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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mercredi 8 juin 2016

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 93

Présidence de M. Dominique Raimbourg, Président

– Communication de M. le Président (déplacement au TGI de Créteil et à la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy avec le Président de la commission des Lois du Sénat) 2

– Examen de la proposition de loi constitutionnelle visant à rendre constitutionnel le principe d’indisponibilité du corps humain (n° 1354) (M. Philippe Gosselin, rapporteur)

– Examen de la proposition de loi visant à lutter contre le recours à une mère porteuse (n° 2706) (Mme Valérie Boyer, rapporteure)

– Examen de la proposition de loi relative à l’exercice, par la Croix Rouge française, de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux (n° 3774) (Mme Françoise Dumas, rapporteure)

La réunion débute à 10 heures 05.

Présidence de M. Dominique Raimbourg, président.

La Commission entend une communication de M. Dominique Raimbourg, Président.

M. le président Dominique Raimbourg. Avant d’en venir à l’examen des trois propositions de loi inscrites à l’ordre du jour, je souhaite vous rendre compte du déplacement que j’ai effectué, jeudi dernier, avec M. Philippe Bas, président de la commission des Lois du Sénat, au tribunal de grande instance de Créteil puis à la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy.

Ce déplacement s’inscrivait dans le prolongement de notre séance de travail qui a eu lieu, la veille, avec la Cour des comptes à propos du budget de la justice. Nous n’avons pu que constater, sur le terrain, les difficultés réelles auxquelles font face les tribunaux et que subissent les chefs de cour et l’ensemble des personnels.

Les carences dans le domaine informatique, par exemple, sont telles que, à Créteil, c’est un fonctionnaire mis à disposition par le conseil départemental en vertu d’une loi antérieure à la décentralisation qui assure, de son propre chef, la maintenance du réseau. Il a lui-même développé un logiciel permettant de suivre le trajet des détenus, depuis leur arrivée au dépôt jusqu’à leur comparution. Étant de bonne volonté – honneur aux hommes de bonne volonté ! –, il se propose de mettre en place, sur son temps libre, le même système à Bobigny.

Nous avons observé des difficultés du même ordre à la maison d’arrêt de Bois-d’Arcy, où le taux d’occupation dépasse les 170 %, dans un établissement vétuste, pensé par un architecte « créatif » qui a eu l’idée de faire desservir l’ensemble des cellules par un escalier unique, central et métallique autour duquel tous les bâtiments sont ordonnancés. Les personnels de la maison d’arrêt sont inquiets, d’autant qu’une bonne partie d’entre eux, qui sont stagiaires au sens de la fonction publique, demandent, dès leur titularisation, leur mutation vers leur région d’origine. La rotation est donc très élevée.

Vous trouverez sur le site de l’Assemblée nationale, et plus précisément sur la page de la Commission, un petit film retraçant notre visite. Mais je souhaite particulièrement attirer votre attention sur la nécessité de ne plus légiférer en matière de procédure sans penser aux moyens indispensables à la mise en œuvre des réformes et au surcroît de travail que cela peut représenter pour les personnels. Emportés parfois par notre furia législative, nous faisons preuve d’une inventivité procédurale que l’appareil judiciaire n’a pas les moyens de suivre sur le terrain. A l’occasion de ce déplacement, j’ai pu le constater encore une fois.

*

* *

La Commission en vient à l’examen, sur le rapport de M. Philippe Gosselin, de la proposition de loi constitutionnelle visant à rendre constitutionnel le principe d’indisponibilité du corps humain (n° 1354) et, sur le rapport de Mme Valérie Boyer, de la proposition de loi visant à lutter contre le recours à une mère porteuse (n° 2706).

M. Philippe Gosselin, rapporteur. Mme Valérie Boyer et moi-même vous proposons d’examiner deux propositions de loi concernant la gestation pour autrui (GPA). Nous avons en effet travaillé en commun et procédé ensemble aux auditions nécessaires à l’élaboration de ces deux propositions de loi, qui constituent les deux étages d’une fusée destinée à affermir le principe de l’interdiction de la gestation pour autrui, alors que celui-ci semble de plus en plus menacé, au vu notamment du nombre croissant d’États dans le monde qui permettent, explicitement ou implicitement, le recours à la GPA. Si notre corpus juridique semble assez solide, du moins en ce qui concerne notre droit interne, il n’est plus protégé, en réalité, que par des digues de sable.

On ne rappellera jamais assez ce qu’est en réalité la gestation pour autrui : une marchandisation du corps de la femme, une réification, la logique de marché poussée à l’extrême, qui en incite certaines, par besoin d’argent, à céder à une forme de prostitution.

Les républicains de tous bords doivent donc s’unir pour lutter contre la GPA, et ces propositions de loi peuvent ici faire office de passerelles, dans le prolongement de l’initiative qu’a prise Mme Laurence Dumont, le 2 février dernier, en organisant des Assises pour l’abolition universelle de la maternité de substitution. Il faut en effet dire stop à la réification et à la marchandisation du capital humain, et affirmer avec force qu’il ne saurait y avoir de GPA ou de maternité de substitution « éthique » – qu’elle concerne des couples hétérosexuels ou homosexuels. C’est un oxymore, une atteinte intrinsèque au respect fondamental des droits humains, la négation de la dignité humaine. Surmontons donc nos différences pour nous retrouver dans l’affirmation du respect des droits humains. À défaut, les générations suivantes ne manqueront pas de nous juger durement.

Je parlais d’une fusée à deux étages. Il y a d’abord une proposition de loi constitutionnelle, que j’ai déposée en septembre 2013 et qui vise à inscrire dans la Constitution le principe d’indisponibilité du corps humain. Il y a ensuite une proposition de loi ordinaire, déposée par Valérie Boyer et qui a pour objet de renforcer l’arsenal juridique relatif à l’interdiction de la GPA. J’ajouterai, bien que cela ne soit pas de notre ressort ici, qu’il faudrait à cette fusée un troisième étage, à savoir une action vigoureuse au plan international. La France doit en effet prendre la tête de ces pays qui entendent abolir la gestation pour autrui jusqu’à l’extérieur de leurs frontières.

Je ne sous-estime pas la difficulté et n’oublie pas que les « standards » divergent selon les peuples, mais certaines causes, qui paraissaient des causes perdues, ont fini un jour par triompher. Je pense en particulier à l’abolition de l’esclavage, à laquelle certains pays, aujourd’hui parfaitement à l’aise avec les mères porteuses, se sont ralliés après 1848, continuant à organiser la ségrégation raciale sur leur territoire alors que le xixe siècle était achevé depuis longtemps. Je ne vois donc pas à quel titre ces pays où la GPA est une pratique parfaitement organisée devraient nous servir de modèles. Je refuse en tout cas le « dumping éthique », cette forme d’alignement sur le moins-disant moral qui rallie à la loi du marché des hommes et des femmes dont nous n’ignorons pas la douleur de ne pas pouvoir être parents, mais à qui nous disons avec empathie qu’il y a, derrière tout cela, des enfants dont l’intérêt n’est pas forcément d’être ainsi conçus. Posons-nous en effet la question des conséquences physiques et psychologiques pour la mère qui a porté l’enfant, et pour ce dernier.

Il nous paraît donc important d’user des pouvoirs législatif et constituant qui nous ont été confiés par nos concitoyens pour légiférer aujourd’hui sur la GPA.

Quel est en effet, aujourd’hui, le statut du principe d’indisponibilité du corps humain ? C’est un principe d’ordre public consacré par le juge, en particulier depuis l’arrêt de la Cour de cassation du 31 mai 1991, dans lequel l’assemblée plénière a considéré que la convention par laquelle une femme s’engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l’abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d’ordre public de l’indisponibilité du corps humain qu’à celui de l’indisponibilité de l’état des personnes.

Ce principe n’a pas été explicitement affirmé par le législateur, mais il a, en revanche, fait l’objet d’une reconnaissance indirecte de sa part, puisque la loi de 1994 relative au respect du corps humain a introduit, aux articles 16 et suivants du code civil, des règles dont le respect concourt à son effectivité. Il en va ainsi du principe de non-patrimonialité du corps humain, de ses éléments et produits, ou encore de l’affirmation de la nullité des conventions portant sur la procréation ou la gestation pour autrui.

De fait, le corpus alors adopté par le législateur paraît consacrer, mais implicitement seulement, le principe d’indisponibilité du corps humain, tout en organisant, à titre exceptionnel, les conditions de la circulation de ses produits et éléments, laquelle se trouve régie par les principes de gratuité et d’anonymat, qu’il n’est donc pas question de remettre ici en cause.

Pourquoi inscrire dans la Constitution ce principe d’indisponibilité ? Ma proposition de loi constitutionnelle repose sur un constat clair : si la France s’est dotée, sous l’impulsion de François Mitterrand – et, une fois n’est pas coutume, je lui rends ici hommage – d’un corpus juridique particulièrement élaboré en matière de bioéthique, si elle a créé la première un Comité consultatif national d’éthique (CCNE) et a joué un rôle moteur dans l’élaboration de la convention d’Oviedo, les principes posés il y a un quart de siècle se trouvent de plus en plus fragilisés.

Depuis 1994, l’évolution législative se caractérise en effet par la constitution d’un double corpus juridique. D’un côté, les principes fondamentaux posés par la loi de 1994 relative au statut du corps humain – en particulier l’inviolabilité, l’intégrité et la non-patrimonialité du corps humain, ainsi que la primauté de la personne humaine – continuent à structurer le champ de la bioéthique ; de l’autre, le droit de la bioéthique, décliné dans un nombre croissant d’activités médicales et scientifiques, apparaît de moins en moins comme un droit d’exception.

Parallèlement, plusieurs décisions prises à différents niveaux, ces dernières années, en matière de filiation, constituent autant d’éléments de fragilisation des principes posés en 1994, comme celui de l’interdiction de la gestation pour autrui. Il en va ainsi de la circulaire de la garde des Sceaux du 25 janvier 2013, relative à la délivrance des certificats de nationalité française aux enfants nés à l’étranger d’une GPA, qui a ouvert une première brèche. Il en va également ainsi, au plan européen, de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) sur le droit des enfants au respect de leur vie privée – les fameux arrêts Mennesson et Labassee du 26 juin 2014. Tout en rappelant qu’elle ne se prononce pas sur la compatibilité de l’interdiction de la gestation pour autrui posée par un État membre avec la Convention européenne des droits de l’homme, la Cour a en effet jugé que le refus d’établir le lien de filiation entre des enfants issus d’une gestation pour autrui et leur père biologique portait atteinte au droit des enfants, au respect de leur vie privée, dont font partie les droits à la reconnaissance de l’identité et à l’établissement de la filiation. La Cour de cassation a commencé à en tirer les conséquences dans deux arrêts du 3 juillet 2015, tandis que la Suisse en tirait, dans un arrêt du Tribunal fédéral de septembre 2015, des conclusions radicalement différentes, ce qui montre bien que des lectures divergentes sont possibles ou, à tout le moins, qu’il était envisageable de saisir la Grande chambre de la CEDH en 2014, ce qui n’a pas été le cas. Les choses ne sont donc pas aussi claires que certains veulent bien le dire.

En définitive, il apparaît que, si aucune recherche n’est venue bouleverser fondamentalement le champ de la bioéthique ces dernières années, l’approfondissement des techniques existantes et, surtout, leur diffusion croissante élargissent la portée des questions d’ordre éthique. Les coups de boutoir portés au principe de l’indisponibilité du corps humain se multiplient, rendant d’autant plus nécessaire son inscription dans la Constitution.

L’idée n’est pas nouvelle. Dès 1975, la Commission spéciale des libertés présidée par Edgar Faure achevait ses travaux par l’adoption, en 1977, d’une proposition de loi constitutionnelle sur les libertés et les droits de l’homme, qui prévoyait notamment que « tout homme a droit à la vie et à l’intégrité physique et morale ».

En 1993, dans son rapport remis au Président de la République, le Comité consultatif pour la révision de la Constitution présidé par Georges Vedel proposait de compléter l’article 66 de la Constitution avec un alinéa reconnaissant le droit au respect de la dignité de la personne.

Plus récemment, les comités Balladur et Veil se sont interrogés sur l’opportunité d’inscrire dans le Préambule de la Constitution le principe de la dignité de la personne humaine, principe à valeur constitutionnelle affirmé en 1994 à l’occasion de l’examen des lois de bioéthique.

Aujourd’hui, je considère que, eu égard aux défis croissants auxquels la société française est confrontée, il convient de ne plus différer l’inscription dans la Constitution du principe d’indisponibilité du corps humain. Depuis quarante ans que la question se pose, nous avons donné du temps au temps.

À cet égard, je ne partage pas les conclusions relativistes du comité de réflexion sur le Préambule de la Constitution présidé par Simone Veil, selon lesquelles certains principes ne devraient pas être inscrits dans la Constitution au motif qu’ils seraient susceptibles d’évoluer avec le temps. On ne peut qu’être inquiet pour la protection des personnes, et notamment des individus les plus fragiles ou les plus faibles, de la proclamation d’un tel relativisme ! La dignité est ou n’est pas ; il en est de même pour le respect de l’être humain, qui n’est pas à géométrie variable.

La Constitution, ce sont les libertés essentielles. Or, dès lors qu’elle touche à la vie et à la mort de l’être humain, à sa santé, à la qualité de son existence ou encore au choix de sa descendance, la bioéthique ne se situe-t-elle pas au cœur même de nos libertés les plus fondamentales ?

La Constitution doit intégrer les principes que nous énonçons, car elle transmue en droit un système de valeurs qui sont au centre des problématiques biomédicales. Il serait en outre paradoxal qu’elle contienne des principes propres à la protection de l’environnement, tout en demeurant muette sur la protection de l’être humain.

Enfin, ce n’est pas parce que le législateur ou le juge a reconnu tel ou tel principe que le constituant doit s’en abstenir. Je rappelle, à cet égard, que le comité présidé par le doyen Vedel allait dans ce sens, considérant que certains principes inscrits dans la loi devaient être élevés au rang de principes constitutionnels, précisément pour les préserver d’éventuels revirements de la législation ou de la jurisprudence. Le constituant peut et doit avoir le dernier mot ; il doit savoir surmonter la sentence d’une cour. Je vous invite donc à inscrire dans l’article 1er de la Constitution le principe d’indisponibilité du corps humain.

Je veux être ici très précis. L’inscription dans la Constitution du principe d’indisponibilité du corps humain n’a pas pour objet de proscrire le don d’organes, de moelle osseuse ou de sang et de ses dérivés, un don altruiste et respectueux, fondé sur le volontariat ; je me suis d’ailleurs moi-même engagé en faveur du collectif « Don de soi, don de vie », cette grande cause nationale que j’ai eu l’honneur de présider en 2009. Je précise également que cette inscription n’a pas non plus pour objet de remettre en cause le droit à l’interruption volontaire de grossesse. Elle vise simplement à clarifier la place, dans la hiérarchie des normes, du principe fondamental qu’est l’indisponibilité du corps humain et à prévenir ainsi tout risque de remise en cause de l’interdiction de conclure des conventions de gestation pour autrui.

Je crois que les hommes et les femmes de demain nous jugerons sévèrement si nous ne faisons rien. Avec les mères de substitution, je le dis solennellement, mais sans emphase, c’est l’avenir d’une certaine forme d’humanité que nous avons entre les mains.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Je remercie votre Commission de m’accueillir en son sein pour l’examen de cette proposition de loi qui, comme celle que j’ai déjà eu l’honneur de défendre devant vous à la fin de l’année dernière, concerne le respect de la dignité humaine.

La proposition de loi visant à lutter contre le recours à une mère porteuse forme naturellement un tout avec la proposition de loi constitutionnelle que vient de présenter M. Philippe Gosselin. Comme cette dernière, elle devrait nous rassembler bien au-delà des clivages partisans : quand il s’agit de dignité humaine, on ne saurait en effet être de droite ou de gauche.

Les auditions que nous avons menées m’ont confortée dans la conviction que l’opposition à la gestation pour autrui – préférons l’expression de « grossesse pour autrui », et évitons l’emploi d’un mot appartenant au lexique vétérinaire – était un sujet qui devait rassembler tous ceux qui portent une même vision de l’homme et de l’éthique.

Cette proposition de loi entend protéger des principes et des valeurs que nous avons en partage, à savoir le respect de la dignité de la personne, la garantie de l’indisponibilité du corps humain face aux tentatives d’aliénation et de marchandisation, la protection des femmes et des enfants contre toute forme d’exploitation et, in fine, la préservation de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui passe avant tout par le fait de ne pas être cédé comme une vulgaire marchandise. Elle n’a du reste qu’une ambition : concrétiser les engagements pris par nombre de nos collègues de la majorité et par le Gouvernement en matière d’interdiction de recours à la procréation pour autrui, pratique contraire aux principes essentiels de notre droit.

En effet, depuis les deux arrêts du 26 juin 2014 rendus par la CEDH, dans les affaires Mennesson et Labassee contre France, notre politique de prohibition de la GPA est plus fragilisée que jamais, et nous sommes aujourd’hui face à l’alternative suivante : soit nous admettons qu’elle existe et nous nous soumettons à la volonté d’autres pays ou de certains lobbys qui défendent cette pratique, soit nous jouons notre rôle de législateur, nous croyons en la politique, en ce qu’elle a de plus noble, et nous travaillons à renforcer notre droit pour empêcher ce trafic d’êtres humains.

La grossesse pour autrui ou la procréation pour autrui consiste pour un couple à conclure ce que l’on appelle une convention, mais qui est en réalité un contrat de cession, avec une femme, afin qu’elle porte un enfant qu’elle s’engage à abandonner au terme de sa grossesse. Bien souvent d’ailleurs, le contrat stipule que l’accouchement aura lieu par césarienne afin que la mère porteuse ne voie pas l’enfant et que celui-ci soit livré « tout beau, tout propre » aux parents acquéreurs.

Les progrès des techniques d’assistance médicale à la procréation ont permis une dissociation de la maternité gestationnelle et de la maternité génétique, rendant possible le transfert à la mère dite « porteuse » d’un embryon issu des gamètes des deux parents d’intention, de l’un d’entre eux et de celles d’un tiers ou encore de deux donneurs : cinq personnes peuvent ainsi être impliquées dans la venue au monde de cet enfant si cher – dans tous les sens du terme – et tant attendu. Bref, en autorisant la GPA, nous consacrons la maternité éclatée.

Pourtant, cette pratique est interdite en France depuis un arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation de 1991, dont la solution, qui s’appuie sur le respect des principes d’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes, a été inscrite dans le code civil par le législateur en 1994.

La grossesse pour autrui doit demeurer interdite pour plusieurs raisons, au premier rang desquels les risques physiques et psychologiques qu’elle fait courir à la mère porteuse. On ne peut en effet minimiser les risques pris par une femme qui va porter un enfant pour autrui. Si la grossesse n’est pas une maladie, ce n’est pas non plus une aventure anodine, et elle a des conséquences qu’il ne faut pas négliger. Il serait à ce propos intéressant de disposer d’études sérieuses sur l’état des mères qui portent un enfant pour autrui ; or il n’en existe aucune à ce jour.

Parmi les autres raisons qui doivent nous pousser à prohiber cette pratique figurent ensuite l’aliénation et la marchandisation du corps qu’elle représente, l’impossibilité d’inscrire cette pratique dans un cadre interdisant toute dérive. Je m’attarderai ici sur la notion de GPA éthique ou altruiste : pour reprendre l’expression d’une de nos collègues, ce n’est rien moins qu’une illusion « pathétique », car cela n’existe pas, et l’on parle toujours à travers cette expression de la chair et du sang de la femme qui porte l’enfant, semblant considérer, au mépris de ce qu’est réellement la nature humaine, la grossesse comme un état banal.

Je songe enfin au risque de survalorisation de la transmission génétique par rapport à d’autres formes de parentalité. Avec l’essor de la demande d’« un enfant génétiquement de soi », pour reprendre les termes du professeur René Frydman, avec la promotion de la GPA, nous assistons à une sorte de triomphe du père et à l’introduction à bas bruit du droit du sang dans nos pratiques et dans notre droit.

Contrairement à ce que certains peuvent penser, la GPA n’a absolument rien d’altruiste : elle consacre au contraire le triomphe du désir individuel sur le bien d’autrui, à commencer par le bien de l’enfant porté et celui de la mère porteuse. Que celle-ci soit consentante ou non – on pourrait d’ailleurs s’interroger sur la manière dont on recueille son consentement –, son corps n’en est pas moins réduit à l’état de bien meuble, tout comme le fruit de sa gestation, avec tous les risques médicaux que cela comporte.

On retrouve ici la définition inscrite à l’article 1er de la convention de 1926 relative à l’esclavage : « L’esclavage est l’état ou condition d’un individu sur lequel s’exercent les attributs du droit de propriété ou certains d’entre eux. » En effet, avec la GPA, l’enfant devient un produit, mis au monde sur commande. En défendant aujourd’hui la GPA, au nom du progrès ou, comme nous l’ont dit certains, de l’amélioration de la fertilité – un comble ! –, on fait régresser notre pays de près de deux siècles : cela revient à décréter que l’humain est une chose et que l’enfant fait l’objet d’un droit de propriété.

Avec la GPA, nous avons affaire à une adoption illégale, incluant commande, fabrication, traite et vente d’enfant. Or n’est-ce pas le premier droit de l’enfant que de ne pas être une marchandise, de ne pas être cédé ?

Pourtant, cette pratique fait l’objet d’un large consensus dans notre pays, d’autant plus large que l’effectivité de sa prohibition française est menacée ; et elle l’est doublement.

Premièrement, le non-respect de l’interdiction de recourir à la GPA est insuffisamment réprimé. Notre politique pénale en la matière sanctionne principalement les intermédiaires : en dehors des délits d’entremise en vue d’une adoption ou d’une gestation pour autrui, de provocation à l’abandon d’enfant et de supposition d’enfant, aucune infraction ne permet d’incriminer spécifiquement la présentation de cette pratique sous un jour favorable – au sens juridique de la formule – ou le fait d’entreprendre des démarches en vue d’une GPA. En outre, les sanctions notoirement faibles encourues pour les délits existants sont rarement mises en œuvre, compte tenu des règles de territorialité de la loi pénale française.

Deuxièmement, la CEDH, en condamnant la France, a exigé que notre pays transcrive à l’état civil français des actes de naissance établis à l’étranger en vertu d’une convention de gestation pour autrui, au motif – à mon sens fallacieux – que le refus de transcription porterait atteinte au droit des enfants au respect de leur vie privée, dont relèvent les droits à la reconnaissance de l’identité et à l’établissement de la filiation.

Ces arrêts, qui ont mis un terme à la jurisprudence dissuasive de la Cour de cassation, sont contestables et doivent être contestés. Car les enfants nés d’une GPA peuvent vivre normalement en France, hériter de leurs parents et acquérir la nationalité française. Vous n’ignorez pas, en effet, qu’ils deviennent français au bout de cinq ans de scolarisation en France. Ce ne sont donc pas eux qui sont gênés dans leur vie privée, mais leurs parents. Je ne vois pas en quoi cela leur porterait atteinte. Le Gouvernement français aurait dû contester ces arrêts devant la grande chambre de la CEDH au moment où ils ont été rendus. Il ne l’a pas fait ; je le regrette vivement, pour des raisons de fond, mais aussi parce que cela aurait montré à la France et au monde que nous ne sommes pas d’accord avec la GPA et que nous le manifestons par des actes concrets au lieu de nous contenter de paroles.

Aujourd’hui, le législateur a l’ardente obligation d’intervenir pour garantir l’effectivité de la prohibition en droit français des grossesses pour autrui. Tel est l’objet de la présente proposition de loi, qui vise à agir à trois niveaux.

En matière pénale, d’abord, les articles 1er et 2 créent de nouvelles incriminations permettant de sanctionner plus sévèrement la GPA, en particulier le fait d’obtenir ou de tenter d’obtenir la naissance d’un enfant par le recours à une mère porteuse, la provocation à la gestation pour autrui et la présentation de cette pratique sous un jour favorable. Il s’agit également d’étendre le champ d’application de la loi pénale française en cette matière, en supprimant la double exigence de réciprocité d’incrimination et de dénonciation officielle par l’État dans lequel les faits ont été commis, à laquelle est subordonnée la poursuite des délits commis par un Français à l’étranger.

J’insiste sur ces articles en raison des enjeux financiers de cette pratique : la fabrication et la vente d’enfants sont aujourd’hui un business international.

En matière civile, ensuite, l’article 3 permet au législateur de se prononcer sur cette délicate question de sorte que la CEDH, constatant que le droit français ne prive pas les enfants nés d’une GPA du droit à une vie privée normale, reconsidère sa position. Cet article tend en effet à maintenir la présomption de bonne foi dont bénéficient en France les actes d’état civil étrangers régulièrement établis, traduits et authentifiés. Cette règle permet aux enfants concernés de vivre dans notre pays comme n’importe quel autre enfant. En revanche, je vous inviterai à inscrire dans notre droit le refus de transcription des actes étrangers établis en vertu d’une convention de gestation pour autrui.

Au niveau international, enfin, aux termes de l’article 4, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les perspectives d’adoption d’une convention internationale interdisant la gestation et la procréation pour autrui, dans le prolongement des conventions existantes sur la traite des êtres humains et la vente d’enfants.

Je vous proposerai de compléter le texte par trois dispositions.

Premièrement, le Gouvernement devrait également remettre au Parlement un rapport sur les raisons pour lesquelles il n’a pas interjeté appel des deux arrêts de la CEDH et sur ses intentions de maintenir l’effectivité de la prohibition française.

Deuxièmement, je souhaite étendre l’extraterritorialité de la loi pénale française à l’ensemble des atteintes à la filiation, et non aux seules infractions créées par la proposition de loi.

Troisièmement, il convient de sanctionner pénalement la vente d’enfants, qui ne fait l’objet dans notre pays d’aucune incrimination spécifique, comme l’a fait observer le comité des droits de l’enfant de l’Organisation des Nations unies (ONU).

Ainsi que M. Philippe Gosselin l’a rappelé, nous avons un droit original de la bioéthique que nous devons à la volonté de notre ancien Président de la République ; l’exception française qu’est l’existence d’un Comité national d’éthique devrait servir d’exemple aux autres pays. Ce sont les lois de bioéthique qui ont conduit à la convention d’Oviedo, que la France a ratifiée et dont de nombreux États se sont inspirés. Nous avons un devoir de cohérence. Aucun d’entre nous ne veut d’une société où tout s’achète et où tout se vend, où la marchandisation triomphe. L’histoire nous oblige, notre héritage nous oblige : c’est un rendez-vous que nous ne devons pas manquer. Nous ne devons pas participer à la fabrication et au trafic d’êtres humains, qui rapportent des milliards et dans lesquels les femmes sont la matière première et les enfants des objets convoités. Ne soyons pas complices de cette production infinie ; ne réduisons pas le corps humain, la personne humaine à une simple marchandise ; inscrivons ce refus dans la loi. Tel est le sens de la proposition de loi que M. Philippe Gosselin et moi-même avons déposée. J’espère que le débat et l’adoption de nos amendements permettront de répondre aux attentes de ces femmes considérées comme des marchandises et de ces enfants que l’on a fabriqués pour les céder.

M. Jacques Bompard. Je salue le travail des rapporteurs, en particulier le texte de M. Gosselin. Car la question de l’indisponibilité du corps humain est cruciale si nous voulons que notre manière de considérer la politique se fonde de nouveau sur une anthropologie saine : animation du fœtus, refus de toute marchandisation du corps humain et politique publique enfin porteuse d’autres ambitions que les recherches sur l’embryon, la chasse aux trisomiques si bien évoquée par M. Jean-Marie Le Méné et toute une série d’incitations à peine masquées à déconsidérer l’inviolabilité de la vie, depuis son commencement jusqu’à son terme naturel.

J’ai adressé il y a peu au ministère de la santé une question écrite concernant une révolution scientifique susceptible de nous soustraire enfin à une logique qui ne pourra conduire qu’aux horreurs récemment révélées à propos du planning familial américain. Les organoïdes, cellules artificielles, sont en quelque sorte de mini-organes, découverts par MM. Shinya Yamanaka et John Gurdon, prix Nobel de médecine. Cellules pluripotentielles, elles ont la capacité d’opérer une transformation en n’importe quel genre de tissu du corps humain par le fait d’une stimulation adéquate. Or aucune politique publique ne soutient leur développement en France.

Il faut espérer que le texte que nous examinons permettra de faire de la vie le pivot de toute réflexion politique, pour que nous ne défassions pas ce que le politique devrait s’interdire de toucher : l’homme, digne non parce qu’on le désigne comme tel, mais justement parce qu’il est.

M. Jean-Christophe Lagarde. Le groupe de l’Union des démocrates et indépendants est favorable à la proposition de loi constitutionnelle. En effet, nous considérons que l’on ne saurait utiliser la personne humaine pour en produire une autre. Comme l’a répété M. Philippe Gosselin, il n’est pas question de ne pas pouvoir faire don de soi : il s’agit de ne pas pouvoir faire don d’un autre. Cette position est intimement liée à notre vision humaniste.

Ces dernières années, les évolutions législatives ont accompagné la science. Mais nous devons aussi savoir la diriger, l’encadrer, la limiter lorsqu’elle va au-delà de ce que nous pouvons admettre.

Si nous sommes confrontés au problème qui nous est ici soumis, c’est parce que d’autres pays, qui ne doivent pas nous servir de modèles, offrent cette possibilité et parce que des jurisprudences successives menacent notre capacité à décider de la limite à imposer au progrès technique au nom de l’humanisme.

Nous souhaitons que se dégage une majorité suffisante pour procéder à cette révision constitutionnelle. C’est un texte court, simple, dont je ne vois pas qui il pourrait choquer, et qui ne risque pas d’être interprété comme applicable au don d’organes, de sang ou à d’autres dons. Je le répète, avec la pratique de la GPA, il ne s’agit pas de faire don de soi, mais de faire don d’un autre ; en autorisant ce don, nous nous soumettrions à une logique marchande qui réduit l’être humain à un objet, le privant de son humanité.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Les questions qui se posent à nous sont lourdes de sens, car elles concernent le rapport à la vie. Alors que celui-ci semble généralement joyeux, car une naissance est toujours source de joie, tandis que notre rapport à la mort est toujours douloureux, ici le rapport à la vie dépend de l’instrumentalisation du corps d’autrui en vue de procréer – dans des conditions compliquées, qui n’empêchent pas le phénomène de se développer dans le monde entier.

Plutôt que de « gestation pour autrui », j’aimerais d’ailleurs que l’on parle de « maternité de substitution » : l’expression est plus claire, sans compter que le terme de gestation convient aux animaux, non aux femmes.

La France fait, avec l’Allemagne, figure d’exception : notre droit protège les femmes. La maternité de substitution est interdite en France, et le restera. Le problème est que des enfants sont là, qui ont été, qu’on le veuille ou non, achetés dans un autre pays du monde : on a payé une donneuse d’ovocytes inconnue et une femme qui a porté l’enfant et qui a juridiquement disparu au bout de quelques semaines, voire dès l’accouchement.

De plus, le contexte international est délicat. Ainsi, aux États-Unis, les conventions, longues de soixante à quatre-vingts pages, enrichissent toute une « batterie » de gens de droit qui en font leur métier, alors qu’en Grande-Bretagne aucune convention ni aucun transfert d’argent ne sont possibles. Or de nombreuses GPA ont lieu aux États-Unis, tandis qu’elles se raréfient en Grande-Bretagne, faute de candidates prêtes à s’exposer aux risques d’une maternité – lesquels ne concernent pas uniquement l’accouchement, mais englobent le développement de maladies hormono-dépendantes, par exemple. Le droit sur le fœtus, en particulier au moment de l’accouchement, les décisions à prendre en cas de difficulté et la situation de l’enfant ne sont pas non plus stabilisés au niveau international.

Si les questions posées sont donc pertinentes, il ne me paraît pas possible de les résoudre par ces deux textes principiels, qui n’abordent pas les problèmes techniques, fondamentaux, charnels auxquels pourraient être confrontées les femmes. En France, celles-ci sont protégées ; mais le sort de l’enfant reste pendant, étant donné les décisions de la CEDH. Les procureurs traitent les situations au cas par cas ; c’est très bien ainsi. Nous ne sommes pas prêts à nous engager dans ce débat jusqu’à son terme, qu’il s’achève par un oui ou par un non.

M. Philippe Gosselin, rapporteur. Pas encore !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. C’est votre opinion. Nous pensons qu’en France, il n’est pas temps.

On sait qu’existe en la matière un nomadisme, certains payant à l’étranger des sommes parfois considérables – 100 000 à 120 000 euros aux États-Unis –, pour des femmes par ailleurs très peu payées. Les intermédiaires apparaissent en nombre, y compris sur le territoire national, par le biais d’internet, où l’on trouve publicité et incitations. Le phénomène auquel nous sommes confrontés est donc bien plus complexe que l’objet de votre texte.

Pour ces raisons, le groupe Socialiste, écologiste et républicain ne vous suivra pas sur cette voie.

M. Guillaume Larrivé. Je voterai la proposition de loi ordinaire présentée par Mme Valérie Boyer, qui me semble avoir pour objet et pour portée de rendre effective la prohibition de la GPA. Car, si cette prohibition existe en droit français, où elle est même d’ordre public, comme l’ont dit nos deux excellents rapporteurs, c’est la question de son effectivité que nous devons nous poser, sur quelque banc que nous siégions.

De ce point de vue, les deux voies explorées par la proposition de loi de Mme Valérie Boyer sont tout à fait pertinentes.

D’une part, il faut qu’au pénal nous réprimions de manière plus sévère et plus effective les différentes interventions d’intercesseurs. C’est précisément le sens de la proposition de loi telle qu’elle sera amendée par la rapporteure.

D’autre part, il est essentiel que nous, législateur, intervenions pour remettre d’aplomb une situation que Mme Christiane Taubira, garde des Sceaux, avait traitée de manière assez funeste en demandant, dans sa circulaire du 25 janvier 2013, que soit accordé le certificat de nationalité française aux enfants nés à l’étranger par GPA. Nous avions alors été un certain nombre à saisir le Conseil d’État au contentieux afin que cette circulaire soit annulée pour excès de pouvoir. Le Conseil nous avait donné tort dans une décision du 12 décembre 2014. L’amendement CL10 de la rapporteure, qui modifierait le code civil pour disposer que « ne peut être transcrit à l’état civil l’acte de naissance établi en exécution d’une décision étrangère lorsque des indices sérieux laissent présumer l’existence d’un processus frauduleux comportant une convention de procréation ou de gestation pour le compte d’autrui », me semble tout à fait bienvenu en vue de casser cet arrêt du Conseil d’État et d’expurger notre droit des effets de la GPA sur le droit de la nationalité.

M. Erwann Binet. J’abonderai pour ma part dans le sens de Mme Le Dain.

La proposition de loi constitutionnelle me semble totalement inutile : l’indisponibilité du corps humain est un principe solide de notre droit, dont les contours sont précis et stables, et qui a valeur constitutionnelle puisqu’il découle du préambule de la Constitution. En modifiant cet équilibre, nous risquons de remettre en cause la force du principe et son champ d’application, ainsi que toutes les exceptions à celui-ci. À cet égard, vous avez parlé du don du sang, monsieur le rapporteur, mais vous aviez aussi évoqué au cours des auditions la recherche sur les embryons surnuméraires, les expérimentations médicales, l’interruption volontaire de grossesse et le don d’organes. Prenons donc garde de toucher à l’équilibre actuel, même si je ne doute pas de vos bonnes intentions.

J’en viens à la proposition de loi ordinaire. S’agissant d’abord de l’alourdissement des peines – dont nous avons déjà longuement discuté en examinant ici même, il y a quelques mois, la proposition de loi de notre collègue Leonetti –, j’ai de sérieux doutes, dès lors qu’un désir d’enfant est en jeu, quant au pouvoir dissuasif des sanctions que nous pourrions inscrire dans le code pénal, quelles qu’elles soient.

Par ailleurs, il est très difficile de prouver l’existence d’une GPA. La raison actuelle d’un refus de retranscription est la suspicion de GPA ; or, pour justifier une peine pénale, il faut plus qu’une suspicion. Le fait que, sur l’acte de naissance, le père soit français et la mère indienne, par exemple, ne suffit pas à établir formellement qu’il y a eu GPA.

Est-ce dans l’intérêt de l’enfant que l’on mette ses parents en prison ? Sur ce point aussi, j’ai quelques doutes.

Surtout, les parents risquent de chercher à contourner cette loi par des méthodes encore plus secrètes, encore moins encadrées, encore plus inacceptables.

Mme Boyer, vous proposez d’interdire de présenter le recours à la GPA sous un jour favorable. Ce pourrait être intéressant si les propos que vous avez tenus au cours des auditions n’éclairaient pas votre intention d’un jour nouveau : vous n’avez cessé de faire référence à un reportage diffusé il y a quelques semaines sur France 2, réalisé par des journalistes parfaitement indépendants, et qui n’avait rien d’un publireportage sur les agences de GPA. Je ne vous suivrai pas sur cette voie : nous n’avons pas à empêcher les journalistes de faire leur métier ; la liberté de la presse est un principe important dans notre pays.

Enfin, l’article 3, que vous proposez d’amender, annulait dans sa version initiale la valeur probante de l’acte de naissance étranger dans ses effets en France. S’il est assurément contestable de parler de « fantômes de la République », votre intention était ici tout bonnement d’en créer ! Cette idée a naturellement été critiquée par les plus motivés des participants aux auditions, y compris M. Gosselin, à bon droit. Vous la remettez en cause par voie d’amendement, mais je note que plusieurs des personnes que vous avez auditionnées sont favorables à la possibilité, que vous ne les avez pas dissuadées d’envisager, de retirer les enfants à leurs parents d’intention, comme on l’a fait en Italie – un cas qui fera probablement l’objet d’une condamnation de la CEDH au cours des mois qui viennent.

Deux questions se posent à nous. La première est celle de la GPA, dont il faut naturellement garantir et consolider l’interdiction en France par une convention internationale. Le Gouvernement l’a proposé dans l’hémicycle lors de l’examen de la proposition de loi de M. Leonetti et travaille en ce sens. Notre point de vue ne sera pas facile à défendre au niveau international – le Parlement portugais est favorable à la GPA, malgré le veto présidentiel annoncé ce matin –, mais c’est le seul moyen de réussir.

Le deuxième problème, à distinguer absolument du premier, est celui des enfants. Ceux-ci doivent pouvoir jouir de tous leurs droits, quel que soit leur mode de conception, car ils n’y sont pour rien. Je veux le dire aux enfants nés de GPA : il y a ici des gens qui ne sont pas favorables à la GPA, mais qui jamais ne parleront d’eux comme de marchandises ou de produits !

M. Patrick Mennucci. Très bien !

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Personne n’en parle en ces termes !

M. Gilbert Collard. Nous sommes au cœur de la question ontologique : quel est le devenir de l’être ? Sera-t-il marchandisable ou non ?

Dans ce contexte, l’alternative est simple : agir ou ne pas agir. Car le débat d’idées ne changera rien. On peut parler de maternité de substitution ou de gestation pour autrui : la querelle des mots traduit l’inquiétude de l’inconscient. Nous savons, que nous le voulions ou non, que la marchandisation du corps est devenue possible ; nous devrions tous avoir l’honnêteté de le reconnaître, quel que soit notre point de vue sur la question.

La chose n’est pas nouvelle : sous le Bas-Empire, des contrats de droit privé sur les esclaves affranchis permettaient la location de leur ventre. Cela montre que la location du ventre est liée à l’esclavage, par la possibilité de disposer du corps d’autrui.

Nous devrions réfléchir à ce problème ontologique, à l’heure où l’on cherche de plus en plus, à juste titre, à protéger la dignité de la personne.

La GPA, la convention de grossesse, la maternité de substitution – peu importe le terme – s’apparente du point de vue financier aux contrats de portage. C’est horrible ! Qu’on le veuille ou non, quelle que soit l’honnêteté dont chacun fait preuve dans la discussion, il s’agit d’acter le principe de séparation entre la grossesse et tous les liens psycho-affectifs qui lui sont associés. Dès lors, le capital humain devient un capital marchand.

Or les lois agissent sur la structuration des mentalités ; de sorte qu’en laissant exister, même de manière théorique, la possibilité de louer un ventre, on introduit dans les esprits l’idée que l’on fait « boutique mon corps » – comme on pouvait dire, à propos de la prostitution, « boutique mon c… ».

Bien sûr, il y aura des gens honnêtes, des familles désemparées, désespérées, dont il faut prendre la souffrance en considération. Mais il y aura aussi tous les escrocs, tous les financiers, tous les rapaces qui essayeront de tirer parti de la souffrance des uns pour faire le profit des autres.

Nous devons donc nous montrer très fermes, sans nous lancer des leçons de morale au visage : il n’y a pas ici de méchants et de gentils, de purs et d’impurs, mais une recherche, dans un monde en devenir qui est un peu effrayant.

Par conséquent, nous avons tout intérêt à aller dans le sens des rapporteurs.

M. Olivier Dussopt. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que je vais voter pour les amendements de suppression déposés par Mme Anne-Yvonne Le Dain, dont je suis signataire. Je souscris totalement aux arguments soulevés par la porte-parole du groupe Socialiste, écologiste et républicain, ainsi que par M. Erwann Binet. La proposition de loi constitutionnelle est inutile : l’intégrité et l’indisponibilité du corps humain sont garanties par le Préambule de la Constitution de 1946 et ont été consacrées par une décision du Conseil constitutionnel en 1971, confirmée en 1994. Nous n’avons donc pas besoin de modifier la Constitution dans le sens qui nous est proposé. S’agissant de la GPA, adopter la proposition de loi de Mme Boyer reviendrait à réécrire l’article 227-12 du code pénal qui interdit déjà cette pratique sur le sol français. Ces deux propositions de loi, constitutionnelle et ordinaire, sont de nature à rouvrir et à nourrir un débat qui n’a pas lieu d’être.

En outre, ce débat donne l’occasion de susciter le doute et la suspicion concernant la recherche sur les embryons, telle que prévue par la loi du 6 août 2013, ou les questions relatives à la bioéthique.

M. Philippe Gosselin, rapporteur. J’ai répondu à cela !

M. Olivier Dussopt. Il est malheureux que ces textes puissent donner l’occasion de remettre en cause la circulaire du 25 janvier 2013 sur l’inscription dans l’état civil français des enfants nés par GPA à l’étranger. Cette circulaire a été confirmée par la Cour de cassation le 3 juillet 2015. Ces propositions de loi ne se contentent donc pas de remettre en cause la décision et l’orientation donnée par la garde des Sceaux en juillet 2013, elles reviennent aussi à contester un arrêt de la Cour de cassation qui fait jurisprudence, qui doit être respecté et qui s’appuie sur une décision de la CEDH.

M. Philippe Gosselin, rapporteur. C’est le rôle du législateur, le cas échéant !

M. Olivier Dussopt. Vous me permettrez de faire trois remarques sur la GPA, en précisant d’emblée que j’ai bien conscience que ma position n’est majoritaire ni dans ma famille politique ni a fortiori au sein de cette Commission.

Ma première remarque porte sur les mots utilisés. Parler de « parents acquéreurs » ou de « bébés tout propres, tout neufs », par exemple, c’est faire peu de cas de la volonté et de la dignité des femmes et des hommes de notre pays qui ont recours à la GPA à l’étranger – puisqu’ils n’ont pas la possibilité de le faire en France – afin de construire leur projet parental. Certains mots sont extrêmement blessants et peuvent être insultants. Reconnaître le projet parental de couples d’hommes et de femmes, de couples de femmes et de couples d’hommes mérite l’utilisation d’un vocabulaire au moins plus respectueux.

Ma deuxième remarque fait écho aux propos de M. Erwann Binet. À force de parler de « bébés marchandise », à force de parler de femmes comme d’outils de production, à force de dire que reconnaître la GPA sous une forme ou sous une autre consacre le triomphe de celles et de ceux qui veulent s’approprier le bien de quelqu’un d’autre, les adversaires les plus opposés à la GPA participent à la réification de l’enfant. Par le choix de ce vocabulaire, ils sont les principaux responsables de la réification de l’enfant.

Dernière remarque : contrairement à nombre d’entre vous, j’ai la conviction que la GPA peut s’inscrire dans une éthique du don, qu’elle peut être gratuite, qu’elle ne doit pas être vue uniquement au travers de conventions marchandes, comme c’est le cas depuis le début de ce débat. Si la GPA était inscrite dans une éthique du don parfaitement encadrée, conformément à certaines propositions, peut-être pourrions-nous sortir des travers qui consistent à dénoncer une prétendue marchandisation de l’enfant.

Mme Françoise Guégot. Ce sujet difficile touche au plus profond de l’être, particulièrement pour une femme qui a pu avoir des enfants. On sait l’importance que revêt dans une vie et dans une histoire personnelle cette étape de la constitution d’une famille. Certains expliquent que, la question étant délicate à traiter sur le plan législatif, il vaut mieux ne pas l’aborder. Notre Commission a pourtant l’habitude d’examiner des textes difficiles : ainsi, la semaine dernière, nous avons débattu, dans le cadre de l’examen d’une proposition de loi visant à lutter contre la discrimination à raison de la précarité sociale, de ce que l’on pourrait appeler le « délit d’apparence », qui ne me semble pas beaucoup plus simple à traiter que la GPA. Même si le sujet est délicat, le législateur doit prendre position et réaffirmer ses valeurs, quels que soient les mots qu’il emploie, car, en définitive, ceux-ci ont une importance relative comparée à celle des conséquences de la GPA.

Je voudrais soulever plusieurs questions qui m’ont toujours semblé essentielles. Dans quelques années, comment expliquera-t-on à des enfants qu’ils ont coûté 30 000 euros, 60 000 euros ou 120 000 euros en fonction du pays dans lequel ils ont été conçus ? Comment leur expliquera-t-on que leur mère, qui les a mis au monde, a été obligée de se séparer d’eux pour des raisons financières ? On connaît la vulnérabilité des femmes qui pratiquent ces GPA et on sait qu’elles le font pour des raisons financières. Nous devons avoir à l’esprit ces questions importantes qui se poseront dans vingt ans. Nous avons la chance d’avoir travaillé sur des problématiques d’éthique à propos de toutes les évolutions de société : adoption, parentalité, filiation. Nous avons besoin de débattre de la GPA de manière posée, sans forcément considérer que certains pensent bien et d’autres mal. En tant que législateur, nous devons dire ce qui nous semble important pour notre société et trouver les moyens de répondre aux questions que nos concitoyens se posent.

Il ne s’agit pas de pénaliser tel ou tel enfant en raison de son histoire, mais il nous faut constater que les progrès de la recherche médicale, dont nous profitons, passent souvent par un questionnement du médecin sur nos origines et nos antécédents familiaux. Il serait temps de considérer que la vie de quelqu’un est aussi constituée par sa filiation : c’est pourquoi il est important qu’un enfant puisse connaître son histoire. Or la GPA met à mal cette histoire. Même si je comprends leur projet parental, je souhaite bonne chance aux personnes qui y recourent pour expliquer à ces enfants, qu’ils auront accompagnés dans leur éducation, d’où ils viennent et dans quelles conditions ils ont été mis au monde.

Mme Marie-Françoise Bechtel. La question de société dont nous traitons met en jeu des principes éthiques : aussi, chacun est amené à exercer sa liberté de conscience, et c’est ce qui explique la diversité des positions. L’un d’entre nous a dit que le vrai sujet était le don d’enfant et non pas le don de soi. Je ne le crois pas. En fait, il y a deux sujets : le don de soi, celui du ventre acheté à la mère ; le don d’enfant, qui pose des problèmes délicats en ce qui concerne les droits de l’enfant.

S’agissant du don de soi, la GPA est l’exemple même d’une conception si extensive de la liberté individuelle, caractéristique des sociétés occidentales développées, qu’elle finit, ici comme en d’autres domaines, par rejoindre le libre marché. Sans vouloir être polémiste, je m’étonne de l’illogisme de certains défenseurs de la condition féminine qui sont extrêmement susceptibles vis-à-vis du moindre acte dit sexiste, et qui ne s’offusquent guère devant la marchandisation du ventre féminin. De même, je m’étonne que d’aucuns estiment qu’il faut protéger les prostituées contre elles-mêmes et contre leur tentation de faire commerce de leur corps, sans faire le lien avec le sujet dont nous débattons. N’est-ce pas la même problématique ? Ne faut-il pas protéger des femmes qui vont être tentées de vendre leur corps pour des raisons dans lesquelles la précarité qu’elles subissent peut jouer un rôle ?

En ce qui me concerne, je ne suis pas choquée par les articles 1er et 2 de la proposition de loi présentée par Mme Boyer, sous réserve, lorsque nous en débattrons, de veiller à leur juste rédaction pour prévenir d’éventuels effets pervers. La pénalisation plus précise du don de soi ou de l’incitation au don de soi – c’est-à-dire du don du ventre féminin – mérite certainement d’être prise en compte dans le code pénal.

Plus difficile est la question du don de l’enfant. Diverses jurisprudences avaient embrouillé les choses. La circulaire de la ministre de la justice a eu le mérite d’exprimer la contradiction qui existe entre, d’une part, l’interdiction prévue par la loi française et, d’autre part, les droits de l’enfant qui pourraient rendre nécessaire la transcription de l’acte de naissance sur le registre d’état civil avec l’octroi de la nationalité à la clef.

On nous propose de régler ce problème en passant par la Constitution. Sur le principe, la démarche est juste, puisque seule la Constitution a une valeur supérieure aux traités. Si la révision constitutionnelle était assez précise pour faire pièce aux jurisprudences de la CEDH, ce serait sans doute la voie à suivre, mais cela ne réglerait pas la dimension sociologique, sociétale, de la question. En tout état de cause, la rédaction qui nous est proposée ne me paraît pas suffisante pour qu’un juge dise qu’elle fait obstacle aux arrêts de la CEDH.

En outre, il faut souligner un risque : les juges pourraient s’appuyer sur le texte, tel qu’il est actuellement rédigé, pour remettre en cause certains droits comme l’IVG. La révision constitutionnelle – seul moyen de faire obstacle à l’intrusion du droit étranger dans notre droit par la transcription de l’acte de naissance – n’est pas mûre. Et, même si ce point était résolu, il resterait la question douloureuse des droits de l’enfant. J’avoue ne pas avoir de réponse. Autant ma position est extrêmement ferme sur le don du ventre féminin, autant j’admets qu’il y a de vraies difficultés en ce qui concerne les droits de l’enfant.

M. Éric Ciotti. Je voudrais apporter mon soutien à ces propositions de loi, tout particulièrement à celle de Mme Valérie Boyer, qui me paraît très pertinente et que je voterai avec détermination, car elle répond à des exigences fortes : la protection des enfants, qui doit passer avant tous les désirs qui peuvent s’exprimer ; le refus d’une marchandisation du corps. M. Dussopt a parlé de prétendues conventions marchandes alors qu’il s’agit, hélas, d’une réalité, et d’une éthique du don qui relève de l’utopie. La réalité est tragique – il y a des enfants sur catalogue – et nous devons mettre un terme à ces dérives.

Cette proposition de loi, qui prévoit un dispositif clair et des sanctions indispensables, me paraît totalement pertinente. Elle doit être soutenue par tous ceux qui refusent cette dérive induite par l’idéologie de Mme Taubira, qui s’est concrétisée dans la circulaire évoquée par M. Guillaume Larrivé. La majorité est placée face à ces contradictions, mais elle peut dépasser les clivages habituels. Nous pouvons nous retrouver sur ce refus de la marchandisation de l’enfant, du corps humain. Nous sommes au-delà des débats sur le mariage pour tous. Il s’agit de protéger l’enfant et la dignité humaine. Tous ceux qui sont attachés à ces principes doivent voter cette proposition de loi.

M. Lionel Tardy. Les deux propositions de loi viennent à point nommé, car elles traitent un sujet que, depuis 2012, le Gouvernement se refuse à aborder, avec une constance qui confine à l’aveuglement. La GPA est une pratique intolérable de commercialisation des êtres humains et de marchandisation du corps des femmes. Nous sommes nombreux ici à partager les propos qu’a tenus le Premier ministre.

Il ne suffit pas de répéter que la GPA est interdite en France : il faut agir contre cette pratique indigne. Le risque est grand qu’elle se développe et nous échappe. Agir, c’est précisément ce à quoi nous invitent ces propositions de loi. Si la majorité et le Gouvernement refusent à nouveau leur adoption, ils se rendront coupables d’affaiblir la lutte légitime et pressante contre la GPA et le recours aux mères porteuses ; ils cautionneront implicitement ces pratiques et le renoncement de la France à ses valeurs fondamentales.

Pour ma part, je voterai donc pour ces deux textes.

M. René Dosière. Je voudrais tout d’abord dire mon accord avec la finalité des deux propositions de loi, dans la mesure où je suis totalement opposé à la GPA, ce qui démontre que la question dépasse largement les clivages partisans traditionnels. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je regrette que les auteurs aient utilisé le mécanisme de la proposition de loi pour traiter le sujet : c’est sans doute le plus mauvais qui soit pour une question aussi importante et transpartisane. À entendre les différentes interventions, on voit bien que ces textes encouragent les effets de posture. En outre, ils font l’objet d’un examen pour le moins simplifié, même si les rapporteurs ont procédé à des auditions : il nous manque tout le travail d’analyse qu’un tel sujet mériterait ; il nous manque l’avis du Conseil d’État.

M. Philippe Gosselin, rapporteur. Cela relève du Gouvernement, nous en sommes d’accord !

M. Guy Geoffroy. Que ne le fait-il pas !

M. René Dosière. L’opposition a d’autres moyens que des propositions de loi pour faire étudier sérieusement un sujet : les missions d’information, les commissions d’enquête, etc. Il y a d’autres formules pour faire travailler ensemble majorité et opposition sur un texte. Étant donné le sujet traité, la proposition de loi est la plus réductrice et la plus mauvaise des méthodes. En outre, vous le savez très bien, il y aura peu de monde en séance quand ces textes y seront discutés, et les postures – que l’on retrouve déjà dans les exposés des motifs et dans les propos des uns et des autres – joueront à plein. Je m’opposerai donc à l’adoption de ces deux propositions de loi.

Au-delà même de ce refus, il faut bien comprendre que le problème dépasse nos frontières. Nous devons aller vers une sorte de législation commune au moins au niveau européen, sinon au niveau mondial. Je souhaite que le Gouvernement français, appuyé par l’ensemble des forces politiques du pays, s’efforce de faire évoluer la législation européenne. Cela me paraît beaucoup plus urgent que de modifier le code pénal, pour des effets de posture, alors qu’il existe déjà des dispositions.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Vous n’en avez pas, vous, des postures ! Cela nous est réservé !

M. le président Dominique Raimbourg. Avant d’entendre les derniers orateurs inscrits, je vais donner la parole au rapporteur qui doit ensuite quitter la réunion en raison d’obligations personnelles impératives.

M. Philippe Gosselin, rapporteur. J’entends tout ce qui a été dit sur nos travaux ou sur les véhicules législatifs qui ne seraient peut-être pas adaptés. Il n’empêche que l’objectif est bien de s’intéresser davantage à une question cruciale. Du reste, je constate que, au-delà des propos et des postures, il se passe bel et bien quelque chose : nous assistons à une forme de convergence. Les choses ne sont sans doute pas mûres et l’on ne doit toucher à la Constitution que « d’une main tremblante ». C’est pourquoi j’ai veillé à ce que les mesures envisagées ne se traduisent pas par la remise en cause de l’IVG ou du modèle français de don du sang ou de moelle osseuse. Ce travail cherche en toute bonne foi à réunir les républicains de tous horizons, et ils sont nombreux à s’inquiéter des dérives marchandes et à s’interroger sur ces enfants et sur ces parents. Nous devons avoir de l’empathie, car notre propos n’est pas de faire en sorte que ces enfants soient rejetés, mais nous devons aussi alerter le Parlement sur ses responsabilités.

Le sujet n’est peut-être pas encore totalement mûr, mais je crois que le temps viendra où les positions convergeront davantage. On se souviendra peut-être alors de nos débats – beaucoup plus sereins que naguère – comme des prémices d’un rapprochement dont les Français savent parfois être les acteurs.

C’est sur cette note d’espérance que je vais m’absenter, sans anticiper sur la suite des débats. Mme Le Dain défendra un amendement de suppression de l’article unique de la proposition de loi constitutionnelle. Vous ne serez pas surpris de me voir émettre un avis défavorable à cet amendement. En séance publique, nous poursuivrons le plus sereinement possible, je l’espère, ce débat passionnant, observé, attendu. Nous ne pourrons pas nous contenter de constater ces pratiques avec fatalisme, sans tenter de les arrêter : sinon tous les combats politiques seraient voués à l’échec un jour ou l’autre. Ce qui fait la force et la grandeur d’un Parlement, c’est sa capacité à anticiper certaines questions et à en débattre au-delà des clivages, même quand elles ont été posées par une minorité. Les parlementaires savent parfois utiliser leur talent et leur courage pour rassembler, afin que la minorité devienne une voix à entendre, sinon une majorité.

M. Sergio Coronado. On ne peut débattre d’un sujet sans prendre en compte toute sa complexité. Or, pour être franc, j’ai été un peu déçu et surpris par une présentation à charge d’une question délicate, sur laquelle je n’ai pas d’avis tranché. Si j’ai une opinion particulièrement ferme sur la transcription de la filiation à l’état civil ou sur l’octroi d’une pièce d’identité, que permet la circulaire de Mme Christiane Taubira, ce n’est pas le cas en ce qui concerne la grossesse de substitution, ou GPA.

J’avais pourtant lu avec grand intérêt le rapport rédigé en 2008 par les sénateurs de votre famille politique : bien plus subtil, il se proposait d’encadrer ce qu’il appelait une « gestation altruiste ». Je n’ai pas non plus retrouvé dans vos propos l’écho des débats qui traversent aujourd’hui le mouvement féministe. En soulignant l’illogisme de certains défenseurs de la condition féminine, Mme Bechtel a bien fait de rappeler que la question y est débattue dans des termes plus nuancés et plus complexes que la présentation qu’en font les rapporteurs.

Autre sujet d’étonnement : cette présentation est totalement contraire à l’histoire française de la gestation pour autrui. Dans un très joli livre, L’Empire du ventre, Mme Marcela Iacub retrace l’historique de cette pratique et de son interdiction. Des associations de grossesses de substitution comme Les Cigognes fonctionnaient sur une base altruiste et sans conventions marchandes. Je m’étonne que votre présentation se fasse un peu ex nihilo, sans tenir compte de ce qui s’est passé dans notre pays.

Votre façon de mener le débat est très principielle, dogmatique, idéologique. Les termes utilisés me rappellent ceux qui avaient été employés en 1998-1999, lors des débats sur le pacte civil de solidarité (PACS), pour combattre une revendication à l’époque naissante : l’ouverture du mariage civil et de la filiation aux couples de même sexe. Des inquiétudes folles s’exprimaient alors à propos de l’homoparentalité et de l’histoire douloureuse qu’il faudrait expliquer aux enfants. Mais il existait déjà des familles homoparentales, de même qu’il existe déjà, aujourd’hui, des familles avec des enfants nés de la GPA. On peut rencontrer ces enfants : leur histoire ne leur est pas cachée et on ne constate pas chez eux les traumatismes qu’on redoutait. Depuis une quinzaine ou une vingtaine d’années, des enquêtes américaines, menées scientifiquement, ont conclu dans le même sens.

Faut-il élargir le débat ? La réalité de la GPA se passe en grande partie dans un monde de très grande inégalité économique et sociale. Mais, une fois passé l’examen et lorsque l’on constate qu’il n’y a ni contrainte ni déséquilibre financier dans la prestation, au nom de quoi est-il permis d’interdire cette disposition ? Au nom de quoi balayer le consentement d’un revers de main ? L’intérêt de l’enfant est un argument, mais on ne peut pas s’y référer tout en s’opposant à la transcription des actes de naissance à l’état civil et à l’octroi d’une pièce d’identité nationale. Il faut choisir.

Après avoir participé à des débats similaires, j’ai acquis cette conviction : considérer qu’en aucune circonstance une personne ne peut disposer librement de son corps pour, par exemple, se livrer à la prostitution, participer à une GPA ou demander un suicide assisté, revient à prendre une partie de nos concitoyens pour des incapables. Pour ma part, je crois que le consentement librement éclairé doit être la base d’une société démocratique, ce qui, je vous l’accorde, correspond à une tradition très libérale, mais me convient.

M. Dominique Potier. Je suis heureux de m’exprimer après M. Sergio Coronado, car je souhaite, comme lui, que ces questions soient abordées avec le souci absolu de prendre en compte leur caractère infiniment complexe, mais aussi dans le respect de la dignité de nos interlocuteurs, s’ils pensent différemment de nous. Il convient que nous recherchions une vérité commune avec une certaine humilité. Je rejoins donc M. Coronado dans cette approche précieuse qui a terriblement manqué dans les débats précédents. Ne retombons pas dans les mêmes ornières !

Longtemps, la gauche a été assimilée à une conquête des libertés qui passait parfois par la transgression d’interdits résultant d’un conservatisme sans fondement, transgression qui demandait souvent d’opérer de réelles révolutions. Aujourd’hui, la donne a changé : la conquête des libertés a eu lieu, elles sont désormais largement acquises, et il faut peut-être désormais faire prévaloir les principes de responsabilité et de dignité humaine. Je veux bien croire que ce chemin n’est pas seulement celui de la gauche, et qu’il peut être celui de tous les républicains.

La conquête des libertés va dorénavant de pair avec la redécouverte de nos responsabilités, par exemple à l’égard de la nature. Les débats autour de la COP21 ont fait éclater au grand jour, à l’échelle internationale, une conscience de la fragilité planétaire, qui devient un nouvel élément de la conscience politique universelle. Nous avons certainement le même chemin à parcourir s’agissant de notre rapport au corps humain, à la naissance de l’enfant, aux dimensions éthique et bioéthique de l’identité.

L’ultralibéralisme de notre monde se traduit à la fois par une mondialisation sans foi ni loi, et par un individualisme sans limites. Cet ultralibéralisme nourrit, alimente et fonde une tentation fasciste dans une conscience populaire profondément bouleversée.

Certes, je me rangerai à la position de mon groupe politique, qui estime que ces textes ne sont peut-être pas les véhicules idéaux de ce débat, mais je tiens à dire que, sur les plans philosophique et politique, je partage cette condamnation de la GPA, en l’état et par principe. Je le fais dans un dialogue à gauche qui a été nourri par la réflexion de Mme Sylviane Agacinski, par des échanges avec plusieurs de nos collègues, comme M. Jean Yves Le Déaut ou Mme Anne-Yvonne Le Dain, mais aussi par les travaux effectués sur ce sujet par M. Benoît Hamon et Mme Laurence Dumont. Il y va de la protection de la fragilité et de la dignité humaines, de la non-marchandisation du corps. Sur ces champs, nous devons développer une nouvelle éthique et poser des limites. Être républicain aujourd’hui, être de gauche, n’est-ce pas, au nom de la dignité humaine, poser à nouveau des limites, non pas contre la vie, mais au nom même de la vie ?

M. Philippe Houillon. Je soutiendrai les textes qui nous sont soumis. J’ai cru entendre dans les propos de nos collègues certaines réticences, voire des oppositions. Je crains qu’elles ne soient des combats d’arrière-garde – ce qui ne m’étonne pas plus que cela sachant d’où elles viennent. Il existe en effet une jurisprudence européenne – certes, ce n’est pas la législation européenne que M. René Dosière appelait de ses vœux, mais tout de même –, l’arrêt Mandet contre France, rendu le 14 janvier 2016 par la CEDH, qui affirme le principe simple et lourd de conséquences selon lequel l’intérêt supérieur de l’enfant est avant tout de connaître la vérité sur ses origines. Il s’agit d’un arrêt de principe dont les développements viendront mécaniquement balayer la GPA, mais aussi les filiations établies, comme la loi française le permet désormais, avec deux pères et deux mères. Cet arrêt aura forcément des conséquences sur des systèmes auxquels vous vous dites opposés, mais que vous ne voulez pas officiellement combattre.

M. Jean-Frédéric Poisson. Les orateurs qui se sont exprimés avant moi et, à l’instant, le bâtonnier Houillon ont présenté tous les arguments qui auraient été les miens. Je me contente en conséquence d’apporter mon soutien plein et entier aux textes en discussion.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. J’ai été sensible à l’ensemble des interventions, notamment celle de M. Dominique Potier.

Si j’en crois le discours des médecins, il n’y a pas de limites à la science, et la recherche ira de plus en plus loin. Le problème est donc de savoir comment arrêter ce processus, ce qui nous mène sur le terrain de l’éthique. Les propositions de loi que nous examinons constituent des réponses à des questions qui se posent à notre société. Ce débat devait être mené, et je suis plutôt favorable à ce qui est proposé par nos deux collègues.

M. Guy Geoffroy. J’adhère totalement à la majeure partie des arguments présentés par ceux, en particulier au sein de mon groupe, qui soutiennent ardemment ces deux textes – je suis pour ma part cosignataire de la proposition de loi constitutionnelle.

Sans aucune animosité, mais de façon très claire, je voulais très simplement relever l’embarras que je ressens du côté de certains collègues de la majorité qui ne savent pas très bien comment justifier le fait qu’ils ne vont pas voter des textes avec lesquels ils sont, au fond d’eux-mêmes, profondément d’accord.

Nous avons tenu un discours commun sur l’indisponibilité du corps humain pour aboutir à l’adoption d’une loi de la République contre le phénomène prostitutionnel. J’avoue ne pas comprendre que l’on puisse avoir défendu ce texte, et que l’on ne franchisse pas aujourd’hui le pas qui en découle afin d’inscrire l’indisponibilité du corps humain dans la Constitution – la référence au Préambule ne me semble en tout état de cause pas suffisante.

J’entends l’embarras de M. René Dosière, mais son argument selon lequel une proposition de loi serait moins efficace qu’une mission d’information pour faire œuvre législative ou pour réviser la Constitution me paraît d’une très grande légèreté venant d’un collègue chevronné.

La décision de nos collègues de la majorité de ne pas voter ces textes est une erreur.

M. Philippe Houillon. S’il n’y avait que celle-là !

M. Guy Geoffroy. Je ne vais pas jusqu’à dire qu’il s’agit d’une faute, mais, avec le temps, nous constaterons certainement que tel était bien le cas. Il est toujours temps de se reprendre : j’invite nos collègues de la majorité à se mettre en conformité avec ce que pensent la plupart d’entre eux, c’est-à-dire la même chose que nous.

Mme Sophie Dion. Je me joindrai à Mme Valérie Boyer et M. Philippe Gosselin pour voter ces deux textes.

Chers collègues de la majorité, lorsque vous avez adopté la loi sur le « mariage pour tous », vous avez solennellement affirmé que jamais on ne toucherait au principe d’indisponibilité du corps humain et que jamais on ne reconnaîtrait la gestation pour autrui. Je m’étonne donc des réticences que vous avez aujourd’hui à voter ces textes.

L’enfant reste la personne vulnérable par excellence, et vous le laissez, en quelque sorte, aux prises avec l’ultralibéralisme économique le plus absolu. Vous allez à l’encontre des valeurs humanistes dont vous vous prétendez les plus fervents avocats. Je n’y comprends rien, mais sans doute s’agit-il de l’une des erreurs que vous accumulez depuis des mois. Il faut protéger l’enfant et lui permettre de connaître ses origines : notre propre code civil et, désormais, la CEDH l’exigent. Votre erreur est à la fois une faute morale et une faute politique.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. La GPA existe, et elle est indirectement reconnue par la France. C’est la raison pour laquelle M. Philippe Gosselin et moi-même avons estimé que nous devions intervenir. Ce qui, sur le plan théorique, est interdit aux Français en France leur est permis à partir du moment où cela se passe à l’étranger et qu’ils rapportent le produit de leur achat. Je n’emploie pas ce vocabulaire parce que j’approuve ces actes, mais, au contraire, parce que je pense qu’il faut cesser d’habiller la maternité de substitution – il s’agit bien de cela, Mme Le Dain – des atours de l’altruisme ou du consentement éclairé.

Les femmes qui siègent dans cette salle et qui ont connu une grossesse savent parfaitement ce que c’est que de porter un enfant. Qu’il s’agisse ou non de ses propres ovocytes, l’enfant est tout de même le produit de sa chair et de son sang ! Une grossesse n’est pas une maladie, mais elle comporte des risques. J’aurais aimé disposer d’une étude sur l’état psychologique et physique de ces femmes qui sont traitées comme des animaux – je rappelle qu’en Inde elles sont rassemblées dans des lieux que l’on appelle des « fermes ». Il faut donc appeler les choses par leur nom pour pouvoir travailler correctement. Je me permets aussi de rappeler qu’en Europe le régime nazi avait créé les Lebensborn où des femmes étaient fécondées avant qu’elles ne cèdent leur enfant.

Vous avez noté que nous faisions référence à d’autres pays. Aux États-Unis, des contrats permettent à des mères porteuses de céder leurs organes reproductifs, mais ce n’est pas pour autant un modèle auquel nous souhaitons nous référer. Lors de nos auditions, M. Jean-François Mattei, ancien député et ancien ministre, a rappelé que, dans certains pays, on trouve des catalogues d’enfants à adopter : ceux-ci y vantent leurs propres qualités – ils seront sages et affectueux –, et les parents ont la possibilité de rendre les enfants s’ils n’en sont pas satisfaits. Ce n’est pas notre conception des relations humaines ou de la protection de l’enfant.

Comme vous le disiez, Mme Le Dain, la naissance, bien qu’elle comporte des risques, doit être un moment joyeux. C’est difficilement le cas pour une femme dont on a instrumentalisé le corps et dont on se sert comme d’un ventre à louer pour une maternité de substitution. Si, à droite comme à gauche, nous nous retrouvons sur cette question, c’est bien parce qu’il s’agit de dignité humaine et de protection des personnes les plus vulnérables. Je ne connais pas de maternité « altruiste ». Si l’on excepte les militants de la cause, l’ensemble des personnes que nous avons interrogées a réfuté ce mot. Le président du Comité consultatif national d’éthique a, lui aussi, des difficultés avec le terme « altruiste ».

Je ne voudrais pas que le rejet de ces textes permette à la GPA et à la maternité de substitution de prospérer dans notre pays et que les militants d’une gestation que, pour la rendre plus présentable, certains appellent « éthique » nous expliquent, demain, que tout cela s’est tellement développé qu’il est trop tard pour revenir en arrière. Nous ne devons pas nous contenter de dresser des constats, nous ne sommes pas les greffiers des mœurs : nous sommes aussi là pour faire la loi.

Ma proposition de loi n’est pas que principielle, elle est concrète. Dans les amendements que je vous soumets, je propose des solutions concrètes pour lutter effectivement par des actes, au-delà des paroles, contre la gestation pour autrui ou la grossesse de substitution dans notre pays.

Je remercie M. Guillaume Larrivé pour son soutien.

Non, M. Binet, la situation actuelle n’est pas équilibrée, et nous ne cherchons pas davantage à l’être ! Lorsqu’il s’agit de dumping éthique ou de traite d’êtres humains, de femmes et d’enfants, ce n’est pas la question. Nous sommes confrontés à une question de principe, qui touche à la dignité humaine. Je m’oppose au proxénétisme procréatif qui fait des femmes des ventres à louer.

On ne peut pas dire, comme vous le faites, que tout va bien en France. Il faut absolument que l’entremise soit réprimée, et sévèrement. Pourquoi des instruments de propagande sont-ils mis en place pour faire passer un trafic d’êtres humains pour une démarche altruiste ? Tout simplement parce qu’il y a beaucoup d’argent à la clef. C’est la raison pour laquelle, lors de conférences dans de grands hôtels ou à la télévision, des agences présentent la maternité de substitution sous un jour idéalisé – pour ma part, je dirais « mensonger ». Dans l’intérêt de l’enfant, qui consiste en premier lieu à connaître ses origines et, surtout, à ne pas être cédé, je propose que l’entremise soit réprimée.

Quant au mauvais procès que vous m’intentez s’agissant de la répression de la presse, sous prétexte que j’ai évoqué un reportage, je précise que la nouvelle incrimination concernant la provocation à la maternité de substitution et sa présentation sous un jour favorable vise principalement des sites internet qui font la promotion de cette pratique. Ces sites ont des liens très forts avec de grands groupes financiers : c’est un problème de business. Cette nouvelle incrimination est compatible avec le respect du droit à l’information qui a valeur constitutionnelle. Il ne s’agit en aucun cas de porter atteinte à la liberté de la presse. Ces insinuations de mauvaise foi ne sont pas du tout à la hauteur des débats qui nous occupent.

Les conventions internationales ont déjà été invoquées lorsque notre collègue Jean Leonetti a présenté un texte visant à réprimer la maternité de substitution. Le Gouvernement a alors affirmé qu’il mettrait en œuvre des actions afin que la maternité de substitution soit supprimée sur le plan international. Nous avons interrogé le ministère de la justice mais rien n’a été fait depuis en la matière. Le ministère de la famille, de l’enfance et des droits des femmes ne dispose pas d’informations sur ce sujet, et il n’en a pas trouvé auprès du Quai d’Orsay. Il nous a avoué rencontrer de grandes difficultés, compte tenu de la régression des droits des femmes au plan mondial, pour faire en sorte que ce sujet soit traité en priorité. Je remercie Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes, d’avoir fait en sorte que nous ayons des réponses précises à nos questions.

Certes, le parlement portugais s’est déclaré favorable à la maternité de substitution, mais je répète qu’il ne s’agit pour moi ni d’un modèle ni d’un curseur, et que nous ne sommes pas obligés de nous référer au moins-disant éthique pour faire notre droit.

Oui, M. Collard, il s’agit bien de proxénétisme procréatif ! Le corps est vraiment découpé en morceaux. Comment ne pas combattre la maternité pour autrui lorsque l’on a combattu le trafic d’organes, comme j’ai pu le faire ? J’ai déposé des propositions de loi, lors de mon mandat précédent et durant cette législature, afin que ces pratiques soient réprimées par la France, et que notre pays signe une convention internationale sur le sujet. Je considère comme vous que le corps n’est ni une marchandise ni une boutique, et que la détresse des riches en mal de maternité ou de paternité ne doit pas être soulagée en instrumentalisant des corps des femmes les plus pauvres. Comme je l’ai dit à la précédente ministre de la justice, ce n’est pas parce que ces femmes sont de couleur et pauvres que l’on doit les abandonner à l’indignité de voir leur corps réduit à une marchandise ou à un instrument ; ce n’est pas parce que des enfants sont commandés et fabriqués que l’on doit avaliser cette pratique.

M. Dussopt, la GPA gratuite n’existe pas, elle n’a jamais existé ; c’est une vue de l’esprit. Il n’y a pas davantage de GPA « éthique ». Je me permets de vous inviter à regarder ce qui se passe en Grande-Bretagne. Plusieurs témoignages nous ont montré ce qu’il en était vraiment : depuis que le commerce est officiellement proscrit en matière de GPA, des conventions sont passées qui comportent des dons à des associations – de mémoire, les montants engagés atteindraient 120 000 euros. Sans doute la femme qui sert d’instrument ne reçoit-elle qu’une petite part de cette somme : cela dit, je ne vois pas ce qu’il peut y avoir d’altruiste dans cette affaire.

Quand j’emploie le mot « esclavage », ce n’est pas pour cautionner l’esclavage. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Ce mauvais procès n’est pas à la hauteur de notre débat. Je dis en revanche que les parents sont des parents acquéreurs, puisqu’il s’agit bien d’une acquisition, et que cette prétendue convention est, en fait, un contrat. Il comporte des points très précis qui entravent la liberté de la mère avec, par exemple, des restrictions sur ses déplacements ou sur son alimentation, et même une obligation de césarienne. C’est une réalité !

Mme Bechtel, comme vous, j’ai été choquée par la différence de traitement que le Parlement réserve à la prostitution et à la maternité de substitution. Comme vous, j’ai fait l’analogie entre les deux sujets, et c’est pourquoi j’ai employé dans l’exposé des motifs de ma proposition de loi l’expression « proxénétisme procréatif ». Je pense aussi que ces femmes qui sont dans une grande détresse doivent être protégées d’elles-mêmes, et qu’en tout cas notre devoir est de ne pas cautionner ces pratiques. Elles nous choquent de la même façon que nous sommes choqués lorsqu’un individu en grande détresse financière vend l’un de ses organes.

Je remercie MM. Lionel Tardy et Éric Ciotti pour leur soutien.

M. Dosière, la question posée ce matin dépasse les clivages partisans. M. Philippe Gosselin et moi-même vous avons tendu la main lors de la rédaction des textes que nous présentons aujourd’hui. Si le Gouvernement avait vraiment souhaité traiter du sujet, j’aurais voté un texte issu de la majorité et sanctionnant l’apologie de la GPA. Je rappelle que, alors que l’Assemblée a rejeté la proposition de loi de M. Jean Leonetti visant à lutter contre les démarches engagées par des Français pour obtenir une gestation pour autrui, au motif que le texte devait être retravaillé, nos auditions ont montré qu’il ne l’a pas été.

De façon plus générale, je suis surprise d’entendre dire que l’inscription d’une proposition de loi et d’une proposition de loi constitutionnelle dans une « niche » réservée à l’opposition ne fait pas avancer le débat. Je pense pourtant qu’il s’agit de la façon dont nous travaillons dans cette assemblée. Je comprends la gêne de collègues qui, bien qu’approuvant nos propositions, ne les voteront pas. Ces leçons de fonctionnement de l’Assemblée me paraissent très curieuses, en particulier à la commission des Lois.

Enfin, pour compléter l’information de M. Dosière, je lui indique que j’ai déposé, le 10 juillet 2015, une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête relative à l’interdiction effective de la gestation pour autrui en France. J’aurais aimé que d’autres s’y joignent, comme je l’ai fait pour la pénalisation du négationnisme des génocides. Si je suis engagée dans la vie publique, ce n’est pas pour prendre des postures : c’est, comme vous, mes chers collègues, pour défendre des convictions.

M. Coronado, il est difficile de relativiser la marchandisation. Pour moi, je le répète, la gestation pour autrui « altruiste » n’existe pas.

Je remercie M. Potier pour ses propos auxquels j’adhère complètement. Comme il le soulignait, le dialogue permet d’avancer : nous avons, par exemple, été particulièrement impressionnés, lors de l’audition de Mme Yvette Roudy, par la force de ses convictions et par son engagement. Les auditions nous ont donné l’occasion de partager de belles leçons de vie.

M. Philippe Houillon nous a rappelé à juste titre la position de la CEDH : l’intérêt supérieur de l’enfant exige qu’il connaisse la vérité sur ces origines. Mme Françoise Guégot l’avait dit avec ses mots, ce qui avait suscité les remarques méprisantes de certains collègues. Le sujet est pourtant majeur.

Je remercie M. Guy Geoffroy d’avoir travaillé sur le sujet fondamental du phénomène prostitutionnel. J’ai dit il y a un instant à Mme Bechtel combien il était pertinent d’établir un lien entre ces deux sujets.

Merci également à MM. Jean-Frédéric Poisson et Pierre Morel-A-L’Huissier qui m’ont apporté leur soutien.

Mme Sophie Dion a eu raison de qualifier l’enfant de « personne vulnérable par excellence » : nous sommes aussi là pour le protéger.

Pour citer un dernier collègue, mais disparu depuis longtemps celui-là, je rappellerai les mots de Lacordaire : « Entre le fort et le faible [...], c’est la liberté qui opprime, et la loi qui affranchit. » C’est tout le sens du travail que nous effectuons aujourd’hui sur la maternité de substitution.

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La Commission en vient à l’examen de l’article unique de la proposition de loi constitutionnelle visant à rendre constitutionnel le principe d’indisponibilité du corps humain (n° 1354).

Article unique (art. 1er de la Constitution) : Consécration du principe d’indisponibilité du corps humain

La Commission est saisie de l’amendement CL1 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Nombre d’entre nous se sont exprimés au cours de cette réunion, y compris des collègues venus d’autres Commissions. Beaucoup de choses ont été dites, beaucoup de concepts ont été abordés, beaucoup de positions extrêmement claires ont été défendues. Des mots importants ont été prononcés. Les positions sont divergentes, en tout cas au sein du groupe auquel j’appartiens. Il est important de le souligner.

Selon moi, il n’y a eu ni débordement ni violence dans les propos qui ont été tenus ce matin. Je regrette donc que certains considèrent que d’autres ont été violents. Je respecte profondément la parole de chacun. Chaque député s’est exprimé en son âme et conscience, en toute légitimité, avec sa personnalité. Pour ma part, il m’arrive parfois d’être un peu véhémente. Je ne reprocherai à personne de me le reprocher, mais c’est aussi ma liberté.

Le présent amendement vise à supprimer l’article unique de la proposition de loi constitutionnelle, car celle-ci vise à constitutionnaliser des principes qui sont déjà constitutionnellement garantis, tant par l’alinéa 1er du Préambule de la Constitution de 1946, qui consacre le principe de dignité, que par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, lequel exerce un contrôle scrupuleux dans ce domaine. J’aurai l’occasion de revenir dans l’hémicycle sur les raisons pour lesquelles nous ne souhaitons pas aller plus loin sur ce projet de constitutionnalisation. En tout cas, je me félicite que ce débat ait eu lieu, car il nous a permis de nous exprimer publiquement. C’était important et je vous en remercie, Mme la rapporteure.

M. Jacques Bompard. Je tiens à intervenir sur la proposition de loi de Mme Boyer. Je veux vous dire bravo, madame la rapporteure, car rares sont ceux qui mènent ce beau combat qui vise à préserver ce qui peut encore l’être dans la dignité humaine. Le recours à une mère porteuse n’est jamais une possibilité acceptable : c’est un détournement de l’ordre naturel, un nouveau signe de l’incroyable « ensauvagement » de notre société. La jurisprudence de la CEDH et les circulaires de Christiane Taubira sont là pour prouver que la location d’utérus n’est pas combattue avec la fermeté nécessaire. Nous connaissons bien la technique habituelle du progressisme, qui veut formater un homme nouveau : par des petits pas, il fait accepter à la société les plus cruels retours à la barbarie.

En France, on le sait, des entreprises américaines viennent démarcher des clientèles potentielles dans les rues de Paris. Il y a quelques semaines, un reportage de Valeurs actuelles montrait le quotidien inhumain imposé dans des usines à bébé en Inde. De telles organisations existent également en Afrique. C’est un nouveau genre de trafic des êtres humains, totalement inacceptable. Il faudrait veiller à ce que ces dispositions soient effectivement appliquées, afin que la France ne se couvre pas de honte au regard du monde.

Par ailleurs, on comprend tout à fait que des familles aient envie et besoin d’enfants. Dans notre culture et nos traditions, il y avait une solution acceptée pour cela : l’adoption. Bien sûr, je défends tout à fait l’adoption pour les couples en mal d’enfant. Mais, si l’on développait une option alternative à l’avortement, il y aurait là une solution tout à fait éthique qui réglerait ce problème, sans poser des difficultés juridiques qui semblent d’une complexité extrême.

M. Guy Geoffroy. Je salue les propos très intéressants de Mme Le Dain. Toutefois, je reprends les observations que j’ai faites tout à l’heure : certes, le Préambule de la Constitution de 1946 fait référence à la dignité de la personne humaine, considérée comme une valeur suprême, mais cela ne signifie pas que, du seul fait de cette mention, la notion d’indisponibilité du corps humain soit déjà inscrite dans la Constitution. Selon moi, il y a même un écart important entre ces deux affirmations, et l’argument des auteurs de l’amendement manque de solidité. Ainsi qu’on le dit communément, « si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant », surtout dans une matière aussi sensible que celle-ci, qui touche à autant de principes démocratiques et à une certaine forme d’éthique de la République, que nous sommes très nombreux à partager dans cette assemblée. Le texte proposé aujourd’hui ne vient nullement contredire ce qui est déjà inscrit dans le Préambule de la Constitution de 1946 : il vient le compléter d’une manière contemporaine, responsable et utile.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Je m’exprime au nom du rapporteur M. Philippe Gosselin, dont je partage totalement le point de vue.

Le rapporteur est évidemment défavorable à la suppression de cet article unique. Il considère qu’il convient de constitutionnaliser le principe d’indisponibilité du corps humain, car, contrairement à ce qui a été affirmé, il ne fait pas l’objet, aujourd’hui, d’une reconnaissance au niveau constitutionnel : il s’agit d’un principe d’ordre public reconnu par le juge, qui a fait l’objet d’une reconnaissance indirecte par le législateur en 1994, lorsque ce dernier a inscrit, dans le code civil, le principe de non-patrimonialité du corps humain, de ses éléments et de ses produits. Certes, le Conseil constitutionnel a reconnu que ce principe de non-patrimonialité – de même que ceux d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain – tendait à assurer le respect du principe de dignité de la personne humaine, principe à valeur constitutionnelle, mais ce n’est pas un principe constitutionnel et il n’est pas, en outre, l’exact synonyme du principe d’indisponibilité du corps humain.

Au regard des défis croissants auxquels notre société est confrontée, dont nous avons longuement parlé ce matin, il convient d’inscrire le principe d’indisponibilité du corps humain dans la Constitution. Encore une fois, le principe de dignité de la personne humaine est beaucoup plus large. Il a été reconnu comme principe à valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel, mais n’est pas inscrit explicitement dans la Constitution.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article unique est supprimé et la proposition de loi constitutionnelle est rejetée.

M. Guy Geoffroy. Vous prenez une lourde responsabilité !

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La Commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi visant à lutter contre le recours à une mère porteuse (n° 2706).

Avant l’article 1er

La Commission examine l’amendement CL5 de la rapporteure.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Cet amendement vise à demander au Gouvernement des explications précises et circonstanciées sur les initiatives qu’il a prises depuis les deux arrêts rendus par la CEDH en juin 2014, lesquels ont fragilisé l’interdiction de la maternité de substitution en France. À la suite de ces arrêts, le Gouvernement de M. Manuel Valls avait en effet réaffirmé son attachement à la prohibition française de la GPA. Il est temps de passer des déclarations d’intention aux actes. Il importe de connaître les actions précises que le Gouvernement a menées dans ce domaine.

L’article 4 de la proposition de loi tend à demander au Gouvernement des comptes sur les initiatives qu’il a déjà prises et sur celles qu’il envisage de prendre au niveau international en vue de l’adoption d’une convention sur l’interdiction de cette pratique.

Le présent amendement a une portée plus interne : il vise à demander au Gouvernement, premièrement, les raisons qui l’ont conduit à ne pas interjeter appel de ces arrêts alors qu’il en avait la possibilité et, deuxièmement, les démarches qu’il a entreprises depuis ces arrêts et celles qu’il pense entreprendre à l’avenir pour conforter l’interdiction française, en matière pénale et civile.

La Commission rejette l’amendement.

Article 1er (art. 227-12 du code pénal) : Distinction entre l’entremise en vue d’une gestation pour autrui et les autres infractions relatives à l’abandon d’enfant

La Commission est saisie de l’amendement CL1 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Cet amendement CL1 et l’amendement CL2 suivant, tous deux déposés par le groupe Socialiste, écologiste et républicain, ont le même objet : supprimer le renforcement de notre arsenal pénal en matière de lutte contre la maternité de substitution. Pourtant, un tel renforcement est absolument nécessaire, car le droit actuel est insuffisant et inefficace.

Il est insuffisant parce qu’il se borne à réprimer les intermédiaires par le délit d’entremise, prévu à l’article 227-12 du code pénal, et la supposition d’enfant, prévu à l’article 227-13 du même code, et que les peines prévues sont peu dissuasives. Or il convient de punir d’autres démarches liées à la maternité de substitution, en particulier la provocation à y recourir et la présentation de cette pratique sous un jour favorable. Ce sont là des dispositions concrètes, que je vous invite à voter.

Le droit actuel est, en outre, inefficace parce que, lorsque ces délits sont commis par un Français à l’étranger, ils ne peuvent être poursuivis en France qu’à la double condition de la réciprocité de l’incrimination et d’une dénonciation officielle par l’État dans lequel les faits ont été commis – tel est le cas pour la plupart des autres délits. Il importe de supprimer ce double verrou pour que ces délits soient poursuivis. Le législateur l’a déjà fait dans d’autres domaines, notamment la mise en péril de mineurs.

Je veux pour preuve de cette inefficacité l’extrême rareté des poursuites ouvertes et plus encore des condamnations prononcées sur le fondement des incriminations actuelles : entre 2009 et 2013, on a dénombré seulement dix-huit condamnations au titre de l’article 227 13 du code pénal.

Plutôt que de supprimer l’article 1er, je vous propose de vous rallier à mon amendement CL6, dont l’objet est de recentrer le volet pénal de la réforme sur une répression plus dissuasive des pratiques d’intermédiation et des comportements promouvant la GPA.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 1er est supprimé.

L’amendement CL6 de la rapporteure n’a plus d’objet.

Article 2 (art. 227-12-1 [nouveau] du code pénal) : Renforcement de la répression pénale de la gestation pour autrui

L’amendement CL7 de la rapporteure est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL2 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

En conséquence, l’article 2 est supprimé.

Après l’article 2

La Commission examine l’amendement CL9 de la rapporteure.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Cet amendement vise à créer le délit de vente d’enfants. La France se singularise par l’absence d’incrimination spécifique de la vente d’enfants, généralement appréhendée par l’intermédiaire d’autres infractions telles que la provocation à l’abandon d’enfants ou l’entremise en vue d’une adoption ou d’une grossesse de substitution. Or celles-ci ne recouvrent que partiellement les faits dont il est question.

Si nous souhaitons protéger les plus vulnérables, il faut créer une incrimination spécifique dans notre droit. Ainsi que l’a dit M. Guy Geoffroy, « si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant ». Je rappelle que le comité des droits de l’enfant de l’ONU signale régulièrement à la France les lacunes de son droit en la matière. Une affaire récemment jugée à Blois, à laquelle je vous invite à réfléchir, a révélé la faiblesse de notre arsenal juridique : une mère qui vendait les enfants qu’elle mettait au monde a été poursuivie et condamnée du chef d’escroquerie, car elle avait essayé de les vendre à deux familles ; si elle ne les avait vendus qu’à une seule famille, elle n’aurait peut-être pas été poursuivie.

Si, comme je le crois, nous sommes opposés au trafic des enfants sur tous les bancs de notre assemblée, il me semble important que nous votions cet amendement, d’autant que l’ONU nous y engage.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL8 de la rapporteure.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. L’article 2 de la proposition de loi visait à créer de nouvelles infractions et prévoyait l’application de la loi pénale française à ces infractions lorsqu’elles étaient commises à l’étranger par un Français ou une personne résidant habituellement en France, ainsi que le code pénal le prévoit déjà pour d’autres infractions telles que la mise en péril de mineurs. Pour ce faire, il supprimait la double exigence de la réciprocité de l’incrimination et d’une dénonciation officielle par l’État dans lequel les faits sont commis, qui conditionne généralement la poursuite des délits commis à l’étranger.

Le présent amendement tire les conséquences de la suppression de l’article 2 en prévoyant l’extraterritorialité de la loi pénale française pour la poursuite de toutes les atteintes à la filiation commises par un Français à l’étranger, c’est-à-dire des délits actuels de provocation à l’abandon d’enfant, d’entremise en vue d’une adoption ou d’une gestation pour autrui, de substitution volontaire, de simulation ou de dissimulation d’enfant.

Selon moi, nous pouvons tous nous entendre pour adopter cette disposition, qui constituerait un moyen de dissuasion efficace à l’égard des personnes qui se rendent à l’étranger pour recourir à une maternité de substitution interdite en France. De la sorte, nous mettrions enfin notre droit en accord avec nos paroles et nos bonnes intentions.

La Commission rejette l’amendement.

Article 3 (art. 47-1 [nouveau] du code civil) : Interdiction de tout acte et de toute décision portant reconnaissance d’une filiation avec un enfant obtenu par une gestation pour autrui

La Commission est saisie de l’amendement CL3 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer le volet civil de la réforme que nous proposons. Je crois nécessaire, au contraire, que le législateur prenne position sur la délicate question de la validité des actes d’état civil établis à l’étranger en vertu d’une convention de maternité de substitution.

Je rappelle que les enfants nés d’une GPA à l’étranger peuvent avoir une vie privée et familiale normale dans notre pays, en utilisant les actes d’état civil étrangers, lesquels font foi en France dès lors qu’ils ont été régulièrement établis, traduits et authentifiés. Cela vaut dans tous les domaines, y compris en matière de nationalité et de succession.

Ainsi, ces enfants bénéficient des mêmes protections et prestations que n’importe quel autre enfant, et leurs parents jouissent à leur égard de tous les attributs de l’autorité parentale. Ce ne sont pas des « fantômes de la République » ; ils ne sont pas inquiétés dans leur vie privée. En revanche, il est vrai que leurs parents peuvent l’être, mais ceux-ci ont contourné sciemment la loi, veulent en tirer les bénéfices et faire retomber la responsabilité de leur choix sur l’État, ce qui n’est pas faire preuve de bonne foi.

Ces enfants n’ont pas non plus de problème au regard de leur droit à une nationalité : ils disposent généralement de la nationalité du pays dans lequel ils sont nés et peuvent acquérir la nationalité française en vertu de l’article 21-12 du code civil s’ils ont été élevés pendant au moins cinq ans en France. Avec la circulaire du 25 janvier 2013, le Gouvernement leur a même facilité la délivrance de certificats de nationalité dès lors qu’au moins un de leurs parents est français.

Enfin, en matière successorale, la preuve de la qualité d’héritier pouvant être apportée par tout moyen, ils peuvent hériter de leurs parents sur le fondement de l’acte d’état civil étranger.

Le Gouvernement n’ayant pas interjeté appel devant la grande chambre, formation solennelle de dix-sept juges, des deux arrêts de la CEDH de juin 2014, rendus par une simple section de ladite Cour comprenant dix juges, il appartient au législateur de prendre position sur la question et d’inviter la CEDH à réexaminer sa position.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 3 est supprimé.

Les amendements CL10 et CL11 de la rapporteure n’ont plus d’objet.

Article 4 : Demande de rapport sur l’adoption d’une convention internationale relative à l’interdiction de la gestation pour autrui

La Commission examine l’amendement CL4 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. En 2014, je le rappelle de nouveau, le Premier ministre Manuel Valls a reconnu qu’il était nécessaire d’avancer sur la question de la maternité de substitution au niveau international et a proposé que la France lance « une initiative internationale qui pourrait aboutir, par exemple, à ce que les pays qui autorisent la GPA n’accordent pas le bénéfice de ce mode de procréation aux ressortissants des pays qui l’interdisent ». Pour timide et insuffisante qu’elle soit, cette proposition allait dans le bon sens. Toutefois, deux ans après cette déclaration, rien n’a bougé, et on peine à savoir quelles initiatives la France a prises pour faire avancer ce dossier au niveau international.

Comme nous, d’autres pensent qu’il faut avancer sur la négociation d’une convention de prohibition de la maternité de substitution au niveau mondial : le Parlement européen, qui s’est exprimé en ce sens le 17 décembre 2015 ; de nombreux acteurs de la société civile, notamment le collectif d’associations « No Maternity Traffic » et les promoteurs de la pétition internationale « Stop Surrogacy Now » ; le groupe de travail sur la filiation, les origines et la parentalité conduit par Mme Irène Théry ; les sénateurs M. Yves Détraigne et Mme Catherine Tasca dans leur rapport d’information sur l’assistance médicale à la procréation et la gestation pour autrui, publié récemment.

Pour toutes ces raisons, l’article 4 est utile.

Je soulève une dernière question : aujourd’hui, si l’on ne fait rien pour endiguer la maternité de substitution, on consacre la prévalence, voire le triomphe du père, ainsi que, de manière indirecte, le droit du sang. On se croirait de retour au XIXsiècle, lorsque seul le nom du père comptait pour l’enfant. Aujourd’hui, je pense franchement que d’autres débats nous attendent. Au nom des droits des femmes et de ceux des enfants, je vous serais reconnaissante de voter l’article 4. Il nous permettrait au moins de connaître les engagements du Gouvernement et les éventuelles avancées qu’il a obtenues s’agissant de la négociation d’une convention internationale afin de lutter contre le trafic des enfants et l’instrumentalisation du corps des femmes.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 4 est supprimé.

L’amendement CL12 de la rapporteure n’a plus d’objet.

L’ensemble des articles ayant été rejetés, la proposition de loi est rejetée.

Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je souhaite m’exprimer à titre personnel. Il s’agit de débats de société très délicats et complexes. Nous allons jusqu’à toucher à la notion de droit aux origines, point sur lequel les positions sur les divers bancs de notre assemblée sont extrêmement variées. Cela soulève aussi des questions sur la manière dont la nationalité est confirmée ou infirmée au fil des années, même pour des personnes qui sont devenues françaises – il est arrivé que l’administration remette en cause l’acquisition de la nationalité française en raison des origines des intéressés, en s’appuyant sur une interprétation de la loi. Cette question traverse tous nos groupes politiques, du seul fait que le mot « origine » est utilisé. Pour ma part, je suis très réservée sur les notions d’origine et de droit aux origines : une personne est ce qu’elle fait et ce que son environnement fait d’elle – je le dis en tant que scientifique.

Dans le cadre de ces débats, nous abordons des questions très importantes.

Il y a l’enfant né. Celui-ci a tous les droits, mais il n’a pas forcément droit à tout, en tout cas pas tout de suite. Il doit avant tout être protégé et être en sécurité dans notre pays. Très honnêtement, je crois qu’il l’est.

Il y a l’enfant à naître. Une question se pose tout d’abord concernant ce qu’il est. Je tiens à la répéter : tant qu’il n’est pas né, c’est-à-dire tant que ses poumons ne se sont pas déployés et qu’il n’a pas poussé son premier cri, c’est non pas un enfant, mais un fœtus. Ne l’oublions pas et ne faisons pas trop d’amalgames sur ces grandes questions, car elles touchent au droit et, au-delà, à des choses importantes. S’agissant de l’enfant à naître, une question se pose également concernant la femme qui le porte, ainsi que les gamètes et les ovules qui ont été, le cas échéant, implantés dans son corps. Ce ne sont pas des choses indifférentes.

Il y a l’enfant désiré. Cela renvoie à une notion de satisfaction. Or, dans une société moderne, démocratique, consciente et confiante, la satisfaction de tous les désirs doit-elle être une ambition commune ? La constitution d’un cadre légal où les besoins de tous seraient satisfaits ne signifie pas nécessairement que les désirs de tous doivent l’être. La différence, en droit, entre le désir et le besoin est un point essentiel. À mon sens, une société moderne est une société qui devrait tendre à ce que les besoins soient satisfaits, mais pas forcément tous les désirs. Car, alors, il n’y aurait plus de société, mais seulement un libéralisme outrancier. Il me semblerait dommage que la France soit la première à l’embrasser.

Mme Valérie Boyer, rapporteure. Je remercie tous mes collègues. Je partage les interrogations dont vous venez de faire part, Mme Le Dain. Il s’agit vraiment d’un débat de société majeur.

M. le président Dominique Raimbourg. Les deux textes dont nous venons de débattre seront examinés en séance publique le jeudi 16 juin.

*

* *

La Commission examine enfin la proposition de loi relative à l’exercice, par la Croix Rouge française, de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux (n° 3774) (Mme Françoise Dumas, rapporteure).

Mme Françoise Dumas, rapporteure. Merci, monsieur le président, de m’accueillir au sein de votre Commission.

La présente proposition de loi vise à faciliter l’une des missions statutaires de la Croix-Rouge : le rétablissement des liens familiaux. Celle-ci est consacrée par les conventions de Genève de 1949 et ses protocoles additionnels.

Cette mission recouvre quatre activités : la recherche des membres de la famille ; l’appui à la démarche de réunification familiale lorsque la Croix-Rouge a retrouvé les proches ; la transmission de nouvelles entre les membres de la famille lorsque tous les autres moyens de communication sont bloqués ou inaccessibles ; la délivrance de certains documents – pièces d’état civil, certificats, attestations – par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), pour faire valoir un droit, ou par les États.

Pour permettre à la Croix-Rouge française de retrouver plus facilement une personne recherchée dans le cadre de sa mission de rétablissement des liens familiaux, cette proposition de loi vise à lui accorder des dérogations ciblées afin qu’elle obtienne des administrations françaises, entendues au sens large, communication de documents administratifs comprenant des données à caractère nominatif susceptibles d’aider à retrouver la personne.

Ce texte résulte d’un travail de longue haleine : la Croix-Rouge m’a fait part de ses problèmes il y a deux ans, dans le cadre des travaux que j’ai menés en tant que rapporteure de la commission d’enquête chargée d’étudier les difficultés du monde associatif. Je suis très heureuse qu’il soit désormais inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée, d’autant que nous avons tous été sollicités récemment à l’occasion des journées nationales de la Croix-Rouge.

Comme vous le savez, la Croix-Rouge française est la première association dans notre pays, tant par la diversité de ses interventions dans le domaine de l’action sociale, médico-sociale, sanitaire et humanitaire, en France et à l’étranger, que par la densité de son maillage territorial – 910 délégations locales et 50 000 bénévoles – et de son réseau international – quelque 190 autres sociétés nationales.

L’objectif de cette proposition de loi est simple : aider des familles installées en France ou à l’étranger à retrouver, par l’intermédiaire du Mouvement international de la Croix-Rouge, des proches dont elles ont été séparées dans des situations violentes et traumatiques – guerres, conflits armés, attentats, catastrophes naturelles ou humanitaires.

Sont exclues, bien évidemment, les recherches de personnes disparues dans des conditions suspectes, les recherches généalogiques ou celles qui résultent d’une procédure d’adoption, pour lesquelles les services de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge ne sont pas compétents.

Si la demande de recherche d’un membre de la famille émane d’une personne installée à l’étranger, celle-ci doit s’adresser à sa société nationale de Croix-Rouge, qui formule ensuite une « demande entrante » auprès de la Croix-Rouge française si elle dispose d’indices laissant penser que cette personne est en France. Si la demande est formulée par une personne installée en France auprès de la Croix-Rouge française pour retrouver un proche disparu dans un autre pays, on parle de « demande sortante » : l’objectif est alors de mobiliser le réseau du Mouvement international de la Croix-Rouge pour retrouver la personne recherchée là où elle se trouve.

Dans une délibération n° 2012-161 du 24 mai 2012, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a autorisé la Croix-Rouge française à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel ayant pour finalité le rétablissement des liens familiaux. La CNIL a en effet considéré la finalité poursuivie comme déterminée, explicite et légitime. Dans cette délibération, elle a précisé que les données peuvent être collectées au moyen d’un formulaire de demande de recherche, établi par le CICR et utilisé par l’ensemble du réseau du Mouvement international de la Croix-Rouge française.

Le 21 juin 2014, à l’occasion du 150e anniversaire de la Croix-Rouge française, le Président de la République a réaffirmé le rôle d’auxiliaire des pouvoirs publics de la Croix-Rouge française et s’est engagé à faciliter son action, notamment dans le cadre de sa mission statutaire de rétablissement des liens familiaux.

La présente proposition de loi répond donc à cet engagement présidentiel en permettant désormais explicitement à la Croix-Rouge : d’obtenir communication de certains documents ou données à caractère personnel qui ne sont en principe communicables qu’à l’intéressé, auprès des administrations de l’État, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics administratifs, des organismes de sécurité sociale et des organismes assurant la gestion des prestations familiales ; de demander directement aux officiers d’état civil dépositaires des actes les copies intégrales et d’extraits d’actes d’état civil des personnes recherchées ; de saisir le représentant de l’État afin de vérifier l’inscription d’une personne sur les listes électorales et, le cas échéant, de prendre communication des données relatives à cette personne.

La proposition de loi précise également les conditions dans lesquelles un tiers peut être informé du sort de la personne recherchée. Si elle est vivante, les informations relatives à cette personne ne peuvent être communiquées qu’avec son consentement écrit ; si elle est décédée, la Croix-Rouge française indique le décès et, le cas échéant, le lieu de sépulture, aux tiers qui les lui demandent.

Il me semble que cette courte proposition de loi devrait faciliter grandement l’action de la Croix-Rouge française en améliorant le taux de succès des demandes de rétablissement des liens familiaux.

Elle me paraît d’autant plus nécessaire que, depuis deux ans, la Croix-Rouge française constate qu’un nombre croissant de personnes ont dû quitter leur pays pour des raisons humanitaires et se sont trouvées séparées violemment de leur famille. Les zones sensibles sont connues : Syrie, Ukraine, République démocratique du Congo, Guinée, etc. C’est ainsi que le service de la Croix-Rouge française a enregistré 200 demandes nouvelles de rétablissement des liens familiaux entre les mois de janvier et d’avril 2015, et 299 demandes nouvelles sur la même période en 2016.

Faciliter la mission statutaire de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge française auprès de nos administrations centrales et territoriales devient désormais impérieux.

D’autres États se sont engagés dans cette voie depuis longtemps déjà : l’Allemagne a actualisé la loi favorisant la mission de rétablissement des liens familiaux de la Croix-Rouge allemande en 2001 ; la Grande-Bretagne l’a fait en 2007, de même que la Belgique depuis bientôt dix ans. À titre d’exemple, en Belgique, un accord avec les autorités centrales a été signé afin de permettre aux officiers de recherche de la Croix-Rouge belge d’avoir un accès direct au fichier national d’état civil et au fichier d’hébergement des personnes vulnérables.

Je vous invite donc à adopter cette proposition de loi, sous réserve de quelques amendements rédactionnels et d’un seul amendement de fond que je vous proposerai, destiné à permettre à la Croix-Rouge française de saisir la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) en cas de refus ou de silence de la part de l’administration, afin de donner toute son effectivité à ce texte.

Mme Pascale Crozon. La Croix-Rouge française est régulièrement confrontée à un refus, de la part des administrations et des services publics, de transmettre des données personnelles concernant les personnes recherchées. Il est donc nécessaire de lui permettre d’assurer sa mission de rétablissement des liens familiaux prévue par les conventions internationales, les résolutions statutaires et les engagements des conférences internationales déjà repris par plusieurs pays européens. Ainsi, il est prévu que la confidentialité ne pourra plus être opposée aux demandes de la Croix-Rouge française.

Bien entendu, le groupe Socialiste, écologiste et républicain votera ce texte.

La Commission en vient à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article 1er : Dérogation en faveur de la Croix-Rouge française pour accéder aux documents mentionnés à l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration

La Commission adopte successivement l’amendement rédactionnel CL1 et l’amendement de précision CL8 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Article 2 : Droit d’accès de la Croix-Rouge française aux copies d’actes d’état civil

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL2 et CL3 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Article 3 : Dérogation en faveur de la Croix-Rouge française pour accéder aux listes électorales et aux informations personnelles afférentes

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL4 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La Commission examine l’amendement CL9 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement donne compétence à la Commission d’accès aux documents administratifs pour connaître des questions relatives à l’accès aux documents administratifs et à la réutilisation des informations publiques prévues par les articles 1 à 3 de la présente proposition de loi. Il permet donc à la Croix-Rouge française de saisir la CADA en cas de refus implicite ou explicite de la part des administrations françaises de lui communiquer des documents qu’elle aura demandés dans le cadre de sa mission d’intérêt général de rétablissement des liens familiaux. Jusqu’à présent, cela se faisait uniquement à titre tout à fait dérogatoire.

La Commission adopte l’amendement. L’article 3 bis est ainsi rédigé.

Article 4 : Encadrement des informations transmises à des tiers par la Croix-Rouge française sur une personne recherchée

La Commission adopte successivement l’amendement de précision CL5 et les amendements rédactionnels CL6 et CL7 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

La Commission adopte à l’unanimité l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

La réunion s’achève à 12 heures 45.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Nathalie Appéré, Mme Marie-Françoise Bechtel, M. Erwann Binet, M. Jacques Bompard, Mme Valérie Boyer, Mme Colette Capdevielle, Mme Marie-Anne Chapdelaine, M. Éric Ciotti, M. Jean-Michel Clément, M. Gilbert Collard, M. Sergio Coronado, Mme Pascale Crozon, M. Carlos Da Silva, M. Marc-Philippe Daubresse, M. Jean-Pierre Decool, Mme Françoise Descamps-Crosnier, Mme Sophie Dion, M. René Dosière, M. Philippe Doucet, Mme Françoise Dumas, M. Olivier Dussopt, M. Georges Fenech, M. Guy Geoffroy, M. Bernard Gérard, M. Yves Goasdoué, M. Philippe Gosselin, M. Philippe Goujon, Mme Françoise Guégot, M. Philippe Houillon, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Guillaume Larrivé, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Anne-Yvonne Le Dain, M. Patrick Mennucci, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Frédéric Poisson, M. Joaquim Pueyo, M. Dominique Raimbourg, M. Bernard Roman, Mme Cécile Untermaier, M. Daniel Vaillant, Mme Paola Zanetti, M. Michel Zumkeller

Excusés. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Christian Assaf, M. Dominique Bussereau, M. Patrick Devedjian, M. Marc Dolez, Mme Laurence Dumont, M. Daniel Gibbes, Mme Marietta Karamanli, Mme Sandrine Mazetier, M. Edouard Philippe, Mme Maina Sage, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, M. Patrice Verchère, Mme Marie-Jo Zimmermann

Assistaient également à la réunion. - M. Xavier Breton, M. Dino Cinieri, Mme Bernadette Laclais, M. Yannick Moreau, M. Dominique Potier, M. Paul Salen, M. Lionel Tardy, M. François Vannson