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Mercredi 13 mars 2013

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 44

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Jean Jouzel, climatologue, et Mme Catherine Tissot-Colle, présidente de la FEDEM, co-rapporteurs d’un avis du Conseil économique, social et environnemental (CESE) sur la transition énergétique

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Avant de procéder à l’audition prévue ce matin, je vous informe que la réunion prévue ce soir avec le ministre des transports est annulée en raison des conditions climatiques. Elle est reportée au 27 mars 2013 à seize heures quinze.

M. Christophe Priou. N’est-ce pas la veille de l’examen du projet de loi ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous l’examinerons dans la foulée.

M. Christophe Priou. C’est un peu juste !

M. le président Jean-Paul Chanteguet. C’est déjà arrivé.

M. Christophe Priou. Il m’avait, alors, semblé entendre des protestations...

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Elles sont sans doute légitimes.

——fpfp——

La commission procède ensuite à l’audition de M. Jean Jouzel, climatologue, et de Mme Catherine Tissot-Colle, présidente de la Fédération des minerais, minéraux industriels et métaux non ferreux, co-rapporteurs d’un avis du Conseil économique, social et environnemental sur la transition énergétique.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. En votre nom à tous, je souhaite la bienvenue à Mme Anne-Marie Ducroux, présidente de la section Environnement du Conseil économique, social et environnemental (CESE), à Mme Catherine Tissot-Colle, présidente de la Fédération des minerais, minéraux industriels et métaux non ferreux (FEDEM), et à M. Jean Jouzel, climatologue, membre du CESE. Je profite de l’occasion pour féliciter ce dernier qui, déjà prix Nobel de la paix dans le cadre du GIEC en 2007, est, à ce jour, le premier lauréat français du prestigieux prix Vetlesen. Je tiens à lui dire notre fierté.

(Applaudissements sur tous les bancs)

Comme j’en avais pris l’engagement auprès du président Delevoye, la Commission du développement durable a décidé, dans le cadre de ses auditions, de recevoir les rapporteurs du CESE conduisant des réflexions liées à des thématiques fortes. C’est ainsi qu’il y a quelques semaines, Mme Anne de Béthencourt et M. Jacky Chorin sont venus nous parler d’efficacité énergétique. Aujourd’hui, avec Mme Tissot-Colle et M. Jouzel, nous aborderons la transition énergétique, sur la base de leur rapport remis le 9 janvier 2013 et intitulé La transition énergétique : 2020-2050, un avenir à bâtir, une voie à tracer.

Mme Anne-Marie Ducroux, présidente de la section Environnement du Conseil économique, social et environnemental. Mesdames, messieurs les députés, permettez-moi de vous remercier de votre invitation et d’inaugurer, en quelque sorte, les relations entre votre Commission du développement durable et la section Environnement du CESE. C’est, en effet, la première fois que nous sommes auditionnés ici et j’espère qu’il y aura d’autres occasions. J’en profite pour vous indiquer que la section Environnement, qui incarne une partie de la réforme issue des lois Grenelle de l’environnement par laquelle l’ancien Conseil économique et social est devenu le CESE, a pour mandat de travailler sur les thèmes de la transition énergétique, de la biodiversité, des mers et des océans, des risques environnementaux, de la protection de l’environnement et de la qualité de l’habitat. Différents travaux sont en cours dans notre institution, d’autres sont à venir qui nous donneront peut-être d’autres occasions de revenir devant vous.

Avant de vous quitter, puisque je préside cette section le mercredi matin, je renouvelle mon invitation pour le 11 avril, date à laquelle le CESE organise une conférence internationale sur la gouvernance de la haute mer. Ce sujet gagne en importance et mérite une très grande attention de la part des parlementaires, en raison des questions de droit qu’il pose notamment. Nous sommes en train d’instruire une saisine sur la gestion durable et la gouvernance des océans, dont les questions de la haute mer font partie.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je ne peux que me féliciter des relations qui sont en train de s’établir entre le Conseil économique, social et environnemental et la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale. Merci de votre présence et de tout le travail que vous faites au sein du CESE. Nous y sommes très sensibles.

M. Jean Jouzel, co-rapporteur de l’avis du CESE sur la transition écologique. Mesdames, messieurs les députés, je vous remercie de cette invitation à présenter notre avis sur la transition énergétique, qui résulte du travail collectif de la section.

Le prix Vetlesen est l’équivalent, pour les disciplines des sciences de la terre, de l’environnement et de l’univers en général, du prix Nobel, plutôt attribué aux grandes disciplines que sont la physique, la chimie, la médecine, l’économie,…– prix que j’ai eu le plaisir de partager avec le GIEC. Ce prix, établi dans les années cinquante, est décerné tous les quatre ans. Je le partage avec Susan Solomon, qui a plus travaillé sur la chimie atmosphérique et son lien avec le climat, et je suis effectivement le premier Français à l’obtenir, ce qui me rend très fier au nom de toute notre communauté scientifique. C’est la reconnaissance d’une très bonne place de la recherche française dans ces domaines sur le plan international. Le prix Crafoord, autre récompense pour nos disciplines, a été établi quant à lui dans les années quatre-vingt et l’un des premiers récipiendaires, et seul Français à ce jour, en a été Claude Allègre.

Mme Catherine Quéré et M. Philippe Plisson. Personne n’est parfait ! (sourires)

M. Jean Jouzel, co-rapporteur de l’avis du CESE sur la transition écologique. Dans le domaine de la datation de la terre et de l’univers, ses travaux ont tout de même été très significatifs, et il le méritait.

J’ai accepté de m’investir dans ce travail sur la transition énergétique en qualité de climatologue, bien sûr, mais aussi parce que le lien entre l’énergie et le climat m’a toujours intéressé. Je me suis d’ailleurs beaucoup impliqué dans le Grenelle de l’environnement, et je le suis également dans le comité de pilotage du débat national sur la transition écologique. Bien que nous ayons proposé cet avis sur la transition énergétique bien avant la conférence environnementale des 14 et 15 septembre 2012, il s’inscrit totalement dans la dynamique de la transition écologique. Puisque vous avez auditionné Mme Anne de Béthencourt et M. Jacky Chorin, vous savez que nous avons mené cet avis en parallèle et de façon complémentaire avec le rapport sur l’efficacité énergétique.

En tant que climatologue, je place les aspects environnementaux à un niveau assez élevé dans cette réflexion sur la transition énergétique, mais, en dehors même de ces sujets, beaucoup d’autres aspects de l’énergie devraient nous inciter à y réfléchir, qu’ils soient économiques, géopolitiques ou sociaux, avec les problèmes d’emploi et de précarité énergétique. On ne peut pas nier non plus, dans le contexte spécifique de changement climatique, que se profilent devant nous un réchauffement qui risque d’être important, une augmentation prévisible des prix de l’énergie et une raréfaction des ressources. Même si l’on parle maintenant plutôt de plateau que de pic pour le pétrole ou le gaz, le problème est toujours là dans la mesure où ce sont des quantités finies, en tout cas pour celles qui sont facilement exploitables. Il est important de ne pas limiter le débat au seul problème de l’électricité, qui n’est qu’une part de l’énergie. La transition énergétique concerne aussi la chaleur et la mobilité. L’industrie nucléaire est partie prenante de cette transition pour la partie électricité, et elle est mise en question au regard de sa sûreté, qui doit satisfaire des exigences de plus en plus importantes.

Ce qui peut intéresser un climatologue s’agissant des problèmes énergétiques, c’est le lien fort entre climat et énergie, en particulier les énergies fossiles, puisque les trois quarts de l’augmentation de l’effet de serre dans les années récentes sont liés à notre utilisation du pétrole, du charbon et du gaz naturel au niveau international. On peut aussi incriminer le méthane et les autres gaz à effet de serre, mais il faut avoir en tête que cette augmentation est liée pour 80 % au gaz carbonique et pour 10 % à la déforestation. Ce sont les chiffres au niveau international, ils sont un peu différents pour la France. Les rapports récents de la Banque mondiale ou de l’Agence internationale de l’énergie sont encore plus anxiogènes que ce que dit le GIEC : si nous laissons aller les choses comme nous le faisons actuellement, on ne pourra pas empêcher un réchauffement de l’ordre de quatre degrés dans la seconde partie du XXIsiècle, ce qui aura des conséquences très importantes. Aller vers une société sobre en carbone et émettre moins de gaz à effet de serre n’est pas une option mais vraiment un impératif.

Nous avons collectivement adhéré à cet objectif d’un maintien du réchauffement climatique en dessous de deux degrés. Cela exige que les émissions de gaz carbonique commencent à décroître d’ici à 2020 – ce qui est un véritable défi, sachant qu’elles augmentent actuellement à un rythme de 3 % par an –, et qu’elles soient divisées par trois au niveau mondial entre 2020 et 2050. Malheureusement, on sait déjà que l’objectif pour 2020 risque fort de ne pas être atteint, avec un fossé de l’ordre de 15 à 20 %.

Sur le plan national, la France a pris des engagements qui s’inscrivent largement dans un cadre européen et en conformité avec la directive sur l’efficacité énergétique. L’objectif du « facteur 4 », voire 5, de diminution des émissions de gaz à effet de serre est inscrit dans la loi sur l’énergie de 2005, votée pratiquement à l’unanimité. Le Grenelle de l’environnement a permis des avancées, avec beaucoup de réflexions qui n’ont pas toutes abouti mais qui se poursuivent. Enfin, un débat national sur la transition énergétique a été lancé, dont j’espère qu’il va vraiment aider à mûrir une loi qui devrait arriver devant vous à la fin de l’année.

Mme Catherine Tissot-Colle, co-rapporteure de l’avis du CESE sur la transition écologique. En introduction au travail que nous avons fait au sein de la section et qui a été voté par le CESE, nous nous sommes autorisés à rédiger une feuille de route pour le Gouvernement et les parlementaires dans la perspective du débat et des textes législatifs qui suivront. Ce n’est pas un travail d’expertise sur les thèmes que nous avons abordés que nous communiquons, mais plutôt le reflet de ce que les composantes du CESE attendent du monde politique. C’est ainsi qu’il faut interpréter nos recommandations. Dans cette logique et pour la première fois au CESE, nous avons essayé de dater certaines propositions, en fonction de l’urgence des décisions à prendre. Ce sont des orientations destinées à lisser le travail et à donner le temps des évaluations intermédiaires.

Nous avons structuré notre travail autour de quatre axes : la transition énergétique au service de la performance économique et sociale ; l’évolution du mix énergétique ; l’évolution des jeux d’acteurs et les aspects financiers – que nous n’avons fait qu’aborder, puisque la section de l’environnement n’a pas vocation à travailler sur ces sujets extrêmement techniques et sensibles ; la R&D et le lien entre recherche et développement économique.

En qualité de représentante du monde des entreprises au CESE, je suis heureuse de pouvoir vous dire qu’il n’y a pas eu débat quant à la priorité que représente la transition énergétique au service de la performance économique et sociale. Personne n’imagine, surtout dans le contexte actuel, que la transition énergétique ne soit pas positive pour notre économie. C’est un défi, car vouloir une économie décarbonée à la fois compétitive et écologique, c’est vouloir tout. En même temps, le contexte expliqué par Jean Jouzel du changement climatique, de la raréfaction des ressources bon marché et accessibles et de l’augmentation de la population mondiale ne nous laisse pas le choix.

Nous vous recommandons de réfléchir, dès le débat, c’est-à-dire maintenant, à des sujets qui nous paraissent essentiels. En premier lieu, il faudrait retravailler les notions d’efficacité et de sobriété énergétiques, en s’interrogeant sur l’évolution que nous souhaitons imprimer à nos modes de consommation – au besoin en passant par des contraintes. Nous avons pu constater que tout le monde n’a pas la même définition de ces notions. Nous attendons de vous que vous définissiez et précisiez clairement ces deux concepts et leur réalité.

Nous avons rencontré beaucoup d’experts qui nous ont présenté de multiples scénarios d’une grande qualité et d’une grande richesse. Il importe de procéder à des évaluations socio-économiques et environnementales de même niveau pour chaque scénario retenu, afin d’en dégager les implications dans ces domaines. En particulier, nous attirons votre attention sur un volet qui n’a pas été traité dans la plupart des scénarios, qu’ils soient de statu quo ou de rupture : l’emploi. Entre le mythe que le changement d’énergie apportera des tas de choses formidables qui ne sont pas quantifiées et la crainte d’un danger extrême, il y a un énorme travail pour déterminer quels emplois vont disparaître, quels sont ceux qui vont émerger, aussi bien en quantité qu’en qualité. Notre attente à nous, société civile s’exprimant au sein du CESE, c’est qu’on ne dégrade pas, sinon le nombre, du moins la qualité des emplois. Nous voulons une France de haut niveau technologique, pas des emplois de bas niveau.

Dès maintenant, il faut examiner, pour l’horizon 2020, les problèmes de coût et d’accès des acteurs à l’énergie. Nous demandons que l’électricité reste à un coût compétitif et que l’accès à l’énergie pour les ménages précaires ou certaines entreprises, selon les contextes, soit facilité. Pour nous, il s’agit de deux sujets différents qui font l’objet de deux recommandations distinctes. Nous n’avons pas pris une position à l’allemande pour savoir si ce sont les ménages ou les entreprises qui doivent porter les surcoûts attachés à des évolutions du mix énergétique. Nous ne l’avons pas dit de manière claire, mais nous sommes attachés à des coûts de production réduits.

S’agissant des énergies renouvelables, dites ENR, dont nous recommandons le développement, les propositions foisonnent au point parfois d’être brouillonnes. Nous souhaitons que soient privilégiées les énergies à fort potentiel de développement au niveau de la recherche et du savoir-faire technologique, et susceptibles de générer des emplois qualifiés non délocalisables. Cela rejoint complètement la première recommandation : quand on analyse les scénarios et qu’on tend à privilégier une orientation, il faut vraiment regarder dans le détail ce qu’elle va donner et favoriser les ENR qui sont le plus proches de l’autonomie économique. Nous sommes bien conscients qu’il va falloir accompagner une partie de cette transition, mais plus vite les nouvelles formes d’énergie pourront vivre de manière autonome dans un monde économique normal, sans être assistées, mieux cela vaudra.

M. Jean Jouzel, co-rapporteur de l’avis du CESE sur la transition écologique. De façon schématique, si l’on place les impératifs climatiques à un niveau élevé, la première priorité dans le mix énergétique, c’est clairement une diminution des combustibles fossiles. Or je crains que le secteur n’y soit pas vraiment préparé. Si l’on peut jouer sur le développement, grâce à la recherche, du piégeage et du stockage du gaz carbonique et sur le rééquilibrage interne en faveur du gaz naturel qui est moins émetteur de gaz à effet de serre, globalement, c’est une consommation nettement moindre qui sera déterminante. Un autre équilibrage est possible entre les énergies non émettrices de gaz à effet de serre, c’est-à-dire le nucléaire et les énergies renouvelables. Pas plus que nous ne pensons utile de se focaliser sur le nucléaire, nous ne souhaitons éviter le débat, lequel doit commencer par un questionnement des besoins. Le mix énergétique doit offrir une bonne adéquation entre les moyens de production et les besoins. En termes d’efficacité énergétique, on sent plus facilement les améliorations dans le secteur du logement que dans celui des transports. C’est là un point sur lequel le débat devrait se focaliser.

Les scénarios énergétiques doivent être évalués d’ici à 2020, mais aussi jusqu’à l’horizon 2050. Les ENR en phase de développement commercial sont citées dans le rapport, à la page 29 – éolien terrestre, solaire photovoltaïque, biomasse, géothermie –, de même que celles qui présentent un réel potentiel de développement – photovoltaïque, éolien offshore, biocarburants avancés, énergies marines. Les réseaux de transport de l’énergie, principalement d’électricité ou de gaz, sont très importants. Dans les transports, il faut réfléchir au développement des moteurs électriques, hybrides, au gaz naturel et aux énergies renouvelables, favoriser de nouvelles mobilités. Derrière tout cela, cependant, il n’y a pas de véritable proposition. Un vrai travail sur le transport s’impose. Nous considérons que la programmation pluriannuelle n’est pas suffisamment forte actuellement. Il faut l’envisager pas seulement sur une mandature, mais sur une dizaine d’années, voire plus. J’espère que la future loi aura cette ambition. Certains de ces aspects devront être mis en place dès le débat national sur la transition énergétique, puis, d’ici à 2030, l’électrification des transports individuels et collectifs devra connaître une accélération et les énergies renouvelables être organisées en filières créatrices d’emplois.

Mme Catherine Tissot-Colle, co-rapporteure de l’avis du CESE sur la transition écologique. Le troisième axe de notre travail concerne la mobilisation des acteurs et des moyens à la hauteur du défi climatique et de la transition énergétique. Cette partie est vraiment l’âme du CESE, puisque nous représentons le monde des acteurs. Nous avons beaucoup discuté et travaillé au sein de la section sur cette question. Reprenant notre logique d’échelle de temps, nous pensons important que, au cours du débat et dans les textes qui en seront issus, une clarification des rôles respectifs des acteurs publics intervienne. Partout sur le territoire, au niveau des communes et des intercommunalités, les initiatives foisonnent et il est important que la production et la distribution d’énergie demain soient mieux implantées dans les territoires. Pour autant, il nous semble aussi que l’optimum global n’est pas forcément la somme des optimums locaux. Il va y avoir des choix à faire, d’où la nécessité de clarifier les rôles. La recommandation votée par le CESE est de privilégier deux niveaux : l’État, qui doit être responsable de la cohérence nationale, qu’il s’agisse des politiques énergie-climat, de la fiscalité et de tous les aspects financiers associés ; la région, qui nous paraît le bon niveau de responsabilité de la cohérence de la transition énergétique sur l’ensemble du territoire. C’est, nous semble-t-il, votre mission que d’y veiller, mais cela n’empêche pas d’autres acteurs de jouer un rôle. Il faut aussi renforcer les programmes opérationnels territoriaux visant la maîtrise de la demande en énergie. C’est là un message très fort qui vous est adressé.

Nous autorisant à penser par-delà l’hexagone, nous avons considéré qu’il faut soutenir plus fortement qu’actuellement l’orientation de la politique étrangère de la France vers un accord international équitable. On connaît les difficultés du sujet, en particulier Jean Jouzel et Anne-Marie Ducroux qui est spécialiste des débats internationaux. Nous pensons aussi qu’il faut développer le niveau européen en matière de politique de l’énergie. S’il y a une politique climatique, il n’y a pas de véritable politique commune de l’énergie ambitieuse et solidaire cohérente avec la politique climatique. C’est aussi une recommandation forte que nous faisons au monde politique.

Nous avons également réfléchi au défi du financement. S’il faut maintenir un système de type « quotas ETS », le marché a montré des faiblesses et des ambiguïtés qui nécessitent de le remettre à plat, d’en tirer un bilan objectif. Il faut aussi le doter de véritables règles du jeu de marché, ce qui signifie une forme de contrôle tout en lui laissant sa nature de marché. Nous souhaitons aussi que les politiques s’emparent de cette question.

Autre recommandation importante, le réexamen absolument nécessaire de l’ensemble des mécanismes fiscaux français attachés à l’énergie, à l’aune à la fois de leur efficacité économique, de la justice sociale et de leur cohérence avec la lutte contre le changement climatique. C’est encore un sujet qui mériterait un travail approfondi, parce qu’il y a énormément de choses à dire.

La transition énergétique est un changement important qui va durer longtemps. Il faudra vraiment y associer l’ensemble des acteurs, notamment les citoyens, à travers la formation et la communication. Nous recommandons de s’appuyer, tout au long de la vie, sur une formation aux questions de transition énergétique, d’efficacité et de sobriété. Ce ne sont pas des sujets simples, mais ils concernent chacun dans sa vie quotidienne et au travail et ils méritent d’être expliqués. Il faut s’appuyer sur des réseaux de formation à l’éducation au développement durable et impliquer très largement les ministères concernés. Il nous semble que le ministère de l’éducation nationale est un peu trop absent de ces débats.

M. Bertrand Pancher. Excellent !

Mme Catherine Tissot-Colle, co-rapporteure de l’avis du CESE sur la transition écologique. Le ministère de l’enseignement supérieur doit également y être associé. Il est important de favoriser une approche interdisciplinaire puisqu’il s’agit de sujets complexes qui impliquent de nombreuses disciplines. Il faut également former les personnels enseignants.

Quand notre pays se sera doté de textes de loi, bien que nous sachions la rareté des deniers publics, nous recommandons des campagnes de communication fortes pour expliquer, irriguer les territoires avec ce qui aura été décidé et le partager avec les citoyens.

M. Jean Jouzel, co-rapporteur de l’avis du CESE sur la transition écologique. Le dernier axe de notre travail a trait à la recherche et à l’innovation. Dans la mesure où la transition énergétique est inévitable, ceux qui s’y investiront le plus tôt seront gagnants du point de vue économique, à condition de savoir innover dans ces domaines. Un fort potentiel de recherche et d’innovation doit être mis en œuvre si l’on veut faire de la transition énergétique un levier de compétitivité. Ne pas le faire serait courir à l’échec économique. L’Agence internationale de l’énergie rappelle que toute somme non investie d’ici à 2020 dans les technologies nécessaires à la lutte contre le réchauffement climatique devra être multipliée par quatre après 2020 pour obtenir le même résultat. La transition énergétique n’est donc pas qu’un jeu écologique, c’est aussi un jeu économique. Nous en sortirons plus compétitifs, pour peu que nous sachions innover dans ce domaine, en particulier dans les énergies renouvelables qui prendront une place de plus en plus importante au niveau mondial.

Les recommandations de notre rapport sont assez classiques mais néanmoins importantes : associer recherche fondamentale, recherche appliquée, innovation et développement, autrement dit mobiliser toute la chaîne de valeur dans ces domaines ; favoriser les partenariats pour arriver à de véritables innovations et permettre le passage jusqu’au développement de nouvelles filières. La recherche sur l’énergie, actuellement, n’est pas forcément conforme à cette recommandation. L’ANCRE, l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie, a bien été mise en place, mais elle n’est pas vraiment organisée pour faire face aux défis des dix ou vingt prochaines années. Dans ce domaine de la recherche en énergie, nous préconisons d’effectuer un état des lieux.

Nous insistons – et nous ne sommes pas les seuls – sur l’importance, dans tous ces travaux, des sciences humaines et sociales, pas seulement des sciences de l’ingénieur. La façon dont on saura intégrer les découvertes et les innovations dans le tissu social a son importance. Or ce n’est pas simple. Il faut réfléchir dès maintenant à la façon de développer des réseaux pluridisciplinaires, de même qu’au mode de financement de ces aspects de recherche et d’innovation. À cet égard, nous avons émis quelques recommandations à observer d’ici à 2020 : réalisation d’un état des lieux et affectation des crédits de recherche en fonction des résultats, pas simplement de façon abstraite par rapport à des objectifs. Bien sûr, il faut trouver des sources de financement. Le marché ETS est censé constituer une voie de soutien à la recherche sur l’énergie en général. Je répète que les recherches en sciences humaines doivent être développées et plus encore intégrées. Cette recherche doit être européenne et nous nous devons d’être présents au niveau européen dans ce domaine de la recherche et de l’innovation.

Nous réitérons notre intérêt à continuer d’explorer et de déployer toutes les pistes de valorisation et de transformation du CO2, y compris le captage et le stockage. On ne voit pas bien comment le fossile réussira à diminuer ses émissions d’un facteur quatre si cette technique ne devient pas mature rapidement. C’est vrai au niveau français comme au niveau international.

Mme Catherine Tissot-Colle, co-rapporteure de l’avis du CESE sur la transition écologique. Le CESE a essayé d’avoir une vision assez large et d’identifier les paramètres essentiels d’une transition énergétique réussie. Sortir de la crise systémique actuelle nécessite de repenser les fondamentaux, c’est un point de vue partagé dans notre assemblée. On doit associer volontarisme et progressivité ; donner un prix au carbone ; permettre l’adaptation de tous les acteurs en n’allant pas trop vite et en accompagnant, mesurant et vérifiant ce qui se passe au niveau de tous les acteurs ; améliorer la gouvernance dans le sens des recommandations que nous avons faites ; faire évoluer en profondeur la fiscalité ; bâtir une véritable Europe de l’énergie ; investir dans la R&D ; développer des filières économiques pérennes.

Nous avons confiance, car notre travail a montré que la société est prête à entendre la nécessité de changer. Des gens qui n’étaient pas proches au début sont prêts à travailler ensemble. En s’appuyant sur un large accord politique et une anticipation sociale, nous vous remercions de prendre en compte nos recommandations.

M. Jean-Yves Caullet. Monsieur Jouzel, je garde le souvenir de notre rencontre à Doha, au cours de laquelle vous m’avez aidé à comprendre que la différence entre + 2 degrés et + 4 degrés pour notre planète équivaut à celle d’une casserole d’eau à 98 ou à 100 degrés : à 98 degrés, la surface est tranquille ; à 100 degrés, elle ne l’est pas du tout. Cela m’a conduit à penser que, compte tenu de l’enjeu du climat, désormais, en matière de transition énergétique, la vertu individuelle et collective est un devoir et sûrement pas un moyen de rachat.

En matière de fiscalité, faut-il s’attacher à l’énergie en général ou au carbone en particulier pour privilégier l’aspect transfert de ressources, ou bien à la sobriété d’abord ?

Vous recommandez de préserver, dans le futur service de l’électricité, la compétitivité de certains secteurs. Est-ce à dire que, dans la transition, il faut réserver prioritairement l’énergie nucléaire aux secteurs électrodépendants pour que son bas coût n’incite pas à une consommation immodérée par l’ensemble de l’économie et de la société, mais soit ciblé vers ceux dont la transition est la plus compliquée ? Ce type de « part du feu » vous paraît-il pertinent ?

En matière de transports, le secteur rural est l’otage historique de la voiture individuelle, il s’est même constitué autour de ce modèle dans les cinquante dernières années. Les efforts que vous recommandez en matière de transports ne rendent-ils pas souhaitable de faire obligation aux collectivités locales, au niveau intercommunal, départemental ou régional, d’organiser des transports de substitution aux véhicules individuels pour éviter qu’une partie de notre territoire et de notre population ne soit prise en otage ?

L’articulation entre l’État et la région est évidemment une nécessité, mais je souhaiterais être certain de la capacité régionale à ne pas dupliquer un centralisme national et à faire en sorte que la capitale régionale ne soit pas l’échelon le plus rapproché du peuple que nous puissions concevoir dans la République.

En matière de gouvernance, vous semble-t-il souhaitable d’officialiser la responsabilité sociale et environnementale au niveau des organismes publics, notamment des organismes d’État et des collectivités locales ?

Je souhaite souligner l’importance de votre proposition en matière de formation. Pour ne citer qu’un exemple relevé dans le cadre d’une de mes missions, dans la filière bois comme matériau de substitution en matière de construction, nous n’avons une formation en structures et calcul de structures que très embryonnaire. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres.

Que pensez-vous de la recherche sur l’hydrogène, pas seulement comme combustible mais comme outil de réduction des émissions de gaz carbonique ?

M. Alain Gest. Lors d’une réunion précédente, notre porte-parole habituel, Martial Saddier, a souligné que notre groupe était tout à fait ouvert à ce que les contacts avec le Conseil économique, social et environnemental puissent se développer. Je me réjouis que ce soit le cas aujourd’hui avec vous, monsieur Jouzel. J’entends avec plaisir votre discours, puisque vous concevez la transition énergétique en la mettant au service de la performance économique. À l’UMP, nous sommes persuadés que les efforts à fournir dans la lutte contre le réchauffement climatique doivent se traduire autant que faire se peut par des mesures n’apparaissant pas comme des punitions permanentes pour la population. Qu’ils doivent se faire en conciliation avec le développement économique et social nous convient donc tout à fait. En vous écoutant, nous ne pouvions donc qu’être en accord avec le constat que vous faites et avec vos recommandations. C’est pourquoi je souhaiterais que vous répondiez à mes questions par un avis personnel plutôt que par les positions du CESE.

Vous avez beaucoup insisté sur la nécessité de garder un coût compétitif de l’électricité tout en privilégiant les énergies renouvelables, ce qui aboutirait à une quasi-autonomie économique. Avez-vous déjà retenu des préférences parmi toutes les énergies possibles que vous avez citées ?

Vous envisagez davantage de transparence sur la contribution au service public de l’électricité ainsi que l’élargissement de son assiette. Pour quelles raisons souhaitez-vous cette transparence ? Avez-vous déjà réfléchi à une méthode d’élargissement de l’assiette ?

S’agissant des transports, quel est votre point de vue sur l’évolution du multimodal dans notre pays ? Aujourd’hui, la SNCF éprouve de grandes difficultés à faire fonctionner le fret ferroviaire, même si le président actuel considère qu’il y a quelques améliorations. Par ailleurs, les décisions concernant le fluvial sont bloquées, s’agissant d’un investissement important comme le canal Seine-Nord.

La diminution de l’utilisation des combustibles fossiles suppose-t-elle de prendre des mesures drastiques de réduction ? Si oui, dans quels domaines ? En passant, monsieur Jouzel, quelle est votre position sur les gaz de schiste ?

Selon l’expérience des débats internationaux que vous avez acquise au sein du GIEC, que peut-on faire de plus pour contrer le laisser-faire au niveau international et faire évoluer les positions diverses ? Avez-vous des raisons d’être optimiste sur les chances qu’ont la France et d’autres pays de n’être plus les seuls à faire des efforts ? Je vous remercie d’avoir cité notre loi de 2005 sur l’énergie et les débats du Grenelle.

M. Bertrand Pancher. N’ayons pas peur des mots : un monde s’effondre. Néanmoins, la construction d’un monde nouveau est vraiment à notre portée, en termes de créations massives d’emplois et d’amélioration de la qualité de vie, à condition de communiquer sur les enjeux, comme vous l’avez indiqué. Si nous réussissons à le faire, nous trouverons les moyens d’assurer la transition énergétique dans de bonnes conditions.

Je suis très frappé de constater que ces moyens sont à notre portée. En matière de transports, nous avons besoin d’à-peu-près 3 milliards d’euros par an pour engager les infrastructures de demain. Demander aux trente millions d’automobilistes cent euros en moyenne – trente pour les petites voitures et trois cents pour les 4 x 4 –, c’est à notre portée. Les usagers contribuent à hauteur de 95 milliards d’euros aux services de transport ; c’est 30 % de moins que la moyenne européenne. En l’augmentant un tout petit peu, on aurait les moyens d’engager les grandes infrastructures de demain fortement créatrices d’emplois. Le constat est le même dans le domaine des énergies renouvelables. Nous payons l’électricité la moins chère du monde. Si Mme Tissot-Colle a raison de dire qu’il ne faut pas l’augmenter, avec une légère augmentation des tarifs pour augmenter très fortement les tarifs de rachat, notre pays serait inondé d’énergies renouvelables. Il n’y a pas de problème de financement à cet égard. Même chose dans le secteur du logement : la construction est tombée à 150 000 unités chaque année, alors qu’il en faudrait 500 à 600 000. Avec un effort sur la TVA, notamment dans l’ancien, on y arrivera. La condition à cela, bien évidemment, est de communiquer sur les enjeux.

Partagez-vous ce constat sur la possible mobilisation des moyens ? Si les domaines par lesquels il faudrait commencer sont bien les transports et le logement, ne faudrait-il pas se préoccuper aussi de la politique énergétique ?

La politique européenne nous déçoit fortement. C’est un monde de fous que celui où le carbone ne vaut plus rien, à peine cinq euros la tonne ! C’est d’autant plus surprenant que, partout dans le monde, on s’engage sur ces marchés du carbone. La politique monétaire de l’Europe est une folie. Si on ne la desserre pas, on ne s’en sortira pas. Or c’est la voie qui permettrait de trouver tous les moyens pour un futur New Deal à l’échelle européenne.

Si nous ne disposions que de très peu de moyens, nous aurions intérêt à les consacrer uniquement à la communication et à la politique de formation. Je partage sans réserve vos préconisations en cette dernière matière. On veut faire de nos enfants des robots de connaissance, pour quoi faire ? Le long terme n’est-il pas la perspective de l’éducation nationale ? N’est-il pas urgent d’engager des campagnes de concertation pour déterminer les priorités ? Si les Français partagent les priorités et les enjeux, on trouvera sans problème les moyens pour cette transition dans le monde de demain que nous souhaitons tous.

M. François-Michel Lambert. Le groupe écologiste est très attentif à vos travaux. Pour nous, la crise, que l’on dit tantôt économique tantôt financière, est bien systémique et trouve son origine dans cet enjeu de l’énergie. La vie, c’est l’énergie, et nombre d’obstacles se dressent entre nous et la transition énergétique. C’est ce qui donne son côté enthousiasmant à cette affaire.

Vous avez parlé d’une gouvernance aux deux niveaux de l’État et de la région. Pour notre part, nous sommes très attachés à la territorialisation : à chaque espace son approche particulière. Le nucléaire est l’exacte antithèse de cette notion de territorialisation, puisqu’à peine vingt sites en France couvrent 80 % de la consommation électrique, ce qui est unique au monde et nous place dans une position de fragilité extraordinaire. Comment s’intégrerait la région dans les nouvelles dynamiques de décentralisation en cours ?

Dans le domaine des transports, on ne s’en sortira pas sans une réelle volonté d’aménagement du territoire. Quelle est votre vision en la matière ?

Avec ma collègue Sophie Rohfritsch, je suis co-rapporteur de la mission d’information sur la biomasse créée au sein de cette commission. Vous le savez, la biomasse – biogaz, bois-énergie et un peu de biocarburants – représentera 60 % des énergies renouvelables de l’objectif 2020, soit plus que le photovoltaïque, l’hydraulique et l’éolien cumulés. Pourtant, elle ne fait l’objet d’aucune communication, alors qu’elle est accessible immédiatement dans tous les territoires. Je n’ose pas parler du ratio de communication entre la biomasse et les gaz de schiste : alors que ces derniers représentent la persistance à s’engager dans l’impasse qui conduit droit dans le mur, ils ont droit à une communication intense à tous les niveaux, la biomasse devant se contenter au mieux d’une sous-communication. Pourquoi n’avons-nous pas encore adopté une communication imprimant une dynamique vers les vraies solutions solides et robustes de l’avenir ?

Selon mes informations, le captage de CO2 est dans une impasse et les industriels sont en train de s’en retirer. Le nucléaire n’est-il pas plutôt un frein à la transition énergétique ? À nos yeux, il représente non pas l’énergie made in France mais l’absence de perspective : son très fort pouvoir de captation de ressources financières agit au détriment des énergies renouvelables ou de la sobriété énergétique ; la perspective de vingt à cinquante ans d’énergie qu’il offre contribue au blocage d’autres initiatives et de la création d’emplois.

La transition énergétique ne nécessite-t-elle pas de revoir en profondeur notre mode de développement économique, par exemple en passant de l’économie linéaire à l’économie circulaire, c’est-à-dire à l’écoconception, l’écofonctionnalité dans laquelle les déchets de calorie et frigorie sont des matières secondaires procurant d’énormes gains énergétiques ?

M. Philippe Martin. Monsieur Jouzel, je pense – hélas ! – qu’il vous faudra gagner encore bien des médailles et des trophées avant que les politiques n’entendent le discours que vous tenez depuis des années. Les travaux du GIEC constituent indéniablement un appui précieux à la décision politique. Malheureusement, celle-ci concerne un horizon plus immédiat que la fin du siècle puisqu’elle ne vise, en général, que la fin des mandats. Si les scénarios du GIEC, qui sont établis pour 2100, sont nécessaires pour tracer une évolution statistique, des prévisions à l’échelle régionale pour les décennies à venir seraient sans doute plus parlantes pour les citoyens et plus utiles pour les responsables politiques que nous sommes. Je conduis actuellement, à la demande du Premier ministre, une mission sur la gestion quantitative de l’eau d’irrigation. Au fil des auditions auxquelles je procède, tant avec les organisations agricoles qu’avec des organismes de recherche comme l’INRA ou le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), je constate combien il serait déterminant de pouvoir appréhender la fréquence des précipitations que vont connaître nos arrière-petits-enfants ou quelles sont les plantes que l’on pourra et devra faire pousser dans le Sud-Ouest dans trente, soixante ou quatre-vingt-dix ans. Pensez-vous possible de disposer, à terme, de prévisions à la fois proches et fiables qui permettront de donner un caractère concret à la situation due au réchauffement climatique ?

M. Jacques Kossowski. Pour réussir sa transition énergétique, notre pays se doit de développer des solutions technologiques et organisationnelles nouvelles. Dans votre rapport, vous insistez avec pertinence sur l’importance de la recherche et du développement made in France. Répondant à cet objectif, notre pays a mis en place plusieurs programmes d’investissement d’avenir concernant notamment l’énergie et le climat. Par exemple, ont été financés à hauteur de 1 milliard d’euros neuf instituts d’excellence sur les énergies décarbonées, qui ont été labellisés en 2011 et 2012. Ces instituts ont pour but d’ancrer durablement ces thématiques au cœur de notre compétitivité économique et de donner à la France un savoir-faire de pointe dans la création d’une économie sans carbone. Quel est votre sentiment sur ce programme ? Son état d’avancement est-il satisfaisant ?

M. Yannick Favennec. Quelle sera la place de la filière bois dans la future politique énergétique de notre pays ? Cette filière contribue directement à la lutte contre le réchauffement climatique et ses atouts sont en phase avec les objectifs et les priorités de la France en matière d’énergie et de lutte contre la précarité énergétique. Aujourd’hui, le bois-énergie domestique permet de répondre à différents enjeux, notamment la réduction d’émission de gaz à effet de serre et la réduction des charges d’énergie qui, bien souvent, représentent une dépense considérable pour les ménages les plus modestes. J’ajoute que cette filière est créatrice d’emplois non délocalisables dans les territoires, près de soixante mille personnes vivant des activités liées à ce secteur. Pourtant, elle ne semble pas suffisamment mobilisée sur ce défi : seuls 40 % de la forêt sont exploités en France, alors que 20 % de plus suffiraient à assurer la matière première nécessaire à la chaleur renouvelable. Quel est l’avis du CESE sur l’avenir de la filière bois en France et sur les mesures qu’il conviendrait de prendre pour mieux la mobiliser ?

M. Philippe Plisson. Votre rapport est très intéressant, riche et exhaustif, mais sans appel quant à la situation et aux perspectives d’avenir. Il évoque logiquement toutes les solutions, par exemple le captage et le stockage du CO2 ou encore le marché du carbone qui procède typiquement de l’adaptation au système productiviste et libéral. Or le marché carbone est un véritable fiasco réglementaire, puisque la Commission européenne se propose de geler 900 millions de tonnes de quotas de CO2, dans l’optique d’une hypothétique relance des prix à la hausse. Cela pose une question fondamentale, que vous ne tranchez pas sur le fond puisque ce n’est pas le but de votre rapport, entre adaptation et évolution. À propos du « monde nouveau » dont parlait notre collègue Bertrand Pancher tout à l’heure, je ne suis pas sûr que nous y mettions le même contenu. Pensez-vous que le nouveau modèle dont vous tracez les contours dans votre rapport soit compatible avec le système libéral qui nous régit ?

M. Charles-Ange Ginesy. Il est indéniable que le réchauffement climatique tend à progresser, puisque les rapports du GIEC prévoient une hausse de quatre degrés en 2050. Croyez-vous véritablement que l’homme, avec sa production et sa consommation énergétiques, est essentiellement responsable de ce réchauffement climatique et de cette tendance ? Sans nier notre part de responsabilité, je ne la pense pas pour autant totale. L’histoire du monde est faite de périodes de réchauffement et de périodes de refroidissement.

Nous avons ici reçu M. Jancovici, selon lequel il n’est point de croissance sans consommation énergétique. Quel est votre avis sur cette théorie dont les conséquences sur la vie de l’homme et la poursuite de son activité sont très importantes ?

M. Jean-Marie Sermier. Monsieur Jouzel, parmi vos nombreuses qualités, celle qui m’étonne le plus est votre sérénité. Vous nous expliquez si tranquillement que notre maison brûle qu’on pourrait en douter. Si une hausse de quatre degrés dans les soixante prochaines années est effectivement un scénario catastrophe pour l’humanité, nous n’avons pas du tout le niveau de réaction adéquat. Au vu de l’état des lieux, que s’est-il passé ces dernières années ? On ne peut pas dire que les énergies renouvelables n’ont pas bénéficié de moyens de recherche aux États-Unis, au Japon ou en France. Il y a des problèmes avec l’éolien, dès qu’il s’agit d’implanter une éolienne ; avec le photovoltaïque, ce sont les métaux lourds ; avec l’hydraulique, c’est la continuité des cours d’eau. Face à ces difficultés, n’y a-t-il pas urgence à travailler sur notre grande compétence qu’est le nucléaire ? Allons-nous nous mettre un boulet aux pieds en refusant de continuer dans cette filière d’excellence, plutôt que de chercher à réduire un par un les risques qui y sont inhérents et à apporter la pierre de la France à l’édifice ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il y a quelque temps, un parlementaire dont je tairais le nom nous indiquait qu’il faudrait très rapidement construire vingt-quatre EPR. S’il y a des candidats dans la salle, je leur donnerai ses coordonnées.

M. Jean-Louis Bricout. Voilà un rapport très intéressant qui nous montre, s’il en était encore besoin, qu’en matière de transition énergétique, demain se prépare dès aujourd’hui. Chacun partage votre analyse selon laquelle les régions correspondent à l’échelon le plus à même de coordonner l’ensemble des efforts. Pourtant, les stratégies doivent se décliner à tous les échelons. Une vision territorialisée me paraît indispensable. Comment imaginer une production au plus près des territoires sans faire intervenir les départements, certainement plus à même de détecter et d’accompagner les publics les plus fragiles ou en situation de précarité énergétique ? Les compétences doivent être redéfinies, vous le dites dans votre rapport, mais pourriez-vous nous détailler la façon dont vous imaginez ce partage des compétences ?

M. Christophe Priou. Notre collègue Philippe Martin s’inquiétait de l’avenir de l’Armagnac dans cent ans : nous serions d’ores et déjà preneurs d’un armagnac de cent ans ! (Sourires). Votre rapport souligne le rôle de l’État en la matière. Je me réjouis de ne pas avoir voté en son temps la fusion GDF-Suez, considérant que l’énergie est une mission régalienne de l’État. On voit même aujourd’hui que c’est un enjeu européen.

Vous choisissez, dans les partenariats avec les collectivités territoriales, la région comme chef de file, mais l’entendez-vous au sens de nos vingt-deux régions administratives ? Souvent, les régions les plus dépendantes en termes d’énergie, par exemple le Grand Ouest qui regroupe au moins la Bretagne et les Pays-de-la-Loire, sont sans doute celles qui ont d’autres filières à exploiter. En l’espèce, dans le domaine maritime, outre l’éolien en mer, d’autres expériences sont menées, comme la courantologie ou la houlométrie. Comment les mettriez-vous en perspective avec votre rapport très général ? On a toujours du mal à dépasser le constat et les pistes pour aller aux solutions du producteur au consommateur, surtout dans le contexte de millefeuille administratif que constituent l’État, la région, le département, les communes et l’intercommunalité. Il y a souvent des pertes de charge entre les préconisations et les réalisations.

Mme Sophie Rohfritsch. À mon tour, je voudrais saluer les préconisations contenues dans ce rapport et insister aussi sur la région en tant qu’échelon territorial le plus pertinent pour établir un calendrier le plus court possible. Je pense faire plaisir à François-Michel Lambert en indiquant qu’un grand élément national perturbe cette organisation régionale : la Commission de régulation de l’énergie, à travers ses interventions et labellisations d’appels d’offre, stérilise et neutralise certains projets régionaux, alors que, concrètement, CRE 1, CRE 2, CRE 3 ou CRE 4 ne sont pas visibles pour nos concitoyens. Elle empêche notamment certains projets de biomasse de voir le jour quand ils ont une échelle plus réduite. Il faudrait organiser cela aussi, sinon on ne pourra pas faire grand-chose sur les territoires.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le financement de la transition énergétique s’élèverait à un montant annuel compris entre vingt et quarante milliards d’euros, que l’on pourrait dégager en mettant en place une véritable fiscalité écologique, en donnant un prix au carbone. D’aucuns pensent que la fiscalité du diesel doit rattraper le niveau de celle de l’essence sur plusieurs années. Est-ce aussi votre état d’esprit ?

Mme Catherine Tissot-Colle, co-rapporteure de l’avis du CESE sur la transition écologique. Nous vous remercions de la richesse de vos questions. Malheureusement, pour des raisons de temps autant que de légitimité, nous ne saurions répondre à toutes. Ce sont les limites du travail collectif dont nous sommes ici les représentants ; nous ne sommes pas venus à titre d’experts.

S’agissant de la fiscalité, par exemple, nous ne pouvons aller plus loin que les quelques ébauches dessinées dans le rapport. Un avis est en cours au CESE sur la fiscalité écologique et je ne peux que vous inviter à solliciter les rapporteurs, une fois leur travail terminé. Vous nous avez demandé des réponses personnelles. S’agissant du monde des entreprises, je peux vous indiquer que notre réponse générale sur la fiscalité est que cette dernière doit être au maximum équivalente à ce qu’elle est aujourd’hui, c’est-à-dire déjà très élevée. Qu’on opère par transferts, par modification de type de fiscalité, par moindre taxation du travail ou par d’autres modes, nous sommes tout à fait prêts à en discuter. En tout état de cause, il ne peut pas y avoir de supplément.

Beaucoup de questions concernent les aspects territoriaux. Nous avons fait une recommandation sur la région après qu’un débat sur la territorialisation maximale a montré que small is beautiful n’est pas forcément vrai. Il ne s’agit certainement pas de tuer toutes les initiatives qui pourraient être prises en dessous de l’échelon régional. Bien entendu, il y a place pour des ajustements, mais n’ayant pas travaillé dessus, nous ne pouvons rien vous en dire. C’est à la définition de niveaux structurants que nous nous sommes attachés. Recoiffant ma casquette du monde des entreprises, je peux dire que celles-ci attendent d’avoir de la lisibilité au regard des investissements, surtout pour ceux qui ne concerneront pas seulement un petit producteur en rapport direct avec le consommateur dans un rayon de cinq kilomètres. C’est pourquoi il faut absolument définir les bons échelons et ce travail d’approfondissement vous revient à vous, législateurs. Si, sur certains aspects de ce sujet, l’avis du CESE vous intéresse, n’hésitez pas à le saisir.

Que les vingt-deux régions ne ressemblent pas à vingt-deux États, c’est un souci que l’on peut partager. Les présidents des CESER, qui sont des CESE régionaux, devant lesquels nous avons présenté le résultat de nos travaux, ont montré un grand intérêt et un esprit extrêmement pragmatique. L’orientation économique et sociale, notamment, leur a immédiatement parlé.

Officialiser la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans les organismes publics ? L’idée est, à mon avis, excellente. Les entreprises le font, il serait normal que les autres acteurs le fassent aussi.

La formation semble vous importer autant qu’à nous. Nous ne pouvons pas répondre à toutes vos questions relatives aux différentes technologies. Nos débats internes au CESE ont montré que certains avaient des idées très arrêtées, tandis que d’autres voulaient protéger l’existant. Plutôt que rédiger un catalogue de recommandations, nous avons préféré préconiser de privilégier les technologies matures – ce qui n’interdit pas la R&D –, afin de réduire au maximum le coût économique de la transition pour les finances publiques et les citoyens. Pour cela, il faut pouvoir créer des entreprises, des entités économiques qui gagnent suffisamment d’argent pour produire sans être dépendantes de l’État ou des collectivités. Quant à savoir si ces entreprises doivent évoluer dans un système libéral ou autre, là n’est pas le débat, même si je pense que ce doit être le cas.

M. Jean Jouzel, co-rapporteur de l’avis du CESE sur la transition écologique. J’ai participé à la commission Rocard et je regrette vraiment que la contribution énergie-climat n’ait pas été réellement actée à l’époque. Nous n’en serions pas là aujourd’hui et j’y suis vraiment attaché. Si on ne donne pas un prix au carbone, le piégeage et le stockage du gaz carbonique ne seront jamais compétitifs, puisqu’ils coûtent de l’argent sans rien rapporter. Ce qui me rend optimiste, c’est le rapport du GIEC qui montre que la transition est techniquement possible, que nous ne sommes pas obligés de rester accrochés aux combustibles fossiles. Techniquement, nous pouvons développer, au plan mondial, une économie sur les renouvelables. Le rapport dit clairement qu’en 2050, 50 % de l’énergie mondiale, électricité et chaleur, pourraient provenir de sources renouvelables. Mon avis personnel est qu’il faut, en plus, aller vers la sobriété et l’efficacité, car si l’on ne couvre pas l’ensemble des champs énergétiques, on n’y arrivera jamais. C’est parce que nous n’avons pas su faire cela que nous avons, en France, des consommations de pointe équivalentes à la consommation de la moitié de l’Europe, ce qui est ahurissant. Ce qui l’est plus encore, c’est que nous sommes en train de construire notre système énergétique sur cette base que nous avons nous-mêmes créée.

La recherche sur l’hydrogène, avec la méthanation, offre beaucoup d’ouvertures. Je suis aussi très sensible à la biomasse, sans doute en raison de mes origines bretonnes, ainsi qu’à toutes les énergies marines. Cela dit, les énergies matures dont nous parlons sont, pour le moment, l’éolien terrestre et le photovoltaïque. L’éolien en mer reste cher, mais on sait qu’on n’atteindra pas nos objectifs d’énergies renouvelables en 2020 sans développer l’éolien, terrestre comme marin.

Nous avons parlé du gaz de schiste plutôt en creux, disant que nous étions favorables à un effort de recherche dans tous les domaines, sans limitation. La discussion sur le sujet a été assez rude, car le gaz de schiste n’est pas un gaz naturel et il pose beaucoup de problèmes environnementaux. Je pense que le débat national actuel en traitera. En tout cas, il faut savoir qu’en cas de fuite, le gain par rapport au gaz naturel, au pétrole et au charbon serait totalement perdu.

Vous voulez connaître ma position personnelle sur le nucléaire. D’abord, travaillant au CEA depuis quarante-cinq ans, je ne suis pas un antinucléaire convaincu. Mais je suis aussi de ceux qui pensent qu’on doit accentuer le développement des énergies renouvelables et ne pas commettre l’erreur de mettre toutes les disponibilités en R&D sur le nucléaire. En 2050, quand 50 % de l’énergie mondiale seront issus de sources renouvelables, le nucléaire n’en représentera que 6 % au maximum. Si nous ne savons pas acquérir, comme est en train de le faire l’Allemagne, des compétences – y compris à l’exportation – dans le domaine des énergies renouvelables, nous aurons encore raté une marche de compétitivité. Il faut donc réserver une part de notre effort de recherche aux hydroliennes, aux énergies marines et autres. Ensuite, toutes les questions que suscite le nucléaire sont légitimes, tant celles touchant au coût que celles liées aux risques. Gardons en tête que, dans les vingt ou trente ans, tout accident nucléaire, par exemple dans une vieille centrale d’un pays de l’Est, signera la fin du nucléaire. C’est pourquoi je suis d’accord avec l’invitation que nous lançons à un débat ouvert et serein sur cette énergie. Si j’ai toute confiance et que la sécurité ne me pose pas de problème, je m’intéresse également de près au développement des énergies renouvelables. Je ne tiens pas à opposer les deux. Il y a beaucoup à faire, par exemple en matière de recherche sur les biocarburants de deuxième génération.

Le GIEC se soucie de la demande des décideurs politiques de projections à échéance relativement brève, de quelques décennies, et très régionalisées. Dans le cinquième rapport du GIEC, qui sortira en septembre, le chapitre « Projections » est scindé en une partie « Projections à court terme », plus régionalisées et avec beaucoup de cartes, et une partie « Projections à long terme », d’ici aux trois prochaines décennies et au-delà. Le groupe II s’est aussi scindé en deux gros ouvrages, dont l’un est réellement consacré aux aspects régionaux des impacts et de l’adaptation. L’inconvénient est que cette réduction d’échelle de temps et d’espace rend les projections scientifiques moins précises. Elle a donc ses limites. Si l’on a besoin de projections pour comprendre à quoi on doit s’adapter, encore faut-il s’y préparer. Je me suis engagé avec Dominique Meyer dans un rapport sur l’adaptation au réchauffement climatique, pas du tout pour remettre en cause le plan national d’adaptation dans lequel je me suis moi-même beaucoup investi, mais plutôt pour voir s’il se met en place correctement. L’adaptation doit être menée de front avec la lutte contre le réchauffement climatique. C’est ainsi que, dans le pourtour méditerranéen, il faudra se préparer non seulement au réchauffement, mais aussi à un problème de ressource en eau. Cela dit, il ne faut pas attendre trop de nous. On arrive à décliner quelques caractéristiques régionales qui rendent les problèmes du sud de la France distincts de ceux du Nord ou des régions montagneuses ou côtières, mais on n’ira jamais au-delà de ce que l’on sait.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Il me reste à vous remercier sincèrement et chaleureusement pour la qualité de votre présentation et des échanges auxquels elle a donné lieu. La réunion de ce matin a montré combien méritait d’être tenu et poursuivi l’engagement que j’ai pris de collaboration avec le Conseil économique, social et environnemental. C’est grâce à de tels échanges que notre réflexion progressera et que nous deviendrons, nous, responsables politiques, plus efficaces demain.

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Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 13 mars 2013 à 10 h 15

Présents. - Mme Laurence Abeille, M. Yves Albarello, M. Christian Assaf, M. Julien Aubert, M. Alexis Bachelay, M. Serge Bardy, Mme Catherine Beaubatie, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, M. Vincent Burroni, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Françoise Dubois, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Claude de Ganay, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, Mme Valérie Lacroute, M. François-Michel Lambert, M. Alain Leboeuf, M. Michel Lesage, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Philippe Martin, M. Jean-Luc Moudenc, M. Philippe Noguès, M. Bertrand Pancher, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, Mme Marie-Line Reynaud, Mme Sophie Rohfritsch, M. Gilbert Sauvan, M. Jean-Marie Sermier, M. Thierry Solère, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - Mme Sylviane Alaux, M. Denis Baupin, Mme Chantal Berthelot, M. Patrice Carvalho, Mme Florence Delaunay, M. Stéphane Demilly, M. David Douillet, M. Philippe Duron, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Christian Jacob, M. Jacques Krabal, Mme Viviane Le Dissez, M. Arnaud Leroy, M. Olivier Marleix, M. Rémi Pauvros, M. Edouard Philippe, M. Martial Saddier, M. Gabriel Serville, M. Patrick Vignal

Assistait également à la réunion. - M. Henri Jibrayel