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Mardi 2 juillet 2013

Séance de 10 heures 30

Compte rendu n° 76

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Philippe Duron, président de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), sur le rapport de la commission « Mobilités 21 »

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Philippe Duron, président de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), sur le rapport de la commission « Mobilités 21 ».

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Auditionné le 5 juin dernier par notre Commission, Philippe Duron nous a présenté à cette occasion les missions confiées à la commission « Mobilité 21 » et il a précisé les critères de classement des soixante-quinze projets d’infrastructures de transports retenus par le Schéma national des infrastructures de transports, le SNIT. Aujourd’hui, conformément aux termes de la lettre de mission, il vient nous présenter les principales conclusions du rapport qu’il a rendu au ministre chargé des transports.

M. le Premier ministre souhaitant faire des annonces dans ce domaine la semaine prochaine, nous avons souhaité entendre notre collègue Philippe Duron dès cette semaine, et non le mercredi 10 juillet comme c’était initialement prévu.

M. Philippe Duron, président de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). La commission Mobilité 21 avait deux missions : proposer les fondements d’une politique de mobilité ; faire des propositions de planification pour les soixante-quinze projets du SNIT dans la mesure où il n’était pas raisonnable d’imaginer pouvoir mobiliser les 245 milliards d’euros nécessaires pour réaliser ces projets dans le délai de vingt-cinq ans fixé par le SNIT. Pour vous donner un ordre d’idée, réunir une telle somme dans un tel délai aurait supposé que le budget de l’AFITF augmente de 3,5 milliards d’euros par an, alors qu’il est aujourd’hui de 2,2 milliards environ, soit un quasi-doublement des dotations non seulement de l’État, mais aussi de Réseau ferré de France (RFF), de Voies navigables de France (VNF) et des collectivités territoriales.

Cette commission était composée de parlementaires de tous bords et de hauts fonctionnaires à la compétence reconnue. Tous ont signé ce rapport, ce qui signifie qu’ils en approuvent les grandes lignes. Cela ne veut pas dire que nous partageons tous les mêmes convictions sur tous les sujets : il y a eu entre nous des débats, souvent longs, parfois difficiles, et vous trouverez dans le rapport l’expression de ces différences. En outre M. Chassaigne et Mme Sas ont souhaité y ajouter une contribution personnelle sans que ces points de vue individuels remettent en cause les conclusions du rapport.

Nous avons travaillé pendant plus de huit mois, soit plus longtemps que prévu, mais c’était le temps nécessaire pour rendre nos conclusions. Le rapport a été élaboré à partir de plus de 50 auditions et de 120 rencontres, notamment avec des présidents d’exécutifs locaux ou de chambres de commerce.

Je m’inscris en faux contre certaines affirmations lues dans la presse, selon lesquelles ce rapport consacrerait une politique de recul et d’abandon et une réduction de l’effort d’investissement dans les infrastructures de transport. Aucun des soixante-quinze projets n’est abandonné : chacun d’entre eux a simplement été inscrit dans l’une des trois temporalités retenues par la commission, même s’il est probable que les projets reportés après 2050 devront faire l’objet d’un réexamen. Quant au niveau d’investissement, nous proposons, soit de le maintenir, soit de l’accroître de 28 à 30 milliards d’ici à 2030, ce dernier scénario de financement ayant la préférence de l’ensemble des membres de la commission. Il n’y a donc ni recul, ni abandon ; nous sommes dans le cadre d’une programmation des projets soutenue par un surcroît d’effort financier dans le deuxième scénario.

Le classement des projets est la partie du rapport qui a bien évidemment suscité les controverses les plus vives. Il faut cependant aller au-delà de ce classement, qui n’est pas aussi important que nos analyses et nos propositions pour développer une politique des transports durable et responsable.

Je mettrai l’accent sur quatre constats majeurs, parmi les onze qui ont été formulés par la commission.

Premièrement, la conservation et l’amélioration de l’existant doivent devenir une priorité en matière d’investissement. Le rapport Rivier et l’audit de l’École polytechnique fédérale de Lausanne ont donné la mesure de l’ampleur de la dégradation du réseau ferroviaire depuis trente ans. Ce constat vaut également pour le réseau routier de l’État. Certes, régénérer coûte plus cher qu’entretenir, mais cet état de dégradation remet en cause l’efficacité et la sécurité du système de transport. Les comparaisons internationales montrent que le choix de consacrer l’effort financier par priorité à la préservation de la qualité du réseau existant est le fait de pays développés tels que la Suisse, l’Allemagne et la Norvège, qui veulent un système de transport de qualité sur l’ensemble de leur territoire.

Deuxièmement, une réforme du modèle français de développement ferroviaire s’impose, notamment en raison de l’impasse financière où se trouve celui-ci qui présente, en outre, le défaut d’avoir privilégié la grande vitesse au détriment de toute autre considération. Non qu’il faille renoncer à celle-ci, mais il ne faut faire le choix de ce type de transport que là où il est adapté, sur de longues distances et pour desservir des bassins de population suffisamment vastes. La performance de ce type de transport ne doit pas être recherchée au détriment de tous les autres. Le choix de la grande vitesse perd également de sa pertinence lorsque la performance est dégradée par la saturation des nœuds ferroviaires et l’insuffisance des gares.

Troisièmement, la commission souligne l’urgence de soutenir le développement des ports français de dimension européenne, notamment Le Havre-Rouen, Fos-Marseille et Dunkerque. Si la loi portuaire de 2008 commence à porter ses fruits – la situation du port de Marseille s’améliore et le trafic du port du Havre s’intensifie –, le handicap du manque de liaison de nos plateformes portuaires à leur hinterland n’est toujours pas surmonté, notamment pour les modes alternatifs à la route.

Quatrièmement, il faut clarifier la gouvernance et le financement du système de transports. Actuellement, on ne parvient pas à chiffrer précisément le coût des aménagements de transport, alors qu’ils bénéficient souvent de dotations publiques. En outre, moins les choix d’investissement sont pertinents, plus les subventions publiques sont importantes.

Ces constats nous ont conduits à faire une vingtaine de recommandations qui s’articulent autour de quatre axes principaux.

Il faut tout d’abord garantir la qualité d’usage des infrastructures de transport – j’ai déjà développé ce point.

Il faut aussi rehausser la qualité de service du système de transport pour l’ensemble des Français sur l’ensemble du territoire. Il faut non pas se limiter aux grandes métropoles, mais penser également aux zones moins denses, aux territoires de périphérie, de montagne ainsi qu’aux territoires ruraux.

Par ailleurs, il faut améliorer la performance d’ensemble du système ferroviaire, notamment en s’attaquant à la question de la saturation des lignes. Plusieurs des projets examinés par la commission ont cet objectif – les projets d’interconnexion Sud en Île-de-France, le grand projet Bordeaux-Hendaye ou le projet de ligne nouvelle Perpignan-Montpellier. La question est de savoir non pas si ces projets sont nécessaires, mais à quel moment il faudra les engager : il faudra les engager lorsque le taux de saturation des lignes existantes détériorera la performance de l’ensemble du système.

S’agissant par exemple du projet de ligne nouvelle Paris-Orléans-Clermont-Lyon, le projet POCL, on peut choisir soit de rénover la ligne actuelle, soit de construire une nouvelle ligne à grande vitesse permettant de désengorger la ligne Paris-Lyon. La question est donc de savoir quand celle-ci sera saturée, et sur ce point il y a autant d’avis que de spécialistes. Les plus impatients parlent de 2025 ; d’autres, notamment à RFF, évoquent plus prudemment 2030 ou 2035. Certains spécialistes des transports pensent que cela sera beaucoup plus tard, d’autant que l’European Rail Traffic Management System (ERTMS) et le changement de matériel peuvent nous permettre de gagner une dizaine d’années.

S’agissant de ce projet comme des trois autres précédemment évoqués, nous sommes donc incapables de dire s’ils doivent être engagés en 2025, en 2030 ou en 2035. C’est la raison pour laquelle la commission recommande la mise en place d’un observatoire contradictoire de la saturation, associant toutes les parties prenantes, élus, acteurs économiques, associations d’usagers. En outre, nous proposons, au titre des premières priorités, l’institution d’une soulte de deux milliards d’euros pour parer au cas où une ligne concernée par l’un des quatre projets serait saturée avant 2030.

Par ailleurs, ces perspectives de saturation des lignes ferroviaires mettent en évidence les marges d’amélioration de la performance de notre réseau via la modernisation de son exploitation. Les Japonais, par exemple, font passer infiniment plus de trains par les mêmes lignes.

Nous insistons également sur la nécessité de soutenir le développement des mobilités « propres », en favorisant notamment les modes de transport collectifs via la poursuite des appels à projets, ou les modes de transport alternatifs, notamment sur les courtes distances. Nous estimons par ailleurs qu’une réflexion sur le lissage de la demande de transport collectif en heure de pointe doit être engagée.

Nous proposons également la création d’un contrat régional de mobilité durable, soit autonome, soit dans le cadre du contrat de projets, afin de permettre à l’État et à ses partenaires territoriaux d’évaluer la pertinence des investissements en matière de transports pour un territoire donné.

Il convient aussi de vérifier la pertinence des lignes ferroviaires les moins fréquentées, afin d’examiner si une liaison par autocar, par exemple, ne pourrait pas s’y substituer avantageusement. La pertinence de ce mode de transport ne se vérifie pas seulement dans les zones peu denses, comme le montre le précédent du rabattement par autocar du trafic de la grande couronne madrilène.

La commission recommande par ailleurs la tenue d’assises nationales sur le financement des infrastructures et des services de transport, qui permettraient de débattre de sujets tels que les investissements ou la tarification du service. On pourrait rechercher dans ce cadre des moyens d’assouplir les modes de financement des transports, sans perdre de vue que tout système de transport n’aura jamais que deux financeurs : l’usager et le contribuable.

Enfin, il nous semblerait légitime que le Parlement d’un pays moderne comme le nôtre soit régulièrement consulté sur les grands objectifs de la politique de transport, qui pourraient faire l’objet d’une loi-cadre, et sur les grands choix de cette politique, dans le cadre d’un projet de loi de programmation tous les cinq ans.

Venons-en à la hiérarchisation des projets. Je rappelle que chacun d’eux a été évalué d’après trois batteries de critères, en plus des critères habituels que sont le taux de rentabilité interne (TRI) et la valeur actualisée nette (VAN), qui nous ont paru privilégier trop fortement la vitesse. Reste que, même modulés par des critères environnementaux, sociétaux ou d’aménagement du territoire, les critères socio-économiques restent prépondérants. Ce sont eux qui assurent notamment le classement de nombreux projets routiers et de nombreux projets franciliens dans les premières priorités. Si nous nous en étions tenus aux seuls critères socio-économiques monétarisés, seuls les projets d’autoroutes en Île-de-France seraient considérés comme des investissements prioritaires. Cela serait difficilement acceptable, tant du point de vue du développement durable que de l’aménagement du territoire !

Cette évaluation a permis de classer les projets selon deux temporalités : avant 2030 et de 2030 à 2050. Certains nous ont reproché d’avoir retenu un horizon temporel trop éloigné, mais il faut une dizaine d’années pour mener à bien l’ensemble des procédures nécessaires à l’engagement d’un projet, voire vingt ans si on tient compte du temps du débat public. Les échéances de 2030 et 2050 sont calquées sur le calendrier des programmes opérationnels européens du Core Network et du Global Network. Les deuxièmes priorités sont les projets dont l’engagement doit être envisagé entre 2030 et 2050, et donc préparés dès maintenant. Un troisième groupe de projets sont renvoyés au-delà de 2050.

Nous sommes conscients qu’un tel classement peut paraître brutal, frustrant, voire désespérant pour certains élus.

Plusieurs députés. Ça, c’est certain !

M. Philippe Duron. En revanche, interrogés dans le cadre d’un sondage, 82 % des Français ont dit préférer le maintien et l’amélioration des réseaux de transports au lancement de nouveaux projets. C’est également ce que nous ont répondu toutes les organisations économiques, les syndicats, les associations d’usagers. Je comprends la conviction et l’énergie mise par certains élus à défendre des projets sur lesquels ils se sont engagés et qui les mobilisent depuis plusieurs années. Je me demande cependant si dans ce domaine les attentes de la majorité de nos concitoyens ne diffèrent pas quelque peu de celles des grands élus locaux.

Nous ne prétendons cependant pas que ce classement doit être gravé dans le marbre. Nous préconisons au contraire que sa pertinence soit évaluée tous les cinq ans par le Parlement, afin de s’adapter aux évolutions qui peuvent intervenir d’ici là : notre économie peut sortir de la crise et connaître une très forte croissance (Exclamations).

M. Laurent Furst. Ce n’est plus une question de cycle économique !

M. Philippe Duron. Je ne me résigne pas au déclin économique.

L’Union européenne peut s’engager dans une politique de relance s’appuyant sur le développement des transports. La vie quotidienne de nos concitoyens peut également être affectée par des changements significatifs.

Enfin, nous avons exclu de notre classement les projets sur lesquels nous manquons de visibilité ou dont la réalisation dépend d’engagements internationaux, tels que la LGV Lyon-Turin ou le canal Seine Nord Europe. Cela dit, si nous avions privilégié ces deux grands projets pour la période 2014-2030, à financement constant, il serait inutile d’avoir cette discussion car, d’ici à 2018, les quatre lignes LGV engagées par la précédente majorité saturent complètement la capacité de financement de l’AFITF – les 800 millions d’euros disponibles pour le financement de projets nouveaux sont quasiment tous mobilisés à cet effet. Ensuite, la réalisation de la LGV Lyon-Turin nous emmènerait au moins jusqu’en 2024 avec des financements équivalents, et celle du canal Seine Nord Europe jusqu’en 2028, voire 2030. Si nous réalisions ces projets à financement constant, nous n’en ferions donc aucun autre. Voilà pourquoi nous n’avons pas voulu nous inscrire dans cette démarche.

La commission a retenu deux scénarios de financement des premières priorités. Le premier retient un montant d’engagement de projets d’ici à 2030, tous financements confondus, compris entre 8 et 10 milliards d’euros. Le second propose un montant d’investissements compris entre 28 et 30 milliards d’euros, que l’on peut juger déraisonnable ou insuffisant, selon qu’on l’envisage du point de vue du déficit de l’État ou des besoins des territoires. Il correspond à une augmentation moyenne des ressources de l’AFITF de l’ordre de 400 millions d’euros par an, soit l’équivalent du maintien jusqu’en 2030 de la moitié de la subvention d’équilibre que l’État devait verser à l’AFITF en 2013.

M. Rémi Pauvros. Grâce au travail réalisé par la commission « Mobilité 21 » et son président, notre collègue Philippe Duron, nous disposons désormais d’un document complet sur la politique d’infrastructures à mener sur notre territoire national. En partant du constat que notre réseau de transport, ferroviaire, routier et fluvial est un des meilleurs d’Europe, mais qu’il doit être mieux entretenu et optimisé que cela a été fait ces dernières années, le rapport développe le concept de mobilité : il s’agit de répondre à l’attente des habitants de notre pays, quel que soit le territoire où ils vivent, plutôt que de développer des infrastructures pour les infrastructures. Ce traitement des transports du quotidien passe par une amélioration des dessertes, une décongestion des nœuds ferroviaires ou routiers, et la recherche systématique de l’intermodalité. Le développement de modes doux de transport apparaît donc plus urgent que la construction d’autoroutes ou de LGV. Ce sont autant de chantiers ou de projets qui auront des répercussions positives pour nos entreprises du ferroviaire ou du BTP. Je souhaite que l’on n’oublie pas la recherche et le transfert de technologie. Enfin, l’impact environnemental de ce choix stratégique est fondamental.

Vous évoquez, monsieur le président Duron, la nécessité d’augmenter sensiblement les investissements ou les moyens de l’AFITF ; vous faites état de divergences internes et parlez de différentes pistes de recettes. Pouvez-vous nous préciser vos réflexions dans la perspective du projet de loi de finances pour 2014 ? Vous évoquez par ailleurs une autre gouvernance, en espérant que la nouvelle étape de décentralisation clarifie comme il est prévu les différents niveaux de responsabilité. Comment assurer la mobilisation de l’ensemble des acteurs, afin d’offrir à notre population un service de qualité garant de l’égalité républicaine ?

M. Martial Saddier. Les projets en question ne devant pas être réalisés avant 2030, voire 2050, pourquoi cette précipitation dans l’organisation de nos travaux, alors qu’un tel sujet méritait un débat calme et serein ? La majorité craindrait-elle les conséquences de ce rapport et l’accueil qui sera réservé aux arbitrages du Gouvernement ? (Exclamations diverses)

Je déplore encore une fois que les membres de la commission « Mobilité 21 » aient été désignés par une décision unilatérale du Gouvernement, qui a exclu les députés UMP de sa composition.

Quant au fond, c’est la première fois depuis les années 70 que l’on met ainsi un coup arrêt à la réalisation de grands projets d’infrastructures de transport. Un tel choix aura des conséquences néfastes tant sur le plan social et économique qu’en termes d’aménagement du territoire. Il n’y a aucune lisibilité sur les programmes de modernisation des itinéraires routiers, les PDMI. La stratégie que vous proposez, qui consiste à concentrer l’effort sur la rénovation des liaisons existantes, est plus que contestable et trouvera rapidement ses limites.

Vous savez que repousser ainsi des projets équivaut à leur mise à mort. On portera ainsi atteinte à la compétitivité, et même à l’image de la France. Pour toutes ces raisons, nous sommes extrêmement inquiets des suites qui seront données à ce rapport.

Mme Laurence Abeille. Pour les écologistes, la réalisation des projets d’infrastructure doit être guidée par le souci des besoins des usagers en matière de transports collectifs confortables et efficaces, de notre empreinte écologique et de nos engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces objectifs commandent de privilégier le rail et de réussir le report modal vers des transports moins carbonés. Il est nécessaire de garder à l’esprit cette donnée écologique lorsqu’on réfléchit à l’aménagement du territoire et à l’avenir de nos infrastructures de transport.

C’est pourquoi notre groupe partage trois conclusions essentielles de ce rapport. Premièrement, il vaut mieux moderniser les lignes existantes plutôt que de construire de nouvelles lignes à grande vitesse. Deuxièmement, il faut que l’État continue de soutenir les transports collectifs. Troisièmement, certains projets pharaoniques captent l’essentiel du financement au détriment de projets bien plus utiles économiquement et socialement. Je pense notamment au projet Lyon-Turin, qui coûterait près de 30 milliards d’euros, alors que le trafic entre la France et l’Italie est en baisse, que des solutions alternatives existent et que la viabilité économique de ce projet n’est absolument pas assurée.

Certains projets me semblent incompatibles avec l’idée même de mobilité durable. Notre collègue Eva Sas, membre de la commission « Mobilité 21 », a pointé notamment le projet d’autoroute A 45, qui entraînerait l’artificialisation de 500 hectares de terres agricoles et favoriserait un report modal du rail vers la route, soit l’inverse de ce vers quoi nous devons tendre ! Notre politique de transport doit être structurée autour de l’objectif d’un report modal vers les alternatives à la route si nous voulons respecter nos engagements écologiques.

De même, le problème de l’artificialisation des sols me semble insuffisamment pris en compte dans la sélection des projets. Le chiffre souvent avancé d’une artificialisation de l’équivalent d’un département français tous les sept ans est révélateur du manque de conscience de ce problème. Nous devons parvenir le plus rapidement possible à arrêter ce processus, notamment pour préserver la biodiversité. C’est pourquoi il me semble plus qu’inopportun de programmer de nouvelles artificialisations. C’est pourtant le cas avec le projet de contournement d’Arles, qui empiète sur des terres agricoles et sur le Parc naturel de Camargue. Ce type de projet va à l’encontre d’une vision durable de la mobilité.

J’aimerais enfin savoir le rôle que joueront les parlementaires dans la définition des projets retenus dans le SNIT. Ils doivent pouvoir débattre de la pertinence de l’ensemble de ces projets, notamment du point de vue écologique.

M. Olivier Falorni. Je concède, monsieur le président, que votre position n’est pas facile. Vous avez dû tailler dans le vif et faire des choix parmi l’ensemble des projets du SNIT, dont le financement aurait représenté une dépense de 245 milliards d’euros d’investissements sur vingt-cinq ans, avec une participation de l’État à hauteur de 90 milliards, alors que les dépenses annuelles de l’État pour ces mêmes infrastructures sont de l’ordre de 2 milliards. Vous avez donc choisi de mettre l’accent sur la desserte de proximité et l’amélioration des réseaux existants plutôt que sur la création de nouvelles lignes TGV. De ce fait, seulement deux lignes de TGV et cinq tronçons d’autoroute ont été jugés prioritaires par votre rapport et cela dans l’hypothèse où le Gouvernement retiendrait votre deuxième scénario, fondé sur des investissements compris entre 28 et 30 milliards d’euros, résolument plus optimiste que le premier.

Permettez-moi de vous dire ici ce que je pense du choix qui a été réservé à deux projets que je connais bien puisqu’ils concernent mon département.

Vous préconisez l’arrêt de la LGV Bordeaux-Hendaye alors que les collectivités locales ont fortement investi dans la construction de cette ligne. Ainsi, le conseil général de la Charente-Maritime a consacré 28 millions d’euros aux 22 kilomètres de ligne qui traversent le département et la communauté d’agglomération de La Rochelle a participé à ce projet pour plus de 8 millions. Cet investissement a été consenti pour que la ligne se poursuive jusqu’à Hendaye et au-delà en Espagne, pas pour qu’elle s’arrête à Bordeaux. L’arrêt des prolongements vers Limoges et le Pays Basque pourrait remettre en cause ce qui se construit aujourd’hui. En revanche, le prolongement vers Toulouse semble être épargné.

Je suis tout particulièrement inquiet du sort du projet de l’A831, dernier maillon de l’autoroute des Estuaires. Ici même, il y a moins d’un mois, vous nous aviez assuré avoir pris la mesure du consensus assez large suscité par ce projet. Je lis par ailleurs dans votre rapport que « les éléments dont la commission a disposé pour se forger une opinion sur l’urgence de réalisation du projet mettent en avant un bilan socio-économique agrégé tout à fait favorable. »

J’ajoute que tous les clignotants techniques sont au vert. Sur le plan juridique, la déclaration d’utilité publique a été obtenue après une enquête publique ; 80 % de la mise en concurrence est réalisée, l’appel à concession est lancé ; tous les recours, que ce soit auprès des instances nationales ou européennes, sont purgés. Sur le plan environnemental, ce projet de construction d’autoroute est en tous points exemplaire. Enfin, toutes les collectivités ont signé le protocole d’accord financier avec l’État au ministère des transports le 31 janvier 2012.

Ce projet ambitieux non seulement pour nos deux départements de la Charente-Maritime et de la Vendée, mais aussi pour les villes de Fontenay-le-Comte, de La Rochelle et de Rochefort doit absolument se concrétiser, la déclaration d’utilité publique étant caduque en 2015.

Enfin, vous-même évoquez la nécessité de « placer au cœur des priorités le renforcement des équipements et des liaisons avec leur hinterland des plateformes portuaires de niveau européen ». Or, l’A831 permettrait d’assurer l’interface entre le Grand port maritime de La Rochelle et son hinterland.

En dépit de tout cela, la commission prétend que ce projet soulève des controverses quant à son intérêt et à ses conséquences au plan environnemental, justifiant ainsi son report aux calendes grecques. Pourriez-vous me préciser de quelles controverses il s’agit ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Monsieur Saddier, la convocation a été envoyée mercredi 26 juin et figure au feuilleton de jeudi 27 juin. Il n’y a donc eu aucune précipitation. Je vous ai déjà expliqué les raisons qui ont conduit à avancer l’audition de Philippe Duron.

J’aimerais avoir plus de précisions sur les 20 milliards d’euros supplémentaires affectés au deuxième scénario de financement proposé par la commission. D’où proviendrait en particulier l’accroissement de 400 millions d’euros des ressources de l’AFITF ? Il semble que les projets retenus dans le cadre de ce scénario devraient être financés par les collectivités territoriales à hauteur de un milliard d’euros, notamment par des régions dépourvues aujourd’hui de toute autonomie fiscale. Ces investissements seront donc réalisés au détriment de l’aménagement du territoire régional.

M. Florent Boudié. Pourquoi ne pas avoir proposé des solutions de financement innovantes des infrastructures de transport, telles que les project bonds auxquels la Grande-Bretagne a recours pour financer un vaste plan de construction de logements étudiants ? Ne pourrait-on pas faire en sorte que les documents de consultation des projets en cours de discussion ou déjà engagés soient conformes aux critères sur lesquelles s’appuie la Banque européenne d’investissement pour garantir ce type d’emprunt ?

M. Jacques Kossowski. Qui mieux que l’usager, qui me paraît être le grand oublié de votre travail, peut prévoir les risques de saturation des lignes ferroviaires ? Envisagez-vous la possibilité d’un financement par des partenariats public-privé ? Avez-vous engagé une réflexion sur les conséquences de l’arrêt de ces grands projets d’infrastructures sur la situation de l’emploi dans notre pays ?

M. Gilles Savary. Le fait d’exclure certains grands projets de votre classement ne fait pas disparaître le besoin de financement de ces projets, et les scénarios de financement que vous proposez en sont fragilisés. Comment RFF pourra-t-il supporter un endettement évalué à 61 milliards d’euros en 2025 du fait de la réalisation des quatre LGV, à un moment où on lui demande d’équilibrer ses comptes et alors qu’il ne dispose pas de fonds propres ? Ne faut-il pas envisager d’établir un nouveau SNIT, plus conforme à vos préconisations ?

M. Alain Chrétien. Élu d’un département qui ne compte ni autoroute ni voie ferrée électrifiée, je me bats pour la réalisation du projet d’autoroute A319 Langres-Vesoul ainsi que pour la modernisation de la ligne Paris-Mulhouse. Différentes études ont été menées depuis des années dans la perspective de la réalisation de ces projets, qui risque aujourd’hui d’être repoussée. Comment conserver le bénéfice de ces études, afin de ne pas avoir à les recommencer dans une quinzaine d’années ?

M. Alain Leboeuf. Vous affirmez que les attentes de la population ne coïncident pas avec celles des élus. Pourtant, les habitants de Charente-Maritime et de Vendée se sont spontanément mobilisés pour exprimer leur opposition à vos préconisations concernant le projet de liaison autoroutière A 831 dès qu’ils en ont pris connaissance.

Comment pouvez-vous prétendre qu’aucun projet n’est abandonné, alors que le report de ce projet après 2030 le ferait inévitablement tomber à l’eau, la déclaration d’utilité publique étant caduque à partir de 2015 ?

Je m’étonne par ailleurs que vous évoquiez je ne sais quelles controverses sur la qualité environnementale de ce projet, dont tout le monde reconnaît l’exemplarité en la matière.

M. Philippe Bies. Tout en approuvant les orientations de ce rapport, je m’étonne que vous n’ayez pas pris en compte la dimension européenne de certains projets, dont le caractère prioritaire ne peut évidemment pas être évalué qu’à l’aune de critères franco-français. Je pense en particulier à l’achèvement de la branche Est de la LGV Rhin-Rhône, essentiel tant pour l’avenir du transport ferroviaire européen en général que pour Strasbourg. Pour quelles raisons ce projet, pour lequel la déclaration d’utilité publique a déjà été prononcée et dans lequel l’État a investi 80 millions d’euros, n’est-il plus considéré comme prioritaire ?

Mme Chantal Berthelot. Je voudrais rappeler à mes collègues que le département de la Guyane est également dépourvu et d’autoroutes, et de liaisons ferroviaires. Les caractéristiques géographiques de la Guyane ont pour effet que la vie économique et sociale dépend énormément des infrastructures de transport. Nous avons les fusées et les satellites, mais pas assez de retombées économiques !

Les enjeux de la modernisation de la RN1 et de la RN2 figurent dans le rapport de la commission Mobilité 21, même si c’est en italique… En Guyane il n’y a que 507 kilomètres de routes nationales, et elles sont transfrontalières : le pont avec le Brésil va être inauguré prochainement. La RN2 mérite effectivement d’être modernisée, et surtout il serait nécessaire de re-calibrer les ouvrages d’art pour le transport du fret.

Comment assurer le financement des programmes de modernisation des itinéraires routiers 2009-2014 et surtout des PDMI 2015-2020 ?

Mme Catherine Beaubatie. Je reconnais, monsieur le président Duron, que l’exercice auquel vous vous êtes attelé n’était pas aisé. Au vu des conclusions de votre rapport, les motifs de satisfaction pour les élus sont modestes. Je veux pour ma part vous livrer un mouvement d’humeur.

Votre rapport préconise de reporter à 2030 le projet de la ligne à grande vitesse entre Limoges et Poitiers. Si, pendant longtemps, la région Limousin a été desservie par le train le plus rapide de France, le Capitole, il faut aujourd’hui compter au mieux trois heures trente pour rallier Paris – encore faut-il que les trains partent et soient à l’heure ! Vous dites avoir consulté la population mais, selon un récent sondage, plus de 75 % des habitants de la Haute-Vienne sont favorables à la LGV. L’enquête publique a d’ailleurs débuté en mai.

En outre, une seule autoroute, l’A20, traverse la région. Le tronçon est gratuit parce que les collectivités territoriales l’ont financé au prix de quarante années d’endettement.

Les élus déplorent, et la population plus encore, que le projet de LGV ne figure pas en tête des priorités que vous avez définies alors que l’ensemble des acteurs de la région soutient le projet qui est de surcroît bien avancé. Nous avons fait les choix qu’on exigeait de nous, sur le tracé notamment. Malgré tout cela, le projet n’est pas retenu. Nous avons le sentiment d’avoir été bernés !

M. Jean-Pierre Vigier. Sur les quatorze projets d’aménagement de routes nationales retenus au titre des prochains programmes de modernisation des itinéraires routiers, je me réjouis que deux projets – pour la RN 102 et la RN 88 – concernent ma circonscription. Ils sont en effet indispensables au désenclavement des territoires ruraux et au développement économique.

J’espère néanmoins que les budgets alloués à ces PDMI seront en adéquation avec les besoins et que la région Auvergne apportera enfin le soutien financier qu’elle a refusé jusqu’alors. Quel est votre sentiment ?

M. Jean-Louis Bricout. Si je partage les orientations de votre rapport, je ne peux pas me réjouir pour mes administrés. (Sourires)

Vous faites de l’entretien et de la modernisation de l’existant la première priorité des investissements futurs. À cet égard, je veux alerter sur l’état lamentable de la RN2 et son caractère très accidentogène. Cet axe est structurant pour la Thiérache, d’autant qu’il est l’unique desserte pour ce territoire rural enclavé en l’absence de toute alternative à la route. Les administrés, les entrepreneurs et les élus sont excédés par cette situation.

Comment améliorer la participation des collectivités territoriales et la visibilité des PDMI ?

Mme Sylviane Alaux. Vous plaidez pour un recours à bon escient à la grande vitesse compte tenu de son coût. Mais une LGV n’est pas seulement une dépense, elle participe aussi au développement économique d’un territoire.

Je m’interroge sur la prise en compte dans votre rapport des aspects environnementaux. Le flot de camions et la pollution générés par la liaison routière Bordeaux-Hendaye demeureront malgré l’élargissement de l’A63. Rassurez-moi : la préservation de l’environnement a-t-elle bien été une préoccupation majeure de votre rapport ? Un observatoire de la pollution sera-t-il mis en place parallèlement à l’observatoire de la saturation que vous préconisez ?

M. Charles Ange Ginesy. Je suis déçu par vos conclusions. Ce rapport aurait pu être l’occasion d’inciter le Gouvernement à lancer les grands projets que je crois nécessaires à la relance de l’économie et de l’emploi dans notre pays en soutenant l’innovation et la croissance.

En renvoyant certains projets à 2030, vous les condamnez à l’oubli. C’est le cas de la ligne nouvelle Provence Côte-d’Azur qui aurait permis le désenclavement des Alpes-Maritimes. Vous connaissez les problèmes du département pour y être venu : la perspective de la saturation de l’aéroport de Nice en 2025, l’échec du projet d’A8 bis et les goulets d’étranglement persistants. Malheureusement, en l’absence de ligne nouvelle, la situation est appelée à durer et cela aura des conséquences sur d’autres territoires.

Mme Colette Langlade. Je salue la transparence, la sincérité et la responsabilité de votre travail qui m’inspire néanmoins de la déception et de l’amertume.

Vous connaissez mon attachement au projet Euro 21 sur lequel cinq départements ont travaillé avec tous les acteurs du territoire afin de proposer une offre de services accessible et performante. Votre rapport ne retient pas ce projet qui correspond pourtant à une priorité territoriale. Le contrat régional de mobilité durable que vous évoquez peut-il permettre d’y croire encore et de continuer à travailler ensemble ?

M. Olivier Marleix. Le rejet du projet d’autoroute A154, qui doit relier Orléans et la Normandie, a provoqué la consternation dans la région Centre. Je suis surpris que votre rapport ne mentionne même pas ce projet et préfère s’en tenir aux vieilles recettes de la direction départementale de l’équipement : l’aménagement de la nationale 12, d’une part, et de la nationale 154, d’autre part.

Pourtant, depuis le débat public organisé il y a quatre ans, le projet d’aménagement d’un tronc commun autoroutier à partir de ces nationales fait l’unanimité parmi les élus. De plus, en 2010, une décision ministérielle a entériné le principe d’une concession autoroutière pour cet aménagement et la concertation sur le tracé a commencé.

Le scénario n° 2, qui semble avoir la préférence du ministre, aboutit à une aberration totale. Le seul aménagement de la RN12 que vous y définissez comme priorité première coûtera 150 millions d’euros, principalement à la charge de l’État, alors que la construction de l’A154 coûterait 100 millions d’euros dont une moitié seulement serait financée par l’État. Votre choix, qui finance seulement un tiers du tronçon pour un coût trois fois supérieur, est totalement incompréhensible. Vous privilégiez au nom de l’urgence une solution qui a été écartée et vous faites fi de la concertation menée depuis quatre ans.

M. Christian Assaf. Je veux saluer votre travail ingrat mais nécessaire. Vous saviez que les choix qu’il impliquait susciteraient plus de frustration que de satisfaction.

Je veux vous faire part de mon étonnement quant aux choix faits dans le rapport que vous avez remis, en particulier celui de classer en seconde priorité la ligne nouvelle de 155 kilomètres entre Montpellier et Perpignan Est.

La promesse de cette ligne, qui est le chaînon manquant et un axe prioritaire du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) allant de Séville à Hambourg, a été faite à la région en 1992, à l’occasion des Jeux Olympiques de Barcelone. La France a pris alors vis-à-vis de l’Espagne un engagement qu’elle a réitéré à chaque sommet bilatéral.

Pour quelles raisons cette ligne ne figure-t-elle pas parmi les priorités du scénario n° 2 ? Vous indiquez dans votre rapport : « Toutefois, la commission considérant qu’elle ne peut être entièrement affirmative sur le moment à partir duquel il pourrait être nécessaire d’engager l’opération, elle a prévu dans le scénario n° 2 d’inscrire en premières priorités une provision pour engager en tant que de besoin de premiers travaux en lien avec le projet. » Cela signifie-t-il que la ligne pourrait devenir prioritaire avant 2030 ?

M. Claude de Ganay. Lors de votre nomination méritée à l’AFITF, nous avions évoqué l’avenir de la LGV Paris-Orléans-Clermont-Ferrand-Lyon. Vous aviez alors admis que le doublement de la ligne était nécessaire pour remédier à la saturation du tronçon Paris-Lyon. Le corridor en exploitation ne permet pas de faire face au doublement de la fréquentation.

Je salue le travail réalisé pour ce rapport et le souci des contraintes budgétaires qu’il manifeste. Je regrette cependant que le projet POCL s’achemine vers une fin de non-recevoir. Votre rapport propose complaisamment la mise en place d’une commission indépendante pour étudier pendant cinq ans la saturation de la ligne et son éventuelle accélération. C’est inutile puisque nous connaissons déjà la réponse ! Je suis déçu du sort réservé à la ligne POCL qui est une nécessité pour les territoires, notamment le Giennois dont je suis l’élu. Je sais en outre que vous êtes personnellement convaincu de cette nécessité.

Investir avec pertinence, c’est préparer l’avenir. Comment peut-on relancer l’économie en arrêtant les grands travaux ?

Mme Suzanne Tallard. Vous saviez que l’exercice serait difficile, sa présentation l’est peut-être encore plus. Votre commission fait quelques satisfaits et beaucoup d’insatisfaits. Espérons que les premiers ne seront pas ingrats ! (Rires)

Dans cette commission, nous nous intéressons au développement durable et à l’équilibre territorial sans que l’un ne prenne le pas sur l’autre. À côté des métropoles et des ports européens, les territoires ne doivent pas être oubliés car ils ont un rôle à jouer. Il appartient aux élus de défendre les projets qui les concernent.

Le refus de poursuivre l’A831 sur soixante-quatre kilomètres est incohérent. L’autoroute, qui relie le nord de l’Europe au Sud, s’arrête actuellement au sud à Rochefort renvoyant ainsi la circulation vers l’axe routier littoral le plus fréquenté de Poitou-Charentes, reliant La Rochelle et Rochefort. Je rappelle que la Vendée et la Charente-Maritime sont les deuxième et troisième départements touristiques de France.

Le report après 2050 de ce projet, attendu par les acteurs économiques, mature et financé, est incompréhensible.

M. Jean-Luc Moudenc. À première vue, la lecture du rapport est rassurante puisque la ligne Bordeaux-Toulouse est inscrite au rang des priorités d’ici à 2030. En pratique, j’ai néanmoins quelques inquiétudes : selon l’hypothèse la plus favorable sur laquelle toutes les collectivités territoriales ont travaillé de manière consensuelle, le TGV devait arriver à Toulouse en 2020. Les collectivités de Midi-Pyrénées considéraient les liaisons Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Hendaye comme la continuité de la ligne Tours-Bordeaux. Ils ont donc accepté d’en financer une partie à condition que les travaux de la ligne vers Toulouse commencent dès 2017, date prévue de l’arrivée du TGV à Bordeaux. Si votre scénario est retenu, le retard de treize ans entre 2017 et 2030 risque de fragiliser le système de cofinancement âprement négocié avec plusieurs collectivités. Je pense aussi au Grand Tarbes qui finance une partie de la ligne en contrepartie de la réalisation de la ligne Bordeaux-Hendaye. Le projet pourrait ainsi se trouver menacé par des effets négatifs en cascade. Il me semble difficile de prévoir un report aussi important pour un projet qui n’est pas nouveau et qui est déjà négocié et cofinancé.

Mme Catherine Quéré. L’abandon de l’A831 est une immense déception en même temps qu’un gâchis financier du fait des nombreuses études déjà réalisées.

J’espère que le tracé du TGV pour Royan passera par la Charente-Maritime pour que le département ne soit pas une nouvelle fois oublié.

Je me fais la porte-parole de M. Jean-Michel Clément pour m’étonner que la RN147 ne soit pas mentionnée dans le rapport alors qu’elle est très accidentogène.

M. Gilbert Sauvan. Je veux vous dire ma solidarité dans l’exercice que vous avez dû mener. Nous savons, pour être ou avoir été élus locaux, que l’envie de donner satisfaction au plus grand nombre est forte. Mais être raisonnable consiste aussi à faire des choix. Je regrette malgré tout l’absence de la LGV jusqu’à Nice dans la liste des projets prioritaires.

Vous définissez une liste de projets prioritaires relevant des PDMI. Vous avez évoqué une révision des programmes tous les cinq ans. Les PDMI actuels font-ils office de programmation pour 2014-2020 ou d’autres PDMI pourraient-ils être adoptés ultérieurement ?

M. Guillaume Chevrollier. Votre rapport suscite l’incompréhension des habitants du Grand Ouest. S’agissant de la Mayenne, il est muet sur la RN162 et la RN12 alors que ce département rural mérite un effort particulier de désenclavement.

La poursuite de la LGV Le Mans-Rennes en direction de Brest et de Quimper est repoussée à 2030, voire 2050. Pourtant, dans le Grand Ouest, la LGV contribue au désenclavement et au dynamisme économique de ces territoires. Votre rapport va casser la dynamique des infrastructures dans ces derniers.

Je défends constamment l’idée que l’État doit faire des économies en menant des réformes structurelles. Mais ces économies ne doivent pas se faire au détriment des infrastructures qui sont les garantes de l’économie de demain et de la création d’emplois sur tout le territoire.

M. Philippe Duron. Nous savions que notre tâche serait difficile. Nous l’avons acceptée en connaissance de cause.

Nous savions aussi que le SNIT n’était pas un mauvais document, mais qu’il était incomplet car il lui manque la programmation et la planification. Je comprends d’ailleurs pourquoi : l’exercice est extrêmement difficile, les réactions à notre rapport en sont l’illustration. Chaque territoire, chaque élu défend légitimement une infrastructure parce qu’il considère, et sa population avec lui, le projet utile, parfois même indispensable.

Je veux rappeler que l’adoption à l’unanimité de la loi Grenelle I nous lie. Par ce vote, nous avons manifesté notre volonté de favoriser des déplacements moins consommateurs d’énergie et moins producteurs de gaz à effet de serre. Nous avons ainsi implicitement accepté de privilégier des modes de déplacement alternatifs à la route. Cela signifie que nous ne pouvons construire autant de routes et d’autoroutes que les élus l’espèrent pour leurs territoires. Il faut être cohérent !

Vous avez été nombreux à souligner la dimension financière. Nous sommes confrontés à des réalités budgétaires et financières résilientes, que nous ne pouvons pas esquiver. Faire de la politique, c’est faire des choix. Ces choix sont souvent difficiles, parfois inexacts ou injustes – nous ne sommes pas infaillibles –, mais ils sont nécessaires.

S’agissant de la dette de RFF, j’avais étonné le ministre Thierry Mariani en affirmant que les 4 LGV auraient pour effet de faire passer cette dette de 31 à 60 milliards d’euros. Or, ce chiffre traduit bien la réalité de l’engagement de RFF. L’aggravation de sa dette pourrait à l’avenir lui interdire d’investir davantage dans des LGV. Si tel était le cas, un effort supplémentaire de l’État et des collectivités territoriales et d’autres formes de financement, faisant appel au secteur privé notamment, seraient nécessaires. La charge financière retomberait inévitablement sur les usagers et les contribuables car ce sont eux les payeurs finaux. Il faut regarder cette question avec un certain réalisme, parfois même un certain courage.

Notre commission ne condamne pas et ne décide pas. Elle émet des avis et formule des propositions. Dans la République, la décision appartient encore au Gouvernement et au Parlement… Il faut donc relativiser la portée de notre rapport.

L’exercice fut long et difficile. Je souhaite saluer les parlementaires qui ont consacré de nombreux mercredis aux travaux de la commission ainsi que les fonctionnaires et les rapporteurs qui ont fait un travail formidable.

M. Rémi Pauvros nous a reproché de ne pas parler suffisamment de recherche et de transfert de technologie. Ces sujets sont évidemment importants, mais nous ne pouvions pas aborder toutes les questions. S’agissant de la recherche dans le domaine ferroviaire, des progrès restent à faire sur le fret et la gestion des réseaux. Mais l’accent doit être mis sur la recherche concernant les routes. Le report du trafic routier sur des modes de transport alternatifs demandera en effet du temps. Dans l’intervalle, il convient donc de moderniser les moyens de transport routiers pour atteindre les objectifs environnementaux. À cette fin, il serait bon de soutenir la recherche dans le cadre des investissements d’avenir.

Sur la question du financement – qui aurait nécessité de multiples auditions tant le sujet est riche et complexe –, nous avons débattu, mais faute de temps nous avons jugé plus raisonnable de nous abstenir de propositions hasardeuses et de recommander l’organisation à brève échéance d’assises du financement.

La commission propose l’augmentation immédiate des crédits des PDMI qui ont, ces dernières années, servi de variables d’ajustement pour financer l’entretien des routes nationales altérées par les intempéries. Elle propose de les porter à 450 millions d’euros par an, soit une hausse de 30 % des dotations sur les cinq prochaines années. Il faut aussi imaginer pour l’avenir de nouveaux programmes prenant la suite des PDMI actuels, car beaucoup reste à faire.

Monsieur Florent Boudié, les project bonds européens ne représentent qu’une petite enveloppe et sont dans une phase d’expérimentation. Ce ne sont pas des subventions attribuées à une infrastructure ou à un État ; ils visent à encourager les investissements de fonds privés dans les infrastructures. Les project bonds ont donc vocation à faciliter les montages financiers pour les concessions. C’est de la dette « senior ». Les collectivités doivent assurément tirer profit de ces financements européens, mais ces derniers ne peuvent nullement satisfaire tous les besoins.

Je n’interviendrai pas dans le débat sur la participation des collectivités territoriales au financement des infrastructures et sur le rôle des régions en la matière. Néanmoins, les contrats régionaux de mobilité durable que nous proposons sont un moyen de réunir tous les financeurs.

Le contrat régional de mobilité peut être distinct ou constituer un volet des futurs contrats de plan ou contrats de projets selon la dénomination qui sera retenue. Il fera l’objet d’une négociation entre l’État, les régions, qui sont chef de file en matière de transports, et les départements, qui gèrent le plus grand patrimoine routier de France après les communes.

Je ferai des propositions sur la gouvernance de l’AFITF lors du prochain conseil d’administration afin que les régions et les départements, voire les agglomérations, y soient représentés ès qualités.

Si certains projets n’ont pas été examinés par la commission c’est parce qu’ils ne figuraient pas dans le SNIT.

Je m’inscris en faux contre les affirmations péremptoires de M. Martial Saddier. Nous ne stoppons pas les grands projets puisque cela n’aurait aucun sens ; nous les mettons en perspective. Jusqu’à présent, les LGV étaient réalisées les unes après les autres. Avec le SNIT, il a été décidé de mener quatre projets concomitamment. Cela explique l’embolie du financement des infrastructures que nous connaissons

La commission ne remet pas en cause la pertinence de la grande vitesse. Au contraire, le rapport classe parmi les premières priorités un projet de LGV, celui de la ligne Bordeaux-Toulouse, pour deux raisons. Ce projet est d’abord cohérent avec le RTE-T qui doit permettre de relier l’ensemble des grandes métropoles de l’Union européenne à grande vitesse avant 2030 – seules Toulouse et Nice restent à l’écart du réseau pour la France. Ensuite, l’aéroport de Toulouse est proche de la saturation du fait de l’absence d’une offre ferroviaire compétitive pour se rendre à Paris. Or, l’existence d’une LGV permet un basculement massif depuis l’avion vers le rail comme le montrent les exemples de Strasbourg et de Marseille.

Nous n’arrêtons pas les projets puisque nous privilégions la régénération des routes et du rail qui permet une multiplication des projets et des chantiers. La Fédération nationale des travaux publics et tous les industriels du secteur que nous avons consultés nous ont dit préférer l’entretien et la régénération aux grands projets, car ce sont ces activités qui les font vivre – l’Union des syndicats de l’industrie routière française a ainsi fait de ces activités un axe stratégique de son développement. La multiplication des chantiers a un effet rapide et solide sur l’économie du secteur. Elle permet de soutenir des entreprises moyennes aujourd’hui en difficulté, alors que les grands projets profitent d’abord aux majors et, dans une faible proportion, aux autres entreprises par le biais de la sous-traitance.

Madame Laurence Abeille, je vous remercie d’avoir exprimé vos accords avec le rapport. Vous avez repris les réserves émises par Mme Eva Sas au sein de la commission sur des autoroutes ou des contournements sensibles.

L’A45 a donné lieu à un débat interminable. Nous avons considéré qu’il était de notre responsabilité de désenclaver une ville aussi touchée par la désindustrialisation que Saint-Étienne. En outre, de nombreux Stéphanois, parce qu’ils travaillent dans l’agglomération lyonnaise, sont captifs du transport automobile. Puisqu’il est malheureusement impossible, selon les experts, d’augmenter la capacité ferroviaire, frappée de saturation, nous proposons de requalifier l’autoroute actuelle en boulevard industriel – il serait irresponsable de recommander la construction d’une seconde autoroute.

Le contournement d’Arles pose la question de la protection des zones sensibles sur le plan environnemental. Mais il faut aussi soulager la population locale du trafic intense et protéger une ville de grande qualité patrimoniale. La solution que nous proposons n’est pas parfaite, mais le contournement d’Arles est une nécessité.

En matière de gouvernance, le SNIT a été étudié par un rapporteur au Sénat, mais il n’a jamais été soumis à la discussion ni en commission ni en séance. Sa révision, si elle était décidée, devrait être débattue par le Parlement, éventuellement au travers d’une loi de programmation.

Monsieur Olivier Falorni, la desserte du grand port maritime de La Rochelle soulève une question qui est néanmoins moins stratégique que pour les ports du Havre – premier port de containers français, mais nain européen – et de Marseille-Fos – essentiel pour le sud du territoire. Nous aurions pu parler d’autres grands ports maritimes qui méritent également l’attention comme Nantes Saint-Nazaire ou Bordeaux.

L’A831 a suscité des discussions au sein de la commission. Si le bilan socio-économique agrégé est excellent, il n’en va pas de même des bilans environnementaux et sociétaux, d’après l’évaluation du Conseil général de l’environnement et du développement durable. En outre, la commission ne pouvait pas prendre en compte tous les projets autoroutiers puisque les critères du Grenelle obligent à prévoir, pour 20 % de transports routiers, 80 % de transports alternatifs.

La ligne Bordeaux-Hendaye a donné lieu à un long débat. L’argument de l’impossible dissociation de ce projet des lignes Tours-Bordeaux et Bordeaux-Toulouse qu’avancent les élus de ces territoires n’est pas recevable.

La réalisation des deux lignes depuis Bordeaux empêcherait de financer tout autre projet. La liaison Bordeaux-Hendaye est une voie importante pour le fret, mais le fret ferroviaire en Espagne n’est pas mature car la structure et la culture du transport routier y sont différentes. En outre, l’hostilité au Pays basque à ce projet nous a été rapportée. Enfin, le financement de la ligne pose question. Le tour de table financier pour la ligne Tours-Bordeaux n’a pas été simple. Les conseils généraux qui ont déjà lourdement contribué sont-ils en mesure de recommencer immédiatement pour Bordeaux-Hendaye ? Des inquiétudes ou des interrogations se sont exprimées sur ce point.

Nous suggérons que la ligne soit construite lorsqu’elle sera absolument nécessaire, ce qu’un observatoire de la saturation permettra d’apprécier.

S’agissant de POCL, vous m’avez mal compris. Je pense qu’il faut faire cette ligne, car désaturer en faisant de l’aménagement du territoire est une bonne idée. Mais il faut choisir le moment opportun pour éviter trois conséquences négatives : la mise en danger de RFF – les péages ne seront pas à la hauteur des attentes –, une exploitation insuffisamment rentable pour la SNCF – à cause d’un trop faible nombre de passagers tant que le report de Lyon-Paris ne sera pas effectif – et les effets d’éviction puissants pour les autres projets – POCL est l’un des projets ferroviaires les plus coûteux.

Le coût de POCL, estimé à 14 milliards d’euros, est impossible à financer dans le premier scénario. Ce projet n’a de sens que s’il peut être financé en une seule fois afin de rejoindre Lyon – si la ligne ne va pas jusqu’à cette ville, les ratios socio-économiques monétarisés ne seront pas atteints – et si la saturation est constatée par un observatoire contradictoire. Dès que la saturation sera constatée, le projet pourra être lancé. La réalisation de quatre autres lignes, notamment Montpellier-Perpignan, devrait être soumise aux mêmes conditions parce qu’elles ne sont pas indispensables pour l’instant.

Mme Chantal Berthelot, s’agissant des routes de Guyane, les problèmes relèvent plutôt des PDMI. Le SNIT comporte une fiche « ROU6 » intitulée « Renforcer l’accessibilité des populations des territoires situés à l’écart des réseaux de services publics, d’équipements collectifs ou de pôles d’emplois », consacrée à tous les problèmes routiers qu’on ne sait pas traiter. Cette méthode ne nous semble pas satisfaisante. Nous recommandons plutôt d’augmenter le montant des PDMI pour débloquer ces situations. Ces routes – c’est vrai pour la RN21 – participent à l’aménagement du territoire. Nous avons étudié la mise à deux fois deux voies de la RN21 à laquelle j’étais favorable, mais cela n’est pas possible.

Les PDMI sont les outils appropriés pour traiter les problèmes urgents de saturation, de contournement et de sécurité. À cet égard, la RN12 comme la RN134 ont besoin d’être mises à niveau. On ne peut pas laisser les territoires dans l’attente, suspendus à des promesses. Nous avons voulu traiter les problèmes les plus urgents, ce qui n’interdit pas de revenir de manière plus complète sur le sujet ultérieurement.

La ligne Limoges-Poitiers est reportée, madame Catherine Beaubatie, car l’évaluation socio-économique n’est pas convaincante – cette ligne est une bretelle là où nous cherchons à construire un réseau. Nous avons aussi entendu les élus entre Limoges et Toulouse qui craignent d’être condamnés à l’oubli. Il est plus raisonnable de restaurer la ligne Paris-Limoges.

Monsieur Jean-Louis Bricout, pour la RN2, vous devez vous en remettre au PDMI et inciter le Gouvernement à augmenter les dotations. Le chiffre de 450 millions d’euros que nous proposons n’est pas une limite infranchissable. Les PDMI peuvent être une piste intéressante pour relancer l’économie.

Monsieur Alain Chrétien, en Haute-Saône, les problèmes portent sur la desserte de Vesoul et des installations de Peugeot. L’entreprise dispose là-bas de son plus grand entrepôt logistique de France qui est mal desservi depuis l’Ouest et l’Île-de-France. Nous avons donc insisté sur le contournement de Port-sur-Saône et de Langres qui est déjà engagé. Pour le reste, le trafic routier ne justifie pas de créer une autoroute ou une deux fois deux voies sur l’ensemble du trajet.

Monsieur Philippe Bies, nous aurions aimé favoriser davantage les infrastructures de dimension européenne, car la connexion avec le reste de l’Europe est essentielle – de nombreux projets que j’ai cités y contribuent néanmoins déjà. Mais la réalisation de projets aussi importants, en raison de leur poids financier, risque de se faire au détriment de projets internes. Il convient de trouver un équilibre entre l’effort d’intégration européenne et l’amélioration du réseau national. Par ailleurs, deux autres sujets européens méritent l’attention : l’interopérabilité des réseaux et la modernisation de l’ERTMS.

Je ne suis pas hostile aux PPP, mais ce n’est pas la panacée. Ils ne peuvent pas intervenir dans tous les cas, car ils sont très coûteux – dès lors que l’emprunteur doit assumer le risque d’exploitation, le coût financier de la réalisation est plus élevé que dans le cas d’un investissement direct par l’État. En revanche, l’urgence peut justifier le recours au PPP – cela a été le cas récemment pour la deuxième rocade périphérique de Marseille, la L2.

Prévoir la réalisation de la ligne Bordeaux-Toulouse dans la période 2014-2030 ne signifie pas qu’il faille attendre 2030. Il peut être opportun de réaliser rapidement un projet de cette nature puisque le retour sur investissement est fort.

Monsieur Charles-Ange Ginesy, la commission a été très favorablement impressionnée par l’évolution du dossier de Nice. En renonçant à la LGV Méditerranée au profit de la ligne nouvelle Provence Côte-d’Azur, vous faites preuve de réalisme dans votre démarche et dans l’analyse des difficultés qui tiennent à des problèmes de capacité pour le trafic quotidien et de robustesse de la ligne – la multiplication des incidents perturbe l’économie et la vie des habitants.

La commission a apprécié le pragmatisme qui vous a conduit à déclarer que le projet pouvait être réalisé en plusieurs séquences. Même si M. Christian Estrosi ne veut pas que Nice passe une nouvelle fois après Marseille (Sourires), la recherche d’une solution exige une réponse coordonnée aux problèmes de Marseille et de Nice. Dans le cas de la première, la gare Saint-Charles est un nœud de congestion qui pose problème à l’ensemble du réseau et à sa fiabilité. Parce qu’elle est en cul-de-sac et ne dispose que de quelques quais, il faut, pour augmenter le trafic, améliorer la capacité pour les trains à sortir de la gare. À Nice, le problème est tout autre : il est lié à une arrivée dans un milieu urbain très dense et très contraint. Augmenter la capacité suppose d’enterrer une partie de la ligne, ce qui coûterait 3 milliards d’euros.

Dans le scénario n° 1, un seul problème pourra être résolu. Or, la hiérarchie des besoins du réseau impose de traiter d’abord le cas de Marseille, même si nous comprenons l’impatience des Niçois. Le scénario n° 2, dont je souhaite qu’il soit retenu, permettrait d’améliorer la situation à Marseille et à Nice.

Armés d’une feuille de route très riche et approuvée par l’ensemble des élus, les Bretons présentent leurs demandes avec une force, une conviction et une sérénité impressionnantes. Mais il en va de la Bretagne comme de l’Aquitaine, de l’Est ou du Languedoc-Roussillon. Ces régions ont déjà bénéficié du développement des infrastructures.

Grâce à la LGV jusqu’à Rennes en 2017, le temps de parcours vers toute la Bretagne diminuera de quarante minutes. L’Est va profiter de la phase 2 de la LGV Est alors même que la réalisation de celle-ci n’augmentera pas le nombre de passagers. Fallait-il en même temps privilégier la liaison Rhin-Rhône dont l’évaluation est moins convaincante ? Enfin, pour la région Languedoc-Roussillon, qui a déjà bénéficié d’investissements considérables, le contournement de Nîmes-Montpellier est en cours.

Si l’on veut répartir équitablement les efforts entre les régions, ceux-ci doivent porter sur des territoires qui n’ont pas été servis jusqu’à présent. Ainsi la région Midi-Pyrénées, qui est la plus grande de France, est un angle mort sur le plan des infrastructures de communication, ce qui est préjudiciable à l’ensemble de l’économie française, notamment en raison de la présence de l’industrie aéronautique.

M. Olivier Marleix.  Pourquoi renvoyez-vous à trente ans le projet global d’A154 qui pourrait être concédée et demanderait une subvention d’équilibre d’environ 50 millions d’euros, soit l’équivalent de deux kilomètres de TGV ? Vous lui préférez un projet traitant séparément les cas de la RN12 et de la RN154 pour lequel vous prévoyez des dépenses de 150 millions d’euros pour la seule RN12. Cela n’a aucun sens. J’aimerais comprendre.

M. Philippe Duron. Nous ne pouvions pas multiplier les infrastructures routières sur l’ensemble du territoire en raison des objectifs fixés par le Grenelle de l’environnement. Nous avons donc choisi de trouver des solutions aux situations insupportables, c’est-à-dire, pour le cas évoqué, l’interconnexion entre les deux nationales.

Je défends une idée à titre personnel : nous aurions intérêt à autoriser les routes express à péages qui sont moins coûteuses que les autoroutes et qui permettent d’aller plus vite. Nous construisons aujourd’hui des autoroutes qui ont parfois du mal à atteindre le trafic espéré. Je suis coupable d’en avoir fait une entre Falaise et Sées parce qu’il n’y avait pas d’autre solution pour moderniser cet itinéraire. Quand je l’emprunte, il m’arrive de m’interroger. De même, je ne suis pas sûr que le concessionnaire de l’A28 entre Sées et Rouen soit parvenu à un point d’équilibre dans son exploitation.

Nous devons nous interroger sur le bien-fondé d’une autoroute en termes d’investissement et d’équilibre économique dans l’exploitation. Nous avons essayé de classer les nombreux projets autoroutiers en fonction de l’urgence et de la pertinence. J’ai compris que je faisais beaucoup de déçus. Je vous prie de m’en excuser.

M. Alain Leboeuf. Qui décidera de la priorité des projets de rénovation ferroviaire et de l’ordre d’exécution des travaux ? Quand serons-nous informés de ces décisions ? Je pense à la ligne Nantes-Challans pour laquelle RFF attend la réponse de l’État.

M. Philippe Duron. Le ministre des transports a demandé au président de RFF de lui proposer un plan de rénovation qui devrait prochainement lui être présenté. Les décisions seront prises à l’issue d’un débat entre l’État et le gestionnaire des infrastructures. La commission pose des principes mais n’a ni la compétence, ni l’autorité, ni la légitimité pour dicter des décisions. Nous soulevons des problèmes qu’il nous semble urgent de traiter, notamment les grands nœuds pour éviter la paralysie du système.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je remercie M. Philippe Duron d’avoir accepté notre invitation. Je remercie aussi et je félicite tous les membres de la commission ainsi que les rapporteurs.

Je rappelle que deux scénarios sont présentés dans le rapport : le premier pour un montant de 10 milliards d’euros et le second, de 30 milliards, sur la période 2017-2030. Ces scénarios prennent en compte un programme de modernisation des voies existantes, le renouvellement du matériel sur des lignes TET (Paris-Clermont-Ferrand ; Paris-Orléans ; Paris-Cherbourg ; Limoges-Toulouse ; Bordeaux-Marseille-Nice) ainsi que le financement des mobilités propres qui constituent une vraie priorité.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 2 juillet 2013 à 10 h 30

Présents. – Mme Laurence Abeille, Mme Sylviane Alaux, M. Christian Assaf, M. Alexis Bachelay, Mme Catherine Beaubatie, Mme Chantal Berthelot, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, M. Philippe Duron, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Laurent Furst, M. Claude de Ganay, M. Charles-Ange Ginesy, M. Jacques Kossowski, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Olivier Marleix, M. Jean-Luc Moudenc, M. Rémi Pauvros, M. Philippe Plisson, Mme Catherine Quéré, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. – M. Denis Baupin, M. Stéphane Demilly, M. Michel Heinrich, M. Christian Jacob, M. François-Michel Lambert, M. Edouard Philippe, M. Napole Polutélé, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville

Assistaient également à la réunion. – M. Alain Chrétien, Mme Marianne Dubois, Mme Colette Langlade, Mme Émilienne Poumirol