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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 19 février 2014

Séance de 11 heures 45

Compte rendu n° 63

Présidence de M. Gilles Carrez,
Président

–  Audition, ouverte à la presse, de M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des finances, chargé du Budget, sur les premiers résultats de la procédure de mise en conformité spontanée et l’actualité du contrôle fiscal

–  Présences en réunion

La Commission entend, en audition ouverte à la presse, M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du Budget, sur les premiers résultats de la procédure de mise en conformité spontanée et l’actualité du contrôle fiscal.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des finances, chargé du Budget. Les résultats de la procédure de mise en conformité des contribuables détenant des avoirs non déclarés à l’étranger ne peuvent être aujourd’hui que partiels puisque les nouvelles demandes continuent d’affluer. Les premières données dont je dispose vous permettront toutefois de vous faire une idée assez précise de l’intérêt et de l’efficacité de ce dispositif.

Le 20 juin dernier, à l’occasion de l’examen en première lecture par l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, je vous avais présenté, avant sa publication, une circulaire organisant les conditions dans lesquelles les contribuables détenant des avoirs non déclarés à l’étranger pourraient revenir dans la légalité. Comme je m’y étais engagé à l’époque, par souci de transparence et par volonté d’informer le Parlement, je vous rends compte aujourd’hui des résultats de cette procédure. Il m’importait en effet que la commission des Finances pût avoir la primeur des chiffres relatifs aux conditions de cette régulation, car cela correspond à la fois à la conception que je me fais des relations entre l’exécutif et le Parlement ainsi qu’au respect de vos prérogatives.

Je voudrais d’abord insister sur la dimension de droit commun de cette procédure, qui a été organisée en toute transparence.

La transparence constitue en effet une exigence aussi bien à l’égard de la représentation nationale que des Français. La procédure de régularisation a été décidée dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et le barème qui vous avait été présenté à cette occasion a été officialisé par la circulaire publiée dès le lendemain de mon intervention en séance publique.

La transparence s’impose également au contribuable dans ses relations avec l’administration fiscale, en particulier en ce qui concerne son identité. L’époque où il pouvait demeurer anonyme, envoyer son avocat prendre connaissance des conditions de sa régularisation, recevoir une sorte de devis de l’administration fiscale et peser l’intérêt de l’offre de l’administration, sans avoir révélé son identité, appartient définitivement au passé.

La procédure exige aujourd’hui que celui qui veut revenir dans la légalité commence par se faire connaître de l’administration en déclarant son identité et les avoirs qu’il détient, et en déposant les déclarations fiscales rectificatives correspondantes. Il agit ainsi comme n’importe quel contribuable qui a le droit de déposer une déclaration rectificative.

L’administration peut vérifier que la démarche est bien authentiquement spontanée. En effet, la procédure ne s’adresse pas à des contribuables ayant fait l’objet d’un contrôle ou en cours de contrôle, ni à ceux interceptés à nos frontières avec des capitaux non déclarés. Il est trop tard pour ceux que l’administration a identifiés avant qu’ils ne se dévoilent à elle ; ils doivent le savoir.

La transparence concerne ensuite l’origine des avoirs. Selon ce critère, les contribuables détenant des avoirs non déclarés à l’étranger relèvent de catégories très différentes. Certains peuvent avoir commis, pour alimenter leur compte, des fraudes d’une particulière gravité, sanctionnée par l’application d’une pénalité de 80 % au titre de l’exercice d’une activité dite occulte. La procédure mise en place ne leur est pas destinée. D’autres ont reçu d’un membre de leur famille un compte dont ils ignoraient auparavant l’existence. Ils ont commis une infraction en prolongeant une situation qu’ils n’ont pas créée. Nous avons décidé d’en tenir compte. Sous le contrôle de l’administration, les contribuables qui se mettent en conformité avec la loi fiscale doivent assurer la traçabilité complète de leurs avoirs.

La procédure a par ailleurs été organisée dans le strict et total respect du droit commun.

Celui-ci a prévalu tout d’abord dans le traitement administratif des dossiers. Les contribuables se mettant en conformité avec la légalité sont traités au sein de l’organisation administrative de droit commun par un service spécialisé, le service de traitement des déclarations rectificatives – STDR –, qui dépend de la direction nationale des vérifications de situations fiscales – DNVSF. Chargée du contrôle des particuliers à forts enjeux, cette direction dispose d’une expertise sans équivalent en la matière. Le choix d’un service spécialisé au sein d’une direction de contrôle répond à des objectifs d’efficacité mais aussi de transparence.

L’efficacité constitue un impératif car la complexité de certains dossiers demande un haut degré de compétence. J’ai pu en prendre la mesure vendredi dernier, lors d’un déplacement dans les services en compagnie de Mme Sandrine Mazetier, rapporteure pour avis du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale. Par ailleurs, la présentation par les contribuables de leurs montages est aussi un gage d’efficacité pour l’administration car elle alimente sa connaissance des schémas les plus complexes et enrichit son travail de contrôle.

La spécialisation du STDR permet aussi de suivre très précisément son activité et ses résultats. Cette transparence permet d’évaluer à tout moment le travail et les résultats obtenus au regard des objectifs et des règles qui ont été fixés.

Le droit commun vaut ensuite et surtout dans l’application de la loi de la République.

Il existe de très longue date, en France comme chez nos voisins, un débat public sur la meilleure manière de faire revenir les avoirs détenus à l’étranger. L’Italie organise régulièrement des amnisties fiscales à cette fin. En mars dernier, dans une proposition de loi, certains membres de l’opposition proposaient de s’inspirer de ce dispositif. Ils souhaitaient, d’une part, que soit accordée une amnistie fiscale au prix d’une soulte : selon l’exposé des motifs de ce texte, « le niveau de la taxe forfaitaire liée au dispositif d’amnistie fiscale sur les capitaux rapatriés doit être raisonnable, et l’article 1er propose de le fixer à 5 %. » Ils prévoyaient, d’autre part, dans l’article 2 de la proposition de loi, que soit accordée « une franchise d’impôt pour les capitaux rapatriés investis dans la création ou la reprise d’entreprises françaises ». Sans doute estimaient-ils que 5 % constituaient un niveau de taxation très élevé !

Le Gouvernement n’a pas souhaité retenir une solution de cette nature ; il assume même pleinement son choix de l’écarter totalement. Nous estimons, en effet, qu’il est absolument inconcevable qu’un contribuable qui a éludé l’impôt ne s’acquitte pas intégralement et dans le strict respect du droit commun de la totalité des droits à sa charge, majorés de pénalités, d’amendes et d’intérêts de retard tenant compte de son comportement.

Quatre mesures ont donc été prises en ce sens. Premièrement, l’impôt sera payé par ces contribuables exactement dans les mêmes conditions que par tous les autres, en faisant application de la totalité des dispositions du code général des impôts votées par le Parlement. Deuxièmement, cet impôt étant payé tardivement, il sera assorti de l’intégralité des intérêts de retard, calculés au taux légal, sans plafonnement ni modulation. Troisièmement, les contribuables concernés ayant manqué à leurs obligations déclaratives, ils devront, au surplus, être soumis aux sanctions prévues par la loi, que sont les majorations des droits dus, d’une part, et les amendes, d’autre part. Quatrièmement, pour tenir compte de leur démarche spontanée, il a été décidé, en application des dispositions que vous avez votées, de moduler ces sanctions à des niveaux différents selon l’origine des avoirs déclarés par les contribuables – notamment selon qu’ils étaient fraudeurs actifs ou passifs. Le barème correspondant, qui figure dans la circulaire, est évidemment public. Il s’applique à tous les contribuables concernés, sans négociation ni sur-mesure. Défini en fonction de la loi que vous votez, il a vocation à suivre les évolutions législatives. Dans cet esprit, il a été tenu compte de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, qui renforce certaines sanctions. J’ai ainsi annoncé une adaptation de ce barème, qui est entrée en application au 1er janvier.

Lors de la publication de la circulaire, des voix se sont élevées pour estimer qu’elle était trop rigoureuse et, à ce titre, vouée à l’échec. Dans un contexte de redressement des finances publiques qui met tous les Français à contribution, nous assumons cette fermeté, que nous devons aux contribuables acquittant spontanément leurs impôts dans le respect du droit.

Les premiers résultats attestent du succès encourageant de la procédure mise en place. Ils évoluent constamment puisque, chaque semaine, en moyenne cent cinquante contribuables supplémentaires font le choix du retour à la légalité et du rapatriement de leurs avoirs. Au 14 février, 15 813 contribuables avaient d’ores et déjà pris une décision en ce sens alors qu’ils étaient 10 600 au 31 décembre 2013. Plus de 5 000 contribuables supplémentaires se sont donc présentés à l’administration au cours des six premières semaines de l’année 2014.

Ces contribuables se font généralement connaître via une lettre d’intention par laquelle ils informent l’administration de l’existence d’un compte non déclaré à l’étranger. Ils déposent ensuite leurs déclarations fiscales rectificatives accompagnées des pièces justifiant l’origine de leurs avoirs. Leurs dossiers peuvent alors être instruits. Certains déposent directement des dossiers avec leurs déclarations rectificatives, ce qui permet d’engager immédiatement leur instruction.

Au 7 février, sur près de 16 000 dossiers, 2 621 étaient complets et comprenaient les pièces et déclarations permettant de les instruire. Ils représentent un montant cumulé de 2,386 milliards d’euros d’avoirs, soit un montant moyen de près de 910 000 euros par dossier. Il s’agit déjà d’un montant significatif, qui ne porte que sur 17 % des contribuables s’étant déclarés à l’administration.

Le traitement de 241 de ces 2 621 dossiers est achevé. Les avoirs en jeu représentent 296 millions d’euros, soit un montant moyen de 1,2 million d’euros par dossier. Les droits, pénalités et amendes correspondant s’élèvent au total à près de 70 millions d’euros. Pour ces dossiers, le montant total payé par les contribuables équivaut donc en moyenne au quart des avoirs non déclarés. Ce chiffre constitue une moyenne car le montant de l’impôt dû dépend de la situation de chacun : certains ont hérité et doivent des droits de succession, ceux qui sont redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune – ISF – doivent l’acquitter à un taux dépendant de leur fortune totale tandis que l’impôt sur le revenu dépend des gains éventuellement réalisés.

De plus, au moment du dépôt des déclarations rectificatives, les contribuables redevables de l’ISF ou des droits de succession doivent spontanément régler les impositions dues, hors pénalités, amendes et intérêts de retard qui, comme l’impôt sur le revenu, sont calculés par l’administration. À ce titre, en plus des 70 millions de droits, pénalités et amendes provenant du traitement achevé de 241 dossiers, le dépôt de 2 621 dossiers complets a permis à l’administration d’encaisser 159 millions d’euros.

Au total, au 7 février dernier, la recette déjà acquise s’élève donc à 230 millions d’euros.

La proportion des dossiers traités par l’administration s’accroît. Il faut toutefois comprendre que la constitution et l’instruction du dossier reposent, en large part, sur le contrôle de l’origine des avoirs, qui suppose la présentation par les contribuables de pièces justificatives, d’attestations de la part de banques, de notaires ou de gestionnaires de fonds, qui sont parfois longues à obtenir.

Compte tenu de l’enjeu financier, l’administration est totalement mobilisée pour assurer le traitement rapide des dossiers comprenant les pièces nécessaires. À l’origine, le service compétent comprenait vingt-cinq agents : vingt agents de catégorie A chargés du traitement des déclarations, trois agents de collaboration chargés de la gestion administrative de ces déclarations rectificatives et deux responsables les encadrant. Confronté à l’afflux des demandes, qui ont plus que doublé depuis la fin du mois de novembre, j’ai décidé de renforcer ce service, dont l’effectif vient d’être augmenté de 50 % et sera accru par la suite, autant que cela sera nécessaire. Nous nous donnerons tous les moyens pour assurer un traitement des dossiers permettant un encaissement rapide des recettes correspondantes. Je tiens à rendre hommage aux agents du service de la DNVSF, qui réalisent un travail absolument considérable avec exigence, détermination et passion pour les principes qui nous guident tous, parmi lesquels l’égalité des citoyens devant l’impôt.

Au vu des résultats déjà obtenus, je suis extrêmement confiant dans notre capacité à atteindre les objectifs fixés dans le cadre de la loi de finances pour 2014. Je ne prends pas de grands risques en affirmant même d’ores et déjà que nous avons de très fortes chances de les dépasser.

Dans le strict respect des règles relatives au secret fiscal, je souhaite également vous donner quelques éléments sur la nature des dossiers constitués en 2013.

Quel est le profil des contribuables rapatriant leurs avoirs en France ? La plupart ne les ont pas constitués eux-mêmes : 76 % des dossiers correspondent à des comptes reçus par héritage ou donation. Les dossiers sont d’un montant élevé : moins de 10 % concernent des avoirs inférieurs à 100 000 euros et certains sont d’un montant très important. La veille de la visite effectuée dans les services, un contribuable a, par exemple, révélé à l’administration un compte de près de 170 millions de dollars. Plus de 80 % des comptes sont issus de Suisse, le second État d’origine étant le Luxembourg, qui abritait 7 % des comptes déclarés.

Les premiers résultats attestent d’un véritable succès, qui s’amplifie, et d’un retour de capitaux en France d’une ampleur exceptionnelle, sinon historique. Ils sont de nature à inciter à plus de mesure dans les commentaires parfois excessifs concernant la fiabilité de nos prévisions budgétaires ou l’existence d’un exil fiscal massif. Sur ce dernier point, aucun chiffre n’est généralement avancé alors que je fournis aujourd’hui des éléments précis sur les capitaux rapatriés en France.

Je ne doute pas que d’autres contribuables s’interrogent encore aujourd’hui sur l’attitude à adopter : ils consultent, ils reçoivent, ils lisent des notes fiscales, techniques et juridiques, très approfondies, pour savoir ce qu’ils doivent faire. Je veux leur adresser un message simple, direct et sans ambiguïté.

Le contexte international change et de plus en plus d’États coopèrent désormais à la lutte contre l’évasion fiscale. Cette évolution n’est pas étrangère à l’action mise en œuvre par le Président de la République et le ministre de l’Économie et des finances, Pierre Moscovici, au sein des instances européennes, pour généraliser les conventions automatiques d’échange d’informations, mettre en place une liste d’États et de territoires non coopératifs – ETNC – européens et faire en sorte que l’Union puisse être mandatée afin de négocier des conventions de type FATCA – Foreign Account Tax Compliance Act – avec des pays tiers, sur le modèle de celles signées par les États-Unis. Le contexte international change aussi parce que nous utilisons tous les instruments de notre droit pour nous assurer de la coopération de nos partenaires – je pense à la liste des ETNC, sur laquelle l’inscription de certains États n’est pas restée sans effet.

Mais chacun doit être aussi conscient que le législateur et le Gouvernement ont changé de braquet dans la lutte contre la fraude fiscale. Nous avons procédé à un renforcement sans précédent de notre arsenal législatif en adoptant près de soixante mesures nouvelles. Aucun Gouvernement n’avait jamais fait preuve d’une telle détermination. Nous n’avons pu parvenir à un tel résultat que grâce au soutien la majorité mais aussi de certains membres de l’opposition appartenant à votre Commission, qui, par leurs amendements, leurs propositions et leurs réflexions, ont contribué à améliorer la qualité des textes qui ont été adoptés.

C’est, en effet, en raison de vos votes que les fraudeurs, qui sont bien informés, savent que l’administration fiscale a désormais tous les moyens pour les identifier et qu’ils seront inéluctablement rattrapés par la République. Je les invite donc à ne pas écouter les mauvais conseils dispensés par ceux qui, parfois, les entourent de leur affection et qui ont intérêt à ce qu’ils demeurent dans la clandestinité, pour alimenter leurs propres affaires.

Je souhaite maintenant évoquer les résultats des opérations de contrôle fiscal pour l’année 2013.

Pour cette période, un objectif de rendement supplémentaire de 1 milliard d’euros avait été fixé à ce titre par la loi de finances initiale votée en décembre 2012. Cet objectif était ambitieux, puisqu’il correspondait à une progression de 10 % des montants encaissés ; il a été atteint. Je vous confirme en conséquence que ces montants ont progressé de 1 milliard d’euros en 2013 et qu’ils atteignent au total 10 milliards.

Les premiers résultats de la procédure de rectification spontanée que je viens de présenter contribuent à ce succès, avec 116 millions d’euros encaissés en 2013 au titre des dossiers déposés auprès du service de traitement des déclarations rectificatives.

Les droits et sanctions notifiés se maintiennent au niveau élevé atteint en 2012, soit 18 milliards d’euros. S’agissant du seul contrôle fiscal externe, les droits et sanctions notifiés connaissent un léger recul de 5,7 % par rapport à 2012, avec un montant total notifié de 11,6 milliards d’euros. Cette évolution s’explique par le résultat exceptionnel acquis cette année-là au titre d’opérations d’ampleur exceptionnelle liées à la fraude sur les quotas de CO2. Les résultats des directions nationales de contrôle et ceux des services territoriaux poursuivent en revanche leur progression par rapport au niveau élevé atteint en 2012.

Un premier bilan atteste parallèlement d’une progression des résultats du contrôle sur pièces. Cela tient en particulier aux résultats enregistrés en matière de TVA, notamment au titre des demandes de remboursements de crédits de TVA. Les rejets de demandes de remboursement pour cause de fraude sont ainsi en progression de plus de 30 %, à hauteur de 1,5 milliard d’euros. Pierre Moscovici et moi-même souhaitons par ailleurs poursuivre la modernisation du contrôle fiscal. À cet égard, la montée en puissance des résultats du contrôle sur pièces s’inscrit dans une tendance que nous voulons accompagner.

Comme vous le savez, l’impôt peut être versé spontanément, rappelé au stade du contrôle sur pièces ou après un contrôle externe sur place. Il est évidemment préférable en tout point que l’impôt soit payé le plus tôt et le plus spontanément possible. C’est l’intérêt des finances publiques puisque l’impôt payé spontanément ou à la suite d’un contrôle sur pièces est perçu plus rapidement et dans des proportions très supérieures en termes de recouvrement.

Je veux prendre l’exemple du combat contre les fraudes à la TVA, qui prennent de multiples formes. Il constitue l’une de nos priorités. Nous savons bien qu’en la matière, l’intervention de l’administration doit être précoce pour permettre un recouvrement efficace des droits. Ce recouvrement devient en effet presque impossible en présence de structures éphémères, notamment dans le cadre de carrousels, et il est souvent très difficile, compte tenu du montant des droits au regard du chiffre d’affaires, lorsque la fraude est identifiée tardivement. La répression est indispensable pour mettre fin à cette fraude et pour sanctionner les personnes physiques concernées, notamment celles animant les véritables escroqueries parfois constatées. Les plaintes pour escroquerie progressent d’ailleurs de 14 % en 2013.

Mais il faut aussi, pour préserver l’intérêt du Trésor public, que l’administration poursuive ses efforts pour identifier le plus en amont possible les entreprises qui fraudent la TVA. C’est tout l’intérêt d’une politique de prévention permettant notamment de refuser des remboursements de crédits de TVA dès lors que des indices laissent présumer que le remboursement n’est pas dû. Pour progresser davantage encore dans ce domaine, nous sommes dans la phase finale d’expérimentation d’un outil informatique de data mining, dont le développement a été assuré par une maîtrise d’ouvrage intégralement publique, nous permettant d’améliorer la programmation du contrôle fiscal et d’identifier en amont les entreprises présentant des risques élevés de fraude. Cet outil, dont la première application concernera les demandes de remboursement des crédits de TVA, sera très rapidement opérationnel.

Assurer le paiement précoce de l’impôt, en amont du contrôle fiscal externe, est également dans l’intérêt des contribuables pour lesquels un tel contrôle est évidemment lourd à gérer. Je souhaite en conséquence que nous développions une politique d’information des contribuables, en particulier des entreprises, confrontées à des enjeux fiscaux souvent complexes. À titre d’exemple, l’administration fiscale va mettre à la disposition des entreprises une notice pédagogique détaillée pour les accompagner dans leurs déclarations de crédits d’impôt comme le crédit d’impôt recherche. Ce document, aussi simplifié que possible, pointe notamment les erreurs à ne pas commettre dans la déclaration.

Cet exemple illustre une démarche dont nous souhaitons le développement. Elle met l’accent sur la prévention et privilégie deux dimensions. Elle doit d’abord permettre de concentrer l’action du contrôle fiscal, notamment du contrôle fiscal sur place, sur sa finalité répressive de sanction des comportements pour lesquels l’intention d’éluder l’impôt est manifeste, et la rendre ainsi plus efficace. Elle favorise ensuite un dialogue constant et apaisé entre l’administration et le contribuable qui doit, lorsqu’il est de bonne foi, ce qui est généralement le cas, être prioritairement accompagné par l’administration pour appliquer spontanément la règle de droit plutôt que sanctionné a posteriori.

L’efficacité du contrôle fiscal, dont je vous présente aujourd’hui les résultats chiffrés, n’a donc pas vocation à se mesurer exclusivement à l’aune de ceux-ci. Il ne doit pas avoir pour seul objectif de « faire du chiffre », et je suis évidemment d’autant plus à l’aise pour tenir ce discours que ces chiffres sont bons.

Nous vous présenterons donc, avec Pierre Moscovici, dans le courant de l’année, des propositions de réforme visant à poursuivre la modernisation du contrôle fiscal afin de développer le civisme fiscal spontané et de lutter plus efficacement contre toutes les formes de fraude fiscale.

M. le président Gilles Carrez. Nous nous réjouissons tous de l’efficacité de notre administration fiscale en matière de recouvrement de l’impôt.

Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir souligné l’apport de tous les députés lors du débat sur le projet de loi relatif à la fraude fiscale. La commission des Finances est unanime à vouloir améliorer les moyens destinés à lutter contre cette fraude et des amendements en ce sens ont été déposés sur ce texte par des députés issus de tous les bancs. Vous avez cité une proposition de loi relative à l’amnistie, signée par une quinzaine de membres de l’opposition – dont, je crois, aucun n’appartient à notre Commission.

M. le ministre délégué. Ni à la majorité !

M. le président Gilles Carrez. Vous avez raison de le préciser tant il est vrai qu’en la matière, nous pouvons nous attendre à tout !

Je veux souligner que l’amnistie, qui a été mise en œuvre dans d’autres pays européens en dehors de l’Italie, a été constamment refusée en France entre 2002 et 2012. Elle n’est donc pas à l’ordre du jour.

Mais en rendant invivable le climat de notre pays pour les fraudeurs, n’incitons-nous pas certains d’entre eux à rechercher ailleurs un ciel plus accueillant ? Je viens de prendre connaissance du rapport de décembre dernier qui nous a été transmis par votre administration, en application de la seconde loi de finances rectificative pour 2012, sur l’évolution des départs pour l’étranger et des retours en France des contribuables et l’évolution du nombre de résidents fiscaux. Il en ressort qu’une évaluation sérieuse de l’exil fiscal peut être envisagée à partir du recoupement des informations issues des collectes de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur la fortune et de l’exit tax. En ce début d’année 2014, la direction générale des finances publiques – DGFIP – dispose de données complètes pour l’année 2012. Je vous demande en conséquence, monsieur le ministre, si vous accepteriez de revenir devant notre Commission, après la suspension des travaux parlementaires liée aux prochaines échéances électorales, pour discuter avec nous de la méthodologie de ces travaux et de leurs résultats pour 2012.

M. le ministre délégué. Votre proposition m’agrée pleinement. La meilleure façon d’en finir avec les commentaires approximatifs sur des statistiques dont personne ne dispose consiste à communiquer à votre Assemblée tous les éléments qu’elle demande. C’est d’ailleurs le devoir du Gouvernement. Je prends l’engagement de collecter ces informations, de tenir compte des propositions relatives à l’élaboration de ces statistiques et de venir devant votre Commission présenter ces éléments avec le même désir de précision que celui qui m’anime aujourd’hui.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Monsieur le président, il est compréhensible de vouloir aller plus loin, mais il ne faudrait pas que cette volonté masque les résultats qui nous sont communiqués. Le dispositif relatif à l’exit tax a été complété par la loi de finances rectificative. Après les informations assez décevantes qui nous avaient été communiquées en guise de premier bilan, nous avions d’ailleurs souhaité qu’un suivi sérieux soit assuré. Il ressort des données dont nous disposons que, contrairement à ce l’on entend trop souvent, la plus grande fermeté en matière de recouvrement et de contrôle, qui s’inscrit dans un mouvement international, n’encourage pas l’exil fiscal. On constate même plutôt des retours massifs.

Monsieur le ministre, j’ai effectué une simple règle de trois. Le montant des avoirs étant en moyenne de 1 million d’euros pour les dossiers déjà complets, on peut l’estimer au total à 15 milliards d’euros pour les 15 000 dossiers déposés. Sachant que le montant total payé par les contribuables dont les dossiers sont achevés s’élève à un quart des avoirs, il est possible d’attendre raisonnablement de cette assiette de 15 milliards d’euros 3 à 4 milliards d’euros de recettes. Même si ces calculs sont approximatifs, pouvez-vous nous confirmer leur pertinence ?

J’ai par ailleurs observé que, ces dernières années, la hausse des pénalités était très supérieure à celle des droits. Confirmez-vous cette tendance ?

En outre, dans son rapport annuel de 2012 portant sur le pilotage national du contrôle fiscal, la Cour des comptes a émis un jugement mitigé sur l’organisation et l’action de la DNVSF. Des mesures ont-elles été prises ? Quel bilan de l’action de cette direction tirez-vous aujourd’hui ?

Dans les relations entre les administrations fiscales des différents pays, percevez-vous des évolutions dans le comportement des États les moins coopératifs ? Je m’en suis déjà entretenu avec le directeur général de la DGFIP, M. Bruno Bézard, mais je serais heureux de vous entendre sur le sujet, notamment en ce qui concerne la Suisse.

Par ailleurs, le taux d’encaissement des redressements relevés ces dernières années me paraît assez faible : il s’élève à 62 % deux années après la notification. Constatez-vous une évolution en la matière ?

Enfin, dans le cadre de la mise en conformité spontanée par les particuliers, l’administration fiscale a-t-elle découvert des schémas de fraude ou d’optimisation dont elle n’avait pas connaissance ?

M. Dominique Lefebvre. Monsieur le ministre, vous nous présentez des résultats sans précédent, tant par leur ampleur que par la nature de votre démarche.

Au-delà de l’enjeu budgétaire, la démarche engagée recouvre en effet un enjeu démocratique. Nos concitoyens attendent que, conformément à l’article VI de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la loi soit « la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » et que personne, en aucun cas, en raison de situations personnelles ou du sentiment que la pression fiscale serait excessive, ne puisse échapper à l’impôt. Je me permets d’insister au nom du groupe socialiste pour qu’une telle démarche soit poursuivie dans la fermeté et la transparence. Nos concitoyens doivent savoir que la période où l’on pouvait parler en matière fiscale de « transactions » et de « négociations » est révolue – à supposer qu’elle ait vraiment existé. Aujourd’hui, l’impôt et les pénalités dus sont payés en totalité.

L’ampleur du mouvement que vous nous avez décrit va à l’encontre de l’idée selon laquelle certains pourraient échapper à l’impôt du fait de l’importance de leur fortune ou de leurs revenus. Nos concitoyens font preuve d’un civisme fiscal éprouvé. La décision de plus de 15 000 Français de se conformer à la loi prouve que l’exil fiscal ne constitue pas une solution et elle invalide la thèse selon laquelle le risque de provoquer un tel exil devrait empêcher de lever l’impôt à proportion du revenu et du patrimoine de chacun.

J’ajoute que l’effort de redressement des finances publiques en cours rend d’autant plus nécessaire la récupération des impôts dus.

Le législateur a permis l’adoption d’un certain nombre d’outils. Il serait utile de faire un point sur leur mise en place. Mais seule la coopération internationale permettra de franchir de nouvelles étapes. Pouvez-vous nous éclairer sur les sujets qui seront traités dans ce cadre dans les mois à venir ?

M. Pierre-Alain Muet. L’exposé du ministre montre clairement que le durcissement des sanctions et l’application du droit commun sont bien plus efficaces que toutes les lois d’amnistie imaginables et ont surtout l’avantage de produire des effets durables.

La règle de trois appliquée par le rapporteur général laisse penser que cette année sera probablement exceptionnelle en termes de rendement du contrôle fiscal. Mais si nous obtenons plusieurs milliards d’euros supplémentaires en 2014, les résultats des années suivantes risquent d’être moins élevés.

Par ailleurs, la procédure de rescrit est indispensable pour le crédit d’impôt recherche : beaucoup d’entreprises ayant compté en toute bonne foi sur celui-ci sont confrontées à des contestations, alors qu’en utilisant cette procédure, elles auraient pu s’assurer du bien-fondé de leur comptabilité et de leurs choix.

M. Charles de Courson. Le groupe UDI a toujours appuyé les mesures permettant d’améliorer le recouvrement de l’impôt et de lutter contre la fraude fiscale.

Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, la très grande majorité des comptes faisant l’objet de la procédure de mise en conformité spontanée viennent de Suisse. Or, lorsqu’il y a eu le débat en Allemagne sur l’accord Rubik, finalement rejeté par le parlement allemand, les autorités helvétiques ont donné les chiffres des avoirs étrangers détenus dans leur pays non déclarés aux administrations fiscales des États concernés : l’Allemagne arrivait largement en tête avec environ 160 milliards d’euros ; pour la France et l’Italie, le montant était de l’ordre de 80 à 85 milliards et, pour la Grande-Bretagne, de 23 à 24 milliards – le nombre de paradis fiscaux dont elle dispose expliquant sans doute ce niveau plus modeste. Si les 241 dossiers que vous avez évoqués sont représentatifs, à raison d’un million d’euros d’avoirs non déclarés par dossier, les avoirs non déclarés de l’ensemble des contribuables ayant recours à la déclaration spontanée seraient d’environ 16 milliards d’euros, soit 20 % de la totalité des avoirs mentionnés par la Suisse.

Ne nous faisons pas d’illusion : le rapatriement massif constaté ne résulte pas du renforcement de notre dispositif, mais de ce que la loi suisse a de nouveau été modifiée et que ce pays a demandé à tous les détenteurs d’avoirs non déclarés de fournir une attestation de leur administration d’origine indiquant qu’ils les avaient déclarés. La meilleure action que nous pouvons avoir dans ce domaine est donc internationale, à l’image de ce qu’ont fait les États-Unis en disant à la Suisse que si elle ne déclarait pas l’ensemble des avoirs non déclarés des ressortissants américains, elle devrait fermer toutes ses implantations bancaires outre-Atlantique. Cela a permis au fisc américain de récupérer plusieurs milliards de dollars. Il faut aussi agir de même à l’égard du Luxembourg.

Enfin, le contrôle fiscal, dans lequel les faits de fraude fiscale sont minoritaires, donne lieu à des règles de prescription différentes en fonction des impôts ou de la bonne ou mauvaise foi des contribuables, le délai de prescription pouvant être de trois ou six ans selon les cas. Ne faut-il pas harmoniser ce régime et étendre ce délai à dix ans en cas de mauvaise foi ?

M. Yann Galut. Monsieur le ministre, votre détermination et votre méthodologie très fermes portent leurs fruits, au-delà même de ce qu’on avait espéré. Il est essentiel que la procédure de régularisation retenue soit transparente et repose sur l’application du droit commun.

Monsieur le président, la France n’est pas victime d’un exil fiscal massif : les chiffres de l’évasion fiscale sont à peu près les mêmes que dans les pays comparables. C’est le cas notamment en Allemagne, qui a renforcé sa lutte contre ce phénomène, auquel elle a été massivement confrontée au cours des derniers mois.

Pouvez-vous me confirmer, monsieur le ministre, que les 230 millions d’euros que vous avez évoqués s’agissant de la procédure de mise en conformité spontanée sont rentrés dans les caisses ?

M. le ministre délégué. Pour les 241 dossiers réglés, on enregistre 70 millions de recettes sur environ 300 millions d’euros d’avoirs, soit une proportion d’un quart. Par ailleurs, les 2 600 dossiers complets donnent lieu à un encaissement de 230 millions d’euros au titre de l’ISF, lesquels n’intègrent pas les pénalités et amendes que nous aurons à percevoir par ailleurs.

M. Yann Galut. Par ailleurs, vous accordez une attention particulière à la fraude « carrousel » à la TVA et à l’escroquerie à cet impôt, évaluée à un montant de 10 à 15 milliards d’euros par an. Un dispositif spécifique sera mis en place dans les semaines qui viennent pour y remédier.

Je souhaite en outre attirer votre attention sur l’inventivité des fraudeurs fiscaux. Si des dispositifs sont annoncés pour y faire face, on assiste à une montée en puissance de la technique du crédit lombard, qui serait passée ces dernières semaines de quelques centaines de dossiers à 20 000 ou 30 000. Si nous devons donc saluer le travail réalisé par votre administration, il faut réadapter en permanence la législation dans ce domaine.

M. Pascal Cherki. Monsieur le ministre, je vous félicite pour l’effort engagé et les premiers résultats obtenus.

Si 76 % des dossiers sont liés à des comptes reçus par héritage ou donation, cela veut dire qu’un quart d’entre eux correspond à de nouveaux fraudeurs. On sait par ailleurs qu’historiquement la Suisse est une terre de refuge de fortunes de la bourgeoisie et de l’aristocratie françaises. Pourrions-nous disposer de données sur la répartition des patrimoines concernés selon leur montant ? En effet, parmi les patrimoines situés à l’étranger, notamment en Suisse, certains sont petits, d’autres très gros : je voudrais être sûr que les États avec lesquels nous coopérons ne se concentrent pas seulement sur les premiers – qui sont d’ailleurs devenus moins intéressants financièrement.

Par ailleurs, 80 % des comptes en Suisse et 7 % au Luxembourg correspondent à des fortunes privées individuelles. Mais où en est-on de la lutte contre la fraude fiscale des entreprises, notamment dans les paradis fiscaux ? Combien de dossiers avons-nous pu rectifier en matière de prix de transfert ou d’abus de droit ? Progresse-t-on dans ce domaine ?

Mme Arlette Grosskost. Quelle est votre approche s’agissant des fiducies ou des fondations ?

M. le ministre délégué. Compte tenu du temps limité qui nous est imparti, je me réserverai la possibilité de répondre par écrit aux questions auxquelles je n’aurais pu apporter de réponse aujourd’hui.

S’agissant des montants que nous comptons récupérer, je ne peux retenir le calcul par la règle de trois que vous évoquez dans la mesure où elle comporte une marge d’erreur, ce calcul dépendant du montant des avoirs de tous les dossiers et de la situation fiscale de chacun. Par ailleurs, compte tenu de ce qu’il y aurait près de 80 000 comptes à l’étranger, on peut se dire que le chiffre de 15 000 dossiers que j’ai évoqué n’est pas définitif et que ceux qui ont les plus grosses fortunes sont ceux qui réfléchissent le plus longtemps avant de se mettre en conformité. Dès lors, on peut penser que les dossiers de déclaration spontanée vont continuer à nous parvenir et que, plus le temps passera, plus ils seront substantiels.

J’en profite d’ailleurs pour dire à ceux qui ont les comptes les plus garnis que chaque minute qui passe s’inscrit dans un compteur qui tourne à leur désavantage ; le temps de leur réflexion donne lieu à un taux d’intérêt bien différent de celui des banques dans lesquelles les avoirs sont placés. Je les invite donc à se régulariser au plus vite.

Reste que le flux des dossiers qui nous parviennent est significatif et les sommes potentiellement récupérables importantes.

Monsieur de Courson, au travers des accords Rubik, les Suisses nous ont proposé un prélèvement sur les avoirs déposés sur leurs comptes : cela nous garantissait une recette, en contrepartie de laquelle les déposants ne seraient pas inquiétés et le secret bancaire pas remis en cause. Comme ces accords étaient une forme d’amnistie qui ne disait pas son nom et se dissimulait derrière des perspectives de gain significatives pour les États signataires, ceux qui les ont proposés ont eu tendance à majorer fortement le niveau des avoirs déposés et les perspectives de gain. Cela est très classique et très habile, mais ce n’est pas une raison pour tomber dans le piège ! Surtout si l’on compare ce qu’on nous promet en contrepartie du secret bancaire à ce que l’on est sûr de récupérer si on reste ferme dans la plus grande transparence. Vous en étiez d’ailleurs d’accord. Il ne faut avoir aucune naïveté à cet égard.

Quant au raisonnement consistant à dire que c’est parce que les autorités helvétiques ont incité leurs clients à se rapatrier que ceux-ci le font, je pense que si telle était vraiment leur intention, la manière la plus sûre serait de signer une convention d’échange automatique d’informations – ce qui n’a pas été fait jusqu’à présent. Nous souhaitons d’ailleurs renforcer notre pression avec tous nos partenaires pour l’obtenir, à l’instar de ce qu’ont fait les États-Unis.

Je comprends que lorsqu’on est dans l’opposition, on ait tendance à trouver des raisons externes au succès de ce qui est fait par la majorité. Je n’exprime d’ailleurs aucune satisfaction excessive en la matière car nous voulons obtenir plus, voire le rapatriement de la totalité des avoirs. Mais je ne remercierai pas des partenaires extérieurs – qui ne sont pas encore totalement des partenaires – pour les résultats que nous avons obtenus du fait de notre détermination.

Nous poursuivrons et intensifierons les relations avec la Suisse. Nous nous y rendrons d’ailleurs prochainement avec Pierre Moscovici pour évoquer cette question avec les autorités de ce pays et maintenir les pressions nécessaires pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

S’agissant de la DNVSF et du rapport de la Cour des comptes, qui s’interrogeait notamment sur les conditions de la transaction, le service dont nous disposons fait un travail extraordinaire avec un niveau de professionnalisme reconnu. En outre, la circulaire que j’ai prise ne laisse aucune place à la transaction et la présente réunion témoigne de la volonté que nous avons de rendre compte de tous les aspects de la régularisation.

D’ailleurs, monsieur Cherki, quand nous aurons un échantillon suffisamment large, nous communiquerons les données sur la structure des patrimoines et le montant des sommes obtenues au regard des avoirs, ce qui permettra au Parlement de mesurer les conditions dans lesquelles les pénalités, les amendes et les impôts ont été recouvrés.

Nous progressons considérablement sur ce point : je m’en réjouis car c’est le résultat d’un travail commun entre le Gouvernement et le Parlement et cela témoigne de la reconnaissance par le premier des prérogatives de contrôle du second. C’est aussi une manière de montrer qu’il n’y a pas un verrou à Bercy et un écrou ailleurs : il y a à Bercy une catapulte qui envoie vers la justice ceux qui doivent y être renvoyés et des fonctionnaires appliquant le droit dans toute sa rigueur.

Enfin, je suis tout à fait prêt, monsieur le président, à rendre compte devant votre commission des conditions dans lesquelles nous obtenons des résultats dans la lutte contre la fraude des entreprises, ainsi que de l’efficacité des outils dont nous nous sommes dotés à cet effet – ce serait à la fois utile et intéressant. Je rappelle que nous avons adopté soixante mesures de lutte contre la fraude depuis le début du quinquennat, dont plusieurs ne concernent pas que les particuliers.

Si parfois nous avons eu des débats de droit sur des dispositions destinées à lutter contre l’optimisation ou la fraude, jamais ils n’ont fait apparaître entre nous une différence de volonté. Si j’ai souhaité avoir ces débats, c’est parce que j’ai estimé important, dès lors que nous étions déterminés à mener cette lutte, de faire en sorte que les outils juridiques dont nous nous dotions ne fassent l’objet d’aucune contestation. Car si on veut réussir ce combat, il ne faut s’exposer à aucun risque juridique. Nous aurons donc encore des débats de ce type, tant notre détermination est forte dans ce domaine.

M. le président Gilles Carrez. Je vous remercie, monsieur le ministre.

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Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 19 février 2014 à 12 heures

Présents. - M. Éric Alauzet, M. Dominique Baert, M. Jean-Marie Beffara, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, Mme Arlette Grosskost, M. Régis Juanico, M. Jean-François Lamour, M. Jean Launay, M. Dominique Lefebvre, M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, Mme Valérie Pécresse, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, M. Philippe Vigier

Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Étienne Blanc, M. Olivier Dassault, M. Marc Francina, M. Jean-Pierre Gorges, Mme Sandrine Mazetier, M. Thierry Robert, M. Thomas Thévenoud, M. Michel Vergnier

Assistait également à la réunion. - M. Yann Galut

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