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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 9 juillet 2014

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 94

Présidence de M. Pierre-Alain Muet,
Vice-président

–  Audition, ouverte à la presse, de MM. Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, et Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration, sur l’exécution des crédits de la Défense pour 2013

–  Présences en réunion

La Commission entend, en audition ouverte à la presse, MM. Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées, Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, et Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration, sur l’exécution des crédits de la Défense pour 2013.

M. Pierre-Alain Muet, président. Notre Commission, sur décision de son bureau, organise des débats en liaison avec l’examen du projet de loi de règlement pour 2013. Après avoir consacré, le 11 juin, une réunion sur l’exécution des crédits dédiés aux aides au logement, nous évoquons aujourd’hui les crédits de la Défense.

M. Pierre de Villiers, chef d’état-major des armées. Je vous remercie de me donner l’occasion de faire un bilan de l’exécution budgétaire pour l’année 2013, au côté de Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement – DGA – et de Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration – SGA – et contrôleur général des armées. Cet exercice permet de rendre compte des conditions d’exécution budgétaire de l’année écoulée, mais il jette aussi un éclairage indispensable sur les conditions de la gestion en cours et sur les perspectives budgétaires pour les années suivantes.

Les armées ont fait, au cours des vingt dernières années, d’importants progrès en matière d’analyse du budget exécuté. Je m’en réjouis, car je me suis personnellement engagé sur ce sujet au début des années 1990, lorsque, sorti de l’École de guerre, je servais à l’état-major de l’armée de terre, au sein du bureau planification et finances. Comment, en effet, construire les budgets sans vision consolidée de l’exécution du dernier d’entre eux ? L’analyse de l’exercice 2013, qui constitue une charnière entre deux lois de programmation militaire – LPM –, est à cet égard particulièrement instructive ; elle a servi de fondation à la construction de la nouvelle LPM et en a déterminé les conditions d’entrée.

En guise de préambule, je veux rappeler que 2013 a été une année très remplie sur le plan opérationnel, puisque plus de 10 000 hommes et femmes de nos armées ont été simultanément engagés en opération pendant une partie de l’année. Les opérations extérieures – OPEX – de l’an dernier auront été marquées par la diminution du dispositif en Afghanistan, le lancement simultané de l’opération Serval au Mali, puis de l’opération Sangaris en République centrafricaine – RCA – en fin d’année. Le surcoût de ces opérations s’est élevé à 1,25 milliard d’euros, soit un dépassement de plus de 600 millions par rapport aux provisions.

L’exécution budgétaire pour 2013 et ses conséquences impactent directement les conditions d’entrée dans la LPM 2014-2019, déjà extrêmement tendues dans tous les domaines. Pour l’illustrer, je vous propose d’analyser le budget exécuté à travers les trois grands domaines qui le structurent : les crédits consacrés à payer le personnel – en d’autres termes la masse salariale –, les crédits de fonctionnement du ministère – notamment pour l’entraînement du personnel – et les crédits d’équipement. Je le ferai en dégageant les principaux leviers et enseignements pour l’avenir à court terme, en 2014, et à moyen terme, de 2015 à 2017.

En 2013, la masse salariale a représenté 12 milliards d’euros, sur un budget global de 31 milliards pour la mission « Défense », sur le périmètre de laquelle 7 093 postes ont été supprimés, dont 6 614 pour les armées, directions et services, soit une économie d’environ 250 millions d’euros. Cette déflation a déjà nécessité un effort considérable, qui sera encore accru en 2014, avec une déflation de 7 658 postes sur le même périmètre, dont 6 969 pour les armées, directions et services. Il est difficile d’aller au-delà, quels que soient les leviers considérés, à savoir le recrutement, l’avancement et la condition du personnel.

Le flux de recrutement annuel, qui garantit la nécessaire jeunesse du personnel militaire, se traduit par une dépense de 170 millions d’euros par an. Tarir ce flux entraînerait un vieillissement de la population incompatible avec le métier des armes et le besoin de régénération des unités combattantes. Utiliser ce levier serait dangereux, car cela aurait des effets néfastes et durables sur le plan opérationnel. Quant à l’avancement, un gel complet entraînerait un gain annuel de 32 millions d’euros, somme dérisoire au regard des conséquences morales et sociales. Enfin, la condition du personnel – mesure d’accompagnement indispensable de la réforme – représente un budget de 159 millions d’euros pour l’année 2013, dont l’essentiel a couvert des dépenses inéluctables. Je laisserai le soin au secrétaire général pour l’administration, en charge de la masse salariale du ministère, de développer ces éléments.

Le fonctionnement, auquel sont dédiés 7 milliards d’euros, se décline en deux agrégats : le fonctionnement courant et l’activité opérationnelle – autrement dit, ce qui est nécessaire à la vie quotidienne des unités et à l’entraînement des forces. Le fonctionnement courant, doté de 2,5 milliards d’euros, n’a rien à voir avec le « train de vie » : il concerne tout ce qui permet d’assurer des conditions de vie et de travail décentes. Sur ce point, nous étions déjà l’an passé à la limite de la rupture, à telle enseigne que le ministre a décidé la mise en œuvre d’un plan d’urgence de 30 millions d’euros en fin d’année au bénéfice des bases de défense, afin de satisfaire en partie les besoins les plus élémentaires. Comment peut-on envisager d’aller plus loin en ce domaine, quand la hausse de la TVA notamment – qui représente environ 40 millions pour les armées – est prise sous enveloppe et que les coûts de l’énergie et des fluides représentent 40 % des dépenses des bases de défense ?

Quant à l’activité opérationnelle, qui comprend l’entretien programmé des matériels – EPM – et le fonctionnement directement lié à l’entraînement – carburant opérationnel, frais de déplacements liés aux exercices ou frais d’escale, par exemple –, elle constitue à juste titre l’une des priorités de la nouvelle LPM. Pour 2013, 4,5 milliards d’euros y ont été consacrés, dont près de 3,1 milliards pour l’EPM. En 2013, le niveau d’entraînement s’est situé de 15 à 20 % sous les standards de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord – OTAN. Il serait déraisonnable de poursuivre dans cette voie : revenir à un niveau satisfaisant est donc l’un des objectifs de la nouvelle LPM. En 2013, la spirale baissière de l’EPM a été enrayée grâce à un effort de 8 % par rapport à 2012. Cette stabilisation, en entrée de LPM, était la condition sine qua non pour permettre un retour, à terme, aux normes attendues. C’est de la qualité de la préparation opérationnelle qu’il s’agit. Celle-ci permet la réactivité de nos armées et garantit leur aptitude à durer, conditions de leur succès en opération et, in fine, de la liberté d’action politique. En deçà de ce plancher, nous augmentons les risques pour le combattant, en opération comme à l’entraînement. Il y va donc aussi de la protection de nos soldats.

Les équipements – c’est-à-dire les investissements hors EPM –, auxquels sont consacrés 12 milliards d’euros, concernent trois grands domaines : la dissuasion, les programmes d’armement et l’infrastructure. En 2013, la consommation des crédits dédiés à la dissuasion a été d’environ 3 milliards d’euros. Conforme à la programmation, elle n’appelle pas de commentaire de ma part.

S’agissant des programmes d’armement, environ 6 milliards d’euros répartis entre les grands programmes et ceux qui assurent la cohérence capacitaire, nous nous situons à un plancher. Laurent Collet-Billon vous donnera des précisions en la matière ; pour ma part, je veux souligner quelques éléments. Un point positif, d’abord : la quasi-totalité des programmes prévus en 2013 ont été mis en œuvre. Je pense, par exemple, au nouveau standard F3R du Rafale, de la rénovation de l’Atlantique 2 et du missile antichar de moyenne portée – MMP.

En revanche, l’annulation de 650 millions d’euros, fin 2013, a dégradé le report de charges du programme 146 de 300 millions euros, le portant à hauteur de 2,4 milliards, sur un total de 3,45 milliards de report pour la mission « Défense ». Cela déséquilibre l’entrée en LPM ; et c’est cette annulation qui justifie l’appel des 500 millions d’euros de ressources exceptionnelles supplémentaires. Une incertitude pèse encore sur la moitié de ce montant. Toute réduction supplémentaire conduirait à décaler des programmes très attendus, dont l’arrivée a déjà été repoussée au maximum : programme Scorpion pour la protection des forces, Multi role tanker transport – MRTT – pour le ravitaillement en vol, sous-marin Barracuda ou programmes de renseignement. Aujourd’hui, ces programmes sont gelés en l’absence de garantie sur l’obtention des ressources attendues.

S’agissant enfin de l’infrastructure, elle a représenté environ 1 milliard d’euros en 2013. Ce budget me semble sous-doté compte tenu de l’arrivée des nouveaux programmes, ainsi que des dépenses liées à l’infrastructure nucléaire et aux ports de Toulon et de Brest – dépenses que nous avions plusieurs fois repoussées au cours des dernières années. La plupart de nos jeunes soldats et sous-officiers vivent, je le rappelle, dans une enceinte militaire, donc sur leur lieu de travail. Cette situation problématique est chronique. Le secrétaire général pour l’administration apportera des précisions sur cet agrégat. Les petits équipements – habillement, munitions, systèmes d’information et de communication – et les études représentent enfin un budget proche de 2 milliards d’euros.

Cette rapide revue de l’exécution 2013 révèle l’absence totale de marge de manœuvre ; et cette situation va perdurer. Le chef des armées, le Président de la République, a pris des engagements forts, que le ministre de la Défense met en œuvre avec détermination. Au-delà de 2013, votre vigilance sera cruciale sur les conditions d’exécution du budget 2014, fondées notamment sur des ressources exceptionnelles et des prévisions d’exports qui structurent la LPM. C’est un combat collectif que nous devons mener ; il y va de la cohérence de notre démarche vertueuse, telle que la définit le Livre blanc, la LPM, le projet « CAP 2020 » que j’assume avec les chefs d’état-major d’armées, les directions et les services.

M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement. Je vous remercie de nous donner cette occasion de nous exprimer sur l’exécution 2013 du budget de la Défense. Comme l’a indiqué le général de Villers, je m’exprimerai sur le programme 146, dont la direction générale de l’armement est coresponsable, et sur le volet du programme 144 qui la concerne, à savoir les études amont et la prospective en matière de technologie de défense.

L’année 2013 a été une année charnière, avec l’élaboration du nouveau Livre blanc et la LPM pour 2014-2019, dans un contexte exigeant de redressement des comptes publics. Le premier semestre a ainsi été marqué par une gestion très prudente et un ralentissement des engagements, afin de préempter le moins possible les choix en cours d’examen dans le cadre de la LPM ; au second semestre, les décisions prises en Conseil de défense ont été mises en œuvre, avec notamment le début de la renégociation des grands contrats.

Les engagements budgétaires sur le programme 146 ont atteint, en 2013, 9,4 milliards d’euros, en retrait de 3 milliards par rapport aux prévisions du projet de loi de finances, principalement en raison de l’attente de la LPM. En effet, le cadrage des ressources en crédits de paiement sur les années à venir a nécessité, dans la LPM, un certain nombre de décalages, d’étalements voire d’annulations de programmes. Certains contrats prévus en 2013 ont ainsi été retardés, qu’il s’agisse de l’acquisition des avions de transport MRTT ou des bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers – BSAH – pour la marine nationale, des travaux de conception du système de lutte anti-mines du futur – SLAMF –, de l’acquisition de torpilles lourdes du type Artémis ou encore de l’acquisition de missiles Aster 30.

Les paiements du programme se sont élevés à 9,4 milliards d’euros, 42 centimes étant restés en caisse par rapport à la norme autorisée… Le report de charges à la fin de 2013 s’établit à 2,4 milliards d’euros, soit 3,4 mois de retard, avec une dégradation de 300 millions par rapport à 2012 résultant de l’annulation de 650 millions d’euros de crédits en fin d’année.

Hors annulation de crédits, le report aurait donc été amélioré d’environ 350 millions d’euros, ce qui aurait permis l’exécution de la LPM dans les hypothèses prévues. Il s’agit donc d’une nouvelle dégradation, puisque ce report s’établissait à 2 milliards fin 2012. Afin de se prémunir d’une éventuelle rupture de paiement due à l’annulation de crédits de 650 millions d’euros, la DGA a par ailleurs mis en œuvre, comme en 2012, une gestion optimisée de la ressource au dernier trimestre, en donnant autant que possible la priorité au paiement des PME.

Le montant des intérêts moratoires s’est limité en 2013 à 4,8 millions d’euros, soit 0,05 % de la dépense, niveau en baisse par rapport à 2012. Cependant, la diminution dans la loi du délai global de paiement, la disparition des seuils minimums d’intérêts moratoires dans les nouveaux contrats et l’instauration d’une indemnité forfaitaire de 40 euros par facture en retard contribueront de toute évidence à faire augmenter ces intérêts dans les années à venir.

Pour les études amont, les autorisations d’engagement s’établissent à 708 millions d’euros et les crédits de paiement à 725 millions, ce qui traduit, à quelques euros près, une exécution conforme aux ressources attribuées.

La levée partielle de la réserve a conduit à une diminution des ressources disponibles de 24 millions d’euros, en particulier pour abonder les 30 millions mentionnés par le général de Villiers.

Les résultats obtenus en 2013 en matière de coûts, délais et performances sont globalement satisfaisants, avec des devis maîtrisés – le plafond d’évolution annuelle moyenne des devis à terminaison ayant été fixé à 1,5 %. Les réductions de cibles adoptées dans le cadre de la LPM se traduisent par une décrue de l’indicateur de 1,83 % : c’est là un effet mathématique un peu artificiel, reconnaissons-le ; mais, même si l’on n’en tient pas compte, le résultat reste satisfaisant, avec une augmentation des devis de seulement 0,2 %.

Les délais ont été maîtrisés malgré une dégradation apparente, les mesures de la LPM relatives à l’étalement des programmes ayant porté l’évolution annuelle moyenne des délais de réalisation à 3,77 mois.

La réalisation des principales opérations d’armement est également maîtrisée. L’indicateur de progression s’établit à 75 %, contre un objectif de 85 % ; mais si l’on neutralise l’effet des étalements décidés par la LPM, il atteint 88,4 %. Le principal écart concerne le taux de livraisons valorisées qui, à près de 81 %, reste en deçà de l’objectif de 85 %, principalement en raison du décalage en 2014 de la livraison d’un A400M, d’hélicoptères NH90, de systèmes SAMP/T et de torpilles MU90.

Les commandes ont été significatives en 2013 avec, pour la fonction stratégique « connaissance et anticipation », 4 400 systèmes de communication radio Contact – postes radio de nouvelle génération de l’armée de terre – et le lancement des travaux de conception préliminaire du programme CERES – capacité de renseignement électromagnétique
spatiale – ; pour la fonction stratégique « dissuasion », le marché TRANSOUM, qui permettra la rénovation et le maintien en condition opérationnelle des centres de transmissions pour les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins – SNLE –, et le lancement de la rénovation des Atlantique 2, prioritairement destinés à la lutte contre les sous-marins et les navires de surface ; pour la fonction stratégique « intervention », la notification du marché Rafale F3-R, le lancement du MMP, successeur du MILAN, et la commande de 34 hélicoptères NH90-TTH ; pour la fonction stratégique « protection », l’acquisition de trois bâtiments multi-missions B2M, qui doivent remplacer les navires déployés outre-mer pour protéger les intérêts français et les populations.

En outre, un certain nombre d’acquisitions ont été décidées au titre des urgences opérationnelles, dans le cadre de l’opération Serval au Mali : elles répondent à la nécessité d’interopérabilité des télécommunications, aux nécessités du renseignement – avec un outil projetable de surveillance cybernétique – et à la protection des forces – avec des systèmes de protection additionnels des véhicules terrestres.

Le montant total de ces acquisitions s’est limité à 13 millions d’euros, soit une légère hausse par rapport à 2012 ; mais la DGA et l’état-major des armées restent très vigilants sur le respect des délais pour les urgences opérationnelles comme sur la maîtrise de ces urgences.

L’effort consacré aux études amont a par ailleurs permis d’obtenir les résultats attendus en termes de progression des technologies : on peut notamment citer le succès d’essais à la mer de drones de guerre contre les mines. Nous avons également renforcé nos actions en lien avec des organismes civils, en particulier le ministère de la Recherche.

S’agissant des effectifs, le maintien de nos missions, notamment dans le domaine de la cyberdéfense – où le recrutement d’ingénieurs spécialisés dans les technologies nouvelles s’avère indispensable – ne permet pas de poursuivre une réduction sensible, bien au contraire.

J’en viens au bilan et aux perspectives. La DGA a réalisé une exécution globalement conforme à la loi de finances amendée par les mesures prises pour préparer la LPM, laquelle définit notre nouveau modèle d’armée dans un contexte financier extrêmement contraint ; elle résulte ainsi d’un équilibre délicat, que le changement d’un seul paramètre suffirait à déstabiliser.

Pour ce qui concerne les équipements relevant du programme 146, l’exécution de la LPM nécessitait un report de charges maîtrisé ; tel n’est plus tout à fait le cas aujourd’hui. La renégociation des grands contrats est quasiment terminée, et se traduit par le respect des flux financiers prévus en LPM. Toute variation de ces flux induirait des contraintes ou des variations complémentaires difficiles à prendre en compte. D’autre part, la LPM est construite sur l’hypothèse d’une exportation du Rafale qui se traduirait par une limitation des commandes passées par l’État. Les conditions seront à vérifier fin 2014.

Enfin, il est nécessaire d’avoir une pleine visibilité sur l’intégralité des ressources de la LPM, y compris sur les ressources exceptionnelles – 500 millions d’euros en 2014, comme l’a rappelé le général de Villiers –, car nos contrats s’exécutent sur toute la période. Cela suppose que ces dernières ressources, encore insuffisantes, soient utilisables : beaucoup de questions restent en cours d’examen à ce propos.

Je terminerai en précisant que la DGA a récemment fait l’objet d’un contrôle sur place des deux commissions parlementaires en charge de la défense.

M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration. Je vous remercie de me donner l’occasion de faire un bilan de l’exécution des crédits de la Défense pour 2013 ; je ciblerai mon propos sur le programme 212, « Soutien de la politique de défense ».

D’une manière générale, l’exécution pour 2013 est caractérisée par une contribution à l’objectif de redressement des finances publiques, une autre contribution à des dépenses urgentes interministérielles – notamment en fin d’année – et des dysfonctionnements persistants de l’application de solde des militaires, dysfonctionnements qui ont conduit à appliquer le principe de l’auto-assurance à partir des crédits hors titre 2.

J’évoquerai quelques éléments de cadrage du programme, avant d’en détailler les dépenses d’infrastructure, les systèmes d’information, d’administration et de gestion, et l’accompagnement de la politique de ressources humaines.

Le montant des engagements du programme s’élève à 1 898 milliards d’euros, en retrait de près de 150 millions par rapport aux prévisions de la loi de finances. Cette baisse, qui pour l’essentiel porte sur les dépenses d’infrastructure, est aussi liée à une nouvelle évaluation des besoins pour le Barracuda et à des décisions – intervenues en fin d’année au vu des difficultés de gestion – de décaler des opérations.

À la fin de 2013, le solde des autorisations d’engagement non engagées et reportées sur 2014 s’élève à 339,5 millions d’euros, soit une augmentation de 81 millions d’euros par rapport à 2012 ; cette situation suscite une vigilance de notre part car elle concerne principalement l’infrastructure.

Les crédits de paiement du programme se sont élevés à 1 656 milliards d’euros ; il faut y ajouter les paiements réalisés à partir des ressources du compte d’affectation spéciale immobilier, à hauteur de 200 millions d’euros, soit sur engagements directs – pour 20 millions –, soit sur engagements antérieurs – pour 180 millions. Hors titre 2, la totalité des paiements atteint ainsi 1,856 milliard d’euros.

Les crédits non consommés au 31 décembre 2013 et reportés sur 2014 s’élèvent à 4 millions d’euros, et résultent de crédits de paiement réservés dans le cadre du pilotage de la fin de gestion. Le report de charges, pour le programme, se monte à 209 millions d’euros à la fin de 2013, en hausse de 25 millions par rapport au report constaté fin 2012.

S’agissant des effectifs, les dépenses de titre 2 ont atteint 1,188 milliard d’euros, soit 98 % des crédits ouverts ; le plafond d’emploi du programme était de 13 160 équivalents temps plein travaillé – ETPT –, en hausse de 54 emplois en raison de transferts d’effectifs de la DGA ou des armées au titre de la fonction ressources humaines ou pour le service de maintenance des systèmes d’information. Le secrétariat général pour l’administration devait cependant contribuer aux réductions d’effectifs à hauteur de 273 emplois en 2013, de 362 en 2014 et de 500 en 2015 ; il a d’ailleurs terminé l’année 2013 avec une avance de déflation de 127 équivalents temps plein emploi – ETPE –, à cause de difficultés de recrutement, notamment de contractuels, pour certaines missions.

J’en viens aux principaux aspects du programme : l’infrastructure ; les systèmes d’information d’administration et de gestion ; l’accompagnement de la politique des ressources humaines, visé par les dépenses dites « hors socle » – notamment celles liées à la mobilité, au chômage et à la cessation anticipée d’activité pour exposition à l’amiante.

Pour les infrastructures, le montant global des engagements juridiques du budget opérationnel de programme en matière de politique immobilière s’est élevé à 1,303 milliard d’euros. En crédits de paiement, l’écart entre les prévisions de ressources
– 1,233 milliard – et l’exécution n’a été que de 9,4 millions d’euros.

Les encaissements liés aux cessions immobilières ont été de 104 millions d’euros, contre 383 millions prévus en loi de finances. Cet écart s’explique par le décalage de la cession de l’ensemble immobilier parisien Penthemont-Bellechasse, dont l’acte de vente a été signé il y a quelques jours, pour un prix nettement plus élevé que celui attendu par France Domaine. La répartition des encaissements issus des cessions a été la suivante : 20 millions d’euros à Paris – avec la cession de la caserne Reuilly –, 45,6 millions en Île-de-France et 38,2 millions en province.

Les règles de fonctionnement du compte d’affectation spéciale immobilier permettent une certaine souplesse : ce qui n’a pas été consommé une année peut être reporté l’année suivante, si bien que les ressources disponibles atteignaient 214 millions d’euros fin 2012. Le solde, à la fin de 2013, s’établit à 82,95 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 114 millions en crédits de paiement. Les perspectives pour 2014 sont plutôt encourageantes – notamment avec la vente de l’ensemble Penthemont-Bellechasse – et devraient le rester en 2015 avec l’engagement, dans quelques jours, de l’appel d’offre pour la cession de l’ensemble de la Pépinière et l’avancement des discussions sur la cession de l’ensemble Saint-Thomas d’Aquin. Elles sont en revanche incertaines pour 2016, compte tenu de la taille de l’ensemble de l’îlot Saint-Germain : des discussions sont en cours, à ce sujet, avec France Domaine et la direction du budget.

En matière de dépenses d’infrastructure, l’exécution du plan de commande 2013 a globalement correspondu aux prévisions ; les principaux engagements ont concerné, pour l’armée de terre, l’accueil du véhicule blindé de combat d’infanterie – VBCI – et du NH90 – NATO Helicopter –, l’hébergement des personnels, auquel ont été consacrés près de 100 millions d’euros. Pour l’armée de l’air, les travaux liés à l’accueil de l’Airbus A400M ont été poursuivis, pour un montant de 12 millions d’euros, ainsi que ceux liés à l’accueil du SAMP/T, pour environ 4 millions, et des Rafale à Mont-de-Marsan et Saint-Dizier, pour 5,5 millions.

Des dépenses importantes ont été consenties dans les ports : 37,8 millions d’euros pour l’accueil des frégates multi-missions – FREMM – à Toulon, 31 millions pour l’accueil et le soutien du Barracuda ; a également été engagée la rénovation électrique de Brest, pour 10 millions, et de Toulon, pour environ 15 millions.

Les dépenses liées à la réorganisation – déplacements d’unités ou restructurations – se sont montées à quelque 40 millions d’euros pour l’armée de terre, 36 millions pour l’armée de l’air, 16 millions pour la marine et 25 millions pour les structures interarmées. Nous avons également consacré des dépenses importantes à l’installation des systèmes d’information et de communication, notamment au Mont Valérien pour la direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’informations. Globalement, nous avons pu exécuter les dépenses prévues, qu’il s’agisse du compte d’affectation spéciale ou des crédits de paiement, même si 80 opérations, pour un montant total de 16,5 millions d’euros, ont été décalées en 2014.

S’agissant des systèmes d’information, d’administration et de gestion – SIAG –, l’enveloppe a dû faire l’objet d’une dotation nouvelle à hauteur de 25 millions d’euros via une levée partielle de la réserve, en raison de plusieurs difficultés : un reste à payer élevé en entrée de gestion 2013 ; un report de charges de 2012 sur 2013 de quelque 8 millions d’euros consécutif à une insuffisance de crédits en fin de gestion 2012 ; une part très élevée de dépenses obligatoires – 75 millions, pour la plupart payables en début d’année –, compte tenu notamment de contrats cadres ministériels en matière d’acquisition de licence – contrat signé avec Microsoft, par exemple.

Les dépenses en ressources humaines s’expliquent en partie par les difficultés rencontrées avec le logiciel unique à vocation interarmées de la solde, dit « Louvois », et leur impact sur l’ensemble des SIAG. Pour ce qui est de la masse salariale, les dépenses « hors socle » concernent la réserve, l’accompagnement social des restructurations, l’indemnisation du chômage, l’action sociale ou la cessation anticipée d’activité liée à l’amiante. Ces dépenses ont connu, en 2013, des évolutions contrastées, avec une insuffisance de 29,7 millions d’euros qu’il a donc fallu gager sur l’ensemble du programme. Les dépenses d’indemnisation du chômage ont connu une hausse sensible, de 13 millions par rapport aux prévisions, pour un total de 143 millions d’euros. Elles recouvrent, je le rappelle, l’indemnisation du chômage versée par Pôle emploi à l’ensemble des militaires ainsi qu’aux personnels civils non restructurés du ministère – ce qui représente 88 % de la dépense –, et aux ouvriers de l’État restructurés qui bénéficient du plan d’accompagnement correspondant.

Les anciens militaires indemnisés au titre du chômage étaient au nombre de 12 056 en 2013, soit environ 1 000 de plus qu’en 2012. Il s’agit donc d’une augmentation sensible, que nous devons surveiller ; elle tient bien entendu au contexte économique et aux difficultés qu’éprouvent les anciens militaires à retrouver un emploi dans le civil.

Les dépenses d’accompagnement des restructurations – notamment indemnités des départs volontaires – se sont élevées à 159 millions d’euros ; elles ont été moindres que l’an dernier et inférieures aux prévisions de 15 millions. Les dépenses liées à la mobilité du personnel civil ne suffisent plus à atteindre nos objectifs en la matière, notamment au regard des restructurations : cela doit être une alerte pour celles qui sont à venir. Quant au personnel militaire, le pécule s’est élevé à 114 millions d’euros ; 1 249 militaires en ont bénéficié en 2013. La cessation anticipée liée à l’amiante représente 103 millions d’euros de dépenses, en hausse de 11 millions par rapport aux prévisions ; on compte au total 2 337 bénéficiaires à la fin de 2013.

L’impact des dysfonctionnements du logiciel Louvois est estimé à 112 millions d’euros en 2013, dont 68 millions au titre des indus et 44 millions au titre des avances et fractions OPEX. Pour l’instant, la campagne de recouvrement des indus Louvois concerne les sommes versées depuis 2012, et elle est mise en œuvre depuis le début de l’année 2014. Environ 18,5 millions d’euros ont été recouvrés au 31 mai, sur les 28 millions prévus ; nous espérons récupérer 60 millions d’ici à la fin de 2014. Ce recouvrement est indispensable, car il doit notamment financer le système d’information qui se substituera à Louvois. Fin 2013, le ministre s’est engagé sur la mise en œuvre d’un prototype pour la fin de 2014, lequel sera testé tout au long de 2015.

La gestion est globalement conforme aux prévisions malgré des tensions, sur lesquelles il convient d’être vigilant, en matière de dépenses d’infrastructure et d’accompagnement des ressources humaines. Une certaine inquiétude demeure également sur les recettes exceptionnelles issues des cessions immobilières, notamment à partir de 2016, comme je le rappelais.

M. Jean Launay, rapporteur spécial pour le budget opérationnel de la défense. Il y a un mois environ, le directeur des affaires financières nous a détaillé le détail du report de charges sur 2014 qui, évalué à 3,45 milliards d’euros, a encore augmenté par rapport à 2012 alors qu’il était déjà élevé. L’objectif affiché par la LPM – dont j’étais rapporteur pour avis – de réduire ce report dans le but de le solder pourra-t-il être atteint au cours des prochaines années ? J’appelle bien entendu de mes vœux l’application de la LPM : toute la LPM, rien que la LPM, selon le souhait exprimé par l’ensemble des groupes lors d’une audition du ministre non ouverte à la presse. Comment les entreprises et organismes publics qui constituent les principaux créanciers du ministère – l’organisation conjointe de coopération en matière d’armement – OCCAr –, Thales et Dassault, pour citer les plus importants – intègrent-ils ces décalages dans leurs stratégies respectives ?

Le rythme de commandes a fortement diminué en 2013 en raison de l’attente de la LPM, mais il a décru aussi au cours du premier semestre de 2014 : comment l’expliquez-vous, et quel est l’impact budgétaire, en termes de report d’une année sur l’autre des autorisations d’engagement du programme 146 ?

Quelles conséquences aura l’annulation de 650 millions d’euros de crédits d’investissement en fin de gestion 2013 sur la conduite des opérations programmées par la LPM ?

La mission « Défense » bénéficiera de 250 millions d’euros supplémentaires au titre du programme d’investissements d’avenir – PIA –, qui financeront des programmes menés par la direction des applications militaires du Commissariat à l’énergie atomique – CEA. Ils s’ajouteront à l’enveloppe de 1,5 milliard prévue au titre du PIA en loi de finances pour 2014. Où en est-on de la consommation effective de ces crédits ? L’utilisation du PIA correspond-elle à la volonté de ne pas accroître la prévision de dépenses, conformément aux règles européennes ?

Par ailleurs, une évolution du statut de la DGA lui permettrait-elle de gérer les crédits du PIA ?

Enfin, ne peut-on imaginer que certaines dépenses consenties pour la sécurité de l’Union européenne – au titre des opérations Serval et Sangaris par exemple – ne soient pas comptabilisées dans le calcul du déficit public ? Cela consoliderait aussi l’exécution de la LPM.

Les difficultés de Louvois, que j’évoque au nom de Jean-Louis Dumont, constituent à mes yeux une double peine : pour les militaires, qui n’ont pas reçu leur solde en temps et en heure, et pour le ministère, qui doit à présent récupérer les indus. L’Agence pour l’informatique financière de l’État a-t-elle un rôle ? Quid de la stabilisation du logiciel ?

M. François Cornut-Gentille, rapporteur spécial pour la préparation de l’avenir. L’étude de l’exécution de 2013 nous permet d’affiner notre approche des budgets pour 2014 et 2015, et de mesurer l’écart entre les intentions et la réalité – écart qui est le fait de ce Gouvernement comme des précédents. Comme le rappelait à juste titre le chef d’état-major, la fin de gestion est essentielle car elle a conditionné l’entrée en LPM, avec 650 millions d’euros de moins : une série de conséquences en découlent, que nous mesurerons année après année.

Depuis vingt ans, les intentions sont bonnes mais la réalité l’est moins : chaque majorité doit se méfier d’elle-même. Cela fait des années qu’en matière de budget de la Défense, on agit au rebours des objectifs affichés, qui sont de privilégier l’investissement et l’équipement. Ne pourrait-on prévoir des procédures pour limiter la casse, si vous me passez l’expression ? Puisque le couperet tombe toujours en fin de gestion, ne pourrait-on anticiper à la faveur d’un dialogue avec Bercy ? Pourquoi ne pas associer notre assemblée en amont, notamment sur les OPEX, plutôt que de la mettre devant le fait accompli en fin d’année ?

Comment se présente la tuyauterie des investissements d’avenir, au vu des 250 millions d’euros manquants en 2014 ? Sans anticiper sur les conclusions de la mission concernée, comment se présente la mobilisation de ces investissements en 2015 ? L’idée d’une société de portage avait été évoquée, avant d’être abandonnée ; il est désormais question, monsieur le délégué général pour l’armement, de renforcer votre rôle : pourriez-vous nous en dire plus ?

Enfin, le report de charges du programme 146 s’élève à 2,4 milliards d’euros et dépassera sans doute les 3 milliards cette année : quelles sont vos pistes pour régler ce problème ?

M. Jean-François Lamour. L’exécution du budget de 2013 permet d’appréhender l’exercice 2014 et l’avenir de la LPM ; si un euro manquait à celle-ci, aviez-vous suggéré lors d’une audition par la commission de la Défense et des forces armées, nous serions dans une autre trajectoire de programmation ; or, je crains fort que ce ne soit déjà le cas.

J’ai en effet découvert avec surprise, en lisant le rapport de la Cour des comptes en mai dernier, que 417 millions d’euros du PIA pour 2014 avaient financé l’activité du CEA en 2013. Certes, 212 millions ont été reversés sur le programme 146 au début de l’année ; mais cette somme vient-elle ou non en surcroît de l’enveloppe de 1,3 milliard dédiée au programme en 2014 ? Les 205 millions restants seront-ils compensés d’une manière ou d’une autre ? J’ai le sentiment que non, partant que la LPM n’est déjà plus exécutée.

Mon autre question concerne le financement des OPEX. Le ministre nous a expliqué qu’une base de 450 millions était préférable à une base de 630 millions, perspective initiale pour 2013. On comprend la logique : le surplus d’OPEX est pris en charge, à hauteur d’environ 13 %, par le ministère de la Défense ; le reste provient de la solidarité intergouvernementale. Cette technique, plutôt maligne, ne saurait dissimuler le poids financier des OPEX, et elle s’opère aux dépens du budget de la Défense. En tout état de cause, je pense qu’en 2014, le budget des OPEX sera plus proche de 1,5 milliard que de 1,2 milliard : où trouvera-t-on les moyens de l’abonder ? Les 13 % redéployés sont exclusivement prélevés sur le programme 146, autrement dit sur l’équipement des forces. Cette situation, à propos de laquelle Xavier Bertrand avait tiré la sonnette d’alarme il y a deux mois, est intenable : nous n’entendons nullement polémiquer en le soulignant, mais faire état de la réalité. Vous avez donc raison, mon général, d’évoquer, comme François Cornut-Gentille l’a fait à son tour, le problème des ressources exceptionnelles, dites « REX », pour 2015. Comment, dans ces conditions, boucler le budget des OPEX ?

M. Alain Rodet. Je souhaite interroger le délégué général pour l’armement sur les appels d’offre des matériels tactiques de l’armée de terre et, plus généralement, sur la protection des entreprises françaises et de leurs sous-traitants. Alors que l’Allemagne, l’Espagne ou l’Italie défendent bec et ongles leurs industries d’armement, la France joue naïvement la mise en concurrence. Cela n’est pas sans semer le trouble, comme l’a montré, il y a trois ou quatre ans, le cas du porteur polyvalent terrestre. La DGA œuvre-t-elle à la défense et à l’organisation de nos industries d’armement ?

M. Philippe Meunier. L’accroissement du report de charges et les perspectives des recettes exceptionnelles posent problème. En droit commercial, cela s’apparenterait à de la cavalerie. Combien de temps cela va-t-il durer ? Nous sommes au mois de juillet, et les Rafale ne sont toujours pas vendus. Il va bien falloir dire la vérité aux Français et prendre la mesure de la situation, sans imputer éternellement à l’échec de Louvois le fait que la LPM soit déjà sortie des clous. Peut-on continuer à étirer les livraisons d’armement et à reporter les charges sans conséquences majeures sur notre tissu industriel ? Dans la négative, quelles suppressions de programme envisage-t-on ? Certes, c’est au pouvoir politique qu’il appartient de répondre à ces questions, mais elles n’en restent pas moins posées.

M. Philippe Vigier. Le contexte actuel est sans doute l’un des plus graves que nous ayons jamais connus. François Cornut-Gentille a raison : il y a toujours eu un écart entre les prévisions et la réalité ; mais il semble que l’on soit arrivé à un point de rupture. D’après la Cour des comptes, la soutenabilité de la LPM n’est pas assurée, y compris en 2014.

Les 250 millions d’euros supplémentaires dont a parlé Jean Launay ne sont qu’une rustine : c’est une somme que l’on a d’abord tenté de soustraire aux crédits de l’Écologie avant de l’imputer, en raison de l’échec de la manœuvre, sur ceux du PIA. Notre inquiétude est donc grande, d’autant que le report des charges atteint désormais quelque 3 milliards d’euros. Le Premier ministre a indiqué qu’il demanderait à la défense de faire des « propositions pour améliorer la gestion des matériels et projets », autrement dit réaliser des économies supplémentaires. Quelles propositions les armées ont-elles faites ?

Les recettes exceptionnelles ont été évaluées à 500 millions d’euros. Qu’en sera-t-il en 2014 ? La vente des bandes de fréquence donnera-t-elle les mêmes résultats financiers qu’en 2013 ? Quid des cessions d’actifs immobiliers ? Pour avoir été un praticien en ce domaine, je sais que la fluidité est nécessaire. Ce sont les recettes exceptionnelles qui, faut-il le rappeler, ont permis au bateau de ne pas prendre l’eau.

M. le délégué général pour l’armement évoquait un « trou » dans la livraison des Rafale. Ce trou va-t-il s’agrandir ? Qu’en est-il de l’A400M ? Les industriels m’ont fait part de leurs craintes, qui sont grandes.

Le ministre avait évoqué une possible participation de pays européens aux OPEX ; le Président de la République avait également fait des déclarations en ce sens. Où en est-on ? La question s’est aussi posée de savoir si le ministère de la Défense doit assumer seul les dépenses des OPEX.

Si l’on considère l’ensemble du budget de la mission, on voit bien que le compte n’y est pas : on est plus près de 29,5 milliards d’euros que de 30,93 milliards. Dans ces conditions, la Défense est-elle en mesure d’assumer toutes ses missions ? Avez-vous dit au Gouvernement que vous devriez renoncer à certaines d’entre elles, compte tenu par ailleurs des difficultés opérationnelles soulevées par les OPEX ?

M. Régis Juanico. Bien que cette audition soit consacrée à l’exécution des crédits de 2013, je veux interroger le chef d’état-major des armées et le délégué général à l’armement sur le rapprochement, annoncé par le Gouvernement, entre l’entreprise publique Nexter et l’entreprise allemande Krauss-Maffei Wegmann, en vue de constituer le leader européen de l’armement terrestre, étant entendu que l’État français en détiendrait 50 % du capital. Dans la Loire, le groupe Nexter est un gros employeur. Pouvez-vous nous rassurer, et rassurer les salariés, sur la complémentarité des deux entreprises, qu’il s’agisse des exportations, de la gamme des produits et des compétences et savoir-faire ? Ne doit-on pas attendre des rationalisations en matière de moyens d’étude, de recherche et développement ou de services achats ? Des suppressions de poste sont-elles à prévoir ? On parle aussi d’une localisation du siège de la nouvelle entité aux Pays-Bas : quelle en serait la justification ?

M. Patrick Ollier. On ne peut évidemment faire reproche aux responsables militaires de faire avec ce qu’ils ont, c’est-à-dire avec ce qui a été voté par la majorité.

Quels choix stratégiques conseilleriez-vous, au vu des crédits disponibles ? Faudra-t-il sacrifier les OPEX ou la dissuasion nucléaire ? La doctrine de la France sera-t-elle remise en cause ? Le Président de la République ira-t-il plus loin que ne le laissent entendre ses déclarations ? En plus des sacrifices que cela implique pour notre politique internationale, les conséquences seront terribles pour l’emploi et les entreprises : quel est votre sentiment sur ce point ? Pour avoir présidé la commission des Affaires économiques pendant dix ans, je connais le poids de l’industrie de la défense dans l’économie nationale.

M. Xavier Bertrand. Quel est, mon général, l’état d’esprit de nos militaires, au vu de tout ce qui a été dit sur la LPM ? Et quel est, monsieur le délégué général, celui des industriels ? Pour eux, après les déclarations du Président de la République confirmées par le Premier ministre et les propos rassurants du ministre de la Défense, la visibilité devrait être entière : est-ce le cas ?

Enfin, le ministre de la Défense nous a dit que les instructions étaient données, sur les MRTT entre autres. En tant que délégué général, avez-vous eu confirmation des financements alloués aux contrats signés dans le cadre de l’exécution de la LPM ?

Mme Valérie Pécresse. Je m’associe aux questions posées par Xavier Bertrand.

M. le chef d’état-major des armées. Je laisserai le délégué général pour l’armement et le contrôleur général des armées répondre aux questions qui les concernent plus précisément.

Sur le moral des troupes, je ne suis pas ici pour vous raconter des sornettes mais pour vous donner une appréciation objective. Nous avons de belles armées, et je suis fier d’être à leur tête. Il ne faut pas confondre les inquiétudes pour l’avenir avec l’engagement en opération. Aujourd’hui, 7 500 soldats participent aux OPEX, et plus de 20 000 sont engagés à l’extérieur de la métropole. Nous pouvons en être fiers, et c’est à juste titre que notre armée est respectée et admirée à travers le monde. Ces soldats font remarquablement leur métier, non seulement en opération mais aussi au quotidien. Nous sommes aussi parvenus à les fidéliser.

Leur moral est par ailleurs très contrasté selon les lieux et les unités. Ceux qui sont engagés en OPEX sont bien équipés, bien entraînés et ils ont un moral de vainqueurs. Nous n’avons jamais eu des soldats d’une telle qualité depuis des dizaines d’années : je ne le dis pas à la légère, et pourrais vous le démontrer.

Pour les personnels confrontés aux réformes, le moral dépend des lieux et des cursus personnels : ils peuvent nourrir des inquiétudes, par exemple, sur le modèle de ressources humaines que nous construisons, les restructurations, l’arrivée de tel ou tel équipement ou les programmations. Le moral n’est pas très bon, notamment, à Paris et en région parisienne ; en tout cas il ne s’améliore pas, car le phénomène n’est pas nouveau. Par le fait, nous enchaînons une deuxième réforme après celle mise en œuvre en 2007 : à une première déflation de 45 000 postes succède une seconde de 34 000, avec les changements profonds que cela suppose dans les unités et les états-majors parisiens. La fragilité du moral qu’on y constate est une préoccupation quotidienne pour moi, car mon action se fonde tout entière sur les hommes et les femmes des armées.

J’en viens aux économies à réaliser d’ici à la fin du mois de juin. Afin de tenir les objectifs de la LPM, nous avons engagé une réforme profonde, axée sur trente et un chantiers majeurs. Un peu plus de la moitié d’entre eux sont conduits par le chef d’état-major des armées, et les autres par le SGA et le DGA. L’organisation mise en place nous permet de suivre ces chantiers. Le Premier ministre a d’ailleurs déclaré que la Défense ne paierait pas deux fois. La LPM, je le rappelle, implique une décrue de 40 milliards d’euros sur la période 2014-2019 par rapport au précédent Livre blanc, à périmètre comparable. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant qu’il soit difficile de trouver des sources d’économies dans les effectifs.

Les chantiers dont j’ai parlé ne produiront pas tous leurs effets immédiatement : on peut donc s’attendre à un cap difficile en 2015 et 2016. Afin de privilégier les forces, nous cherchons les déflations, à raison des deux tiers, dans leur environnement : la tâche est donc ardue. Des analyses fonctionnelles sont menées afin d’éviter une déstructuration de l’organisation dans son ensemble ; cependant, je ne partage pas le pessimisme qui vient de s’exprimer. Un homme sans souci est proche du désespoir, dit-on ; pour ma part je suis plein d’espérance. Nous tiendrons les objectifs de déflation, j’en suis convaincu, et ce sans compromettre notre organisation, à une condition cependant : que le Livre blanc, la LPM et le projet Cap 2020 respectent le pied de colonne budgétaire. Les REX restent effectivement un point d’attention majeur, avec deux dossiers urgents : les 250 millions d’euros en moins pour 2014 et le 1,5 milliard pour 2015. Il faudra respecter, dans la construction du triennal, le pied de colonne à 31,4 milliards pour 2015 si l’on veut bâtir l’édifice prévu ; en d’autres termes, toute la LPM, rien que la LPM. La copie générale est cohérente, mais la cohérence n’implique pas l’absence de difficultés. Cette copie, il faut donc la défendre, en restant vigilant sur les difficultés.

Le surcoût des OPEX atteindra quelque 775 millions d’euros, même si l’expérience des années antérieures m’incite à la prudence, car nous ne sommes qu’à la moitié de l’année. La déflation des effectifs sera plus lente que prévu au Mali et en RCA. Le socle de 450 millions avait été prévu en fonction d’une moyenne annuelle ; il faudra compenser le surplus d’une manière ou d’une autre. C’est là l’enjeu du traditionnel calcul de fin de gestion : outre les 250 millions d’euros de REX, des crédits sont encore gelés et le report de charges se monte à 3,45 milliards.

J’appelle bien entendu de mes vœux l’aide européenne pour les OPEX et leur non-intégration dans le calcul du déficit. La LPM est en effet taillée au plus juste en ce domaine ; aussi la coopération internationale, qu’elle soit bilatérale ou multilatérale, qu’elle vienne de l’OTAN ou de l’Union européenne – comme à Koulikoro au Mali –, est-elle nécessaire. Tout ce qui est source d’économies est naturellement bon à prendre. Quoi qu’il en soit, pour répondre directement à une question qui m’a été posée, à ce jour, je n’ai pas eu à annoncer aux autorités politiques qu’une mission était abandonnée faute de moyens.

M. le délégué général pour l’armement. On peut distinguer cinq thèmes dans les questions qui m’ont été posées : le report de charges ; l’exécution du budget 2014 et les commandes d’équipement qu’on peut imputer sur celui-ci ; les perspectives ultérieures et leur impact sur les décisions présentes ; les conséquences sur l’activité industrielle ; la structure de la DGA et, à travers elle, les relations entre le ministère de la Défense et Bercy.

Le report de charges du programme 146 s’élève à 2,4 milliards d’euros au terme de l’exercice 2013, dont ont été retranchés 650 millions d’euros. La LPM, monsieur Launay, a été construite avec la perspective, non de réduire, mais de maintenir ce report à 2 milliards : cela suppose une gestion tendue, mais tenable au vu des intérêts moratoires suscités. Par expérience, un report de charges de 1 milliard d’euros – soit un peu plus d’un mois d’exécution budgétaire – nous paraît pour ainsi dire normal ; mais 2,4 milliards, cela commence en effet à faire beaucoup, surtout qu’il est difficile de prévoir l’évolution de ce report dans les années à venir.

La trésorerie française au sein de l’OCCAr sera bientôt complètement amenuisée. Les grands groupes industriels peuvent supporter plus aisément que d’autres des non-paiements liés au report de charges – notamment par des conditions d’accès au crédit plus favorables –, mais ils ne sont ni des banques, ni des organisations de charité publique ; en d’autres termes, ils répercutent le manque à gagner en ne payant plus leurs fournisseurs. Les effets du report sont donc plus sensibles pour les entreprises de taille intermédiaire et les PME ; de plus, ce dernier touche majoritairement des industriels dont la Défense n’est pas la spécialité principale. Le civil représente 80 % des activités d’Airbus, plus de 50 % de celles de Thales et 75 % de celles de Dassault Aviation ; en réalité, seules les entreprises DCNS et Nexter peuvent être considérées comme des entreprises de défense à part entière.

L’exécution budgétaire de 2014 se traduit par un reflux de 350 millions d’euros et une augmentation de 500 millions, dont 250 millions pour le PIA, lui-même ciblé sur les actions du Centre national d’études spatiales – CNES – et du CEA grâce au transfert des crédits du programme 191 vers le 146. Autrement dit, les programmes de recherche duale seront en grande partie financés, à plus de 50 % via des recettes extra-budgétaires. Reste à savoir comment trouver les 250 millions d’euros restants et comment les utiliser, selon qu’ils proviendront ou non du PIA. Les ressources issues de la vente des participations de l’État ne sont affectables, je le rappelle, qu’au désendettement de l’État ou à d’autres opérations capitalistiques.

Le ralentissement des commandes en 2014 tient d’abord au manque de visibilité sur les 500 millions d’euros de compensation ; s’est également posée la question des recettes extra-budgétaires issues de la cession de fréquences de 700 MHz de la télévision numérique terrestre – TNT –, dont 1,5 milliard en 2015. Sur ce sujet, une mission associe l’Inspection générale des finances, la DGA, le Contrôle général des armées et l’Agence des participations de l’État ; sans dévoiler de grands secrets, on peut pronostiquer que les recettes ne seront pas encaissées avant 2016, et qu’elles se situeront plutôt autour de 2,4 milliards. Cela pose donc un problème de fond pour le financement des équipements. Or, en la matière, les contrats sont de très longue durée. La livraison de la dernière frégate multi-missions est prévue pour 2022, celle du premier MRTT pour fin 2018 au plus tôt et celle du véhicule blindé multi-rôles – VBMR – pour 2018 également. Une visibilité à dix ans est donc indispensable, sans parler du sous-marin Barracuda, dont le contrat est déjà notifié, pour une livraison du dernier attendue seulement en 2028. Bercy nous reproche une certaine rigidité dans la dépense ; mais les contrats sont ainsi notifiés. Quoi qu’il en soit, la question sera réexaminée lorsque nous aurons toute la visibilité voulue sur la programmation triennale et sur l’exercice 2015 ; le ministre de la Défense organisera des concertations sur ce point d’ici aux vacances d’été. La DGA souhaite bien entendu que tous les contrats prévus soient notifiés.

Si toutes les recettes issues de la vente des fréquences ne sont pas au rendez-vous en 2015, et s’il manque 1,5 milliard, de deux choses l’une : ou l’on accroît le report de charges, qui équivaudra alors à cinq mois de trésorerie – ce qui conduit n’importe quelle entreprise devant le tribunal de commerce –, ou l’on engage un nouveau PIA, dont les crédits devront alors être consommés par des opérateurs habilités. La question n’est pas encore posée, mais devra l’être, selon nous, dans le projet de loi de finances pour 2015.

Le secteur de l’armement représente aujourd’hui 165 000 emplois ; ses exportations, d’un montant de 6,5 milliards d’euros l’an dernier, devraient bientôt se situer au même niveau que la production nationale. Au reste, plus les investissements nationaux sont faibles, plus les entreprises vont chercher des marchés ailleurs : Éric Trappier l’a rappelé en termes peu diplomatiques lors d’une audition à l’Assemblée.

La relation de la DGA avec Bercy a toujours été un peu conflictuelle, monsieur Cornut-Gentille, et la question est peut-être de trouver un amortisseur. La trésorerie de l’OCCAr permet d’amortir les flux de gestion des programmes en fonction des dotations des États. Ne pourrait-on sereinement envisager une logique comparable ? S’agissant de l’évolution du statut de la DGA, une telle réflexion n’aurait aucun effet à court terme et ne dispense pas, en tout état de cause, d’apporter des solutions budgétaires pour la fin de l’exercice 2014 et pour l’exercice 2015.

Le programme 146 dispose d’une réserve de 500 millions d’euros en crédits de paiement, et la question des OPEX n’est pas nouvelle : la DGA a donc l’habitude d’y faire face.

Nous sommes tous attachés à l’industrie nationale, et nous efforçons de la soutenir dans la mesure du possible, en particulier grâce aux crédits d’innovation ou aux études amont. Cela dit, la réglementation bruxelloise impose des contraintes de plus en plus strictes, et les pays qui s’en exonèrent sont de plus en plus souvent rattrapés par la patrouille – la République tchèque l’a été, par exemple, sur l’achat d’avions de gré à gré. Le ministre de la Défense en est conscient, puisqu’il a excipé de l’article 346 du traité de l’Union pour le programme Scorpion ; mais l’on ne peut utiliser cette procédure à chaque fois : il faut la réserver aux dossiers prioritaires.

Pour le PPT, deux groupes étaient en concurrence, le consortium mené par Renault Trucks d’une part, celui formé par le groupe alsacien Lohr – et sa filiale Soframe – et Iveco de l’autre ; c’est le second qui l’a emporté. Je rappelle au passage que le groupe Iveco emploie environ 10 000 personnes en France, en particulier dans la région de Limoges. Renault Trucks est implanté à Bourg-en-Bresse et il emploie également des personnes en France, mais il appartient à Volvo, groupe suédois. Bref, le critère de nationalité des entreprises doit être relativisé. Les Britanniques ont coutume de dire que tous ceux qui produisent des emplois sur leur territoire – et y paient leurs impôts – sont britanniques…

M. le secrétaire général pour l’administration. Je partage l’analyse du général de Villiers sur le moral des troupes – qui dépend effectivement des lieux, des cursus personnels et de l’ampleur de la réforme pour les services concernés – comme sur la difficulté de la réforme, dont il ne faut pas oublier qu’elle succède à une première déjà difficile à mettre en œuvre. À cet égard, je veux souligner la fragilité des structures de soutien, appelées à contribuer pour deux tiers aux réductions d’effectifs alors qu’elles subissent déjà de fortes contraintes.

Sur Louvois, les difficultés rencontrées en 2012 et 2013 sont pour l’essentiel derrière nous ; le mécanisme des avances est à peu près stabilisé ; il nous reste à gérer le problème de la récupération des indus. Le système demeure néanmoins fragile, et sa coordination avec les systèmes d’information des ressources humaines des différentes armées problématique.

Enfin, le projet de loi de finances pour 2015 contiendra un article tendant à prolonger au-delà de 2014 le mécanisme de récupération intégrale des produits de cession par le ministère de la Défense : j’appelle votre attention sur ce point, dont dépendent certaines ressources exceptionnelles.

M. le délégué général pour l’armement. Les nouveaux métiers, notamment dans le domaine de la cyberdéfense, imposent de recruter de nouveaux ingénieurs. La DGA doit aussi s’adapter au passage à l’industrie numérique 2.0, ce qu’elle ne pourra faire qu’avec des moyens. Si je n’en demande pas plus que ceux fixés par la LPM, à l’instar du général de Villiers, je demande à tout le moins qu’ils soient effectivement mobilisés.

Sur Nexter, monsieur Juanico, un protocole d’accord a été signé la semaine dernière pour l’ouverture des comptes. L’État continuera, via Nexter, de détenir 50 % du capital de la future coentreprise ; le siège sera effectivement établi à La Haye, pour des raisons faciles à imaginer… L’affaire remonte à quatre ans. Nous avions été étonnés, alors, que la famille Bode-Wegmann, propriétaire de Krauss-Maffei Wegmann, accepte l’idée d’une présence durable de l’État au sein du groupe : la raison est assurément que cette présence assure une pérennité des commandes.

Les deux sociétés sont complémentaires, sur leurs produits – Krauss-Maffei Wegmann a vendu quelque 3 000 chars Leopard dans le monde, à des prix très rentables –, et Nexter dispose de produits d’excellence, tels le VBCI, les tourelles ou le camion équipé d’un système d’artillerie, le Caesar. La différence est que la société Krauss-Maffei Wegmann s’est spécialisée dans l’export, alors que Nexter est beaucoup plus empruntée sur ce terrain – situation anormale compte tenu de la qualité de ses produits et des investissements dont ils ont fait l’objet. Au char Leclerc et au Leopard 2 devrait donc logiquement succéder un engin hybride, dont la base roulante proviendrait du savoir-faire de Krauss-Maffei Wegmann, et les tourelles, les conduites de tir et les systèmes d’armes, de celui de Nexter et de Thales. L’opération vise aussi à consolider une société qui, comme General Dynamics ou BAE Systems, peine à l’exportation, où les Chinois deviennent très agressifs, notamment au Moyen-Orient.

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Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 9 juillet 2014 à 9 heures

Présents. - M. Éric Alauzet, M. François André, M. Laurent Baumel, M. Xavier Bertrand,
M. Christophe Caresche, M. Christophe Castaner, M. Alain Claeys, M. Romain Colas,
M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz,
M. Jean-Louis Dumont, M. Olivier Faure, M. Alain Fauré, M. Marc Goua, M. Régis Juanico,
M. Jérôme Lambert, M. Jean-François Lamour, M. Jean Launay, M. Marc Le Fur,
M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, M. Michel Pajon, Mme Valérie Pécresse,
Mme Christine Pires Beaune, Mme Monique Rabin, M. Alain Rodet, M. Philippe Vigier

Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Dominique Baert, M. Marc Francina, M. Jean-Claude Fruteau, M. Jean-Pierre Gorges, Mme Arlette Grosskost, M. Patrick Lebreton,
M. Pierre Moscovici, M. Thierry Robert, M. Pascal Terrasse, M. Michel Vergnier

Assistait également à la réunion. - M. Philippe Meunier

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