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Mercredi 24 avril 2013

Séance de 16 heures 30

Compte rendu n° 60

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, sur les dispositions relatives à la transition écologique dans la réforme de la décentralisation

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, sur les dispositions relatives à la transition écologique dans la réforme de la décentralisation.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je remercie Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, d’avoir bien voulu répondre à notre invitation. Depuis quelques semaines, nous souhaitions évoquer avec elle différents sujets tels que la réforme de l’État ou la décentralisation. Dans ce dernier domaine, trois projets de loi ont récemment été présentés en conseil des ministres : le premier concerne les métropoles, le deuxième les régions et l’égalité des territoires, le troisième la solidarité territoriale.

La Commission du développement durable est évidemment concernée par les dispositions contenues dans ces trois textes. La transition écologique dans les territoires, en particulier, représente pour nous un sujet important de préoccupation, qui touche aux transports, à la biodiversité, au climat et à l’énergie. Mais c’est aussi parce que l’aménagement du territoire fait partie des compétences de notre Commission que « l’acte III de la décentralisation » nous intéresse.

Je vous laisse la parole, madame la ministre, avant de la donner aux porte-parole des groupes et aux parlementaires qui souhaiteront vous interroger.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique. La question de la décentralisation touche en fait à tous les domaines compris dans mon portefeuille ministériel, d’abord parce que, à nos yeux, elle est un des moyens de moderniser l’action publique, et ensuite parce qu’elle a des incidences sur les trois fonctions publiques, nationale, territoriale et hospitalière. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons beaucoup travaillé en amont avec les syndicats.

Au départ, nous avions prévu un texte unique d’environ 80 articles, qui permettait de revoir la distribution des compétences entre les différentes collectivités à la lumière de trente ans de décentralisation. Ce contenu s’est ensuite alourdi à la suite d’échanges interministériels relatifs aux volets de la formation professionnelle ou des transports, et dans la mesure où, pour être transférée ou déléguée, une compétence doit avoir été au préalable décrite avec précision. Le 10 avril, le Premier ministre a donc finalement pris la décision de présenter le texte en trois parties.

Les dernières lois de décentralisation sont relativement récentes : l’une a été adoptée en 2004, l’autre en 2010. Je ne voulais donc pas proposer au Parlement un nouveau projet de réforme en courant le risque de devoir y revenir trois ou quatre ans plus tard. En effet, chaque nouvelle loi de décentralisation, chaque changement dans l’attribution des compétences entraîne, pour les collectivités territoriales, non seulement une charge importante, mais aussi des perturbations pouvant durer un ou deux ans, car elles ont tendance, pendant la préparation du projet, à réduire certaines de leurs activités dans l’attente de connaître plus précisément les dispositions qui les régiront. Or le redressement du pays, dans un contexte marqué par les difficultés économiques, passe par celui de tous ses territoires. Il est donc essentiel d’adopter rapidement ces trois projets de loi, sans avoir besoin de proposer une loi similaire dans quelques années. C’est pour cette raison que nous avons voulu faire confiance aux élus.

Cette confiance paraît d’autant plus nécessaire que les élus ont mal vécu les couvertures de magazines dénonçant le gaspillage de l’argent public qui résulterait de leur prétendu laxisme ou de leur nombre trop élevé.

Mais surtout, l’évaluation des politiques publiques – notamment en matière d’enseignement – montre qu’elles sont plutôt bien gérées par les élus locaux. Et dans la mesure où nous étions nombreux à vouloir rétablir la clause de compétence générale pour les départements et les régions, il était important de faire confiance aux élus pour répartir, non la charge des compétences, mais leur gouvernance. La clause de compétence générale fait donc partie des premiers points abordés par cette réforme, avec le principe de libre administration des collectivités territoriales, qu’il convenait de réaffirmer, et la reconnaissance de la diversité des territoires français.

Les territoires ne sont en effet pas de même nature : certains comprennent de très grandes villes, voire des « métropoles » ; d’autres sont situés en montagne ou sur le littoral. Il paraît donc difficile – et je le pense depuis longtemps – d’imposer partout la même gestion des compétences.

Pour cette raison, nous proposons que dans chaque région de France, une conférence territoriale réunisse autour d’une « même table » les présidents de l’exécutif régional, des exécutifs des départements et des agglomérations, et des représentants de communautés de communes rurales. Certains craignent que des conflits ne surviennent à cette occasion, mais un élu est, par essence, quelqu’un de raisonnable… (Sourires)

J’ai lu quelque part que l’on me trouvait trop bretonne, c’est-à-dire trop régionaliste. Il est vrai que je crois aux régions, mais je crois aussi à la force de l’État. Pour que la décentralisation fonctionne bien, il faut que l’État soit présent, et qu’il soit fort, car il est le garant de l’accès aux services et de l’égalité entre territoires. C’est une première raison de prévoir qu’il soit représenté à ces conférences.

La deuxième raison est que nous reconnaissons aux collectivités le droit de réclamer l’exercice de certaines compétences particulières : je cite toujours l’exemple de la gestion de l’eau, mais on pourrait également penser à des actions relevant de l’innovation technologique, de l’enseignement supérieur ou de la recherche. Or la délégation d’une compétence implique d’en analyser le contenu, d’évaluer les moyens à transférer et de définir les conditions d’une évaluation de la politique publique déléguée – car nous souhaitons que de telles évaluations soient également menées dans les territoires. Seul l’État est en mesure de faire tout cela, mais aussi de communiquer à l’exécutif souhaitant obtenir une délégation spécifique de compétence les éléments qui lui permettront d’éclairer ses choix.

C’est à dessein que je parle de délégation et non d’expérimentation, ce dernier mot prenant dans notre loi fondamentale un sens très particulier. En effet, une expérimentation ne dure que cinq ans : après ce délai, soit la compétence est transférée à l’ensemble des collectivités, soit elle est retirée à celles qui l’ont essayée. Au contraire, une délégation de compétence spécifique – liée à la montagne, par exemple – n’a pas, par définition, vocation à être étendue à d’autres territoires, a fortiori quand ils ne sont pas situés en zone montagneuse. Mais une telle délégation peut également correspondre à une demande des élus : ceux de Bretagne, en raison de la configuration géologique propre à la région, demandent ainsi depuis longtemps à exercer des compétences en matière de gestion de l’eau, tandis que d’autres conseils régionaux ne réclament rien de tel.

C’est donc bien l’expression « délégation de compétences » qui figure dès l’exposé des motifs du projet de loi, à côté de la notion de « conférence territoriale de l’action publique ». Le choix des termes est important : il n’existe, à nos yeux, qu’une action publique dans notre pays, mais celle-ci peut être transférée ou déléguée à la demande d’une collectivité. Il ne s’agit cependant pas d’une décentralisation « à la carte » : cette expression malheureuse, employée par des journalistes, a fait peur à nos fonctionnaires.

L’objectif de la conférence territoriale est de définir, dans le cadre d’un « pacte de gouvernance territoriale », des modalités d’organisation adaptées aux territoires. Par exemple, la région, qui se verra naturellement reconnaître un rôle de chef de file en matière de développement économique, peut choisir de conserver dans ses compétences tout ce qui concerne la stratégie économique, les filières, les liens avec OSEO ou les banques, l’aide directe, tout en confiant à un département ou une communauté d’agglomération la gestion de l’immobilier d’entreprise. Le conseil régional est en effet une administration de mission plutôt que de gestion. Mais un tel transfert doit faire l’objet d’un écrit signé par les parties et décrivant précisément la compétence concernée.

C’est ainsi, à mon avis, que nous devons progresser. Le monde change ; les technologies changent.

M. Martial Saddier. Les règles également changent souvent !

Mme la ministre. Le risque est donc grand que le contenu d’une compétence évolue trop vite. Le jour où les élèves se rendront à l’école en hélicoptère fonctionnant à l’énergie solaire, le transport scolaire ne sera plus de la même nature, et il sera peut-être préférable qu’une autre catégorie de collectivité en assume la gestion ! (Sourires) Pour éviter que le Parlement ne soit contraint, à chaque fois que le monde bouge, d’adopter une nouvelle répartition des compétences territoriales, il convient d’inciter les exécutifs locaux à se réunir régulièrement, dans le cadre de la conférence territoriale de l’action publique, afin de s’adapter à chaque nouvelle donne et d’améliorer continuellement la gouvernance des compétences.

Un autre point important du texte est la réaffirmation de l’existence de « chefs de file » pour l’exercice de certaines catégories de compétences. D’aucuns auraient voulu que soient définies des compétences exclusives, mais nous avons fait le choix de consacrer une notion déjà présente dans le droit positif, tout en laissant la possibilité d’en négocier les contours dans le cadre de la conférence territoriale.

J’en viens au titre II du premier projet de loi, qui tire les conséquences de la reconnaissance du fait urbain. Lors des débats qui ont précédé le vote de la loi du 16 décembre 2010, nous étions déjà préoccupés par le phénomène de métropolisation. La stratégie de Lisbonne consistait à donner le maximum de compétences aux métropoles avant de les mettre en concurrence en espérant que tout irait bien. Ce n’est pas notre choix : selon nous, la métropole doit être liée à la région pour l’exercice de compétences telles que le développement économique, la recherche ou l’enseignement supérieur, mais aussi aux réseaux de ville, car les réseaux de ville et le polycentrisme sont des traits propres à la France, qui font sa force et que nous devons veiller à conserver.

Nous avons ainsi prévu un statut particulier pour Paris, Lyon et Marseille, dans la droite ligne de la loi dite « PLM ». À Paris – où, on l’oublie souvent, la commune et le conseil général sont gérés par la même équipe –, nous avons voulu pallier l’absence de schéma de coopération intercommunale dans certains départements. Rappelons en effet qu’une loi votée par l’ancienne majorité a imposé la réécriture des schémas intercommunaux sur tout le territoire français, à l’exception de la couronne située autour de la zone dense parisienne. Ce choix, justifié par toutes sortes de raisons, sans doute légitimes, n’en représente pas moins une erreur, notamment parce qu’il ne permet pas, lorsque des communes s’associent entre elles, de compenser le déséquilibre entre les plus riches et les plus pauvres. Un tel schéma devra donc être élaboré sous l’autorité du préfet de région et des préfets de département, selon la procédure déjà suivie dans les autres territoires, et en s’appuyant notamment sur les contrats de développement territoriaux développés autour des gares par de nombreuses communes franciliennes.

N’oublions pas, en effet, que les deux problèmes les plus importants auxquels la région parisienne doit faire face sont la gestion du logement et celle des transports. En ce qui concerne le second point, je ne reviens pas sur les outils déjà disponibles, tels que Grand Paris Express. Le texte précise les compétences des collectivités d’Île-de-France en matière de transport, pour permettre d’avancer plus vite sur les projets en cours.

Sur le premier point, ce projet de loi propose d’aller un peu plus loin en instituant un schéma et une autorité opérationnels pour le logement dans la zone dense correspondant au périmètre de Paris Métropole. D’autre part, pour répondre aux inquiétudes des élus de la troisième couronne, qui craignent une extension de la spéculation foncière jusqu’à leur territoire, nous avons également prévu un schéma régional de l’habitat.

À Lyon, nous avions envisagé de créer une métropole dite « européenne » dotée de conseils de territoire, quand le président du conseil général et celui de la communauté d’agglomération ont proposé de fusionner une partie des compétences du département avec celles de la nouvelle entité urbaine. Nous n’avons pas refusé, si bien que le projet de loi tient compte de ce projet. Cependant, la fusion ne sera pas complète puisqu’elle laissera de côté la partie rurale du département, qui compte 440 000 habitants. Comme tous les départements de France, celle-ci aura toutefois la possibilité de s’associer avec d’autres collectivités.

Quant aux conseils de territoire, que l’on retrouvera également dans l’aire métropolitaine Aix-Marseille-Provence, ils sont l’application de la notion d’aménagement de proximité. Un conseil métropolitain, quelle que soit son efficacité, ne peut pas gérer la proximité, c’est-à-dire le trottoir, le rond-point, le feu de signalisation, l’accès à l’école maternelle. Il devra donc confier à des conseils de territoire, regroupant plusieurs communes, la mise en œuvre des politiques relatives à la circulation de proximité et au petit aménagement, par opposition aux grosses infrastructures, au développement économique, au logement, au transport et à l’environnement, qui relèveront de l’entité métropolitaine.

Lorsque nous nous sommes rendus dans la zone Aix-Marseille-Provence, nous avons été frappés par le fait que, malgré les infrastructures qui font sa force – le terminal pétrolier de Fos, le port autonome de Marseille, l’aéroport international, ITER –, et qui résultent d’investissements extrêmement lourds de la part de l’État, le territoire, qui comprend six intercommunalités et dix autorités organisatrices des transports, souffre d’une embolie.

Par exemple, alors que les universités de Marseille et d’Aix ont réussi leur rapprochement, en parvenant à réaliser une quasi-fusion – ce qui a amené l’État à leur attribuer des crédits dans le cadre du nouveau plan Campus –, il est très malaisé pour les étudiants de se rendre rapidement d’une ville à l’autre, d’autant qu’il n’existe qu’une seule voie ferrée, si bien que les trains ne peuvent pas se croiser. On finit par retrouver les étudiants marseillais à Lyon, où il leur est plus facile de se rendre !

De même, de nombreux chefs d’entreprise nous ont fait remarquer que leurs salariés ne pouvaient plus arriver à l’heure au travail. Pour un habitant d’Aubagne par exemple, il est devenu infernal de se rendre au pôle de compétitivité Pégase. Certaines entreprises en sont ainsi venues à créer leur propre organisation de transport privée pour faire venir leurs salariés.

C’est à la suite de ce constat que le Premier ministre a décidé de proposer une fusion des différentes intercommunalités afin d’améliorer la gestion d’une métropole riche de potentialités mais qui n’est pas, aujourd’hui, au mieux de sa forme. Pour avoir conduit de nombreuses réunions sur place, et rencontré de nombreux maires préférant conserver la situation actuelle, je sais qu’un tel projet est difficile à mettre en œuvre. Mais au nom de l’intérêt général, il me paraît nécessaire de le proposer au Parlement.

Comme à Lyon, la future organisation serait divisée en conseils de territoire, recouvrant l’aire des anciennes intercommunalités, ce qui permettra aux maires de travailler sur l’aménagement du territoire de proximité. La métropole, de son côté, aurait la charge du dossier transports, et notamment des déplacements entre domicile, travail et lieux de service. Dans cette zone où tout le monde circule en voiture, les services de transport en commun fonctionnent bien à l’intérieur de chaque intercommunalité, mais pas d’une intercommunalité à l’autre. La population comme les entrepreneurs auraient donc tout à gagner d’une réorganisation de l’aire métropolitaine. Parmi les seconds, certains menacent de partir vers Rotterdam, à cause des difficultés de circulation ; d’autres voient leurs projets bloqués, ou sont découragés de devoir s’adresser à trois intercommunalités différentes.

Certes, la métropole sera difficile à mettre en place, mais c’est bien dans de telles situations qu’il faut faire preuve de courage.

Il est en outre essentiel de faire de cette zone une porte ouverte sur le bassin méditerranéen. Dans ce domaine, on ne peut pas continuer à « bricoler », même si des résultats ont été obtenus. La grande route méditerranéenne, aujourd’hui, c’est celle qui relie Valence à Lyon en passant par Barcelone et Montpellier. Le terminal pétrolier de Fos a encore perdu un marché au profit de Trieste : nous ne pouvons pas continuer ainsi. J’ai reçu à Marseille les 42 présidents des parlements de l’Union pour la Méditerranée : tous sont favorables à l’idée d’installer de grandes portes entre le nord de l’Europe, le bassin méditerranéen et l’Afrique. Faire de Marseille l’une de ces portes permettrait de conjuguer l’intérêt des populations locales avec l’intérêt général.

Le chapitre IV du projet de loi, consacré aux métropoles françaises autres que Paris, Lyon et Marseille, est la partie du texte qui a fait l’objet des discussions les plus vives. Demander à toutes les métropoles situées dans une aire urbaine de plus de 500 000 habitants de partager avec la région des compétences en matière de développement économique, d’enseignement supérieur, de recherche, de logement des étudiants, cela fait débat. Les régions, en tant que chefs de file dans cette catégorie de compétences, seront, comme auparavant, chargées des schémas régionaux de développement économique, mais elles devront aussi intégrer les schémas des grandes aires urbaines. Aujourd’hui, les deux types de schémas ne sont pas en adéquation : une rationalisation est donc nécessaire.

Bien que la formation professionnelle et l’apprentissage fassent partie des compétences des régions, la taxe d’apprentissage restera collectée au niveau national. Les représentants des entrepreneurs de France ne veulent pas, en effet, d’une multiplication des organismes de collecte. Ils ont raison, car une telle organisation coûterait sans doute beaucoup plus cher qu’un système unique de collecte combiné à une redistribution par péréquation.

Les régions entreront de plain-pied dans les questions touchant à l’enseignement supérieur, la recherche, l’innovation, le transfert de technologies, les centres de ressources, etc., avec toutefois une limite importante : l’enseignement supérieur, en tant que tel, doit rester une compétence régalienne de l’État. Ce n’est que par délégation de ce dernier qu’une région, associée ou non à une ou plusieurs métropoles, pourra soutenir un laboratoire de recherche, un incubateur ou un centre de transfert de technologies.

Le rôle de la région est également accentué dans le domaine des transports. L’objectif est d’éviter les doublons – par exemple entre un réseau de train express régional et un réseau départemental d’autocars –, et d’améliorer la cohérence entre différents horaires ou modes de transports, entre gares urbaines et gares de TER, etc. L’idée est bien sûr de développer le plus possible les transports en commun – on le sait, dans certaines régions, la fréquentation des TER a déjà connu des augmentations à deux chiffres –, mais aussi de favoriser le fret ferroviaire et toutes les initiatives susceptibles d’avoir pour effet une réduction du nombre de camions sur nos routes et autoroutes.

Beaucoup reste à faire, également, s’agissant du développement des plateformes intermodales : si entre les routes et les « autoroutes de la mer », les choses fonctionnent à peu près, nous sommes loin du compte pour les plateformes rail/route. À l’heure où certains pays, imitant l’exemple de la Suisse, se préparent à interdire le passage de camions sur leur territoire, nous devons améliorer le fret non routier à destination de marchés d’intérêt européen comme la zone de Francfort, car aujourd’hui, seuls les services de transport par camions parviennent à tenir les délais. Un schéma régional devra donc prendre en compte tous les aspects de l’intermodalité, depuis les aires de covoiturage jusqu’aux installations frigorifiques de pointe.

D’une manière générale, nous estimons que la question des transports a été un peu trop laissée à l’arrière-plan au cours de ces dernières années – sans même parler des aéroports.

J’en viens à l’énergie. Dans ce domaine, le problème est de concilier l’apparition de nouvelles technologies permettant la production locale d’énergie renouvelable, comme l’énergie éolienne ou hydrolienne, avec la situation actuelle du pays, caractérisée par une production d’électricité à l’échelle nationale. Sans aller jusqu’à leur donner, comme certains le réclamaient, la possibilité de produire toutes les formes d’énergie, nous avons prévu de permettre aux régions, associées ou non à des agglomérations dans le cadre du pacte de gouvernance, de produire de l’énergie renouvelable ou d’en expérimenter la production.

L’idée est de prolonger jusqu’au bout les initiatives lancées par l’ancienne majorité pour améliorer l’approvisionnement en énergie – comme celle qui a donné lieu au Pacte électrique breton – en faisant de la région, non l’acteur unique, mais le chef de file en matière de développement des énergies renouvelables. Il ne faut pas, en effet, mettre un terme aux aides à l’expérimentation déjà lancée par certaines communautés d’agglomération, parfois de taille modeste.

Quant aux actions relevant de la transition énergétique, c’est-à-dire visant à réduire la consommation d’énergie, notamment par l’isolation des bâtiments publics et privés, elles ont été, après de longues discussions, confiées aux intercommunalités, désignées chefs de file, car c’est à cette échelle que l’on débat des questions d’urbanisme. Cependant, les régions qui le souhaitent pourront, dans le cadre du pacte de gouvernance territoriale, participer à des expérimentations en matière de transition énergétique et écologique, telles que la création d’écolotissements. Mais on peut imaginer aussi que le débat national sur la transition énergétique, animé par ma collègue Delphine Batho, conduira à amender cette organisation.

Le projet de loi aborde également la question de la gestion des milieux aquatiques, car cette compétence n’était jusqu’à présent attribuée à aucune collectivité en particulier, en dépit des nombreuses dispositions sur le sujet déjà incluses dans le droit positif. Il s’agit pourtant d’un domaine très vaste, comprenant l’élaboration des plans de prévention des risques d’inondation, la protection des captages, la gestion des nappes phréatiques et des zones humides, etc. Là encore, nous avons privilégié la notion de chef de file, jugeant que toutes les régions, en raison de leurs différences, n’agiraient pas de la même façon en ce domaine. Les intercommunalités auront toutefois la possibilité d’exercer cette compétence dans le cadre du plan local d’urbanisme intercommunal.

Le texte remet également à l’ordre du jour les établissements publics fonciers régionaux, qui deviennent obligatoires, afin de répondre à la menace qui pèse sur notre indépendance alimentaire. Notre urbanisme est en effet marqué par l’extension continue des villes, des bourgs, des villages : si l’on fait la somme de tous les mètres carrés sur lesquels les plans locaux d’urbanisme autorisent à construire, il serait possible de loger l’équivalent de deux fois la population française ! De plus en plus de terres agricoles sont sacrifiées, ce qui pose un gros problème, les mètres carrés agricoles étant aussi précieux que les mètres carrés urbains ou portuaires, par exemple.

Pour assurer notre sécurité alimentaire, nous aurons besoin, en 2050, de 0,8 hectare par habitant, contre 0,5 hectare aujourd’hui. Dès 2030, on peut s’attendre à des problèmes d’approvisionnement en protéines végétales destinées à être transformées en protéines animales. Certains pourront juger qu’il s’agit plutôt d’une bonne nouvelle, mais il n’en demeure pas moins que si nous voulons préserver notre indépendance alimentaire et contribuer à celle de l’Europe, nous devons protéger nos terres agricoles.

Les établissements publics fonciers régionaux aideront les communes à récupérer des friches dans les bourgs et villages – anciens commerces, presbytères – comme dans les villes, petites ou grandes. Il faut limiter la création de lotissements au profit de la réhabilitation des centres bourgs, et en finir avec cette urbanisation folle qui entraîne la juxtaposition de bourgs vides, dont les volets sont clos et les façades en ruine, et de lotissements dans lesquels la vie est rythmée par d’incessants allers et retours entre domicile et lieu de travail ou d’étude.

C’est pour répondre à cette exigence de réappropriation de l’espace que nous souhaitons généraliser le plan local d’urbanisme intercommunal, la délivrance des permis de construire restant de la compétence du maire. Je sais que les élus locaux sont réticents – c’est d’ailleurs l’un des points du projet qui, lors de mes déplacements dans les territoires, ont suscité les débats les plus vifs. Il est en effet aussi difficile et coûteux d’élaborer un plan local d’urbanisme (PLU) que de dessiner un schéma de cohérence territoriale (ScoT) : dans les deux cas, la collectivité ne dispose pas nécessairement de l’ingénierie adéquate et doit faire appel à un des nombreux bureaux d’études qui fleurissent dans notre pays.

Une première réponse réside dans la simplification. Nous avons d’ailleurs demandé à Cécile Duflot de faire des propositions dans ce domaine, notamment pour ce qui concerne les permis de construire, car notre pays connaît un record de contentieux sur les opérations d’urbanisme, quelle qu’en soit la nature. Mais nous avons aussi un vrai travail à accomplir sur les PLU et les SCoT.

S’agissant du PLU intercommunal, je suis donc consciente de l’hostilité des maires, mais j’espère qu’au fil des discussions, et avec le témoignage des collectivités dans lesquelles ce système fonctionne bien, elle pourra finalement être surmontée.

D’une manière générale, le texte consacre la montée en puissance des intercommunalités par rapport aux communes. Une telle évolution peut être inquiétante pour les maires, mais elle me paraît indispensable. Quand une commune ne compte qu’une centaine d’habitants, elle ne peut pas assumer les frais de fonctionnement d’une école, ni d’ailleurs d’aucun autre service. Certaines communes n’ont contracté aucun emprunt, ne supportent aucune dette, parce qu’elles n’offrent aucun service. Je ne pense pas qu’il faille les supprimer, car les Français sont attachés à leur village et revendiquent souvent plus volontiers une identité très locale qu’une identité régionale. Mais les conserver implique nécessairement de renforcer l’intercommunalité.

Il est dès lors logique de renforcer le domaine de compétence intercommunale. J’ai parlé de la transition énergétique et de certaines compétences obligatoires. Leur confier l’assainissement, comme j’ai prévu de le faire, peut être l’objet de discussions : de nombreux maires ont organisé des regroupements beaucoup plus larges que le périmètre de leur intercommunalité pour assurer cette fonction.

Il est en tout cas essentiel de favoriser la mutualisation des services. S’il y a une critique à adresser aux élus locaux, ce n’est pas d’avoir fait preuve de laxisme, de gabegie ou d’incompétence – je récuse ce genre de discours – mais peut-être d’avoir transféré des compétences, et non des services. Il existe d’ailleurs moins d’une dizaine d’intercommunalités intégrées en France, comme Strasbourg, Brest ou Annonay. Pour notre part, nous ne réclamons pas une intégration totale, mais au moins la mutualisation des services, compétence par compétence.

C’est pourquoi, même si le volet financier de la réforme n’est pas inclus dans ce projet de loi – il nous faudra, je crois, deux projets de loi de finances pour le prendre en compte –, il me paraît d’ores et déjà nécessaire de prévoir deux innovations.

La première est la prise en compte de la préservation des mètres carrés protégés dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement, qui devrait être consacrée dans le projet de loi de finances pour 2015. En effet, une commune qui rend une zone inconstructible pour préserver des terres agricoles, un périmètre de captage ou une zone Natura 2000 perd du même coup une ressource, celle que représenterait le produit de la taxe d’habitation correspondant aux maisons qui auraient pu être construites. C’est pourquoi il convient de valoriser, au nom de l’intérêt général, le fait de rendre la terre inconstructible.

Mme Geneviève Gaillard. Absolument !

Mme la ministre. La deuxième est l’instauration d’un coefficient de mutualisation des services pour le calcul de la dotation d’intercommunalité, dans la mesure où nous prenons déjà en compte la pression fiscale et le revenu moyen par habitant. Là encore, la disposition sera effective dans le projet de loi de finances pour 2015. Alors que l’état de nos finances publiques ne nous permet plus de distribuer les carottes comme nous l’avons fait dans le passé, une telle mesure paraît être le seul moyen de favoriser la mutualisation des services sur les compétences déjà transférées.

D’une façon générale, je pense d’ailleurs qu’il faut donner plus d’importance à la péréquation verticale. La péréquation horizontale, c’est l’enfer : il y a une disproportion entre le nombre d’heures de débats qu’elle requiert et le montant des enveloppes redistribuées. Il ne faut donc y recourir que pour assurer la solidarité entre les territoires.

J’en viens aux départements, dont je lis partout qu’il faudrait les supprimer.

M. Martial Saddier. On le dit surtout à votre gauche !

Mme la ministre. M. Jean-François Copé n’a pas rejoint le Parti communiste français, que je sache : il a pourtant très récemment proposé la suppression de cet échelon territorial.

M. Laurent Furst. S’il l’a dit, on le condamne… (Sourires)

Mme la ministre. Dans un entretien publié hier dans Les Échos, François Fillon a d’ailleurs fait de même, allant même jusqu’à préconiser la fusion des communes et des communautés de communes.

La nécessité de supprimer l’échelon départemental, c’est un cliché, véhiculé notamment par la presse. Pour ma part, j’ai voulu éviter tout a priori et vérifier la validité de cette affirmation.

Je constate tout d’abord que des allocations de solidarité aussi essentielles pour la vie du pays que le revenu de solidarité active ou les prestations attribuées aux personnes âgées ou handicapées sont prises en charge, à hauteur de 70 % de leur montant total, par les conseils généraux. Si nous supprimons les départements, nous devons donc nous poser la question de savoir qui en assurera le versement. Si c’est l’État, il faudra les financer par une augmentation de l’impôt sur le revenu ou de la CSG, ce qui augure des débats complexes. En outre, compte tenu du niveau de la première tranche d’imposition, cela reviendrait à exonérer une grande partie de la population qui, actuellement, participe – même pour une petite part – à la solidarité nationale via la taxe d’habitation.

Et si le versement doit être assuré par les intercommunalités, par exemple, sur quels critères s’opérera la répartition des crédits ? Nul ne le sait. Le nombre de personnes âgées ou handicapées en année n ? Ces chiffres sont appelés à évoluer en permanence.

Ensuite, que va devenir le patrimoine des départements, qu’il s’agisse du passif – emprunts contractés pour la construction de collèges ou de systèmes routiers, aides aux petites entreprises – ou de l’actif – une criée, par exemple ? À qui faudrait-il transférer un port de plaisance : à la commune sur laquelle il est installé, ou à l’une ou l’autre des intercommunalités qui en tirent bénéfice ? Je n’ai pas de réponse à toutes ces questions. Pour parvenir à les résoudre, il faudrait sans doute deux ou trois ans de travail et de négociations. Or, en période de crise économique, nous avons besoin de gagner du temps, pas d’en perdre.

De plus, l’étude réalisée en 2009 pour l’Association des départements de France montre que le transfert des personnels départementaux coûterait, dans un premier temps, 6 milliards d’euros sur l’ensemble du territoire français, dans la mesure où il faudrait réaligner tous les régimes indemnitaires. Le retour sur cette dépense n’interviendrait qu’au bout d’une dizaine d’années. De la même façon, la fusion entre Lyon et une partie du conseil général du Rhône coûtera plus cher dans un premier temps ; ce n’est qu’au bout de quelques années que l’on pourra observer une diminution des dépenses. La ville peut se le permettre, parce qu’elle est en bonne santé économique, mais on ne peut en dire autant de l’ensemble de la France.

C’est pourquoi je ne propose pas la suppression de l’échelon départemental. Au contraire, en plus de la fonction essentielle qu’il assume en matière de cohésion sociale, nous souhaitons lui faire jouer un rôle en matière de cohésion territoriale, ce qui lui sera plus aisé qu’à la région. Compte tenu des difficultés que connaît l’ATESAT, l’assistance technique fournie par l’État aux collectivités pour raisons de solidarité et d’aménagement du territoire, et de l’existence dans de nombreux départements de conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement – CAUE – ou d’agences spécialisées, telles que les agences d’urbanisme, il paraît naturel que les départements soient chargés d’assurer la cohésion et l’aménagement des territoires.

C’est d’ailleurs ainsi qu’il faut entendre l’expression « aménagement numérique » dans le projet de loi. Celle-ci ne renvoie pas aux grandes infrastructures, comme les réseaux de fibre optique, car selon moi, de tels aménagements doivent être réalisés à l’échelle régionale. Leur utilisation doit d’ailleurs être soumise à des péages, de façon à pouvoir financer les travaux d’adaptation rendus nécessaires par le développement technologique. De ce point de vue, nous devons tirer les leçons de la vente des concessions d’autoroute : ceux qui l’ont décidée hier admettent aujourd’hui qu’elle fut une erreur, parce qu’elle a privé notre système ferroviaire de la source de financement représentée par les péages.

En fait, l’aménagement numérique concerne plutôt le raccordement de la dernière maison du village le plus éloigné d’un nœud de connexion, là où l’opérateur privé n’ira jamais. Les départements sont déjà les collectivités qui participent le plus à ces dépenses ; nous souhaitons qu’ils poursuivent dans ce sens.

Je finirai par une question qui a fait beaucoup débat, celle du tourisme. Cette activité économique concerne tout le monde : il existe des comités régionaux, départementaux du tourisme, des offices communaux et intercommunaux de tourisme, etc. Le conseil régional souhaitera sans doute conserver une part de compétences en la matière – par exemple pour ce qui concerne l’image de la région ou les relations internationales. Cela fera probablement partie des éléments discutés dans le cadre du pacte de gouvernance territoriale, mais nous avons souhaité attribuer la compétence générale aux départements, dont certains, aujourd’hui, font plus que les régions en ce domaine, jusqu’à être identifiés comme des « objets touristiques ». Quant aux offices de tourisme, ils doivent devenir intercommunaux, car la multiplication de leur nombre est source d’importantes dépenses. Nous tenons tous à nos jolis petits prospectus, mais quel sens peuvent-ils bien avoir vus de Tokyo, de Shanghai ou de Singapour ? De plus, il est difficile pour une petite structure de développer un site internet ou d’attirer l’attention des grands voyagistes. Le tourisme est une forme d’industrie !

Il convient aussi d’accorder une place plus importante – et dans ce domaine, les départements ont un rôle à jouer – à ce que l’on a toujours – mal – appelé le « tourisme social », c’est-à-dire le tourisme s’adressant à des gens disposant de peu de moyens. Ce secteur peut connaître un développement comparable à celui de l’économie sociale et solidaire.

Sur ce dernier sujet, le projet de loi ne contient aucune disposition, dans la mesure où un texte consacré à l’économie sociale et solidaire sera présenté par Benoît Hamon au second semestre. Mais je suis persuadée que les coopératives, les mutuelles et les grandes associations représentent un énorme potentiel économique. Il existe des coopératives agissant dans la haute technologie, des associations présentes dans la recherche. La négociation du pacte de gouvernance territoriale sera donc également l’occasion de désigner un chef de file dans ce domaine.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mme la ministre, j’entends vos arguments au sujet des départements. Néanmoins, nous sommes nombreux à penser qu’il existe, en France, un échelon territorial de trop. Cela ne signifie pas, pour autant, que le problème posé soit facile à résoudre.

En ce qui concerne les finances locales, des réformes importantes ont été votées au cours des dernières années : suppression de la taxe professionnelle, mise en place de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, nouvelle répartition entre les différents niveaux de collectivités territoriales… Ces nouveaux modes de financement ont-ils fait l’objet d’une évaluation précise ?

M. Florent Boudié. Au nom du groupe SRC, je vous remercie, madame la ministre, d’avoir accepté le principe de cet échange. C’est la première fois qu’une commission parlementaire vous auditionne depuis la présentation, le 10 avril, des trois projets de loi sur la décentralisation.

Vous l’avez vous-même souligné, ces textes visent avant tout à améliorer l’efficacité de l’action publique. Dans ce but, vous proposez trois grandes orientations novatrices.

Tout d’abord, et même si vous ne l’avez pas exprimé en ces termes, il me semble que vous avez voulu éviter les transferts massifs de compétences qui ont trop souvent tenu lieu de décentralisation dans notre pays – je pense en particulier à la loi du 13 août 2004. En fait, la logique de défausse de responsabilité qui sous-tendait ces transferts a eu pour effet de brouiller l’image de la décentralisation, au point que ce seul mot a fini par susciter la méfiance voire la défiance des élus locaux. À cet égard, la démarche du Gouvernement semble plus qualitative que quantitative, comme le prouvent vos propos sur la mutualisation des services, un sujet qui personnellement me tient à cœur.

Ensuite – et c’est sans doute l’orientation la plus attendue –, vous essayez de clarifier les compétences, de déterminer qui fait quoi. C’est en effet une nécessité, non seulement pour améliorer l’efficacité de l’action publique, mais aussi – et peut-être surtout – pour en assurer la lisibilité.

Mais la clarification des compétences n’est pas synonyme d’hyperspécialisation. C’est d’ailleurs tout le sens de la réintroduction – encadrée, je le souligne – de la clause de compétence générale pour les départements et les régions, clause qui est au cœur du principe de libre administration des collectivités territoriales de la République.

Vont également dans le sens d’une clarification le fait de pousser plus loin la logique de la collectivité chef de file ou celui de consolider les compétences exclusives des différentes catégories de collectivité – y compris à travers la création des métropoles. Il appartiendra au pacte de gouvernance territoriale de définir, secteur par secteur, les schémas d’organisation destinés à mieux articuler entre elles les compétences locales, y compris sur la question complexe des financements croisés.

Enfin, la troisième orientation novatrice a trait à la méthode employée par le Gouvernement. Le contexte était difficile, puisque chacun a aujourd’hui sa propre idée de ce que doit être une nouvelle étape de la décentralisation. En matière d’organisation territoriale, nous sortons d’une période mouvementée, la révision de la carte intercommunale, parmi d’autres initiatives, ayant longtemps fait « bouillir la marmite » en ce domaine. Quelles que soient nos sensibilités politiques, nous avons alors jugé la méthode, sinon arbitraire, du moins autoritaire. Il me semble que vous en avez tiré les leçons en proposant un processus pragmatique de remise en ordre des compétences locales : la répartition n’est pas imposée « d’en haut », depuis Paris, dans la plus pure tradition jacobine, mais négociée au sein d’une conférence territoriale de l’action publique. L’objectif, on le voit bien, est de nouer le dialogue entre l’État et les collectivités territoriales, et entre les collectivités elles-mêmes. L’idée n’est pas, comme j’ai pu l’entendre, de laisser à ces dernières la responsabilité d’une réforme que l’État ne parviendrait pas à réaliser, mais de trouver des solutions adaptées aux réalités et aux rapports de forces locaux.

Plusieurs questions restent toutefois posées, dont celle, centrale, du décrochage des territoires périurbains et ruraux, auxquels les quartiers dits « difficiles » de nos grandes agglomérations urbaines n’ont parfois rien à envier en termes de précarité. Quelle réponse les trois projets de loi peuvent-ils apporter à ce phénomène, qui touche un très grand nombre de bourgs centres ? Ces derniers, en raison de leur fragilité, peinent à assumer leur rôle structurant au sein de nos territoires. De quels outils faut-il les doter, en complémentarité avec les métropoles ? Quelqu’un a d’ailleurs pu parler de « métropoles rurales » pour indiquer la voie à suivre.

D’autre part, quel équilibre peut-on trouver entre la centralisation excessive qui caractérise aujourd’hui la politique énergétique et une décentralisation qui pourrait perturber les processus de décision ? Comment le débat sur la décentralisation va-t-il croiser celui qui est mené sur la transition énergétique ?

Enfin, on ne peut pas envisager d’approfondir la décentralisation sans revisiter la fiscalité locale. Quelles sont les intentions du Gouvernement en ce domaine ?

M. Martial Saddier. Madame la ministre, les députés du groupe UMP sont très largement favorables à la décentralisation et n’ont donc pas d’a priori négatif à l’égard de vos projets. Nous vous sommes reconnaissants aussi d’avoir exprimé votre confiance à l’égard des élus locaux et d’avoir exposé ces projets sans critiquer les gouvernements précédents. Personnellement, j’étais d’ailleurs plutôt rassuré par le fait qu’on vous ait confié ce travail !

Je nourris néanmoins quelques inquiétudes sur la cohérence de l’action gouvernementale : comment allez-vous l’assurer alors que votre propos vous a amenée à aborder une vingtaine de thèmes sur lesquels Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement, Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, et M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, ont aussi leur mot à dire et leurs projets, cependant que les commissions et les comités ad hoc se multiplient ?

Nous notons que vous ne remettez pas en cause la réforme territoriale décidée par la précédente majorité, qu’il s’agisse du bloc constitué par les communes et les communautés de communes, ou des pôles métropolitains. Je pense aussi que nous nous accordons pour ne pas opposer ville et campagne ou pour conserver la notion de zonage. Mais comment allez-vous assurer la péréquation et la solidarité entre les territoires ? Hier, lors d’une table ronde sur les réseaux de transport d’énergie, tous les députés, de gauche comme de droite, se sont prononcés pour que le Parlement, cet automne, réaffirme la nécessité de la péréquation pour garantir un même prix de l’énergie ou du timbre-poste sur tout le territoire, mais comment faire jouer concrètement ce principe en faveur des collectivités qui vont « sanctuariser » une partie de leurs terres pour assurer l’alimentation en eau potable et en nourriture de l’ensemble du pays et pour préserver la biodiversité ? Comment, également, faire en sorte que les schémas régionaux n’entraînent pas une mise sous tutelle des autres collectivités territoriales ? Ce sujet nourrit des inquiétudes que je crois légitimes. Il ne s’agit pas de remettre en cause ces schémas, mais de veiller à ce qu’ils soient élaborés de manière concertée.

Se pose aussi la question du maintien des services de l’État : que va-t-il en être des sous-préfectures ?

Vous vous êtes attardée sur le cas de Paris, de Lyon et de Marseille, mais il ne faudrait que ce modèle s’impose à tous les pôles métropolitains – ce ne serait pas de mise, s’agissant par exemple des pôles transfrontaliers.

Enfin, sachant les difficultés que nous avons nous-mêmes rencontrées pour la mise en place des commissions et des schémas de coopération intercommunale, quelle stratégie allez-vous adopter pour que la loi qui sera votée soit bien appliquée conformément à la volonté du législateur ?

M. Bertrand Pancher. En matière environnementale, il n’y a, me semble-t-il, que quatre actions à mener en direction des collectivités locales : clarifier leurs compétences ; redéfinir leur rôle en relation avec celui de l’État, qui ne peut plus tout faire ; préciser les modalités d’application de la loi et la façon dont cette application sera contrôlée ; revoir, enfin, les grands schémas régionaux, aujourd’hui trop nombreux. Sur ces quatre thèmes, où allons-nous ?

Les trois projets que vous nous avez présentés ne sont qu’une partie d’un puzzle où devront trouver place les lois à venir, sur la transition énergétique, sur l’urbanisme, sur les transports… Faute d’une loi d’ensemble sur la décentralisation, il aurait été judicieux qu’un premier texte définisse les grandes orientations en la matière. Faute d’une vision globale, la confusion est grande en effet du côté des collectivités comme des grandes organisations environnementales – ce matin même, un représentant de France Nature Environnement m’a affirmé que les « allers retours » sur ce projet d’acte III de la décentralisation avaient été si nombreux que son association avait cessé de s’y intéresser ! Je souhaite donc que le Gouvernement nous donne rapidement une vue claire de ses orientations.

Ainsi, il faut éviter d’exclure les communes de la production d’énergie : il convient au contraire d’encourager une production décentralisée, par des acteurs locaux qui doivent, comme en Allemagne, être responsabilisés. Pour ce qui est de la distribution, il faut clarifier la position de l’État, qui affirme vouloir favoriser les économies d’énergie mais qui perçoit des revenus élevés en tant qu’actionnaire majoritaire d’EDF. Il faut également généraliser les critères d’efficacité énergétique dans tous les domaines : ils doivent notamment s’imposer dans les documents d’urbanisme. S’agissant de la planification, toutes les collectivités locales devraient être associées à l’élaboration des schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE). Enfin, le financement de la décentralisation énergétique supposera obligatoirement une composante territoriale.

Nous sommes bien sûr prêts à travailler avec vous sur ce sujet comme sur bien d’autres, mais j’insiste sur la nécessité d’une vision à la fois globale et précise des intentions du Gouvernement.

M. François-Michel Lambert. La suppression des départements nécessiterait un débat long et complexe et engendrerait un surcoût de 6 milliards d’euros par an avant tout retour sur investissement, avez-vous fait valoir. Le groupe écologiste, pour sa part, entend depuis toujours voir les régions renforcées, et souhaite donc qu’une réflexion soit engagée sur les moyens d’alléger notre mille-feuille institutionnel, source de rigidités de toutes sortes et handicap pour notre économie.

Dans cet esprit, je ne puis m’empêcher de remarquer que, dans votre exposé, vous avez mis en avant le rôle des régions, des métropoles et des intercommunalités, plutôt que des départements, dans les enjeux d’avenir, qu’il s’agisse des transports, de l’urbanisme ou de l’énergie. Le schéma directeur national de la logistique, dont l’Assemblée va très prochainement voter le principe, s’articulera de même entre la région, l’intercommunalité et les métropoles ; ces mêmes acteurs locaux s’inséreront dans les flux économiques territoriaux que promouvra la future loi-cadre sur l’économie circulaire. Comme le département semble décidément voué à devenir spectateur plus qu’acteur, ne pourrions-nous réfléchir au transfert de certaines de ses compétences – comme la gestion des collèges et d’une partie des routes – à d’autres collectivités ?

Dans les Bouches-du-Rhône, 109 maires sur les 119 concernés ont signé un manifeste hostile au projet de métropole Aix-Marseille-Provence. Une véritable guerre de tranchées s’est engagée entre des acteurs qui nouent des alliances fluctuantes et se vilipendent. La concertation sera donc difficile alors même qu’il n’y a aucun doute sur la volonté du Gouvernement de mettre ce territoire à même de surmonter ses difficultés et de valoriser ses atouts. Ne conviendrait-il pas d’organiser un débat public pour apaiser les tensions et rapprocher les points de vue, quitte à perdre quelques années dans la réalisation de la métropole ?

M. Olivier Falorni. Nous accordons, mon collègue Jacques Krabal et moi, une grande importance à l’application dans les territoires des dispositifs relatifs au contrôle de la qualité de l’air, à la biodiversité et à la transition énergétique.

Les articles 12 et 13 de votre projet de loi visant à engager la transition écologique et énergétique, à favoriser l’intégration communautaire et à renforcer la démocratie locale transforment les autorités organisatrices des transports urbains en « autorités organisatrices de la mobilité urbaine » (AOMU). L’objectif que cache cette évolution sémantique est louable, puisqu’il est de réduire l’empreinte environnementale des déplacements. À ce titre, les AOMU pourront développer les usages partagés de l’automobile et proposer des vélos en libre-service. Le projet est ambitieux, mais il pourrait l’être encore davantage si l’on adoptait une approche moins sectorielle de la compétence transport, en vue de définir des périmètres cohérents pour les plans de déplacements urbains.

Pour les collectivités territoriales, il s’agit en effet davantage d’élaborer des politiques cohérentes en la matière que de financer de nouvelles infrastructures. Mais les enjeux financiers sont de taille. Le versement transport, qui représente en moyenne 48 % des recettes des collectivités dans ce domaine, ne suffit plus à financer l’investissement, l’exploitation des réseaux de transports collectifs urbains et les programmes de mobilité durable. Cette ressource, dont le produit a augmenté de 50 % entre 2000 et 2010, a atteint son taux plafond dans 75 % des agglomérations, de sorte que les marges de progression sont très limitées. Absentes du projet de loi, la décentralisation et la dépénalisation du stationnement de surface, accompagnées d’une modulation du tarif et des amendes du stationnement sur voirie en fonction des zones géographiques du périmètre de transport urbain, mais aussi en fonction des solutions de mobilité alternatives à la voiture particulière, pourraient garantir un transfert modal plus efficace et permettre aux collectivités de mieux contrôler les recettes tirées de ce stationnement. Êtes-vous disposée, madame la ministre, à ouvrir cette possibilité sur l’ensemble du territoire national, comme l’a fait le Premier ministre pour le Grand Paris ?

L’article 16 du projet de loi institue une compétence communale de gestion des milieux aquatiques pour lutter contre les inondations : pourquoi n’avez-vous pas retenu l’échelon intercommunal, les bassins versants et les cours d’eau ne s’arrêtant pas aux limites des communes ?

Sur un sujet proche, qui concerne également ma circonscription fortement touchée par la tempête Xynthia en 2010, l’article 17 proroge de dix ans la gestion des digues par l’État pour le compte des communes, mais envisagez-vous d’opérer un transfert de ressources après ce délai ?

Mme Geneviève Gaillard. Dans les territoires urbains dépourvus de métropole, les réseaux de villes peuvent se révéler utiles : de quelle péréquation pourraient-ils bénéficier ?

Les régions cesseront-elles d’être la collectivité chef de file en matière de gestion des écosystèmes – expression qui me semble préférable à celle de gestion de la biodiversité ?

Enfin, toutes les communes ne se sont pas dotées d’une fourrière pour animaux ou n’ont pas adhéré, comme elles y sont obligées à défaut, à la fourrière d’une commune voisine. Ne pourriez-vous insérer dans le projet de loi une disposition qui les contraindrait à provisionner pour faire face à cette charge ? (Sourires)

M. Claude de Ganay. Le projet de loi risque d’engager la responsabilité financière des collectivités en cas de sanctions infligées par les juges européens pour des infractions à la réglementation environnementale. En effet, il consacre les prérogatives des communes en matière de pollution de l’air et confie aux communautés de communes et aux métropoles la gestion des milieux aquatiques : deux sujets qui ont valu à la France d’être traînée en justice par l’Union européenne en février 2011 – pour sa gestion de la qualité de l’air – et en février 2012 – pour les taux excessifs de nitrates dans l’eau.

Madame la ministre, que se passera-t-il si une collectivité entreprend des investissements sans intégrer dans son cahier des charges les dispositions environnementales contenues dans les directives européennes, mais non encore transposées en droit français ? Comment se répartira le paiement des amendes entre l’État et les collectivités locales ?

M. Laurent Furst. Je tenais à remercier le Gouvernement pour le soutien qu’il a apporté aux partisans du « oui » au référendum sur la fusion des deux départements alsaciens.

Nous devons tirer les leçons de ce scrutin : le « oui » a recueilli 57 % des suffrages sans que soit atteint le seuil de 25 % des inscrits. Celui-ci apparaît hors de portée pour une consultation isolée de la sorte, comme le confirment les constats que nous pouvons faire à chaque élection législative partielle. D’autre part, il semble difficile de mobiliser les citoyens en faveur d’un principe dont ils ignorent comment il se traduira concrètement, puisqu’il appartiendra au Parlement de statuer sur le projet qui en définira les modalités d’application. Dans l’intérêt d’autres projets de fusion, il convient de lever ces obstacles !

M. Alain Calmette. La métropolisation ne doit pas surtout pas se traduire par un creusement du fossé, réel ou ressenti, entre territoires ruraux et zones urbaines. Pour l’éviter, sans doute faudrait-il favoriser la constitution d’intercommunalités suffisamment importantes pour atteindre une taille critique.

La contrepartie de la clause de compétence générale étant la désignation de chefs de file, je plaide pour que ceux-ci soient clairement perçus comme tels par la population concernée. Il me semble également que le sport et la culture pourraient entrer dans les compétences relevant de ce régime.

L’introduction d’un coefficient de mutualisation des services pour les intercommunalités me semble une bonne idée, et je souhaite qu’il soit aussi élevé que possible.

Enfin, beaucoup de départements ruraux se plaignant des conditions dans lesquelles ils peuvent bénéficier de la péréquation horizontale cette année, ne pourrait-on revoir pour 2014 les critères d’éligibilité au fonds d’urgence ?

M. Michel Heinrich. Je regrette le saucissonnage de la loi initialement prévue en trois textes, car il nuit à la définition d’une vision globale et cohérente. En outre, alors qu’on présentait l’acte III de la décentralisation comme la réforme du quinquennat, le projet me semble manquer de souffle !

Je crois à la décentralisation, mais aussi à la nécessité d’un État fort et les modalités que vous avez prévues pour la délégation de compétences me conviennent à cet égard. En revanche, les conférences territoriales de l’action publique ne risquent-elles pas de brouiller la perception qu’auront nos concitoyens de la répartition des compétences ? Ne vont-elles pas aussi entraîner une augmentation des financements croisés ?

Les avantages du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) sont indéniables, mais il ne constitue pas selon moi l’outil pertinent pour limiter la consommation d’espaces et pour conforter les bourgs-centres ; à cet égard, je crois davantage aux vertus du ScoT, qui couvre une zone plus large.

Enfin, vous n’avez pas du tout évoqué les pays : quelle place comptez-vous leur faire ?

M. Jean-Jacques Cottel. Quels financements seront alloués aux territoires qui ne comportent pas de métropole ? Quel rôle le département peut-il jouer en matière de solidarité dans le cadre de la clause générale de compétence ?

Quels moyens de fonctionnement seront donnés aux autorités organisatrices de transport scolaire, notamment en milieu rural, sachant que les plus petites intercommunalités ne pourront pas devenir des autorités organisatrices de transport (AOT) ?

Il convient d’élaborer des plans ambitieux d’élimination des déchets et d’harmoniser les pratiques dans ce secteur, mais à quel niveau élaborer ces plans : à celui du département ou à celui de la région ?

M. Rémi Pauvros. La crise économique accentue les fractures territoriales, ce qui oblige à une réflexion sur la péréquation horizontale, étant entendu que la pauvreté touche autant les zones rurales que les zones périurbaines et urbaines. Il existe certes un ministère de l’égalité des territoires, mais c’est un point dont il faut impérativement tenir compte dans la réforme de la décentralisation.

Dans le projet de loi, quelle est l’articulation entre le schéma national des infrastructures de transport (SNIT) et l’action des collectivités territoriales en matière de transports de proximité : par exemple, comment s’assurera-t-on que l’aménagement d’une ligne à grande vitesse (LGV) sera assorti de la réalisation de gares multimodales, qui suppose la coopération de nombreux partenaires ?

M. Charles-Ange Ginesy. Déposséder les conseils généraux de leurs compétences revient à abandonner la solidarité au bénéfice du monde rural. Cela imposerait pour le moins de prévoir des compensations.

Qui portera les projets de centrales photovoltaïques et d’éoliennes ? Qui financera les initiatives dans ce domaine ?

Enfin, le département me semble être l’échelon approprié pour œuvrer au développement des autoroutes du numérique, d’autant que les conseils généraux en assurent déjà le financement. Malgré les stratégies de cohérence régionale d'aménagement numérique, la région ne me semble pas pouvoir atteindre à la même efficacité.

M. Michel Lesage. Les enjeux liés à l’eau sont multiples : quantité et qualité, lutte contre la pollution, la sécheresse ou les inondations, etc. Je me réjouis donc que ce sujet ait trouvé sa place dans le projet de loi.

Tant comme élu de terrain que comme parlementaire chargé d’une mission d’évaluation de la politique de l’eau auprès de Mme Delphine Batho, je constate la complexité de toute action en ce domaine, du fait de la multiplicité des acteurs et de l’enchevêtrement de leurs compétences. Aussi faut-il saluer la simplification et la clarification auxquelles vous procédez en créant une compétence nouvelle, celle de la gestion des milieux aquatiques, affectée au bloc communes-EPCI, niveau de gouvernance en effet de toute évidence le plus adéquat. Ce choix va d’ailleurs de pair avec votre proposition d’élaborer des PLU intercommunaux, car les politiques de l’eau sont transversales et s’inscrivent dans la quête d’un aménagement du territoire équilibré.

Comment cette nouvelle compétence s’articulera-t-elle avec l’action de l’État et de ses établissements publics, avec celle des autres collectivités territoriales et avec celle de l’Union européenne, telle qu’elle est définie dans le cadre de la politique agricole commune et de la directive cadre sur l’eau ?

M. Guillaume Chevrollier. Ce projet de loi sur la décentralisation aurait pu être l’occasion de diminuer les dépenses publiques en simplifiant le mille-feuille administratif français. Mais cela demandait du courage et vous avez préféré créer une strate supplémentaire en instaurant les métropoles. Reconnaître le fait urbain est certes pertinent, mais la ruralité et ses villes moyennes ne doivent pas être oubliées, ces zones requérant l’établissement d’un cadre de gouvernance simple, lisible et stable.

Vous avez peu évoqué la transition écologique, madame la ministre : la gestion de l’énergie sera-t-elle décentralisée, pour répondre aux demandes des collectivités, soucieuses de plus d’autonomie ? S’il en est ainsi, il faudra veiller à ce que le principe de libre administration des collectivités ne fasse pas obstacle à la nécessité d’une harmonisation au niveau national, qui relève bien sûr de l’État.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la ministre, je partage davantage votre diagnostic que vos préconisations ! Imaginez le citoyen qui cherche à obtenir une réponse sur une question liée à la politique des transports : l’immobilier urbain relève de la commune, le transport public de l’EPCI, le transport scolaire du département, le TER de la région, la LGV de l’État. À cela se rajoutent encore, dans mon département du Jura, les coopérations transfrontalières. Cet enchevêtrement se retrouve dans la politique de l’eau ou pour l’approvisionnement en biomasse. Chacun ne peut que déplorer ce mille-feuille, mais il apparaît bien difficile de dépasser le stade du constat.

Le renforcement de l’intercommunalité épouse le sens de l’histoire, à condition toutefois que ce mouvement ne soit pas conduit au détriment des villages, qui m’intéressent personnellement plus que les communes. En revanche, je persiste à regretter la suppression du conseiller territorial, qui aurait permis de fusionner à terme départements et régions. Si on attend l’unanimité pour agir, rien ne sera fait, jusqu’au jour où entre département et région, il faudra bien choisir !

M. Jean-Pierre Vigier. Même si elles ne leur offrent plus ni services ni école, les petites communes répondent tout de même, grâce aux équipes municipales, à certains besoins de leurs habitants et permettent ainsi le maintien de la vie dans les territoires ruraux. Les communautés de communes, qui mutualisent services et école et qui portent un projet d’aménagement du territoire à leur profit, peuvent travailler en parfaite harmonie et complémentarité avec ce tissu local. Cependant, il importe de trouver un équilibre entre un seuil minimal nécessaire au déploiement des actions des communautés de communes et une superficie suffisamment restreinte pour permettre aux habitants d’avoir rapidement accès aux services.

M. Jean-Luc Moudenc. Dans les grandes agglomérations, il y aura un cumul des compétences en matière d’action économique entre la métropole et la région. Les schémas de développement que vous avez évoqués ne permettent pas une gestion opérationnelle de cette politique. Comment comptez-vous résoudre cette difficulté ?

Le conseil municipal de Paris est également le conseil général du département et votre projet pour Lyon s’inspire en partie de ce modèle. Pourquoi ne pas étendre la même organisation aux dix ou douze plus grandes métropoles françaises ? 

Quelle règle proposerez-vous pour définir le périmètre géographique des métropoles sur le territoire desquelles cohabitent plusieurs intercommunalités ?

Mme la ministre. Nous avons installé un groupe de travail sur le financement des allocations de solidarité réunissant les départements et l’État ; on y réfléchit à des assiettes fiscales nouvelles. Parallèlement, nous préparons une projection concernant l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), dont une part importante du produit revient aux régions. Cette réflexion et ces simulations n’étant pas achevées, le projet de loi n’intègre pas la réforme de la fiscalité locale, d’autant que certains préalables, comme la possibilité ou non d’un rapprochement entre impôt sur le revenu et CSG, ne sont pas levés.

Il faut à la fois renforcer la péréquation verticale – portée par la dotation globale de fonctionnement (DGF) – et maintenir la péréquation horizontale qui assure la solidarité entre les territoires. Comme la péréquation est aujourd’hui insuffisante, nous avons créé un fonds spécifique pour la région Île-de-France – que nous souhaitons doter de 60 millions d’euros – et nous avons conservé ce que la précédente majorité avait mis en place. L’évolution de la DGF doit prendre en compte la question des terrains rendus inconstructibles par des dispositions d’intérêt général dans les communes rurales. Nous soumettrons des propositions au Parlement afin que les assiettes fiscales nouvelles soient élaborées au plus tard pour le projet de loi de finances de 2015. Il y a notamment lieu de régler la question du transfert : si une région, disposant d’une ressource particulière, demande une délégation spécifique, le transfert concerne-t-il la ressource ou l’assiette fiscale ? Mais, dans le cas de l’eau, comment déterminer une assiette, sauf à imposer un prélèvement sur chaque mètre cube ? D’où la nécessité de simulations très précises, pour éviter les déboires rencontrés avec la CVAE. Mais, le moment venu, nous constituerons des groupes de travail thématiques auxquels je vous invite à vous joindre, dans un esprit transpartisan…

Monsieur Florent Boudié, il nous faut en effet renouer les liens de confiance que la réforme de 2004 a rompus. Cette année-là, la région a cessé d’être un échelon de mission pour devenir une administration gérant des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) – en Bretagne par exemple, le nombre d’agents placés sous l’autorité de la région est passé de 1 500 à 7 500, ce qui a engendré des besoins en matière de fonctions supports et des difficultés liées à la distance entre le chef-lieu régional et les cités scolaires. Cette évolution, non prévue par le projet de loi, fut une erreur. Nous devons donc effectuer le mouvement inverse et ramener les régions vers une activité centrée sur la conduite de projets en ne leur transférant aucune tâche de gestion supplémentaire. Elles pourront par exemple participer aux réflexions menées par le nouveau commissariat général à la stratégie et à la prospective sur les filières économiques et sur les coopérations internationales.

La France ne possède pas l’exclusivité du mille-feuille : la Suède, par exemple, emploie 140 fonctionnaires pour 1 000 habitants – contre 90 en France –, percevant des salaires bien supérieurs à ceux pratiqués dans notre pays, pour, entre autres choses, animer 400 agences indépendantes chargées de la conduite des politiques publiques. Le modèle n’est donc pas là…

En revanche, nous pouvons clarifier ! Nous proposons au Parlement qu’on ne puisse pas autoriser de cofinancement sans signature de pacte de gouvernance. En l’absence d’entente, le chef de file s’imposera, ce qui revient à reconnaître un principe de compétence exclusive. Cette réforme pourrait certes être jugée contraire à la libre administration des collectivités territoriales, garantie par la Constitution, mais une telle règle permettrait de développer la confiance et d’adapter les règles d’organisation à chaque région. Il me semble plus intéressant pour les élus d’élaborer des pactes de gouvernance plutôt que de suivre des directives qu’on leur imposerait.

La loi du 16 novembre 2010 conférait au préfet le dernier mot sur le schéma départemental de coopération intercommunale, ce qui a heurté les élus. Il aurait été préférable de donner le pouvoir de décision à la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), quitte à prévoir éventuellement la possibilité de former un recours. Cela étant, ce qui est fait est fait.

La réponse au décrochage des territoires, sujet important, ne se limite pas à la solidarité fiscale. La création des aires métropolitaines permettra de développer la solidarité à l’intérieur du territoire concerné – Lyon constitue un exemple de réussite de cette politique, des zones rencontrant de grandes difficultés se portant dorénavant beaucoup mieux –, mission que le département assurera également pour les autres territoires, notamment ruraux. L’État peut travailler avec les départements pour les zones rurales et avec les régions pour les zones urbaines, même s’il faudra gérer les frictions entre la fonction publique d’État et la fonction publique territoriale pour la répartition des tâches.

La loi définira le contenu des compétences en matière de transition énergétique, ce texte se bornant à prévoir que les intercommunalités et les régions en recevront la responsabilité. Nous aurions pu tout écrire dans le projet – option que nous avons suivie pour la formation professionnelle et pour une partie des transports –, mais il aurait été beaucoup trop volumineux, si bien que nous avons préféré scinder l’identification des compétences et la définition de leur contenu.

Monsieur Martial Saddier, il est normal de nourrir des inquiétudes – je les partage d’ailleurs – quant à la cohérence de la politique que nous mettons en œuvre. Néanmoins, nous devrions parvenir à les lever si nous définissons précisément les contours des conférences territoriales de l’action publique et du pacte de gouvernance, si nous encadrons les cofinancements et si nous dépassons une fois pour toutes l’opposition entre les villes et les campagnes. Les amendements joueront un rôle éminent pour enrichir le texte sur ces points – je souhaite d’ailleurs qu’ils soient transmis aux présidents des commissions parlementaires à mesure que nous les recevons. Le débat parlementaire pourrait, par exemple, déboucher sur la création des pôles de développement ruraux, idée que défendent certains sénateurs et pour laquelle j’ai moi-même plaidé avant d’occuper ces fonctions.

Le risque de tutelle des schémas régionaux sur l’action des autres collectivités territoriales existe, mais tout schéma local a vocation à s’imposer et comporte donc ce danger – je pense notamment aux SCoT votés par un pays ou par une intercommunalité. Je souhaite que la conférence des exécutifs permette de saisir chacune des instances délibérant sur les schémas : cela allonge certes la procédure, mais cela permet d’avancer des propositions sur leur contenu. À plus long terme, nous devrons aboutir à la fusion des différents schémas régionaux – de développement économique, de l’éolien, de l’énergie entre autres – en un seul schéma régional d’aménagement du territoire.

J’ai proposé à M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur, de ne fermer que des sous-préfectures situées en milieu urbain, car plus personne ne s’y rend. En zone rurale, nous proposons en revanche d’y rassembler des services de différents ministères pour créer des maisons des services de l’État, ouvertes aux usagers, aux élus, aux entrepreneurs et à tous ceux qui en auraient besoin. Cette évolution générerait des économies d’immobilier et de déplacements. Nous conduirons rapidement des expérimentations en ce sens dans quelques arrondissements.

La réforme ne prévoit pas la suppression des pôles transfrontaliers de Nice, de Strasbourg et de Lille, et des études sur l’opportunité d’en créer de nouveaux sont même conduites. Le texte définit un cadre général dans lequel d’autres territoires entreront s’ils le souhaitent.

Monsieur Bertrand Pancher, à l’occasion de la présentation du projet de loi, je dresserai la liste des missions de l’État qui ne peuvent être transférées, afin de distinguer les missions régaliennes des missions de service public. Les premières peuvent être déléguées, mais non transférées.

Monsieur François-Michel Lambert, je n’ai pas le temps d’organiser un débat public avec les collectivités territoriales sur la métropole d’Aix-Marseille-Provence, si bien que cette discussion doit se tenir entre elles, à l’image de la centaine de rencontres organisées par les élus pour le projet de Paris Métropole. En outre, les maires n’ont pas participé à la seule séance publique à laquelle j’ai participé, préférant organiser une manifestation à l’extérieur de la salle !

M. Martial Saddier. Venez chez nous, vous serez mieux accueillie !

Mme la ministre. Nous maintenons notre projet, car celui proposé par certains élus est trop compliqué puisqu’il repose sur la création d’un établissement public opérationnel de coopération (EPOC), situé au-dessus des EPCI et chargé des questions de logement, de transport et de développement économique.

Les problèmes diffèrent selon que les régions comptent deux ou douze départements ; sans cette hétérogénéité, on aurait pu depuis longtemps engager la fusion entre région et département. Je reste opposée au conseiller territorial, qui aurait dû se déplacer en permanence, certains chefs-lieux régionaux étant éloignés de 300 kilomètres de villes importantes de la région. La création de ce nouvel élu ne me paraît pas plus viable que la disparition des départements, qui poserait des problèmes insolubles, d’où mon refus d’y procéder. Quant à ceux qui se déclarent pour la suppression du département – vous, monsieur Lambert, M. François Fillon, des familles politiques entières –, je les invite instamment à m’indiquer comment ils comptent la réaliser. Pour ma part, je ne sais pas faire !

La production d’énergie ne sera pas confiée aux régions, mais la loi sur l’énergie devrait leur octroyer davantage de responsabilités en la matière.

Les régions pourraient transférer la gestion de lycées aux départements pour constituer des cités scolaires avec les collèges – ou les départements pourraient concéder la gestion de collèges aux régions –, mais c’est aux élus de se saisir de cette question.

Un amendement parlementaire insérant dans le texte la décentralisation et la dépénalisation du stationnement de surface – souhaitées par M. Olivier Falorni – recueillerait notre soutien. De même, nos positions sur la mobilité durable sont proches et convergeront facilement.

En revanche, dans le cadre des plans de prévention des risques naturels, la fin de la période de gestion des digues par l’État pour le compte des communes ne s’accompagnera pas de transferts de ressources pour prévenir de nouvelles inondations.

Je suis d’accord avec Mme Geneviève Gaillard pour que les réseaux de villes bénéficient de péréquations.

Le projet de loi ne traite pas de la gestion des écosystèmes, car la position du Gouvernement n’est pas encore arrêtée sur le sujet. La biodiversité a été affectée aux régions et la gestion des milieux aquatiques aux intercommunalités, mais si l’on est capable de mieux définir la politique globale de gestion des écosystèmes, la conférence territoriale de l’action publique pourra s’en saisir.

Monsieur Claude de Ganay, toute compétence transmise entraîne le transfert de la responsabilité juridique dans le domaine concerné : c’est déjà le cas des fonds structurels pour les régions. S’agissant de la pollution de l’air, nous discutons avec M. Janez Potočnik, commissaire européen à l’environnement, afin que seule une obligation de moyens – par exemple ne pas acquérir un parc de bus roulant au diesel – pèse sur les collectivités, sans obligation de résultat.

Contrairement à M. Laurent Furst, il me semble nécessaire qu’au moins 25 % des inscrits acceptent un changement institutionnel. Le département alsacien le moins riche, celui qui souffre le plus – le Haut-Rhin – a rejeté la fusion, alors que le Bas-Rhin y était favorable ; ce résultat est inquiétant, car il met en lumière le risque de repli sur soi que la crise induit.

Le Sénat va probablement instaurer les pôles de développement ruraux, qui équilibreront le poids des métropoles, comme le souhaite M. Alain Calmette.

Le sport et la culture représentent les principaux vecteurs de réduction des inégalités entre les enfants– les plus profondes étant liées à la situation du territoire dans lequel ils naissent –, d’où le maintien de cofinancements dans ces domaines qui doivent continuer de relever du service public. L’importance de ce sujet exige sans doute d’accroître la péréquation au bénéfice des territoires les plus pauvres – ceux-ci ne se situant d’ailleurs pas dans les zones rurales –, sur la base d’indicateurs de développement que nous n’avons pas encore élaborés.

Monsieur Michel Heinrich, mon expérience m’a apporté la conviction que la confiance était une bonne politique : lorsque l’on accorde davantage de responsabilités aux élus, ils entreprennent davantage. Je rencontre beaucoup de présidents d’exécutifs locaux au cours de mes déplacements et la très grande majorité d’entre eux m’apparaissent allants et compétents.

Le débat parlementaire pourrait conduire à l’insertion du pays dans le pôle de développement territorial.

Monsieur Jean-Jacques Cottel, nous n’avons pas réussi à mieux traiter le sujet des AOT en milieu rural, notamment parce que nous n’avons pu proposer aux régions que des versements transport interstitiels – ceux qui sont perçus uniquement en dehors des périmètres de transports urbains – très faibles par rapport au plafond de ce versement ; si vous avez de bonnes idées en la matière, n’hésitez pas à déposer des amendements.

Je ne crois pas au plan régional d’élimination des déchets, d’où le maintien de la compétence de l’échelon départemental, plus pertinent, qui bénéficiera d’une liberté de gestion. Il convient sans doute d’inciter – et non imposer – au renforcement de l’opposabilité des plans de gestion des déchets industriels, afin de régler les problèmes de non-traitement de ces déchets qui subsistent dans quelques endroits du pays ; ce sujet n’entre cependant pas dans le champ de ce projet de loi.

Monsieur Charles-Ange Ginesy, nous sommes d’accord pour reconnaître la compétence du département sur le numérique. Le photovoltaïque n’est pas seulement une énergie renouvelable, il constitue aussi un élément de la politique industrielle. Les conférences territoriales se réuniront tous les cinq ans pour adapter l’action des collectivités au renouvellement permanent des nouvelles technologies ; Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie présentera un projet de loi sur l’énergie qui précisera les modalités de cette intervention.

Monsieur Michel Lesage, j’ai demandé à la région qui souhaite obtenir une délégation en matière de politique de l’eau ce qu’elle voudrait gérer : la ressource, l’alimentation ou la protection du captage ? Elle va mener une expérimentation scientifique qui nous permettra d’avancer dans l’articulation entre la politique agricole commune, la directive-cadre et le deuxième pilier des fonds structurels – en partie du ressort des régions, d’où l’existence d’une cogestion avec l’État du volet dédié à l’eau. Chargé d’une mission d’évaluation de la politique de l’eau, vous allez pouvoir nous aider à mieux définir les contours de la délégation de compétence.

Monsieur Guillaume Chevrollier, je m’étais opposée à l’instauration de la métropole en 2010, en vain – je ne crée donc aucune nouvelle strate –, mais j’utilise cet instrument, car je suis attachée à la continuité de l’État. La conférence territoriale de l’action publique et le pacte de gouvernance territoriale favoriseront l’émergence d’un système simple, lisible et stable, pour reprendre vos propres mots.

S’agissant de la transition écologique, je souscris à votre mise en garde.

Monsieur Jean-Marie Sermier, le schéma régional de transport apportera de la cohérence à une organisation en effet actuellement trop complexe ; cet instrument me paraît le mieux adapté, même si nous étudierons attentivement d’éventuels amendements.

M. Martial Saddier. Vous êtes donc favorable à ce que nous amendions le texte ?

Mme la ministre. Effectivement. Monsieur Jean-Pierre Vigier, j’approuve votre position sur les petites communes. Ne perdons pas de temps à tenter de supprimer les communes de moins de 100 ou de 200 habitants, car nous n’y parviendrons pas. Les intercommunalités incarnent l’avenir, mais le maire – et non le président de l’EPCI – représente l’État et le droit républicain : cette fonction fait partie de notre histoire et il n’est pas opportun de faire disparaître certaines catégories de communes ; néanmoins, certaines fusionneront, même si je ne dispose pas d’enveloppe financière pour encourager ces rapprochements. Si un projet de loi de finances nous octroyait des moyens, nous pourrions favoriser des unions, mais, en tout état de cause, elles ne devront s’effectuer que sur la base du volontariat. Je partage également votre souhait de limiter la superficie des intercommunalités.

Monsieur Jean-Luc Moudenc, ce texte constitue un progrès pour l’intégration des compétences entre la région et la métropole, sans placer l’un de ces échelons dans le rôle du « donneur d’ordre ». Il nous faudra examiner la question des villes éloignées des plus grands centres urbains, qui exercent des fonctions métropolitaines, mais ne disposent pas de la population suffisante – sur la base des recensements de l’INSEE – pour acquérir le statut de métropole. Cela étant, rien n’empêchera cette quasi-métropole de fusionner avec l’intercommunalité voisine si celle-ci y consent.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La politique d’aménagement du territoire peut souffrir d’un manque de lisibilité, car elle semble uniquement dédiée au fait urbain. Afin de lutter contre cette vision réductrice, le projet de loi devrait définir cette politique et en présenter les composantes.

Mme la ministre. L’exigence d’équilibre entre les territoires et la définition du rôle des départements par rapport à celui des régions posent la question de l’opportunité de créer des pôles de développement territoriaux – autrement nommés pôle de développement ruraux.

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Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 24 avril 2013 à 16 h 30

Présents. - Mme Sylviane Alaux, M. Christian Assaf, M. Alexis Bachelay, Mme Catherine Beaubatie, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Alain Calmette, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Fanny Dombre Coste, M. Olivier Falorni, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Claude de Ganay, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, Mme Viviane Le Dissez, M. Michel Lesage, M. Jean-Luc Moudenc, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, M. Edouard Philippe, M. Martial Saddier, M. Jean-Marie Sermier, M. Jean-Pierre Vigier, M. Patrick Vignal

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Serge Bardy, M. Denis Baupin, Mme Chantal Berthelot, M. Yann Capet, M. Patrice Carvalho, M. Christian Jacob, M. Napole Polutélé, Mme Catherine Quéré, M. Gabriel Serville

Assistait également à la réunion. - Mme Christine Pires Beaune