionnaires qu’il y a deux fonctions publiques, l’une dite prioritaire – l’éducation, la police et la gendarmerie, la justice – qui gagne 11 000 emplois par an, l’autre où vous reconduisez la politique de vos prédécesseurs ? Car pour maintenir les effectifs globaux, il faudra supprimer 13 000 postes par an dans ces secteurs non prioritaires : 7 500 le seront dans celui de la défense aux termes de la loi de programmation que nous avons votée ; restent 6 500 emplois, soit exactement un emploi sur deux, dans les autres ministères.

Ensuite, on constate page 2 du rapport sur le projet de loi de finances rectificative que vous respectez les engagements de la France pour 2012-2013 par un seul moyen ou presque : la hausse des prélèvements obligatoires. Ces derniers augmentent en effet de 1,1 point de PIB en 2012 et de 1,2 point en 2013, ce qui représente une hausse de la pression fiscale de 46 milliards d’euros en deux ans, le tout pour passer de 5,2 % de déficit public à 4,5 % puis à 3 %. En d’autres termes, pour réduire les déficits publics de 2,2 points, vous augmentez les prélèvements obligatoires de 2,3 points. C’est beaucoup trop et vous allez vous « crasher » !

Il est un point essentiel que vous n’avez pas évoqué : les mesures favorables à la compétitivité des entreprises. Sans elles, nous ne pourrons redresser notre pays. Or la plupart de vos propositions ne tendent qu’à aggraver la situation.

J’en viens à quatre des mesures que vous proposez. Vous parlez de prudence, de justice et d’équité. Mais en matière d’heures supplémentaires, vous êtes parfaitement injustes. La défiscalisation des heures supplémentaires rapportait 4,9 milliards d’euros à 8 millions de salariés, c’est-à-dire 600 euros en moyenne par an, soit quelque 50 euros par mois. Vous allez donc faire chuter le pouvoir d’achat d’au moins 25 à 30 % des salariés, et des plus modestes. C’est une politique profondément antisociale.

Mme Sandrine Mazetier. Ce n’est pas vrai !

M. Charles de Courson. C’est mécanique.

S’agissant de l’ISF, le texte que vous nous proposez est anticonstitutionnel puisque vous ne plafonnez pas l’ensemble formé par l’IR, l’ISF, la CGS et la CRDS. C’est une erreur élémentaire : dès lors qu’il existe un ISF, il faut introduire un plafonnement, même si l’on peut débattre de son niveau. Sur cette disposition, nous saisirons le Conseil constitutionnel qui l’annulera. Pourquoi avez-vous renoncé au plafonnement que vous aviez annoncé ? Et pourquoi ajouter une tranche rétroactive pour les patrimoines de 0,8 à 1,3 million d’euros, qui n’étaient pas imposés ?

Vous supprimez la TVA sociale, alors même que la Cour des comptes préconise une hausse modérée de la TVA et de la CSG. Ce faisant, vous privez les entreprises d’un avantage de compétitivité de 11 milliards d’euros, sans aucune contrepartie. Pourquoi ne pas avoir maintenu le mécanisme prévu pour les PME, au moins pour celles de moins de vingt salariés, comme vous l’aviez annoncé ? Il n’y a là rien d’anticonstitutionnel : nous avons souvent adopté des mesures favorables aux PME, sans contrevenir au droit communautaire.

Enfin, si l’on peut discuter du taux du forfait social, le porter brutalement de 8 à 20 % est tout à fait excessif.

Mme Eva Sas. Le groupe écologiste est satisfait de voir mises en œuvre sans délai trois mesures qu’il appelait de ses vœux : la suppression des exonérations de charges sur les heures supplémentaires ; la remise en cause de la réforme de l’ISF ; enfin, la hausse de l’impôt sur la succession, dont les différentes réformes avaient abouti à ce qu’un euro hérité soit taxé 2,5 fois moins qu’un euro issu du travail. Nous nous réjouissons également que la lutte contre l’évasion fiscale commence, notamment grâce aux mesures sur les transferts de bénéfices vers les paradis fiscaux.

En revanche, nous sommes surpris que le collectif ne remette pas plus profondément en cause les dépenses fiscales, lesquelles doivent être évaluées à l’aune de leur effet social mais aussi de la transition écologique et énergétique voulue par la majorité. Nous souhaitons donc que, pour réaliser les économies qu’il recherche, le Gouvernement revienne sur plusieurs niches fiscales, dont l’exonération de taxe sur le kérosène utilisé pour les vols intérieurs, qui représente un manque à gagner de 1,3 milliard d’euros pour l’État, le taux réduit de TVA sur les engrais ou encore les exonérations dont bénéficient les transports routiers. Monsieur le ministre des finances, comptez-vous réexaminer toutes les dépenses budgétaires et fiscales du point de vue de leur effet environnemental et social, afin que l’objectif de redressement des comptes publics rejoigne l’ambition de préparer notre pays aux défis environnementaux de demain ?

M. Nicolas Sansu. Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la situation inquiétante que vous nous présentez, également exposée ce matin par la Cour des comptes, résulte d’un manque de recettes dont faisait déjà état il y a deux ans le rapport de Gilles Carrez. Si les prélèvements avaient conservé leur niveau de 2000, montrait-il alors, le budget aurait été excédentaire en 2006 et 2007 et serait resté par la suite en deçà du seuil fatidique de 3 % du PIB. Pour M. de Courson, les prélèvements obligatoires vont trop augmenter. Mais de quels prélèvements obligatoires parle-t-on ? Aujourd’hui, il s’agit de transférer une part des revenus du capital vers les revenus du travail au titre du partage de la valeur ajoutée. On sait en effet qu’en vingt-cinq ans la part des revenus du travail a perdu 10 % de PIB face aux revenus du capital : 200 milliards sont ainsi passés du travail et de la formation au seul capital. C’est un cancer financier qui ronge notre économie. Tout est là, y compris la compétitivité : nos entreprises seront bien plus compétitives si nous développons l’innovation, la formation et les services publics ainsi que la capacité de consommation de nos concitoyens.

Cette modification de la répartition des revenus entre capital et travail qui s’amorce sera toutefois très délicate dans le cadre européen dans lequel vous vous inscrivez, monsieur le ministre des finances. Car le mécanisme européen de stabilité que vous appelez de vos vœux entraînera selon nous une contraction budgétaire qui risque de faire baisser les dépenses publiques. On nous objectera le « volet croissance », mais il ne représente que 60 milliards d’euros nouveaux puisque 60 milliards étaient déjà prévus : il ne fera pas la maille. Il y a donc un décalage entre votre volonté affichée et cette contrainte budgétaire.

On constate également un hiatus entre le PLFR et le document d’orientation des finances publiques. Le premier est globalement satisfaisant puisque l’architecture fiscale qui en résulte intègre davantage les revenus du capital et ceux des plus aisés, grâce à des mesures justes que nous saluons. En revanche, le second document nous inquiète car il annonce des diminutions de dépenses qui pourraient contrecarrer ces premiers efforts.

Qu’adviendra-t-il du point d’indice de la fonction publique ? Son gel, que maintient le présent PLFR, sera-t-il reconduit dans les budgets suivants ? Qu’en sera-t-il des collectivités locales, c’est-à-dire du service public et de l’investissement public locaux ? Le sort auquel elles sont promises est en totale contradiction avec ce que les élus locaux de gauche annonçaient et attendaient. Enfin, si nous saluons les premiers pas du Gouvernement en la matière, nous aimerions connaître son plan de lutte contre l’évasion fiscale, qui représente 30 à 50 milliards d’euros, ce qui suffirait à résoudre le problème du déficit budgétaire.

Avec ce PLFR, messieurs les ministres, vous faites un petit pas à gauche ; il faut maintenant opérer un virage complet !

Mme Annick Girardin. Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste salue à son tour la prudence des prévisions de croissance du Gouvernement, ainsi que sa volonté de répartir avec justice et équité, conformément aux engagements du Président de la République, l’effort général indispensable au retour à l’équilibre en 2017.

Le débat sur le maintien des exonérations de charges sociales dans les TPE est très suivi outre-mer, où ces entreprises constituent l’essentiel du tissu économique et où l’emploi est en grande partie saisonnier. Nous serons donc particulièrement vigilants sur ce point.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Je remercie M. Mariton de ses félicitations et je lui confirme que les engagements du Président de la République seront tenus. Ainsi, en ce qui concerne le doublement du plafond du livret A, qui n’est pas remis en cause, j’ai confié à M. Pierre Duquesne une mission destinée à faire le point sur les besoins d’épargne afin de relever le plafond au rythme des besoins.

Sur la TVA sociale, comme du reste sur les heures supplémentaires, je rejoins Pierre-Alain Muet : un profond désaccord nous oppose quant aux effets de la mesure sur la justice sociale, sur le pouvoir d’achat et la consommation. Pierre-Alain Muet en a cité un illustre critique, Nicolas Sarkozy ; je songeais pour ma part à Alain Madelin, que l’on ne peut soupçonner d’être un farouche partisan du virage à gauche.

En ce qui concerne le PLFR et l’équilibre entre les recettes et les dépenses, j’ai trouvé vos remarques assez osées, monsieur Mariton. Rappelons que ce PLFR n’aurait pas été nécessaire si nous n’avions pas constaté que l’évolution spontanée allait aboutir à un déficit de 5 % en 2012 : nous nous en serions volontiers passés.

M. Hervé Mariton. Cela ne dispense pas de faire des économies !

Mme Valérie Pécresse. Que faites-vous pour réduire les dépenses ?

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Nous avons procédé ainsi que le préconise la Cour des comptes, en dégageant des recettes pour compenser les moindres rentrées – 7,2 milliards d’euros –, et en prenant des mesures de précaution pour combler les impasses budgétaires. Vous le savez, c’est tout ce que nous pouvions faire à ce moment de l’année puisque c’est en loi de finances initiale que l’on procède aux économies sur les dépenses. Notre objectif est l’équilibre entre recettes et dépenses d’ici à la fin de la législature, grâce à un effort à court terme plutôt centré sur les recettes, complété à long terme par des économies sur les dépenses. Comme le montre le document qui vous a été transmis, la part de la dépense publique dans le PIB, qui a fortement augmenté pour atteindre 56 % en 2011, diminuera au cours des années à venir ; nous nous y engageons ici. Cette rectification sera maîtrisée, progressive, mais effective. Je ne vous laisserai pas prétendre que nous serions partisans du tout fiscalité ou de je ne sais quel matraquage : notre approche équilibrée réussira là où vous avez échoué en réduisant la part de la dépense publique dans le PIB.

En ce qui concerne l’Europe – je réponds également à M. Sansu –, le Président de la République a souhaité une réorientation de la construction européenne. Tel était le sens qu’il donnait au terme de renégociation. Un volet supplémentaire attestant de cette réorientation devrait être soumis au Parlement. Le « paquet croissance », tout d’abord, représente 120 milliards d’euros, soit 1 % du PIB de l’Union ou l’équivalent d’un an de son budget. S’y ajoutent les mesures de stabilité financière, laquelle constitue en réalité le principal facteur de croissance. Depuis mon entrée en fonction, j’ai constaté aux États-Unis, au G20, à l’Eurogroupe que tous – Américains, Chinois… – sont inquiets de la situation de l’euro. La levée de ces incertitudes est un important facteur structurel de croissance ; j’espère que nous sommes tous d’accord sur ce point. Les mécanismes qui y concourent sont pertinents. Ratifié par le Parlement allemand, le MES va pouvoir entrer en vigueur d’ici à une dizaine de jours, après signature et passage devant la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Il permettra de recapitaliser les banques dès lors que la supervision bancaire aura progressé, ce qui suppose d’importants travaux de l’Eurogroupe ; d’appliquer le plan d’aide à l’Espagne sans la séniorité des prêts qui suscitait la défiance des marchés lorsque ce plan a été décidé ; enfin, avec le concours de la Banque centrale européenne, d’intervenir sur les marchés obligataires pour desserrer l’étau qui pèse sur l’Italie.

Ce qui sera soumis au Parlement le moment venu, comme l’a dit le Président de la République à l’issue du Conseil européen de Bruxelles, est donc un paquet : au traité budgétaire s’y ajoutent toutes les mesures décidées au Conseil européen qui marquent une réorientation – et une amélioration.

Si je vous comprends bien, monsieur de Courson, la stabilisation des effectifs de la fonction publique est insuffisante. On retrouve les reproches contradictoires que j’évoquais précédemment : pour les uns, nous serions trop féroces ; pour d’autres, nous ne frapperions pas assez fort. Il y a en effet un changement, que nous assumons : nous mettons fin à la suppression d’effectifs, parce que nous sommes attachés au service public et aux serviteurs du public. Toutefois, nous avons des priorités, qui nous paraissent correspondre aux besoins de la société française. Dans nos territoires, il y a eu beaucoup trop de suppressions d’emplois dans l’éducation nationale qui est une cause prioritaire, comme la sécurité, la justice et Pôle emploi qui, pour que les demandeurs d’emploi soient efficacement traités, doit être renforcé. Cette politique ne revient pas à créer deux fonctions publiques ni ne nous dispense de l’obligation de modernisation que j’ai évoquée. Sérieuse, cohérente et volontaire, elle sera comprise et approuvée.

Monsieur Sansu, s’il suffisait de lutter contre l’évasion fiscale pour résoudre le problème du déficit, d’autres l’auraient sans doute fait ! Mais il est exact que nous devons progresser dans cette voie. Cela relève toutefois du projet de loi de finances pour 2013.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Je tiens tout d’abord à vous remercier, monsieur Pierre-Alain Muet, pour les propos que vous avez tenus sur le projet de loi de finances rectificatif et auxquels j’adhère complètement.

Monsieur Hervé Mariton, peut-être est-ce la marque de chaque majorité que de trouver une expression adaptée pour qualifier les hausses d’impôts. Mais je remarque que dans le dernier tiers de la mandature précédente, la vôtre a refusé de voir dans la diminution de la dépense fiscale l’équivalent d’une hausse d’impôts. En cela il y a une différence entre Pierre Moscovici et moi-même et les trois parlementaires que sont devenus les anciens ministres : nous assumons parfaitement ce que nous disons et nous agissons sans nous cacher derrière notre petit doigt.

Vous évoquez au demeurant la fascination que l’impôt exercerait sur nous. Cela mérite que nous regardions de plus près ce qui s’est fait au cours de ces trois dernières années. D’une part, entre 2010 et 2011, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 1,4 point de PIB, soit 30 milliards d’euros. Or je ne me souviens pas que vous ayez refusé de voter de telles augmentations. D’autre part, entre 2011 et 2012, les prélèvements obligatoires augmenteront de 1,1 point de PIB, qui n’est pas uniquement constitué des 7 milliards d’euros que nous vous proposons puisqu’il recouvre aussi les 15 milliards que vous avez précédemment votés. Bref, depuis 2010, la majorité précédente, à laquelle vous appartenez, a voté sans protester 30 milliards d’euros d’impôts supplémentaires entre 2010 et 2011, et 15 milliards d’impôts supplémentaires entre 2011 et 2012, ce qui représente tout de même une augmentation de 45 milliards !

Ainsi, parce que nous proposons une augmentation de 7 milliards d’euros, nous serions « fascinés » par l’impôt, tandis que vous, qui en auriez voté 45 milliards, vous seriez fascinés par « les économies dans la dépense » ! Permettez-moi de ne pas partager votre point de vue.

On pourrait imaginer dégager, à partir du mois de juillet, 4, 5, 6 ou 7 milliards d’euros en économisant sur la dépense. Mais lorsqu’on ne le décide pas en début d’année, ce n’est pas possible, en raison de la rigidité de cette dernière. C’est tellement vrai que la réserve de précaution – entre 5 et 7 millions d’euros ces dernières années – à laquelle il est souvent fait référence – n’a pas permis d’annulation de crédits en 2010, et n’a permis qu’une économie dans la dépense de 200 millions d’euros en 2011.

Mme Valérie Pécresse. Non, de 2 milliards !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Les documents budgétaires seront là pour rafraîchir la mémoire à celles et ceux qui pourraient en manquer ! Et je mets au défi quiconque de contester ce chiffre. Mais évidemment, il ne faut pas confondre l’annulation de crédits avec la réaffectation de crédits à partir de la réserve de précaution. À ma connaissance, on ne fait pas des économies en déplaçant des sommes d’une ligne de crédits à une autre. On fait des économies en annulant des crédits, et en 2011, ces annulations ont été de 200 millions d’euros.

D’une certaine manière, M. Charles de Courson vous a répondu en déclarant que nous faisions la même chose que vous. Vous nous reprochez de ne pas faire d’économies ? Eh bien, nous faisons comme vous. D’autres, qui espéraient une petite différence, pourraient nous le reprocher. Mais il est difficile de nous reprocher tout et le contraire de tout. Voilà pourquoi je me suis permis de vous répondre un peu longuement en la matière.

Monsieur de Courson, il n’y a pas d’alourdissement de l’ISF, mais création d’une taxe exceptionnelle, qui n’existait pas avant et qui n’existera plus après. Précisément parce que c’est une taxe exceptionnelle, la question de son plafonnement ne se pose pas. Je ne crois donc pas, monsieur de Courson, que cette taxe risque d’être déclarée inconstitutionnelle. C’est en tout cas les assurances qui nous ont été données par les instances que le Gouvernement consulte avant de proposer des projets de loi au Parlement.

M. Hervé Mariton. Ce n’est pas sûr !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Bien sûr, en matière juridique, les choses ne sont jamais certaines. Mais c’est le rôle du Gouvernement que de s’entourer des avis les plus éclairants en la matière et nous estimons que nous pouvons vous proposer cet article sans craindre qu’il soit censuré par le Conseil Constitutionnel.

Vous avez ensuite développé, monsieur Mariton, ce que vous estimez constituer une « perte de pouvoir d’achat ». Je comprends très bien que vous accordiez toute votre attention au pouvoir d’achat des Français. Reste que vous ne vous en êtes pas inquiété cette année, quand vous avez voté le gel de l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu : 1,7 milliard d’euros ou l’augmentation de la CSG pour les salariés – 600 millions d’euros –. Je ne vous ai pas non plus entendu vous plaindre quand vous avez augmenté la taxation sur les mutuelles de 2 milliards d’euros ou quand vous avez voté la franchise médicale pour 1 milliard d’euros, en début de mandature. Enfin, à l’occasion de la réforme de l’ISF, c’est vous-même qui avez fait passer de 50 euros à 150 euros l’avantage familial pour enfant pour les foyers éligibles à l’ISF. Cela prouve que de temps en temps, notamment quand il s’agit de l’ISF, vous ne regardez pas à la dépense !

Monsieur Charles de Courson, j’ai entendu vos remarques sur l’ISF et sur le forfait social. S’agissant de l’ISF, on ne peut pas parler de tranche rétroactive, puisqu’il s’agit d’une taxe exceptionnelle. S’agissant du forfait social, vous estimez excessif de le faire passer de 8 % à 20 %. Vous aviez pourtant approuvé la proposition de la Cour des Comptes de le porter à 19 %. Entre 19 % et 20 %, il n’y a que l’épaisseur du trait !

Madame Eva Sas, je vous remercie de votre intervention tout en vous précisant que la taxation spécifique sur le kérosène relève de la convention de Chicago, qui a valeur de traité. Les traités étant une norme juridique supérieure à la loi, il ne nous est pas possible de revenir dessus, tant que cette convention est en vigueur.

Madame Annick Girardin, merci également. Je tiens à vous indiquer que l’avantage dit « patronal » d’1,50 euro par heure travaillée est maintenu. Cela concerne, me semble-t-il, les PME de votre circonscription.

Monsieur Sansu, vous êtes intervenu sur le point d’indice de la fonction publique. Sachez qu’on ne peut en décider qu’à l’occasion de la loi de finances initiale, et pas à l’occasion de cette loi de finances rectificative, dont le but est de permettre à la France de tenir son objectif de 4,5 % de déficit public. Sans recettes supplémentaires, nous n’y parviendrions pas. En effet, lorsqu’il s’est agi de définir la trajectoire des finances publiques de notre pays pour 2012, les équipes précédentes ont surévalué les recettes à venir.

M. François Baroin. Monsieur le ministre, nous avons suffisamment d’estime les uns pour les autres et nous avons assumé suffisamment de responsabilités les uns et les autres, pour considérer que nos prédécesseurs ne sont pas des incapables et nos successeurs des imposteurs. Mais puisqu’il faut choisir un juge de paix, nous nous référerons au rapport de la Cour des Comptes, que le Gouvernement a lui-même commandé. Je tiens à en souligner quelques points, dans la mesure où ce n’est pas aujourd’hui une commission tout à fait comme les autres, puisque l’opinion publique est prise à témoin et que la presse y assiste.

Concernant le respect des objectifs budgétaires, je cite le rapport : « l’année 2011 s’est caractérisée par le respect des objectifs budgétaires prévus ». Il faut donc prendre acte du fait que nous avons tenu la distance.

Quant à la prévision de croissance pour cette année, la Cour a reconnu que les informations disponibles « en avril, lorsque le programme de stabilité a été déposé, ne conduisaient pas à remettre en cause l’hypothèse d’une croissance de 0,7 % en 2012. Celle-ci était notamment cohérente avec la prévision de croissance au premier semestre 2012, que l’INSEE avait présentée dans sa note de conjoncture. ». Il est important de rappeler que le correctif proposé par le ministre de l’économie sur la prévision de croissance est adapté à l’évolution et au contexte européen beaucoup plus incertain encore aujourd’hui, du fait de la dégradation en Espagne et en Italie.

Vous avez évoqué le contentieux des OPCVM et vous nous avez reproché d’avoir caché certaines choses. Je rappelle qu’à l’époque où, comme ministre du budget, je portais la réforme fiscale et qu’avec vous-même, comme président de cette commission, nous y passions des jours et des nuits, nous avons fait voter des dispositions destinées à régler l’affaire des frégates de Taïwan. On n’en a pas parlé. Après tout, il s’agissait d’une charge que l’État devait assumer, et nous l’avons assumée. Vous déclarez que « c’est tout de même cette grosse affaire qui remet en cause et le principe de la réserve de précaution et la problématique de la sincérité du budget ». Je vous renvoie donc à la page 14 de la synthèse du rapport de la Cour des comptes qui précise que « ces contentieux étaient connus. Une provision avait été passée dans la comptabilité générale de l’État à hauteur de 6,3 milliards ».

Je tenais à apporter ces précisions pour qu’on n’en parle plus et pour qu’on ne remette pas en cause pas la qualité, l’objectivité et la sincérité de nos débats. Ensuite, politiquement, vous faites des choix. Nous les contestons. Notamment, nous ne croyons pas à la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires.

Je reviendrai enfin sur la réforme de l’ISF. Je savoure avec malice le fait que le Gouvernement précédent a supprimé le bouclier fiscal et que le gouvernement actuel nous annonce qu’il envisage de le restaurer en rétablissant le « plafonnement Rocard ». Mais cela concerne la loi de finances 2013.

M. Marc Goua. Messieurs les ministres, votre présentation de cette loi de finances rectificative, qui favorise à la fois le redressement des finances publiques et plus de justice, est pour moi un motif de satisfaction.

Je rappellerai d’abord à M. de Courson qu’il a une mémoire sélective : le candidat Sarkozy avait prévu de réduire les dotations des collectivités d’1,2 milliard d’euros en 2013. Or ce montant est maintenu.

Ensuite, n’est-on pas en train d’exonérer de la taxe sur les stocks pétroliers la grande distribution, qui représente un pourcentage important de la vente de pétrole et d’énergie ?

Enfin, je suis sûr que cette proposition ne pourra que recueillir l’unanimité : à l’instar des ministres qui ont montré l’exemple en acceptant de réduire leurs indemnités, les députés pourraient faire également un effort, dans une période si difficile pour nos concitoyens.

Mme Valérie Pécresse. M. Moscovici a mis en cause, de manière assez inélégante, mon action en matière de réduction des déficits. Mais sait-il de combien de milliards nous avons réduit le déficit entre 2010 et 2011 ? Connaît-il une année, depuis 1945, où la réduction du déficit a été plus importante ? Peut-il dire, pour éclairer la représentation nationale, quel sera en 2012 l’impact des plans de réduction des déficits Fillon votés en 2011 ? Il me semble que dans son discours, il l’a minoré.

M. Baroin a très bien parlé, pour sa part, du contentieux OPCVM et a réfuté la thèse selon laquelle nous aurions caché l’existence de cette « ardoise » à la représentation nationale. D’une part, la représentation nationale en avait discuté. D’autre part, nous avions provisionné le montant que François Baroin et la Cour des comptes ont relevé.

J’aimerais maintenant connaître le coût total des mesures annoncées par M. François Hollande depuis son élection à la présidence de la République, sur l’année 2012 et sur le quinquennat. Voilà en effet un moment que nous nous interrogeons à ce propos, le président de la commission des finances et moi-même. Je ne trouve nulle part trace de nouvelles dépenses budgétées dans ce projet de loi de finances rectificative. Pourtant, il y en aura, et elles devront être compensées et financées.

Je souhaiterais également savoir quelles mesures vous présenterez en projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Enfin, la Cour des comptes nous a mis en garde ce matin contre des décisions du Gouvernement qui, selon elle, nuiraient à la compétitivité de l’économie française. À quelles mesures faisait-elle référence ? Que lui répondez-vous ?

M. Pascal Cherki. Merci, messieurs les ministres, pour la clarté et la précision de votre présentation.

Monsieur Moscovici, vous avez eu raison de rappeler que la dette publique avait crû de près de 800 milliards d’euros depuis 2002. On pourrait ajouter à cela le recul phénoménal du commerce extérieur, puisque nous sommes passés d’un excédent de 3,5 milliards d’euros en 2002, à un déficit de 70 milliards en 2012. De ce point de vue, la précédente décennie est marquée par la décadence des finances et du commerce extérieur de la France ! Et il nous faudra bien poursuivre le bilan de la précédente majorité.

Mais la question n’est pas là. Vous avez affirmé, reprenant en cela un engagement que nous avons porté ensemble dans la campagne présidentielle, que nous souhaitions nous inscrire dans une trajectoire de réduction des finances publiques. Seulement, notre vision de l’économie ne se limite pas aux questions des finances publiques. Nous ne pouvons pas laisser de côté les questions du chômage, du pouvoir d’achat et les conditions de vie de nos concitoyens, ni faire l’impasse sur la croissance, qui passe principalement par l’affectation de recettes nouvelles. Est-il donc envisageable, quoi qu’il se passe, et quelles que soient les prévisions de croissance, de maintenir l’engagement de ne pas dépasser un déficit de 3 % et de revenir à l’équilibre en 2017 ?

Il faut que nous ayons une discussion sérieuse sur ces sujets. Si, comme certains économistes l’annoncent, la Chine ou les États-Unis entrent dans une période de contraction de leur activité, ne risquons-nous pas de basculer, à terme, vers l’austérité, et donc d’amplifier une récession que nous ne souhaitons pas voir venir ?

M. Laurent Wauquiez. Selon le rapport, l’objectif de la loi de finances rectificative est d’épargner les classes moyennes. Nous en doutons.

Premièrement, vous estimez que votre mesure sur les successions, qui consiste à abaisser le plafond à 100 000 euros, est de celles qui portent sur les personnes « très aisées ». Ce sont donc des personnes très aisées, celles qui transmettent un bien de 100 000 euros, qui correspond à peine à un tout petit pavillon ou à un minuscule appartement ?

Deuxièmement, vous proposez de faire plus que doubler le forfait social qui pèse sur les entreprises participant aux dispositifs d’épargne salariale, chère à notre groupe. Or ces dispositifs assurent un complément de revenus très conséquent à de nombreux salariés en France – jusqu’à 1 000 ou 1 500 euros de revenus supplémentaires par an. Avez-vous évalué l’impact d’une telle mesure ?

Troisièmement, pendant toute la campagne, vous avez inlassablement répété, comme l’a fait M. Hollande, par exemple sur France Inter, que la mesure sur les heures supplémentaires porterait, en tout cas concernant les entreprises de moins de vingt salariés, uniquement sur les avantages octroyés aux entreprises. Or, comme l’a dit Gilles Carrez et comme cela ressort de votre tableau, sur 1 milliard d’euros attendus de cette mesure, 900 millions d’euros viendront des ménages. C’est un reniement total par rapport à ce que vous aviez annoncé. Vous écrivez vous-même noir sur blanc, dans le projet de loi de finances rectificative, qu’une telle disposition concernera principalement les classes moyennes et les familles modestes.

Enfin, l’ensemble de la mesure TVA « anti-délocalisation » comprenait trois volets : la TVA, la baisse des charges et l’augmentation de la CSG. Vous ne revenez que sur les deux premiers. Mais, dès lors que vous avez décidé d’épargner les classes moyennes et les familles modestes, pourquoi maintenir la hausse de la CSG sur les produits du capital des familles modestes ? Je pense aux revenus immobiliers et aux revenus de l’assurance-vie, qui est l’épargne populaire par excellence.

On voit très bien, à travers ces quatre mesures, que, contrairement à ce que vous prétendez, l’essentiel de vos ajustements concernant les ménages pèse sur les familles modestes et les classes moyennes.

M. Christian Estrosi. Messieurs les ministres, monsieur le rapporteur, vous avez indiqué ce matin que la question qui se posait était l’écart existant entre la France et l’Allemagne. Nous avons atteint cette année notre objectif de réduction des déficits, mais cela ne vous satisfait pas et vous comparez la France à l’Allemagne sur la même période.

Vous ne vous demandez pas pourquoi l’Allemagne fait mieux que nous aujourd’hui. Quand elle met en place la TVA « anti-délocalisation », vous souhaitez la supprimer en France.

Depuis quelques jours, la nouvelle Clio 4 est à l’honneur. Si cette voiture est produite aujourd’hui à Flins, et non pas à Bursa comme le souhaitait M. Carlos Ghosn, c’est parce que nous avons exigé que, pour le marché et le marché européen, elle soit produite dans une usine française par des ouvriers français. Pourtant Renault s’en plaint, car elle dit qu’une Clio 4 produite en France coûte 1 200 euros de plus qu’une Clio produite en Turquie.

Ainsi, au moment où nous mettons en place une TVA anti-délocalisation permettant de rendre les produits d’importation moins compétitifs, et que nous baissons les charges qui pèsent sur les entreprises pour améliorer la compétitivité de la production française, vous revenez en arrière, rendant les produits d’importation plus compétitifs et les productions françaises moins compétitives. Je voudrais savoir pourquoi.

Vous nous expliquez par ailleurs que vous voulez soutenir le pouvoir d’achat. Mais quel est le lien logique entre l’augmentation du pouvoir d’achat et l’augmentation des droits de succession ou la suppression de l’exonération sur les heures supplémentaires ? Vous souhaitez redonner du pouvoir d’achat aux Français, mais vous supprimez ce qui avait permis d’y parvenir.

J’approuve malgré tout certaines de vos mesures, notamment celle qui concerne la taxation des compagnies pétrolières. Pour autant, je n’accepte pas que cette taxe permette de régler la facture des dépenses ubuesques que vous prévoyez et entraîne, en outre, l’augmentation du prix de l’essence. L’augmentation de la taxe sur les compagnies pétrolières doit servir à faire baisser le prix de l’essence, ce qui favoriserait le pouvoir d’achat.

Votre stratégie est dangereuse. Vous révisez toutes les prévisions du programme de M. Hollande en 2012 et 2013. Ainsi, les dettes publiques passeront en 2013 de 88,6 % à 90,6 % du PIB. En revanche, vous ne révisez pas vos promesses de dépenses. Il y aura plus de dépenses, moins de recettes. La différence ne sera compensée que par des hausses d’impôts, qui pèseront pour beaucoup sur les plus modestes.

Vous écrivez dans votre rapport : « au sein des ménages, ce sont les ménages dont les patrimoines et les revenus sont les plus élevés qui sont, pour l’essentiel, mis à contribution, puisqu’ils supportent à 73 % les prélèvements supplémentaires à la charge des ménages. » Cela signifie très clairement que les foyers les plus modestes, pour 27 % d’entre eux, perdront du pouvoir d’achat en contribuant à ces hausses d’impôts.

C’est une certitude : vous allez étouffer l’économie et nous amener tout droit dans le mur ! Pourquoi ne pas faire d’économies sur les dépenses ?

M. Éric Woerth. Monsieur Moscovici, vous dites que vous mettez en place une politique de redressement des finances publiques. Non : vous ne faites que poursuivre une telle politique, même si vos objectifs et votre méthode diffèrent de ceux de l’ancienne majorité.

De la même manière, vous allez poursuivre la révision générale des politiques publiques. Mais vous allez réduire la fonction publique de façon drastique dans un certain nombre de secteurs, alors que nous avions décidé de le faire plus modérement sur l’ensemble de la fonction publique. Jusqu’à présent, cela se passait tout à fait correctement. À l’avenir, cela risque d’être très difficile pour le service public, sans permettre pour autant de stabiliser la masse salariale. En effet, pour y parvenir, il faudrait que vous bloquiez l’évolution des carrières, ce qui me semble être un peu compliqué. Je précise que nous avons lancé depuis bien longtemps le débat sur le point d’indice. Nous avons d’ailleurs tranché, considérant que la rémunération des fonctionnaires ne reposait pas uniquement sur le point d’indice, mais sur d’autres éléments. Cela dit, je m’en tiendrai là.

Ce PLFR est très idéologique et très antisarkozyste, ce qui se comprend puisque vous venez d’arriver aux affaires. Vous détricotez les mesures que vous avez combattues, sans les remplacer par d’autres mesures dont les objectifs seraient comparables. C’est vrai s’agissant de la compétitivité, qui doit être au cœur des enjeux de l’évolution de notre pays dans les années qui viennent. Vous considérez qu’il faut maintenant baisser la TVA, alors qu’il faudrait plutôt l’augmenter, comme nous le dit la Cour des comptes. Vous faites le contraire.

En augmentant le forfait social sur l’intéressement et la participation, vous envoyez un drôle de message aux salariés et aux entreprises ! De la même façon, en revenant sur la défiscalisation des heures supplémentaires, vous envoyez un message assez curieux à des millions de salariés ; je pense notamment aux millions de fonctionnaires qui en ont bénéficié, tout particulièrement à ceux de l’éducation nationale.

Vous jetez un voile pudique sur les augmentations de dépenses figurant dans ce PLFR. Vous parlez assez peu des recrutements, du coût du SMIC, de la suppression, un peu étonnante, du forfait de l’aide médicale d’État, etc.

Les classes moyennes seront évidemment les premières visées. Je rejoins sur ce point Laurent Wauquiez.

Quelle a été la « recette » de l’Allemagne ? Cette dernière a augmenté la TVA, que vous allez plutôt baisser. Elle a limité et gelé totalement la progression des dépenses. Vous n’allez probablement pas le faire, dans la mesure où vous ne dites pas comment, ni où. Elle a désindexé les pensions de retraite. Or je ne vous vois pas mener ce type de politique. Vous êtes plutôt partis pour faire le contraire.

Enfin, les avancées obtenues au sommet européen sont comme le pâté d’alouette : 99 % de rigueur et 1 % de croissance.

M. Olivier Carré. Je souhaiterais revenir sur la taxation sur la valeur des stocks de produits pétroliers, évoquée tout à l’heure par Christian Estrosi. J’ai entendu que cela pourrait avoir un impact sur le prix à la pompe. Pourriez-vous nous confirmer qu’il y en aura un ? De combien sera-t-il ?

Pourriez-vous également nous dire quel sera l’impact, sur la masse salariale, du « coup de pouce » donné au SMIC ? Apparaît-il dans ce PLFR ?

Ensuite, vous avez évoqué un certain nombre de déconvenues, s’agissant de l’exécution du budget. Pour ma part, je retiendrai un résultat, à savoir le niveau des taux d’emprunt. Mais celui-ci ne pourrait-il pas constituer une marge de manœuvre supplémentaire ?

Autre déconvenue : l’annulation de 4 milliards d’euros du compte d’affectation spéciale « participations financières de l’État ». Qu’est-ce qui était attendu ? Quelle en est la raison ?

M. Yves Censi. Au travers de deux petits exemples, je voudrais mettre l’accent sur l’énorme différence qu’il y a entre les exposés des motifs et la réalité des décisions que vous proposez.

En premier lieu, M. Moscovici, évoquant la question des heures supplémentaires, a dit qu’un complément de revenus de 300 euros par an correspondait déjà à des salaires nettement supérieurs à l’origine. C’est méconnaître totalement la situation réelle d’un certain nombre de travailleurs.

Prenez l’exemple d’un chauffeur routier, auquel les heures supplémentaires peuvent apporter un complément de revenus supérieur à 3 000 euros par an. On ne peut pas dire qu’il bénéficie d’un haut niveau de revenus, mais il travaille beaucoup, et tout travail mérite salaire. Les heures supplémentaires constituent pour lui une bouffée d’oxygène absolument indispensable.

En second lieu, on a abordé la question de l’impact de la TVA anti-délocalisation sous l’angle des mathématiques et des statistiques, en l’évaluant à 1,6 point, auquel il convient d’enlever la diminution des charges pour les entreprises. Tout le monde s’est accordé à dire que cela correspondrait à une augmentation des prix, pour des productions nationales, de 0,35 % : 35 centimes pour un vélo de 100 euros – on ne trouve plus un seul vélo fabriqué en France sur le territoire national – ou l’équivalent d’un paquet de cigarettes pour un produit à 2 000 euros. Vous dites que vous voulez sauver le pouvoir d’achat, mais vous êtes très loin du compte et des réalités ! D’ailleurs, votre lapsus de tout à l’heure, lorsque vous avez appelé la TVA anti-délocalisation « TVA anti-compétitivité » est révélateur d’un certain malaise.

En troisième lieu, vous avez dit que vous vouliez stabiliser le nombre de fonctionnaires. Nous l’avions baissé sous la précédente législature, ce qui nous avait permis de redistribuer à peu près 800 millions d’euros par an sur des mesures catégorielles et des mesures salariales au profit des agents de l’État. En procédant ainsi, vous allez réussir ce tour de force non seulement d’augmenter la masse salariale de l’État, mais de devoir geler des salaires, ce qui entraînera une paupérisation chez les fonctionnaires. J’aimerais savoir si vous êtes d’accord avec cette analyse. Si vous ne l’êtes pas, comment arrivez-vous à joindre les deux bouts ?

M. Jean-Pierre Gorges. Je voudrais revenir sur un point particulier, qui me tient à cœur : l’exonération des cotisations sociales sur les heures supplémentaires et leur défiscalisation, sur lesquelles j’ai travaillé six mois, lors de la dernière mandature, avec mon collègue Jean Mallot. Je conseille d’ailleurs aux ministres et au rapporteur général de lire notre rapport, car leurs interventions m’amènent à penser qu’ils ne l’ont pas fait.

Selon ce rapport, 9 400 000 personnes, touchant en moyenne 450 euros par an, seraient concernées par la suppression de cette exonération et de cette défiscalisation.

Ces 9 400 000 personnes sont les « victimes » des 35 heures. Quand on est passé aux 35 heures, elles ont continué à travailler 39 heures. Elles n’ont pas bénéficié des 35 heures payées 39 – qui se traduisent, tous les ans, par une facture de 12 milliards d’euros. Par un effet d’aubaine, ces 4 heures supplémentaires ont fait l’objet d’une bonification immédiate. Supprimer cette bonification constituerait une faute sociale énorme.

Mais il ne nous semblait pas normal, à Jean Mallot et à moi-même, que l’article 1 de la loi TEPA institue une bonification pour l’entreprise. En effet, pour celle-ci, une heure supplémentaire représente un bonus, alors que pour un employé, c’est une incitation. Or vous allez aujourd’hui à l’encontre des recommandations de M. Mallot en maintenant la mesure d’exonération au niveau de l’entreprise, tout en la supprimant au niveau des salariés. Vous commettez ainsi une « double » faute sociale !

Sur un tel sujet, qui concerne 9 400 000 personnes, notre intérêt politique serait de vous laisser faire. Pendant la campagne, j’ai regretté que le Président de la République n’ait pas été suffisamment agressif à ce propos. Mais je vous préviens que si vous touchez à cette défiscalisation, cela vous coûtera très cher. Pour certaines familles, ce serait l’horreur !

Vous avez encore le temps de corriger le tir. La partie « entreprises » représente 1,3 milliard d’euros. Le Gouvernement avait déjà décidé, à la suite de notre rapport, d’en enlever « l’avantage Fillon », qui coûtait 600 millions d’euros et ne se justifiait pas. Je pense qu’il aurait dû aller plus loin et décider de tout supprimer. Mais de grâce, ne touchez pas aux avantages accordés aux employés. Sachez en tout cas que je me battrai pour l’éviter !

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Monsieur Baroin, une colère un peu surjouée n’est jamais bonne conseillère et je vais m’efforcer de retrouver l’attitude qui sied à ma fonction. Mais si j’ai réagi de manière sans doute excessive, c’est parce que certains anciens ministres ont cru devoir pilonner avec allégresse ce que nous nous apprêtons à faire. J’ai lu en effet que ce que nous faisons est d’une brutalité inouïe, que nous allons être la risée de toute l’Europe, que la rigueur de gauche est hypocrite ou que nous allons proposer une vraie saignée…

M. Hervé Mariton. C’est un peu ça !

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. La retenue dont vous faites preuve, monsieur Baroin, est sans doute de meilleur aloi. Mais je ne veux pas m’immiscer dans les affaires d’une autre formation politique…

Je considère que le rapport de la Cour des comptes – que j’ai en haute estime, même si je n’ai pas eu l’occasion de m’y rendre depuis quelque temps – ne constitue ni un satisfecit, ni un réquisitoire. N’en tirons pas non plus, ni les uns ni les autres, des choses qui n’y sont pas. Le fait est que tous ceux qui sont ici connaissent la situation des finances publiques. Et je me garderais, si j’avais été au gouvernement pendant cinq ans, de dire qu’elle est fameuse : nous sommes face à des impasses.

En 2012, je regrette de le dire, peu d’actions ont été enclenchées pour tenter de réduire les déficits. Elles furent en tout cas insuffisantes, ce qui justifie le collectif d’aujourd’hui.

Nous aurons l’occasion de reparler de la croissance avec Pascal Cherki. Mais je veux l’inviter d’ores et déjà à l’optimisme et à la confiance. Nous travaillons sur les cinq prochaines années. Nous pouvons espérer que les hypothèses que nous présentons sont solides et que le chemin de réduction des déficits, qui est en effet incontournable, sera respecté. Je me garderai d’évoquer les autres scénarios, plus pessimistes : ce ne sont ni ceux que je souhaite, ni ceux sur lesquels nous travaillons.

Monsieur Christian Estrosi, nous pourrions avoir un long débat sur la France et l’Allemagne. Mais je ne crois pas que le modèle allemand ait été fondé exclusivement, et même principalement, sur la TVA ; il conviendrait d’ailleurs d’examiner les dégâts qu’il a pu entraîner au niveau social.

Nous cherchons, pour notre part, à doper la compétitivité à la française, ce qui passera par une politique industrielle, sur laquelle nous aurons à débattre. Vous avez évoqué le secteur automobile. La commune de Sochaux faisant partie de ma circonscription, je vois bien ce qui se passe chez PSA. Mais un plan automobile sera mis en place. De la même façon, plusieurs réformes relatives au financement de l’économie – dont la création de la Banque publique d’investissement – sont prévues.

L’observation d’Éric Woerth sur les « 99 % d’austérité et 1 % de croissance » de l’Europe n’a aucun sens. Il est exact que, il y a seulement quelques mois, on ne parlait pas de croissance en Europe. Pour autant, on ne saurait parler de « 99 % d’austérité » quand on injecte dans la croissance européenne 120 milliards d’euros, soit 1 % du PIB de l’Union.

Vous devriez convenir, vous qui êtes plus libéraux que moi, qu’une meilleure stabilité financière assure aux entreprises – auxquelles nous sommes tous attachés – un meilleur climat pour investir et pour embaucher. Pour ma part, j’irai plus loin : je pense que la stabilité financière, telle qu’elle peut découler du Conseil européen, constitue sans doute le principal facteur qui permettra, dans les années qui viennent, d’améliorer la croissance structurelle de l’économie européenne et de mener à bien la résorption des déficits. L’une et l’autre font masse et cette présentation caricaturale ne sert pas à grand-chose.

Telles sont les remarques que je voulais faire.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. J’ai quelques compléments à apporter.

Monsieur le président, nous ne vous avons pas répondu sur l’éventuelle différence de traitement entre les salariés du privé et ceux du public, s’agissant de la date d’entrée en vigueur de la suppression des exonérations liées aux heures supplémentaires. Une telle mesure s’appliquera à tous le 1er septembre. Si la rédaction du texte vous a semblé ambiguë, je vous présente mes excuses.

Par ailleurs, le contentieux portant sur les 900 millions d’euros auxquels vous faisiez référence était relatif au précompte mobilier, et non pas au contentieux OPCVM. Je maintiens que ce dernier n’a été évoqué à aucun moment, ni en loi de finances initiale, ni dans le programme de stabilité. En revanche il fut provisionné dans la comptabilité générale, sans la moindre indication.

Monsieur Baroin, je prends acte de la réduction du déficit de 1,9 point opérée en 2011. Mais convenez que sur ce 1,9 point, il n’y en a que 0,8 de structurel : le reste est exceptionnel ou conjoncturel. Pour l’essentiel, l’effort reste à faire.

Mme Nathalie Pécresse est revenue sur la loi de règlement pour parler elle aussi des déficits. Je lui indiquerai, ainsi qu’à M. Yves Censi, que si la réduction du déficit opérée en 2011 a pu être qualifiée d’historique, le déficit ne l’était pas moins.

Mme Pécresse s’est également interrogée sur l’impact des mesures Fillon en 2012. Je le lui avais déjà indiqué, mais je le lui confirme : 15 milliards d’euros d’impôts nouveaux ! Les prélèvements obligatoires ont augmenté en 2012 de 1,1 point, qui se ventile ainsi : les 15 milliards « Fillon », et il y a les 7 milliards que nous vous proposons. Les deux tiers de cette augmentation sont donc imputables au gouvernement précédent, et un tiers à l’actuel. Cela me ramène aux remarques que je faisais sur notre prétendue fascination pour la dépense ou pour l’impôt.

M. Wauquiez a évoqué la disposition relative aux successions. Je précise que le dispositif existe depuis six ou sept ans et qu’il ne s’applique pas « pour solde de tout compte », mais par enfant et par parent. Aujourd’hui, nous proposons de baisser le seuil d’exonération à 100 000 euros. Mais un enfant possédant a priori deux parents, le seuil d’exonération s’établit à 200 000 euros. Par ailleurs, il se trouve que le patrimoine médian est de 113 000 ou 120 000 euros. Voilà pourquoi je conteste l’affirmation selon laquelle cette disposition frapperait prioritairement les classes moyennes.

Je remarque enfin qu’avant cette réforme, 5 % des successions étaient imposées. Désormais, 12 % le seront. Cela signifie que 88 % des successions ne le seront pas. Les 12 % qui restent imposées concerneront donc les ménages les plus aisés. Libre à vous d’estimer que dans les 88 %, il n’y a que des classes moyennes. Mais je ne crois pas que vous ayez raison.

Sur 24 millions de salariés, 5 millions seulement sont concernés par l’épargne salariale. Je conçois que l’augmentation du forfait social représente un effort. Mais en proposant cette augmentation, nous ne faisons que nous conformer aux recommandations de la Cour des comptes.

Enfin, monsieur Wauquiez, le gouvernement auquel vous apparteniez n’a pas augmenté la CSG sur le patrimoine : il a augmenté de 2 points le prélèvement social sur les revenus du patrimoine. C’est la même assiette que la CSG, mais ce n’est pas de la CSG. Le rapporteur général de l’époque fut d’ailleurs à l’origine d’un amendement dont l’objet était d’éviter de probables et délicats problèmes de déductibilité. Nous ne touchons pas à cette augmentation. Libre à vous de le contester.

Je ferai ensuite remarquer que l’Allemagne n’a consacré à la baisse des charges qu’un point, et non pas les trois points – comme cela a été avancé abusivement – de l’augmentation de la TVA à laquelle elle a procédé.

Et puisque vous êtes sensibles au sort des classes moyennes, vous ne pourrez qu’approuver la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire qui concerne 5 millions d’enfants et 3 millions de familles, et n’est pas imposable.

M. Hervé Mariton. Comment est-elle financée ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. En partie par le forfait social. L’année prochaine, elle sera financée conformément aux préconisations énoncées dans le programme de François Hollande.

Monsieur Mariton, l’allocation de rentrée scolaire est donc financée à part et ne s’impute pas sur les 7 milliards de recettes nouvelles. Il en est de même des départs à la retraite anticipée pour les carrières longues.

Madame Pécresse, l’augmentation du SMIC coûtera en 2012 à l’État 100 millions d’euros, du fait de l’augmentation de la masse salariale, et à la protection sociale 200 millions d’euros, du fait de la compensation – 100 millions d’euros pour les collectivités territoriales et autant pour la collectivité hospitalière. Nous estimons que de telles sommes seront facilement couvertes, notamment par des annulations de crédit.

Au total, monsieur le président, le coût consolidé de cette augmentation du SMIC sur les cinq années de la mandature ne sera pas de 5 milliards d’euros comme cela a été imprudemment avancé, mais d’1,2 milliard d’euros. Et je vous donne rendez-vous, documents à l’appui, à l’occasion de l’examen de la loi de finances initiale, ou à l’occasion de l’examen de la loi de finances rectificative.

Monsieur Woerth, la masse salariale a évolué en moyenne de 0,6 % sous la précédente mandature. Nous essaierons de faire moins.

Selon vous, monsieur Carré, la baisse de la charge de la dette nous donnerait une marge de manœuvre. Certes, celle-ci diminue effectivement – de 600 millions selon la Cour des comptes, ou de 700 millions selon le ministère de l’économie et des finances. Mais cela ne constitue pas pour autant une marge de manœuvre, en raison de la volatilité des taux d’intérêt.

Par ailleurs, le compte d’affectation spéciale auquel vous faisiez allusion n’est pas supprimé. Simplement, il n’est pas abondé.

Enfin, monsieur Gorges, nous ne sommes pas d’accord. C’est la majorité à laquelle vous apparteniez qui a étendu les 35 heures aux entreprises de moins de 20 salariés. De ce fait, elles se trouvent affectées par ce dispositif.

Je vous remercie.

L’audition prend fin à quatorze heures vingt-cinq.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 4 juillet 2012 à 12 h 15

Présents. - M. Éric Alauzet, M. Dominique Baert, M. François Baroin, Mme Karine Berger, M. Xavier Bertrand, M. Étienne Blanc, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Gaby Charroux, M. Jérôme Chartier, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Dassault, Mme Carole Delga, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, M. Christian Estrosi, M. Alain Fauré, M. Olivier Faure, Mme Annick Girardin, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, Mme Arlette Grosskost, M. Régis Juanico, M. Jean-François Lamour, M. Jean Launay, M. Dominique Lefebvre, M. Marc Le Fur, M. Patrick Lemasle, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, Mme Sandrine Mazetier, M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, M. Michel Pajon, Mme Valérie Pecresse, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Monique Rabin, M. Thierry Robert, M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Pascal Terrasse, M. Thomas Thévenoud, M. Philippe Vigier, M. Laurent Wauquiez, M. Éric Woerth

Assistaient également à la réunion. - M. Gérard Bapt, M. Christophe Castaner, M. Alain Chrétien, M. Guillaume Larrivé, Mme Marion Maréchal-Le Pen, M. Michel Piron

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