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Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Mardi 2 décembre 2014

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 9

Présidence de Mme Catherine Coutelle, Présidente

– Audition de Mme Dominique Henon, conseillère au Conseil économique, social et environnemental régional d’Île-de-France, ancienne membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et rapporteure sur La santé des femmes en France de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité du CESE, sur le projet de loi relatif à la santé (n° 2302).

– Information relative à la Délégation

La séance est ouverte à 17 heures.

Présidence de Mme Catherine Coutelle, présidente.

La Délégation procède à l’audition de Mme Dominique Hénon, membre du Conseil économique, social et environnemental régional (CESER) d’Île-de-France, ancienne membre du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et rapporteure de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité du CESE sur la santé des femmes, en 2010, sur le projet de loi relatif à la santé (n° 2302).

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Madame Hénon, vous êtes ici au titre du Conseil économique, social et environnemental (CESE), pour lequel vous avez fait en 2010 un rapport sur La santé des femmes en France. Ce rapport a attiré notre attention à la veille de l’examen du projet de loi relatif à la santé, adopté en conseil des ministres le 15 octobre 2014, qui devrait venir dans l’hémicycle au premier trimestre 2015 et dont l’ambition est de changer le quotidien des patients et des professionnels de santé, et de faire un système de santé prêt à affronter le XXIe siècle.

Nous souhaiterions connaître les préconisations que vous avez été amenée à faire dans votre rapport, ainsi que les lacunes que vous auriez pu observer dans le projet de loi que nous allons bientôt examiner. Il existe plusieurs travaux sur la santé des femmes, dont votre rapport, sur lesquels nous pensons nous appuyer pour enrichir le projet.

Mme Dominique Hénon. Merci de votre accueil. Je suis ravie de vous présenter les travaux du CESE, auxquels j’ai contribué pendant cinq ans au sein de sa Délégation aux droits des femmes et à l’égalité. À cet égard, je me félicite de la convergence qui existe entre les Délégations aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, du Sénat et du CESE, qui permettent de donner une belle visibilité à ce dossier, et de consacrer le thème de l’égalité dans nos débats de société. Nos travaux se nourrissent les uns des autres, et nous ne pouvons que nous en féliciter.

Le rapport que je vais vous présenter aujourd’hui a déjà quatre ans et depuis, de nombreuses avancées ont eu lieu. Je tiens à souligner que 2013 a été une année charnière sur un certain nombre de points en termes de prise en charge de la santé des femmes. J’y reviendrai au fil de ma présentation.

En 2010, on pouvait dire que la santé des femmes présentait un portrait contrasté, avec notamment :

– un développement des moyens permettant la maîtrise de la fécondité, mais un taux d’interruptions volontaires de grossesse (IVG) qui augmente chez les mineures et les jeunes femmes de moins de vingt ans ;

– un taux de survie en augmentation pour les femmes atteintes de cancers du sein, mais une augmentation de cette pathologie, sans explication réellement prouvée à ce jour ;

– une volonté affichée dans le plan national « nutrition et santé » d’informer et de former à de bonnes habitudes alimentaires, mais le développement du surpoids et de l’obésité chez les femmes des catégories sociales les plus défavorisées ;

– une progression de l’entrée des femmes sur le marché du travail, mais dans leur grande majorité, celles-ci occupent des emplois peu qualifiés, à temps partiel, entraînant des inégalités sociales et professionnelles et ayant un impact très négatif sur leur santé ;

– une diminution de l’écart d’espérance de vie entre les deux sexes, signe positif pour les hommes, mais négatif pour les femmes, car en lien avec le développement de comportements à risque ;

– une longévité accrue pour les femmes, mais une situation d’isolement pour la majorité d’entre elles, situation à laquelle elles doivent faire face avec une retraite inférieure à près de 40 % à celle des hommes.

Nous avons organisé nos travaux en nous appuyant sur les différents temps de la vie, en commençant par l’adolescence.

Globalement, l’adolescence est une période de bonne santé, mais non exempte de risques puisque soumise à de nombreux changements sur le plan physique, social et affectif, susceptibles d’induire une consommation de produits psychoactifs. En la matière, le comportement des filles tend à se rapprocher de celui des garçons, qu’il s’agisse de consommation d’alcool ou de cannabis. Par ailleurs, les troubles du comportement alimentaire, qui sont classés parmi les affections psychiatriques, touchent à 90 % les filles. L’anorexie, entre autres, entraîne une forte mortalité, soit par complications, soit par suicide.

C’est à ce moment de la vie que l’on aborde la sexualité et la gestion de la fécondité. Nous avons pointé le fait que le rôle des parents était fondamental dans cette approche, mais que la collaboration avec l’école était primordiale. La circulaire d’application de la loi du 4 juillet 2001, en date du 16 juillet 2003, détaille les modalités de mise en œuvre de l’éducation à la sexualité dans les écoles et les collèges. Cette circulaire est parfaite mais malheureusement, faute de disponibilités ou d’effectifs suffisants, sa mise en pratique est très inégale selon les établissements, les volontés politiques et les endroits où se situent les établissements.

Le manque d’informations ou de connaissances est particulièrement marqué chez les très jeunes femmes en termes d’accès à la contraception, et la non-reconnaissance sociale de la sexualité dans certains milieux rend problématique l’inscription dans une démarche contraceptive.

Nous avons noté que la contraception d’urgence demeurait un recours, dont l’usage était en augmentation sur les cinq précédentes années, mais que cette contraception d’urgence n’avait pas pour autant fait régresser le nombre d’IVG. La prévention des grossesses précoces passe par l’amélioration de l’information et de l’éducation des jeunes filles, au moment où elles commencent leur vie sexuelle, associées à un accès facilité aux moyens de contraception – c’est un thème récurrent.

Nous nous sommes ensuite intéressés à la femme adulte, dont la santé est impactée par des vulnérabilités spécifiques.

Il existe encore des obstacles à une démarche contraceptive sereine. Si 73 % des femmes entre 15 et 54 ans utilisent une méthode contraceptive, la pilule est la plus courante, quel que soit l’âge. Bien qu’au fil du temps une très grande diversification des méthodes de contraception se soit développée, l’état de connaissance de la population et l’information faite auprès des médecins ne suit pas encore l’évolution de l’ensemble des techniques proposées. La disparité dans la prise en charge du remboursement des différentes modes de contraception disponibles constitue un obstacle évident à leur diffusion. On a pu souligner que dans les deux précédentes années, une campagne d’information, largement diffusée sur les murs du métro, avait pu permettre d’ouvrir un peu les esprits sur ce qu’est une bonne contraception.

Si, depuis quelques années, le nombre d’IVG est relativement stable, autour de 14 pour 1 000 femmes, il augmente régulièrement parmi les mineures et les jeunes femmes de moins de vingt ans. Seul un tiers des femmes ayant eu recours à l’IVG en 2007 n’utilisait aucune contraception. A contrario, plus de 60 % d’entre elles en utilisaient – dont 30 % la pilule. Les causes d’échec évoquées sont essentiellement : les oublis, les erreurs, les accidents. Mais on peut comprendre que sur quarante ans d’une vie de gestion de sa contraception, l’oubli d’un comprimé fasse aussi partie de la vie. Et cela doit être envisagé dans l’approche que l’on a sur ce moment de la vie.

Nous avons vu que la plus grande longévité des femmes était tempérée par le développement des comportements à risque : consommation de tabac, d’alcool, qui vient impacter la réduction de l’écart d’espérance de vie entre hommes et femmes. Ces comportements se traduisent par un accroissement du cancer du poumon, des maladies chroniques et des pathologies cardiovasculaires. Une maladie de l’appareil circulatoire reste la première cause de mortalité chez les femmes, avec une particularité : une prise en charge d’urgence moins systématique que chez les hommes, liée à une mauvaise appréciation du risque, en particulier dans les cas d’infarctus, où les symptômes ressentis par les femmes relèvent plus de nausées et de douleurs dans les mâchoires, alors que le symptôme qui apparait plus couramment chez les hommes est la douleur thoracique. Voilà pourquoi le diagnostic d’urgence peut ne pas être posé. En la matière, les mentalités évoluent doucement. Reste qu’un quart des décès féminins prématurés pourrait être évité par une réduction des comportements à risque : tabac, alcool, etc.

À âge, formation et situation identiques, les femmes sont plus sensibles au stress et à la dépression : différentes sources de données mettent en évidence qu’une femme présente 1,5 à 1,8 fois plus de risques qu’un homme de vivre un épisode dépressif. Ces inégalités face à la dépression seraient dues en partie à des conditions économiques et sociales qui exposent davantage les femmes aux troubles dépressifs dans la sphère privée, en particulier les mères de famille monoparentale, ou dans la sphère professionnelle : emplois peu qualifiés, à faible latitude décisionnelle, temps partiel subi. Sans oublier les femmes cadres, à responsabilités, qui doivent gérer une vie professionnelle intense et une vie privée.

Au cours de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre, il a bien été mis en avant que les femmes connaissaient un risque accru de subir des violences. Je pense qu’un certain nombre de messages sont vraiment passés, mais on ne peut pas nier le fait qu’en matière de violences, être femme expose, et être femme et jeune surexpose. L’ampleur des violences intrafamiliales est par ailleurs sous-évaluée, leur visibilité se focalisant sur les issues tragiques ; or le quotidien peut aussi être dramatique.

Les liens entre les violences subies et certaines caractéristiques de l’état de santé des victimes sont statistiquement significatifs : angoisse, anxiété, repli sur soi, tentatives de suicide, et ces manifestations sont majorées lorsque le contexte biographique est difficile. Le CESE a d’ailleurs adopté récemment, après cette journée du 25 novembre, un rapport très important contre toutes les violences faites aux femmes.

Enfin, d’autres violences telles que l’excision, les mariages forcés, la traite des êtres humains ou la maltraitance sur personnes âgées ont des effets lourds de conséquences sur la santé des femmes qui les subissent.

Nous avons observé ensuite que les femmes étaient exposées d’une façon particulière aux atteintes à la santé au travail. L’enquête SUMER (surveillance médicale des expositions aux risques professionnels) qui a été menée par des médecins du travail nous montre que 58 % des troubles musculo-squelettiques (TMS) touchent les femmes, notamment dans l’industrie agroalimentaire, la grande distribution et les services aux personnes. L’explication avancée est que les postes de travail qu’elles occupent majoritairement impliquent rapidité, précision, mouvements répétitifs et positions assises prolongées. L’apparition des TMS augmente avec l’âge, ce qui plaide en faveur d’une réflexion sur les conditions de travail soutenables tout au long de la vie – surtout si nous devons être amenés à travailler plus longtemps.

Près d’une femme sur trois est exposée à des tensions au travail, contre un homme sur cinq. Ces écarts sont encore plus importants pour la catégorie des ouvriers et employés. En effet, les femmes sont plus souvent confrontées que les hommes à du harcèlement moral ou sexuel, à des menaces ou à des intimidations de la part de la clientèle ou des usagers. La violence dans l’organisation du travail est également répandue dans de nombreux emplois féminins : surcharges, cadences rapides, manque de formation, changements imprévus d’horaires.

Les conséquences à long terme sur l’état de santé des conditions de travail défavorables demeurent malheureusement peu évaluées, que ce soit en matière de TMS ou d’exposition à des substances nocives, contrairement au Canada où l’on s’est saisi à bras-le-corps de cette problématique et où l’on commence à avoir des idées un peu plus précises sur ce que signifie travailler en bonne santé en étant une femme.

Des chercheuses de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) comme Annette Leclerc et Monique Kaminski ont beaucoup étudié les inégalités sociales au travail. Leurs conclusions et leurs recherches prouvent que travailler dans de bonnes conditions est favorable à la santé. Cela rejoint la déclaration de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) selon laquelle la réduction des inégalités sociales passe par l’accès à l’emploi, un bon statut dans l’emploi, un maintien dans l’emploi avec adaptation en cas de problème de santé et une réduction aux expositions aux risques professionnels. Tous les avis convergent pour laisser penser que l’accès à l’emploi est une condition de santé, en particulier pour les femmes.

Nous nous sommes intéressés également aux localisations les plus fréquentes des cancers chez les femmes. Le cancer du sein occupe la première place des causes de mortalité par cancer ; viennent ensuite les cancers du côlon et du rectum et, en troisième position, le cancer du poumon. Depuis 1980, chez les femmes, l’incidence des cancers augmente, mais la mortalité diminue. La moitié des cas supplémentaires de cancers détectés chez les femmes depuis trente ans sont des cancers du sein, notamment chez les jeunes femmes de moins de 45 ans, sans explication à ce jour.

J’attire votre attention sur les travaux de recherche qui ont prouvé que cancer du sein et travail de nuit pouvaient être liés. En 2007, le Danemark s’est saisi de cette question au travers des travaux du CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) et a reconnu le cancer du sein comme maladie professionnelle. En France, des études ont émergé en 2012. Vous les retrouverez dans la revue « Travail et changement » de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) où l’on commence à travailler sur cet aspect qui me semble très important dans la mesure où le travail de nuit augmente, particulièrement chez les femmes. Et si le travail de nuit génère des symptômes et des pathologies chez les femmes, il n’y a pas de raison qu’il ne génère pas autre chose chez les hommes. Le travail de nuit mérite donc d’être étudié sous l’angle de la santé.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. La question a été soulevée en 2010, à l’occasion de la dernière réforme sur la retraite. Je m’étais alors inspirée d’une étude de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) portant sur les cancers du sein chez les infirmières et les hôtesses de l’air.

Mme Dominique Hénon. Je crois qu’il faut vraiment creuser cette question, à laquelle je me suis intéressée en tant que syndicaliste. Mais comment faire la preuve du lien entre travail de nuit et cancer du sein, en l’absence de travaux précis ?

Par ailleurs, ce moment de la vie s’accompagne, pour certaines, d’une évolution du surpoids et de l’obésité. La progression de l’obésité en France est devenue une priorité de santé publique. En France, 41 % des femmes âgées de 18 à 74 ans sont en situation de surpoids et d’obésité, avec une obésité sévère touchant davantage les femmes que les hommes, et une surreprésentation dans les populations dont le niveau de formation initiale est moindre. Si le surpoids touche toutes les catégories, il reste, d’une manière générale, inversement proportionnel au niveau d’instruction. Les disparités sociales sont plus marquées chez les femmes touchées par l’obésité que chez les hommes. Le diabète est fréquemment associé à l’obésité, avec toutes les conséquences que l’on connaît en termes de prise en charge lourde et d’incapacités. L’obésité peut même affecter la situation sociale des adultes – difficulté d’accès ou de maintien dans l’emploi, stagnation professionnelle, stigmatisation.

Nous avons observé également les maladies chroniques, qui ont un retentissement sur le bien vieillir. Les pathologies cardiovasculaires arrivent en tête, avec le développement du cholestérol, de l’hypertension, le dépôt de plaques d’athéromes qui peuvent entraîner des infarctus et des accidents vasculaires cérébraux (AVC). Or les femmes sont les plus touchées par les pathologies cardiovasculaires. L’ostéoporose nous est apparue également comme une problématique à regarder de plus près, puisque, compte tenu de la sensibilité particulière des femmes à cette affection, des dépistages plus systématiques devraient être organisés à partir de la ménopause, afin d’éviter des fractures.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Nous l’avions demandé au moment de l’examen de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, mais en vain.

Mme Dominique Hénon. Cet examen n’est pas encore passé dans les mœurs. Il faut dire qu’il est cher et que pour qu’il soit pris en charge par la sécurité sociale, les médecins ont beaucoup de cases à remplir !

Nous avons regardé ensuite la longévité, et la diminution de l’écart de vie en bonne santé entre les femmes et les hommes. En France, l’espérance de vie à la naissance des femmes, qui était en 2012 de 84,8 ans, est l’une des plus élevées au monde. Elle est sensiblement supérieure à celle des hommes, qui était, cette même année, de 78,4 ans. En revanche, l’écart d’espérance de vie en bonne santé se réduit, en raison des comportements à risque. Les hommes y gagnent, et les femmes y perdent.

Les motifs d’une espérance de vie plus élevée chez les femmes font débat. Est-ce que ce sont des raisons biologiques, des comportements plus favorables à la santé, un rapport plus favorable à la médecine ? Le CESE a constaté au fil de ses travaux que les femmes sont plus nombreuses que les hommes à déclarer consulter un médecin. Elles recourent davantage aux examens de prévention, en particulier ceux qui leur sont spécifiques. Les périodes liées à la fécondité sont enfin l’occasion de bilans de santé. Mais les hommes, en adoptant peu à peu des comportements plus favorables à leur santé comblent progressivement l’écart d’espérance de vie.

Au vu des tendances sociodémographiques actuelles, le vieillissement de la population devrait s’accentuer, et cette progression devrait connaître un pic d’ici à 2030. En 2050, un Français sur trois sera âgé de soixante ans ou plus, contre un sur cinq en 2005. Ces perspectives attirent l’attention sur un phénomène majeur des prochaines décennies et sur les politiques de prévention permettant le bien vieillir, c’est-à-dire en meilleure santé possible.

Pour les gérontologues, le processus de vieillissement est hétérogène et s’il n’est pas possible d’influencer les facteurs génétiques, il est par contre possible de modifier les facteurs d’environnement tels que les facteurs socioéconomiques, ainsi que les progrès de la médecine de prévention et l’accès aux soins.

Les femmes sont particulièrement vulnérables aux maladies cardiovasculaires. La prévalence augmente avec l’âge et si cette pathologie est traitée, on diminue de 40 % l’incidence des accidents vasculaires cérébraux, cause importante de décès et de dépendance, dont le coût social et humain est très lourd.

La maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées sont les maladies les plus fréquentes de dépendance. Nous avons auditionné le professeur Françoise Forette, qui est directrice de la Fondation nationale de gérontologie. À cette occasion, celle-ci a souligné que le taux global de dépendance était en fait peu élevé : 7 % de la population totale de plus de soixante ans. Cela veut dire que 93 % de cette population est autonome. Cette approche méritait d’être soulignée. En revanche, la prévalence de la maladie d’Alzheimer augmente après 80 ans, et touche davantage les femmes que les hommes – avec un écart de l’ordre de deux tiers/un tiers. Mais comme les femmes vivent plus longtemps, on recense un nombre de femmes plus important.

Nous sommes sortis du déroulement de la vie des femmes pour regarder plus précisément la représentation des femmes dans la recherche médicale et les essais cliniques. Nous nous sommes rendus compte que celles-ci étaient largement sous-représentées dans la recherche médicale, et que les différences biologiques entre hommes et femmes avaient une incidence sur l’action des traitements et les prises en charge. À titre d’exemple, au regard des différences de poids moyen entre les deux sexes, un traitement pré-dosé pourrait être excessif pour une femme au vu de la surreprésentation des hommes dans les cohortes sollicitées pour réaliser un essai clinique.

Cette exclusion des femmes des essais thérapeutiques a sans doute été dictée par le souci de les protéger dès lors qu’elles pourraient ignorer un début de grossesse. C’est en tout cas la politique qui a été avancée par la Food and Drug Administration (FDA) dans les années soixante-dix pour les exclure des essais de phase I. Mais en fait, la pratique s’est étendue, et l’on a sorti les femmes des essais cliniques.

Une étude, qui a fait l’objet d’une communication lors d’un congrès sur la santé cardiovasculaire en 2008, faisait état d’une sous-représentation marquée dans les populations sollicitées, alors que les femmes constituent 53 % des patients atteints par ces pathologies cardiovasculaires. Par ailleurs, une étude sur la prise en charge de l’infarctus, réalisée en Franche-Comté, a montré que le manque d’évaluation des traitements appliqués aux femmes pouvait avoir des conséquences dramatiques en matière de mortalité, d’autant que les symptômes de la même pathologie peuvent être différents de ceux des hommes. Et pour les médecins qui ont mené cette étude, il convient de réfléchir à une surveillance et à des traitements plus spécifiques chez les femmes en formant les médecins à la prise en charge correspondante. Il a ainsi précisé que le stent, le petit ressort métallique destiné à maintenir une artère ouverte, fonctionne parfaitement chez une femme mais demande un geste particulier, car les artères des femmes sont plus fines et sinueuses.

Selon un article tout à fait récent rédigé par un cardiologue,  les crises cardiaques augmentent chez les femmes, mais les hommes restent les principales cibles des messages de prévention. Et le professeur Simon, chef du service de prévention cardiovasculaire de l’hôpital européen Georges Pompidou, souligne que  la proportion des femmes dans les essais cliniques n’est que de 30 % en moyenne. Plusieurs pistes commencent à se dégager, pour réintroduire une représentation plus fidèle à la population, et en particulier aux besoins spécifiques des femmes.

Nous avons également étudié le renoncement aux soins, qui devient de plus en plus fréquent par manque de temps ou d’argent, et qui apparaît plus élevé chez les femmes : 16,5 % de femmes renoncent aux soins, quand les hommes y renoncent à hauteur de 11,7 %. Les soins les moins bien remboursés par l’assurance maladie sont à l’origine de la majorité des renoncements : les soins bucco-dentaires, l’optique et tout ce qui nécessite une avance de frais.

Ce renoncement concerne aussi le recours aux examens de dépistage et de prévention. Ainsi, parmi les femmes de quarante ans ou plus appartenant à des ménages modestes, 34 % n’ont jamais réalisé de mammographie, contre 19 % des autres femmes dans la même tranche d’âge. Il en est de même pour le frottis permettant de dépister le cancer du col de l’utérus : 12 % des femmes disposant de faibles ressources, âgées de 20 à 70 ans, n’en ont jamais réalisé. C’est deux fois plus que dans le reste de la population, ce qui a fait dire au corps médical que le cancer de l’utérus était le cancer de la femme pauvre. J’ai trouvé cela dramatique. En revanche, je tiens à saluer l’avancée qui consiste à prendre en charge à 100 % tous les trois ans le dépistage du cancer de l’utérus. Il s’agit d’une mesure récente, adoptée en 2013.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Le projet de loi prévoit que le tiers payant s’appliquera à tout le monde. Cela provoque une opposition chez certains praticiens, mais je pense que cela constitue une amélioration pour les personnes aux revenus modestes. Par ailleurs, cela devrait permettre de désengorger l’hôpital.

Mme Dominique Hénon. Après avoir fait ces constats, nous avons dégagé des préconisations.

Nous sommes revenus sur l’adolescence. Nous pensons que pour les filles, l’éducation à la santé est aussi un facteur d’émancipation, et que les moyens dédiés aux services de médecine scolaire doivent être renforcés afin d’aider infirmières et personnels éducatifs à repérer en amont les signes de mal être physique et psychique, ce qui permettrait de cibler les bilans effectués par les médecins sur les élèves en difficulté. Il convient de réorganiser et de soutenir les infirmières scolaires qui pour nous sont au cœur d’un dispositif de soutien de la jeunesse. Il semble que le projet de loi s’en préoccupe.

Mme Édith Gueugneau. On manque cruellement d’infirmières dans les établissements scolaires.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Aujourd’hui, 100 postes de médecins scolaires ne sont pas pourvus, alors même que 10 postes supplémentaires devraient encore être créés. Je pense que l’on devrait s’interroger sur la raison de ce manque d’attractivité.

Mme Dominique Hénon. Je crois que vous posez le problème de la bonne façon.

Il nous est apparu que pendant l’adolescence, la prévention du surpoids était essentielle, et que la promotion de la santé alimentaire passait par l’amélioration du repérage du rebond d’adiposité précoce. En effet, l’indice de masse corporelle (IMC) ne doit pas varier entre la marche et six ans et s’il augmente, il est prédictif d’une situation d’obésité ou de surpoids à l’âge adulte. D’où l’intérêt d’une meilleure coordination entre les services de la protection maternelle infantile (PMI), la médecine scolaire et le médecin généraliste. Cette meilleure coordination me semble être assurée dans le projet de loi.

Mme Édith Gueugneau. N’oublions pas la restauration scolaire, qui doit offrir des menus équilibrés.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Quand il n’y a pas de frites, les trois quarts de la nourriture sont jetés !

Mme Dominique Hénon. D’où l’intérêt de passer par le jeu et des ateliers d’alimentation, qui rendent ludique l’approche des légumes. C’était notre deuxième préconisation.

Il nous est aussi apparu que le développement, dans le cursus, d’activités sportives non sexuées – c’est-à-dire proposées systématiquement aux deux sexes – et suffisamment diversifiées ne pouvait que renforcer la prévention de l’obésité et amener les jeunes à prendre goût et plaisir à une activité physique soutenue. La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes comporte des dispositions concernant la féminisation des instances dirigeantes des fédérations sportives. Maintenant, il faut que le phénomène « redescende » et que les activités sportives soient proposées aux deux sexes.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Selon une étude, les professeurs de gymnastique solliciteraient beaucoup moins les filles que les garçons, quand ils ne les laissent pas de côté. En un mot, on ne force pas trop les filles à faire du sport.

Mme Dominique Hénon. Nous avons pensé aussi que la prévention des conduites à risque s’imposait, ce qui suppose que l’on rende effectif le contrôle de l’interdiction des ventes d’alcool et tabac aux mineurs.

Mme Catherine Quéré, corapporteure. Il y a de très nombreux contrôles dans les grandes surfaces.

Mme Dominique Hénon. Votre remarque est intéressante. Je n’en étais pas persuadée moi-même.

Cela suppose que l’on renforce l’information sur les risques physiques, psychiques et de désocialisation induits par la consommation de produits stupéfiants, et que l’on mette en place des programmes d’aide pour les parents. En outre, à l’occasion de notre enquête, nous avons constaté que les jeunes avaient rarement conscience que la consommation de cannabis était interdite par la loi.

En dernier lieu, il conviendrait de mettre en place une véritable politique d’éducation à la sexualité. L’application de la circulaire que j’évoquais devrait être effective.

S’agissant de la maîtrise de la sexualité et de la fécondité, nous sommes revenus sur des préconisations qui passaient par la facilitation de l’accès aux méthodes contraceptives pour les jeunes filles. Nous avons remarqué que certains hôpitaux s’étaient dotés de structures du type « Info Ados » qui passaient par un numéro de téléphone et qui permettaient aux jeunes de s’informer anonymement. De leur côté, certaines régions se sont dotées d’un « Pass contraception ».

Mme Catherine Quéré, corapporteure. La région Poitou-Charentes a été la première à le faire.

Mme Dominique Hénon. Malheureusement, ce dispositif est inégalement développé selon les territoires.

Il faudrait ensuite renforcer les missions des services de médecine préventive universitaire et accélérer leur transformation en centres de santé. La situation de nos jeunes étudiants et étudiantes en matière de santé est dramatique, surtout pour les filles. Ce dispositif tarde à se mettre en place. Les raisons en sont sans doute économiques, mais les conséquences sociales sur la vie de nos futurs professionnels sont énormes.

Il faudrait enfin développer la formation des professionnels de santé sur l’ensemble des moyens contraceptifs et en améliorer la prise en charge. La formation des médecins, qui bénéficient maintenant d’une formation continue, mériterait d’être revue en ce domaine.

Bien sûr, nous souhaitons que l’on conforte l’exercice du droit à l’IVG et que l’on veille à son accompagnement. Cette intervention doit être pratiquée dans la sécurité et la dignité, ce qui est encore discutable dans les services dont l’éthique n’impose pas une approche médicale protégeant la santé de la femme.

Mme Catherine Quéré, corapporteure. Le problème vient aussi de ce que depuis l’instauration de la tarification à l’activité (T2A), l’IVG ne rapporte rien aux hôpitaux.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Grâce à Mme Marisol Touraine, l’IVG est prise en charge à 100 % et le tarif payé aux hôpitaux et cliniques lorsqu’ils pratiquent une IVG a été revalorisé et correspond à celui prévu pour une fausse couche. Ce dispositif a été mis en place en 2013.

Mme Dominique Hénon. La revalorisation de l’acte a permis de réinscrire officiellement l’activité d’IVG dans les groupements hospitaliers. À l’hôpital Tenon, où de grands mouvements avaient suivi la fermeture du centre d’IVG, trois lits sont maintenant disponibles, avec deux infirmières et deux aides-soignantes pour prendre l’activité en charge.

Il faudrait donc intégrer l’IVG dans l’offre de soins en l’inscrivant dans le plan national stratégique et dans le projet régional de santé comme une activité médicale à part entière.

J’en viens aux actions visant à promouvoir pour améliorer la santé des femmes au travail.

Il nous a semblé important, au vu de la forte prévalence des troubles musculo-squelettiques, d’imposer la prise en compte du genre dans la définition des normes ergonomiques, ainsi que le développement de recherches sur le travail féminin.

L’existence d’outils expérimentaux facilite la traçabilité d’exposition aux risques. Des mutuelles ont pris des initiatives en ce sens. Par exemple, la femme peut prendre l’habitude de noter sur un petit carnet qu’elle est exposée à tel risque, pendant tant de temps, sur tel poste. En effet, l’obligation de faire des fiches d’exposition professionnelle est loin d’être remplie dans tous les établissements, pas plus que dans les fonctions publiques. Certaines mutuelles incitent donc les femmes à prendre en charge la traçabilité des risques auxquels elles sont exposées : bruit, changements horaires, stress, produits chimiques, etc.

Pour nous, le rapport de situation comparée devrait être enrichi d’indicateurs renseignant sur les liens existant entre les emplois occupés par les femmes et les hommes, et leur état de santé. Le document unique d’évaluation des risques (DUER) devrait être renseigné par genre, et devrait permettre au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de s’intéresser plus particulièrement au travail féminin dans l’entreprise. Enfin, l’accord interprofessionnel du 26 mars 2010 sur la prévention du harcèlement et des violences au travail, dont tout un chapitre concerne les femmes, devrait être décliné le plus largement possible dans les entreprises et les fonctions publiques.

Nous avons bien sûr souhaité que l’on renforce la prise en charge médicale des femmes victimes de violences. Il conviendrait de mieux sensibiliser les professionnels de santé en intégrant cette problématique dans les modules obligatoires de formation et en diffusant largement les guides pratiques élaborés sur le sujet. Mais au-delà, deux moments clé de contact avec le système de santé devraient être mis à profit pour repérer et prendre en charge les victimes : le suivi des grossesses et le premier accueil dans un service hospitalier lié à des situations laissant présager des violences. On sait bien que si la femme n’est pas questionnée, elle ne viendra pas systématiquement déclarer qu’elle est victime de violences. Tout cela passe par un système de formation.

Pour favoriser un vieillissement en bonne santé, il faudrait rendre opérationnelle la « consultation médicale de longévité » lors du départ en retraite, prévue dans le plan national « Bien vieillir 2007-2009 ». Cette consultation, qui a du mal à s’imposer, vise à repérer les fragilités qui viendront impacter la vie de la personne après soixante ans. Et au vu de ce diagnostic, elle met en place des mesures de correction. Cela passe par un accueil avec un médecin gériatre, un éducateur sportif, un nutritionniste. L’objectif de cette consultation est mettre en place des bonnes pratiques, et d’accompagner cette rupture majeure que constitue la retraite.

Il faut aussi, on l’a déjà dit, mettre en place une surveillance et des traitements plus spécifiques pour les femmes souffrant de pathologies cardiovasculaires car elles en sont les premières victimes devant les hommes, améliorer le dépistage de l’ostéoporose et encourager le recours aux consultations mémoire.

Répondre aux besoins du grand âge nécessite également de promouvoir un environnement facilitant le maintien à domicile. Le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, où cette dimension était très présente, a permis de faire progresser cette idée. Mais bien sûr, il conviendra de s’assurer des financements que suppose la mise en œuvre de la loi.

Il faut enfin soutenir les aidants familiaux qui sont majoritairement des femmes, développer les situations qui entretiennent le lien social et privilégier des maisons de retraite médicalisées intégrées dans les quartiers et favorisant les solidarités.

Voilà ce que nous avons été amenés à repérer et à préconiser au sein de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité du CESE. C’est un dossier que nous avons porté avec passion.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Merci de ces propos qui étaient fort intéressants. Nous ne referons pas ce travail, mais nous alimenterons notre réflexion par vos remarques pour apporter à la loi des éléments qui n’y sont pas pour l’instant. Nous en discuterons avec le ministère.

J’observe que lors de la précédente législature, Mme Valérie Boyer avait déposé une proposition de loi concernant les sites qui pouvaient encourager l’anorexie ; elle n’avait pas été votée. Ce projet de loi évoque l’obésité, mais pas l’anorexie, qui touche à 90 % les jeunes filles. Je pense moi aussi que l’infirmière scolaire, qui est à même de s’apercevoir du changement d’apparence des jeunes filles, a un rôle prépondérant à jouer dans la lutte contre cette maladie.

Mme Édith Gueugneau. Je voulais évoquer, parmi la vingtaine de grandes orientations de ce projet de loi, la mise en œuvre du plan « tabac » : le taux de mortalité des pathologies liées au tabagisme diminue pour les hommes et augmente pour les femmes. Avez-vous des préconisations particulières à nous faire en la matière ?

Ensuite, en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, le texte prévoit la création d’un numéro d’appel pour joindre un médecin à toute heure. Comment, selon vous, ce dispositif pourrait-il venir compléter les outils déjà existants ? Il me semble par ailleurs que vous n’avez pas suffisamment souligné les violences intrafamiliales, qui sont très importantes.

Enfin, dans le milieu rural, d’où je viens, la précarité est encore plus importante. Comment y remédier ? De très nombreuses femmes renoncent aux soins ou échappent aux campagnes de prévention, ce serait-ce que parce qu’elles ne peuvent pas se déplacer. Avez-vous des préconisations à faire ?

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Je voudrais savoir ce que vous pensez des paquets neutres. Nous serions les seuls en Europe à adopter cette mesure. Seule l’Australie l’a prise. Les professionnels du tabac nous ont dit que ce serait contreproductif. Je n’ai pas d’avis sur la question. A-t-on établi le caractère dissuasif d’une telle mesure ? N’oublions pas que l’augmentation du prix du tabac a eu pour effet de développer la contrebande. C’est ainsi, par exemple, que des cars entiers partent vers l’Espagne et reviennent chez nous pour 30 euros. La dépense est vite amortie.

Mme Dominique Hénon. Je n’ai pas lu d’études sur le paquet neutre, mais vous soulevez une question qui mérite d’être étudiée. Je vais y regarder de plus près, même si, personnellement, je suis pour l’éradication de la consommation de tabac et le développement de la capacité de prescrire des substituts nicotiniques. Le projet de loi prévoit que le médecin du travail comme les sages-femmes pourront prescrire ces substituts, et cela constitue selon moi un progrès.

Ensuite, nous sommes favorables à tout ce que l’on pourra mettre à la disposition des femmes victimes de violence. Le numéro d’appel a, entre autres, l’avantage de gommer les disparités existant entre les milieux ruraux et urbains. À Paris, des commissariats entiers sont sensibilisés à cette problématique et des lieux d’accueil sont mis en place. Mais en milieu rural, d’autres solutions doivent être envisagées, et ce numéro peut en être une.

Vous évoquez fort justement la précarité en milieu rural, où le déficit en médecins est par ailleurs très marqué. Le projet de loi propose d’étendre la capacité des personnels paramédicaux à poser des diagnostics et à agir. Je pense que dans ces milieux ruraux, le fait de favoriser la prise en charge de la santé sur un champ plus large devrait permettre de rendre le discours de santé plus accessible aux femmes éloignées des centres. Une infirmière libérale peut tout à fait orienter ou dédramatiser, ou conseiller, ou inciter. Le glissement de la fonction médicale qui semble se dessiner – comme cela s’est produit dans certains pays anglo-saxons – va dans le bon sens au vu du déficit de médecins actuellement à disposition sur le territoire français. Cela permettrait aussi de revaloriser ces métiers et de permettre aux personnels paramédicaux, moyennant une formation, de jouer un rôle important, en particulier dans les régions moins bien dotées que d’autres.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Le regroupement des professionnels de santé se développe et les maisons de santé se multiplient. Dans ma circonscription, une sage-femme s’est installée à 30 kilomètres de la ville où se trouve le centre hospitalo-universitaire (CHU). Cela représente une nette amélioration pour les femmes pendant leur grossesse et juste après leur accouchement. Cela leur évite 60 kilomètres pour une visite au CHU. Cela leur apporte un certain confort et elles bénéficient d’un meilleur suivi.

Une telle solution serait d’autant plus adaptée qu’il semblerait que l’on envisage de raccourcir la durée des séjours en maternité à une ou deux journées après l’accouchement. Or ce ne serait possible, selon moi, que si les femmes sont bien entourées à leur retour à domicile.

Mme Dominique Hénon. Déjà, dans le milieu hospitalier, on trouvait qu’un séjour de deux jours et demi était vraiment très court, surtout lorsqu’il y a d’autres enfants à la maison. Pour ma part, je pense qu’une telle réduction ne serait pas raisonnable, mais que si elle était adoptée, elle devrait effectivement s’accompagner d’un renforcement du rôle de la sage-femme. Cela deviendra évident.

Mme la présidente Catherine Coutelle. J’ai eu l’occasion de discuter, au niveau local, de la distinction existant entre une maison de santé et un centre de santé. Dans une maison de santé, les médecins s’installent ensemble ; ils peuvent être aidés par les collectivités qui, par exemple, mettent à leur disposition des locaux qu’ils leur louent ; cela reste de la médecine libérale, regroupée et organisée. Dans les centres de santé, qui sont l’équivalent des anciens dispensaires, les médecins, salariés, sont rémunérés de la même façon quel que soit le nombre d’actes qu’ils dispensent, et les patients ne paient rien. Ces centres sont d’un accès plus facile et les visites durent plus longtemps. Ils constituent un progrès dans les quartiers difficiles et dans les zones avec universités. Sans doute conviendrait-il de transformer les services de médecine universitaire en centres de santé. Avez-vous étudié la question ?

Mme Dominique Hénon. Non, mais c’est effectivement un bon sujet d’étude.

Mme la présidente Catherine Coutelle, corapporteure. Merci d’avoir présenté votre rapport, qui était fort intéressant. Nous allons nous en inspirer et creuser un certain nombre de pistes. Comme vous l’avez dit, nos trois délégations font ensemble du bon travail. Récemment, j’ai été auditionnée, avec la Délégation du Sénat, par une commission du CESE. Et nous continuerons bien sûr à échanger sur nos travaux, pour nous appuyer les unes sur les autres.

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Information relative à la Délégation

La Délégation a désigné Mme Catherine Coutelle et Mme Catherine Quéré corapporteures sur le projet de loi relatif à la santé (n° 2302).

La séance est levée à 18 heures 10.

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Membres présents

Présentes. - Mme Catherine Coutelle, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Edith Gueugneau, Mme Sandrine Mazetier, Mme Catherine Quéré.