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Mercredi 13 février 2013

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 36

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Anne de Béthencourt et M. Jacky Chorin, rapporteurs du Conseil économique, social et environnemental, sur l’efficacité énergétique

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu Mme Anne de Béthencourt et M. Jacky Chorin, rapporteurs du Conseil économique, social et environnemental sur l’efficacité énergétique.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il y a quelques mois, j’ai rencontré M. Jean-Paul Delevoye, président du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Nous avons convenu que les rapports du Conseil sur les thématiques intéressant la commission du développement durable donneraient lieu à l’audition des rapporteurs aussi souvent que nécessaire.

C’est dans ce contexte que je souhaite la bienvenue à Mme Anne de Béthencourt, chargée des relations extérieures de la Fondation Nicolas Hulot, ainsi qu’à M. Jacky Chorin, secrétaire général Force ouvrière « Énergies-mines ». Leur rapport sur l’efficacité énergétique a été présenté le 9 janvier dernier au nom de la section des activités économiques. J’ajoute, toujours dans le cadre de nos relations avec le CESE, que nous entendrons prochainement M. Jean Jouzel et Mme Catherine Tissot-Colle, auteurs d’un avis sur la transition énergétique.

Je rappelle par ailleurs que le rapporteur pour avis de notre commission sur le projet de loi portant création de la Banque publique d’investissement (BPI), M. Arnaud Leroy, lui a donné une orientation forte en la désignant comme banque de la transition énergétique.

Enfin, deux autres rendez-vous sont prévus à l’agenda de l’Assemblée nationale. À la demande du groupe SRC, un débat sur l’efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment sera organisé le mardi 26 février. Une table ronde de la commission se tiendra le lendemain sur le même sujet en salle Lamartine.

M. Jacky Chorin, rapporteur du Conseil économique, social et environnemental sur l’efficacité énergétique. Je remercie la commission du développement durable de son invitation. Nous sommes honorés d’inaugurer ces relations entre l’Assemblée nationale et le Conseil afin que les deux institutions puissent partager leurs réflexions.

L’efficacité énergétique peut être définie comme une consommation moindre pour un même service rendu. Notre rapport n’envisage pas la question de la sobriété énergétique, sujet beaucoup plus complexe, même si conseil national du débat sur la transition énergétique comprend un groupe de travail « efficacité et sobriété ». Il n’aborde pas non plus le domaine du transport, privilégiant les secteurs du bâtiment et de l’industrie : cette question nécessiterait des développements spécifiques, concernant notamment l’urbanisme.

Le paquet énergie-climat assigne l’ambition de 20 % d’économie d’énergie d’ici 2020 par rapport à 1990, mais c’est le seul objectif non contraignant du droit communautaire. En outre, le Grenelle de l’environnement a permis une avancée importante concernant le bâtiment. Le Parlement devra transposer la directive européenne sur l’efficacité énergétique dans un délai assez bref, selon le vœu du Président de la République. Enfin, un débat national sur l’énergie est en cours, un projet de loi de programmation étant annoncé pour l’automne.

L’efficacité énergétique constitue un objectif important : si nous parvenons à économiser 20 % d’énergie et si les perspectives du Grenelle sont atteintes, elle sera, de fait, notre première source d’énergie. Les gains réalisés permettront d’équilibrer l’offre et la demande futures. Le CESE considère, en effet, que le débat sur l’énergie doit se fonder sur la demande car son nécessaire équilibre avec l’offre oriente nos choix en matière de production.

Nous avons essayé d’identifier les conditions permettant d’atteindre les objectifs très ambitieux que la France s’est assignés. Il convient, tout d’abord, de considérer que l’efficacité énergétique constitue une filière d’avenir riche de nombreux nouveaux métiers. En outre, nous devons nous inscrire dans une vision à long terme, à l’horizon de 2050, en tenant compte de la progressivité des efforts. Nous ne partons pas de rien – le Grenelle de l’environnement constitue un acquis – même s’il nous reste à transposer la directive sur l’efficacité énergétique, dont l’enjeu est considérable. Enfin, il faut donner des signaux politiques forts et stopper les « contre-signaux » : l’augmentation de la TVA, par exemple, a fortement interpellé.

Je me propose de vous présenter rapidement les éléments de notre avis sur le bâtiment, la précarité énergétique et l’industrie. Nous avons également traité les questions liées à l’agriculture et à l’outre-mer.

Le bâtiment tertiaire représente 44 % de la consommation énergétique, 850 millions de mètres carrés, et 33 millions de logements dont 4 millions considérés comme très énergivores. J’attire votre attention sur le fait que les trois quarts du parc de 2050 sont déjà construits, ce qui témoigne de la centralité de la rénovation.

Le Grenelle de l’environnement demande des efforts portés à hauteur de 12 % par le secteur des transports et de 88 % par celui du bâtiment. L’industrie n’a pas été concernée. 400 000 logements doivent être rénovés chaque année, chiffre que l’actuel Gouvernement a porté à 500 000, mais 160 000 rénovations seulement ont eu lieu en 2011. Nous essayons d’examiner les conditions dans lesquelles cet écart pourrait être comblé.

S’agissant de l’emploi, nous avons interrogé plusieurs acteurs. Alain Grandjean, de Carbone 4, a fait état de 100 000 à 150 000 créations ; Cécile Duflot a, quant à elle, évoqué le chiffre de 75 000 nouveaux emplois. Nous demandons une étude macro-économique permettant d’envisager précisément les gains escomptés. Il y en aura forcément, mais il faut reconnaître que les données sont jusqu’ici assez variables.

Nous avons également formulé des propositions concrètes. L’efficacité énergétique est une priorité nationale : nous recommandons d’abaisser le taux de TVA à 5 % car c’est un bien de première nécessité. Nous connaissons évidemment l’état des finances publiques mais nous souhaitons susciter la discussion. Le précédent Gouvernement a fait passer le taux applicable de 5,5 % à 7 % et il est désormais question de le porter à 10 %. Les professionnels du bâtiment ne comprennent pas cette nouvelle hausse qui provoquerait des destructions d’emplois et qui, de surcroît, contredit le propos du Président de la République lors de la Conférence environnementale selon lequel la rénovation thermique aurait rang de priorité. Telle est la position, en l’occurrence très consensuelle, de la société civile qui ne comprend pas l’objectif politique présidant à cette hausse de la fiscalité.

Nous considérons qu’il faut favoriser la coopération entre les professionnels de la filière, depuis la conception des matériaux jusqu’à la gestion énergétique des bâtiments. Cela suppose que l’ancien et le neuf travaillent mieux ensemble et que nous réfléchissions à la maîtrise des coûts par rapport à nos voisins.

Il importe aussi de définir rapidement les normes applicables dans le tertiaire. La loi Grenelle a prévu une obligation de rénovation mais les décrets définissant sa nature et son contenu sont toujours en souffrance. Il en résulte un blocage et un manque de confiance entre les différents acteurs. Je rappelle que la directive sur l’efficacité énergétique imposera un certain nombre de remises à niveaux sur les bâtiments publics. Nous avons insisté sur ce point parce que l’ampleur du secteur tertiaire doit servir d’amorce au mouvement de rénovation. Si l’État ne se l’impose pas à lui-même, il sera bien difficile de convaincre les particuliers. Des concertations ont eu lieu dans le cadre du plan Bâtiment du Grenelle sur le caractère plus ou moins ambitieux des normes. Mais il importe d’enfin lancer l’effort de rénovation.

En outre, nous proposons de développer l’efficacité active, c’est-à-dire la gestion intelligente des bâtiments. Jusqu’à présent, nous nous sommes focalisés sur la rénovation – certes essentielle – du bâti. Mais en quatre ou cinq ans, grâce au progrès technique, la situation a considérablement évolué. Lors du débat sur la transition énergétique, les professionnels ont fait état d’économies évaluées entre 19 % et 28 % avec des investissements moins lourds et des temps de retour plus rapides. Il serait dommage de ne pas travailler sur l’efficacité active alors qu’elle génère des gains conséquents.

Il convient également de tendre vers une garantie de performance des travaux. Nous avons le sentiment que rien ne se fera efficacement sans que les particuliers soient certains de profiter justement des investissements réalisés. Des débats ont eu lieu, là encore, dans le cadre du plan Bâtiment du Grenelle ; des propositions de garanties de performances intrinsèques ont été formulées. Mais la situation n’évoluera positivement, je le répète, que si les particuliers sont assurés que les investissements qu’ils ont consentis seront assortis de gains mesurables. Si tel n’est pas le cas, la machine demeurera grippée. Des contrôles doivent être menés ; leurs modalités restent à définir.

La formation des professionnels constitue un enjeu majeur. À l’instar de l’ensemble des formateurs, nous promouvons une approche globale multi-métiers. Là encore, je vous renvoie aux travaux du plan Bâtiment du Grenelle. Le programme Formation aux économies d’énergies des entreprises et artisans du bâtiment (FEE Bât) fonctionne bien même si toutes les personnes qui devaient le suivre n’ont pas participé. Parce que la rénovation des bâtiments doit évidemment se faire avec les artisans, nous insistons pour le maintien de ce programme, financé à 50 % par la profession et 50 % par EDF dans le cadre des certificats d’économies d’énergie (CEE).

Nous souhaitons réaffirmer l’éco-conditionnalité des aides publiques, le précédent gouvernement ayant annoncé que l’éco-PTZ ne devait être accordé que pour des travaux réalisés par des entreprises reconnues Grenelle de l’environnement (RGE). Cela incite les professionnels à se former. Faute d’un tel mécanisme vertueux – il avait été question du 1er janvier 2014 mais nous verrons ce qu’il en est du nombre d’artisans concernés –, les difficultés demeureront.

Il importe d’impliquer et d’informer les citoyens, notamment sur les avancées en cours : compteurs électriques communicants Linky à généraliser même si un problème de financement persiste ; projet similaire Gazpar, sur lequel travaille l’ADEME, concernant 11 millions d’abonnés à la distribution de gaz ; répartition des charges de chauffage dans les copropriétés, dont une directive européenne impose la généralisation d’ici 2017, alors que 10 % seulement des copropriétés en bénéficient aujourd’hui.

La qualité du diagnostic de performances énergétiques (DPE) a fait l’objet de critiques très vives lors du débat de la proposition de loi (PPL) sur la tarification progressive de l’énergie. Il nous semblerait plus judicieux de mettre en place un « DPE + » exprimé en euro par mètre carré pour clarifier les consommations effectives.

Enfin, si l’appréciation des membres du CESE diverge quant à la tarification progressive de l’électricité et du gaz, ils ont unanimement considéré que le mécanisme prévu dans le texte actuellement en navette, même rectifié, ne permettrait pas d’atteindre les objectifs souhaités et qu’il remettrait même en cause les exigences de justice sociale.

Mme Anne de Béthencourt, rapporteur du Conseil économique, social et environnemental sur l’efficacité énergétique. Je me propose d’aborder la question du financement de l’efficacité énergétique, qui fait l’objet d’un chapitre de notre avis intitulé Innover dans l’accompagnement financier. Chaque rénovation coûtant en moyenne de 20 000 à 30 000 euros, nous avons besoin de 10 à 15 milliards d’euros chaque année pour rénover 500 000 logements. À ce jour, l’État engage environ deux milliards d’euros. Un effort important sera donc nécessaire.

Nous avons également formulé un certain nombre de recommandations. La BPI a été conçue comme la banque de la transition énergétique et écologique. Nous sommes donc attentifs à ce qu’une partie des fonds puisse être fléchée vers la rénovation thermique. La France dispose d’un potentiel important puisque l’efficacité énergétique est l’un des secteurs qui se porte le mieux, avec des emplois et un chiffre d’affaires en progression.

Il nous semble également essentiel de réfléchir au tiers investissement, mécanisme permettant au propriétaire d’un bâtiment de faire financer sa rénovation par un tiers, lequel se rembourse par un loyer correspondant aux économies réalisées. Ce système est peu présent en France mais nombre de pays européens tendent à le développer ; nous aurions intérêt à en examiner les modalités. Il peut être un levier important dans le tertiaire public et privé, même s’il n’est pas pertinent pour des particuliers faute de projets suffisamment importants.

Les CEE ont permis de déterminer les économies d’énergie possibles ainsi que leur calcul théorique afin de constituer une base de réflexion. Néanmoins, ils sont aujourd’hui critiqués : le mécanisme devient de plus en plus complexe, surtout pour les consommateurs ; le caractère théorique des économies générées ne permet pas d’en définir l’efficacité réelle. Il nous a semblé qu’il convenait absolument de maintenir le financement de programmes très importants par les CEE tout en réorientant une partie des fonds sur un programme de soutien à l’efficacité énergétique. Nous recommandons que la Caisse des dépôts et consignations (CDC) lance une étude sur ce sujet. L’Allemagne dispose depuis très longtemps d’une banque dédiée avec la KfW ; la Grande-Bretagne vient de lancer le programme Green Deal avec une banque de la transition et de l’efficacité énergétiques. La CDC-Climat a proposé la création d’un fonds auprès de la Banque européenne d’investissement (BEI), lequel proposerait des prêts bonifiés aux particuliers via des banques locales. Il nous semble particulièrement important d’aller au bout d’une telle idée.

Nous avons tenu à aborder la précarité énergétique. Il ne s’agit plus de consommer moins pour un confort égal, mais de maintenir ledit niveau de confort. Sont considérés comme précaires les 3,8 millions de ménages qui consacrent plus de 10 % de leurs revenus à leurs dépenses d’énergie. Plus de 50 % d’entre eux sont des personnes âgées, propriétaires, vivant en maison individuelle et dans des zones rurales ou périurbaines. J’ajoute que 600 000 ménages déclarent souffrir du froid dans notre pays. Or, selon une étude européenne, un euro investi pour lutter contre la précarité énergétique revient à économiser 42 centimes en frais de santé.

Nous proposons de lancer un programme d’isolation des bâtiments les plus énergivores. Le programme Habiter mieux connaît quelques difficultés, mais nous préconisons de le poursuivre et de le doter des moyens nécessaires. Il convient également de généraliser les aides pour le chauffage à toutes les énergies et de ne plus les limiter au gaz et à l’électricité.

Nous plaidons pour intégrer la performance énergétique aux critères de décence du logement. Cela ne signifie pas que des habitations doivent être retirées du marché, mais que les propriétaires doivent être accompagnés afin qu’il ne soit plus possible, à terme, de louer des passoires énergétiques.

Les industriels ont déjà beaucoup agi en termes d’efficacité énergétique mais le potentiel reste énorme. Nous pourrions constituer une filière industrielle, notamment à travers les compteurs communicants et les répartiteurs de chauffage.

La directive écoconception libérant également un énorme potentiel d’économies, il importe d’accélérer sa mise en œuvre et d’approfondir ses exigences. À cette fin, et c’est suffisamment rare pour être signalé, des industriels et des représentants d’associations environnementales se sont unis au sein de Cool Products pour demander des normes européennes d’efficacité énergétique plus importantes afin de préserver l’industrie continentale et d’accélérer la mise en place des différents dispositifs. Le potentiel de réduction des émissions de CO2 s’élèverait à 400 millions de tonnes chaque année.

Nombre de personnes s’interrogent sur l’économie circulaire et les nouveaux principes industriels qui permettraient d’accroître l’efficacité énergétique. La France devrait prendre la tête du mouvement. Si la volonté des acteurs, des pouvoirs publics et de l’ensemble de la société est telle, nous sommes persuadés que l’efficacité énergétique sera un marché clef de l’avenir et une filière d’innovation créatrice d’emplois en France.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Sans préempter le débat, je souhaite formuler quelques réflexions personnelles, en particulier s’agissant de la question du financement.

L’objectif de rénovation de 500 000 logements chaque année – pour 150 000 en ce moment – est ambitieux. Vous évaluez le coût entre 20 000 et 30 000 euros par logement, ce qui représente entre 10 et 15 milliards par an. Les moyens financiers à mobiliser sont donc énormes. Il conviendra de mettre en place un certain nombre de dispositions réglementaires, de créer différents outils et de consentir des efforts significatifs.

Je suis sceptique quant à l’efficacité du dispositif du tiers investisseur. Il n’est pas question d’en parler pour les particuliers, puisqu’il ne fonctionnerait pas, mais je ne suis pas non plus certain qu’il en irait différemment pour le secteur public et le tertiaire. Les collectivités territoriales avaient la possibilité de signer des contrats avec des entreprises privées afin de réaliser des travaux favorisant les économies d’énergie, le coût étant financé par les économies réalisées : c’est un échec patent. Là encore, l’écart est sensible entre les gains obtenus et le prix de ces travaux. Je connais une commune de taille importante qui a consacré 12 millions d’euros à l’isolation thermique de ses écoles ; le maire a constaté que les économies réalisées ne sont pas équivalentes. Dès lors, il importe de trouver des financements complémentaires. Si ce n’est pas le cas, la collectivité ne doit pas s’engager si lourdement.

Tout le monde doute de l’efficacité des CEE. L’opacité la plus grande règne, nul n’est capable de décrire simplement leur fonctionnement, comme le faisait remarquer Mme de Béthencourt. Ils ont été l’occasion d’effets d’aubaine importants. Une remise en cause s’impose, même s’il convient sans doute d’en conserver une partie pour les actions de formation. Plus globalement, les CEE doivent servir à la mise en place d’un fonds permettant un effet de levier. Le ministère chargé du développement durable s’apprête à en demander une évaluation par la Cour des Comptes. Si ce fonds permettait de mobiliser des financements européens et, en particulier, ceux issus de la BEI, ne conviendrait-il pas de mettre en place une fiscalité écologique afin de le financer ?

M. Jean-Yves Caullet. Au nom du groupe SRC, je remercie Mme de Béthencourt et M. Chorin pour leur rapport lequel, comme tous les travaux du CESE, a le mérite d’être suffisamment panoramique et de ne pas cloisonner le questionnement. S’agissant des objectifs et de leur ambition, tout le monde est d’accord, mais convient également que le rythme actuel est insuffisant pour les atteindre.

Dans le domaine du bâtiment, vous semble-t-il possible d’isoler les travaux qui contribuent à l’efficacité énergétique afin de cibler la TVA applicable ? Comment, par ailleurs, opérer les différents contrôles ? La fiscalité ne peut être appréciée de façon isolée et les contre-signaux sont nombreux. Les difficultés du dispositif du tiers investisseur et, plus globalement, des financements, ne résultent-elles pas du fait que l’énergie, finalement, est moins onéreuse qu’elle n’est précieuse ?

Vous avez fait part du nécessaire renforcement des normes. Sur le terrain, je suis confronté à des projets qui ne voient jamais le jour car trop éloignés du niveau exigé par ces dernières : au final, rien ne se fait. N’y a-t-il pas un problème entre l’ambition posée par une norme, que je comprends fort bien, et la possibilité même d’agir ? En la matière, le mieux n’est-il pas l’ennemi du « un peu mieux » ?

Vous avez souligné la distance entre la durée de financement des travaux, leur réalisation et le retour sur investissement compte tenu du coût de l’énergie, certes important, mais pas autant qu’on ne le croit. Ne conviendrait-il pas de se pencher sur l’aspect patrimonial de la question ? Ainsi, en plus du fonds que vous avez évoqué, les prêts viagers ne pourraient-ils constituer une source complémentaire de financements de manière à ce qu’un propriétaire comprenne que les travaux augmentent la valeur de son bien et que cela peut constituer un moyen de financement ? Le tiers investisseur ne se paierait pas simplement à partir du remboursement, mais en devenant pour partie propriétaire. 

Enfin, s’agissant de la précarité énergétique, l’efficacité énergétique exige des investissements qu’une catégorie de la population ne possède pas. La voie patrimoniale, là encore, ne serait-elle pas intéressante ?

M. Martial Saddier. Au nom du groupe UMP, je vous remercie de votre exposé et je salue la qualité de vos travaux ainsi que de vos interventions. À travers vous, je salue également le président Jean-Paul Delevoye.

Si nous sommes là ce matin, c’est parce que nous avons modifié notre Constitution afin d’y inclure la Charte de l’environnement ; c’est parce que le Grenelle de l’environnement a modifié le titre, la composition, l’esprit et l’orientation des travaux du Conseil économique et social devenu ainsi environnemental. Serions-nous là pour discuter de ce rapport si tel n’avait pas été le cas ? Il me semble utile de faire ce petit rappel.

Le président Jean-Paul Chanteguet a été dans son rôle en rappelant que le rapporteur de la majorité a fait en sorte que la BPI ait une vocation et une sensibilité environnementales. Je suis dans le mien en rappelant que les députés UMP avaient déposé des amendements identiques et qu’ils ont également œuvré afin que le texte adopté le 19 décembre confère à notre commission une position centrale s’agissant des travaux et des orientations de la BPI.

Le rapport du CESE souligne la qualité de l’apport du Grenelle de l’environnement et nous vous en remercions. Il rappelle également que ses grandes orientations étaient bonnes et que nous avons besoin d’une continuité dans l’action, ce que nous ne cessons quant à nous de répéter depuis un an. Je rappelle que 80 % du chemin reste à faire dans le domaine du logement mais que la moitié de la transition a été accomplie dans l’industrie depuis une dizaine d’années – alors que cette dernière traverse les difficultés que l’on connaît – à travers, notamment, la lutte contre la pollution de l’air.

Qu’en est-il des enquêtes d’opinion ? Quelle est la sensibilité de nos concitoyens sur la transition énergétique ? Quid de la recherche et du développement ? Je rappelle que c’est nous qui avons mis en place le crédit impôt recherche, en particulier via les pôles de compétitivité, dont certains sont spécialisés dans le domaine de la transition énergétique.

Dans deux mois, cela fera un an que le Président François Hollande a remporté les élections. Le moins que l’on puisse dire est que vous n’avez eu de cesse d’interrompre la dynamique du Grenelle de l’environnement en faisant le contraire de ce qu’il aurait fallu faire comme en témoigne l’augmentation de la TVA. Pire : c’est un comble que cette majorité ait accru l’injustice sociale avec la tarification de l’électricité ; ce rapport en atteste comme nous n’avons nous-même cessé de le marteler. (Murmures sur les bancs du groupe SRC)

Que dire de l’absence de politique du logement puisque nous ne disposons d’aucune visibilité alors que des efforts devraient être accomplis dans la réhabilitation de l’ancien ? Nous avons compris que la spécialité de la majorité est de détourner l’attention de l’opinion : nous l’avons vu à l’occasion du dépôt d’amendements concernant l’éolien à deux heures du matin quand il faudrait plutôt se concentrer sur les questions de logement. Si nous n’avons pas été écoutés ni entendus par la majorité, nous espérons tout de même que la société civile saura à quoi s’en tenir à travers ce rapport.

M. Bertrand Pancher. Au nom du groupe UDI, je suis également très heureux de votre présence et je vous remercie de venir témoigner de la réflexion du CESE.

Êtes-vous satisfaits de la façon dont vous travaillez avec le Parlement et pensez-vous que nos relations puissent encore s’améliorer ? Lors de la réforme constitutionnelle, j’avais souhaité qu’une audition du CESE soit systématique avant la discussion de tous les textes mais on m’a expliqué, à gauche comme à droite, qu’il était bien de vous inviter lorsque nous en avions envie. Je souhaiterais vraiment qu’il soit possible de travailler ensemble d’une manière plus régulière compte tenu de la qualité de vos expertises.

J’ai lu votre rapport avec beaucoup d’intérêt. Nous sommes toujours frustrés de constater combien nous sommes déconnectés des orientations européennes alors que c’est l’Europe qui, au quotidien, nous guide en permanence. J’invite mes collègues à examiner les travaux de la Commission sur la question énergétique, lesquels souffrent d’un manque de dimension… européenne. Comment donc mieux coordonner les réseaux et les objectifs ?

Vous insistez beaucoup sur votre souhait de faire travailler ensemble les acteurs privés. Il convient en effet d’avancer dans ce sens. Toutefois, vous évoquez peu la question des acteurs publics. Or, si nous atteignons difficilement nos objectifs, c’est parce que nous sommes dans la quasi-incapacité de faire travailler ensemble ces derniers. Les décisions des uns et des autres changent en permanence, le consommateur n’y comprend plus rien et le propriétaire pas davantage. Les règles nationales sont modifiées presque à chaque loi de finances – crédits d’impôt, aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), etc… Celles des collectivités territoriales, régions et départements, s’ajoutent des dispositifs comme les CEE. Par ailleurs, des contre-signaux sont effet envoyés dont, par exemple, le doublement de la TVA sur le logement. Après, d’aucuns se demandent pourquoi nous n’atteignons pas nos objectifs… Cherchez l’erreur !

Enfin, si nous ne dégageons pas des moyens financiers lourds, nous n’atteindrons jamais nos objectifs. Ce n’est pas la peine de se raconter des histoires : il ne sera pas possible de rénover annuellement 500 000 logements. Quels moyens innovants mettre en place sur le plan bancaire ? Quelles sont les évolutions possibles ?

M. Denis Baupin. Au nom du groupe écologiste, je remercie également Mme Anne de Béthencourt et M. Jacky Chorin pour leur avis adopté à la quasi-unanimité du CESE, ce qui est selon moi presque aussi important que son contenu. Cela montre que nous sommes capables de définir une politique de transition énergétique visant à répondre à des objectifs environnementaux et, également, économiques, de créations d’emplois, de justice sociale, de pouvoir d’achat et de lutte contre la précarité. Ce n’est pas contradictoire. Nous aurions évidemment tort de croire qu’il faut attendre d’avoir résolu la crise pour appliquer de telles solutions quand, au contraire, ce sont ces préconisations qui peuvent nous aider à dépasser la crise que nous traversons.

Il est important que vous ayez mis en évidence combien l’efficacité énergétique constitue le premier gisement énergétique dont nous disposons et non telle ou telle ressource sur laquelle on attire prioritairement l’attention. Vous avez de surcroît rappelé combien les filières concernées créent des emplois. Le contenu du rapport, de plus, converge avec les analyses de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) selon laquelle 77 % des actions à mener afin de lutter contre le dérèglement climatique résulteront de l’efficacité énergétique et 19 % des énergies renouvelables.

La convergence est également patente avec les propos tenus par le ministre allemand de l’environnement auditionné la semaine dernière dans le cadre du débat sur la transition énergétique. Il n’est pas fréquent que je cite un membre de la CDU (Sourires) mais j’invite nos collègues à se reporter à son discours : aujourd’hui, un ménage allemand consomme 40 % d’électricité de moins qu’un ménage français. Cela s’explique pour une moitié par l’utilisation du chauffage électrique et pour une autre moitié par une efficacité énergétique réelle due à des appareils électroménagers moins gourmands.

Je regrette que vous n’ayez pas évoqué la question des transports alors qu’il s’agit d’un sujet d’autant plus essentiel que l’industrie automobile se trouve en plein marasme. Nous devons promouvoir des véhicules sobres si nous ne voulons pas que nos concitoyens – qui n’ont plus les moyens de se déplacer en voiture – et les salariés – aujourd’hui menacés – soient victimes d’une absence de transition sur ce plan.

Tout le monde convient que le mécanisme des CEE est complexe. Néanmoins, il ne faut pas « jeter le bébé avec l’eau du bain » puisqu’ils ont permis de mettre en place des cercles vertueux en matière d’efficacité énergétique. Si de nouveaux dispositifs devaient être proposés, ils devraient avoir au minimum les mêmes résultats.

Personne ne prétend que le tiers investissement est un moyen de tout financer. Mais si l’on se fonde sur la durée de vie d’un bâtiment et sur l’apport patrimonial à sa valeur, un certain nombre d’éléments favorisent un autofinancement ou la réduction de la part de financement parapublic. Des centaines d’écoles parisiennes bénéficient de ce dispositif dont, il est vrai, le temps de rentabilité est long. La BPI peut accompagner le mouvement, de même que des mécanismes de fonds de garantie, mais cela ne sera efficace qu’à condition de considérer l’énergie comme un bien dont la quantité est limitée.

Enfin, je suis en accord avec ce qui a été dit concernant la TVA à 5 %.

M. Olivier Falorni. Au nom du groupe RRDP, je remercie les auditionnés pour la qualité de leur intervention. Le Gouvernement s’est engagé dans un vaste plan de rénovation de logements dont le coût varie en fonction des interlocuteurs puisque les chiffres annoncés vont de 8 à 15 milliards d’euros. Le financement de la transition énergétique est bien évidemment au cœur des débats. Le programme « Habiter mieux », financé en grande partie par l’ANAH, s’élève à 1,4 milliard d’euros. Tous les modes avancés reposent en priorité sur le financement public ; dans le contexte économique contraint que nous connaissons, nous savons qu’ils ne sont pas viables.

Vous avez formulé plusieurs propositions, dont celle qui consiste à faire de la BPI un outil de la transition énergétique. Elle l’est dans les textes, mais dans quels délais sera-t-elle opérationnelle et constituera-t-elle un véritable pivot d’une telle évolution ? Le principe d’une « banque verte » à l’instar de ce qui existe déjà en Allemagne et en Grande-Bretagne faisant son chemin au sein de l’opinion publique française, la BPI pourrait-elle s’inspirer de ces modèles ?

La TVA à taux réduit pour les travaux de rénovation énergétique constitue un élément du dynamisme de ce marché. Vous regrettez que le Parlement ait décidé de majorer le taux en le faisant passer de 7 % à 10 % au mois de novembre 2012 et je suis d’autant plus en accord avec vous que le secteur du bâtiment poursuit les efforts qu’il a engagés avec le programme FEE Bât, reconduit pour 2013.

Les professionnels attendaient impatiemment la fin du bras de fer entre EDF et le ministère de l’écologie quant à la rémunération des CEE. L’accord intervenu, grâce auquel 53 000 artisans ont été formés l’année dernière – pour un objectif de 100 000 – permettra à EDF de financer ce programme à hauteur de 50 %. La transition écologique passera aussi par la plus grande compétence de ces professionnels. Nous devons soutenir cet engagement.

Enfin, qu’en est-il des diagnostics immobiliers, dès lors que débourser 200 euros peut être un frein pour une partie de la population ? Vous proposez que cette facture soit prise en charge par l’État mais envisagez-vous dans ce cas-là un plafond de revenus ?

M. Jacques Krabal. Comme les rapporteurs l’ont dit, la première source potentielle d’énergie domestique à l’horizon de 2020 est constituée par celle qui ne sera pas consommée. Tel est l’élément clé – il faut le marteler – de notre débat sur la transition énergétique qui permettra de rallier l’ensemble de la population. Nous devons faire preuve d’exigence dans le respect des règles tout en étant soucieux de lisibilité. Par exemple, les périmètres diffèrent en matière de réglementation thermique et de diagnostics de performance énergétique : on a bien du mal à s’y retrouver.

Vous soutenez la proposition de CDC Climat sur le tiers financement et la mise en place de circuits de financement spécifiques, ce qui est positif. Connaissez-vous des exemples de tiers financement qui fonctionnent et bénéficiez-vous d’un retour d’expérience ?

Pourquoi soutenez-vous le dispositif des CEE ? Existe-t-il un bilan précis et chiffré du nombre de rénovations qu’ils ont permis ?

Nous connaissons le rapport affectif qui unit les consommateurs et l’énergie. Il est d’autant plus utile d’en revenir à La Fontaine : le poète n’écrivait-il pas dans La Fiancée du roi de Garbe qu’ « il n’est d’affection dont on ne vienne à bout » ? Je suis convaincu qu’il en sera finalement de même en matière d’énergie !

M. Philippe Plisson. Le secteur agricole ne représente que 3 % du total des consommations finales d’énergie. Cette faible proportion justifie-t-elle la quasi-absence de l’agriculture dans le rapport ?

Les objectifs du plan de performance énergétique des exploitations agricoles, dont ceux du Grenelle de l’environnement, visent à aboutir à l’horizon de 2013 à ce que 30 % des exploitations soient à faible dépendance énergétique et à réaliser 100 000 DPE. Pour atteindre ce résultat, ne convient-il pas de proposer un plan spécifique avec, par exemple, la généralisation du photovoltaïque sur les toits des hangars, la méthanisation systématique dans l’élevage et le développement du petit éolien en consommation autarcique financé en emprunt grâce aux économies réalisées ?

M. Jacques Kossowski. J’ai lu dans un rapport de septembre dernier que, selon Réseau de transport d’électricité (RTE), la sécurité de l’alimentation électrique est assurée jusqu’en 2015. À partir de 2016, donc demain, la situation pourrait se tendre avec une demande supérieure à l’offre. Parmi les facteurs préoccupants : une consommation électrique qui ne cesse d’atteindre des pics record, la pointe de consommation saisonnière ayant augmenté de 40 % en dix ans et représentant 102 GWh en 2012, niveau beaucoup plus élevé qu’en Allemagne où il est de 86 GWh.

Une telle hausse s’explique par l’usage du chauffage électrique auquel s’ajoute l’augmentation des usages spécifiques de l’électricité. Cela risque de se combiner avec une baisse de l’offre liée au déclassement d’installations thermiques et avec la fermeture de la centrale de Fessenheim en 2017. Le développement des énergies renouvelables ne suffira pas à compenser. Dans le cadre d’un programme d’efficacité énergétique, que proposez-vous pour diminuer une telle tension ?

M. Yannick Favennec. Les agriculteurs ont un rôle important à jouer dans la maîtrise énergétique puisqu’ils produisent des énergies renouvelables, qu’ils peuvent améliorer l’efficacité énergétique de leurs exploitations et qu’ils contribuent à la transition énergétique. Le monde agricole a fourni de nombreux efforts mais il a besoin de sécurité et de lisibilité : dans le cadre réglementaire autant que pour les investissements en économie d’énergie et la production en énergies renouvelables.

Un important projet de méthanisation, dans ma circonscription de Mayenne, rassemble une centaine d’agriculteurs, qui doivent faire face à des démarches administratives complexes et à une inflation normative étouffante. Par exemple, six mois sont nécessaires, en Allemagne, pour monter un tel projet quand il en faut trois plus dans notre pays.

Quelles orientations prendre afin de simplifier ces démarches ? Ne pensez-vous pas que la France devrait se doter d’une tarification plus incitative en matière de méthanisation et mieux soutenir la professionnalisation de cette filière ?

M. Philippe Martin. La précarité énergétique constitue un fléau social. Président du Conseil général du Gers, j’ai été alerté sur l’accélération de ce phénomène dès 2004 par les travailleurs sociaux de ma collectivité en relation avec les familles les plus modestes. Plutôt que de remédier ponctuellement aux accidents de paiement, nous avons créé un service local d’intervention pour la maîtrise de l’énergie – que vous mentionnez d’ailleurs dans votre rapport – permettant d’identifier les ménages concernés et de les accompagner dans une démarche de rénovation.

Avant d’être un problème de réglementation, d’équipement ou d’aides financières, la précarité énergétique est d’abord un problème d’isolement, notamment en milieu rural. Votre rapport fait peu état de cette dimension de renforcement du lien social, laquelle doit pourtant figurer au cœur du dispositif de lutte contre cette forme de précarité. Pourquoi ne pas favoriser la mise en réseau de ces personnes afin qu’elles apprivoisent ensemble l’utilisation de leurs nouveaux équipements ? Cela permettrait de surcroît de répondre aux résistances, aux angoisses et aux difficultés de signalement.

M. Guillaume Chevrollier. Votre rapport fait de la rénovation énergétique des bâtiments une priorité dans la transition écologique de notre société, une telle rénovation devant conduire à l’amélioration du pouvoir d’achat ainsi qu’au développement de l’économie et de l’emploi, ce qui est positif. Le Président de la République a fait part d’engagements chiffrés que vous qualifiez d’extrêmement ambitieux puisqu’il s’agit de mettre aux meilleures normes énergétiques un million de logements neufs et anciens en se concentrant sur les quatre millions de logements énergivores de notre pays. Vaste programme !

Mais le problème est toujours le même : les engagements sont là, pas les financements, d’où le décalage entre les objectifs et les réalisations. Votre rapport énumère des mesures qu’il serait certes intéressant de prendre mais la plupart étant à la charge de l’État, quid de la nécessaire réduction des dépenses publiques annoncée par le Gouvernement ? L’efficacité énergétique doit passer préalablement par l’efficacité budgétaire de l’État ainsi que par la stabilité juridique et fiscale des normes.

Mme Geneviève Gaillard. Je ne m’attarde pas sur les questions touchant au monde agricole puisqu’elles ont déjà été posées par mes collègues. J’ai bien entendu le constat porté sur les problématiques liées à l’énergie ainsi que les propositions formulées. Pensez-vous possible d’avancer avec les difficultés que nous connaissons ? Êtes-vous plutôt optimistes ou considérez-vous que nous n’avons pas fini d’évoquer ces problèmes ?

Je n’ai pas entendu dans vos propos d’éventuelles préconisations en matière d’urbanisme, sujet pourtant important pour le traitement de l’efficacité énergétique. Pourrait-on avoir quelques informations ?

M. Jean-Jacques Cottel. Les collectivités territoriales sont volontaires pour rénover leur éclairage public ou isoler leurs bâtiments, mais les dossiers n’en sont pas moins compliqués à constituer. Les aides de l’ADEME, des fédérations départementales de l’énergie au titre des CEE ou dans le cadre des fonds européens, sont évidemment intéressantes mais nous n’y voyons pas toujours clair. On réclame sans cesse des pièces afin de parachever des dossiers et, finalement, les demandes de subventions finissent par être hasardeuses.

Vous avez souligné l’importance de l’isolation des bâtiments, notamment pour les personnes qui se chauffent au fioul, particulièrement cher. J’avais déjà signalé cette difficulté dans le cadre de la discussion de la PPL Brottes.

J’ai été sensible à vos propos concernant les nombreuses personnes qui souffrent du froid. Comment peut-on favoriser le développement des audits énergétiques ? Comment les collectivités locales peuvent-elles compléter les mesures dont vous avez parlé ?

M. Julien Aubert. À l’évidence, un problème de visibilité et de lisibilité de la politique d’efficacité énergétique se pose. Un précédent auditionné nous a affirmé que la tertiairisation de l’économie provoquerait une explosion de la consommation énergétique, que le prix de l’énergie augmenterait fortement, ce qui impacterait évidemment le calcul et l’intérêt d’avoir recours à l’efficacité énergétique.

Les notions de transition et d’efficacité énergétiques sont parfois mêlées dans les discussions. Peut-on avoir une politique d’efficacité énergétique non corrélée à la transition énergétique, c’est-à-dire à bouquet énergétique constant ? L’État ne doit-il pas arbitrer pour répartir le plus équitablement possible ses ressources entre transition et efficacité ?

Mme Martine Lignières-Cassou. Lorsque je discute avec des artisans de la confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB), je n’ai pas le sentiment qu’ils soient aussi engagés qu’il le faudrait dans les politiques de formation. Des marchés risquent de leur échapper. Je vous ai donc trouvés très optimistes sur cet aspect.

Comme vous, je considère qu’il faut tendre à la création d’un fonds faisant office de tiers investisseur à même de penser une stratégie et de lever des fonds sur trente ans puisque telle est la durée du retour sur investissement. Il faut œuvrer afin que la CDC Climat s’investisse en ce sens ou bien il faut imaginer, de façon plus décentralisée, la constitution de sociétés d’économie mixte (SEM) ou d’autres outils opérationnels permettant d’innover et d’agir, notamment dans les copropriétés dégradées.

M. Philippe Noguès. Comme vous l’avez souligné, nous ne pourrons engager la transition énergétique sans moyens de financement innovants. Les fonds dont nous disposons sont trop faiblement dotés alors que, paradoxalement, l’épargne française est abondante. N’étant hélas pas dirigée vers des investissements productifs dédiés au développement durable, comment mieux la réorienter ? Tel était notamment l’objet du Livret de développement durable créé au mois de janvier 2007. Or nous ne disposons d’aucune analyse ni d’aucune statistique rendant compte des projets financés grâce à lui. Certains qualifient ce dispositif de désastreux et je ne cache pas, quant à moi, mon scepticisme. Comment faire pour ne pas retomber dans les mêmes écueils ?

Vous avez également souligné que l’éco-prêt à taux zéro n’a rencontré que peu de succès. Est-ce parce que les banques sont seules juges quant à son attribution et qu’elles ne sont pas des expertes dans de tels domaines ? Lorsque vous préconisez de confier la gestion de ce prêt à un autre organisme agréé, à quel type de gouvernance vous référez-vous pour en optimiser la gestion et l’attribution ?

M. Jean-Pierre Vigier. Le financement est le nerf de la guerre. Votre rapport fait de la rénovation énergétique des bâtiments une priorité dans la transition écologique de notre société. C’est une bonne chose et, comme vous l’avez dit, la première énergie économisée est celle qui n’est pas consommée. Le Gouvernement souhaite procéder annuellement à la mise aux normes énergétiques de 500 000 logements dans le cadre d’un programme de 10 à 15 milliards quand les rénovations s’élèvent à ce jour à 150 000 chaque année. Or, de tels travaux représentent une lourde charge pour l’État et les collectivités locales. Chacun connaissant l’état des finances publiques. Comment cet ambitieux programme sera-t-il financé ? Je crois qu’en l’état nous ne le pouvons absolument pas.

M. Jean-Louis Bricout. Dans nos campagnes et nos petites villes, nos aînés souffrent de précarité énergétique. Ils vivent souvent dans des logements trop grands, d’où une surconsommation d’énergie. De surcroît, il leur est souvent difficile d’engager des travaux : sur un plan financier, certes, mais aussi psychologique tant il est perturbant de bouleverser leurs habitudes. Quelle solution proposez-vous ? Quel rôle leurs ayants droit pourraient-ils jouer ? Nos collègues ont évoqué le tiers investisseur ou la voie patrimoniale. Quel relais les bailleurs publics pourraient-ils également constituer ?

Pour lutter contre les marchands de sommeil, que pensez-vous de l’élargissement des pouvoirs de police du maire dans le cadre de l’article L. 212-1 du code général des collectivités territoriales ? Le maire devant veiller à la salubrité, à la sécurité et à l’ordre publics, pourrait-on imaginer d’introduire la notion d’insécurité économique afin qu’il puisse ordonner des travaux d’isolation ?

Mme Sophie Rohfritsch. La Commission de régulation de l’énergie (CRÉ) fixe les prix sans se soucier du long terme. Elle garantit une stabilité des prix à l’horizon de cinq ans alors qu’il faudrait que ce soit sur quinze ou vingt ans, notamment afin de favoriser les investissements sur les compteurs intelligents – lesquels constituent l’un des éléments de la future performance énergétique des particuliers – et de faire en sorte que les opérateurs puissent les installer correctement. Comment résoudre ce problème ? Ce n’est pas le seul thème sur lequel il conviendrait de réviser le mode de fonctionnement de la CRE.

Mme Florence Delaunay. Des progrès ont été réalisés dans les constructions en bois. Nous savons combien l’efficacité environnementale est patente dans la construction neuve mais, également, avec les matériaux de rénovation. Peut-on espérer l’émergence d’une nouvelle filière industrielle dans ces nouveaux matériaux pour le bâtiment ? Je songe aux briques isolantes et aux chanvre et chaux utilisés dans la fabrication des colombages.

Le programme « Habiter mieux » connaît quelques difficultés mais il est plus facile de le mettre en œuvre lorsqu’il intègre une opération programmée d’amélioration de l’habitat. De ce point de vue, le rôle des collectivités territoriales et des EPCI est important.

Enfin, pensez-vous qu’il soit souhaitable ou possible de confier aux artisans le diagnostic énergétique ?

M. Michel Lesage. Si nous sommes tous d’accord s’agissant de l’efficacité et de la sobriété énergétiques ou du rôle des entreprises du bâtiment, je regrette qu’il ne soit pas question de celui des territoires. Les agences locales de l’énergie n’ont pas été évoquées, non plus que des opérations comme Vir’Volt qui, en Bretagne, vise à sensibiliser le citoyen afin qu’il évite de consommer de l’énergie à certains moments. On pourrait aussi parler du recrutement de thermiciens par les EPCI pour réaliser des audits énergétiques dans les bâtiments publics et promouvoir ensuite des programmes d’action.

Vous n’avez pas évoqué non plus la possibilité de mobiliser des financements croisés entre l’État, les départements et les régions. Le rôle des territoires me semble donc fondamental pour que nous puissions réussir la transition énergétique.

M. Jacky Chorin, rapporteur du Conseil économique, social et environnemental sur l’efficacité énergétique. Pour une première audition, nous ne pouvons que nous féliciter de l’intérêt que vous portez à nos travaux. Nous répondrons à partir du travail que nous avons réalisé et nous serons sans doute amenés à exprimer des points de vue plus spécifiques mais, dans ce cas-là, avec la prudence requise puisque nous portons avant tout un travail voté par le CESE.

Précisément, ce travail n’est pas un rapport mais un avis d’une cinquantaine de pages, aussi pédagogique que possible, à propos d’un thème sur lequel on a parfois tendance à asséner quelques vérités. Nous avons veillé à ce que l’immense majorité du CESE s’y reconnaisse tout en livrant à la puissance publique des éléments de réflexion pour éclairer ses choix. Nous avons donc été contraints de limiter tel ou tel développement, ce qui n’aurait pas été le cas dans le cadre d’un rapport.

J’ajoute que lorsque nous avons lancé ce travail, en janvier 2012, tout le monde a regardé avec de grands yeux, y compris au sein de la section des activités économiques du CESE, en se demandant ce que pouvait bien être l’efficacité énergétique. Je constate avec plaisir que ce sujet a désormais mûri.

Les questions de l’efficacité et de la transition énergétiques peuvent être traitées séparément mais, quoi qu’il en soit, il existe des engagements européens politiques – et non juridiques – en matière d’efficacité énergétique. La transition et les bouquets dépendent des États et des citoyens. L’efficacité énergétique devra donc être réalisée indépendamment des choix effectués par ailleurs.

Ma collègue se chargera de répondre aux questions concernant les financements mais je précise d’ores et déjà que nous avons tenu à faire état des ordres de grandeur afin de signifier, en termes diplomatiques, que rien ne sera simple.

Je répète que la question des transports est centrale et qu’elle est évidemment liée aux problèmes d’urbanisme et, plus particulièrement, d’étalements urbains. J’ajoute que la réforme constitutionnelle permet à l’Assemblée nationale de saisir le CESE et que vous pouvez le faire si vous jugez qu’il peut être utile à votre réflexion.

Il est vrai que la dimension européenne est insuffisamment mise en avant. Néanmoins, nous avons commencé notre propos en mentionnant l’objectif de 20 % d’économie d’énergie contenu dans la directive ainsi que le Grenelle de l’environnement, sur lequel nous avons un point de vue équilibré : il convient de s’appuyer sur l’atout qu’il représente mais nous avons rendu un avis pointant un certain nombre d’insuffisances, parfois importantes, quant à ses applications. Tel est le fruit de nos réflexions collectives, en plus de l’excellent rapport de notre collègue Pierrette Crosemarie, à l’occasion duquel M. Pancher a été auditionné, et qui reflète le consensus des acteurs de la société civile.

Cet aspect européen est d’autant plus important que le Président de la République a demandé une transposition rapide de la directive, laquelle formule des d’objectif extrêmement structurants, en particulier s’agissant des bâtiments publics. Son impact est important même si certains auraient souhaité qu’elle aille plus loin encore. Il vous appartiendra de définir les modalités législatives de cette transposition mais, quoi qu’il en soit, un engagement a été pris lors de la Conférence environnementale pour des délais raccourcis.

S’agissant de la gouvernance et du travail de l’ensemble des acteurs publics, nous n’avons pas souligné toutes les difficultés. Je constate simplement que des élus locaux ont soulevé la question du financement des engagements pris dans le cadre du Grenelle en termes de travaux dans le tertiaire public et privé. Les maires de l’Association villes et banlieues de France ont fait état de 50 milliards d’euros, soit six milliards par an. Cette question est évidemment déterminante.

Certains, parmi nous, considèrent que les normes doivent être d’emblée ambitieuses afin de les rendre aussi intangibles que possible ; d’autres jugent qu’il est préférable de pouvoir les modifier sans quoi le mécanisme peut se bloquer. Nous avons finalement privilégié leur caractère raisonnable pour être accessible, quitte à les revoir régulièrement. Parmi nos propositions figure en effet la réévaluation régulière de ces politiques, comme vous le faites à l’Assemblée nationale, afin de vérifier si les normes doivent être augmentées ou abaissées. En revanche, il est certain que rien ne se passera si la situation ne change pas pour le tertiaire public et privé. Je le répète : je ne vois pas comment il sera possible de demander à des particuliers de se lancer dans des rénovations si l’État lui-même ne se montre pas proactif. Or la circulaire sur l’ « État exemplaire » en matière de bâtiment reste peu appliquée voire ignorée. Au dogmatisme qui consiste à se demander si l’on doit aller trop loin ou non, nous opposons le pragmatisme qui mesure les difficultés rencontrées afin de pouvoir avancer.

Lors de nos premiers contacts avec la CAPEB, nous étions loin d’être optimistes. Nous avons dit aux artisans que, s’ils ne se mettaient pas en ordre de bataille pour assurer un niveau de qualité et, à terme, s’engager sur des garanties de performance, ce marché leur échapperait. Nous tenons beaucoup à la formation FEE Bât. S’ils ne se mobilisent pas, les artisans deviendront les sous-traitants de grosses structures alors qu’à ce jour, 98 % des entreprises du bâtiment sont composées de moins de dix salariés. Nous ne sommes pas complètement optimistes, mais tout de même plus aujourd’hui qu’au début de nos travaux.

En ce qui concerne le monde agricole, nous ne nous sommes pas livrés à une règle de trois pour consacrer tant de pages aux 3 % qu’il représente. Toutefois, nous avons formulé un certain nombre de propositions. Nous n’avons pas traité la transition énergétique et la méthanisation car elles relèvent de l’audition de M. Jean Jouzel et Mme Catherine Tissot-Colle, mais nous avons pointé plusieurs difficultés dont celle concernant les 100 000 DPE qui devaient suivre le Grenelle de l’environnement et qui sont loin d’avoir été effectués, probablement pour des raisons de financement. J’ajoute que nous avons travaillé avec le groupe agricole du CESE et que les agriculteurs ont voté notre avis.

En ce qui concerne RTE, il conviendra également que vous interrogiez M. Jean Jouzel et Mme Catherine Tissot-Colle sur cette question.

La proposition d’augmentation de la TVA est survenue pendant le déroulement de nos travaux. Nous avions prévu de dire que ce n’était déjà pas une bonne idée de l’avoir déjà augmentée auparavant. Les acteurs concernés nous expliquent que cette nouvelle hausse détruira des emplois alors que, dans le bâtiment, le seul secteur qui en gagne est celui de l’efficacité énergétique. À l’exception d’une organisation qui n’a pas voté notre avis, précisément en raison de cette question de la TVA, nous avons tous considéré qu’un problème de lisibilité se pose quant aux actions envisagées. Ensuite, ce n’est évidemment pas à nous de présider aux arbitrages. J’ai toutefois compris qu’un certain nombre d’évolutions se feront jour, notamment en ce qui concerne les logements sociaux. À titre personnel, je considère qu’un ciblage des opérations les plus efficaces pourrait sans doute constituer une piste. Nous avons également estimé que l’éco-PTZ et le crédit d’impôt développement durable (CIDD) devraient être recentrés pour plus d’efficacité.

Soucieux de nos finances publiques, nous n’avons pas formulé de recommandations dispendieuses. Nous avons évalué les moyens nécessaires au regard des objectifs que nous estimions judicieux et qui sont partagés par la quasi-totalité du CESE. Sans doute ces ciblages mériteraient-il donc d’être étudiés.

Nous craignons que tout le monde se regarde « en chiens de faïence » en attendant le début d’un processus qui ne s’enclencherait finalement pas. Voilà trois ans que cela dure. Notre message est simple : si vous voulez qu’il démarre, il faut réunir un certain nombre de conditions, et pour le moment tel n’est pas le cas en dépit des discours. Et ce n’est pas en portant le nombre de logements à rénover de 400 000 à 500 000 que la situation s’améliorera puisque, je le répète, nous devions atteindre en 2013 le chiffre de 400 000 logements – dont la rénovation n’était pas financée – et que nous en étions à 160 000 en 2011.

Mme Anne de Béthencourt, rapporteur du Conseil économique, social et environnemental sur l’efficacité énergétique. Je savais que vous vous montreriez particulièrement intéressés par la question du financement. Nous n’avons certes pas pu répondre à tous les problèmes, non plus qu’à toutes vos interrogations.

En préambule, il existe un vrai potentiel et je ne suis pas absolument certaine que nous en ayons pris l’exacte mesure. C’est pourquoi l’une de nos premières propositions vise à réaliser une étude macro-économique sur les questions énergétiques. Je vous rappelle qu’un euro investi dans la lutte contre la précarité énergétique fait économiser quarante-deux centimes de frais de santé. Je le répète : la deuxième source de financement, après l’efficacité énergétique, c’est la lutte contre le gaspillage, dont nous sommes loin d’avoir pris en compte l’ampleur. Il s’agit là d’un enjeu considérable, dans le secteur public comme dans le privé.

La fixation des normes dans l’industrie revêt une grande importance. À ce propos, je vous invite à lire la page de notre avis consacrée aux moteurs montrant que 70 % d’entre eux sont surdimensionnés.

Jusqu’à présent, le tiers investissement n’a pas été un succès absolu et je comprends vos doutes. Néanmoins, nous n’avons pas été au bout de ses potentialités. Les parties prenantes doivent réfléchir et innover. Des expérimentations sont en cours – vous avez parlé des SEM – mais elles sont rapidement impuissantes faute d’effet de levier. Si, demain, nous disposons d’un véritable programme d’investissement en faveur de l’efficacité énergétique, nous pourrons bénéficier de taux bonifiés et la situation sera incomparable à celle d’aujourd’hui. Il en est de même s’agissant des contrats de performance énergétique. Il n’y a aucune raison pour que de véritables contrats – où les mêmes ne vendent pas forcément à la fois la performance énergétique et l’énergie – connaissent l’échec dans notre pays alors qu’ils ont fait leurs preuves ailleurs.

Nous n’avons pas pu traiter l’ensemble de la fiscalité écologique, précieux outil auquel je souscris à titre personnel. Quoi qu’il en soit, nous avons besoin de l’éco-conditionnalité des aides publiques. Il n’est plus possible de distribuer l’argent public sans assurance de l’efficacité des résultats obtenus.

J’approuve les propos tenus sur l’opacité des CEE mais, comme M. Denis Baupin, nous ne souhaitons pas pour autant qu’ils soient purement et simplement abolis. Il faut les réviser car, s’ils restent à ce point abscons, ils ne fonctionneront pas. Les consommateurs sont perdus et constatent des effets d’aubaine incompatibles avec une réelle efficacité énergétique. Des contrôles s’imposent. Il n’est pas question d’usines à gaz mais, si éco-conditionnalité il y a, des vérifications doivent s’effectuer comme dans d’autres pays.

Aujourd’hui, les banques contrôlent la délivrance de l’éco-PTZ ; il n’est pas possible qu’elles maîtrisent les éléments techniques de ces dossiers. Chacun son métier ! C’est une faille de ce dispositif, certes, mais là encore il ne faut pas pour autant s’en débarrasser. En Allemagne, une partie du prêt est dédiée à l’intervention d’artisans formés ou d’organismes certificateurs pour évaluer l’efficacité énergétique d’un projet.

Il est difficile de prévoir l’augmentation future du coût de l’énergie, sur laquelle s’accordent tous les acteurs reçus. Néanmoins, cette perspective nous encourage à promouvoir une efficacité énergétique qui, à ce jour, n’a jamais été vraiment mise en œuvre.

Je serais incapable de vous dire ce qu’il en est précisément de la filière bois mais il est certain que son potentiel industriel est important. Les professionnels et les consommateurs sont demandeurs de normes. Il faut que le neuf et l’ancien travaillent ensemble, celui-ci ne bénéficiant pas suffisamment des avancées technologiques de celui-là.

En matière de financement, nous devons faire preuve d’imagination. Le Grenelle de l’environnement n’a pas plus financé l’efficacité énergétique que les politiques postérieures, même si un certain nombre de choses ont été accomplies. Nous avons besoin d’innover, dans le dialogue et l’écoute, car si l’efficacité énergétique constitue bien la première source d’énergie domestique de 2020, nous devrons investir non seulement sur les économies réalisées mais sur la valeur verte ainsi créée. Je le répète : il ne s’agit pas tant de savoir combien économiser en usant de tel ou tel outil que de concevoir une vision macro-économique et sociale.

S’agissant de la précarité énergétique, précisément, renforcer le lien social est une priorité particulièrement soulignée dans notre avis. Les personnes en difficulté doivent être accompagnées mais, si les lignes budgétaires existent, nous ne disposons pas forcément du nombre idoine de salariés pour aller en ce sens. Ce n’est pas une campagne de publicité sur la lutte contre la précarité énergétique qui fera se déplacer les personnes concernées. Le guichet unique constituera sans doute une avancée mais, de même, ce ne sont pas forcément ceux qui en auront besoin qui s’y rendront. Pour parler clairement, il faut accroître les ressources humaines. Je cite notre recommandation : « Le CESE considère que cette action de repérage et d’accompagnement des populations concernées impose des ressources humaines à la hauteur des ambitions et donc les budgets correspondant ainsi qu’une meilleure coordination des acteurs. » Cela nous semble primordial pour créer ce lien social. Le programme « Habiter mieux » concerne aujourd’hui 300 000 logements, et il est très loin de répondre aux besoins. Faute de ressources humaines, l’augmentation des budgets – si elle est possible… – ne permettra pas d’accélérer la mise en œuvre des projets.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous remercie pour cette audition.

M. Jacky Chorin l’a dit : nous attendons mais nous ne voyons rien venir des objectifs ambitieux qui ont été assignés. Le prix de l’énergie, en France, est inférieur à celui en vigueur en Allemagne comme à la moyenne constatée dans l’Union européenne. Or nous sommes un certain nombre à penser que c’est le « signal prix » qui favorisera le changement de comportement des consommateurs et des producteurs. Il convient également de fixer un prix au carbone et de mettre en place une contribution climat-énergie, laquelle peut également induire un changement de comportement et constituer un élément de la mise en route du vaste programme annoncé par le Président de la République.

J’ai bien noté que l’Assemblée nationale pouvait saisir le CESE sur un certain nombre de sujets. L’occasion prochaine ne manquera pas de se présenter. D’ores et déjà, je me félicite de cette prise de contact et de la qualité de nos échanges.

——fpfp——

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je donne la parole à M. Martial Saddier pour une communication spéciale.

M. Martial Saddier. Avec votre accord, monsieur le président, je devais faire cette intervention mercredi dernier mais une contrainte d’agenda m’en a empêché. Je vous remercie donc de me donner la parole aujourd’hui.

Mardi dernier s’est tenue une réunion du groupe national « Loup », la troisième depuis le mois de septembre. Ce groupe est chargé d’élaborer le nouveau plan 2014-2017. Depuis 2002, j’ai l’honneur d’y siéger en qualité de représentant de l’Association nationale des élus de la montagne. Nous avons eu l’honneur et le plaisir de recevoir Mme et M. les ministres Batho et Le Foll pour conclure cette troisième journée. Le calendrier fait état d’une prochaine réunion pour la présentation définitive du plan, à la fin du mois de mars, mais nous avons d’ores et déjà bénéficié de ses grandes orientations.

En la matière, la place est grande et même inédite pour laisser libre cours à la démagogie et au populisme. Telle n’est pas la situation dans laquelle je me place depuis 2002 car j’ai largement œuvré afin d’apaiser le climat et de trouver les équilibres qui s’imposent. Peut-être ne serait-il donc pas inintéressant, surtout lorsque l’on sait ce qui s’est passé au Sénat il y a quelques jours, que la commission bénéficie d’une information sur ce que pourrait être le contenu du futur plan « Loup », lequel me semble d’un grand bon sens, conformément à l’état d’esprit dans lequel nous travaillons – et ce n’est pas facile – avec les éleveurs et les associations environnementales. Depuis 2002, le climat s’est apaisé, je le répète, et je ne voudrais pas que l’on anéantisse tout ce qui a été réalisé.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je prends bonne note de cette communication.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 13 février 2013 à 9 h 45

Présents. - M. Julien Aubert, M. Alexis Bachelay, M. Serge Bardy, M. Denis Baupin, Mme Catherine Beaubatie, M. Jacques Alain Bénisti, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, Mme Sabine Buis, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Florence Delaunay, Mme Fanny Dombre Coste, M. David Douillet, Mme Françoise Dubois, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, M. Michel Lesage, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Olivier Marleix, M. Philippe Martin, M. Jean-Luc Moudenc, M. Philippe Noguès, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Jean-Marie Sermier, M. Thierry Solère, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Yves Albarello, Mme Chantal Berthelot, M. Vincent Burroni, M. Patrice Carvalho, M. Jean-François Copé, M. Stéphane Demilly, M. Philippe Duron, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Christian Jacob, M. Edouard Philippe, Mme Marie-Line Reynaud, M. Gabriel Serville, M. Thierry Solère, M. Patrick Vignal