Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires économiques > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires économiques

Mercredi 18 mars 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 43

Présidence de M. François Brottes Président

La commission a auditionné M. Philippe Wahl, président-directeur général du groupe La Poste.

M. le président François Brottes. Chers collègues, j’ai le plaisir d’accueillir pour la cinquième fois dans cette commission M. Philippe Wahl, président-directeur général du groupe La Poste, ancien président du directoire de la Banque postale. Il est désormais le principal maître d’œuvre de la transition postale. Avec 266 618 employés, La Poste demeure le deuxième employeur de France après l’État, même si le groupe comptait près de 300 000 collaborateurs il y a quelques années. Pour La Poste, une entreprise dont la richesse repose essentiellement sur la main d’œuvre, la mutation numérique constitue un enjeu spécifique. Alors que l’on nous annonce que des drones achemineront bientôt les colis, le volume d’objets transportés par La Poste a déjà chuté de 16 % entre 2008 et 2012, ce qui représente un passage de 17,8 milliards à 14,9 milliards d’objets transportés. Il faut avoir ces éléments à l’esprit lorsque l’on reproche à La Poste de devoir « serrer les boulons ». Certes, il existe des relais de croissance – je pense notamment à l’activité de la Banque postale – mais le défi est grand, non pas en raison d’un manque de talents dans votre entreprise, mais en raison de l’apparition de technologies de transport de substitution. D’ailleurs, bien que le secteur postal soit ouvert à la concurrence depuis un certain nombre d’années, je note que les concurrents ne se bousculent pas au portillon, probablement car il n’y a pas de parts de marché à saisir. Dans le même temps, on ne cesse d’évoquer le sort de La Poste, ici comme sur les territoires. Le Premier ministre a annoncé que La Poste accueillera des maisons de services au public, nous avons abordé le rôle de La Poste dans le cadre de la réforme du permis de conduire mise en œuvre par le projet de loi pour la croissance et l’activité, et dans le cadre de la transition énergétique, nous sommes nombreux à penser que les acteurs de proximité comme les postiers ont un rôle à jouer. De votre côté, vous essayez également d’identifier de nouveaux relais de croissance. Par ailleurs, La Poste est certainement l’une des entreprises les plus liées par des contrats – contrat d’entreprise, contrat de présence territoriale, accords Schwartz sur la presse. Or ces contrats poursuivent parfois des logiques différentes et fixent des obligations peut-être incompatibles, ce qui n’est pas générateur de compétitivité, si vous me permettez d’employer ce mot au sujet d’une entreprise publique. Bref, vous êtes parfois tenu à l’impossible. Monsieur le président-directeur général, donnez-nous des nouvelles de La Poste, des postiers, et des perspectives s’agissant d’une entreprise qui est probablement l’une des plus aimées dans notre pays.

M. Philippe Wahl, président-directeur général du groupe La Poste. Mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d’abord de vous dire combien c’est un honneur pour moi de m’exprimer devant vous aujourd’hui, afin tant de vous présenter le bilan de l’année 2014 que de vous livrer quelques perspectives d’avenir. Mon intervention sera structurée autour de trois axes : un axe stratégique, un axe économique et enfin un axe social. Je répondrai par la suite à l’ensemble de vos questions bien évidemment.

Premièrement, d’un point de vue stratégique, nous avons construit, avec les postières et les postiers, dans un processus de partage stratégique qui a mobilisé 150 000 d’entre eux, un plan stratégique dénommé « La Poste 2020 : conquérir l’avenir ». Dès 2014, nous avons engagé ce plan, qui constitue une transformation radicale du modèle économique et stratégique postal. Comme l’a souligné le président Brottes, le volume du courrier transporté a chuté de 16 % en quatre ans, et de 31 % en 6 ans. Une telle évolution, considérable pour toute entreprise, l’est encore davantage pour une entreprise dont le cœur de métier est le réseau, c’est-à-dire des frais et des organisations implantées sur l’ensemble du territoire. 2014 a été une année clef car nous avons nommé et verbalisé les problèmes. De plus, avec les membres du comité exécutif, nous avons réalisé un tour de France, débuté à Marseille le 12 septembre et clos à Fort-de-France le 11 décembre, afin de rencontrer 7 000 cadres supérieurs du groupe et de diffuser notre diagnostic : le modèle actuel de La Poste n’est plus viable. Tout est dit. Il n’est plus viable, non pas à cause des postières et des postiers ou de leurs dirigeants, mais car se sont substituées au transport physique de l’information, des technologies de l’information qui permettent le transport électronique des messages. Jamais depuis son apparition, il y a six siècles, le service postal n’a été confronté à un tel défi. Bien évidemment, lorsque j’ai pris mes fonctions de président-directeur général du groupe, j’ai commencé par relire l’histoire postale. Bien sûr, il y a eu un grand nombre d’évolutions technologiques, mais qui touchaient le mode de transport de l’information, et non pas la nature même de l’information. Cette transformation nous amène à inventer un nouveau modèle postal, dont vous trouvez les premières preuves en 2014. Ce nouveau modèle nous conduit, les postiers et les postières comme moi-même, à être souvent interrogés pour savoir si ce que nous faisons constitue encore une activité postale. J’assume cette question devant vous. Tout autre question relève d’une certaine nostalgie, pour laquelle j’ai de la sympathie mesdames et messieurs les députés, mais si l’on souhaite que La Poste, ce soit le képi, le vélo et la 4L jaune, autant le dire de manière nette, il n’y aura plus de Poste…

Il faut donc en revenir à l’essence même du service postal : l’identité même de La Poste, c’est la capacité à apporter un service universel humain de proximité et de confiance
– le facteur humain – partout, à des millions de personnes, et tous les jours. D’après nous, dans la société de demain, une société numérique, le facteur humain doit rester le facteur commun de tous les services que nous allons développer. Les semaines récentes ont traduit cette nouvelle stratégie. Vous avez décidé, dans le cadre de l’examen du projet de loi pour la croissance et l’activité, de nous confier certaines activités liées à l’examen du permis de conduire. Monsieur le président Brottes a abordé les 1 000 maisons de services au public que nous allons accueillir avec le souhait de préserver le réseau de services publics le plus capillaire possible dans notre pays, grâce aux 17 000 points de contacts que vous avez vous-mêmes inscrits dans la loi.

Deuxièmement, j’en viens au point économique, la première perception de nos résultats pour l’année 2014 est évidemment une déception. On doit toujours être déçu quand on est chef d’entreprise. Notre résultat d’exploitation est en effet passé de 778 millions d’euros à 719 millions d’euros. Néanmoins, il y a de bonnes nouvelles. D’abord, nous avions anticipé une phase d’inflexion économique, que j’avais moi-même évoquée devant vous à l’automne 2013, avant même ma nomination. L’inflexion s’est produite en 2014. Ensuite, et ce point doit nous rassurer, nous faisons sensiblement mieux que notre budget, ce qui veut dire que la plan stratégique a produit ses premiers effets. Ainsi, premier effet d’accélération des revenus, notre chiffre d’affaires a cru de 2 %, ce qui veut dire que malgré une chute de 31 % du volume de courrier, nous sommes capables de faire croître le chiffre d’affaires et nous parvenons à compenser les mécanismes d’attrition du courrier. Par ailleurs, nous avons continué à réduire les dépenses sur l’ensemble des coûts et des activités sur le territoire. Enfin, les nouveaux moteurs de croissance sont là : la Banque postale sort d’une excellente année puisque, en 2014, elle est la seule des six grandes banques françaises dont le produit bancaire progresse dans la banque de détail, alors que les cinq autres sont en régression ou en plus faible croissance ; GeoPost, notre opérateur de colis et d’express en France, avec Exapaq et Chronopost à l’international, connaît une croissance de 13 %, ce qui témoigne de la réussite du pari initié par mon prédécesseur, M. Jean-Paul Bailly, de tabler sur le courrier international.

Toutefois, le modèle économique reste divergent : la baisse du volume d’exploitation du courrier représente une évolution négative de 147 millions d’euros, qu’il faut compenser, et si l’activité de la Banque postale représente une évolution positive de 130 millions d’euros, GeoPost est légèrement en recul, car nous avons provisionné le montant d’une amende fixée par l’Autorité de la concurrence, qui touche l’ensemble des logisticiens. Comme le voyez, l’enjeu est de conforter les activités nouvelles afin qu’elles produisent plus de résultat d’exploitation que n’en détruit l’attrition des volumes du courrier. Au-delà, il est également nécessaire de générer à nouveau de la trésorerie. L’an passé, nous avons limité la destruction de trésorerie à 134 millions d’euros. J’espère que l’année 2015 sera l’année du triple rebond : croissance du chiffre d’affaires, croissance du résultat d’exploitation, génération de trésorerie positive afin de nous développer sans nous endetter. L’année 2014 est donc malgré tout une belle année. J’espère que l’an prochain je pourrai vous dire que cette année fut le début d’une longue marche mais dans tous les cas, ce n’est pas parce que les trois indicateurs que j’ai mentionnés seront devenus positifs que nous aurons changé le modèle de La Poste. Il faudra aller plus loin ! L’année 2014 donne néanmoins des raisons d’espérer et de croire dans l’efficacité de notre modèle stratégique.

Pour en venir, troisièmement, au volet social, je rappellerai que le 5 février dernier, nous avons signé trois accords sociaux majoritaires importants au sein de notre groupe. Le premier accord, essentiel, est en quelque sorte le pacte social qui accompagne le plan stratégique. Cet accord, signé par plusieurs organisations syndicales, se nomme « Un avenir pour chaque postier ». Il met l’accent sur la formation, la mobilité interne et la capacité d’ascenseur social et de méritocratie. La Poste est en effet l’une des rares entreprises à fournir encore des perspectives d’ascenseur social, grâce à des capacités de formation et de mobilité. À l’occasion de la signature du plan stratégique, nous avions pris l’engagement, confirmé par cet accord, de donner la priorité à la formation, qui ne constitue pas une garantie d’emploi
– aucune entreprise ne peut le promettre – mais une promesse de formation. C’est cet engagement qui explique la signature de cet accord par les organisations syndicales majoritaires. Il s’agit d’un élément fondamental, car nous ne transformerons pas La Poste sans les postiers. Le second accord tient au « complément poste », sur lequel je ne m’attarderai pas ici. Le troisième accord, enfin, signé unanimement, porte sur l’adaptation de la grille indiciaire de la fonction publique postale à des évolutions réalisées pour la fonction publique d’État. Cet accord inclut par ailleurs des mesures nouvelles pour les reclassés, ce qui était une préoccupation permanente de votre commission. Toutes les organisations syndicales de La Poste – le syndicat SUD, la CGT, la CFDT, Force ouvrière, la CGC, le CFTC et l’UNSA – ont signé cet accord. De ce point de vue, j’ai le sentiment d’avoir honoré la promesse que je vous avais faite de prendre ce sujet à bras le corps.

Toujours en matière sociale, nous avons également introduit une dernière innovation extrêmement productrice de sens et très utile pour moi en tant que président-directeur général. Depuis ma nomination, j’ai tenu avec chacune des organisations syndicales quatre cycles de réunion stratégique, dont le dernier a eu lieu fin janvier-début février. Durant trois ou quatre heures, nous abordons la totalité des sujets stratégiques qui touchent le groupe. À titre d’exemple, j’évoque avec eux nos activités en Pologne où, l’an dernier, nous acquis pour 120 millions d’euros le numéro cinq du colis express polonais, ce qui a permis à notre filiale GeoPost polonaise d’être le premier acteur du colis dans ce pays.

J’en profite, puisque j’évoque l’international, pour rappeler que nous sommes le numéro un du colis express en France, en Pologne donc, en Espagne via la filiale SEUR et au Portugal, et que nous atteignons la deuxième place en Allemagne et au Royaume-Uni. Cette activité internationale emporte des effets très positifs pour les forces de travail en France. En effet, le commerce sur internet se traduit par une explosion du volume de livraison de colis, sur laquelle nous bâtissons une partie du modèle économique de demain. Alors qu’un flux important de colis atteint l’Europe depuis le Japon, la Russie, les États-Unis, la Chine, la capacité d’un acteur postal d’intégrer dans son réseau la plus grande partie de ces colis crée de la valeur et des emplois. Grâce à notre réseau, aujourd’hui le deuxième en Europe mais le premier d’ici quatre ans selon nos ambitions, nous sommes en mesure d’alimenter les plateformes de colis françaises. Le développement de l’activité à l’international n’est pas simplement en plus forte croissance et plus rentable que notre activité française, elle fournit du travail en France. Évidemment dans nos réunions avec les organisations syndicales, ce sont des choses que je prouve, que je montre, que j’illustre, surtout dans la mesure où une grande partie de notre avenir repose sur la capacité à bénéficier de la vague internet et à pouvoir assurer une livraison B-to-C c’est-à-dire au domicile.

Pour conclure, j’évoquerai l’expérience que nous avons lancée à Angers avec des facteurs volontaires et l’assentiment des organisations syndicales. Nous livrons le matin le courrier urgent des entreprises, par définition ouvertes, et le courrier non urgent des particuliers ; le soir, nous faisons un deuxième passage chez les particuliers avec le recommandé et le colis. C’est un très gros succès car le taux d’instance, c’est-à-dire le pourcentage des colis que nous ne sommes pas parvenus à délivrer à nos clients, passe de 14 % à moins de 3 %. Cette expérience à la limite et la puissance des expériences. La puissance, c’est qu’elle nous donne envie de généraliser. La limite, c’est que c’est une ville moyenne et que l’on ne sait pas ce que cela donnerait dans une très grande métropole. Je voulais vous livrer cette expérience avant d’aborder les questions, afin de vous montrer que La Poste est dans l’innovation permanente. Je suis prêt à prendre le risque de la transformation, même si cela fait désordre car elle est radicale, brutale et inarrêtable. Voilà le bilan de l’année 2014, des dialogues sociaux, auxquels vous êtes sensibles, et des perspectives. Même si l’année 2015 est un succès, il restera cinq années d’efforts fondamentaux.

M. le président François Brottes. Merci, monsieur le Président. Désormais, en Pologne, on parle donc du facteur français… Je vais d’abord proposer à Jean Launay, qui est le président de la commission supérieure du service public des postes et des télécommunications, de nous dire quelques mots.

M. Jean Launay. Merci de m’accueillir à la commission des affaires économiques. Le sujet que j’ai traité devant la commission des finances en remettant un rapport sur l’évolution des maisons de services au public, et la contribution que La Poste pouvait y apporter, n’est qu’un des aspects de ce nouveau plan stratégique de La Poste qui vient de nous être exposé. Néanmoins, à travers la confirmation des 17 000 points de contact, l’une des dispositions de la dernière loi postale, le constat a été fait de l’évolution du statut d’un certain nombre de bureaux. Le processus de transformation des bureaux de poste en agence postales communales était probablement à bout puisqu’il fallait l’acceptation des maires et des équipes municipales pour que ces processus de transformation puissent aboutir.

La solution suggérée dans le rapport d'information sur la contribution de La Poste au maintien des missions de service public dans les territoires part du constat que l’entreprise de réseau qu’est La Poste est certainement celle qui est la plus diffuse sur le territoire national. L’objectif politique, affiché dès 2013 par M. Jean-Marc Ayrault, pouvait être tenu dès lors que l’on acceptait que la présence postale fût un atout, en s’adossant sur les implantations existantes pour concilier les deux obligations qui figurent dans la loi postale : l’aménagement du territoire et le maintien de la mission de service public. Avec cette orientation, il y a la possibilité de stabiliser le réseau par le maintien des bureaux tels qu’ils sont et d’amener des partenaires, porteurs de missions de service public, à s’adosser aux bureaux existants.

Le discours du président est un discours de sincérité sur l’évolution du groupe La Poste. Je rappellerai aussi que l’État étant actionnaire à 100%, lui-même ou via la Caisse des dépôts et consignations, il n’est pas anormal qu’il s’intéresse de près à l’évolution d’une entreprise pourvoyeuse de main d’œuvre et qu’il lui donne aussi par tous les moyens d’accompagnement financier, par le CICE comme le développement des maisons de services publics, l’appui au développement et à la transformation du groupe La Poste.

M. le président François Brottes. Merci. Je vais aussi donner la parole comme c’est l’usage à Madame Michèle Bonneton qui est rapporteur pour avis du budget de La Poste.

Mme Michèle Bonneton. Merci monsieur le Président et merci à M. le président Philippe Wahl et ses adjoints d’être parmi nous. La Poste est une très grande entreprise, cela a été dit. Les français et leurs représentants élus y sont très attachés. En retour, La Poste bénéficie d’un capital de confiance certain auprès des français.

Les missions de service public confiées à La Poste sont fixées dans un contrat d’entreprise signé en juillet 2013, qui s’appelait auparavant contrat de service public. Ce changement de nom est éloquent. L’entreprise La Poste se doit d’être en bonne santé économique. Or, le volume du courrier est en baisse depuis plusieurs années. En revanche, le volume de petits courriers a augmenté. Est-ce que cela peut compenser la diminution du courrier ? Face à cette situation difficile, vous avez présenté un plan stratégique, « La Poste 2020 : conquérir l’avenir ». J’en reviens aux missions de service public qui font l’objet du contrat. Chaque mission correspond à un contrat qui a une échéance spécifique, ce qui nuit à la lisibilité de l’ensemble. Ne serait-il pas utile d’harmoniser à terme les différentes échéances de ces contrats ?

Par ailleurs, vous avez engagé une mutation des métiers et des efforts ont été faits pour améliorer les conditions de travail. Cependant, les syndicats estiment que le compte n’y est toujours pas. Le pacte social accompagnant le plan stratégique n’a pas été approuvé dans son ensemble pour tous les syndicats. Certains d’entre eux considèrent que ce pacte social est une RGPP déguisée et sont mécontents en raison du blocage des évolutions des grilles et des rémunérations des fonctionnaires. S’agissant toujours des conditions de travail, les facteurs sont très inquiets au sujet des changements de rythme de travail annoncés. Cette évolution ne semble pas aller dans le sens d’une amélioration de leurs conditions de vie. Ils seraient notamment pénalisés par le remplacement d’une pause de vingt minutes rémunérée par une pause non rémunérée de quarante-cinq minutes. Quant aux usagers, on ne voit pas vraiment l’intérêt pour eux. Si cela permet un gain d’argent pour La Poste, les facteurs comme les usagers ne semblent pas y trouver beaucoup de bénéfices. Quelles réponses avez-vous à ces interrogations ?

Le métier de facteur est en mutation avec la généralisation de l’utilisation du smartphone. Pouvez-vous nous dire ce qu’il sera fait précisément de l’utilisation du smartphone ? La Poste a aussi lancé beaucoup d’autres expérimentations comme la collecte de papier, le portage de produits culturels, de courses ou les visites aux personnes âgées. Ces nouvelles missions restent assez marginales à ce jour, pensez-vous en généraliser certaines et avec quel financement ?

Nous sommes particulièrement attachés à ce que le cœur de métier de La Poste reste le « service humain » et nous souhaitons vraiment que cet aspect reste très présent, par exemple avec le passage d’un facteur six jours sur sept au domicile, ce qui n’est pas toujours le cas.

Quant à la présence territoriale de La Poste, les 17 000 points de contact constituent un formidable atout pour les territoires. La Poste tire d’ailleurs sa richesse de son image de proximité. Cependant, il n’existe déjà plus que 9 800 bureaux de poste de plein exercice, le solde étant constitué d’agences postales ou de relais-poste, dont la pérennité n’est pas assurée à moyen terme. Il semble bien que, sur le terrain, on assiste à une nouvelle tentative de transformation massive des bureaux de poste, ce qui nous inquiète beaucoup. La Poste va-t-elle encore fermer des bureaux de poste de plein exercice en 2015 ?

Qu’en est-il de la création des maisons de service public sur laquelle l’État s’engage à un financement partiel ? Ces maisons s’installeront-elles dans des bureaux de poste de plein exercice ou dans des agences postales communales ?

Pour terminer, je rappellerai que La Poste a bénéficié à hauteur de 300 millions d’euros du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), ce qui est tout à fait légitime, sans toutefois que cela s’accompagne de créations d’emplois en France.

M. Philippe Wahl. Notre engagement est d’accueillir dans nos bureaux de poste 1 000 maisons de services au public pour la fin de l’année 2016. Le processus de consultation des commissions départementales de présence postale territoriale a commencé. Sur cette base, nous allons établir des listes qui bénéficieront du consensus des élus des territoires. En réponse à Mme Bonneton, des bureaux de poste de plein exercice ont donc vocation à être la « terre d’accueil » des nouvelles maisons de services au public. Il s’agit d’une forme de présence postale et d’un moyen pour nous de mutualiser des moyens, tout en permettant d’accroître la fréquentation des bureaux de poste. Je veux insister devant vous sur le fait que la fréquentation est ce qui détermine la forme de la présence postale territoriale. En effet, s’il n’y a plus personne dans un bureau de poste, nous devons le transformer. Il est heureux que de nouveaux formats émergent et à cet égard, la maison de services au public apparait très clairement comme un format pertinent pour les zones rurales. Je pense également aux facteurs-guichetiers, notre objectif est d’en avoir plus de 1 000 d’ici fin 2016, contre quelques dizaines seulement aujourd’hui. Pour les zones urbaines qui concentrent l’essentiel de la population, nous aurons par ailleurs des relais de poste urbains, soit la possibilité d’avoir dans un commerce de centre-ville un « corner » postal accueillant les services de base.

Nos réponses s’inscrivent donc à la fois dans une perspective de continuité mais aussi de diversification. Les 17 000 points de contact constituent assurément un atout, à la condition cependant que tout le monde joue le jeu, à savoir les collectivités territoriales, l’État et l’ensemble des opérateurs que nous pouvons accueillir.

Le développement des colis est bien entendu un axe stratégique majeur pour notre entreprise. Au cours de l’année 2014, la croissance du chiffre d’affaire du colis a compensé la baisse de celui du courrier. Cette compensation n’est cependant pas transposable au résultat d’exploitation. Avec moins de volume, notre défi revient à faire un meilleur résultat d’exploitation. Nous n’y sommes pas encore.

Vous avez également abordé la situation économique, sociale et salariale des postiers. L’accord « Un avenir pour chaque postier » a été signé par des organisations syndicales qui représentent la majorité des postières et des postiers. Aurait-on pu envisager une unanimité sur un tel accord ? Ce n’est pas à moi de répondre mais aux deux syndicats qui ne l’ont pas signé. Exiger l’unanimité des syndicats sur tous les changements que nous conduisons reviendrait à instaurer un droit de véto qui nous condamnerait à l’immobilisme. Nous nous inscrivons pleinement dans le dialogue social et nous évoquons également avec nos interlocuteurs syndicaux les questions stratégiques, s’agissant d’Amazon, de l’évolution des directives postales, de ce qui se passe en Asie, ou encore de la question des services à la personne. En somme, nous discutons mais l’unanimité ne peut pas être un objectif de dirigeant d’entreprise. Compte tenu des spécificités du dialogue social en France, je considère que nous avançons dans de bonnes conditions.

Au sujet de la situation des grilles de fonction publique, ma réponse est très factuelle : l’accord a été signé par les six syndicats de La Poste. Peut-être certains auraient-ils souhaité obtenir davantage mais là n’est pas la question. Ils ont tous signé !

L’inquiétude des facteurs est humaine et rationnelle. Ceux-ci mesurent chaque jour la diminution du volume du courrier. Ils sont les premiers, lorsque je les rencontre, à me dire que la sacoche est moins lourde mais qu’il y a toujours autant de boîtes aux lettres et que les distances restent les mêmes. Nous sommes conscients des contradictions que nous avons à gérer. Les solutions passent par le dialogue et par l’investissement. Sur ce point, je vous remercie d’avoir évoqué le programme Facteo qui vise à doter la totalité des 88 000 facteurs d’un smartphone. C’est pour notre groupe un facteur majeur d’innovation.

S’agissant de la qualité de service, je veux être très concret. Chaque jour, les facteurs vont déposer chez les Français près de 80 millions d’objets. Le moindre problème peut apparaître considérable, même si leur nombre est réduit. Le « zéro défaut » est difficile à atteindre. Cela étant, la qualité de service telle qu’elle est mesurée en permanence par des opérateurs de sondages indépendants montre que nos résultats sont bons, et même meilleurs que les objectifs qui nous sont assignés par notre contrat d’entreprise.

Un point concernant le CICE : je crois qu’il nous faut être très précis sur les termes. La Poste a créé des emplois l’année dernière, dans les secteurs en développement et en accélération. Cependant, avec un chiffre d’affaires de l’activité centrale du groupe qui a tendance à diminuer, de l’ordre de 7 % par an, nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir une création nette d’emplois. Vous ne trouverez aucun chef d’entreprise qui pourrait s’engager à ne pas tenir compte de la chute de son chiffre d’affaires et des effets de productivité. Pour autant, La Poste continue d’embaucher et demeure l’un des dix premiers recruteurs sur le marché français.

Enfin, concernant la pause des facteurs, des négociations sont en cours et nous parviendrons à trouver des aménagements.

M. le président François Brottes. Sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, nous avons eu de longs débats. Certains ne voulaient pas que La Poste en bénéficie car l’entreprise ne serait pas sur un marché concurrentiel. Ce n’est pas tout à fait juste puisque la concurrence existe bien et que, par ailleurs, vos charges les plus importantes sont des charges fixes liées aux ressources humaines. En aucun cas, le CICE n’est suffisant pour compenser la perte du chiffre d’affaires en termes de courriers. Il y a donc parfois des faux débats.

M. Philippe Wahl. Ce point est fondamental pour l’économie postale. Si nous n’étions pas en concurrence, comment expliquerait-on alors la baisse de 7 % du volume des courriers ? Dans une économie de marché, la baisse du volume signifie que d’autres services vous prennent des parts de marché. La communication électronique nous prend tous les jours des milliers d’objets. Nous sommes donc en concurrence dans tous les secteurs. Je ne vous parle même pas de la concurrence sur le marché du colis. Quant à la concurrence bancaire, nous n’avons pas été accueillis dans un lit de rose.

M. le président François Brottes. Vous avez bien été accueillis par les consommateurs par contre.

M. Hervé Pellois. Je suis, tout d’abord, très heureux de voir que, grâce à un amendement au projet de loi dit « Macron » porté avec M. Laurent Grandguillaume, nous avons permis que les informations des députés soient déposées dans l’ensemble des boîtes aux lettres de nos circonscriptions alors que cela n’est réservé aujourd’hui qu’aux collectivités territoriales. J’ai eu l’occasion d’assister, le mois dernier, à une réunion sur les nouveaux services des facteurs. J’étais très satisfait de voir le dynamisme de l’équipe départementale de La Poste. J’ai pu constater tous les efforts qui sont faits pour développer de nouveaux services. J’ai appris que La Poste faisait même du recyclage de papier. Dans le cadre de cette diversification et de cette individualisation de plus en plus importante des services, comment La Poste parvient-elle à combiner l’efficacité et la proximité ? Quel plan de formation offrez-vous à vos facteurs ? Quelles sont les réactions des facteurs par rapport à ces évolutions ?

M. Jean-Claude Mathis. Je souhaiterais vous interpeller sur un problème rencontré par beaucoup de candidats aux élections départementales. La distribution des tracts s’est faite dans des conditions un peu difficiles. Elle ne se fait pas dans les boîtes aux lettres où est marqué « Stop-pub » ou dans celles situées à l’intérieur des bureaux de poste. Pourquoi cette anomalie alors qu’on ne peut pas confondre la distribution de publicités classiques avec celle d’informations des candidats dans une campagne électorale ?

Mme Jeanine Dubié. Ma première question porte sur la création des mille maisons de services au public annoncée en juillet 2013. La Poste est un partenaire incontournable. Le Premier ministre a annoncé que d’autres opérateurs nationaux pourraient s’associer à cette démarche. Je crois que c’est une chance pour les territoires ruraux et de montagne. Elle permettra de lutter contre les inégalités d’accès aux services publics. Pourriez-vous nous préciser le cahier des charges et le calendrier prévisionnel de mise en œuvre de ce partenariat ? Quelles seront les conséquences d’un tel partenariat pour les agents de La Poste ? Ma seconde question concerne le climat social à La Poste. Nous constatons, sur le terrain, une multiplication des mouvements de grève en raison de la surcharge de travail, des changements d’horaires, des fermetures et du non remplacement de personnel. Même si je comprends la nécessité de changement de votre activité, je suis inquiète de la radicalisation de ces mouvements. Cela pose la question du management au sein de cette entreprise. On ne peut pas dire que ces mouvements ne sont que de la résistance au changement. Comment La Poste prépare-t-elle donc ses salariés à ces nouvelles missions ? Quelles sont les actions que vous mettez en œuvre pour que l’ensemble des salariés, y compris l’encadrement intermédiaire, s’approprient cette dynamique de changement indépendamment des négociations avec les organisations syndicales ?

M. André Chassaigne. Au niveau social, nous constatons effectivement sur le terrain des difficultés grandissantes. Je pense que vous vous éloignez des pistes qui avaient été précisées dans le rapport de la commission du grand dialogue de La Poste, rendu en septembre 2012, et qui insistaient beaucoup sur les difficultés en termes de ressources humaines, d’organisation du travail et de conduite du changement. Aujourd’hui, il y a indiscutablement un problème pour les facteurs sur l’organisation de la journée de travail. Ils doivent commencer plus tard le matin et finir plus tard l’après-midi, avec trois-quarts d’heure de pause non payée le midi. On mesure les complications que cela peut créer dans une tournée, notamment en milieu rural, en termes de retour en arrière et de possibilité de déjeuner. Dans le milieu rural, des facteurs peuvent se trouver, en milieu de journée, dans des hameaux isolés sans services de proximité. Nous constatons, de nouveau, un retour de l’absentéisme et d’arrêts de travail liés à des questions nerveuses. Soyons attentifs à cela, il ne faut pas le sous-évaluer. Une autre question, fréquemment posée, reste sans réponse : celle des agents reclassés, qui ont un blocage de carrière depuis qu’ils n’ont pas fait le choix, en 1993, d’opter pour un nouveau statut. Il semblerait que l’affaire ne soit pas réglée. Je voulais donc vous rappeler encore ce point-là pour que vous puissiez nous donner quelques éclaircissements.

Sur le plan financier, vous dites que le chiffre d’affaires est en hausse globalement, mais qu’il est en baisse pour le courrier. Vous comprenez bien qu’avec une approche de découpage, on peut très facilement, ensuite, faire une vente à la découpe. Si d’un côté vous avez des activités rentables et de l’autre des activités non rentables, et s’il n’y a pas une approche globale du groupe, je suis très inquiet sur le maintien de services à la population et du service public. Ce qui est soumis à la concurrence et ce qui ne l’est pas ont des résultats à géométrie variable. Il faut donc être attentif à ne pas utiliser un chiffre dans un sens et ne pas l’utiliser quand il s’agit de rendre des services à la population. Quand on dit que le résultat d’exploitation est de 719 millions d’euros, ce qui est intéressant c’est de savoir ce que vous faites de cet argent. On sait que 25 à 30 % de cette rentabilité est versée aux actionnaires publics que sont l’État et la Caisse des dépôts et consignations. En 2013, 126 millions d’euros ont été versés à l’État et 45 millions d’euros à la Caisse des dépôts et consignations. Vous venez de nous dire qu’ensuite, une partie de ce résultat d’exploitation a été utilisée pour des développements externes, notamment à l’étranger. Pourriez-vous être plus précis ? Quel est votre véritable projet industriel en termes d’investissements en France ? Je suis très dubitatif sur d’autres grandes sociétés à capitaux publics qui se sont beaucoup développées à l’étranger et qui reviennent ensuite parce qu’elles se rendent compte que cela peut être hasardeux. Vous avez des objectifs de rentabilité chaque année : 780 millions d’euros en 2015, 1,18 milliards d’euros en 2016 et 1,92 milliards d’euros en 2020. Quel est l’objectif de cette rentabilité ? Qu’allez-vous en faire ? Par ailleurs, quel est le volume de l’activité qui est renvoyé à des filiales ? Si une partie de l’activité est renvoyée à des filiales, cela va bien sûr fausser le résultat global. Or, certaines filiales ont des capitaux privés. C’est le cas notamment de La Poste mobile, où vous êtes présents à 51 %, d’Asendia, où vous êtes présents à 50 % avec la poste suisse, ou du holding des activités bancaires SF2. Quel est le poids de ces filiales ? N’y a-t-il pas année après année un déplacement de l’activité de La Poste vers les filiales ? Comme cela s’est fait au Royaume-Uni et au Portugal, avez-vous dans l’esprit un besoin de capitalisation qui ferait appel à de l’actionnariat privé dans le cadre du développement que vous souhaitez mettre en œuvre ?

M. Philippe Wahl. Je suis très content que vous ayez souligné le dynamisme des équipes de La Poste sur les nouveaux services des facteurs.

La Poste est actuellement confrontée à de profondes transformations. Pour faire face à la perplexité vis-à-vis du potentiel économique, il faut commencer par des changements économiques discrets et modestes. A côté des facteurs, le potentiel autour du vieillissement de la population avec les services à domicile est énorme. C’est l’un des avenirs de La Poste mais il faut démonter qu’elle en est capable. Les facteurs sont eux-mêmes très favorables à ces perspectives car ils sont les premiers à mesurer la menace qui pèse sur leurs métiers traditionnels. C’est notre rôle de dirigeant d’entreprise de les préparer à la mutation de leur métier.

L’accord social signé par les syndicats majoritaires « Un avenir pour chaque postier » comporte deux engagements : 80 % des postiers seront formés chaque année et, sur deux ans, c’est la totalité des 240 000 postiers qui le sera. C’est considérable. La Poste doit donner la capacité de mobilité à ses employés.

Concernant les mille maisons de services au public, le calendrier de mise en œuvre commence aujourd’hui. Des commissions départementales de présence postale territoriale se réunissent déjà avec les élus pour fixer la liste des localisations des futures maisons des services publics. M. Jacques Savatier, mon collègue du comité exécutif de La Poste chargé d’une mission avec les territoires et les élus, constate que souvent d’ailleurs, ces localisations correspondent aux anciens chefs-lieux de cantons qui viennent d’être modifiés. Ces maisons des services publics répondent à un besoin et auront une influence favorable. La fréquentation des bureaux de poste sera ainsi en hausse, ce qui est positif en termes d’accueil et de commerce supplémentaires.

La question du management du changement est cruciale. La Poste est soumise à une réorganisation continue et qui va se poursuivre tant que le volume de courrier ne cessera pas de diminuer. Plusieurs points sont à souligner : d’abord, le nombre de journées de grève est à son plus bas niveau historique en 2014, même si les nouvelles formes de contestation ou de difficultés ne sont pas ignorées. Nous formons ensuite nos manageurs à la gestion du changement.

Enfin, la méthode du changement est normée en cinq phases de réorganisation. C’est ainsi que la transformation de la plateforme industrielle du courrier de La Rochelle s’est bien passée, et cela a été confirmé par les syndicats. La plateforme a été fermée mais aucun licenciement n’a été opéré sur les cent-cinquante salariés et seulement sept cas personnels sont encore à traiter pour un changement de métier. Un opérateur de machine de tri est ainsi devenu consultant en ressources humaines. La mobilité professionnelle doit se faire avec le salarié et elle est nécessaire.

On ne peut pas dire que les difficultés sont grandissantes, mais il est vrai que l’adaptation du modèle postal devient de plus en plus compliquée. La baisse du volume de courrier s’accélère pour atteindre début 2015 moins 8 %, ce qui est très mauvais. Parallèlement, le nombre de kilomètres à parcourir et le nombre de boîtes aux lettres ne diminuent pas, ce qui crée des tensions chez les postiers. Celles-ci doivent être gérées avec la modernisation des outils des facteurs, le dialogue social et l’accompagnement au changement. L’absentéisme constitue la traduction de ces tensions mais les accidents du travail, en recul en 2014, montrent que les investissements produisent des résultats.

Sur la distribution des plis électoraux, la mention « Stop-pub » ne perturbe pas la distribution des déclarations des candidats aux élections.

Concernant le risque de démantèlement et de vente de chacune des activités de La Poste, celui-ci existe toujours mais il est contraire à notre volonté stratégique. Nous consolidons nos efforts dans toutes les branches courrier, banque, réseau et numérique. La présence d’intérêts privés dans le groupe est faible mais elle constitue un moyen de gagner du temps stratégique. Par exemple, l’activité de téléphonie mobile «  La Poste mobile », mise en place par mon prédécesseur M. Jean-Paul Bailly, a bénéficié de ces fonds privés. La confiance dans La Poste et ses multiples relais territoriaux et le retour à une mission originelle de télécommunication ont permis de toucher plus d’un million deux cents mille clients. Sans la présence d’un partenaire privé, cette activité de téléphonie mobile aurait pris beaucoup plus de temps pour aboutir, avec perte d’argent et risque d’échec. M. Rémy Weber, mon successeur à La Banque postale, vient de signer un partenariat très innovant sur la gestion d’actifs avec le groupe mutualiste néerlandais Aegon. Tant que la personne publique reste majoritaire, les partenariats avec le privé restent bénéfiques.

L’objectif de rentabilité affiché par La Poste correspond à un résultat d’exploitation de 1,9 milliard d’euros en 2020. C’est le bien des postiers en général qui est visé puisque cela se traduira notamment par des intéressements pour les salariés ; en 2014, l’augmentation du chiffre d’affaires a ainsi été répercutée sur les salariés. En conclusion, les difficultés liées aux transformations de La Poste existent mais elles sont accompagnées par le dialogue social, le management du changement et la réussite de notre projet stratégique.

Concernant les salariés reclassés, un accord social sur la grille salariale signé unanimement par les six syndicats le 5 février 2015 comprend des mesures spécifiques pour les reclassés. La négociation sociale permet de prendre en compte ces situations mais l’organisation concrète des horaires ou des tournées pour les facteurs restent gérées localement.

M. le Président Brottes. Merci monsieur Wahl pour ce premier lot de réponses. Les salariés reclassés non syndiqués ne se retrouvent cependant pas forcément dans l’accord signé en février dernier. De même, on ne peut pas empêcher les entreprises publiques françaises d’exercer une partie de leur activité à l’étranger quand des entreprises étrangères viennent en France sans retenue. Nous devons prendre part à la société mondialisée.

M. Philippe Wahl. Surtout dans un métier mondial comme la distribution des colis. Si LVMH envoie des colis de luxe au Japon, je préfère que ce soit GeoPost qui le transporte jusqu’au Japon, en lien avec la poste japonaise avec qui nous avons un accord, plutôt que Fedex ou UPS. Nous avons une méthode de développement à l’international qui est très progressive, mais qui marche : nous réalisons plus de cinq milliards d’euros de chiffre d’affaires, ce qui bénéficie aux centrales et aux plateformes logistiques de notre groupe en France.

M. Éric Straumann. Depuis 2011, le marché du courrier est complètement ouvert. Nous nous attendions à une concurrence étrangère forte – pour le courrier, pas le colis – que nous n’avons finalement pas observée. Quelle est la situation de ce marché ? N’y a t-il pas une forme de régulation, par les prix, qui permette de prendre en compte la baisse du courrier transporté ? Ensuite, sur votre activité de banque postale, quelle est votre position sur le marché du financement des collectivités locales ?

Mme Annick Le Loch. Vous avez exprimé votre ambition et votre responsabilité pour La Poste, qui est la transformation radicale de l’entreprise, et votre devoir de trouver de nouveaux relais d’activité. Je me fais l’écho de tensions et de difficultés du personnel, dans le Finistère, qui a du mal à s’adapter devant ce « rouleau compresseur » qui avance inexorablement, sans que les employés ne se soient approprié ce bouleversement, pourtant nécessaire.

Votre souci du dialogue a été entendu, et les accords syndicaux qui ont été signés l’illustrent. Mais les échos sur le terrain sont ceux d’horaires qui diminuent, la fin des heures supplémentaires, notamment pour la distribution de plis électoraux, les tournées qui se rallongent ou les bureaux qui ferment. En parallèle, de nouvelles missions peuvent les troubler, comme en matière de transition énergétique, le conseil sur le prêt à taux zéro ou la signature de contrats avec des compagnies privées, qui entraînent la remise de catalogues ou de bons de commande en main propre par le facteur. Comment gérez-vous ces évolutions de métier en matière de formation et de management ?

M. Jean-Claude Bouchet. Je salue la clarté des propos de M. Wahl. Hier, La Poste était une entreprise « publique », sur un marché captif. Aujourd’hui, le marché est très différent : il est en mutation, il est concurrentiel. Hier, le service à la clientèle était important ; aujourd’hui, sur ce marché concurrentiel, avec votre obligation de résultat, qui a impliqué la mise en place de plans d’optimisation ou de rationalisation, on s’aperçoit qu’il y a une baisse de ce service à la personne, alors que les attentes des clients sont aussi centrales qu’avant. Quel est votre avis sur ce décalage ?

Mme Marie-Hélène Fabre. Je m’associe aux remerciements qui viennent de vous être délivrés. Nous vous avons interrogé sur la question des reclassés de La Poste, et vous avez mené un travail en lien avec le président Brottes et nous-mêmes : je tiens à en prendre acte et à vous remercier d’avoir pris à bras le corps ce dossier, et d’avoir signé un accord avec les organisations syndicales.

La Poste est en pleine mutation, j’en conviens. Je suis pourtant dans une circonscription où je reçois toutes les semaines des usagers qui se plaignent de problèmes sur la distribution et l’acheminement irréguliers du courrier. Des locataires d’immeuble se sont constitués en association pour interpeller La Poste, car ils peuvent rester plusieurs semaines sans courrier. Que pouvez-vous faire dans ce genre de situations, dont il est fait écho dans la presse ?

M. Michel Sordi. Je rappelle ces propos, qui ne sont pas de moi : « ceux qui ont survécu, ce ne sont pas les plus intelligents, ni les plus forts, mais ceux qui ont su s’adapter ». Sur votre stratégie, vous avez été clair, et j’espère que cela est de bon augure.

Localement, sur nos territoires, des locaux de La Poste ne sont plus adaptés, en termes d’accessibilité, de confidentialité, voire de situation géographique. Avez-vous des plans d’investissement pour mener des adaptations aux besoins de la clientèle ?

M. Frédéric Roig. Face à la baisse du courrier, pouvez-vous préciser votre stratégie de transformation du groupe face aux obligations issues de la loi postale qu’a évoquées Jean Launay ? Il est important, sur les territoires ruraux et surtout sur les territoires de montagne, de conserver la complémentarité entre La Banque postale et les bureaux de poste, même si cela a pu être délicat ces dernières années, les logiques et les critères d’attribution n’étant toujours les mêmes. C’est par exemple le cas de la mise en place de distributeurs automatiques de billets.

Certes, il y a une baisse du courrier, mais cela n’empêche pas une meilleure information des usagers sur ces transformations. En effet, s’ils nous sollicitent beaucoup sur le maintien de prestations traditionnelles comme la « camionnette jaune », ils ne sont pas toujours utilisateurs des nouvelles prestations que vous proposez.

J’ai longtemps siégé au sein de la commission départementale de présence postale, où j’évoquais déjà cette inquiétude. D’ores et déjà, dans les CDPP, des listes seraient établies à propos de l’implantation des futures maisons de services au public, mais sur quels critères sont-elles préparées ? Et quel co-pilotage sera mis en place entre vos collaborateurs et les services déconcentrés de l’État ? Il faut que nous puissions, élus locaux ou parlementaires, agir pour avoir un maillage territorial qui corresponde à la réalité des besoins des services et des usagers dans les territoires.

M. Jean-Pierre Le Roch. Un an après la signature du nouveau contrat de présence postale territoriale 2014-2016, où en est sa mise en œuvre ? L’intégration de services postaux dans les espaces mutualisés de services – relais ou maisons de service public – est un enjeu essentiel. À quelle strate de communes s’adresse-t-elle prioritairement ? Y aura-t-il un schéma départemental ?

La mutualisation de services pourrait prendre de nouvelles formes, avec de nouveaux partenaires issus de l’économie sociale et solidaire, des buralistes ou des offices de tourisme. Pourriez-vous dresser un premier bilan de ces contrats de présence postale ?

Par ailleurs, lors de l’examen du projet de loi dit « Macron », ont été évoquées et examinées les conditions d’obtention du permis de conduire, avec l’objectif de diminuer le délai important d’attente entre les différents passages, à quarante-cinq jours au plus. La proposition d’externaliser à La Poste la passation du permis de conduire a été envisagée : le ministre vous a demandé de faire des propositions, pouvez-vous nous apporter des précisions ? Ne s’agira-t-il que de l’examen du code ou également de l’épreuve de conduite ? Les responsables d’auto-écoles sont très inquiets, notamment dans le milieu rural, car leur viabilité économique dépend principalement de l’apprentissage du code.

M. le président François Brottes. J’ai été un des acteurs de ce débat, et j’ai porté un certain nombre d’amendements qui y sont relatifs. Je le dis peut-être avec un peu de véhémence, mais il faut que nous soyons compris : il ne s’agit pas de remplacer les auto-écoles, mais d’avoir davantage d’inspecteurs pour faire passer les épreuves, ce qui augmentera la fluidité des candidats et sera donc, in fine, bénéfique aux auto-écoles !

Mme Marie-Lou Marcel. Je souhaite revenir sur la présentation quelque peu idyllique du volet social qui a été produite, avec la présentation du pacte social : un avenir pour chaque postier, l’adaptation à la grille indiciaire de la fonction publique d’État et le traitement des personnes reclassées.

J’attire votre attention sur deux points : l’aménagement du territoire et le maintien de la fonction de service public. Concrètement, les constats que nous faisons sur les territoires, qui diffèrent de ce que vous nous avez présenté, nous ont conduits à demander une réunion en urgence avec les services de La Poste : des bureaux de plein exercice ferment de manière intempestive, sans concertation avec les élus, sans prévenance. La réponse qui nous a été faite est la pérennisation de la présence postale sous forme mutualisée : je crains que cela ne signifie la transformation de bureaux de poste de plein exercice en agences postales.

Par ailleurs, et c’est un sujet que j’ai déjà évoqué par le passé, y compris avec vos prédécesseurs, la fermeture de la plateforme industrielle courrier d’Onet-le-Château va à l’encontre d’un aménagement harmonieux du territoire et la présence d’un service public de qualité. Où en est-on de ce dossier ?

M. Jean-Luc Laurent. Nous avons une préoccupation que je souhaite relayer sur l’aménagement du territoire. La présence postale dans les villes et quartiers populaires implique parfois une adaptation au public reçu, dans l’accompagnement des démarches à effectuer notamment, qui est parfois nécessaire dans une logique de service public. Comment, au regard du développement des nouveaux bureaux que vous mettez en place, comptez-vous prendre en compte cette problématique d’accompagnement propre au service public, qui ne peut pas être uniforme sur tout le territoire ?

En Île-de-France, un grand projet structurant va modifier la mobilité et les modes de déplacement, et renforcer l’attractivité du territoire : le Grand Paris. Plus de soixante-dix gares vont être implantées. Comptez-vous engager une réflexion sur la présence de services publics postaux au sein de ces gares ? Selon moi, cette réflexion est nécessaire, en concertation avec les villes concernées.

M. Alain Suguenot. Vous avez évoqué le résultat d’exploitation de votre entreprise, mentionnant un résultat net de 513 millions d’euros, sans oublier que, dans ce chiffre, le CICE pèse pour 352 millions d’euros en 2014. Mais quelle est la dette de l’État vis-à-vis du groupe, liée aux charges de service public non compensées ? Vous avez également affirmé que l’activité « colis » était l’avenir du groupe, mais que cette branche avait essuyé de mauvais résultats l’année précédente. Comment expliquez-vous ce hiatus ?

M. le président François Brottes. J’ajouterai une dernière question, dont je pensais qu’elle serait posée par mes collègues : suite aux accords Schwartz, beaucoup d’entreprises de presse, y compris locales, sont inquiètes. Mais il est vrai que La Poste puise dans ses fonds propres pour compenser une partie des coûts liés à la distribution de la presse. Quelles solutions apporter à ce problème ?

M. Philippe Wahl. Je vous remercie, mesdames et messieurs les députés, pour l’ensemble de vos questions, auxquelles je vais tâcher de répondre en détail.

Quel est le lien entre concurrence et hausse des prix ? Le régulateur, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), nous a accordé une hausse des prix pour la prochaine période de quatre ans. Nous passons d’un encadrement de l’évolution des prix « inflation + 1 % » à « inflation + 3 % ». Cette hausse nous permet de limiter les effets de la baisse des volumes sur nos revenus. Mais, évidemment, ce n’est pas une solution stratégique structurelle. La vraie réponse passe par le nouveau modèle économique que nous souhaitons imposer : de nouveaux services reposant sur le facteur humain. La hausse des prix sur les prochaines années doit seulement nous permettre de gérer la période de transition. Quant à l’activité « colis », je vous confirme qu’elle constitue bien un axe fort. La baisse à laquelle nous avons fait face l’année précédente est liée à des facteurs conjoncturels, essentiellement les difficultés rencontrées par nos trois grands clients que sont les sociétés de vente à distance du Nord de la France.

En très peu de temps, La Banque postale est devenue un acteur majeur du financement des collectivités territoriales. Le 12 février 2012, M. François Fillon nous demandait de jouer ce rôle. Nous y sommes parvenus en mois de neuf mois. En 2014, seulement notre deuxième exercice plein sur cette activité, nous prêtions 3,5 milliards d’euros. Nous sommes aujourd’hui le premier acteur du financement des petites communes.

Nous sommes fiers de continuer à remplir les quatre missions de service public qui nous sont assignées par la loi : la distribution de la presse, le service universel postal, l’accessibilité bancaire – le système bancaire classique continue à exclure certains Français – et l’aménagement du territoire. Notre rôle a été confirmé par une décision explicite de la Commission européenne. Nous souhaitons aller plus loin, en revendiquant trois missions supplémentaires d’intérêt général. La première, c’est la transition énergétique : nous disposons d’ores et déjà de la première flotte de véhicules électriques dans le monde ; nous nous positionnons dans le conseil à la rénovation thermique et notre filiale Recy’go est active dans le domaine du recyclage. La deuxième, c’est la modernisation de l’action publique. Les 1 000 maisons de services au public, tout comme le passage des examens du code et du permis de conduire en sont deux exemples. S’agissant de cette dernière mission, nous sommes parfaitement en capacité de la remplir. Notre filiale Mobigreen a déjà formé tous nos facteurs à l’éco-conduite. La troisième mission de service public que nous souhaitons porter, c’est le tiers de confiance numérique : le porte-monnaie, le portefeuille ou le coffre-fort électroniques sont autant de services que nous nous préparons à offrir. Mme Nathalie Collin, ici présente, directrice générale adjointe en charge du numérique et de la communication, s’attelle à cette tâche.

Les besoins en services à la personne sont considérables, en raison notamment de la montée de la problématique du vieillissement. Nous pensons que les facteurs et les postiers sont une réponse à ce besoin de proximité, ce qui nous a conduits à signer des accords, avec la caisse nationale d’assurance vieillesse ou, très récemment, avec la MSA au Salon de l’agriculture. Les agriculteurs retraités sont particulièrement exposés, du fait de leur âge et leur localisation géographique, à l’affaiblissement de la desserte des services publics. Néanmoins, pour jouer un rôle dans les services à la personne, nous devons résoudre l’obstacle de la solvabilité du besoin : nous devons être payés pour les services que nous rendons. En tant qu’entreprise, de service public, nous devons assurer un service tout en gagnant de l’argent.

Madame la députée Fabre, M. Jacques Savatier se tient à votre disposition pour apporter des réponses au problème de distribution de courrier que vous rencontrez dans votre circonscription.  Je crois d’ailleurs savoir qu’il se rend dans votre territoire aujourd’hui, ce qui est une heureuse coïncidence !

Nous investissons chaque année plus de cent millions d’euros dans nos locaux. Notre plan de transformation concerne aussi bien les bureaux de poste des territoires ruraux que ceux des territoires urbains et des zones urbaines sensibles. Ces investissements sont nécessaires pour mettre en œuvre nos cinq nouveaux formats : les deux classiques – l’agence postale communale et le relai poste commerçant – les deux nouveaux – maison de services au public et facteur guichetier – et le réseau poste urbain. Quel est l’objectif d’un tel plan de modernisation ? Les investissements que nous réalisons aujourd’hui se traduiront par davantage de fréquentation et de commerce, par une meilleure activité économique sur l’ensemble du territoire.

La Banque postale conforte l’utilité de La Poste sur le territoire et participe à la revitalisation de notre activité. À cet égard, j’ai déjà signalé notre rôle de financeur des plus petites communes.

Nous sommes en train de définir les critères applicables aux maisons de service public avec les élus. Leur nombre est bloqué à 330 depuis quatre ans. Pour parvenir à dépasser ce blocage, nous souhaiterions des critères plus souples. Quant aux lieux d’implantation, notre expérience nous pousse à conclure que les anciens chefs-lieux de canton sont sans doute les plus pertinents. En tout état de cause, les maisons de service public sont une construction commune à quatre types d’acteur : La Poste, l’État, les collectivités territoriales, et les opérateurs comme la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), la caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), EDF, GDF Suez ou Pôle emploi. Ces derniers doivent aussi en tirer parti, de façon à ce que le réseau de La Poste devienne, en quelque sorte, le réseau « ultime ».

Nous sommes engagés dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. Depuis l’année dernière, nous sommes partie prenante d’un accord, « Alliance dynamique », regroupant cinquante signataires : Sociétés coopératives et participatives (SCOP), associations, et fédérations de SCOP et d’associations. Le bureau de poste doit être un lieu d’accueil pour ces acteurs.

Je déplore comme vous les fermetures intempestives et aléatoires. Elles s’expliquent néanmoins aisément : plus de 4 000 bureaux sont dits « agent seul ». Ces agents, sur qui repose entièrement le fonctionnement d’un bureau, sont hélas soumis aux mêmes épidémies que le reste de la population. Si cette réalité est difficilement contournable, nous avons des marges d’amélioration en termes d’information du public et des élus.

La fermeture de la plateforme industrielle courrier (PIC) d’Onet-le-Château est malheureusement absolument nécessaire, compte tenu des coûts considérables qu’elle génère. L’enjeu est avant tout social. Sur les soixante-dix emplois concernés au départ, il reste vingt situations difficiles auxquelles il faut apporter une solution.

Nous n’avons pas les mêmes ratios de présence dans les zones urbaines sensibles qu’ailleurs, nous mettons en place des dispositifs spécifiques et nous allouons des moyens adaptés. À Lille Sud, où je me suis rendu très récemment, nos personnels sont spécifiquement formés pour s’adresser au public de ces quartiers, avec l’appui d’associations d’insertion pour traiter les publics les plus difficiles. Ca n’est pas un euphémisme : on parle de personnes qui ne parlent pas le français. Notre mission est de les aider à accéder aux services essentiels.

Trois initiatives sont en cours en Île-de-France et au sein du futur Grand Paris. Nous déployons le premier réseau français de consignes connectées. Suite à un accord entre GeoPost, La Poste et Neopost, société française qui développe des outils de traitement du courrier, nous comptons désormais plusieurs centaines de bases ; ce projet s’appuie sur un accord avec la SNCF. Nous avons également mis en place le premier « pickup service » à la gare Saint-Lazare, à droite des quais grande ligne : vous pouvez y retirer vos colis et accéder aux services postaux. La gare d’Ermont Eaubonne a aussi le sien depuis peu. Surtout, à travers notre grand projet de « logistique urbaine », pour lequel nous sommes déjà en contact avec dix des quinze villes de la métropole que vous avez citée, nous voulons apporter notre contribution à la dépollution et au désengorgement des centres-villes. Cela passe par la concentration des flux sur quelques transporteurs, l’usage du véhicule électrique – nous voulons que, dans certaines zones, il n’y ait que des véhicules électriques –, et l’adaptation du service postal, notamment en entrant dans la gestion de la chaîne du froid. À travers ces évolutions, nous répondrons à tous les besoins des centres-villes.

Je vous confirme que les aides versées par l’État n’en sont pas vraiment : ce sont des compensations destinées à couvrir les charges liées à l’exécution de nos missions de service public. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elles ne sont pas surcompensées. Bruxelles l’a reconnu très récemment.

M. le président François Brottes. À combien estimez-vous la sous-compensation ?

M. Philippe Wahl. À plusieurs centaines de millions d’euros. Pour la presse par exemple, le déficit est supérieur à 350 millions d’euros après dotation de l’État. C’est ce qui nous fait dire que la distribution de la presse est un vrai sujet. Nous observons que, partout en Europe, les financements publics sont concentrés sur la presse d’information politique et générale (PIPG). Est-ce la solution que nous devons adopter en France ?

M. le président François Brottes. Je vous remercie, monsieur le président-directeur général, pour vos réponses. Elles illustrent une nouvelle fois à quel point l’économie numérique, qui paie peu d’impôts et de charges sociales, bouleverse le paysage en « siphonnant » les ressources traditionnelles des acteurs. C’est vrai pour les magasins de détail, mais c’est aussi vrai pour vous. Auparavant, l’activité courrier couvrait largement la masse salariale de La Poste et dégageait des ressources pour d’autres activités connexes. Ce modèle est révolu, au profit de nouveaux acteurs qui ne contribuent ni à l’intérêt général ni au service public.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 18 mars 2015 à 9 h 30

Présents. – M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. François Brottes, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Yves Daniel, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Antoine Herth, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Yannick Moreau, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Jean-Marie Tetart, Mme Clotilde Valter

Excusés. – M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Denis Baupin, M. Marcel Bonnot, M. Daniel Fasquelle, M. Joël Giraud, Mme Pascale Got, M. Philippe Kemel, M. Thierry Lazaro, M. Serge Letchimy, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, M. Kléber Mesquida, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistait également à la réunion. - M. Jean Launay