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Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi pour la croissance et l’activité

Samedi 17 janvier 2015

Séance de 9 heures 50

Compte rendu n° 16

Présidence de M. François Brottes, Président

–  Suite de l’examen, ouvert à la presse, du projet de loi pour la croissance et l’activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques)

–  Présences en réunion

La commission poursuit l’examen du projet de loi pour la croissance et l’activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques).

Article 44 : Mise en conformité de l’action spécifique avec le droit constitutionnel et européen

La commission examine l’amendement SPE248 de M. Jean-Frédéric Poisson, qui tend à supprimer l’article.

Mme Véronique Louwagie. Cet amendement tend à supprimer l’article 44, qui complète une ordonnance relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique afin de permettre à l’État de conserver un contrôle sur les entreprises privatisées dans des secteurs majeurs stratégiquement sensibles.

Cette ordonnance avait été prévue par l’article 10 de la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et à sécuriser la vie des entreprises. Nous regrettons qu’il soit ainsi légiféré dans l’urgence, en revenant aussi vite sur une loi récemment votée au lieu de mieux la concevoir d’emblée.

Nous souhaitons ensuite demander des précisions au Gouvernement sur la portée de ces mesures. L’étude d’impact sur cet article évoque la défense, mais qu’en est-il d’autres secteurs pouvant être considérés comme stratégiquement sensibles, dont le secteur énergétique et l’industrie agro-alimentaire ? Combien d’entreprises seront concernées ?

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. L’article 44 reprend en effet l’ordonnance du 20 août 2014 et le dispositif juridique permettant à l’État de moderniser son actionnariat, en particulier par l’établissement d’une action spécifique – appelée en bon français golden share – lors de la privatisation d’une entreprise. L’État évite ainsi de mobiliser du capital public tout en conservant des droits particuliers, justifiés par la nature de l’entreprise. Le champ d’application de l’action spécifique, conformément au droit européen, s’étend à l’énergie, à la défense, ainsi qu’à la santé et à la sécurité publiques.

Vous vous émouvez, madame Louwagie, de la manière dont nous revenons ainsi sur des dispositions toutes récentes. J’y suis sensible : on ne peut évidemment se féliciter de cette situation, dont nous avons parlé hier à propos de l’article 43. Elle n’est toutefois pas l’apanage des ordonnances, comme l’ont montré des débats sur de précédentes lois ; par ailleurs, il est parfois nécessaire de procéder à des ajustements. J’en prends néanmoins ma part de responsabilité, pour l’article 43 plus que pour l’article 44 : il est toujours préférable de viser juste dès le premier coup.

L’action spécifique visée à l’article 44 n’en est pas moins une nécessité. Il en existe trois aujourd’hui, dont deux concernent respectivement GDF-Suez et Thales. Une action spécifique portera sur le capital de Nexter ; nous y reviendrons dans quelques instants.

Un décret détermine les droits de l’État attachés à une action spécifique, parmi lesquels le contrôle de certains franchissements de seuil par les actionnaires, le contrôle de cessions d’actifs et la représentation de l’État au conseil d’administration sans voix délibérative. L’État s’assure ainsi que certaines entreprises considérées comme stratégiques ne subissent pas une évolution qui attenterait à nos intérêts particuliers.

Je vous suggère donc de retirer cet amendement, madame la députée ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Comme l’a rappelé le ministre hier, le Gouvernement a défini une doctrine de l’État actionnaire que traduisent l’ordonnance de 2014 ratifiée par le texte ainsi que plusieurs articles à venir. Cette doctrine soulève à mon sens deux questions principales. Premièrement, comment permet-elle de garantir les intérêts de l’État, qu’il s’agisse de ses intérêts patrimoniaux, des prérogatives de puissance publique ou des intérêts essentiels de la Nation ? Peut-être cet aspect n’a-t-il pas été suffisamment explicité par le Gouvernement. Deuxièmement, comment les opérations en capital sont-elles décidées, par qui, selon quels critères ? Plus précisément, quels sont les rôles respectifs du Parlement et du Gouvernement, en particulier du ministre de l’économie, lorsqu’il s’agit d’autoriser ces opérations ?

C’est pourquoi j’ai proposé hier, par des amendements portant articles additionnels après l’article 43 qui ont été adoptés par la commission, d’abaisser les seuils déclenchant l’intervention du Parlement afin de renforcer ses pouvoirs lors de la privatisation et, en adoptant les mêmes seuils, d’étendre le champ de la saisine obligatoire de la Commission des participations et des transferts.

Sur l’amendement SPE248, je partage l’avis défavorable du Gouvernement. L’action spécifique est un outil extrêmement important pour la doctrine de l’État actionnaire et a vocation à l’être de plus en plus. L’article 44 vise la cohérence avec la jurisprudence européenne sur ce point. Il était important de préciser le champ d’application de l’action spécifique.

M. Jean-Frédéric Poisson. Nous maintenons notre amendement, non par agressivité, mais par cohérence : l’article 44 pose les principes de la doctrine de l’État actionnaire, dont nous contesterons dans les articles suivants les modalités d’application.

La commission rejette l’amendement SPE248.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel SPE1517 des rapporteurs.

Elle en vient ensuite à l’amendement SPE1526 des rapporteurs.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Il s’agit d’inscrire dans la loi, qui n’est pas claire sur ce point, que le décret instituant l’action spécifique est dans tous les cas antérieur à la réalisation de l’opération.

M. le ministre. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement SPE1526.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels SPE1518 à SPE1523 et SPE1527 à SPE1529 des rapporteurs.

La commission adopte ensuite l’article 44 modifié.

Section 2

Simplification du cadre juridique de l’intervention de l’État actionnaire

Article 45 : Modernisation de la composition de la Commission des participations et des transferts et des règles déontologiques qui lui sont applicables

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels SPE1530 à SPE1532 des rapporteurs.

Puis elle adopte l’article 45 modifié.

Article 46 : Transparence des sociétés holding de l’État pour l’application des seuils légaux de détention

La commission est saisie de l’amendement SPE249 de M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Cet amendement tend à supprimer l’article. Les raisons en sont les mêmes que pour l’article 44.

M. le ministre. Avis défavorable. L’article 46 se justifie par la nécessité de compléter l’ordonnance du 20 août 2014 qui était, par suite de la loi d’habilitation, lacunaire s’agissant des règles de gouvernance applicables aux sociétés « transparentes ».

La philosophie générale est de donner plus de marge de manœuvre à l’État dans sa gestion des participations publiques pour lui permettre d’activer son capital en cédant des actions sans perdre des droits de gouvernance. Les dispositions voulues par le Gouvernement au cours des derniers mois tendent à moderniser la présence de l’État au sein des conseils d’administration pour la rapprocher du professionnalisme d’une gestion privée, à lui permettre de gérer les sociétés de manière plus flexible et à préserver ses intérêts stratégiques par l’action spécifique, en conformité avec le droit européen.

Nous avons fixé des objectifs chiffrés : le but est que l’État cède pour 8 à 10 milliards d’euros d’actifs au cours des dix-huit mois à venir, ce qui lui servira à se désendetter – pour un peu plus de 4 milliards d’euros au titre de la loi de finances pour 2015 – et à réinvestir, comme nous l’avons fait dans PSA l’année dernière, comme nous le faisons dans la Banque publique d’investissement, comme nous le ferons dans plusieurs sociétés ou à plusieurs occasions, en particulier dans le secteur de la défense comme cela pourrait être envisagé cette année. Rappelons que le portefeuille de l’État représente 110 milliards d’euros et 70 entreprises.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure thématique, la commission rejette l’amendement SPE249.

Puis elle adopte l’article 46 sans modification.

Section 3

Autorisation d’opérations sur le capital de sociétés à participation publique

Article 47 : Transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Groupement industriel des armements terrestres (GIAT) et de ses filiales

La commission aborde l’amendement SPE491 de M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion. Cet amendement concerne une opération qui n’est pas sans risque pour la souveraineté de l’État, puisqu’il s’agit de transférer au secteur privé la majorité du capital du Groupement industriel des armements terrestres (GIAT) et de ses filiales. L’exposé des motifs nous en donne le contour général : il s’agit de poser les fondements d’une consolidation au niveau européen entre deux entreprises d’armement terrestre de taille assez comparable, le Français Nexter Systems et l’Allemand KMW.

La consolidation des industries de défense à l’échelon européen est une nécessité reconnue de longue date. Ce constat vaut tout particulièrement de l’armement terrestre, victime des surcapacités industrielles en Europe, chez nous comme chez nos partenaires, de la baisse continue des budgets de défense, notamment en Europe, et du développement de la concurrence extrêmement rude des pays émergents. La France doit s’intégrer à ce mouvement, nul ne peut le contester.

Mais elle doit aussi préserver les fondements de sa souveraineté en conservant le degré d’indépendance nécessaire à l’équipement de ses forces armées. À cet égard, l’armement terrestre est essentiel car il est déterminant dans l’issue d’un conflit armé ; on le voit bien dans la bande sahélo-saharienne, par exemple. La France qui se veut souveraine ne peut donc laisser échapper la maîtrise de son industrie d’armement terrestre.

En quelques années, au fil des recapitalisations successives, la reconfiguration de GIAT Industries a coûté 4,5 milliards d’euros au contribuable français. Ces chiffres sont incontestables et, me semble-t-il, incontestés.

Voilà pourquoi, si l’on peut approuver le transfert au secteur privé d’une part du capital de GIAT, l’opération doit nous permettre en priorité de consolider au niveau national nos propres entreprises d’armement, tout en recherchant un ou plusieurs partenaires européens. Ne négligeons pas cette première phase, ou du moins cette phase essentielle, même s’il n’est évidemment pas question d’en rester là compte tenu de ce que sont devenus les marchés.

L’État dispose de tous les moyens nécessaires pour organiser cette consolidation nationale, en particulier autour de Thales, comme je le propose depuis longtemps, dans le sillage du programme Scorpion de modernisation de notre armée de terre prévu par la loi de programmation militaire et qui vient d’être confié à trois entreprises : Nexter, Renault Trucks Défense et Thales.

Nous sommes face à une décision politique délibérée qui favorise la mainmise de l’industrie allemande sur GIAT, donc sur Nexter. L’enthousiasme de nos voisins d’outre-Rhin, que j’ai pu mesurer en me rendant chez KMW à Munich et lorsque le président-directeur général de cette entreprise a été reçu par la commission de la défense, fait d’ailleurs apparaître notre naïveté. Rappelons-nous comment les Allemands ont torpillé le rapprochement entre EADS et BAE, où ils ne trouvaient pas leur compte. Je crains que la France ne se prépare une fois encore à travailler pour le roi de Prusse, et il ne s’agit pas d’un vain jeu de mots !

C’est donc une opération en deux étapes, nationale d’abord, européenne ensuite, qui devrait permettre le transfert du capital de GIAT au privé. Tel est l’objet de mon amendement. Le schéma idéal aurait été le suivant : l’État apporte le capital de GIAT Industries à Thales, à condition que celui-ci devienne l’opérateur du rapprochement entre Nexter et KMW. Dans ce schéma, l’État, qui en a le pouvoir, pousserait à l’intégration du secteur défense de Renault Trucks. Je crois savoir que cette entreprise est favorable à la cession et à la consolidation telle que je viens de l’esquisser.

J’appelle solennellement votre attention sur les conséquences de l’opération telle qu’elle est proposée sur notre souveraineté nationale, sur notre outil de production qui en sortira affaibli, sur les emplois et les compétences que nous y perdrons inévitablement.

M. le ministre. Vous proposez en somme, monsieur Fromion, de créer un pôle national en limitant l’ouverture prévue du capital à un simple rapprochement franco-français. Or, c’est un leader européen de l’armement terrestre que le présent article vise à créer. L’audition récente par la commission de la défense de MM. Haun et Burtin, qui dirigent respectivement KMW et Nexter, a montré l’état d’avancement des discussions en ce sens.

Le programme Scorpion ne représente qu’un quart du plan de charge de Nexter ; il ne saurait donc suffire à maintenir une activité nationale. En outre, le rapprochement que vous envisagez ferait de Nexter un acteur de niche, beaucoup plus fragile sur un marché devenu concurrentiel. Voilà pourquoi le Gouvernement lui préfère, au vu de ses échanges avec ses partenaires et avec l’entreprise, le rapprochement avec KMW, plus protecteur pour Nexter puisqu’il lui confère une surface commerciale bien supérieure.

Ce qui est ici demandé, c’est la possibilité d’ouvrir le capital des filiales de GIAT Industries, de les privatiser. En effet, Nexter est un actif essentiel de GIAT et le rapprochement avec KMW requiert un équilibre 50-50 qui suppose d’en passer par la loi. Il fera l’objet d’une action spécifique de l’État, conformément au dispositif que vous venez d’adopter et qui protège nos éléments de gouvernance. À chaque étape de la négociation, nous serons particulièrement sensibles, comme toujours, à ses conséquences sur l’emploi, la recherche-développement et les intérêts stratégiques français.

Vous avez fait référence aux oppositions que nous rencontrerions lors d’autres négociations avec nos partenaires allemands en matière d’industrie de défense. Dans le cas des négociations sur la fusion entre EADS et BAE, ce sont des désaccords géopolitiques ou industriels qui étaient en jeu et qui ont été très débattus en France, bien loin des discussions sur la répartition de la recherche-développement ou des emplois au sein de l’entreprise. S’il faut trouver un précédent à l’opération envisagée, c’est plutôt chez EADS lui-même, devenu Airbus. Et, en l’espèce, la manière dont les intérêts français ont été préservés en matière de recherche et d’emploi ne nous donne pas lieu de rougir des projets franco-allemands. Les auditions que votre commission a menées en témoignent. Voyez la géographie de la plupart des sous-holdings sectorielles du groupe Airbus, la répartition de la recherche-développement et la répartition stratégique des grands actifs.

Le Gouvernement demande ici l’autorisation de poursuivre les négociations entre Nexter et KMW. Après des échanges déjà nourris, nous en sommes au stade de la transmission d’informations confidentielles. Viendront ensuite les valorisations, puis la continuation du dialogue entre gouvernements, qui tendra naturellement à préserver les intérêts stratégiques et patrimoniaux de l’État.

Avis défavorable.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Même avis.

C’est une belle opération industrielle qui est envisagée. Rappelons que nous parlons des anciens arsenaux, dont l’avenir pouvait nous inspirer quelque inquiétude, à l’heure où, comme l’a souligné Yves Fromion, il s’agit pour eux de se doter d’une envergure internationale afin de se développer à l’exportation. C’est donc une opération « gagnant-gagnant ». Nous ne cessons de réclamer un partenariat européen : saisissons l’occasion qui nous est ici offerte d’en faire une réalité.

Le partenariat franco-allemand ici visé se caractérise par un équilibre 50-50 : l’État conserve 50 % du nouveau groupe. Il est encadré par toutes les garanties nécessaires : l’ordonnance déjà citée et l’autorisation législative, qui associe pleinement le Parlement à l’opération, ce dont nous pouvons nous féliciter ; la parité du capital ; l’action spécifique que nous venons d’adopter. Enfin, le conseil de surveillance du futur groupe sera composé de sept personnes, dont deux représentants de l’État français, deux représentants de la famille allemande actionnaire de KMW et trois indépendants, parmi lesquels sera choisi le président.

M. Yves Fromion. Ne nous trompons pas de débat : nous ne sommes pas défavorables au transfert au secteur privé d’une partie du capital. C’est la procédure qui nous pose un problème. En effet, nous avons le sentiment que les entreprises françaises sont laissées hors du circuit. Certes, on peut toujours espérer qu’elles y viendront ultérieurement. Mais EADS, qui a été cité en exemple, avait consolidé les entreprises françaises du secteur spatial et aérospatial, qui sont ainsi entrées dans la boucle ; c’est ce que vous n’avez pas su faire ici. Nos entreprises seront donc isolées face à la nouvelle co-entreprise franco-allemande.

Plus abouti, le projet aurait pu apporter beaucoup à notre industrie et à nos emplois. Mais vous vous contentez d’une opération a minima, animés d’un bel optimisme quant à la capacité de GIAT Industries à s’imposer au sein du futur binôme. Il faut être un peu naïf et ignorer les rapports de force entre la France et l’Allemagne en matière d’exportations pour s’imaginer que KMW va vendre les produits de GIAT sur le marché mondial !

M. Jean-Jacques Bridey. Depuis que le rapprochement a été annoncé le 1er juillet dernier, la commission de la défense a organisé nombre d’auditions et s’est rendue à Munich pour y rencontrer les dirigeants de KMW et visiter les installations. J’étais du déplacement, comme Yves Fromion, et je tiens à dire que son point de vue ne reflète pas celui de la commission de la défense, toutes tendances confondues. Nous verrons bien ce qu’il en est au moment du vote.

En définitive, Yves Fromion nous reproche de ne pas faire ce dont l’ancienne majorité n’a pas été capable. Le rapprochement entre Nexter et Renault Trucks, qui avait été étudié, n’a pu aboutir. Nous le regrettons tous, mais nous n’allons pas reprendre cette discussion. Après cet échec, la stratégie des dirigeants de Nexter et celle du ministère de la défense a complètement changé au profit d’un rapprochement avec un partenaire allemand de taille comparable qui propose des produits complémentaires dans la même gamme et se montre aussi offensif que nous. Il s’agit, comme l’a dit la rapporteure thématique, d’une belle opération, qui suppose de « privatiser » Nexter – en réalité, il s’agit que son capital devienne 50 % du capital d’une société deux fois plus importante et plus solide.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il faut toujours se montrer prudent lorsque l’on annonce le vote d’un autre groupe que le sien, monsieur le député. La position que nous défendons est très majoritaire au sein du groupe UMP, même si certains collègues ont pu dire autre chose ailleurs, dans d’autres villes, pour ne pas dire d’autres pays.

Monsieur le ministre, vous faites valoir d’abord qu’il faut ouvrir le capital de GIAT, et ensuite que les opérations comparables devraient nous rassurer. Sur le premier point, nous sommes d’accord. Si nous ne l’étions pas, c’est un amendement de suppression de l’article que nous aurions déposé. Simplement, dans les circonstances actuelles, la comparaison avec EADS nous paraît hasardeuse. Beaucoup moins armé que ne l’était EADS – précisément à la suite d’agrégations –, le groupe français concerné ne peut absolument pas imposer – ou négocier, si vous voulez, mais enfin on connaît le monde des affaires – une prise en considération équilibrée des intérêts des parties à l’export. En effet, KMW, beaucoup plus puissant sur les marchés internationaux, ne va pas s’affaiblir pour nous faire plaisir.

Ce sont donc les modalités de la fusion qui nous divisent, car nous n’avons pas la même appréciation des circonstances. Pour être réussi du point de vue français, le rapprochement devrait conférer à nos entreprises une force de frappe mondialisée en créant un opérateur européen, franco-allemand, équilibré. Cette dernière exigence est la seule à laquelle votre article ne satisfait pas. Pour y remédier, il faut constituer un plus gros groupe français afin de discuter avec un Allemand plus gros que tous les Français réunis.

Que nous n’y soyons pas parvenus – non plus qu’à d’autres choses, d’ailleurs –, j’en conviens volontiers, mon cher collègue, mais nous verrons ce que vous trouverez dans votre escarcelle quand le moment sera venu de dresser le bilan de la présente législature.

M. le président François Brottes. Vous n’avez pas mentionné la golden share.

M. Yves Fromion. Soyons clairs. J’ai rédigé en 2002 un rapport parlementaire sur GIAT Industries, dans lequel je plaidais explicitement pour son ouverture à l’international dans le cadre d’un partenariat européen. Il ne s’agit absolument pas de faire un procès d’intention au Gouvernement d’aujourd’hui ; c’est plutôt à ceux qui n’ont pas agi en ce sens qu’il faudrait intenter un procès. Je n’ai aucun complexe à cet égard. Pendant dix ans, l’opposition actuelle était au pouvoir et aurait pu mener une telle action ; je l’ai réclamé à tous les ministres de la défense successifs, en vain.

Il n’est donc pas question de polémiquer à ce sujet. Simplement, l’opération telle que vous l’envisagez ne me paraît pas conforme aux intérêts nationaux. Les éléments du projet dont j’ai pu avoir connaissance évoquent une reconfiguration de l’entreprise qui entraînera inévitablement des suppressions d’emplois et de sites. La rationalisation, on sait bien ce que cela veut dire !

M. le ministre. D’abord, il n’est pas question de reprocher à qui que ce soit de n’avoir pu créer un champion français, car à l’impossible nul n’est tenu. On ne peut pas faire des mariages forcés entre acteurs industriels. En l’espèce, tout projet de rapprochement franco-français s’est heurté soit à l’absence de synergies, qui le vidait de tout sens industriel – c’est le cas du rapprochement évoqué avec Thales, qui produit très peu de blindés –, soit au refus des autres actionnaires, comme c’est arrivé avec l’actionnaire suédois majoritaire de Renault Trucks Défense. Ces voies ont été essayées par l’entreprise elle-même et elles ont échoué. Voilà comment on en est arrivé à l’opération actuellement envisagée. Ne laissons donc pas penser qu’il existerait d’autres options évidentes.

Ensuite, cette opération consolide Nexter. Les deux acteurs du rapprochement sont comparables du point de vue de leur chiffre d’affaires comme de leur valorisation. Voilà d’ailleurs pourquoi ils auront part égale dans l’entité combinée. À vous entendre, messieurs, on croirait que l’on marie un gros Allemand à un petit Français !

Enfin, les intérêts français seront préservés grâce à l’action spécifique et aux négociations que nous allons conduire et dont vous serez constamment informés au sein de la commission de la défense, comme vous l’avez été jusqu’à présent.

Tel est le sens de l’opération que l’article tend à permettre, dans le cadre et compte tenu des contraintes industrielles que j’ai évoquées. Les intérêts de Nexter – qui, d’ailleurs, soutient elle-même la démarche – y seront préservés, comme les intérêts de la France en termes stratégiques et d’emploi.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. J’ajoute qu’il existe un dispositif garantissant l’autonomie commerciale aux gammes de chacune des deux entreprises. Par ailleurs, l’objectif est notamment de développer d’autres produits en commun en vue d’une synergie à l’export ; en la matière, nous devrions bénéficier de la force de l’entreprise allemande dans ce domaine, que vous avez vous-mêmes rappelée.

La commission rejette l’amendement SPE491.

Elle en vient aux amendements SPE490, SPE488 et SPE489 de M. Yves Fromion.

M. le président François Brottes. Je vous suggère, mon cher collègue, de présenter en même temps vos amendements SPE488 et SPE489.

M. Yves Fromion. Je prendrai le temps de présenter l’amendement SPE490, car il s’agit d’un sujet majeur et c’est mon rôle de parlementaire que de défendre les intérêts des nombreux salariés concernés.

Aux termes de cet amendement, le Parlement devra donner son avis lorsque l’on aura suffisamment progressé sur ce dossier.

À l’heure actuelle, bien des aspects de l’opération restent flous. Ceux qui ont étudié le sujet ne peuvent le contester. Que deviendra GIAT après le départ de Nexter, qui représente 99,2 % de son chiffre d’affaires ? Qu’en sera-t-il des filiales SNPE et Eurenco ? Leur capital va être transféré au privé ; sont-elles couvertes par la golden share ? N’oublions pas qu’Eurenco œuvre dans le domaine de la dissuasion nucléaire.

Ni le personnel de Nexter ni les syndicats ne sont au courant de rien, alors qu’une data room devait être mise sur pied pour les informer. Il est prévu de créer une co-entreprise pour cinq ans, pendant lesquels les deux entreprises doivent travailler à leur intégration en une seule ; mais l’on ne sait rien non plus du processus d’intégration à terme de la co-entreprise ni de ses conséquences. Au bout du compte, il n’y aura plus qu’une seule entreprise où les intérêts français seront sans doute fragilisés.

Quelles sont les perspectives d’extension à d’autres partenaires européens de la société commune ? Quelles seront les conséquences de la délocalisation aux Pays-Bas ? On nous a d’abord assuré que l’installation dans ce pays du siège de la future co-entreprise n’en aurait aucune, chacun des deux partenaires continuant de payer ses impôts chez lui. Puis, en auditionnant M. Burtin, nous avons appris qu’il y aurait des conséquences fiscales sur les dividendes.

Le flou est également total quant à la valorisation de Nexter. Certains – comme vous, monsieur le ministre – soutiennent que les deux entreprises ont la même valeur, mais les valorisations ne sont pas arrêtées, à en croire le PDG de Nexter. D’aucuns estiment que Nexter vaut 2 milliards d’euros et KMW 1,5 milliard, ce qui devrait entraîner le paiement d’une soulte de 500 millions d’euros, d’ailleurs évoquée dans la presse. Mais le PDG de KMW a dit très clairement devant la commission de la défense qu’il n’était pas question de soulte.

Quant aux perspectives de rationalisation-optimisation des activités des deux entreprises, nul ne sait non plus ce que l’on entend par là, mais cela implique évidemment des conséquences sur l’emploi.

Dans le cadre d’une mission que m’avait confiée M. François Fillon lorsqu’il était Premier ministre, j’ai rencontré dans son bureau à Berlin l’homologue de notre délégué général à l’armement, avec qui je me suis entretenu de consolidation industrielle. Savez-vous, monsieur le ministre, ce qu’il m’a déclaré les yeux dans les yeux ? « Mais, monsieur le député, la consolidation des industries de défense en Europe se fera, et elle se fera sous pavillon allemand ! » Vous comprendrez qu’ayant entendu cela, je sois particulièrement sensible à certains aspects du dossier.

Enfin, on m’objecte l’action spécifique ; j’en vois bien l’utilité, mais quel en sera le contenu ? Qui prendra les décisions stratégiques ? Un exemple : la France ne fabrique plus d’armement petit calibre : en 1998, M. Alain Richard, ministre de la défense, a fermé les lignes de fabrication de munitions petit calibre de GIAT. Nous devons donc trouver une nouvelle arme que nous allons donc acheter à l’étranger, vraisemblablement en Allemagne, chez HK. Jusqu’où l’action spécifique permettra-t-elle donc d’aller ? Que permettra-t-elle de corriger ? Quels garde-fous offrira-t-elle ?

L’amendement SPE488 concerne un problème important qui a été abordé en commission de la défense : en matière d’exportations, la France et l’Allemagne n’ont pas le même point de vue ni la même pratique. Le PDG de KMW nous a dit lui-même que cela posait un problème et qu’il espérait bien que l’opération prévue conduirait le ministre allemand, M. Sigmar Gabriel, à rapprocher son point de vue de celui de la France sur les questions d’armement. Toujours est-il qu’à l’heure actuelle, il existe des blocages et des difficultés. Nous avons déjà du mal à vendre nos équipements ; voulons-nous en outre dépendre d’une autre vision politique que la nôtre ? J’aimerais obtenir des éclaircissements sur ce point.

Quant à l’amendement SPE489, il tend à ce que le transfert de capital soit abordé au sein du Conseil de défense, lequel est saisi, aux termes du code de la défense, des questions touchant à l’approvisionnement des armées.

M. le ministre. La nouvelle loi que vous demandez dans l’amendement SPE490 serait redondante par rapport au contenu du présent article. GIAT possède actuellement deux filiales : Nexter et SNPE, qui compte des actifs stratégiques. Mais SNPE est déjà privatisable depuis une loi de 2009. Si nous en passons par la loi aujourd’hui, c’est en vue d’ouvrir le capital de Nexter, actif essentiel de GIAT. En d’autres termes, ce que vous demandez, c’est ce que nous faisons par le présent article. Votre amendement est donc satisfait.

En ce qui concerne l’amendement SPE488, c’est bien parce que je suis attaché à préserver l’autonomie française que nous avons voulu consolider les fondements juridiques de l’action spécifique. J’en appelle à votre cohérence : l’article 44, qui vous chagrinait, détaillait l’action spécifique sur laquelle vous m’interrogez maintenant. C’est bien ce dispositif que nous comptons appliquer à l’opération de fusion. Parmi ses conséquences, rappelons la possibilité de soumettre tout franchissement de seuil de détention de Nexter Systems SA à un agrément préalable du ministère de l’économie et le pouvoir donné à l’État de s’opposer à certaines cessions d’actifs de Nexter Systems ou de ses filiales. Je pourrai vous transmettre d’autres précisions à ce sujet. La volonté du Gouvernement et l’apparatus juridique sur laquelle elle s’appuiera permettront donc de préserver nos intérêts présents.

S’agissant des éventuelles restrictions export de l’Allemagne, je me permettrai, là encore, de vous demander un peu de cohérence. Vous ne pouvez pas à la fois soutenir que les Allemands ont une capacité d’export incomparablement supérieure à la nôtre et craindre que les restrictions export allemandes ne posent problème après le mariage ! S’ils sont si forts que vous le dites, le rapprochement nous permettra d’en bénéficier. En réalité, les relations entre la France et l’Allemagne en la matière sont régies par les accords Debré-Schmidt ; c’est un sujet sensible qui fait l’objet d’échanges au niveau politique – je m’en suis entretenu avec mon collègue Sigmar Gabriel – et administratif, et dont je puis vous assurer qu’il n’aura pas d’effet sur les intérêts constitués de Nexter.

En ce qui concerne enfin l’amendement SPE489, le Conseil de défense est présidé par le Président de la République, qui préside aussi le Conseil des ministres, lequel a adopté le projet de loi. Je ne vois donc pas l’intérêt de ce formalisme. Je veux toutefois vous rassurer, car ce débat légitime doit permettre d’apporter des éclaircissements sur une opération complexe. Il faut des échanges continus tels que ceux que vous avez au sein de la commission de la défense, et il y aura évidemment des débats au sein du Conseil de défense.

Avis défavorable, donc, à ces trois amendements.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure thématique, la commission rejette successivement les amendements SPE490, SPE488 et SPE489.

Puis elle examine l’amendement SPE487 de M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion. Il s’agit d’un amendement rédactionnel. Dans l’article, on trouve d’abord « et de ses filiales », puis « ou de ses filiales ». Pourquoi ?

M. le ministre. J’avoue avoir quelque difficulté à vous suivre. Vous vous inquiétiez tout à l’heure du sort des autres filiales de GIAT, et voilà que vous voulez les inclure dans l’ouverture de capital. En d’autres termes, vous proposez maintenant de privatiser SNPE. En réalité, l’amendement est satisfait puisque SNPE est privatisable depuis 2009. Voilà pourquoi on ne privatise aujourd’hui qu’une filiale de GIAT Industries : Nexter.

L’amendement SPE487 est retiré.

La commission en vient à l’amendement SPE486 de M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion. On sait que la société KMW est touchée par une procédure judiciaire liée à un contrat de vente de chars Leopard à la Grèce. Je ne connais pas le dossier de l’intérieur, mais cette situation crée un malaise et des difficultés au sein de l’entreprise. Je veux bien que l’on pousse au mariage, mais je tiens à appeler l’attention sur cet état de fait à l’heure où la France dit vouloir adopter une attitude éthique en matière d’exportations d’armement, conformément à certains textes de l’OCDE, et où l’on entend dans cette enceinte des discours lénifiants sur le sujet.

M. le ministre. Je suis sensible à votre argument. Nous verrons quel sera l’aboutissement de cette affaire, mais il convient d’être vigilants.

Contrairement à ce que vous suggérez, il n’est pas question d’un mariage forcé. Par cette loi, nous voulons permettre à Nexter de se rapprocher d’un partenaire allemand parce que cela fait sens du point de vue industriel et que c’est ce que souhaitent les deux dirigeants. Rappelons que KMW est une entreprise à 100 % privée, à actionnariat familial ; la future entité aurait donc des actionnaires publics côté français et privés côté allemand. Il s’agit d’un mariage spontané, que nous rendons possible parce que nous sommes convaincus de sa pertinence industrielle et stratégique.

Ensuite, des négociations sont en cours, qui nous conduisent à soumettre l’ouverture du capital à votre autorisation. Dans ce cadre, les dirigeants de Nexter ont la responsabilité de regarder de très près, au titre de ce que l’on appelle due diligence, les risques de contentieux du côté de KMW. Les précautions nécessaires seront prises afin d’éviter tout transfert de contentieux, toute contamination, comme cela se fait toujours dans la vie des affaires.

Enfin, votre amendement est satisfait par la loi, plus précisément par la procédure d’autorisation préalable des investissements étrangers en France (IEF) visée à l’article L. 151-3 du code monétaire et financier.

Avis défavorable.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Même avis.

En ce qui concerne le précédent amendement SPE487, je précise que la formule visée tend à protéger les intérêts des agents du ministère de la défense en fonction dans les entreprises concernées.

M. Yves Fromion. C’est bien pour obtenir une explication sur cette rédaction que j’avais déposé cet amendement.

J’en reviens à l’amendement SPE486. Monsieur le ministre, ne jouons pas les tartuffes. On demande à GIAT de prendre ses responsabilités, me dites-vous. Mais qui est actionnaire et qui pousse à cette opération, sinon l’État ? On peut toujours trouver un habillage pour apparaître vertueux dans cette affaire qui n’est pas très claire, mais ne nous voilons pas la face. Je comprends que vous essayiez de contourner ces difficultés ; c’est mon rôle de parlementaire que de rappeler leur existence. Certes, ces questions sont encadrées par des textes de loi et je m’en réjouis, mais, puisque tel est le cas, efforçons-nous de nous y conformer.

M. Jean-Frédéric Poisson. Le ministre a fait référence à l’article L. 151-3 du code monétaire et financier, mais celui-ci donne la faculté au ministre de refuser des opérations, alors que nous demandons une interdiction par la loi. Nous ne sommes pas dans le même registre : entre la faculté pour le ministre de s’opposer à une opération et l’interdiction stricte, la différence n’est pas mince. Peut-être notre amendement trouverait-il davantage sa place dans le code monétaire et financier qu’à cet endroit, mais en ajoutant une disposition qui, sans ôter sa faculté au ministre, prévoirait clairement une impossibilité en cas de corruption, serait, je crois, un affichage utile.

M. Jean-Yves Caullet. Une interdiction fondée sur une procédure judiciaire en cours pose problème, car une telle procédure ne signifie pas que la société sera reconnue coupable. Dans une telle situation, l’article qu’a cité le ministre est bien plus pertinent, car il permet d’agir en opportunité.

M. Jean-Frédéric Poisson. Qui d’entre nous accepterait l’idée de passer un accord électoral avec une personne sous le coup d’une procédure pénale ? Tant que la procédure n’est pas éteinte, un danger existe.

M. Jean-Louis Roumegas. Je profite de ce dernier amendement pour donner l’avis du groupe écologiste sur l’article 47. Nous sommes favorables à un pôle européen en matière de défense et d’armement, mais nous refusons le principe d’une fusion avec une industrie qui, du côté allemand, est détenue exclusivement par des intérêts privés. Nous voterons donc contre cet article.

M. Jean-Yves Caullet. Le parallèle que fait Jean-Frédéric Poisson n’est guère pertinent. L’amendement entend fonder en droit une interdiction sur la base d’une procédure engagée à l’étranger. Si un partenaire potentiel est sous le coup d’une procédure, il paraît normal, en opportunité, de ne pas s’associer avec lui, et le texte, précisément, le permet, mais il ne convient pas de donner à des juges étrangers le pouvoir de nous lier les mains de cette façon.

M. le ministre. Beaucoup de nos grandes sociétés sont malheureusement sous le coup d’une procédure judiciaire à l’étranger pour faits de corruption. Si nous inscrivons de telles restrictions dans la loi, nous aurons bien des difficultés à l’expliquer à nos partenaires, allemands ou autres, qui n’imposent pas à nos sociétés les mêmes contraintes. L’article du code monétaire et financier apporte des garanties à deux égards. L’État ne laisse pas l’expert seul : nous suivons cette négociation de près, nous ne nous en lavons pas les mains. En outre, si, avant la conclusion de l’opération, la procédure prenait une tournure préoccupante, l’article du code nous permet de la stopper. Si votre intention est bonne, monsieur Poisson, votre proposition est excessive.

M. Yves Fromion. Compte tenu des explications apportées par le ministre, ainsi que des engagements qu’il a pris, je retire mon amendement.

L’amendement SPE486 est retiré.

La commission adopte ensuite l’article 47 sans modification.

Article 48 : Suppression de l’obligation de détention majoritaire par l’État ou ses établissements publics du capital de la société anonyme dénommée « Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies »

La commission est saisie des amendements SPE802 de M. André Chassaigne et SPE1242 de Mme Monique Rabin, tendant à supprimer l’article, ainsi que de l’amendement SPE1916 des rapporteurs.

Mme Jacqueline Fraysse. L’article 48 met fin à la propriété de l’État sur le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies – LFB. L’exposé des motifs indique qu’il s’agit de permettre des reclassements au sein du secteur public des titres du LFB ou de ses filiales sans autoriser le transfert de la société au secteur privé. Or, l’article procède purement et simplement à la suppression, dans le code de la santé publique, de toute référence à une détention majoritaire du capital par l’État ou d’autres acteurs publics. C’est une première contradiction.

La ministre de la santé, que j’ai interrogée, m’a affirmé que le texte prévoyait l’ouverture du capital du LFB à la seule Banque publique d’investissement (BPI), et que cette disposition ne ramènerait pas la part de l’État en-dessous de 51 %. C’est une seconde contradiction.

De plus, le LFB a déjà subi une mutation de statut en 2004, passant d’établissement public industriel et commercial à société anonyme à capitaux publics majoritaires. Le Gouvernement de l’époque a justifié cette modification par la nécessité pour le LFB de drainer des capitaux extérieurs afin d’augmenter ses dépenses de recherche et de développement. Pour quelle raison ouvrir aujourd’hui le capital à la BPI – si c’est bien celle-ci qui est concernée, car à ma connaissance rien ne le mentionne ? Cette ouverture se fera-t-elle uniquement en direction de cette BPI ? Quelle sera l’étape suivante, si ce n’est la privatisation à marche forcée du laboratoire ?

Il s’agit d’un sujet extrêmement sensible, en termes d’éthique comme de sécurité sanitaire. Notre pays a une tradition de non-marchandisation des produits du corps humain. Dans ce secteur plus encore que dans d’autres, la puissance publique doit maîtriser l’ensemble des activités. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

Mme Monique Rabin. Cet article, même si je comprends qu’un projet de loi dédié à la croissance et à l’activité souhaite contribuer au développement du LFB, afin que celui-ci reste un laboratoire de niveau international, représente une attaque contre l’organisation de la collecte et du fractionnement du sang dans notre pays.

La France a décidé d’organiser la collecte et le fractionnement du sang à la suite de l’affaire du sang contaminé ; il suffit d’évoquer cette affaire pour que chacun comprenne combien le sujet est sensible. Des remises en cause sont pourtant déjà intervenues en 2004, 2006, 2009 et 2011. L’amendement que présentera notre rapporteure thématique à cet article me semble rester en deçà de ce qu’il conviendrait. Le LFB souhaite s’ouvrir à des entreprises, telles que Predica ou Eurazeo, qui ont déjà pris contact avec lui, et même entrer en Bourse. C’est très inquiétant.

Alors que l’article 71 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a entériné une attaque d’Octapharma contre l’Établissement français du sang (EFS), il faudrait reprendre le sujet dans sa globalité avec la ministre de la santé, afin de concilier la philosophie française sur le vivant et notre ambition économique.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Le texte du Gouvernement supprime la mention selon laquelle le capital du LFB est détenu en majorité par l’État, ce qui est nécessaire pour permettre l’entrée de la BPI au capital, à défaut de quoi le LFB ne pourra réaliser son projet industriel, et notamment la construction d’une usine qui lui permettra de multiplier par quatre ses capacités de production, 70 % de celle-ci étant écoulée à l’exportation. Ce laboratoire a besoin de financements, ce que l’État actionnaire n’assure plus depuis des années. Nous avons découvert en audition que la LFB est aujourd’hui conduit, pour couvrir ses besoins courants de trésorerie, à vendre des brevets très prisés. Il est impensable que ce laboratoire, qui est une véritable pépite, ne puisse réaliser ses projets de développement. C’est pourquoi le Gouvernement a proposé une solution.

J’ai cependant entendu les inquiétudes qui se sont exprimées à ce sujet, et je présenterai donc un amendement en vue de clarifier la position du Gouvernement. Il consiste à permettre l’entrée de la BPI au capital, tout en ajoutant un marqueur de notre engagement à l’égard de cette entreprise, en indiquant que l’État a la possibilité d’instituer une action spécifique. Le Gouvernement, dans un premier temps, nous a répondu que cette dernière disposition n’avait pas de portée juridique immédiate. Or, nous souhaitons l’inscrire dans le texte afin que le législateur sache qu’en cas d’ouverture du capital, il devra réfléchir à cette action spécifique, car nous savons qu’autrement cette réflexion n’aura pas lieu.

M. le président François Brottes. Je rappelle que l’action spécifique est un moyen de blocage.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Nous avons une urgence et une obsession. L’urgence est que les projets de développement du LFB se concrétisent. Pour cela, la BPI doit pouvoir jouer pleinement son rôle. Nous avons également une obsession : c’est que cet établissement ne soit jamais privatisé. J’insiste sur ce point, car on nous a fait hier un procès d’intention. En aucun cas ce texte ne propose de revenir sur la propriété publique du LFB. L’amendement que nous avons cosigné avec Clotilde Valter permet de poser des verrous à cet égard. Il s’agit, en somme, de permettre le développement d’une « pépite », le mot est juste en effet, et de la protéger de toute intrusion contraire à la protection des intérêts de notre pays et des impératifs de santé publique.

M. Jean-Louis Roumegas. Lorsque Cécile Duflot a évoqué hier l’inquiétante possibilité d’une privatisation d’une partie de la filière du sang, j’ai entendu des cris d’orfraie. Or, l’article 48 tend à supprimer les dispositions suivantes : « le capital du LFB est détenu majoritairement par l’État ou ses établissements publics » et « le capital de cette filiale est détenu, directement ou indirectement, majoritairement par l’État ou ses établissements publics ». Il y avait donc bien de quoi s’inquiéter, les intentions premières du Gouvernement étant plus que douteuses.

Les écologistes sont opposés à toute privatisation, et le présent article est un pas dans cette direction. Cette filière française du sang est fondée sur des principes éthiques dont l’histoire, tragique, nous a rappelé à quel point ils étaient importants. L’intrusion de laboratoires privés, à l’occasion d’un besoin de financement, serait une très mauvaise opération. Le Gouvernement confirmera sans doute qu’il s’agit d’ouvrir le capital à la seule BPI, mais une autre solution, très simple, était possible, à savoir que l’État continue de financer cette filière, comme il l’a toujours fait, sans recourir à la BPI, qui doit normalement servir à financer les PME. Cet article est le résultat des politiques d’austérité et de restrictions budgétaires, bien mal venues en la matière.

Mme Karine Berger. Loin de moi l’idée de douter des intentions du Gouvernement, mais tant l’article que la proposition de nos rapporteurs ouvrent la possibilité d’aller beaucoup plus loin. Le simple fait que la BPI entre au capital peut en effet poser problème. Comme vous le savez, la BPI souhaite recourir à la titrisation de sa dette. Elle utilisera le capital des entreprises où elle a investi pour servir de caution en cas d’émission de dette et, si nécessaire, titriser celle-ci. J’ai le sentiment que c’est ce type de montage que l’on souhaiterait pour financer le LFB. En cas de problème sur les titres émis par la BPI, c’est le capital de l’établissement servant de caution qui sera appelé, et cela peut bel et bien entraîner, qu’on le veuille ou non, une perte de contrôle d’une partie du capital dans les années à venir. Ni l’article, ni l’amendement ne peuvent techniquement garantir que le bilan du LFB soit maintenu sous le contrôle de l’État ou d’un organisme public, et ce en raison du fonctionnement de la BPI, qui a choisi de se porter caution par effet de levier plutôt que par la propriété du capital.

Mme Bernadette Laclais. Siégeant à la commission des affaires sociales, qui travaille sur le projet de loi relatif à la santé, je souhaite relayer l’inquiétude de nombreuses associations à ce sujet. L’activité du LFB est stratégique pour l’indépendance de notre pays en matière de médicaments dérivés du sang, qui représentent souvent la seule chance de survie pour les patients. Nos voisins belges sont aujourd’hui dépendants de pays étrangers, notamment de notre LFB, pour l’activité de fractionnement, et, malgré la qualité de leurs fournisseurs, ils nous disent regretter leur décision. En Italie, l’État a au contraire injecté 300 millions d’euros dans son laboratoire de fractionnement.

Selon le statut actuel du LFB, 49 % du capital peuvent être redistribués. Pourquoi ne pas prélever sur cette part, plutôt que d’ouvrir d’autres possibilités ? Le statut actuel permet déjà une redistribution. Sans mettre en cause les intentions du Gouvernement, je souhaite relayer les inquiétudes des associations, qui attendent des explications. Pourquoi sortir du cadre actuel ?

Mme Jacqueline Fraysse. Je fais mien le qualificatif de « pépite » pour ce laboratoire, qui mérite bien sa renommée internationale de pionnier dans le domaine. Ce fait à lui seul devrait conduire l’État à dégager des moyens pour le défendre, sans transgresser les règles éthiques du don anonyme et gratuit.

Avec l’entrée de la BPI au capital, le problème du contrôle de l’État est posé. L’amendement pourrait sembler y répondre mais, à y regarder de près, on s’aperçoit qu’il a le même objectif que l’article, à savoir un recul de l’État dans le capital, en permettant aux organismes publics, tels que la BPI, d’être majoritaires. Un scénario de 51 % de parts à la BPI et de 49 % au privé serait ainsi possible, ce qui est contradictoire avec les affirmations de la ministre de la santé et représente une perte de contrôle de l’État.

En ce qui concerne la seconde partie, à savoir la golden share, qui permet à l’État de conserver un certain contrôle sur une entreprise privatisée, vu l’amendement, il ne faut pas nous rouler dans la farine.

M. le ministre. L’Établissement français du sang, monsieur Roumegas, n’est pas le LFB, et la collecte n’est pas le fractionnement : c’était la confusion de votre collègue hier, ne la refaites pas aujourd’hui.

Le LFB, sur le fondement de son expertise scientifique, a développé bien d’autres activités, notamment des activités de biotechnologie aux États-Unis. Avec une croissance de 9 % par an, il a besoin d’un accompagnement en capitaux pour se développer, et notamment pour construire, en France, une usine de médicaments dérivés du plasma sanguin, pour un montant de 250 millions d’euros.

L’article 48 supprime la phrase selon laquelle le capital du LFB doit être détenu majoritairement par l’État ou ses établissements publics, dans la mesure où la BPI n’est pas, juridiquement, un établissement public mais un organisme public. Cette phrase étant supprimée, l’ordonnance du 20 août 2014, dont la commission spéciale a voté hier la ratification, précise qu’il faut passer par la loi pour privatiser toute entreprise dont le chiffre d’affaires est supérieur à 150 millions d’euros. Le chiffre d’affaires du LFB étant de 480 millions d’euros, ce laboratoire ne peut donc être privatisé sans intervention préalable du législateur. Dans le cas où le législateur souhaiterait, à l’avenir, privatiser le LFB, le présent article ne peut l’en empêcher, ni aucune mesure législative que nous voterions, mais nous n’ouvrons aucunement cette possibilité nous-mêmes.

En matière de titrisation, madame Berger, la BPI ne peut pas tout faire, comme vous semblez le suggérer. Vous n’ignorez pas que l’on titrise rarement un seul actif. Imaginons cependant que la BPI souhaite titriser sa participation. Il s’agirait alors d’un transfert de propriété et l’ordonnance du 20 août 2014 s’appliquerait. Une privatisation ne peut donc avoir lieu par ce biais, en supposant que la BPI s’amuse à jouer à ce jeu-là.

Si, sur des sujets comme la défense, dont nous venons de discuter, et sur d’autres dont nous discuterons, nous avons cherché à donner de la mobilité aux détentions capitalistiques de l’État pour que les sociétés se désendettent ou réinvestissent, il ne s’agit ici que de faire bénéficier une entreprise des moyens de se développer. L’amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques rend cette intention plus claire. Le sang est un sujet éminemment sensible, mais nous avons aussi, en tant qu’actionnaire public, la responsabilité de développer un actif d’une grande qualité technologique.

Mme Monique Rabin. N’existe-t-il d’autre solution que de faire appel à la BPI ? Nous savons que les multinationales du médicament sont à la porte : le laboratoire, que j’ai interrogé, souhaite, à terme, s’ouvrir à ces sociétés.

Je sais que la rapporteure thématique a tout fait pour border le nouveau dispositif, notamment par l’action spécifique, mais à supposer que l’État décide d’engager une telle action, l’Union européenne ne partage pas du tout notre philosophie. La Cour de justice de l’Union européenne a ouvert l’EFS à l’entreprise Octapharma. De même, l’Europe a jugé illégale la détention de golden shares par l’État espagnol, par exemple. Le Conseil d’État français a par ailleurs décidé que les produits sanguins étaient désormais des médicaments, donc des produits de marché. Ne pourrait-on supprimer cet article et réfléchir à d’autres types de financement, pour donner satisfaction au LFB tout en préservant notre éthique ?

M. Jean-Yves Caullet. Nous pouvons faire litière des procès d’intention : le dialogue qui vient de s’instaurer montre bien que nous tenons tous à ce que ce laboratoire demeure sous contrôle public. De même, nous admettons tous que ce laboratoire a des potentialités technologiques qu’il est de notre devoir de mettre en valeur et de développer. L’amendement clarifie les garanties prévues par l’article. Sa première partie précise clairement que le capital ne peut être ouvert qu’à des établissements, entreprises ou organismes publics. La seconde partie pose une double garantie, en rappelant l’ordonnance d’août 2014, qui ne permet une privatisation que par la loi, et en prévoyant une golden share.

Je ne suis pas un spécialiste de ces questions, mais puisque nous cherchons à introduire des verrous pour éviter toute forme de dérapage, il me semblerait souhaitable d’indiquer que les opérations ne peuvent être mises en œuvre que dès lors que l’État détient une action spécifique. Nous indiquerions ainsi que, si la législation européenne mettait un jour en cause la golden share française, l’ensemble de la structure capitalistique devrait alors être verrouillée autrement.

M. Jean-Frédéric Poisson. Vous avez, monsieur le ministre, dans votre réponse, parfaitement identifié l’origine du problème. Insérer un sujet si sensible, si symbolique, si chargé de suspicions – alors même que l’affaire du sang contaminé a déjà plus de vingt-huit ans –, entre des dispositions concernant la cession de capitaux d’une industrie fabriquant des armes à feu et d’autres dispositions concernant la cession du capital des aéroports, a de quoi surprendre, et ne favorise pas la clarté.

Ensuite, alors que vous avez renvoyé au projet de loi de financement de la sécurité sociale le sujet des professions réglementées sur la santé, vous entendez traiter ici et maintenant le présent sujet, beaucoup plus sensible, sans justification particulière, à moins que les besoins de financement du laboratoire soient à ce point pressants.

Par ailleurs, l’article supprime toute référence à la maîtrise par l’État du capital. L’amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques rétablit les garanties que nous exigeons tous : il rétablit en réalité ce que vous venez de dire mais qui ne figure pas dans le texte de l’article.

L’articulation de la golden share avec le dispositif n’est pas possible autrement. À vrai dire, nous ne pouvons être sûrs des conséquences. Dès lors que l’on procède à une organisation de capital via un organisme bancaire, quel qu’il soit, la porte est entrouverte, et l’on prend des risques. Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera l’amendement des rapporteurs mais s’abstiendra sur le vote de l’article.

M. Jean-Louis Roumegas. J’entends de nouveau des cris d’orfraie, à propos de prétendus procès d’intention. Sans la vigilance des députés, les intentions du Gouvernement sur cet article seraient restées inexpliquées, alors que les doutes étaient plus que fondés. Vous tentez à présent, monsieur le ministre, de lever ces doutes, mais votre réponse ne me satisfait pas. Monique Rabin a demandé si l’on ne pouvait faire autrement. Si le laboratoire a besoin de se développer, c’est que ses activités sont devenues extrêmement rentables, et chacun sait que les grands laboratoires privés souhaitent s’y associer. Alors que le secteur public, en investissant dans la recherche, a créé une pépite, voici que, maintenant qu’il s’agit de produire, vous appelez le secteur privé pour qu’il récolte les bénéfices. Si nous en sommes arrivés là, c’est que vous avez fait le choix d’une politique d’austérité. Il y a bien une autre solution : l’investissement public dans une activité stratégique et devenue rentable !

M. le président François Brottes. La BPI est publique et a des missions publiques.

Mme Jacqueline Fraysse. Si l’État ne dégage pas les moyens nécessaires pour permettre à ce laboratoire de se développer, c’est bien en raison de choix politiques : le Gouvernement ne veut pas mettre de l’argent de l’État dans ce laboratoire. Vous affirmez qu’il s’agit seulement de permettre l’entrée de la BPI, un organisme public, mais le texte supprime toute référence à la maîtrise de l’État. Si le problème est réglé par l’ordonnance, monsieur le ministre, qu’est-ce qui vous empêche d’inscrire dans la loi que l’État conserve, quoi qu’il arrive, le contrôle de cet établissement ? L’amendement, je l’ai dit, ne règle pas ce problème, malgré certaines apparences. Si vous n’avez pas l’intention de privatiser, ce qui se passe avec Octapharma est néanmoins très significatif : cette société privée fabrique et la société publique distribue !

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Notre amendement va au bout des garanties pouvant être apportées. Celles-ci consistent à rappeler que tout changement de la structure du capital devra passer par la loi – et je rappelle que sur ma proposition, la commission spéciale a adopté la nuit dernière un amendement élargissant les pouvoirs du Parlement en la matière par l’abaissement des seuils – et à prévoir pour l’avenir la possibilité d’une action spécifique : cette action elle-même ne peut toutefois être décidée aujourd’hui puisque nous n’ouvrons pas le capital au secteur privé. Si nous venons de voter l’article 44, madame Rabin, c’est parce que nous souhaitons mettre la législation française en conformité avec celle de l’Union européenne s’agissant de l’action spécifique.

Il y a urgence : le LFB, je l’ai dit, est en train de vendre, donc de céder à la concurrence, des brevets. L’entrée de la BPI au capital est très importante car, dans le portefeuille de l’Agence des participations de l’État (APE), la LFB est la seule entreprise de son genre, tandis que la BPI a investi ces dernières années dans ce secteur et connaît donc bien le domaine des biotechnologies et de la biopharmacie. Il est important de pouvoir s’appuyer sur une telle expertise ; c’est un atout supplémentaire.

Je ne vois pas quel problème poserait l’entrée de la BPI, un organisme public, sachant que la vocation de celle-ci est d’aider les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et PME, ce qu’est bien le LFB, qui a besoin d’être aidé dans la durée. En audition, M. Nicolas Dufourcq nous a confirmé que l’intention de la BPI était d’entrer au capital de cette entreprise dans la durée, entre quinze et vingt-cinq ans. Nous pensons avoir répondu à l’ensemble des préoccupations qui se sont exprimées.

M. le ministre. La rapporteure thématique vient de répondre aux préoccupations de M. Poisson sur l’articulation du dispositif. Le silence dans le code de la santé publique que crée l’article 48 est en réalité couvert par l’ordonnance du 20 août 2014, qui garantit une détention publique. Ce point est clarifié par l’amendement.

Je n’ai pas réagi aux propos de M. Roumegas, mais il arrive que l’approximation devienne offensante. Je relis donc l’exposé des motifs du projet : « L’article 48 permet des reclassements au sein du secteur public des titres du LFB ou de ses filiales. Il n’autorise pas le transfert au secteur privé de la société. »

M. le rapporteur général. Il ne faut pas faire du principe de précaution un principe de paralysie, car l’on sait très bien que, si nous n’agissons pas aux côtés de cette filiale, qui pour vivre vend des brevets, elle risque tout simplement de s’affaiblir et de s’éteindre. Nous aurions alors une responsabilité dans le fait d’avoir laissé ce que nous avons appelé une pépite devenir un astre mort.

Grâce au travail que nous avons mené avec Clotilde Valter, les choses sont verrouillées « ceinture et bretelles ».

Notre majorité ne veut pas laisser porter atteinte, par des intérêts privés, aux intérêts vitaux de la santé publique. Mais si une autre majorité devait nous succéder dans deux ou trois ans, je ne pense pas non plus qu’elle voudrait porter atteinte aux intérêts vitaux de la santé publique au bénéfice d’intérêts privés et marchands, parce que, de par l’histoire que nous avons vécue et la sensibilité qui est celle de notre pays, il n’y aura pas une majorité de républicains pour donner réalité aux fantasmes et aux angoisses qui ont été formulés ici ou là.

Faisons-nous un peu confiance. On ne peut pas manifester ensemble pour rappeler que l’on a des valeurs communes puis dire le lendemain qu’il faut se méfier de l’avenir. Je ne crois pas qu’il y aura dans notre pays une majorité suffisamment scélérate et imbécile pour solder les intérêts vitaux de la santé publique.

J’ai confiance à la fois dans les républicains de notre pays et dans la nécessité d’aider cet institut de recherche à prospérer et à permettre le développement et le rayonnement de la santé publique française.

Mme Jacqueline Fraysse. Ce n’est pas le sujet !

M. Jean-Yves Caullet. Tout à l’heure, je vous ai fait part de mes interrogations. Le ministre, la rapporteure thématique et, à l’instant, le rapporteur général, de façon extrêmement brillante, ont apporté, je crois, toutes les réponses à ceux qui se posent des questions. Au nom du groupe socialiste, je remercie le rapporteur général de permettre à chacun d’exprimer un vote positif sur cet amendement qui montre notre attachement à la République et au caractère public de ce secteur.

La commission rejette les amendements SPE802 et SPE1242.

Puis elle adopte l’amendement SPE1916 et l’article 48 est ainsi rédigé.

Article 49 : Transfert au secteur privé de participations majoritaires de l’État dans deux grands aéroports régionaux

La commission examine les amendements identiques SPE820 de M. André Chassaigne et SPE1388 de Mme Michèle Bonneton, tendant à supprimer l’article, ainsi que les amendements SPE825 et SPE819 de M. André Chassaigne, SPE993 de M. Jean-Christophe Fromantin, SPE1794 des rapporteurs et SPE810, SPE827 et SPE836 de M. Jean-Frédéric Poisson.

Mme Jacqueline Fraysse. L’amendement SPE820 vise à supprimer cet article qui prévoit la vente des participations de l’État dans les sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon en transférant au secteur privé la majorité du capital des sociétés.

Ce n’est pas en bradant son patrimoine et en détricotant ses services publics que l’État relancera l’économie dans la justice sociale. Cette décision est d’autant plus irrecevable que ces deux sociétés sont rentables, puisque le résultat net de la société Aéroports de la Côte d’Azur a été de 13 millions d’euros en 2012 et de 16,6 millions d’euros en 2013. Quant à Aéroports de Lyon, qui a obtenu un prêt de 140 millions d’euros de la BPI pour construire un terminal flambant neuf, son résultat net est légèrement inférieur mais il reste bénéficiaire, puisqu’il s’est élevé entre 9 et 12 millions d’euros par an entre 2009 et 2012.

La décision de l’État, dans une logique de court terme, de brader deux aéroports dans lesquels il est encore majoritaire nous paraît complètement disproportionnée par rapport aux enjeux, dans la mesure où l’objectif affiché est d’éponger une dette qui est pour partie illégitime. Comment peut-on prendre une décision aussi grave au seul prétexte d’éponger un peu une dette ?

M. Jean-Louis Roumegas. Je suis pleinement en phase avec Jacqueline Fraysse.

Je voudrais rapprocher ce débat de celui que nous avons eu sur les concessions d’autoroutes. J’ai regretté le peu d’empressement dont a fait preuve le Gouvernement pour mettre fin à ces contrats de concession et remettre ces activités pourtant juteuses dans le giron public. Or, on voit que le Gouvernement s’apprête à céder très facilement au secteur privé des aéroports qui sont pourtant rentables. Nous ne comprenons pas cette logique fondée sur l’économie libérale et nous ne la partageons pas.

Mme Clotilde Valter, rapporteure thématique. Avant de présenter l’amendement SPE1794, je souhaite vous dire comment j’ai enclenché le raisonnement et réfléchi à la question qui nous était posée, sachant que ma réaction spontanée a été celle qui vient d’être exprimée, c’est-à-dire de refuser le dispositif tel qu’il nous était proposé.

Pour avancer dans mon travail, je me suis posé une série de questions que je vais vous expliciter et qui m’ont permis de parvenir à l’amendement que je vous propose.

Quelles sont les prérogatives de l’État dans la situation actuelle où il est majoritaire dans les sociétés de gestion ? Je vous rappelle qu’il ne s’agit pas de privatiser les aéroports – l’État reste propriétaire des investissements et des infrastructures – mais les sociétés de gestion. Par ailleurs, l’État assure la fonction de régulateur du secteur. Dès lors que l’État reste propriétaire des infrastructures, qu’il reste régulateur et qu’il donne son accord sur la tarification et sur les ouvertures de lignes, il conserve des prérogatives extrêmement importantes, voire déterminantes s’agissant des aéroports concernés.

En revanche, le processus de privatisation doit être encadré par la loi, car nous avons pu constater, à travers les auditions que nous avons menées, sur la base de l’exemple de l’aéroport de Toulouse, qui nous a été offert comme sur un plateau par le Gouvernement, qu’il comporte des insuffisances. Le cahier des charges qui est établi ne comporte qu’un critère, celui du prix. Cela veut dire que le processus ressemble, sans en avoir les caractéristiques, à une mise aux enchères, ce que nous refusons. Le cahier des charges de l’appel d’offres doit prévoir des éléments importants en matière de transport aérien, comme la préservation des intérêts essentiels de la Nation, à laquelle notre amendement fait référence.

Comme je viens de l’indiquer, l’amendement tire tous les enseignements de la réflexion qui a été conduite à travers les auditions, et en particulier du cas de Toulouse. Nous devons avoir l’honnêteté de dire que le transfert n’a pas de conséquences importantes en tant que telles, dans la mesure où le seul élément que l’État perd dans ce transfert, ce sont les actes de gestion courante de la société de gestion.

L’État doit avoir la possibilité de faire prévaloir les intérêts essentiels de la Nation, s’agissant de la place de la France dans le transport aérien international, de notre compagnie nationale et du hub de Roissy.

La procédure, telle qu’elle est définie, pose problème, car seul le critère financier est examiné. Nous pensons certes qu’il n’est pas acceptable que l’État puisse être spolié, mais un élément au moins aussi important, aujourd’hui non pris en compte, est constitué par les intérêts essentiels de la Nation.

C’est pourquoi notre amendement prévoit qu’une autorisation préalable sera donnée par le ministre des transports, que les intérêts essentiels de la Nation seront préservés et que le candidat retenu dispose d’une expérience de la gestion aéroportuaire, en clair que ce ne soit pas une société financière.

Nous posons également le principe qu’à partir de l’entrée en vigueur cette loi – et c’est un profond changement avec le dispositif qui existe aujourd’hui dans notre droit –, tout transfert de participation majoritaire sera soumis systématiquement à l’autorisation du Parlement. Nous constatons, avec ce qui se passe aujourd’hui pour les aéroports de Nice et de Lyon, que le transfert au secteur privé d’une partie du capital des sociétés de gestion des aéroports est autorisé par la loi tandis que l’aéroport de Toulouse relève d’un décret. L’amendement que nous proposons prévoit que ces opérations devront faire systématiquement l’objet d’une autorisation du Parlement. Cette mesure renforce ce qui a été fait à l’article 43, qui conforte le rôle du Parlement dans les opérations en capital.

Avec ce principe général, une fois que la loi sera votée, aucune opération du type de celle de Toulouse ne pourra être conduite. Par ailleurs, nous prévoyons d’encadrer le processus de privatisation pour que les intérêts nationaux soient pris en compte.

M. le président François Brottes. Permettez-moi de saluer une fois de plus, d’une part le travail des rapporteurs qui, article après article, apportent des contributions de fond assez considérables, ce qui montre qu’ils ne sont pas trop de huit sous la coordination du rapporteur général, et d’autre part l’ouverture du Gouvernement, grâce à laquelle le dialogue se transforme en coconstruction législative.

Madame la rapporteure thématique, c’est la deuxième fois que vous donnez davantage de droits au Parlement à travers les propositions que vous faites. Je pense que l’histoire vous en saura gré.

M. le ministre. La rapporteure thématique a parfaitement décrit la situation et montré notamment en quoi l’ouverture du capital des sociétés de gestion aéroportuaires diffère profondément de celle des concessions d’autoroutes : en effet, l’ouverture du capital est limitée et un contrat de régulation économique l’encadre.

L’autorisation qui est demandée ici va dans le sens d’une meilleure utilisation du capital de l’État. Comme ce n’est pas en tant qu’actionnaire, mais en tant que régulateur que nous exerçons le rôle le plus important pour la population française, il nous paraît opportun de nous séparer des titres que nous détenons dans ces sociétés de gestion, tout en conservant une sensibilité plus particulière, renforcée encore par l’amendement des rapporteurs, à la régulation de ce secteur. D’ailleurs, lorsque l’on parle avec les gestionnaires ou les collectivités locales concernés, on se rend compte qu’ils sont bien plus préoccupés par l’ouverture des lignes que par la détention du capital. L’ouverture des lignes reste dans les mains de l’État. C’est la direction générale de l’aviation civile (DGAC) qui en a le contrôle et qui la régule.

Ce que nous proposons ici a un sens sur le plan capitalistique : il s’agit de mieux utiliser le capital. L’affaire de Toulouse a montré la forte rentabilité d’une telle opération, comme les chiffres l’attestent. En moyenne, les dividendes que nous avons perçus au titre de l’aéroport de Toulouse au cours des dernières années s’élevaient à 1,5 million d’euros – l’État détenait 60 % du capital. La cession de 49,9 % du capital représente 308 millions d’euros. Cette opération permet d’ouvrir le capital d’une société de gestion dont on pilote les équilibres économiques. Il n’y a aucun doute sur le fait qu’il s’agit d’une bonne opération sur le plan financier.

Tirons les expériences de la discussion que nous avons eue collectivement sur l’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse. La sensibilité de l’un des investisseurs, perçue par toutes et tous, a créé beaucoup d’émoi, notamment sur place. Cet émoi eût été moindre si une procédure d’autorisation préalable du Parlement avait existé. C’est pourquoi la mécanique proposée par la rapporteure thématique à travers cet amendement et celui que nous avons adopté hier me paraît de bon aloi. Ouvrir le capital ou privatiser une société n’est pas une opération neutre. Aussi est-il normal qu’il y ait un débat. Sans doute les seuils en vigueur étaient-ils un peu trop élevés. En tout cas, en tant que ministre de l’économie, il est de ma responsabilité de considérer que le fait d’avoir un vrai débat parlementaire en amont est une bonne chose à tous égards pour que l’opération se déroule mieux.

L’autre conclusion que je tire de l’opération de Toulouse, c’est que, constitutionnellement l’intérêt patrimonial de l’État est une priorité. La façon dont le décret encadrait l’opération nous a conduits à choisir la candidature d’un consortium chinois. Nous pouvons, pour ces infrastructures, enrichir la nature du cahier des charges en portant explicitement dans la loi les préoccupations industrielles, celles que la rapporteure thématique a mises en évidence, celles de l’aviation civile et donc partager la responsabilité avec le ministre compétent. C’est une bonne chose, une fois encore, que le ministère de l’économie ne soit pas seul à se pencher sur le sujet. Dans les faits, d’ailleurs, il y a des échanges, si cela peut vous rassurer.

Madame la rapporteure thématique, permettez-moi néanmoins d’apporter un léger correctif à vos propos. Aujourd’hui, l’intérêt du dispositif tel qu’il est défini par le texte et défendu par le ministère de l’économie n’est pas uniquement patrimonial : lorsque la Commission des participations et des transferts doit se prononcer sur un texte, elle regarde la bonne défense des intérêts patrimoniaux, mais le ministre de l’économie est en charge de l’intégralité des équilibres tels qu’ils sont définis par le cahier des charges.

Je salue le travail qui a été réalisé par la rapporteure thématique, permettant d’inscrire cette nouvelle philosophie qui rend à la fois plus transparent et plus clair le rôle du Parlement et le rôle intergouvernemental. J’émets un avis défavorable aux deux amendements de suppression de l’article 49 et un avis favorable à l’amendement SPE1794.

M. Christophe Caresche. On ne peut pas dire que la création dans les régions de certains aéroports et aérodromes ait toujours obéi à des logiques économiques irréfutables. Lorsque le volontarisme politique s’éloigne trop des logiques économiques, cela finit par poser des problèmes. Il ne faut pas traiter ces questions sous le seul angle régalien, mais aussi prendre en compte la question économique.

L’amendement SPE1794 vise à donner au Parlement la possibilité d’autoriser ou non le transfert de propriété de ces aéroports. Monsieur le ministre, si le Parlement s’était prononcé sur l’affaire de Toulouse, je ne suis pas certain qu’il aurait autorisé l’investisseur en question à entrer dans le capital de l’aéroport de Toulouse. Personnellement, cela ne me choque pas. Mais la séparation entre le domaine de la loi et celui du règlement le permet-elle ?

M. Patrick Hetzel. Le débat sur l’évolution de la structure du capital nous rappelle celui qui opposait François Mitterrand et M. Michel Rocard lors des nationalisations de 1981, ce dernier estimant alors qu’il suffisait, pour contrôler une société, de détenir 51 % du capital.

Monsieur le ministre, vous avez dit qu’il fallait une gestion saine des participations de l’État et, en l’occurrence, s’inscrire dans des logiques de privatisation. Je pense qu’il s’agit là d’outils et je ne vois pas de problème de fond en la matière. En revanche, dès lors que l’on se dirige vers une ouverture plus grande du capital des sociétés aéroportuaires, ne sera-t-il pas nécessaire de faire évoluer le dispositif réglementaire pour s’assurer que la DGAC peut continuer à assurer un bon contrôle, c’est-à-dire la sécurité du transport aérien et du territoire ?

M. Jean-Louis Roumegas. L’amendement SPE1794 apporte évidemment un élément supplémentaire. D’ailleurs, je rappelle qu’au titre Ier du projet de loi, nous avions proposé une disposition similaire concernant les contrats de concession des sociétés autoroutières, mais cet amendement a été rejeté. C’est une bonne chose que de renforcer les prérogatives du Parlement. Toutefois, les alinéas 1 et 2 ne sont pas modifiés, c’est-à-dire que l’article 49 continue de prévoir le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Aéroports de la Côte d’Azur et le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Aéroports de Lyon. Finalement, l’amendement du rapporteur général et des rapporteurs thématiques ne change absolument rien en ce qui concerne l’article pris globalement.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il s’agit en l’espèce de sujets d’une grande complexité. Aéroports de Paris exploite, je crois, un peu plus d’une vingtaine d’aéroports internationaux. La mécanique qui consiste à faire entrer des exploitants étrangers sur le sol national est nouvelle ; elle a été enclenchée il y a quelques semaines avec l’affaire de Toulouse. Notre groupe a considéré que cette opération posait problème, non pas tant à cause du principe même de l’ouverture du capital d’une société aéroportuaire, mais en raison du choix de l’opérateur. Installer à Toulouse des sociétés d’exploitation d’origine étrangère à quelques hectomètres d’activités extrêmement sensibles, stratégiques et concurrentielles dans le monde entier – je parle, bien sûr, du secteur aéronautique – alors que nous savons que nous sommes très peu armés en matière de défense du renseignement économique – à cet égard, je salue notre ancien collègue Bernard Carayon, qui a essayé pendant quinze ans de faire partager la nécessité de renforcer l’appareil d’État sur ce sujet –, voilà un cocktail qui peut présenter certains inconvénients. Du reste, il semblerait que cela fasse localement des remous, ce qui, à mon sens, est justifié.

Monsieur le président, j’indique d’ores et déjà que je retirerai les amendements SPE810, SPE827 et SPE836 que j’ai déposés sur cet article. Mais, avant, je veux les défendre.

Nous sommes tous attentifs à ce que l’État ait une politique de participations intelligente et proportionnée. Il y a des endroits où il n’a rien à faire, d’autres où il doit demeurer. Ce tri peut dépendre de choix politiques, d’impératifs stratégiques, etc.

S’agissant des sociétés de gestion des aéroports, dans la mesure où il concède l’exploitation de la société mais reste propriétaire de tout le reste et directement dépositaire de la sécurité aérienne et des ouvertures de lignes, pourquoi pas ? Mais je crains que nous soyons dans une politique de court terme. Je comprends que certains s’étonnent que l’on vende des actifs rentables, mais il est plus difficile de vendre des actifs qui ne le sont pas tout en faisant de bonnes opérations financières.

Je le répète, le problème réside surtout dans des lieux qui sont souvent stratégiques et porteurs de beaucoup de renseignements et d’informations importants pour le secteur économique français et au-delà. Étant donné notre faiblesse à nous défendre contre cela aujourd’hui, je suis très réservé quant à l’arrivée de ces opérateurs étrangers sur ces endroits du territoire.

Je retire mes amendements, considérant que celui des rapporteurs répond à mes préoccupations de maintien d’une forte décision de la puissance publique sur ces secteurs. Le groupe UMP ne s’opposera ni à l’adoption de l’amendement des rapporteurs, ni à celle de l’article 49.

Les amendements SPE810, SPE827 et SPE836 sont retirés.

Mme Karine Berger. Cette discussion arrive à point nommé, car les grandes questions soulevées par l’opération de Toulouse méritaient un débat dans notre assemblée, débat que nous n’avions pas encore eu l’occasion d’avoir.

L’amendement des rapporteurs permet de rappeler que la gestion patrimoniale d’un État est importante – d’ailleurs, elle relève de la responsabilité du ministre de l’économie – mais que ses intérêts stratégiques ne le sont pas moins. Même si les autorisations de lignes ne sont pas données par les aéroports, la pilote privée que je suis sait à quel point un aéroport a la main sur les trafics autorisés. Il est dommage que la disposition prévue par l’amendement SPE1794 n’ait pas existé lors de l’opération de Toulouse, car je reste persuadée que ce qui s’est passé là-bas est regrettable car c’est une solution essentiellement financière.

M. Yves Blein. Je remercie notre rapporteure thématique pour les précisions qu’elle a apportées.

Monsieur le ministre, vous avez indiqué que ce qui fait la valeur d’une société de gestion, ce sont les lignes qu’elle peut exploiter. L’aéroport de Lyon Saint-Exupéry est une plateforme aéroportuaire importante. D’ailleurs, des acteurs économiques régionaux commencent à réfléchir, dans l’hypothèse d’une privatisation, au rôle qu’ils pourraient jouer, leurs investissements étant conditionnés à l’ouverture de lignes nouvelles auxquelles de nombreuses compagnies étrangères sont candidates. Pouvez-vous préciser votre point de vue sur le sujet ?

M. le président François Brottes. On n’a pas envie d’acheter le garage sans les voitures !

M. Jean-Christophe Fromantin. L’amendement SPE1794 permet d’apporter quelques précisions sur les critères liés aux ouvertures de capital.

Cet article va dans le bon sens. Le premier critère qui doit nous alerter sur l’évolution de ces infrastructures, c’est leur développement et les investissements qu’elles requièrent. Si nos aéroports sont décalés par rapport à la concurrence et aux besoins de mobilité, nous nous retrouverons petit à petit dans des situations difficiles. Notre ambition pour aménager notre territoire dans sa diversité nous impose de moderniser d’urgence nos aéroports.

Je ne comprends pas bien la méthode du Gouvernement, ni les raisons qui justifient qu’il faille un véhicule législatif pour chaque aéroport. Quand il a besoin de 300 millions d’euros, il privatise un aéroport. Dans deux ans, il aura peut-être besoin de 50 millions, et il en choisira un autre, plus petit. Si la doctrine du Gouvernement est de privatiser les aéroports, alors inscrivons-la dans le texte, quitte à l’assujettir à une liste, un agenda, un programme, au fur et à mesure que l’intérêt stratégique ou les investissements le nécessitent. Mon amendement propose d’inscrire ce mouvement de privatisation des aéroports et de l’assujettir à un programme qui serait proposé tous les deux ans par le Gouvernement et qui répondrait non à des stratégies de besoin de ressources mais d’aménagement et de développement. Les effets de levier qui en résulteraient nous encouragent à plaider en faveur de cette ambition, et donc d’un amendement plus général comme celui que je propose.

Le Gouvernement isole chaque aéroport, en considérant que le sujet n’est que l’aéroport. Or, pour des élus locaux, pour des régions, pour des acteurs économiques, l’avenir de l’aéroport appelle des investissements autoroutiers, logistiques, des installations d’entreprises, bref toute une série de décisions qui participent de l’écosystème dans lequel est placé l’aéroport. En inscrivant dans le texte que cette doctrine toucherait progressivement l’ensemble des aéroports, le Gouvernement enverrait un message de nature à permettre d’anticiper des projets qui viendraient se greffer sur un projet comme celui-là.

Je terminerai par un exemple, celui d’Aéroports de Paris, qui est le plus emblématique. On sait à quel point il est stratégique de réussir la liaison CDG Express, qui relie directement Roissy au centre de Paris et dont le montage est extrêmement compliqué. En l’espèce, ne faudrait-il pas plaider en faveur de la privatisation de l’aéroport de Roissy, pas tant pour l’aéroport en tant que tel mais pour l’ensemble des relations qu’il doit entretenir pour être compétitif et renforcer l’attractivité de Paris ?

M. le président François Brottes. Le CDG Express fait partie intégrante de ce projet de loi puisqu’il figure dans sa partie « mobilité ».

Par ailleurs, j’ai bien compris que votre amendement visait à réduire la portée de l’amendement SPE1794. Il y a des aéroports qui sont intermodaux et d’autres qui ne le sont pas, il y en a qui ont la fonction de hub et d’autres qui ne l’ont pas. Le sujet est parfois plus compliqué que cela.

Mme Monique Rabin. Comment a-t-il été possible de privatiser l’aéroport de Toulouse sans passer par la loi, alors que, pour privatiser ceux de Nice Côte d’Azur et de Lyon, il semble que ce soit nécessaire ?

J’ai une autre question. Les CCI sont opérateurs de plusieurs aéroports. Comment réagissent-elles par rapport à nos décisions ?

Mme Jacqueline Fraysse. L’amendement SPE825 propose d’introduire dans notre législation un principe général qui garantirait le maintien dans la sphère publique des sociétés aéroportuaires.

Comme plusieurs de mes collègues, je veux insister sur l’importance considérable de ces aéroports pour l’aménagement du territoire et pour la satisfaction des besoins des usagers en matière économique, industrielle et touristique. Moins que jamais, on ne peut se déterminer d’un seul point de vue financier. Il faut permettre à l’État de maîtriser l’aménagement cohérent et durable de son territoire au-delà du court terme. On vend, pour des raisons financières, les « bijoux de famille » et, ce faisant, on se prive d’un levier extrêmement important qui pourrait être au service de notre société et du pays.

L’amendement SPE819 vise à arrêter la procédure en cours s’agissant de l’aéroport de Toulouse. J’ai bien conscience que la mesure que nous proposons est très provocatrice, mais cette privatisation relève d’un triple scandale.

La procédure d’appel d’offres a sélectionné un groupe chinois qui a massivement recours aux paradis fiscaux, puisqu’il a des filiales installées aux îles Caïman et aux îles Vierges britanniques. Il sera accompagné d’un groupe canadien qui a été radié par la Banque mondiale pour dix ans, pour des faits graves de corruption. Je précise que c’est la sanction la plus grave qui puisse être décidée par la Banque mondiale.

Alors que le ministre avait indiqué, lors du lancement de l’appel d’offres, que la société d’exploitation de l’aéroport de Toulouse resterait majoritairement contrôlée par la puissance publique avec l’appui des collectivités publiques, nous apprenons que le pacte d’actionnaires, dont des extraits ont été publiés, laisse les mains libres au groupe chinois et à son ami canadien en lui accordant les pleins pouvoirs dans la prise de décisions stratégiques. Nous assistons là à des dérives extrêmement graves, puisqu’on se prive de leviers dont on dispose pour les confier à des sociétés pour le moins douteuses.

S’agissant de l’amendement SPE1794, je ne peux pas être hostile à ce que le Parlement soit consulté. Mais cela ne règle en rien les questions de fond qui nous préoccupent.

M. Alain Tourret. J’ai été très sensible à la fois aux explications données par la rapporteure thématique et aux propositions de Jean-Christophe Fromantin.

La création des aéroports de province a répondu non à une politique générale d’aménagement du territoire mais, pour l’essentiel, à des volontés régionales, ce qui conduit à des situations absurdes. L’aéroport de Saint-Gatien n’est toujours pas fermé, alors qu’il y en a un autre juste à côté, l’aéroport Rouen-Boos. Or, ils sont incompatibles. On peut même se demander s’il y a une compatibilité véritable entre l’aéroport de Caen-Carpiquet et celui de Saint-Gatien.

Il faut permettre le transfert au secteur privé de la majorité du capital de l’ensemble de ces aéroports. J’ai beaucoup de mal à comprendre que l’on puisse raisonner aéroport par aéroport, aérodrome par aérodrome. Il faut parvenir à une privatisation généralisée, rationalisée et encadrée par l’État.

Quant à l’ouverture des lignes, la décision dépend uniquement de l’État.

Il y a un nationalisme antichinois, et l’on veut en faire une politique. Fermons tout simplement l’ambassade de Chine et celle du Qatar.

Mme Karine Berger. N’exagérons pas !

M. Alain Tourret. S’agissant du choix du gestionnaire, il faut définir un certain nombre de principes, de règles, de garanties. Ayons recours à des conseils de juristes plus avisés que ceux que l’État consulte en général. Je suis surpris de voir, dans l’affaire Ecomouv’ comme dans celle des concessions d’autoroutes, que les batteries d’avocats présentées par le secteur privé l’emportent très largement sur les batteries d’avocats ou de conseils du secteur public. Il faut donc repenser le conseil juridique de l’État. Lorsque je vois qu’il n’y a pas eu de clause d’indexation ou qu’il est impossible de se retirer sans avoir à payer des sommes considérables, je me dis qu’il n’y a pas eu de discussion sérieuse sur le prix.

M. le ministre. Effectivement, on peut contrôler des sociétés, même avec moins de 51 % du capital, surtout quand elles sont cotées.

Je veux revenir sur l’affaire de Toulouse, qui a suscité beaucoup de questions et d’émoi. J’ai cité des chiffres qui montrent qu’il ne s’agit pas seulement d’une opération de court terme. Quand on a une telle rentabilité et un tel retour, on peut dire que c’est une bonne opération patrimoniale sur le long terme.

C’est aussi une bonne opération industrielle sur le long terme, parce que l’État est un mauvais actionnaire et il est inutile. C’est un actionnaire inutile parce que pour contrôler et réguler, on n’a pas besoin d’être dans le capital et j’ai expliqué pourquoi. Contrairement à ce qu’a dit Mme Berger, on peut avoir, dans des aérodromes privés, des pilotes privés qui soient autorisés...

Mme Karine Berger. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. le ministre. ... mais on ne peut en aucun cas ouvrir une ligne sans l’autorisation de la DGAC.

D’ailleurs, il suffit de discuter avec la plupart des aéroports régionaux pour s’apercevoir qu’ils sont tous en discussion avec la DGAC, qu’ils considèrent comme trop malthusienne en ce qui concerne le développement de leur aéroport. Les élus locaux sont souvent les premiers à vouloir ouvrir des lignes en direction du Golfe ou de l’Asie pour permettre le développement de leur aéroport régional. Mon collègue en charge de l’aviation civile doit gérer cette espèce de conflit d’intérêts qui existe entre le développement des aéroports régionaux et l’intérêt d’Air France et des deux aéroports parisiens.

J’irai même presque jusqu’à dire qu’il y a un conflit d’intérêts patrimonial à rester au capital de ces aéroports régionaux dont nous bridons nous-mêmes, en tant que régulateur, le développement.

C’est donc une bonne opération de long terme même sur le plan patrimonial, compte tenu des valorisations que nous en avons. Elle est d’autant meilleure que ceux que nous faisons entrer au capital ont des projets d’investissement et de développement que nous ne portons pas parce que nous n’aurions pas réinvesti.

Mme Fraysse a rappelé tout ce qui a pu être écrit par certains sites journalistiques sur l’affaire de Toulouse. J’ai beaucoup d’inconfort à considérer qu’il y aurait de bons et de mauvais Chinois.

Mme Jacqueline Fraysse. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. le ministre. Airbus réalise pratiquement 25 % de son chiffre d’affaires en Asie, dont l’essentiel en Chine. L’un des deux investisseurs qui compose le consortium a déjà acheté plus de dix Airbus et passé commande de plus de cent autres. On ne peut pas considérer que cet acteur n’est pas éligible à un investissement en France, mais qu’il serait éligible à un achat.

Mme Karine Berger. Dans ce cas, vendons la Joconde !

M. le ministre. Nous avons obtenu toutes les garanties s’agissant de la société d’acquisition constituée par ce consortium : elle paiera des impôts en France, et il n’y aura pas d’évasion de flux financiers. Mon collègue Michel Sapin et moi-même avons demandé dans la phase finale toutes les garanties et nous les avons obtenues.

Cette société d’acquisition a pris un exploitant, le groupe Lavalin. Ce groupe dont on s’émeut tant gère une quinzaine d’aéroports en province, dont celui de Toulouse-Francazal. Que l’on vienne m’expliquer que nous avons commis une forfaiture en laissant ce gestionnaire d’aéroports en gérer un nouveau et que le fait d’être condamné par la Banque mondiale est un crime irrémédiable ! Je vous invite à consulter la liste des sociétés françaises qui sont dans un cas comparable.

En ce qui concerne les intérêts français et le risque en termes d’intelligence économique, je vous renvoie au numéro du 13 janvier 2015 de La Dépêche où M. Enders, le président du groupe Airbus, se félicite de l’opération.

Nous avons eu plusieurs interactions dans la phase finale avec le groupe Airbus. D’abord, il souhaitait pouvoir conserver l’usage d’un couloir. Cette demande a été respectée. Ensuite, l’un des deux investisseurs, celui qui a acheté les avions, est présent sur le site aux côtés d’Airbus. Toutes les garanties ont été obtenues en termes d’intelligence économique et d’accès au site. La déclaration faite par M. Brégier le montre.

Les récents événements ont montré que les vrais enjeux d’intelligence économique ne sont pas liés au fait d’habiter le hangar d’à côté. Le problème, c’est celui de la cyberattaque et de la cybercriminalité. C’est un enjeu auquel toutes nos sociétés sont confrontées, et même les pouvoirs publics. Quand les Chinois cherchent à obtenir des informations sur nos grands groupes comme des pouvoirs publics, ils ne cherchent pas à acheter le hangar d’à côté mais ils se livrent à des attaques à travers internet, comme ils savent le faire, et comme d’autres pays le font.

Les collectivités locales et les autres opérateurs publics qui restent au capital ont demandé que nous puissions garder à leur côté certains droits de veto sur les opérations critiques. Il a été obtenu dans la négociation finale de pouvoir bloquer toute décision d’investissement structurante. À cet égard, nous vous ferons parvenir ces documents qui n’ont pas été communiqués par la presse. Dans la négociation finale, nous avons obtenu que soient protégés les intérêts des partenaires minoritaires.

Vous m’avez demandé pourquoi Toulouse n’avait pas fait l’objet d’une autorisation. Cela s’explique par le fait que le chiffre d’affaires de la société Aéroport Toulouse-Blagnac, qui était de 110 millions d’euros, est inférieur au seuil d’autorisation législative, qui était de 150 millions d’euros. Hier, vous avez voté une mesure qui aurait nécessité que l’affaire de Toulouse fasse au préalable l’objet d’une autorisation du Parlement. Nous avons donc procédé à un changement important.

MM. Fromantin et Tourret proposent une politique plus volontariste. Sur un plan intellectuel, je comprends leur raisonnement, ayant moi-même donné la justification de la nature de l’ouverture du capital de ces aéroports. Demander le transfert au secteur privé de la majorité du capital de tous les aéroports régionaux me pose un problème en termes de transparence à l’égard du Parlement parce que cela reviendrait à ce que vous autorisiez aujourd’hui le Gouvernement à privatiser les sociétés qui gèrent les aéroports de Bordeaux, de Montpellier, de Marseille, de Strasbourg et d’outre-mer, avec un débat qui n’aura pas la même nature. Cette année, on veut ouvrir les deux plus gros aéroports régionaux. Quand une autre vague interviendra, il faudra demander une autre autorisation pour mener un débat à la lumière de l’expérience que l’on aura vécue sur les deux aéroports. Ce que nous avons discuté aujourd’hui montre bien que l’expérience toulousaine nous a permis d’enrichir notre approche sur les deux opérations que nous allons conduire.

S’agissant des gares ferroviaires et routières, elles appartiennent à la branche gares et connexions et elles font partie de l’établissement public SNCF Mobilités. L’ouverture du capital que vous proposez supposerait au préalable un aménagement juridique de la forme sociale de ces gares.

Quant aux grands ports maritimes et aux ports décentralisés, ce sont des établissements publics et non des sociétés anonymes dont seul le capital pourrait être ouvert au privé. Il y a donc là aussi une contrainte juridique liée à leur forme. Une fois qu’ils auraient été transformés en société anonyme, si telle était la volonté du Gouvernement, il est évident qu’un projet de loi serait déposé pour demander l’autorisation du Parlement pour en ouvrir le capital.

Je rappelle enfin que la doctrine de l’État actionnaire s’illustre parfaitement pour les autorisations que nous demandons. Nous allons libérer de l’argent qui servira, d’une part, au désendettement de la France – la loi de finances pour 2015 intègre un critère de désendettement de 4 milliards – et à la réduction de la charge que nous faisons peser sur les générations futures, et, d’autre part, à réinvestir ailleurs, parce qu’on ne peut pas avoir de l’ambition pour la puissance publique et considérer qu’elle se financerait de façon spontanée.

Oui, ces cessions d’actifs doivent nous servir pour moitié à réinvestir. Quand on réinvestit dans PSA, quand on peut porter la voix de l’État dans Alstom, quand on investit dans la BPI pour développer des financements et des investissements, c’est parce qu’on a arbitré et cédé d’autres actifs. Quand l’État investit 1 milliard d’euros dans le logement intermédiaire, c’est parce qu’il a procédé à des cessions d’actifs.

La commission rejette les amendements identiques SPE820 et SPE1388.

Puis elle rejette successivement les amendements SPE825, SPE819 et SPE993.

Elle adopte l’amendement SPE1794.

La commission adopte l’article 49 modifié.

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Membres présents ou excusés

Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi pour la croissance et l’activité

Réunion du samedi 17 janvier 2015 à 9 h 45

Présents. - M. Luc Belot, Mme Karine Berger, M. Yves Blein, M. Marcel Bonnot, M. Jean-Jacques Bridey, M. François Brottes, Mme Colette Capdevielle, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Christophe Castaner, M. Jean-Yves Caullet, M. Gérard Cherpion, Mme Corinne Erhel, M. Richard Ferrand, Mme Jacqueline Fraysse, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Laurent Grandguillaume, M. Patrick Hetzel, Mme Bernadette Laclais, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Dominique Lefebvre, M. Arnaud Leroy, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Frédéric Poisson, Mme Monique Rabin, M. Denys Robiliard, M. Jean-Louis Roumegas, M. Christophe Sirugue, M. Alain Tourret, M. Stéphane Travert, Mme Cécile Untermaier, Mme Clotilde Valter, M. Francis Vercamer

Excusé. - M. Jean-Louis Bricout

Assistaient également à la réunion. - M. Yves Fromion, Mme Anne-Yvonne Le Dain

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