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Commission des affaires économiques

Mercredi 14 octobre 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 5

Présidence Mme Frédérique Massat, Présidente

– Présentation du rapport de la mission d’information sur la filière bois-forêt (Mme Pascale Got, rapporteure)

– Informations relatives à la commission 18

La commission a examiné le rapport de la mission d’information sur la filière bois-forêt sur le rapport de Mme Pascale Got.

Mme la présidente Frédérique Massat. L’ordre du jour de nos travaux appelle l’examen du rapport d’information pour une meilleure valorisation économique de la filière bois-forêt en France. La réunion constitutive de la mission d’information s’est tenue le 12 mai 2015. La mission se compose de M. Damien Abad, président, Mme Pascale Got, rapporteure, Mme Michèle Bonneton, MM. André Chassaigne, Dino Cinieri, Christian Franqueville, François Pupponi et François Sauvadet. Les conclusions de ce rapport sont très attendues sur l’ensemble des territoires, la filière bois-forêt étant un enjeu important, tant en termes économiques que d’aménagement du territoire.

M. Damien Abad, président de la mission. La situation de la filière bois-forêt en France ayant déjà fait l’objet de nombreux travaux, on peut s’interroger quant à la valeur ajoutée d’un nouveau rapport parlementaire. C’est le premier constat dressé par les représentants du secteur que nous avons rencontrés. En janvier 2015, une synthèse des plus de 250 rapports produits lors des trente dernières années sur le sujet a même été effectuée. Dans ce contexte, le rapport que nous soumettons aujourd’hui n’a pas vocation à traiter de l’ensemble des sujets liés à la filière bois-forêt ni à venir s’ajouter à la pile de rapports existants mais à s’attaquer aux problèmes rencontrés par cette filière en France sous un angle résolument économique. L’originalité de cette approche doit permettre de tirer profit des analyses passées et d’apporter un regard neuf sur ces difficultés.

Bien sûr, dans le contexte de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21) qui se tiendra dans quelques semaines à Paris, nous avons veillé à ce que cette focale économique ne se transforme pas en œillères : multifonctionnelle, la forêt française remplit un rôle tant productif qu’écologique et social. Le rapport tâche donc de mettre en avant l’équilibre, sinon la complémentarité, entre l’exploitation économique de la forêt, la préservation de la biodiversité et la lutte contre le changement climatique.

La forêt française n’est pas – loin de là – menacée par la déforestation, malgré ce que pourrait croire l’imaginaire populaire. Au contraire, les fragilités économiques de la filière bois-forêt se traduisent par une sous-exploitation chronique : la croissance naturelle de la forêt est supérieure au volume des coupes. En outre, les entreprises sylvicoles se heurtent à un réel problème d’acceptabilité sociale : l’opinion publique tolère difficilement que des parcelles de chênes centenaires fassent l’objet d’une exploitation économique. Pourtant, d’un point de vue écologique, une forêt correctement entretenue joue mieux son rôle de puits de carbone. La forêt, comme ressource renouvelable, se renouvelle : cette tautologie ne paraît pourtant pas aller de soi, situation qui met en péril nombre de petites entreprises. Des efforts de communication devraient être entrepris pour expliquer que la croissance biologique française est supérieure à la quantité d’arbres débités chaque année et qu’une exploitation économique peut être durable et respectueuse des fonctions écologiques de la forêt. Il semble nécessaire de faire évoluer les mentalités sur le sujet.

Quelles sont les difficultés économiques de la filière bois-forêt ? Celle-ci subit une perte structurelle de compétitivité depuis plusieurs années et peine à sortir de la crise économique. Pourtant, la France détient la troisième forêt européenne en surface ; ses entreprises sont présentes dans tous les secteurs du bois et de la forêt ; nous disposons d’une main-d’œuvre qualifiée. Ainsi, alors que la filière bois-forêt devrait être un atout industriel pour le pays, c’est loin d’être le cas.

Pour établir un diagnostic complet, il convient de distinguer facteurs conjoncturels et structurels.

Sur le plan conjoncturel, la filière subit de plein fouet la crise économique. D’une part, les entreprises sylvicoles et industrielles de la filière ont subi, au même titre que l’ensemble du tissu productif français, le retournement de la conjoncture en 2008-2009 : une chute de la consommation, une contraction des marchés mondiaux, un accès réduit au crédit bancaire, de faibles perspectives d’investissements et un risque déflationniste. À titre d’exemple, la crise du marché du logement a entraîné une stagnation encore sensible du secteur du bois construction, et, avec lui, de sa chaîne d’approvisionnement. Or, les entreprises du secteur, en particulier en amont, dans le secteur de la première transformation et dans la papeterie, étaient déjà sujettes à des fragilités économiques, qu’il s’agisse de problèmes de trésorerie, d’amortissement de lourds investissements ou de carnets de commandes insuffisamment remplis. D’autre part, ces entreprises ont subi l’accroissement de la concurrence internationale, notamment issue de pays comme la Chine ou l’Allemagne, plus vite sortis de la crise que nous, et qui ont misé sur des politiques commerciales très offensives pour redresser leur rythme de croissance.

Sur le plan structurel, les difficultés sont de trois ordres.

Celles de l’amont forestier, tout d’abord. La forêt française se caractérise par de fortes disparités géographiques et un important morcellement. Pour mémoire, 3,5 millions de propriétaires forestiers se partagent 75 % des forêts françaises. Parmi eux, 2,4 millions de propriétaires possèdent moins d’un hectare de parcelle. Les propriétaires forestiers ne sont pas tous exploitants sylvicoles : les petites parcelles détenues peuvent se limiter à un investissement patrimonial, tandis que certaines n’atteignent pas la taille critique pour justifier une exploitation économique rentable. Ce morcellement explique un des principaux problèmes économiques de l’amont de la filière : la difficulté à mobiliser la ressource disponible. En effet, les petits propriétaires privés ne sont pas suffisamment incités à une gestion dynamique de leur parcelle ou ont des difficultés à structurer une offre compétitive. Les petites parcelles sont sujettes à une rentabilité économique aléatoire et confrontées à des obstacles pour écouler localement leur production – soit parce que les industries locales de première transformation sont déficientes, soit en raison de tensions logistiques dues au coût, au manque d’accessibilité et à l’indisponibilité des transports. Ces difficultés sont de nature à contraindre des projets d’exploitation économique viables à long terme. En conséquence, la quantité de bois sur pied disponible est sans commune mesure avec le bois récolté et commercialisé à destination de l’aval de la filière, ce qui crée des risques de pénurie assez paradoxaux.

La deuxième difficulté concerne l’aval industriel. Les travaux de la mission d’information ont montré que l’essentiel des difficultés provenait du secteur des scieries. Certaines d’entre elles sont très compétitives, telles que les établissements Ducret et Monnet-Sève, dans l’Ain, dont nous avons rencontré les dirigeants en juin. Mais dans l’ensemble, les faibles performances économiques des scieries pèsent par ricochet sur celles des industries de la deuxième transformation c’est-à-dire de l’ameublement et de la construction. Rapporté au potentiel forestier français, que ce soit en termes de bois sur pied ou de bois récolté, le volume annuel de sciages est très faible.

Cela s’explique par plusieurs facteurs : tout d’abord, les scieries françaises, implantées au plus près de la ressource forestière, sont souvent de très petite taille et fonctionnent selon un mode de production artisanal et un mode de financement familial. Les faibles économies d’échelle attendues d’un tissu économique aussi atomisé expliquent la difficulté à concurrencer efficacement les scieries industrielles allemandes qui ont atteint la taille critique suffisante pour débiter de gros volumes de grumes. Cette situation s’aggrave d’année en année : les petites scieries françaises connaissent une augmentation de leurs coûts d’exploitation qui les empêche d’investir suffisamment dans la modernisation de leur appareil productif, ce qui influence négativement leur résultat économique. Ce sous-investissement chronique se traduit par une perte de compétitivité qui se répercute sur l’ensemble des secteurs.

Enfin, la dernière difficulté structurelle de la filière bois-forêt réside dans le « découplage » économique observé entre l’amont et l’aval : les acteurs économiques ont du mal à s’entendre sur leurs besoins mutuels et préfèrent souvent recourir à l’importation plutôt que de privilégier un patriotisme économique essentiel à la survie de la filière. Par exemple, les ressources de bois disponibles, en majorité feuillues, comme celles issues des chênes, ne correspondent pas aux besoins réels des industriels, orientés vers les essences résineuses telles que les pins. En particulier, le secteur du bois construction, malgré une demande en hausse constante, ne parvient pas à s’alimenter suffisamment en bois résineux français correspondant aux canons réglementaires et techniques actuels. Économiquement, nous observons donc une situation contre-intuitive pour un pays industrialisé : la France exporte du bois brut bon marché, sous forme de matière première, et importe des produits transformés intermédiaires ou finaux, incorporant de la valeur ajoutée : meubles, arbres sciés et charpentes.

L’offre de formation disponible dans la filière apparaît parfois déconnectée des besoins des entreprises à court terme et peu adaptée aux besoins de plus long terme, ce malgré certaines bonnes pratiques en ce domaine. Les emplois du bois et de la forêt pâtissent encore d’un faible attrait auprès des jeunes cherchant une formation initiale, ce qui exige que ces emplois soient davantage orientés vers l’innovation.

Face à ces préoccupations, nous énonçons dans notre rapport quinze recommandations qui seront détaillées par Mme Got. Ayant travaillé dans le même état d’esprit, nous partageons la grande majorité des constats et des solutions cités dans ce document. Cette convergence de vues illustre l’urgence d’agir pour sauver la filière.

Cependant, je souhaiterais exprimer quelques divergences d’appréciation. La première concerne le rôle d’acteur économique majeur du marché du bois que le rapport souhaite conférer à l’Office national des Forêts (ONF). L’ONF joue certes un rôle important mais parfois en décalage avec ses capacités d’action réelles tant il est contraint budgétairement et peu efficace dans les territoires. C’est donc une réforme en profondeur de l’ONF qu’il aurait fallu viser. La deuxième divergence de vues concerne l’attention particulière portée aux soutiens et à la gouvernance publics qui laisse à penser que les acteurs privés, notamment les interprofessions, n’ont pas leur rôle à jouer dans le redressement de la filière. Il conviendrait d’éviter le penchant consistant à vouloir apporter des solutions de nature publique à tous les problèmes économiques. C’est pourquoi je m’interroge quant à la nécessité d’instituer une structure nouvelle et supplémentaire, l’observatoire de la forêt et du bois, surtout en période d’économies budgétaires. Enfin, j’aurais souhaité mettre davantage l’accent sur les blocages socio-culturels qui empêchent le développement des coupes d’arbres et l’orientation des plantations vers les résineux, y compris dans les forêts publiques – déterminant essentiel des difficultés que rencontrent les entrepreneurs sylvicoles.

Globalement, hormis ces trois points, je rejoins l’ensemble des préconisations de ce rapport. Je remercie donc la rapporteure pour son travail de qualité.

Mme Pascale Got, rapporteure. Partageant le diagnostic d’une perte structurelle et inquiétante de compétitivité de la filière bois-forêt, je m’attacherai à présenter les mesures qu’il serait souhaitable de prendre pour mieux la valoriser économiquement. À la différence de M. Damien Abad, j’estime que l’impulsion publique est nécessaire au redressement de cette filière. La situation actuelle réclame un électrochoc : c’est à l’État et aux collectivités locales de prendre la responsabilité de restaurer le dynamisme des entreprises du bois et de la forêt. Si le patriotisme économique ne se décrète pas, il peut être encouragé par des politiques adaptées, ciblées et visant le cœur des problèmes à traiter. Je n’écarte pas pour autant les acteurs privés, notamment les interprofessions qui ont tout leur rôle à jouer en ce domaine.

C’est dans cet esprit que j’ai proposé quinze recommandations visant tant la structure que l’économie de la filière. Sa structure, d’une part, parce qu’un recouplage de l’amont et l’aval est absolument nécessaire pour parvenir à l’intégration économique de la filière, à sa croissance et au développement de l’emploi. Nous devons être en mesure d’affronter la concurrence internationale et mettre fin à un déficit commercial chronique. Son économie, d’autre part, car les difficultés propres à l’amont et à l’aval appellent des solutions économiques spécifiques. On ne saurait résoudre d’un même trait les problèmes des entreprises sylvicoles et ceux des entreprises de la construction bois. En allant au plus près des logiques économiques de chaque secteur, il est possible d’avancer des recommandations réellement opérantes. Il convient d’amorcer le redressement des parties avant de songer à guérir le tout.

En vue d’assurer le recouplage de l’amont et de l’aval, nous énonçons cinq recommandations.

Il conviendrait tout d’abord de désigner un délégué interministériel pour la forêt et le bois. Car la filière ne fonctionne pas spontanément, par le libre jeu des acteurs économiques. La nomination de ce délégué interministériel, placé auprès du Premier ministre, aurait trois objectifs. Elle permettrait d’améliorer la cohérence et la transparence de la gouvernance publique de la filière, actuellement suivie par quatre ministères. Il est temps de montrer un seul visage aux acteurs de la profession. Elle permettrait également de restaurer le dialogue entre les différents acteurs pour amorcer un recouplage entre les besoins et les ressources de l’amont forestier et les besoins et les débouchés de l’aval industriel. Le délégué pourrait jouer un rôle d’interface entre le comité stratégique de la filière bois et le programme national de la forêt et du bois. Il pourrait également servir de médiateur dans l’éventuel rapprochement des deux principales interprofessions de la filière, France Bois Forêt et France Bois Industries Entreprises, que beaucoup appellent de leurs vœux. Enfin, le délégué interministériel aurait pour mission de communiquer sur les dispositifs de soutien institués par les décideurs publics en faveur des entreprises du bois et de la forêt et de mener des campagnes de sensibilisation afin de renforcer l’acceptabilité sociale des coupes d’arbres. Il ne s’agit pas là d’ajouter une couche de gouvernance supplémentaire mais bien de créer un outil de médiation entre des intérêts publics et privés qui peuvent diverger, dans une logique d’émulation plus que de gouvernance à outrance.

Notre deuxième proposition consiste en la création d’un observatoire économique de la forêt et du bois. La filière économique agissant parfois à l’aveugle, nous pourrions l’éclairer quant à son environnement à l’aide d’études économiques, de ressources statistiques complètes et fiables, de cartes des massifs forestiers, des routes d’approvisionnement et des zones tendues en termes de disponibilité des ressources. Cet observatoire permettrait aussi de disposer d’une meilleure prospective des besoins nouveaux et des marchés émergents afin que les entreprises concentrent leur effort d’innovation et commercialisent une offre adaptée.

Nous avons également émis deux recommandations en matière de formation : il convient de développer l’offre disponible, de l’apprentissage à l’enseignement supérieur, et de stimuler la demande en renforçant l’attractivité des métiers de la filière – qui se heurte à un double problème qualitatif et quantitatif. En amont de la filière, il convient de former des conducteurs d’engins, des scieurs et des ouvriers sylvicoles ; et en aval, des architectes spécialisés dans la construction bois, des ingénieurs de la première transformation, des spécialistes du bois énergie et des chimistes. Il faut élargir les spécialisations proposées en BTS (brevet de technicien supérieur), en licence et en master, et créer des doubles diplômes permettant d’intégrer des profils commerciaux aux profils des ingénieurs. Parallèlement, il convient de démocratiser les nouvelles techniques et modes d’organisation par des formations continues ponctuelles et ciblées.

Nous avons un effort important à mener en matière de demande de formation. Comme dans la viticulture, on ne devrait pas « finir dans la forêt » parce que l’on est en échec scolaire. Compte tenu de l’essor des nouvelles technologies et de l’enjeu écologique, des besoins d’innovation se font sentir à chaque stade de la filière, ce qui devrait permettre d’effacer l’image surannée qu’ont les jeunes et les actifs en reconversion des métiers de la sylviculture. Nous envisageons dans notre rapport le recours à plusieurs leviers, dont la promotion de la filière bois-forêt dans les écoles situées dans des régions forestières, au moyen de partenariats éducatifs conclus entre l’éducation nationale et les professionnels.

La dernière recommandation de ce premier ensemble vise à créer un label « qualité France » pour développer l’esprit de patriotisme économique des entreprises. La déconnexion des intérêts de l’amont et de l’aval est la difficulté structurante des entreprises du bois et de la forêt, dans une économie mondialisée et concurrentielle. Il importe de favoriser la rencontre de l’offre et de la demande locales, tout au long de la chaîne de valeur, afin de présenter à l’échelle internationale une filière homogène, indépendante et compétitive. Au-delà de la certification des bois, nous proposons un label « qualité France » pour les produits du bois français : cela nous semble un levier utile à la compétitivité hors prix à l’échelle internationale, permettant de rassembler la filière autour d’une même bannière.

La deuxième série de recommandations porte plus spécifiquement sur l’amont de la filière. Nous avons formulé deux recommandations visant à réorienter la fiscalité forestière en faveur d’une gestion plus productive et d’un regroupement des exploitations. Les avantages fiscaux accordés en matière forestière doivent être soumis à une condition de réelle exploitation économique de la forêt. Nous préconisons de conditionner l’abattement sur l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) à une exploitation économique effective de la forêt afin d’encourager les contribuables aisés à investir dans la forêt. Notre objectif est de transformer la niche fiscale actuelle en incitation fiscale productive, dans la même logique que celle de l’abattement dit « ISF-PME ». Il faudrait également prolonger la durée des différents dispositifs d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt (DEFI) afin d’apporter un horizon fiscal stable aux entrepreneurs sylvicoles. Enfin, nous proposons d’encourager le regroupement des propriétaires forestiers. Pour rationaliser les politiques de coupe et engendrer des économies d’échelle importantes, il faut rendre plus incitative la fiscalité des organisations de production, en les rendant éligibles à un DEFI majoré, en contrepartie d’obligations déjà nombreuses mais qui pourraient être mieux contrôlées.

Nous préconisons par ailleurs d’assurer l’effectivité du déploiement des groupements d’intérêt économique et environnemental forestier (GIEEF) instaurés par la loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, afin de permettre aux propriétaires forestiers privés de gérer durablement et activement leurs forêts, sur une base volontaire et concertée. Les acteurs que nous avons rencontrés émettent des réserves quant à l’efficacité d’un tel dispositif qui impose, selon eux, des contraintes administratives supplémentaires sans contrepartie clairement identifiée. Nous souhaitons donc que le ministère de l’agriculture rende rapidement effectives les incitations fiscales promises pour encourager leur déploiement.

Il conviendrait de redéfinir le rôle de l’ONF, principal acteur du marché de la forêt en France. L’État doit saisir l’opportunité que constitue la signature du nouveau contrat d’objectif et de performance 2016-2020 de l’ONF pour l’inciter à mieux remplir sa mission de gestion prévisionnelle des ressources et des besoins pour adapter au mieux la forêt publique à la demande de l’aval de la filière.

Nous préconisons aussi de garantir le ciblage du fonds stratégique pour la forêt et le bois. Créé par la loi du 13 octobre 2014 précitée, ce fonds vise essentiellement la multifonctionnalité de la forêt. Ses crédits devraient être prioritairement investis dans les actions à fort levier pour la filière forêt-bois, notamment pour soutenir l’innovation, la restructuration et le regroupement des industries faiblement compétitives. Il s’agit d’éviter le saupoudrage d’un fonds déjà faiblement doté au vu des enjeux économiques que la filière doit affronter.

Enfin, nous avons émis cinq recommandations concernant plus spécifiquement l’aval industriel.

Nous proposons d’assurer la continuité des approvisionnements en ressource forestière par le développement de la contractualisation. Les délais de livraison irréguliers et l’hétérogénéité du bois reçu par les industriels fragilisent la trésorerie des entreprises, les empêchent de tenir leur cahier des charges ou d’amortir les investissements réalisés. L’accès à la ressource pose problème, raison pour laquelle nous proposons de stabiliser les relations commerciales entre l’amont et l’aval et de développer la contractualisation de l’approvisionnement, en termes de volumes, de qualité comme de délais. C’est l’une des missions du comité stratégique de filière « bois » (CSF Bois).

Nous préconisons la restructuration et la modernisation de l’industrie de la première transformation du bois. Secteur pivot de la filière bois-forêt, l’industrie du sciage en est aussi le maillon faible. La filière doit intervenir pour encourager la concentration des scieries en concurrence sur un même territoire, tout comme le plan « Industrie du futur » devrait, avec l’appui des crédits du programme d’investissement d’avenir, inciter à la création de scieries industrielles de grande ampleur.

Il sera dès lors plus facile de stimuler l’exploration de marchés étrangers pour valoriser les produits à haute valeur ajoutée. L’aval est en effet constitué de nombreuses TPE et PME qui peinent à pénétrer sur les marchés étrangers alors que leurs produits sont de qualité, qu’elles disposent d’un réel savoir-faire et que la haute valeur ajoutée des produits français pourrait bien mieux s’exporter. Là encore, l’accompagnement de Business France pourrait permettre de donner un second souffle à la filière.

Le bois construction représente incontestablement un gisement de croissance, d’emplois, d’innovation et de performances énergétiques. Malheureusement, ce secteur est handicapé par une culture de la construction davantage orientée vers le béton et le ciment, et par des normes peu favorables. C’est pourquoi nous incitons au recours à ce matériau dans le cadre de la commande publique. Il convient également de mieux traiter la question de la normalisation : il convient de renforcer la part des professionnels du bois dans les comités spécialisés de qualification et de normalisation français comme européens.

La dernière recommandation du rapport porte sur la définition d’une politique d’innovation dynamique qui permette à la filière de sortir par le haut de la crise. Dans la filière bois-forêt, le besoin d’innovation est transversal : dans le secteur sylvicole, les dépenses de recherche-développement doivent se concentrer sur les procédures de récolte ou sur les moyens logistiques d’exploitation et de sortie du bois. Dans les secteurs industriels, l’innovation devrait surtout porter sur les processus de production par le biais de la robotisation et de la numérisation, du design et du marketing, pour créer de nouveaux produits à forte valeur ajoutée – tels que le bois plastique composite et les produits issus de la chimie verte. Quatre solutions sont avancées, comme le développement des appels à manifestation d’intérêt ou les appels d’offre de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) ou de la Banque publique d’investissement (BPI) qui encouragent le développement de projets innovants.

J’espère que nos échanges contribueront à apporter des solutions pour améliorer la valorisation économique de cette filière. Je remercie M. Damien Abad pour l’excellent état d’esprit qui a prévalu au sein de notre mission.

Mme la présidente Frédérique Massat. Je vous remercie de ce travail conséquent dans lequel vous faites le point sur plusieurs outils pour ensuite proposer des voies d’amélioration. Je ne doute pas que nous serons prochainement amenés à reprendre certaines de vos préconisations par voie législative et précise que les GIEEF feront prochainement l’objet d’un bilan dans le cadre d’une mission d’information sur l’application de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

Certaines régions ont contractualisé avec la filière bois, notamment dans le domaine de la formation : comment mieux articuler les actions menées aux niveaux national et régional ? Les grandes régions de demain couvriront des massifs forestiers importants, ce qui devrait permettre de mener des politiques publiques encore plus pertinentes en matière d’économie sylvicole. S’agissant d’autre part de la structuration de la filière, de nombreux propriétaires privés de bois et forêts ne connaissent pas toujours l’emplacement exact de leurs terrains, ce qui pose une réelle difficulté de regroupement. Or, il existe aujourd’hui sur certains territoires des associations foncières pastorales qui permettent la mise à disposition de terrains alors exploités en parallèle. Peut-être de telles associations pourraient-elles aider à résoudre le problème du morcellement et à assurer une exploitation plus rationnelle de la forêt. Enfin, la forêt gagne certains villages, ce qui pose des problèmes de sécurité publique. Il est alors nécessaire de réunir tous les acteurs concernés – producteurs et élus communaux.

M. Dino Cinieri. Lorsqu’on évoque la forêt, on pense d’abord à l’environnement, à la nature et à une respiration pour nos territoires, à l’opposé de l’hyperurbanisation. Or, l’approche économique délibérément choisie par nos rapporteurs est intéressante en ce qu’elle montre que le développement durable est aussi une économie, que la forêt et la filière bois recèlent des enjeux économiques. Compte tenu du nombre croissant de chômeurs, il est urgent de développer la filière : les territoires ruraux seront les premiers à en bénéficier et verront leur attractivité renforcée. Vous avez à juste titre rappelé tout au long de ce rapport que l’économie de la filière bois-forêt française repose notamment sur des ressources forestières riches et abondantes, un tissu industriel historique, une main-d’œuvre qualifiée et des savoir-faire. Cette filière va du producteur forestier au constructeur de maisons. Elle regroupe les sylviculteurs, les gestionnaires, les bûcherons, les débardeurs indépendants ainsi que les transporteurs et les entreprises des secteurs bois-énergie et bois d’industrie. Elle représente un maillage d’emplois sur tout le territoire, en milieu rural comme en milieu urbain.

Pragmatiques et concrètes, vos quinze propositions pour valoriser la forêt et donner à la filière bois des chances de développement économique répondent aux attentes de la profession. Mais il faudra qu’elles soient vraiment mises en application pour que ce rapport n’en soit pas un énième à finir sur le bureau du ministre. Vos propositions visent aussi à créer des emplois dans nos territoires, notamment en développant la formation initiale et continue – ce qui me paraît indispensable. Souffrant d’une mauvaise réputation, les débouchés qu’offre la filière bois restent encore trop souvent méconnus de nos jeunes. Véritable passion partagée par tous les professionnels du secteur, le bois offre de nombreux métiers. Le confort et la modernité y ont désormais toute leur place, notamment grâce aux évolutions technologiques et à l’automatisation des processus de production.

La filière bois dispose pourtant d’un énorme potentiel et de nombreux atouts. Ainsi que vous l’avez souligné, le bois est un matériau d’avenir, à la fois écologique, renouvelable, peu polluant, résistant, isolant et esthétique. Son succès est donc amplement mérité et devrait s’accroître dans les années qui viennent. Comme vous le rappelez dans cet excellent rapport, la région Rhône-Alpes est la seconde région forestière de France après l’Aquitaine : avec 41 300 salariés, elle est la première région employeur de la filière bois. Dans le département de la Loire, la forêt couvre près d’un tiers du territoire. Elle compte 170 massifs forestiers de plus de 100 hectares, répartis principalement sur les reliefs. De nombreuses réalisations récentes dans la Loire montrent que la construction en bois est techniquement et économiquement en mesure de remplacer en partie les constructions en béton et en acier, dès lors que l’on améliore les conditions d’usage de ces matériaux. La Loire a ainsi vu éclore de nombreux projets audacieux, riches en innovations architecturales et à l’ambiance chaleureuse, qui constituent des références au niveau national. Ces constructions jouent un rôle qui va au-delà de la simple fonction d’habitat : le choix des matériaux, les techniques utilisées et l’atmosphère ainsi créée reflètent les spécificités de nos territoires. Le Pilat et le Forez, dans ma circonscription, sont riches de réalisations exemplaires. En effet, deux ouvrages récemment réalisés y font honneur au bois : le centre de ressources sur l’habitat durable du parc naturel régional du Pilat et les maisons individuelles labellisées maisons passives.

Ayant moi-même mené avec notre collègue Marie-Lou Marcel une mission relative aux labels et aux signes de qualité, je ne peux que soutenir votre idée de labellisation des produits du bois français. Ce label serait, comme vous l’avez très justement souligné, un levier utile de compétitivité hors-prix à l’international et permettrait d’unifier la filière autour d’une bannière commune.

Un an après la publication de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, pourriez-vous dresser un bilan des GIEEF ?

M. François Pupponi. Ce rapport de qualité est sans concessions : à sa lecture, on s’aperçoit que nous disposons d’un potentiel important, d’une capacité industrielle et productive peu égalée dans le monde mais que nous ne sommes pas aujourd’hui capables dans notre pays de les valoriser efficacement. Ce secteur est pourtant fondamental puisqu’il représente 60 milliards d’euros pour l’économie française et 3 % de la valeur ajoutée. Petit à petit, la filière s’est laissé prendre par ses propres défauts et n’a été capable ni de se moderniser ni de comprendre l’environnement dans lequel elle évoluait pour se préparer à la période actuelle – alors même que le bois est un produit d’avenir.

J’approuve les propositions que vous formulez, en particulier celle visant à la désignation d’un délégué interministériel dont la mission consisterait à organiser, à valoriser et à structurer la filière. L’intervention publique est en effet nécessaire dans ce secteur, comme l’illustrent les dizaines de millions d’euros investis par la BPIfrance en sa faveur. S’agissant de vos propositions d’ordre fiscal, votre rapport semble arriver trop tard par rapport au projet de loi de finances en cours d’examen mais nous devrions être en mesure de déposer des amendements au projet de loi de finances rectificative. Il est urgent de mettre en application vos propositions car un marché est aujourd’hui en train de se développer sans que la France soit au rendez-vous.

Votre rapport comprend peu de propositions concernant les économies d’énergie et la biomasse. Or, certaines collectivités développent l’usage du chauffage au bois dans des circuits courts. Comment valoriser cette dimension ?

Mme Jeanine Dubié. Alors que nous disposons dans la filière forêt-bois d’intrants de grande qualité, de ressources forestières riches et abondantes, d’une main-d’œuvre qualifiée et des savoir-faire, nous n’arrivons pas à résister à la compétition internationale. Ce que l’on constate pour le bois et la forêt est d’ailleurs vrai dans de nombreux secteurs de l’économie française. La filière bois est morcelée et pour une raison qui m’échappe, au contraire de nos voisins et concurrents directs, nos entreprises ne semblent pas arriver à s’entendre pour organiser efficacement une filière à l’exportation.

Vous citez dans votre rapport la plateforme commerciale « France Viande Export » mise en place pour les producteurs de viande. Mais de telles plateformes à l’exportation sont difficiles à créer car les acteurs ont des réticences à y participer. Lors de vos auditions, les acteurs de la filière se sont-ils prononcés en faveur de la création de telles plateformes ? Sont-ils selon vous prêts à coopérer et à échanger leurs contacts pour « chasser en meute » ?

S’agissant de la marque « qualité France » et de sa promotion à l’étranger, je suis comme vous persuadée que la solution à la crise de la filière bois passe par une meilleure valorisation de nos produits à haute valeur ajoutée. Quelles sont les missions mises en place par le comité stratégique de filière « bois » pour favoriser la montée en gamme de nos produits ? Des cahiers des charges ont-ils été définis ? Des opérations de promotion sont-elles menées à l’étranger pour promouvoir nos produits ?

Enfin, je souhaiterais exprimer un coup de sang concernant la formation. Alors que les métiers de la filière offrent des débouchés, ils n’attirent pas les jeunes. Plutôt que de viser l’objectif de 80 % d’une classe d’âge au baccalauréat et de 60 % dans l’enseignement supérieur, pourquoi ne pas viser celui de 10 % d’une classe d’âge en apprentissage ?

Mme Michèle Bonneton. À quelques semaines de la COP21, ce rapport est le bienvenu. Alors que la forêt occupe le quart de notre territoire, la filière bois est en perte de vitesse. Les axes de la politique forestière indiqués sont tout à fait intéressants pour faire du bois un produit d’avenir.

L’ONF est un outil précieux pour la gestion de la forêt publique. Compte tenu de ses compétences, pourquoi ne pas lui confier de nouvelles missions, ce qui supposerait de lui accorder également des moyens nouveaux ? Les trois quarts de nos forêts appartenant à des propriétaires privés, quels moyens préconisez-vous d’utiliser pour les mettre en valeur dans le cadre d’une exploitation respectueuse de l’environnement et du développement durable ?

Comme vous le relevez dans votre rapport, dans ce secteur, l’économie française n’est pas celle d’un pays industrialisé : nous vendons du bois brut et achetons du bois transformé et des produits finis. Vous l’expliquez par des facteurs structurels tels que le morcellement de la filière. Comment aider au regroupement, en dehors des GIEEF, et à la modernisation de l’outil de travail sans tuer le tissu des entreprises existantes, très présentes en milieu rural et qui y maintiennent de l’emploi ?

Vous proposez différentes mesures pour aider aux exportations de nos bois à haute valeur ajoutée telles que le chêne et l’orme. La plupart des TPE du secteur n’ont pas les moyens de se positionner sur les marchés internationaux. Comment développer ces exportations ?

Le changement climatique a un impact sur la forêt et modifie sensiblement les aires de répartition et les essences. Quelles mesures d’urgence faudrait-il prendre pour protéger et mieux adapter la forêt française au changement climatique ?

Enfin, l’utilisation adaptée du bois comme source d’énergie est très intéressante puisque si l’on considère globalement la vie d’un arbre de sa naissance à sa combustion, on s’aperçoit que son bilan d’émissions de gaz à effet de serre est nul : il absorbe de tels gaz en croissant puis en émet – mais moins – lorsqu’il brûle. Cependant, on voit actuellement arriver dans les massifs alpins d’énormes engins inadaptés aux routes et chemins existants : ils y coupent tout ce qui se présente, y compris des arbres qui pourraient servir de bois d’œuvre, pour faire des plaquettes, c’est-à-dire de petits morceaux de bois de quelques centimètres de diamètre et de moins d’un centimètre d’épaisseur destinés à brûler. Cela est d’ailleurs aussi dommageable aux chemins mêmes et aux sources – certaines exploitations ne respectant pas les aires de captage d’eau. Ces plaquettes sont parfois emmenées très loin, à des centaines de kilomètres. Voilà qui ne me paraît pas une gestion durable de la forêt. Ce alors que des deniers publics, provenant notamment de l’Union européenne, sont souvent investis massivement pour créer des chemins. Comment mieux encadrer la gestion de la forêt ? Que pensez-vous de la création de labels tenant également compte des coupes de bois et non seulement du résultat finalement obtenu ?

M. Jean-Pierre Le Roch. Dans votre rapport, vous citez un sondage effectué en 2015 par l’association Forêts privées françaises d’où il ressort que la majorité des propriétaires considère davantage la forêt comme un patrimoine culturel et familial que comme un bien économique à exploiter. D’où l’opportunité et le bien-fondé de vos travaux. Avec 14 % de surface boisée, la Bretagne fait partie des régions les moins forestières de France. Pourtant, la forêt bretonne augmente chaque année de 3 000 hectares. Mais il s’agit le plus souvent d’un peuplement pauvre et de médiocre qualité. Dans une démarche regroupant l’ensemble des acteurs de la filière a été lancé un programme dénommé Breizh forêt bois, dispositif d’aide financière à la plantation ouvert pour la période 2015-2020. Doté de dix millions d’euros, financé par l’Union européenne, l’État, la région, qui pilote l’opération, et le département, ce programme propose aux propriétaires intéressés de les aider à replanter des arbres sur trois hectares minimum en choisissant des essences de bois d’œuvre diversifiées, adaptées aux terrains et au marché, afin d’inciter les propriétaires à investir à long terme. Que pensez-vous de ce type d’initiative ?

Enfin, en 2013, le nombre de grumes exportées vers la Chine était plus important que le nombre de grumes sciées – en Bretagne, notamment. Nombre de professionnels du secteur m’avaient alors alerté sur le fait que les normes applicables aux grumes résineuses à l’export s’avèrent bien plus souples que celles relatives aux emballages de produits transformés. Ces normes favorisent donc les productions engendrant une moindre valeur ajoutée pour le territoire. Lors de vos auditions, avez-vous abordé la question des déséquilibres à l’export engendrés par les différences de niveau de taxation et d’exigences environnementales et sociales ?

M. Philippe Armand Martin. Quelles sont les aides existantes au développement à l’investissement et à l’export de bois transformé localement ? Lors l’élaboration de votre rapport, avez-vous recueilli des demandes de soutien à l’activité des entreprises de transformation de bois sur notre territoire ? Pourriez-vous nous apporter des précisions quant aux différences de tarif applicable au contrôle phytosanitaire des grumes de bois dans les pays européens, le tarif variant de quinze à cinq cents euros ? Une harmonisation des contrôles phytosanitaires est-elle envisagée ?

M. Paul Molac. Dans l’Ouest de la France, les forêts sont relativement bien gérées mais on y trouve aussi un bocage qui, jadis, servait la plupart du temps de bois de chauffage et de bois d’œuvre. Aujourd’hui, alors que le milieu agricole perd de plus en plus le contact avec l’arbre, il existe un gisement considérable et le plus souvent inexploité.

En matière d’exploitation durable, on sait qu’une fois arrivé à maturité, le bois doit être coupé. Est-il vrai partout en France que, comme vous l’affirmez, la croissance arboricole est supérieure aux prélèvements ? Alors que dans les années 1950-1960, nous avons assisté à une période de défrichement, nous visons plutôt aujourd’hui une reconquête de la forêt. Nombre de scieries ont réalisé des investissements importants pour produire des palettes : ne court-on pas un risque de rupture de la chaîne d’approvisionnement ?

Enfin, les forêts bretonnes sont « en timbre-poste », c’est-à-dire qu’elles sont réparties entre un très grand nombre de propriétaires. Comment faire en sorte que les parcelles, dont la surface est quelquefois inférieure à un hectare, soient replantées systématiquement ?

M. Antoine Herth. Damien Abad a identifié le problème de la concurrence chinoise mais aussi celui de la concurrence intra-européenne, notamment avec l’Allemagne et l’Autriche. Les auteurs du rapport ont choisi dans leurs travaux de faire un gros plan sur les régions Aquitaine et Rhône-Alpes, deux territoires à l’identité forestière très particulière. Ne faudrait-il pas justement établir un inventaire régional des problèmes qui se posent dans la filière ? La forêt aquitaine est cultivée, pour l’essentiel, et les filières de valorisation y existent depuis longtemps. En région Rhône-Alpes, le caractère montagnard de la forêt est prégnant. Mais quid du Massif central, des Pyrénées, du Centre et de la Bretagne ? Peut-être conviendrait-il de décliner vos propositions région par région afin de faire varier les priorités accordées en fonction des différentes problématiques régionales ?

Mme Marie-Hélène Fabre. Vous précisez dans votre rapport que le recours aux circuits courts pourrait être une décision économique rationnelle : comment parvenir à traduire concrètement cette préconisation dans les échanges entre l’amont et l’aval de la filière ? Comment réconcilier les propriétaires forestiers et les industriels du bois autour de cette idée et développer une filière intégralement made in France ?

M. Éric Straumann. Je souscris aux propres de mon collègue Antoine Herth. De nombreux scieurs de notre région se plaignent des exportations vers la Chine. Serait-il possible, notamment au regard du droit international, d’envisager une taxation de ces exportations pour que ce bois reste en France ?

Vous proposez de faciliter l’essor du bois de construction. Or il existe en Alsace une entreprise qui a connu une belle réussite en ce domaine : dirigée par la famille Burger, Maison BOOA fabrique des maisons préfabriquées dans un style très contemporain. Il conviendra donc aussi de faire porter nos efforts sur les architectes qui n’ont pas suffisamment l’habitude d’utiliser ce matériau pour la construction.

Mme Marie-Lou Marcel. La quatrième de vos quinze recommandations met l’accent sur la sensibilisation des jeunes et des actifs aux métiers de la filière dont vous proposez de stimuler l’attrait. Ces métiers pâtissent en effet d’une réputation passéiste. Quelles actions de formation préconisez-vous ? S’agissant de la formation initiale, vous évoquez le BTS mais il serait également possible de viser d’autres diplômes tels que le baccalauréat professionnel. Quelles mesures recommandez-vous pour soutenir l’innovation ? Enfin, dans ma circonscription, un lycée des métiers du bois et de l’habitat propose différentes formations. Cet établissement comprend une plateforme technologique bois assortie d’un plateau technique et d’un centre de ressources. Cette plateforme présente l’intérêt de regrouper l’ensemble des acteurs de la filière – que ce soient les lycées, les centres de recherche ou les professionnels. Pourquoi ne pas avoir évoqué ce type de plateforme dans votre rapport ?

M. Thierry Benoit. Lorsque l’on évoque le bois, on pense souvent à l’énergie, au bois d’œuvre et au charpentage. Le président de la mission et la rapporteure ont-ils songé à relier la filière bois à d’autres industries productives françaises telles que le bâtiment et les travaux publics – notamment dans l’éco-construction –, l’industrie automobile – pour les finitions haut de gamme et l’isolation des portières, des plafonds et des pavillons –, et la filière du granit, présente non seulement dans les Vosges et le Tarn mais aussi en Bretagne ?

M. Lionel Tardy. Vous soulignez à juste titre que la perte de parts de marché de la filière française du bois est liée aux politiques commerciales étrangères – dont souffrent les exportateurs de grumes – et à l’apparition de nouveaux acteurs. Comme dans de nombreux autres secteurs, la filière française doit donc se moderniser et innover, ce qui suppose que nous ciblions mieux les aides qui lui sont apportées et que nous lui facilitions l’accès à BPIfrance.

Je m’interroge quant à la première et à la deuxième de vos recommandations. La désignation d’un délégué interministériel et la création d’un observatoire économique permettront-ils vraiment de résoudre les problèmes posés ? Les pouvoirs publics – ministère de l’agriculture en tête – n’ont-ils pas déjà toutes les clefs en main pour renforcer ou cibler les dispositifs existants ? Pourquoi ne pas s’appuyer sur le Conseil supérieur de la forêt et du bois qui existe déjà et qui vient tout juste d’être réformé par un décret du 8 octobre dernier ?

Mme Marie-Noëlle Battistel. Vous établissez le constat, que je partage, de la dégradation structurelle de la filière forêt-bois qui doit pourtant jouer un rôle important à la fois dans l’économie de proximité, les circuits courts et l’emploi, notamment en zone de montagne. Mais cette filière à fort potentiel a également toute sa place parmi les solutions aux défis énergétiques, environnementaux et climatiques, compte tenu des objectifs que nous nous sommes fixés en termes de biomasse. S’il existe plusieurs leviers pour atteindre ces objectifs, il sera nécessaire de résoudre le problème du morcellement de la forêt française. Les dispositifs de soutien à la mobilisation, tels que les appels à projet, restent insuffisamment connus des propriétaires privés et le regroupement des parcelles ne s’opère que très difficilement. Il me paraît donc indispensable d’œuvrer à la résolution de ces difficultés pour optimiser la mobilisation de la ressource bois. Il est évident que la puissance publique doit se mobiliser. Des moyens doivent être accordés aux collectivités territoriales et aux entreprises d’exploitation. Mais il me paraît essentiel de définir une politique économique forestière en lien avec les élus des communes forestières, les associations foncières pastorales, les groupements forestiers, les établissements de formation, les pôles de compétitivité et les interprofessions. Ces acteurs doivent travailler de manière concertée si l’on souhaite réussir à mieux valoriser la filière bois-forêt en France. Le délégué interministériel dont vous préconisez la nomination pourrait-il devenir l’animateur de cette politique afin que l’on parvienne rapidement à résoudre ces difficultés ?

M. Jean-Claude Mathis. La filière du bois et de la forêt représente un atout économique important, du fait de la surface forestière dans notre pays, mais sous-exploité.

Il conviendrait, selon vous, de former quatre-vingts bûcherons par an alors que les établissements actuels ne formeraient que trente-cinq titulaires de BTS. Or, non seulement il conviendrait aussi de prendre en compte les titulaires d’un baccalauréat professionnel mais, en outre, il existe depuis des décennies dans ma circonscription une école forestière. Après avoir eu pour mission pendant de nombreuses années de former des agents de l’ONF, cet établissement s’est ensuite adapté à la conjoncture. Ses dirigeants, que je rencontre régulièrement, m’ont expliqué que les élèves qu’ils forment ne trouvent pas de débouchés.

Enfin, thème que vous n’avez pas évoqué, la chasse constitue elle aussi une activité économique importante dans nos forêts.

M. Yves Daniel. Ce rapport d’information, qui vise à améliorer la valorisation économique de la filière bois-forêt française, présente d’autant plus d’intérêt qu’il permet également d’aborder des questions écologiques et sociales. Permettez-moi de souligner l’importance des opérations menées par la profession agricole en faveur de la replantation bocagère et d’aborder la question des délaissés routiers, ferroviaires et de ceux des zones d’activité. Ces délaissés représentent un potentiel important de production de bois. Nous souhaitons développer globalement la filière pour en faire un véritable acteur économique dans notre pays et au niveau européen mais nous risquons d’être déçus si nous n’avons pas de capacités de production suffisantes. Enfin, je salue celle de vos propositions qui vise à sensibiliser l’opinion au nécessaire entretien des forêts et à renforcer l’acceptabilité des coupes de bois.

Mme Josette Pons. Dans le Var, il existait autrefois de nombreuses scieries, le bois servant notamment à la fabrication de caisses pour les militaires. C’est chose révolue depuis fort longtemps mais nous nous efforçons depuis plusieurs années de faire rejaillir cette filière bois car la forêt a continué à se développer. 80 % de la forêt varoise appartient à des propriétaires privés détenant de petites parcelles. Cette forêt est essentiellement composée de résineux présentant la particularité de prendre feu en période de chaleur. Sur notre territoire, le projet Inova en cours d’élaboration permettra de produire de l’électricité à partir de la biomasse. L’État, la région et le département ont donc conclu des contrats avec les propriétaires forestiers afin qu’Inova puisse acheter du bois dans de bonnes conditions de conservation de la forêt. Depuis quelque temps, un autre projet, conduit par E.ON, vient d’être agréé par le Gouvernement qui concurrencera Inova dans l’achat de bois auprès de ces propriétaires varois : qu’en pensent le président de la mission et la rapporteure ?

M. Franck Gilard. Depuis des années, un excellent rapport sur la forêt est publié tous les ans par le Conseil économique, social et environnemental, le Sénat ou l’Assemblée nationale. Nous disposons de la plus belle forêt d’Europe et d’un savoir-faire reconnu. Or, malgré tout, la filière ne se développe pas : où est le « bug » ?

M. Alain Suguenot. Le secteur du bois subit aujourd’hui une crise dramatique. Tout d’abord, la France exporte du bois brut bon marché et importe des produits transformés. Ensuite, la forêt française présente la spécificité d’être feuillue. Or, le marché mondial est surtout orienté vers les résineux. C’est pourquoi si vous prônez, avec votre proposition n° 15, des innovations dynamiques permettant de sortir de la crise, ne conviendrait-il pas de réorienter nos plantations vers les espèces résineuses ?

M. Marcel Bonnot. Le constat que vous formulez, qui ne souffre pas la discussion, a déjà établi de manière moins complète dans certaines régions. Je suis originaire d’une région forestière, la Franche-Comté. Dans chaque vallée de ma circonscription, on trouve plusieurs scieries, souvent en difficulté. Nos forêts constituent un atout dans notre espace économique. Elles nous offrent des matériaux d’avenir. Pourtant, nous n’arrivons pas à les transformer et à les intégrer dans une économie efficace. De nombreux rapports ont déjà été publiés sur le sujet sans déboucher sur des résultats tangibles. On coupe du bois pour en faire des grumes au sciage que l’on les exporte et qui nous reviennent sous forme de petits meubles. Dans le domaine énergétique, on utilise à des fins de chauffage des pellets de bois et des granulés que l’on voit arriver des pays de l’Est alors que nos forêts ont un potentiel extraordinaire mais inexploité.

Afin de ne pas nous en tenir à des recommandations, ne conviendrait-il pas de confier leur mise en application aux régions – qui appréhendent précisément ce secteur économique ?

M. Jean-Luc Laurent. Je souhaiterais que ce travail ne soit pas un rapport de plus laissé sans suite. Nos forêts constituent certes une grande richesse mais qui n’est pas exploitée à sa juste mesure. Vous soulevez dans ce rapport la question de la compétitivité, approche qui me paraît adéquate au regard d’un gisement insuffisamment mis en cohérence et exploité. Votre recommandation n° 14, qui vise à faciliter l’essor du bois construction, me laisse sur ma faim : faut-il la rapprocher de la recommandation n° 1 visant à la désignation d’un délégué interministériel voué à assurer cette mise en cohérence et à nous permettre d’obtenir du « produire français », c’est-à-dire l’exploitation de notre production ? Dans le domaine de la construction, j’observe que l’on recourt beaucoup aux importations, plutôt qu’aux circuits courts. Comment transformer ces recommandations en des solutions opérationnelles ?

M. François Vannson. J’ai moi aussi le sentiment que ce rapport va dans le bon sens mais je souhaiterais qu’il soit suivi d’effets. L’ensemble de la filière a de gros besoins d’investissement et le marché demande à ce que les produits soient de plus en plus aboutis. Dans le département des Vosges, alors que nous sommes assez en pointe en matière d’économie circulaire, nous nous trouvons face à des situations absurdes : des bois coupés dans le massif vosgien se retrouvent transportés vers d’autres destinations – telles que l’Allemagne, notamment – pour ensuite revenir chez nous. Il va de soi que le bilan carbone de ce type de démarche n’est guère positif. Il serait donc nécessaire de développer l’économie circulaire qui constitue une approche moderne de notre économie, avantageuse en tous points en termes de développement durable mais aussi de coûts. Enfin, les procédés de vente de bois aujourd’hui utilisés, telles que la vente à la bougie, sont assez différents de ceux employés par nos partenaires européens et handicapent la filière. Les professionnels doivent notamment apporter des garanties, ce qui n’est pas le cas chez nos voisins. Il conviendrait donc de favoriser davantage la contractualisation avec l’ONF.

Mme la rapporteure. Vos nombreuses questions, qui témoignent de votre intérêt pour le sujet, nous confortent dans les préconisations que nous avons formulées. J’entends bien que ces dernières doivent se concrétiser. Je vous répondrai de manière globale tant les sujets abordés sont nombreux.

S’agissant du volet fiscal, nous déposerons des amendements au projet de loi de finances rectificative de manière à réorienter notre fiscalité patrimoniale vers l’investissement.

Il est vrai que nous nous heurtons à un blocage. Mais je crois beaucoup à la désignation d’un délégué interministériel puisque vous n’avez cessé de souligner que l’articulation entre l’amont et l’aval de la filière était inexistante. Les nombreux professionnels que nous avons rencontrés se trouvent à cet égard dans une impasse. Un délégué interministériel redonnerait non seulement de la cohérence au traitement du sujet au sein du Gouvernement mais apporterait aussi de la coordination aux professionnels à l’échelon territorial dans deux secteurs qui ont du mal à trouver un point de jonction. La nomination de ce délégué ne me semble donc pas superflue. Tout comme il ne me semble pas superflu de donner une impulsion plus moderne, plus industrielle et plus compétitive à cette filière – les atouts de celle-ci n’apparaissant pas spontanément. Quant au Conseil supérieur de la forêt et du bois, il est plutôt perçu favorablement par les sylviculteurs, puisqu’il est réuni par le ministre de l’agriculture, mais pas par les industriels. Même au sein de ce conseil, nous retrouvons cette division entre l’amont et l’aval – raison pour laquelle nous jugeons nécessaire d’introduire un correctif en la personne de ce délégué interministériel. Il ne serait d’ailleurs pas nécessaire que cette fonction perdure pendant de longues années dès lors qu’il remettrait en mouvement et en cohérence ces deux pans de la filière.

Une fois que la rationalisation sera acquise au niveau étatique, j’aurais effectivement tendance à faire confiance aux bassins de production et à préconiser une régionalisation des actions à mener de manière à ce que les actions menées soient adaptées aux spécificités de chaque territoire. En Aquitaine, par exemple, une fois défini un périmètre autour de l’aval et de l’amont, on simplifie grandement les choses. Les programmes de plantation sont concertés, la formation est assurée dans des lycées bois et des sections universitaires spécifiques et les pôles de compétitivité mettent en cohérence ce dispositif de formation. S’agissant de l’innovation, il est possible de bien mettre en adéquation l’offre et la demande à tous les niveaux, qu’il s’agisse de la formation, de la production ou des débouchés industriels – voire des scieries, même si ce pivot est défaillant.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué le bois énergie. Mais au fil de nos rencontres, nous nous sommes aperçus que ce secteur ne faisait pas encore consensus chez les professionnels et que la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte contenait des dispositions plus volontaristes qu’ils ne le souhaitaient. D’ailleurs, lors des tables rondes que nous avons organisées, le représentant du secteur bois énergie s’est retrouvé particulièrement isolé face à l’ensemble des autres professionnels. Il revient donc au champ public de donner le ton en la matière.

La filière forêt-bois a été qualifiée d’historique : je n’y vois guère un point positif. Elle est historique dans ses programmes de plantation, ses outils de production et quant à la manière dont est perçu son mode de commercialisation dans une économie mondialisée. Elle a donc grand besoin de gagner en modernité.

S’agissant de la formation, nous sommes favorables au développement des écoles du bois. La France manque réellement de bûcherons : ce n’est pas nous qui l’affirmons mais l’Institut technologique Forêt cellulose bois construction ameublement (FCBA), le plus grand centre technique industriel de cette filière, qui réclame une meilleure gestion des besoins de main-d’œuvre. Quant à nous, nous sommes tout à fait favorables à conserver toute leur place aux plateaux techniques même si dans notre rapport, nous avons plutôt pris le parti des pôles de compétitivité dans la mesure où le champ économique a été notre fil conducteur.

Nous attendons de l’ONF, qui signe actuellement un nouveau contrat avec l’État pour la période 2016-2020, qu’il soit plus réactif dans la gestion des massifs et qu’il encourage à une gestion plus productive et en adéquation avec l’amont et l’aval plutôt que de se cantonner à la protection de la forêt et au marché du bois. Car l’ONF aujourd’hui ne répond pas aux attentes du terrain.

Il est un fait établi que les scieries françaises exportent des grumes car elles ne sont pas taxées ni guère contrôlées par la Chine. En revanche, cet État taxe très fortement les produits finis que pourrait exporter la France. Le choix commercial des scieries tire toute la filière vers le bas. La question de la taxation est donc un point qu’il conviendra d’étudier dans le cadre des textes législatifs à venir.

Quant aux circuits courts, ils seront mis en avant dès lors que l’on favorisera la régionalisation. Sans doute conviendra-t-il de formuler des propositions pour rendre le code des marchés publics plus opérationnel à cet égard.

Enfin, le regroupement étant l’une des clefs de revalorisation de la filière, il importe que les incitations fiscales, dont le principe a été posé, soient vraiment mises en œuvre.

M. Damien Abad, président de la mission d’information. Si le constat est partagé, la question se pose effectivement de savoir comment mettre en application nos préconisations. Deux véhicules législatifs importants devraient nous permettre de passer des vœux pieux à l’action concrète. Nous pourrions, d’une part, proposer des incitations fiscales par voie d’amendements au projet de loi de finances rectificative. Vous constaterez d’ailleurs une différence, concernant l’abattement à l’ISF entre nos préconisations et celles de la Cour des comptes, cette dernière étant favorable à la suppression de cet abattement tandis que nous souhaitons en conditionner le bénéfice à l’investissement productif dans le secteur forestier. D’autre part, le contrôle de l’application de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt nous permettra de mieux structurer la filière et de proposer des pistes d’amélioration, parmi lesquelles la désignation d’un délégué interministériel. Autant j’ai des réserves quant à la création d’un observatoire économique, autant il me semble que le délégué interministériel est un outil indispensable pour réconcilier l’amont et l’aval de la filière.

S’agissant de la restructuration de cette filière, nous avons effectivement besoin, Mme la présidente, d’agir au niveau des bassins régionaux, compte tenu des grandes différences existant entre nos régions. Dans mon département, nous avons élaboré un livre blanc pour aider la filière bois face à des problèmes très concrets. Ainsi, par exemple, la fièvre catarrhale entraîne en ce moment même un besoin de regarnissage de nos forêts – mesure qui ne peut être que prise qu’à l’échelon territorial.

La labellisation me semble faire consensus.

Il conviendrait effectivement de développer des plateformes à l’exportation, comme dans la filière bovine qui bénéficie de la plateforme France Viande export. Cela suppose cependant une entente préalable entre les acteurs concernés.

En matière de formation, je citerai un exemple de bonne pratique : dans mon département a été mis en place un pôle bois associant une maison du bois, une maison familiale rurale et une école d’ingénieurs du bois. Des élèves formés en alternance dans cette école ont ainsi pu accéder à des fonctions d’ingénieur et à une technicité importante dans le domaine du bois.

S’agissant de l’exportation des grumes, le problème que pose le bois est que plus on le travaille, moins il rapporte. Eu égard aux contrôles sanitaires du bois, il est vrai que les différences tarifaires avec la Chine sont importantes. Mais nous avons également des difficultés européennes en ce domaine de sorte que la question de l’harmonisation des contrôles pourrait effectivement être soulevée. En revanche, la taxation est soumise aux règles européennes si bien que nous aurons du mal à aborder le sujet. La seule solution serait de poursuivre notre réflexion sur la TVA sociale afin de taxer les importations tout en respectant les règles européennes.

Mme Josette Pons a soulevé un problème, particulier au site de Gardanne, de conflit d’usage entre le bois énergie et le bois d’œuvre, auquel il nous faudra effectivement retravailler.

Il conviendrait en effet de favoriser le dialogue entre filières. Nous avons d’ailleurs essayé dans ma circonscription de favoriser le mélange du plastique et du bois qui peut servir dans l’industrie automobile. Il me semble que le délégué interministériel mais aussi le Conseil national de l’industrie sont les acteurs adéquats pour encourager un tel dialogue.

S’agissant du bois de construction, nous nous sommes heurtés à une décision du Conseil constitutionnel censurant l’instauration de quotas de bois dans la construction. Il nous faudra tenir compte de cette difficulté constitutionnelle si nous souhaitons avancer en ce domaine.

En ce qui concerne les aides à l’exportation, Business France et les fonds bois mis en place par la BPI nous permettront de résoudre nombre de problèmes.

En conclusion, nous partageons tous le constat que le potentiel de la filière est important mais sous-exploité et sous-valorisé, essentiellement pour des raisons structurelles qui peuvent donner lieu à des réponses, tant à l’échelle territoriale que régionale, nationale et européenne. C’est donc dans ce cadre qu’il conviendra de travailler en utilisant au maximum les deux véhicules législatifs précités.

Mme la présidente Frédérique Massat. Je vous remercie.

La Commission autorise la publication du rapport d’information.

——fpfp——

Informations relatives à la commission

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 14 octobre 2015 à 9 h 30

Présents. – M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bies, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Marcel Bonnot, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. Dino Cinieri, M. Jean-Michel Couve, M. Yves Daniel, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Antoine Herth, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, M. Thierry Lazaro, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Yannick Moreau, M. Hervé Pellois, Mme Josette Pons, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. François Pupponi, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Fabrice Verdier

Excusés. – M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, M. Denis Baupin, M. André Chassaigne, Mme Anne Grommerch, M. Serge Letchimy, M. Kléber Mesquida, M. Germinal Peiro, M. Bernard Reynès, M. Thierry Robert, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistaient également à la réunion. – M. Paul Molac, M. François Vannson