Accueil > Travaux en commission > Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Mardi 27 novembre 2012

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 21

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– En application de l’article 13 de la Constitution, audition, ouverte à la presse, de M. Augustin de Romanet, dont la nomination en qualité de président-directeur général d’Aéroports de Paris (ADP) est envisagée par le Président de la République

– Vote sur la nomination de M. Augustin de Romanet

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

En application de l’article 13 de la Constitution, la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a auditionné M. Augustin de Romanet, dont la nomination en qualité de président-directeur général d’Aéroports de Paris (ADP) est envisagée par le Président de la République.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le Président de la République envisage la nomination de M. Augustin de Romanet, administrateur civil hors classe, ancien directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, aux fonctions de président-directeur général de la société Aéroports de Paris (ADP).

En application de l’article 13 de la Constitution, il appartient à notre Commission de l’auditionner.

M. Augustin de Romanet. Je suis heureux de cette occasion qui m’est donnée d’évoquer les projets de cette société devant vous. Ayant passé de nombreuses années à la direction du budget puis à la Caisse des dépôts, j’ai développé une collaboration ancienne avec la représentation nationale, que je serai heureux de poursuivre au sein d’ADP si vous donnez votre agrément à ma nomination.

En premier lieu, je veux saluer l’action de Pierre Graff, président de la société pendant neuf ans, qui, atteint par la limite d’âge le 11 novembre dernier, a été conduit à cesser ses fonctions.

ADP détient et exploite les trois principaux aéroports de la région parisienne – Orly, Roissy et Le Bourget –, dix terrains civils d’aviation de loisir en région Île-de-France et l’héliport d’Issy-les-Moulineaux. Depuis juillet dernier, elle détient également 38 % de la société turque TAV, qui exploite l’aéroport d’Istanbul – quasiment aussi important que celui de Roissy – et une dizaine de terrains notamment en Macédoine, en Géorgie ou en Arabie saoudite.

Ses activités se répartissent en quatre segments principaux.

En premier lieu, les activités aéronautiques, avec principalement les redevances d’atterrissage et de stationnement, qui représentent 53 % du chiffre d’affaires et 21 % du résultat opérationnel courant.

Deuxièmement, les commerces et services, qui correspondent à 30 % du chiffre d’affaires et à 62 % du résultat opérationnel courant.

Troisièmement, l’immobilier, avec 8 % du chiffre d’affaires et 14 % du résultat opérationnel courant.

Enfin, les autres activités – gestion d’aéroports à l’étranger, ingénierie ou sûreté, avec 9 % du chiffre d’affaires et 3 % du résultat opérationnel courant.

Le BIPE – qui est un bureau d’études spécialisé dans les activités industrielles – a remis en février 2012 une étude sur l’impact économique et social des trois grands aéroports parisiens, dont il ressort que la richesse induite par ADP, en termes de retombées directes et indirectes, est égale au PIB de la Lituanie, soit 30 milliards d’euros ou 1,75 % du PIB de la France. Par ailleurs, le système aéroportuaire parisien représente 5,8 % du PIB d’Île-de-France et 8,3 % de l’emploi salarié de cette région. En outre, chaque fois que le trafic traité par les aéroports parisiens augmente d’un million de passagers, il engendre 355 millions d’euros de valeur ajoutée pour l’économie française, 1 500 emplois directs sur la plateforme et 4 100 emplois salariés au total.

Le chemin parcouru par la société depuis 2003 a été considérable.

En 2003, ADP était un établissement public endetté à hauteur de 150 % de ses fonds propres, alors que la norme dans cette activité se situe plutôt à 50 %. Elle ne payait pas de dividendes à son actionnaire et essayait de rechercher un équilibre comptable improbable. Elle disposait d’un nombre insuffisant d’aérogares. De plus, elle était vue principalement comme une entreprise de construction manquant d’attractivité, notamment de commerces par rapport aux plateformes comparables de Francfort, Londres, Madrid et Amsterdam.

Cette année-là, Pierre Graff a été nommé président de la société, avec pour mission de trouver de nouveaux fonds propres sur le marché pour assurer son développement. Cela a conduit à la transformer en société anonyme et à la coter en bourse, ce qui a amené l’État à vendre des titres sur le marché. La société a pu lever 600 millions de fonds nouveaux.

Une dynamique s’est enclenchée, conduisant à un premier contrat de régulation économique passé avec l’État, prévoyant 2,7 milliards d’euros d’investissements. Cela a permis de faire passer les capacités d’accueil de l’aéroport Charles-de-Gaulle (CDG) de 47 millions de passagers en 2006 à 80 millions en 2012. Avec Orly, la capacité totale d’ADP atteint 110 millions de passagers. À la fin de l’opération, l’État avait 68 % du capital, part qui a légèrement décru depuis.

Au sujet de l’acquisition de TAV, une polémique est née les semaines dernières sur le fait de savoir si l’objet acheté correspondait à ce qui avait été promis, autrement dit si la concession, qui devait aller jusqu’à 2021, était aussi solide que ce que décrivait l’acte d’achat. L’une de mes premières démarches sera d’avoir le cœur net sur ce sujet.

La solidité de ce socle et la qualité du bilan de Pierre Graff autorisent à avoir de grandes ambitions pour cette société.

Je sais parfaitement qu’ADP n’est pas une entreprise comme les autres, car non seulement elle doit fournir des biens et des services au meilleur prix à ses clients, mais elle contribue à l’attractivité de la région parisienne et de la France dans son ensemble.

Cette recherche du meilleur prix suppose qu’elle respecte avec le même degré d’exigence les attentes de ses quatre principales parties prenantes que sont les clients, l’environnement, les salariés et les sous-traitants, et enfin les actionnaires.

Les clients sont essentiels. En économie, l’offre crée la demande : la conséquence est qu’une amélioration de la qualité de l’offre accroît la demande. Or notre objectif est que le maximum de touristes ou d’hommes ou de femmes d’affaires viennent en région Île-de-France pour profiter des équipements d’ADP et exercer des activités économiques en France. C’est la raison pour laquelle mon premier mot d’ordre sera la qualité : pour les clients, mais aussi les compagnies aériennes, à commencer par Air France. Paul Bocuse dit que sa réussite dans la restauration repose sur trois critères : être ouvert en permanence, offrir des prestations de qualité et associer les salariés aux résultats de l’entreprise ; je me les applique à moi-même dans toutes mes activités professionnelles.

Les compagnies aériennes sont aujourd’hui focalisées sur les tarifs. Compte tenu de leur situation financière, il est légitime qu’elles fassent pression sur leurs fournisseurs. Mais il convient de rappeler que, dans leur compte d’exploitation, les charges de redevance aérienne représentent 4 % : pour Air France, ADP correspond à 2 %, les 2 % restants étant pour l’atterrissage à destination.

Un contrat de régulation conduit l’État à surveiller que les tarifs n’augmentent qu’à due proportion des services rendus aux compagnies. L’objectif que s’est fixé l’État au moment de la mise en bourse est que le rendement des investissements aéroportuaires égale le coût moyen pondéré du capital. Nous n’en sommes pas encore là, ce rendement, qui est d’environ à 3,5 %, étant beaucoup plus faible que ce coût, de l’ordre de 6,5 %. Mais, compte tenu de la situation des compagnies aériennes, le rattrapage ne doit pas être brutal.

S’agissant des capacités d’accueil, on m’indique que nous devrions être en mesure de répondre à la croissance du trafic jusque vers 2022-2023. En tout état de cause, la priorité d’ADP n’est pas d’augmenter celles-ci, mais d’améliorer la qualité des services.

J’accorderai une attention très forte aux demandes des compagnies aériennes, en particulier celles d’Air France. Ces demandes portent par exemple sur l’installation de trieurs à bagages – sachant qu’un gros trieur coûte 300 millions d’euros – l’amélioration du transport entre les deux aérogares de Roissy et un accès routier par l’est de l’aéroport.

Pour être à l’écoute des clients, je m’installerai une grande partie de la semaine dans les aéroports. Je poursuivrai le programme de coopération avec Air France initié par Pierre Graff et François Rubichon, intitulé « réussir ensemble », pour améliorer la qualité du service.

Avec cette compagnie comme avec les autres, il me paraît important d’élucider au maximum les responsabilités de chaque acteur de la chaîne pour éviter des défausses sur les partenaires. Il faut aussi développer chez tous ceux-ci – gendarmerie, police de l’air et des frontières, compagnies aériennes… – un réflexe de responsabilité partagée de résolution des problèmes subis par les clients, même s’ils ne sont pas de la responsabilité de celui qui en découvre l’existence.

En ce qui concerne les passagers, ADP a fait des efforts considérables, notamment depuis 2009. D’ailleurs, le mot « client » ne figurait pas dans les six axes du plan stratégique 2005-2009 : mon prédécesseur a souhaité le remettre au cœur du système. Une enveloppe de 170 millions d’euros est prévue à ce stade jusqu’en 2015 à cet égard.

Le taux global de satisfaction des passagers a progressé sensiblement de 82 % en 2007 à 86 % en 2011 et on note des améliorations spécifiques sur certains paramètres tels que le confort des salles d’embarquement ou la sûreté. Mais il faut aller plus loin et atteindre au plus vite l’objectif de 90 % fixé par Pierre Graff. Nous devrons nous inspirer des meilleures pratiques aéroportuaires dans le monde, notamment celles de Séoul, Zurich et Schiphol, avec lequel nous avons un accord de partenariat.

Par différence avec mon prédécesseur, j’estime que nous sommes comptables du succès de la construction rapide du lien fixe CDG-Paris, l’absence d’une telle liaison constituant un handicap pour les clients. Cette démarche ne doit pas être séparée de l’amélioration du niveau de qualité du RER B. En outre, ADP est partie prenante dans la nouvelle ligne du Grand Paris qui pourra desservir Le Bourget et Roissy depuis la Défense.

D’une manière générale, le client est en droit d’obtenir un niveau de qualité le conduisant à considérer que venir sur les sites d’ADP est une expérience enrichissante.

En ce qui concerne la deuxième partie prenante, l’environnement, l’entreprise exerce son activité avec une pratique de prédation, notamment par les déchets et le bruit qu’elle suscite, et par le fait que les personnes du bassin d’emploi n’ont pas assez accès à elle. Son succès tient à ce qu’elle ne soit pas perçue ainsi, mais comme un co-constructeur d’une prospérité partagée pour le territoire. C’est la raison pour laquelle je reprendrai la politique ambitieuse de mon prédécesseur en matière de développement durable et de responsabilité sociale et environnementale. J’ai découvert un fort engagement des responsables de l’entreprise dans ce domaine, notamment du directeur du développement durable, qui a hissé ADP au premier rang des 18 plateformes européennes au titre de l’indice ASPI, évaluant la responsabilité sociale et environnementale.

Nous avons de nombreux objectifs à cet égard, notamment en matière d’émissions de gaz à effet de serre, de chauffage par les énergies renouvelables, d’emplois de personnels de proximité. Il s’agit pour moi d’une priorité.

S’agissant de la troisième partie prenante, les salariés et les sous-traitants, ADP a une forte culture d’entreprise et des personnels très engagés : j’ai l’intention de poursuivre l’important dialogue social qui y règne. 66 accords d’entreprise ont ainsi été signés depuis 2007, le taux de grève est faible et les quatre organisations syndicales représentatives – CGT, CGC, UNSA et FO – participent activement à ce dialogue.

En outre, la société a des accords d'intéressement, de participation et d'épargne salariale très consensuels. Elle apporte beaucoup d’attention à l’insertion des handicapés et des seniors, ainsi qu’à une meilleure intégration des personnes issues de la diversité.

D'autres accords sur la réduction du temps de travail, le service hivernal ou les risques psycho-sociaux notamment complètent ce dispositif remarquable.

L’enjeu majeur à venir sera la gestion prévisionnelle des emplois : mon expérience à la Caisse des dépôts m’a conduit à constater que ce n’est pas parce que vous êtes dans une entreprise qui ne licencie pas qu’il n’y a pas de stress au travail. Quand la modernisation de l’entreprise laisse penser que le métier des salariés disparaîtra, ceux-ci peuvent aussi développer un stress – lequel peut être combattu par des efforts de gestion prévisionnelle et de formation.

Je m’attacherai également à faire tout ce qui est possible pour la mobilité et les reconversions.

Par ailleurs, la direction des ressources humaines a entamé une politique de mobilisation des managers : j’essayerai de développer une culture de la délégation des responsabilités et une politique managériale claire, communiquée et partagée.

Pour ce qui est des sous-traitants, l’entreprise donneur d’ordre a une responsabilité afin d’éviter qu’ils ne constituent les variables d’ajustement et ne subissent les conséquences d’une annulation brutale d’un contrat.

En ce qui concerne les actionnaires, mon premier travail sera d’attirer leur attention sur le fait que toutes les parties prenantes doivent être prises en compte à part égale.

Mon premier objectif sera la transparence de l’information pour que les membres du conseil d’administration soient pleinement conscients des orientations retenues et puissent suivre les grands choix de l’entreprise qu’ils auront approuvés. Les actionnaires attendent que celle-ci puisse déployer sa performance de manière durable – c’est-à-dire en tenant compte des trois autres parties prenantes – et se développe.

Il n’est plus question aujourd’hui d’accroître les capacités, mais plutôt d’améliorer l’efficacité opérationnelle, la qualité des services et la maîtrise des tarifs.

Concernant les commerces, il a été décidé en 2005 de les développer, ce qui a été un bon choix, pour au moins deux raisons : ils ont contribué à l’attractivité des aéroports et ils participent de façon majoritaire au résultat opérationnel de l’entreprise.

Cependant, on devra se poser la question d’un certain rééquilibrage en faveur des commerces de gamme plus moyenne pour les clients européens.

S’agissant de l’immobilier, avec 1 300 hectares de terrains dédiés, il constitue une activité importante sur le moyen terme. Il nous faudra le développer en liaison avec FedEx, qui cherche à accroître ses prestations dans le fret. Nous accorderons aussi une attention particulière à la reprise de l’opération dite « Cœur d’Orly », réalisée en concertation avec les conseils généraux du Val-de-Marne et de l’Essonne : je rappelle que cette opération a été différée à l’occasion de la crise de 2008, où il a été décidé de ne pas faire d’immeuble « en blanc », contrairement à ce qui avait été prévu initialement.

En ce qui concerne l’action internationale, je suis convaincu que si l’on ne prend pas garde à ce qu’on achète, elle constitue le meilleur moyen de perdre de l’argent : je serai donc très prudent et ne peux que souscrire à l’engagement pris par mon prédécesseur auprès des analystes financiers de ne pas faire d’acquisitions avant 18 ou 24 mois. Nous avons pour l’instant le chantier de l’intégration de TAV dans les processus et la gouvernance d’ADP.

Je pense également que la projection de la France à l’étranger est utile à notre économie, dans la mesure où elle nous permet de tirer profit de la croissance mondiale : dans les quinze ans à venir, celle-ci sera de 5 %, soit 10 % dans les pays émergents contre 1,5 à 2 % dans les pays de l’OCDE.

C’est la raison pour laquelle j’attacherai beaucoup d’importance au développement d’ADPI, qui est une société d’ingénierie ayant les moyens de concevoir des aéroports à l’étranger et d’emmener nos entreprises de BTP et nos fournisseurs de véhicules de transport gagner des marchés à l’export. Je ferai aussi en sorte que la participation croisée d’ADP avec l’aéroport d’Amsterdam Schiphol – chacun détient 8 % du capital du partenaire – donne lieu à toutes les synergies possibles.

S’agissant, enfin, des aspects financiers, les marges et la rentabilité de la société doivent continuer à progresser. L’ambition annoncée aux actionnaires dans le dernier plan stratégique est forte : elle repose sur une hypothèse de croissance de trafic de 3,2 % par an jusqu’en 2015.

À cet égard, il est prévu un excédent brut d’exploitation avant amortissement d’1,25 milliard en 2015, en progression de 40 % par rapport à 2009, et une rentabilité des activités régulées se rapprochant du coût moyen du capital – puisqu’elle pourrait atteindre entre 4,5 % et 5 % en 2015.

Cette exigence est nécessaire, mais nous devons analyser la cohérence de ces prévisions économiques avec celles de l’économie générale, qui sont moins favorables que celles prévues en 2009. Les équipes d’ADP travaillent donc à de nouvelles estimations, qui seront communiquées dès qu’elles seront disponibles.

Pour conclure, je suis conscient de l’attente considérable dont cette entreprise fait l’objet de la part de ses clients, des élus locaux et des parlementaires : quand ADP tousse, c’est un peu l’ensemble du pays qui est enrhumé.

La diriger constitue donc une responsabilité lourde, mais exaltante aussi, dans la mesure où peu d’entreprises ont à la fois cette dimension du client au quotidien et une dimension nationale, nos concitoyens partageant la fierté d’avoir une plateforme aéroportuaire participant au dynamisme de l’économie.

Je m’emploierai au premier chef, d’une part, à faire participer l’ensemble des salariés à la recherche d’un processus managérial permettant de scander les progrès qualitatifs de l’entreprise – un plan stratégique tous les cinq ans ne suffisant pas – et d’autre part à ce que nos perspectives à l’international bénéficient à l’ensemble de l’économie française.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le contrat de régulation économique concernant la période 2011-2015 porte sur un montant d’investissements de 2,65 milliards d’euros : quels seront ceux réalisés ?

Par ailleurs, comment évolueront les effectifs, sachant que ceux-ci ont légèrement diminué entre 2010 et 2011 – soit 1,1 % pour l’entreprise ADP et près de 5 % pour le groupe ?

Quel bilan faites-vous du rapprochement avec l’aéroport de Schiphol ?

Enfin, quelle serait pour vous la meilleure solution pour la liaison rapide Roissy Charles de Gaulle-Paris ?

M. Jean-Yves Caullet. Au titre du groupe SRC, je souhaiterais savoir quel équilibre vous comptez trouver entre la stratégie de l’entreprise sur le territoire national et à l’étranger, de manière à ce que l’une n’entrave pas l’autre.

Quel équilibre entendez-vous également établir entre la liaison CDG-Paris et le développement de liaisons directes, notamment par le TGV, entre la province et les aéroports parisiens, de sorte que la porte vers l’international lui soit plus accessible ?

Quelle sera en outre votre politique en matière de sous-traitance ? Quels métiers souhaitez-vous maintenir dans ce cadre ? Quels pans comptez-vous développer ? Quel est, selon vous, l’avantage de ce mode de gestion par rapport à l’emploi direct, notamment en matière de sûreté ? Comment le conjuguer avec les exigences quasi régaliennes prévalant dans ce domaine ? Quels types de formation, de contrat et de garanties pour l’usager retiendrez-vous à cet effet ?

M. Bertrand Pancher. Dans son rapport sur la responsabilité sociétale d'entreprise (RSE) de 2011, le président Pierre Graff a annoncé qu’il avait fixé à ADP l’objectif ambitieux et mobilisateur de devenir la référence européenne en matière de développement durable et de RSE. Dans la continuité du Grenelle de l’environnement, l’entreprise a pris sept engagements pour réduire son empreinte climatique, baisser de 10 % le temps de roulage moyen des avions de l’aéroport CDG avant 2015, appliquer une démarche de haute qualité environnementale aux nouveaux projets de construction, réduire les consommations énergétiques internes de l’entreprise de 20 % entre 2004 et 2020, lancer un programme d’installation d’énergies renouvelables, réduire de 30 % les émissions de CO2 de la flotte de véhicules utilitaires légers d’ici 2012, contribuer en partenariat avec les compagnies aériennes à la limitation du recours au groupe auxiliaire de puissance des avions et promouvoir le covoiturage. Le plan stratégique 2011-2015 prévoit par ailleurs la réduction de 12,46 % de consommation d’énergie primaire interne par mètre carré de bâtiment.

Je souhaiterais savoir, au nom du groupe UDI, quel bilan vous dressez de ces engagements exemplaires. Qu’en est-il des différents modes de production d’énergies renouvelables ? Quels seront vos axes de travail futurs au regard de l’ambition de référence européenne que j’évoquais ?

S’agissant de la concertation et de l’information, comment allez-vous continuer à travailler en liaison avec les acteurs concernés ?

Nous avons la chance de bénéficier des services de l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA), qui fait un travail remarquable, mais est confrontée à une limitation de ses moyens et cherche à mettre en place des collaborations avec les autres acteurs du territoire, notamment ADP : comment entendez-vous poursuivre l’action de l’entreprise en faveur de la protection du cadre de vie des riverains et de la lutte contre les nuisances sonores et atmosphériques ?

Enfin, quels seront vos prochains axes de travail pour satisfaire les clients ? Pouvez-vous nous détailler le projet de modernisation de l’aéroport de Paris-Orly ?

M. Olivier Marleix. J’ai apprécié, au nom du groupe UMP, la façon dont vous avez fustigé la stratégie de la défausse permanente, notamment s’agissant des conditions de contrôle aux frontières à l’arrivée dans les aéroports. ADP est la première image de la France pour des millions de touristes arrivant chaque année sur notre territoire : il est toujours consternant de constater que les aéroports parisiens sont parmi ceux où les conditions d’accueil sont à cet égard les plus désastreuses, avec par exemple des temps d’attente d’une heure à un guichet de douane. Comment entendez-vous traiter ce problème, qui concerne, il est vrai, aussi les services de l’État ?

M. Christophe Bouillon. 500 000 riverains sont directement concernés par l’activité des aéroports, dont plus de 300 000 en Île-de-France : comment comptez-vous vous attaquer au problème du bruit, qui reste un enjeu majeur pour eux ?

M. François Pupponi. Au-delà des problèmes de nuisances, l’aéroport de Roissy ne procure pas suffisamment de ressources aux populations riveraines. Avec le plan d'exposition au bruit (PEB), les communes environnantes ne peuvent même plus construire. Ainsi, à Sarcelles, nous ne pouvons, à cause de ce plan, édifier la résidence étudiante liée aux deux départements d’IUT que nous voulons développer pour les métiers de l’aéronautique et de l’aéroportuaire.

Par ailleurs, nous n’avons plus les mêmes retombées fiscales : avant existaient les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) alimentés par les établissements exceptionnels. Or il n’y a plus de participation d’ADP en faveur des communes riveraines.

Enfin, très peu d’emplois bénéficient à la population riveraine, notamment pour le Val d’Oise – où cette part atteint 12 % – et la Seine-saint-Denis : comment y remédier ?

M. Jacques Alain Bénisti. Pierre Graff m’avait parlé d’investissements de 450 millions d’euros à Orly pour améliorer le service rendu aux passagers et de l’éventualité de doubler le nombre de passagers dans cette zone de plus en plus urbanisée et connaissant des trafics de plus en plus importants : je lui avais dit que je ne voyais pas comment cela était possible sans augmenter les mouvements sur le site. Nous avions proposé de déplacer les pistes à 40 ou 50 kilomètres, comme à Stockholm : quelle est votre position à cet égard ?

En outre, votre prédécesseur m’avait indiqué qu’il n’y avait pas assez d’études approfondies pour prendre une décision claire à cet égard : avez-vous l’intention de lancer de telles études ? Quelle est votre position sur l’augmentation incessante du trafic à Roissy et Orly ?

M. Laurent Furst. Élu de la région de Strasbourg, je prends l’avion plutôt que le TGV pour soutenir la ligne aérienne et les personnels d’Air France. Or si je n’ai pas à me plaindre des personnels de cette société, je suis déçu par la qualité des bus non climatisés des aéroports parisiens ainsi que par la propreté des installations, qui laisse parfois à désirer : un effort considérable est à faire dans ce domaine.

Par ailleurs, à Roissy, les conditions d’accueil sont parfois extrêmement difficiles, ce qui n’est pas bon pour l’image de notre pays. Pour les départements de l’Est de la France, les aéroports de référence sont donc plutôt ceux de Francfort ou de Luxembourg, qui offrent une qualité d’accueil, un prix de stationnement pour les voitures et un environnement bien meilleurs.

M. Augustin de Romanet. En ce qui concerne les effectifs, il serait mal venu de ma part de commencer par dire a priori que je vais supprimer des emplois sans être entré dans l'entreprise : je serais même prêt à les accroître pour produire davantage de biens et de services !

S’agissant de la liaison CDG-Paris, j’estime qu’elle relève de la responsabilité principale d’ADP, qui est comptable de l’accueil des étrangers et des Français à Paris – contrairement à d’autres, tels la SNCF, RFF et la RATP, pour lesquels ce sujet est moins important. L’entreprise doit donc prendre le leadership du projet, sachant que le statut juridique de celui-ci reste encore à définir. Les travaux ont été relancés au mois de juillet, un accord existe entre les entreprises, et ADP s’est déjà engagée à contribuer à hauteur de 50 millions d’euros à la construction d’un pont sous une des pistes de l’aéroport. Un des objectifs de mon mandat est qu’il y ait à la gare de l’Est un petit portique d’accueil signalant l’entrée sur le territoire d’ADP, avec la possibilité éventuellement d’enregistrer ses bagages sur place.

Monsieur le président, les 2,65 milliards d’euros que vous évoquez correspondent au contrat d’objectifs 2011-2015 : ils tendent à moderniser les infrastructures existantes et à améliorer la qualité du service.

Monsieur Jean-Yves Caullet, le contrat de l’entreprise avec notre pays est d’accueillir le mieux possible les personnes utilisant la plateforme parisienne. Une fois qu’on l’a rempli, si on a des marges de manœuvre financières et humaines, on peut essayer d’améliorer la rentabilité en allant chercher la croissance dans les pays où elle est très forte et en y projetant les entreprises de BTP, de véhicules de transport et d’ingénierie. À cet égard, le bilan de mon prédécesseur sur le fonctionnement des aérogares est remarquable, ce qui n’est pas assez connu.

S’agissant de l’acquisition de TAV, mon objectif sera, je le répète, de veiller à ce qu’elle se déroule conformément au contrat signé.

En ce qui concerne l’accès aux aéroports depuis la province, je militerai pour qu’on ait aussi des liaisons de TGV à Orly, ce qui demande du temps.

En matière de sûreté, il a été décidé, dans un certain nombre de cas, de recourir à des sous-traitants pour des raisons de souplesse et de management de proximité, mais, une fois encore, je ne crois pas à la stratégie de la défausse : dans la vie d’une aérogare, il faut que les parties prenantes travaillent suffisamment ensemble pour se sentir personnellement coresponsables. J’irai donc aux guichets de douane de Roissy à six heures du matin pour voir comment sont accueillis les passagers en provenance de Pékin et ferai le nécessaire, le cas échéant, pour éviter des temps d’attente trop longs.

Monsieur Bertrand Pancher, au sujet de la RSE, je rappelle que la société ADP est classée numéro un sur 18 aérogares en Europe. Par ailleurs, sur les sept engagements pris par Pierre Graff à la suite du Grenelle de l’environnement, six ont été parfaitement tenus. Celui qui ne l’a pas été concerne la baisse de 30 % des émissions de CO2 de la flotte des véhicules utilitaires légers entre 2004 et 2012 : des difficultés sont apparues dans ce domaine et, malgré les 183 véhicules électriques que l’on doit acquérir d’ici 2015, on est en retard. Pour le reste, le temps de roulage des avions a été diminué de plus de 10 %, tous les bâtiments construits sont de haute qualité environnementale (HQE), on est en avance sur la trajectoire de baisse des consommations énergétiques internes par passager, ADP dispose d’une centrale à bois – un contrat a été passé avec l'Office national des forêts (ONF) pour alimenter une chaudière – la limitation du recours au groupe auxiliaire des avions progresse nettement et des accords de covoiturage ont été passés.

Monsieur Christophe Bouillon, j’ai rappelé qu’ADP pouvait être prédatrice de son environnement au regard du son ou de l’air. Or l’entreprise est le centre des instruments de mesure : elle a ceux concernant le bruit et la pollution. Elle devra donc être coresponsable dans ce domaine, même si elle n’est pas directement responsable juridiquement.

Quant au lien entre Roissy et Orly, on est suspendu aux décisions qui seront prises dans le cadre du Grand Paris. J’estime néanmoins qu’avec le prolongement de la ligne 14, ce lien devrait être nettement amélioré.

Monsieur Olivier Marleix, s’agissant de l’accueil dans les aéroports, je pense, une fois encore, qu’il faut améliorer la coopération entre les différents acteurs. Beaucoup d’usagers ne savent pas par exemple qu’on peut passer la douane avec le système « PARAFE », lequel repose sur une simple prise d’empreintes et évite la file d’attente : il n’existe à cet effet que deux points d’entrée à Roissy, ouverts de 8 heures à midi et de 14 heures à 17 heures, ce qui limite les possibilités d’utilisation, d’autant que les passagers ne sont pas informés de leur existence.

Je voudrais donc que dans chaque périmètre des aéroports, des personnes soient responsables de la résolution des problèmes même s’ils ne relèvent pas d’eux directement. On doit ainsi améliorer l’information relative aux temps d’attente, par exemple lorsqu’un escalator est en panne, à l’instar des progrès enregistrés dans ce domaine par la RATP pour les métros.

Sur les questions de bruit, ADP a aussi un rôle à jouer. Je sais que certains d’entre vous sont sensibles aux nouvelles règles de survol du côté de Conflans-Sainte-Honorine ou de Château-Thierry, qui entraînent une dégradation de la situation pour certaines personnes : nous devons y apporter des solutions.

Monsieur François Pupponi, du fait de sa prédation sur l’environnement, ADP a le devoir d’offrir, en compensation, des emplois aux populations riveraines. Je suis prêt à examiner avec vous le problème précis que vous évoquez.

En outre, ADP consacre des fonds à l’isolation phonique de certains bâtiments, une fondation de l’entreprise mène une action de proximité et un fonds de 4,3 millions d’euros aide à financer les projets identifiés dans les communes riveraines. Les cadres de l’entreprise souhaiteraient par ailleurs une augmentation des crédits, ce à quoi je suis ouvert, car l’insertion de celle-ci dans son territoire crée des dynamiques permettant de récupérer beaucoup plus que l’investissement initial.

Monsieur Alain Bénisti, il n’est pas question de remettre en cause le plafond de 250 000 mouvements à Orly, ni le couvre-feu. Par ailleurs, les avions sont de plus en plus gros et font de moins en moins de bruit – on me dit à cet égard que celui-ci aurait été divisé par deux dans cet aéroport.

Si, le moment venu, on estimait socio-économiquement rentable de faire une ligne de chemin de fer entre Paris et Vatry ou en direction de terrains situés à 40 ou 50 kilomètres d'Orly – dont je ne suis pas sûr qu’ils existent –, je serais ouvert à votre approche, mais je ne dispose pas de suffisamment d’éléments à ce stade pour en juger. Je suis cependant prêt à examiner la question avec vous.

Monsieur Laurent Furst, je pourrais vous répondre que les problèmes que vous évoquez relèvent des compagnies aériennes, mais nous nous y attellerons. Quant à l’aéroport de Francfort, il fait en effet partie des modèles que je citais dans mon intervention liminaire. Il n’y a pas de raison que ceux de Paris n’atteignent pas le même niveau.

Le travail fait par mon prédécesseur a été considérable mais à l’échelle de l’histoire des aéroports, il a commencé très tard : je rappelle que dans le plan stratégique 2006-2010, le mot « client » ne figurait pas dans les têtes de chapitre. Cela dit, la culture d’entreprise se développe très vite dans ce domaine, même si des progrès restent encore à faire.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous remercie.

*

* *

Après le départ de M. Augustin de Romanet, il est procédé au vote sur la nomination par appel nominal à la tribune et à bulletins secrets, les scrutateurs d’âge étant MM. Guillaume Chevrollier et Arnaud Leroy.

Les résultats du scrutin qui a suivi l’audition sont les suivants :


Nombre de votants


Bulletins blancs ou nuls


Abstention


Suffrages exprimés


Pour


Contre

*

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 27 novembre 2012 à 16 h 15

Présents. - M. Christian Assaf, M. Julien Aubert, M. Serge Bardy, Mme Catherine Beaubatie, M. Jacques Alain Bénisti, M. Philippe Bies, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, M. Vincent Burroni, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Fanny Dombre Coste, M. Philippe Duron, Mme Sophie Errante, M. Laurent Furst, M. Alain Gest, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, M. Michel Lesage, M. Olivier Marleix, M. Philippe Martin, M. Philippe Noguès, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, M. Philippe Plisson, Mme Marie-Line Reynaud, M. Gilbert Sauvan, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Denis Baupin, Mme Chantal Berthelot, M. Florent Boudié, Mme Florence Delaunay, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Christian Jacob, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilles Savary, M. Gabriel Serville, M. David Vergé, M. Patrick Vignal

Assistait également à la réunion. - M. François Pupponi