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Commission des affaires économiques

Mercredi 16 novembre 2016

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 22

Présidence de Mme Frédérique Massat, Présidente

– Table ronde sur la vigne et le changement climatique, et sur les autorisations de plantation en 2016, avec la participation de M. Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), de Mme Anne Haller, déléguée pour les filières viticoles et cidricoles à FranceAgriMer, et de M. Jérôme Gautier, inspecteur national de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO)

La commission a organisé une table ronde sur la vigne et le changement climatique, et sur les autorisations de plantation en 2016, avec la participation de M. Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), de Mme Anne Haller, déléguée pour les filières viticoles et cidricoles à FranceAgriMer, et de M. Jérôme Gautier, inspecteur national de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO).

Mme la présidente Frédérique Massat. Mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour une table ronde ayant pour objet le bilan des autorisations de plantation ainsi que les conséquences du changement climatique sur la vigne.

Je tiens à remercier nos invités, qui ont rapidement répondu à notre demande, car nous sommes au cœur de l’actualité de cette problématique avec la COP 22 de Marrakech. Aussi recevons-nous M. Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), Mme Anne Haller, déléguée pour les filières viticoles et cidricoles à FranceAgriMer, et de M. Jérôme Gautier, inspecteur national de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO).

Je rappelle par ailleurs que notre commission répond des thèmes de la vigne et de la viticulture puisque nous suivons l’ensemble du dossier agricole. Certains de nos collègues présents aujourd’hui, dont Mme Marie-Hélène Fabre, ont beaucoup travaillé sur ce sujet, et ont déposé des propositions de résolution ainsi que des propositions de loi.

Le cinquième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a montré que les conséquences du changement climatique sur les systèmes naturels ne sont plus douteuses. La vigne n’est pas épargnée, elle subit déjà les conséquences de ce changement du fait de la sécheresse et de la hausse des températures estivales ; les vendanges sont plus précoces et les caractéristiques des vins – même français (Sourires) – sont modifiées, car ils sont plus alcoolisés et moins acides.

Nos débats porteront aussi sur la question des autorisations de plantation de vigne en 2016, qui ont fait l’objet d’une réforme, ainsi que sur le bilan des attributions au cours des huit premiers mois de sa mise en œuvre.

Avant de donner la parole à nos invités, je souhaiterais leur poser quelques questions.

Les autorisations de plantation doivent-elles dès à présent nous servir afin d’adapter nos vignobles au changement climatique ?

Dans le cadre du projet « Adaptation à long terme au changement climatique pour la viticulture et l’œnologie » (LACCAVE) de l’INRA, quel est selon vous le scénario prospectif le plus probable parmi ceux avancés pour l’horizon 2050 ?

Si nous devons déplacer une partie de nos vignobles, qu’adviendra-t-il de nos terroirs ? Car cette question se pose tant à l’Assemblée nationale qu’à l’ensemble de nos populations.

Le cahier des charges des appellations contrôlées (AOC) étant strict, comment ces contraintes climatiques sont-elles prises en compte en matière de degré d’alcool, d’innovation technique et de zonage ?

Enfin, quelles sont les réactions des consommateurs ? Car, les vins étant plus concentrés et plus alcoolisés, la consommation est susceptible d’évoluer.

M. Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Économiste, je travaille sur l’innovation dans les systèmes agroalimentaires pour l’adaptation des filières et des territoires à des enjeux comme le changement climatique. Mes travaux de recherche portent spécifiquement sur la filière de la vigne et du vin.

En 2012, nous avons lancé un programme de recherche dénommé LACCAVE, qui réunit une vingtaine de laboratoires de l’INRA ainsi que des partenaires de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) et de FranceAgriMer. Ce sont donc une centaine de chercheurs et de doctorants qui ont travaillé sur les différents aspects que peut revêtir l’impact du changement climatique sur la vigne et le vin, et particulièrement sur les solutions d’adaptation du secteur.

La filière de la vigne et du vin est extrêmement sensible au climat et au changement climatique. Les viticulteurs sont confrontés aux évolutions du climat depuis des millénaires ; de ce fait, ils ont développé une aptitude à prendre en compte ces phénomènes, et proposent déjà des solutions. Le facteur nouveau réside dans l’accélération du changement climatique qui prend les acteurs au dépourvu. Et les règles, les pratiques et les connaissances qui avaient été stabilisées afin de s’adapter à cette variabilité climatique, y compris en en tirant profit à travers les millésimes et les terroirs, se trouvent bouleversées.

Le cycle des travaux du programme LACCAVE touche à sa fin et, cet après-midi, les conclusions vont être présentées au conseil d’administration spécialisé de FranceAgriMer, la semaine prochaine à l’INAO, ensuite dans les différentes régions viticoles.

S’agissant des conséquences du changement climatique sur la vigne et le vin, quatre aspects doivent être pris en considération.

Tout d’abord, l’augmentation de la température moyenne et ses effets sur le fonctionnement de la plante, qui font l’objet d’observations et de simulations, avec divers scénarios.

En second lieu, l’évolution de la pluviométrie, qui comporte quelques incertitudes, peu de changements étant aujourd’hui observés – mais les simulations mettent en évidence l’accentuation des sécheresses dans le bassin méditerranéen, caractérisées par de moindres précipitations estivales, et leur extension dans le reste de la France.

Ensuite, la variabilité du climat, à laquelle les agriculteurs sont les plus sensibles, et qui est associée à des événements extrêmes : vagues de chaleur, pluies importantes, dans les Cévennes par exemple.

Le dernier aspect, moins souvent évoqué, réside dans les perturbations induites par le changement climatique sur les écosystèmes, les sols – qui changent –, les bioagresseurs, les prédateurs de ces bioagresseurs, etc.

L’ensemble de ces aspects provoque des impacts en cascade sur la vigne et le vin.

Parmi ces impacts, le premier est la précocité des stades de développement de la vigne : le dernier d’entre eux, celui de la vendange, est avancé de quinze jours à trois semaines dans toutes les régions par rapport aux années 1980. À cet égard, la vigne a été un témoin précurseur du changement climatique, dont on constate un effet amplificateur pour cette plante. Ainsi, lorsque deux degrés centigrades supplémentaires de température moyenne sont annoncés pour 2050, on obtient, si l’on additionne à ce phénomène une précocité pouvant aller jusqu’à trois semaines, une hausse de plus quatre à cinq degrés de température au moment des vendanges.

Aujourd’hui, dans la zone méditerranéenne, du fait de la chaleur, la vigne transpire davantage, et a de ce fait besoin de plus d’eau, alors que celle-ci se raréfie en été. Ainsi les bilans hydriques sont-ils négatifs chaque année en plaine languedocienne depuis 2000, ce qui n’est pas le cas dans les autres vignobles de France. Ce phénomène a des conséquences sur les rendements ainsi que sur les processus d’élaboration du vin.

Par ailleurs, la variabilité climatique a des conséquences sur les caractéristiques du raisin, notamment sur sa composition, donc sur la qualité du vin. Le raisin étant plus sucré, le taux d’alcool dans le vin augmente et l’acidité diminue, particulièrement l’acide malique ; le vin est donc moins acide. Le profil aromatique ainsi que la couleur sont, eux aussi, affectés par ce changement de température.

Ces évolutions ne sont pas nécessairement négatives pour les vignobles, notamment septentrionaux, qui ne connaissaient pas toujours des conditions de maturité optimales à l’heure des vendanges. En revanche, le problème est sérieux pour le vignoble méditerranéen, car certains vins atteignent déjà des degrés d’alcool importants, des vins blancs peuvent devenir insuffisamment acides, et des profils aromatiques sont susceptibles d’être trop prononcés.

Le changement climatique influe encore sur les aspects géographiques : l’évolution de la température va modifier les zones potentiellement favorables à la plantation de vigne. Il sera ainsi possible de planter en altitude, mais surtout dans le nord de la France et de l’Europe. Des cartes fondées sur des indices strictement climatiques montrent de la vigne plantée en Angleterre, déjà présente dans le sud de ce pays, au Danemark, en Allemagne et en Pologne.

Toutefois, des conditions climatiques favorables ne sont pas suffisantes pour obtenir de grands vignobles, qui supposent d’importants investissements dans plusieurs domaines.

D’autre part, des impacts sont constatés sur le revenu des viticulteurs, singulièrement du fait d’une baisse des rendements, mais à cause des risques accrus, ainsi que sur la valeur à terme du patrimoine constitué par le vignoble. Par ailleurs, la compétitivité et la hiérarchie entre les différentes régions viticoles peuvent se voir modifiées.

Enfin, le système des appellations est mis à mal et remis en cause ; la question de la capacité des autorités concernées à anticiper et à faire face à ces enjeux futurs est posée.

Les travaux du programme LACCAVE ont aussi porté sur les solutions à envisager. Certaines d’entre elles ont déjà été mises en pratique, parfois dans d’autres pays, mais un important travail de recherche demeure nécessaire pour en proposer de nouvelles, notamment parce que les évolutions se précipitent.

Des innovations techniques sont susceptibles d’intervenir dans certains domaines, mais aucune d’entre elles ne se suffit à elle-même : elles doivent être combinées afin de faciliter l’adaptation.

Le premier domaine dans lequel il est possible d’intervenir est le choix des cépages. Il est ainsi possible d’en introduire de nouveaux, plus tardifs, afin de contrer la précocité, ils résistent à la sécheresse et éventuellement aux maladies – sujet très actuel –, produisant plus d’acidité et moins de sucre.

À cette fin, nous sommes en quelque sorte à la recherche du cépage idéal ; il peut s’agir d’une plante existante ou de clones présents au sein d’un cépage, susceptibles de présenter ses caractéristiques. Il peut s’agir de plants provenant d’autres régions, qui seront importés, c’est pour cela que, dans le Bordelais par exemple, de tels cépages sont testés. Des cépages peuvent être le fruit de la création variétale, singulièrement des hybrides auxquels nous travaillons à l’INRA.

Le deuxième volet technologique est agronomique, et concerne la gestion du sol, question qui a été trop délaissée et à laquelle l’INRA va activement se consacrer – pas uniquement dans la perspective du programme « quatre pour mille » inscrit dans les travaux de la COP 22, mais aussi parce qu’elle constitue un levier d’intervention important. Il s’agit de baisser la température de surface, de renforcer la capacité de rétention d’eau du sol, d’augmenter la matière organique, de favoriser l’enracinement de la vigne, donc sa capacité à résister aux chocs climatiques.

Un autre champ d’intervention réside dans le mode de conduite du plant, la façon de la tailler, sa hauteur, etc.

L’irrigation est associée à ce volet agronomique, cette question est posée depuis un certain temps en Languedoc. L’irrigation ne doit pas être utilisée comme arme première, mais elle sera indispensable pour répondre à des déficits hydriques. Au demeurant, elle doit être considérée dans le cadre d’une réflexion globale portant sur la gestion de l’eau dans la vigne.

D’autres innovations plus technologiques portent sur l’information climatique. D’autres sont « correctives », qui tempèrent les effets du changement climatique, comme l’excès de sucre et d’alcool ainsi que le manque d’acidité, par des interventions œnologiques. Ce travail revient à l’INRA, et des moyens d’intervention concrets existent d’ores et déjà.

Trois autres volets devront être combinés à ces évolutions techniques.

Le premier d’entre eux porte sur la réorganisation des plantations au sein d’un terroir. Plusieurs doctorants se sont penchés sur le sujet et leurs travaux ont montré que les terroirs sont hétérogènes et qu’il est possible de jouer sur la diversité d’un terroir donné, sur l’exposition des parcelles et des sols ou l’orientation de tel cépage afin de s’adapter. On constate grâce à cette adaptation une variation d’un ou deux degrés de la température moyenne sur la période végétative, ce qui représente l’équivalent de l’augmentation moyenne attendue pour 2050.

Nous conduisons des réflexions avec les syndicats, avec les organismes de défense et de gestion (ODG) et avec des groupes de viticulteurs. Le changement climatique peut être ainsi considéré comme l’occasion de rebâtir un projet de terroir et d’appellation, de le revisiter en tenant compte des nouvelles données climatiques. Ces évolutions devront bien entendu s’inscrire dans le cadre déterminé par la COP 21 d’une évolution vertueuse, car si un minimum de stabilité climatique n’est pas garanti, il ne sera pas possible de construire un nouveau modèle viable.

Cela suppose l’accompagnement de ces projets locaux, sous forme de nouveaux outils de simulation afin de prévoir quelle pourrait être dans cinquante ans l’évolution du paysage viticole ou la ressource en eau, etc.

Le deuxième volet de l’adaptation porte sur la localisation, car beaucoup de parcelles ne sont pas exploitées : ainsi, dans le Minervois, seule une portion minime de l’aire d’appellation est utilisée ; il existe donc des réserves foncières mobilisables. Un ressort réside dans la possibilité de modifier les limites des aires d’appellation, notamment dans les zones d’altitude, qui offrent une plus grande fraîcheur, propice à l’adaptation. De façon plus radicale, il est aussi possible de créer, ex nihilo, de nouveaux vignobles, en Bretagne ou dans le Bassin parisien, par exemple.

En complément de ces diverses solutions, le changement institutionnel constitue un autre registre de l’adaptation au changement climatique. Cela concerne notamment la gestion du risque ; il faut repenser la façon de combiner le système d’assurance avec les options de stockage de réserves afin de compenser une année par une autre, imaginer des solidarités entre vignobles et terroirs – qui fonctionnent déjà, comme le montre le cas du pic Saint-Loup – ainsi que la diversification des activités.

Les politiques de recherche et d’innovation doivent aussi être mobilisées, mais aussi la gestion du foncier ; par ailleurs, il est également possible d’agir sur le cahier des appellations.

En outre, nous avons considéré que les consommateurs pouvaient constituer l’un des acteurs de l’adaptation. Car, s’ils acceptent les effets du changement climatique sur les vins sur le plan de la qualité gustative, l’adaptation sera facilitée. Dans le cas contraire, les viticulteurs seront contraints à maintenir les caractéristiques actuelles des vins, et éviter les chocs trop importants, faute de quoi, un marché sera perdu.

Des tests ont été effectués avec des vins de Bordeaux et du Languedoc. Une comparaison a été pratiquée entre des vins de Bordeaux « actuels » et des vins prenant d’ores et déjà en compte le facteur du changement climatique – car certains viticulteurs en fabriquent –, qui sont plus alcoolisés et moins acides, dont les raisins ont fait l’objet d’une plus longue maturation, etc. En première dégustation, les consommateurs sont séduits par les vins « du changement climatique », qui présentent l’attrait de la nouveauté, sont plus expressifs, et développent des arômes différents. En revanche, la répétition des dégustations, sur une semaine par exemple, met en évidence une certaine lassitude, les consommateurs marquant une préférence pour les vins actuels.

Le changement climatique peut être mis à profit pour faire émerger de nouveaux profils aromatiques, mais l’essentiel du marché demeure associé aux caractéristiques actuelles des vins ; il faut donc éviter des modifications trop radicales de leurs profils afin de ne pas bouleverser le secteur.

Pendant deux ans, avec le concours de nos collègues de FranceAgriMer et de l’INAO, et en consultant des professionnels, nous avons engagé des travaux de prospective ayant abouti à quatre scénarios visant l’horizon 2050, qui vont être présentés cet après-midi, puis diffusés dans les régions viticoles.

Ces scénarios ont été construits en croisant l’intensité de l’innovation avec celle de la relocalisation.

Le premier d’entre eux propose une stratégie « conservatrice », dans lequel les viticulteurs joueraient un rôle incrémental et partiel en réorganisant leurs propres espaces de production. Dans ce cas de figure, l’innovation demeure ce qu’elle est aujourd’hui, sans rupture majeure d’intensité, et les mêmes cépages sont conservés tout en connaissant quelques évolutions. L’irrigation est introduite avec modération, et les aires d’appellation actuelles ne sont pas modifiées.

Ce scénario est a priori viable jusqu’en 2050, à condition que le réchauffement climatique demeure modéré.

Le deuxième scénario s’intitule « Innover pour rester » ; il a la faveur d’un nombre non négligeable de producteurs qui constatent d’ores et déjà les effets du changement climatique sur la qualité du vin ou les rendements, notamment. L’un des principaux paramètres réside dans une accélération de la dynamique, ce qui implique en particulier des modifications de la réglementation applicable aux appellations.

L’enjeu consiste à conserver le capital ainsi que les investissements humains, matériels et immatériels ayant été réalisés par des générations, qui font la valeur de la filière. Il s’agit d’être prêts à bouleverser, en particulier, l’encépagement et les pratiques, ce qui suppose une bonne gestion de la trajectoire.

Plus improbable, le troisième scénario, dit « nomade », nous a en revanche permis de tirer toutes les conséquences de la mobilité poussées à ses extrémités. Que se passera-t-il si les droits de plantation sont totalement libérés, s’il est permis de planter partout ?

Le quatrième scénario est dit « libéral ». Il postule l’abolition de toute réglementation relative aux droits de plantation et la permission de faire du vin partout ; dans ce cas de figure, les producteurs perdent du pouvoir. Ce pouvoir ira alors aux assembleurs, qui mettront le changement climatique à profit pour mieux organiser leurs approvisionnements en fonction des régions.

M. Jérôme Gautier, inspecteur national de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO). L’Institut national de l’origine et de la qualité attribue les AOC et les indications géographiques protégées (IGP), les labels rouges ainsi que le label « agriculture biologique », tous signes d’origine et de qualité agricole. Je travaille à Bordeaux et suis chargé des questions environnementales pour l’ensemble des produits, tous concernés par le changement climatique.

Le régime des AOC viticoles existe depuis quatre-vingts ans ; il a été fondé sur les caractéristiques particulières des produits et sur leur lien avec le terroir. Ces vins d’appellation d’origine contrôlée présentent une originalité et des caractéristiques bien particulières. La composante climatique est prépondérante dans la définition du terroir, et toute évolution des conditions climatiques entraîne des modifications de ses caractéristiques, singulièrement si les autres critères demeurent inchangés.

Dans les années 1980, le travail de l’Institut a notamment consisté à définir les règles de production afin de s’assurer que les vins présentaient toutes les garanties de maturité et de qualité, notamment dans les régions septentrionales, mais aussi dans le Sud-Ouest, par exemple, où la variabilité climatique est importante. L’INAO s’est toujours adapté, tâchant de jouer sur un certain nombre de critères que sont notamment les rendements, en les modulant chaque année en fonction des caractéristiques climatiques constatées.

Ainsi les cahiers des charges prennent-ils en compte ces évolutions, dont la hausse des températures bien entendu. Toutefois, si une hauteur de feuillage importante permet une bonne photosynthèse, si les vignes ont été enherbées afin d’obtenir une concurrence hydrique entre l’herbe et la vigne pour éviter un rendement excessif, si les vins atteignent une concentration suffisante et si les conditions climatiques sont favorables, le changement climatique peut être bénéfique dans un premier temps.

Il faut conserver à l’esprit que la France connaît simultanément plusieurs évolutions climatiques ; elle produit 360 AOC et 75 IGP, assez également réparties sur l’ensemble du territoire, même s’il n’y a pas de vigne dans le nord du pays. Par ailleurs, la production est marquée par la prépondérance des AOC et IGP.

Ces implantations viticoles ont été fondées sur une organisation sociale importante, avec des producteurs et des négociants ; l’ensemble de la filière est concerné par les évolutions du climat. On constate que les récentes années ont été de belles années dans certaines régions, toutefois des sécheresses terribles sont survenues en d’autres endroits, ce qui conduit à poser la question de l’irrigation, voire de la survie du végétal. Dans ces conditions, c’est le devenir de l’appellation qui peut être remis en cause.

Les cahiers des charges des appellations déterminent un certain nombre de caractéristiques comme les zones. Et, s’il fait toujours plus chaud, peut-être faudra-t-il remonter les vignobles lorsque des zones d’une altitude raisonnable sont disponibles, car on ne peut aller à 2 500 mètres ! En revanche, dans la plaine languedocienne par exemple, il est possible de gagner en altitude.

Outre la définition des zones, il faut prendre en compte le végétal, car des variétés de vignes supportent mieux telles ou telles caractéristiques, notamment les températures élevées.

Par ailleurs, le changement climatique se caractérisera par la multiplication des évènements extrêmes, car, outre les canicules et les sécheresses, des épisodes très pluvieux peuvent survenir. De tels évènements se sont produits il y a quelques années en Europe de l’Est, où il a plu tout un été. Au demeurant, le changement climatique peut accroître les risques de gels printaniers, les pousses étant plus précoces du fait du réchauffement. En outre, l’alternance jour-nuit sera modifiée : les nuits seront plus longues et les jours plus courts ; ce qui augmentera le risque de survenue de gel de printemps, alors que les gels d’hiver seront moins denses. Dans tous les cas, la capacité de production annuelle sera mise en cause.

Ainsi, le dernier congrès de l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) s’est tenu au Brésil, pays où, il y a deux ans, les vignes ont été touchées par le gel pour la première fois.

L’appropriation de la thématique des appellations par les producteurs est fondamentale : que faire alors que les vignes vont être replantées pour quarante ou cinquante ans, à l’horizon de 2050-2060 ? Il est possible de prévoir de modifier les hauteurs de feuillage par exemple, ce qui relève du travail quotidien déjà existant, et chaque année, le viticulteur doit s’adapter aux évolutions climatiques de l’année.

Par ailleurs, d’autres réflexions peuvent être conduites au sujet de l’encépagement. Dans les régions françaises, l’encépagement des AOC est assez diversifié, et certains d’entre eux peuvent compter jusqu’à dix cépages. Plus on remonte au nord, plus ce nombre diminue : ainsi la Bourgogne compte-t-elle un cépage unique, présent depuis plus de six cents ans. Il existe donc une notoriété, une histoire, un attachement des producteurs et des consommateurs au chardonnay et au pinot noir dans cette région. C’est en ayant conscience de cet arrière-plan qu’il faut considérer l’éventualité d’introduction de nouveaux cépages.

Nous avons entamé une réflexion portant sur les conditions imposées par les cahiers des charges des appellations d’origine. Nous suivons tous les travaux techniques produits par la recherche. Si le taux de sucre des moûts est trop élevé, alors que, pendant vingt ans, nous avons travaillé à obtenir des taux de sucre et d’alcool plus importants ; il nous faudra peut-être revenir sur les travaux de sélections effectués par le passé.

Nonobstant les travaux de la recherche, un certain nombre de règles ont été entérinées par les producteurs, dont la proscription des organismes génétiquement modifiés (OGM). Nous sommes par ailleurs toujours dans l’attente de travaux supplémentaires des divers instituts de recherche, ainsi que d’information et de souhaits d’appropriation de l’ensemble de ces thématiques par la filière.

Mme Anne Haller, déléguée pour les filières viticoles et cidricoles à FranceAgriMer. FranceAgriMer travaille à dégager, avec les professionnels de la filière viticole notamment, des stratégies de réponse et d’adaptation au changement climatique. Comme l’a indiqué M. Jean-Marc Touzard, les résultats de nos travaux de recherche sont en cours de présentation devant nos principaux interlocuteurs, en conseil spécialisé aujourd’hui, la semaine prochaine, au comité national de l’INAO.

Nous organiserons par ailleurs, au début du mois de janvier prochain, une rencontre avec les professionnels afin de les mobiliser, et nous créerons un groupe de travail mixte entre l’INAO et FranceAgriMer qui travaillera sur ces problématiques avec l’objectif de mettre en place un plan d’action concret dans le courant de l’année 2017. Dans la mesure du possible, ce plan s’articulera avec les autres grandes thématiques.

Le dépérissement du vignoble fait d’ores et déjà l’objet d’un plan de travail. La question de la garantie des récoltes par l’assurance en cas d’accident climatique entre, elle aussi, dans le champ de nos préoccupations. Nous réfléchissons par ailleurs aux dispositifs d’aides destinés à accompagner le changement et l’innovation, car, au-delà de l’adaptation des cahiers des charges, c’est toute une philosophie qu’il convient de faire évoluer. Faut-il recourir plus systématiquement à l’irrigation ? Faut-il changer les terroirs et les cépages ? Ces questions constituent autant de points importants de doctrine.

Les professionnels souhaitent s’approprier et prendre en charge ces thématiques, tant sur le plan national, pour lequel un groupe va être constitué, que sur le plan régional ; cela représente un travail considérable, dans lequel nous nous investissons dès à présent.

Les autorisations de plantation constitueront l’un des outils privilégiés de notre politique, utile à la régulation du potentiel ; à ce titre elles permettront de limiter ou d’accompagner les nécessaires évolutions du vignoble.

La négociation de la réforme de la politique agricole commune (PAC) de 2008 a conduit à la suppression du système de régulation, qui s’est éteint au cours des années 2013-2014. Au mois de décembre 2013, la nouvelle PAC a réintroduit ce système sous une forme différente, puisque désormais il est question d’autorisations de plantation et non plus de droits de plantation.

Les textes d’application du nouveau droit communautaire ont été publiés au mois d’avril 2015. Malgré cette publication tardive, l’administration de FranceAgriMer, l’INAO et les professionnels ont travaillé de concert au cours de l’année 2015 afin d’être prêts dès le 1er janvier 2016.

Notre choix a porté sur un outil unique et dématérialisé couvrant tous les segments : les AOC, les IGP et les vins sans indication géographique (VSIG). Tous les types d’autorisations sont par ailleurs concernés, qu’il s’agisse des plantations nouvelles accroissant le potentiel d’une exploitation ou des replantations car, aujourd’hui, un producteur qui arrache puis replante doit détenir une autorisation.

Notre outil a ainsi été centralisé et automatisé afin de rendre le meilleur service possible aux professionnels.

Les règles applicables aux plantations nouvelles constituent le sujet le plus politique, car c’est là que réside le potentiel de croissance. Les professionnels ont mis en place un dispositif de gouvernance fondé sur des instances nationales ; il a ainsi été décidé qu’au cours de la première année 1 % du potentiel existant serait mis à la disposition des intéressés ; ce qui représente 8 057 hectares d’autorisations de plantations nouvelles, si telle est la demande. C’était là le maximum qu’il était possible d’autoriser.

En outre, quatre-vingt-dix-huit limitations régionales ont été proposées. Il s’agit de zones dans lesquelles les professionnels, afin d’éviter les risques de détournement de notoriété de l’indication géographique ou de saturation du marché, ont souhaité limiter les surfaces concernées à dix, cinquante ou cent hectares. Un critère unique d’éligibilité a été retenu : tous les producteurs se sont engagés, à l’occasion de plantations nouvelles, à ne pas aboutir à un détournement de notoriété, c’est-à-dire à bien planter dans le segment autorisé. Ainsi, une nouvelle plantation de VSIG devra conserver ce statut jusqu’en 2030.

En application d’une règle communautaire, deux critères de priorité ont été retenus : les nouveaux entrants sont prioritaires, tandis que les producteurs ayant antérieurement pratiqué des plantations illégales ne le sont pas. Par ailleurs, à l’avenir, les producteurs n’ayant pas utilisé les autorisations qu’ils avaient obtenues ne seront pas non plus prioritaires.

Le bilan montre que 4 141 producteurs ont demandé des autorisations de plantations nouvelles représentant 7 768 hectares pour 7 506 demandes initiales. Toutes les attributions ont eu lieu le même jour, le 31 juillet 2016 ; 3 540 hectares ont été attribués pour 7 506 demandes. L’écart constaté entre les demandes initiales et les attributions résulte de la non-éligibilité d’une partie des surfaces : ainsi, de façon caricaturale, des gens situés en Bourgogne voulaient-ils faire du champagne. Des erreurs matérielles ont par ailleurs pu être commises, certaines demandes concernant des emplacements situés en dehors de l’aire d’autorisation. Enfin, quelque 1 000 hectares ont fait l’objet de tentatives de détournement. Il s’agit de producteurs ayant déposé des dossiers portant sur des surfaces importantes – car celles-ci ne sont pas plafonnées aujourd’hui – malgré la forte probabilité de se voir opposer un refus, dans le seul but d’empêcher d’autres viticulteurs d’accéder aux hectares concernés. Nous devons donc demeurer vigilants, car de telles situations sont susceptibles de se reproduire.

L’écart est aussi imputable à un plafonnement régional des demandes dans certaines zones. Dans celle de Cognac, le plafond était de 250 hectares pour plus de 2 000 hectares de demandes. Ce sont ainsi 1 800 hectares qui ont « disparu », en raison d’une différence importante entre ce qui a été demandé et ce qui a pu être attribué. Comme les producteurs savaient qu’il y avait une limitation régionale et que l’attribution se faisait au prorata de la demande initiale, beaucoup ont gonflé leur demande pour être sûrs d’obtenir ce qu’ils souhaitaient. Par exemple, si vous savez que l’on ne vous attribuera que 20 % de ce que vous avez demandé et que vous voulez dix hectares, vous êtes tenté d’en demander cinquante plutôt que dix. Dans les zones où il y a des limitations régionales, il y a donc eu un effet, que l’on n’a pas mesuré, de « sur-demande » de la part des producteurs pour avoir une attribution finale qui corresponde à leurs besoins. Aussi ne peut-on pas affirmer qu’il y a eu 7 768 hectares de demandes réelles de plantation ; c’est sans doute beaucoup moins.

Aujourd’hui, tout le monde se félicite, y compris les professionnels, que l’on ait réussi à attribuer correctement l’ensemble des autorisations pour 2016, ce qui n’était pas gagné d’avance. Nous avons pu mettre en place une gouvernance professionnelle forte qui implique à la fois le conseil spécialisé de FranceAgriMer, le comité national des AOC viticoles et le comité national des IGP viticoles de l’INAO. L’ouverture à la plantation pour les vins sans indication géographique (VSIG) a pu être mise en place sur l’ensemble du territoire, à l’exception de quelques endroits où les professionnels ont choisi de ne pas le faire. Dans le périmètre de certaines AOC, là où il y a des risques de détournement, ils ont en effet préféré limiter fortement la possibilité de faire des VSIG.

Des ajustements sont en cours de discussion. Il y a cependant un vrai problème avec le non-plafonnement des demandes ; aussi les professionnels demandent-ils que l’on fasse bouger cette ligne. La priorité donnée aux nouveaux entrants pose également problème car, dans certains endroits, ils ont été les seuls bénéficiaires des autorisations, ce qui est un peu gênant pour l’économie de la filière. Enfin, il est nécessaire d’adapter le critère de détournement de notoriété dans le sens d’une plus grande souplesse par rapport aux règles qui avaient été retenues l’année dernière.

Un certain nombre de demandes professionnelles sont en cours d’examen. Nous espérons qu’elles pourront aboutir à des arbitrages d’ici à la fin de l’année, de manière à pouvoir lancer la campagne 2017 de plantations nouvelles dans de bonnes conditions.

En plus des autorisations nouvelles, nous avons délivré aux professionnels un nombre important d’autorisations de conversion de droits ou de replantation. Actuellement, 75 % des autorisations sont délivrées de manière automatique. Comme le nouveau système réglementaire était assez contraignant, nous avons fait en sorte de limiter la charge administrative pour les professionnels grâce à un outil informatique simple : les professionnels font une demande, et ils reçoivent l’autorisation par retour de courriel – c’est la machine qui fait le calcul – ce qui leur évite d’avoir à attendre.

Mme Marie-Hélène Fabre. Madame, Messieurs, je tiens à vous remercier pour l’éclairage que vous nous avez apporté sur la viticulture et sur les thèmes importants que vous avez abordés : la gestion des sols, en particulier, qui n’a peut-être pas été prise en compte convenablement, ainsi que la gestion des risques de sécheresse, d’inondations ou de gel que peut connaître notre pays.

Madame Anne Haller, les autorisations de plantation posent problème compte tenu du changement climatique. En tant qu’élue de Languedoc-Roussillon, je sais à quel point la sécheresse a fait baisser la capacité de production de la vigne. Nous enregistrons en effet une baisse des récoltes de 40 % à 70 %. Pensez-vous qu’il soit nécessaire de modifier le fonctionnement des autorisations de plantation ? Faut-il continuer à considérer les nouveaux entrants comme prioritaires pour l’attribution des autorisations ?

Je souhaite revenir sur la violence des aléas climatiques – sécheresse, inondation, gel, grêle. L’ensemble des bassins viticoles ont été plus ou moins touchés en 2015 par des risques différents. Le contrat « socle » avait été mis en place pour permettre aux agriculteurs de souscrire une assurance, considérant que le Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) ne pourrait pas continuer à abonder la gestion de ces crises. On sait que ce contrat socle a moyennement fonctionné puisque, sur 800 000 hectares de vignes en France, 150 000 hectares seulement ont été assurés. Certaines propositions sont en cours de négociation au niveau européen – nous avons entendu le ministre de l’agriculture la semaine dernière sur ce sujet. Des propositions sont faites par la profession. Pensez-vous que l’on puisse rendre obligatoire l’adhésion à ce contrat socle, du moins pour les aides venant de l’organisation commune de marché (OCM) ?

Monsieur Jean-Marc Touzard, vous avez fait état d’un certain nombre de recherches. Je souhaite, pour ma part, insister plus particulièrement sur les cépages résistants aux maladies, afin de limiter l’utilisation de pesticides. Je sais que le centre de Pech-Rouge de l’INRA mène des recherches depuis de nombreuses années. Pourrait-on avoir un calendrier de la façon dont les choses vont évoluer, car on sait qu’il faut une inscription sur un cahier des charges à présenter à FranceAgriMer avant de pouvoir définir ces cépages ? Vous avez retenu treize cépages sur les quatorze présentés. Si la France ne met pas en avant des expérimentations sur les cépages résistants, nous serons obligés de les acheter en Italie, en Allemagne, en Espagne ou en Suisse, alors qu’ils n’ont certainement pas les mêmes qualités.

Avez-vous des inquiétudes par rapport aux déclarations du nouveau Président des États-Unis concernant les noms de domaine « .vin » et « .wine » et la Société pour l’attribution des noms de domaine et des numéros sur internet – Internet Corporation for Assigned Names and Numbers, dite « ICANN » ?

M. Éric Straumann. Madame la présidente, je tiens à vous féliciter pour cette belle initiative et à saluer tous les intervenants pour leur travail, en particulier le centre de Colmar de l’INRA qui travaille sur ce sujet depuis de nombreuses années. Le changement climatique est bien réel, même si ce phénomène est parfois contesté. S’agissant du vignoble alsacien, nous avons constaté que la température moyenne a augmenté de deux degrés en cinquante ans et que les vendanges ont été avancées en moyenne d’un mois. On ne peut contester ces faits.

Pour le moment, le changement climatique est plutôt favorable aux viticulteurs. Toutefois, nous savons bien qu’il faut anticiper l’avenir. Vous avez parlé de l’évolution des cépages. Peut-être faut-il se tourner davantage encore en Alsace vers la production de vin rouge, qui connaît déjà une belle progression, notamment le pinot noir. Nous avons également une belle production de vins pétillants, puisque les crémants d’Alsace représentent 35 millions de cols.

Enfin, le changement climatique n’existe pas seulement en France, mais aussi en Italie et en Espagne. L’Italie est, je crois, le premier producteur en volume, et l’Espagne est le premier exportateur. Le changement climatique chez nos voisins du Sud peut-il nous être favorable ?

Mme Jeanine Dubié. Je tiens à remercier les intervenants qui, par leur présentation très précise et pédagogique, nous ont apporté un éclairage sur ce sujet. Il est particulièrement intéressant d’avoir un retour d’expérience sur le projet LACCAVE qui a étudié les impacts du changement climatique sur la vigne et le vin et les stratégies d’adaptation possibles.

Vous connaissez l’attachement des parlementaires de tous bords pour la vigne et la viticulture. C’est dans ma circonscription que sont situés les vignobles de Madiran et je connais bien leur impact culturel, économique et social sur notre territoire. Si, à court terme, comme vous l’avez dit, la hausse des températures peut bonifier le vin, à long terme c’est tout un secteur qui risque d’être bouleversé.

J’ai écouté avec grand intérêt vos présentations qui nous poussent à nous interroger sur nos modes de production et sur les cépages. Je veux saluer ici la capacité de l’INRA, de FranceAgriMer et de l’INAO à se projeter dans l’avenir et à travailler pour donner les moyens à nos producteurs de s’adapter au changement climatique.

Je souhaite vous interroger sur les chances que pourrait offrir ce changement climatique aux vins français, car il ne faut pas voir seulement les aspects négatifs. Dans quelle mesure le changement climatique pourrait-il nous permettre de redécouvrir des cépages locaux oubliés, et ainsi de renouer avec notre patrimoine ? Dans le Sud-Ouest, la cave de Plaimont effectue un travail sur le tannat et le manseng noir. Ce type d’expérimentation sur des cépages anciens est-il conduit sur d’autres territoires ? Comment les pouvoirs publics peuvent-ils aider les producteurs à s’adapter ? C’est maintenant qu’il faut le faire, parce que l’on sait bien qu’il faut plusieurs années avant qu’une vigne donne le meilleur d’elle-même.

Ma deuxième question concerne les appellations d’origine contrôlée. En France, il existe 360 AOC et 75 IGP. Ne faudra-t-il pas, à terme, réviser le cahier des charges des AOC afin de s’adapter au changement climatique, notamment en ce qui concerne l’irrigation qui est actuellement interdite pour les AOC ? La technique d’irrigation dite raisonnée, au goutte-à-goutte, peut-elle se développer ?

Enfin, notre pays n’est pas le seul à être touché par le changement climatique. Y a-t-il des vignobles plus menacés que d’autres en France et dans le monde ? Comment les autres pays du monde se préparent-ils à ces changements ?

Vous nous avez présenté le nouveau dispositif de gestion du potentiel de production viticole mis en place le 1er janvier 2016. Ce nouveau système réglementaire est-il une réponse adaptée face aux effets du changement climatique ?

M. André Chassaigne. Nous sommes malheureusement déjà dans l’adaptation, ce qui est un signe d’échec partiel en ce qui concerne la lutte contre le changement climatique.

Il existe plusieurs scénarios possibles. Le premier mise sur une simple augmentation de la température d’un à deux degrés, qui pourrait être favorable à la qualité des vins. Malheureusement, il faut davantage réfléchir aux conséquences d’une hausse de la température de 4 à 5 degrés et évaluer le bouleversement que cela va entraîner pour le cadre traditionnel de la viticulture, qu’il s’agisse du degré alcoolique, de l’acidité, du ruissellement et de l’érosion, des phénomènes de photosynthèse. Comme vous l’avez souligné les uns et les autres, la question du temps est primordiale : il faut anticiper à vingt ans, voire davantage, ce qui implique une appropriation par les producteurs, mais aussi une intensification de la recherche pour apporter des réponses à la hauteur du défi.

Je veux appeler votre attention sur la nécessité d’accompagner la recherche sur les cépages résistant à certaines maladies comme l’oïdium et le mildiou. J’ai déjà eu l’occasion de regretter certains blocages, alors que la recherche, en particulier dans le centre de Pech Rouge de l’INRA, s’est considérablement développée et a abouti à des résultats très concrets. Il a fallu saisir l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) pour qu’il y ait un déblocage et que cette recherche puisse bénéficier à la viticulture.

Ma deuxième question concerne le maintien de certaines caractéristiques physico-chimiques des cépages avec leurs typicités. Des recherches sont-elles menées en la matière ? C’est toute la richesse de nos vins qui en dépend.

Quelles solutions sont esquissées sur la maîtrise de la température des raisins, des moûts, des vins ? Des techniques ont-elles déjà été mises en œuvre sur la désalcoolisation, pour tenter de sauvegarder la typicité des vins avec de nouveaux composants de la vendange ? Qu’en est-il de ces conservatoires de l’INRA que je trouve remarquables sur de nombreuses productions, notamment avec des cépages anciens ? Cela pourra-t-il servir à répondre à cette priorité ?

Ma dernière question concerne l’INAO. Il a été souligné que l’évolution pouvait porter sur le périmètre des zones de plantation, en lien notamment avec l’altitude, et sur de nouvelles variétés adaptées aux nouvelles conditions, avec de nouveaux cépages. Quelles AOC ont engagé une mutation ? Où en est la prise de conscience des régions d’appellation contrôlée ? Dans le cadre de cette mutation, quels cépages peuvent être pris en compte, en particulier quels cépages anciens peuvent-ils être introduits ?

M. Kléber Mesquida. Je tiens tout d’abord à remercier nos trois intervenants pour leurs exposés concis, qui nous ont beaucoup éclairés.

Je considère que la viticulture joue un grand rôle en matière de développement durable. Si des territoires ont été préservés sur la façade méditerranéenne, c’est grâce au coupe-feu naturel que représente la viticulture. Elle permet aussi la préservation de la biodiversité. Si mon département est l’un des plus attractifs de France, c’est grâce au climat et au littoral mais aussi aux paysages qu’offre la vigne et qui en font sa carte d’identité. Nos vins sont les marqueurs de notre « ADN ». Enfin, si la viticulture joue un rôle économique important et qu’elle permet la vie des personnes sur notre territoire et l’aménagement du territoire, c’est une composante essentielle de l’attractivité touristique.

J’ai entendu plusieurs propositions concernant les cépages résistants. Je ne comprends pas pourquoi on refuse en France l’utilisation de certains cépages alors qu’ils sont autorisés ailleurs, en Italie et en Allemagne, notamment.

Alors qu’auparavant le climat jouait un rôle de régulateur, nous allons devoir nous adapter aux variations climatiques que nous connaissons actuellement – canicule, sécheresse, hivers doux. Dans l’Hérault, dont je préside l’assemblée départementale, nous souhaitons lancer un grand plan d’irrigation. Le canal du Bas-Rhône et les retenues collinaires jouent un rôle spatial environnemental sur la préservation des dégâts d’inondation et sur l’érosion des terres.

Comme le disait Jean Jaurès, « c’est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source ». La source, c’est la vie de l’homme. Lorsque le fleuve se déroule sur un territoire, il alimente aussi l’économie. L’irrigation doit être pensée, car je ne crois pas trop à la translation vers d’autres terroirs plus au nord qui seraient plus frais : la notion de terroir et de géologie des sols doit être prise en compte.

M. Jean-Claude Mathis. À mon tour, je tiens à remercier les intervenants. Il est certain qu’il n’est pas évident d’anticiper les effets liés au changement climatique. Comme l’a indiqué mon collègue alsacien, le changement climatique est pour le moment plutôt bénéfique pour les vignobles alsacien et champenois. Il est plus facile en effet de vendanger au mois de septembre quand il fait encore beau, qu’au mois de novembre quand il gèle et qu’il y a du brouillard.

S’achemine-t-on vers une implantation de vignobles plus au nord, ce qui n’est pas pour nous déplaire ? Ce qui est important, c’est la prise de conscience du réchauffement climatique. Il faut pouvoir anticiper dans les meilleures conditions les effets du changement climatique ; c’est certainement un travail de très longue haleine.

Mme Anne Haller a parlé du nouveau système de régulation des plantations jusqu’en 2030, après cinq années de combat acharné. Aujourd’hui, la viticulture reste le seul secteur agricole dont le potentiel de production a été un instrument de régulation dans la nouvelle PAC. En effet, les droits de plantation ont laissé la place aux autorisations de plantation. Quelles conséquences ces nouveaux dispositifs peuvent-ils avoir à long terme sur la filière viticole ?

Mme Michèle Bonneton. Chacun sait que la vigne est un révélateur pertinent du changement climatique. Le vin est une composante importante de notre agriculture et de notre culture. Je vous remercie pour votre présentation, car nous sommes tous concernés, même dans les régions où il n’y a pas de vignoble.

En quoi le changement climatique est-il à l’origine de nouvelles maladies ou de nouveaux ravageurs pour la vigne ? Pour lutter contre ces nouveaux ravageurs et ces nouvelles maladies, faudra-t-il recourir à une nouvelle agronomie, une nouvelle approche culturale des sols, ou bien est-il essentiellement envisagé d’utiliser de nouveaux intrants, de nouveaux pesticides, etc. ?

M. Frédéric Roig. Je veux, moi aussi, saluer l’excellent travail qui nous a été présenté ce matin, et surtout la prise de conscience des instances.

Mon propos concernera plus précisément la nature des aléas climatiques et leur fréquence. Le Lodévois a connu quatre événements cévenols en deux ans. Nous n’avions pas encore colmaté les deux premiers qu’il tombait plus de 500 millimètres d’eau en quelques heures.

Plus récemment, le 17 août 2016, s’est produit un événement exceptionnel sur le pic Saint-Loup, puisqu’il y a eu à la fois de la grêle, une tornade, une tempête et des pluies diluviennes. Les vignerons que nous rencontrons nous disent que les dispositifs technico-administratifs sont assez complexes. Je pense à tout ce qui touche à l’achat de raisin ou de vin, par rapport aux dérogations. Quant au risque assurantiel sur le capital ou sur la parcelle, il est d’une complexité extraordinaire, à la fois sur la forme, en ce qui concerne la qualification du risque, et sur le fond, pour la mise en œuvre des procédures. Certes, les instances – collectivités territoriales, État, chambres d’agriculture – sont très présentes et mobilisées, mais nous constatons que chaque cas individuel est très compliqué car il y a autant d’exploitations que de cas de figure. La définition du risque par Météo France est parfois assez contestée.

Vous avez parlé de l’agriculture de demain. On s’aperçoit que l’irrigation est présente au cœur du vignoble héraultais. Mais comme elle n’est pas la même sur l’ensemble du territoire, il est important d’effectuer un travail prospectif « chirurgical », c’est-à-dire pratiquement au plan communal. C’est ce que nous allons faire, avec mon collègue Kléber Mesquida, dans les semaines à venir.

M. Laurent Furst. Peu de gens refusent maintenant la notion de changement climatique. Il suffit de regarder ce qui se passe dans la sylviculture. En effet, les essences changent, les lignes de hauteur où les feuillus et les résineux se remplacent les uns les autres ont tendance à remonter. Bref, la nature s’adapte à l’évolution des situations.

La viticulture est un secteur économique essentiel pour la France puisque la balance commerciale et les exportations sont au même niveau que l’aéronautique. La filière viticole représente un grand nombre d’emplois directs et c’est toute une industrie qui fonctionne autour d’elle.

Nos vignobles sont confrontés aujourd’hui à des changements majeurs, dont le changement climatique, mais aussi à de nouveaux entrants sur le marché, au développement d’une production très uniformisée et presque industrialisée dans les pays du Nouveau Monde, à une modification mondiale de la consommation de vin. Si la France veut conserver son atout compétitif, le vignoble devra évoluer.

Y a-t-il une coopération avec le monde viticole pour accompagner cette évolution nécessaire ? J’ai parfois le sentiment que l’on impose beaucoup de règles à la viticulture, qu’on lui demande toujours de s’adapter, sans une véritable coopération avec les professionnels.

M. Hervé Pellois. Si l’on peut se réjouir que la filière viticole française apporte une forte valeur ajoutée et un excédent commercial intéressant, il n’en demeure pas moins qu’elle comporte des points faibles, notamment les vins sans appellation, les produits de distillerie, les jus de fruits, qui sont des secteurs déficitaires, ce qui nous soumet à une forte concurrence et nous oblige à acheter en Espagne ou en Italie.

Si j’ai bien compris, sur les 8 000 hectares de demandes d’autorisations de plantation, ce sont à peine 50 % qui ont été satisfaits l’année dernière. Qu’est-ce qui peut expliquer que l’on n’arrive pas à ces 8 000 hectares ? Des pays concurrents comme l’Italie et l’Espagne n’utilisent-ils pas l’ensemble de leurs quotas pour augmenter leur production ?

Comme M. Éric Straumann, je souhaiterais savoir si les pays du Sud comme l’Italie et l’Espagne sont confrontés eux aussi à des variations de température. Ont-ils mis en œuvre des expérimentations communes avec l’INRA ? Y a-t-il une réflexion identique dans ces pays ?

Ma dernière question est celle d’un néophyte : peut-on planter de la vigne partout en France, grâce à ces 1 % de plantations nouvelles, si l’on utilise des produits non-IGP ?

Mme Brigitte Allain. Je veux m’associer aux questions qui ont été posées par Mme Marie-Hélène Fabre et M. André Chassaigne s’agissant des autorisations de plantation accordées en priorité aux nouveaux entrants et des demandes qui ne sont pas plafonnées.

Les aires d’appellation sont liées à des terroirs et à la géologie des sols. Cela dit, nous avons bien vu, ces vingt dernières années, qu’à chaque crise viticole des vignobles sont abandonnés sur les coteaux, qui deviennent des friches, au profit des zones de plaine, ce qui crée une grave déprise agricole. Se pose-t-on vraiment la question globale de la gestion du foncier lorsque l’on parle des aires d’appellation ? Faudrait-il aller plus loin dans la précision de ces aires d’appellation, parce que l’on doit aussi intégrer la dimension globale du foncier pour l’alimentation ? Si l’on ne regarde que la viticulture, cela peut être néfaste. La vigne doit donc s’intégrer dans des politiques globales agricoles et alimentaires.

À travers les différents scénarios qui nous ont été présentés, nous voyons bien que certains sont tentés par le scénario nomade. En quoi l’agro-écologie, qui figure dans la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, peut-elle accompagner justement le deuxième scénario, « innover pour rester », qui semble à privilégier ?

Mme Sophie Errante. Ma question porte essentiellement sur la confiance des viticulteurs vis-à-vis des plants vendus par les professionnels et sur la recherche sur les maladies. Pour ma part, je représente en partie le vignoble du muscadet, fortement touché par l’esca, et cette année plus particulièrement par le mildiou. C’est notamment à cause du dérèglement climatique et des pluviométries différentes que cette maladie s’implante durablement.

Les viticulteurs ont perdu confiance dans l’avenir parce que la recherche sur les maladies piétine depuis de nombreuses années. Avez-vous des éléments permettant de leur redonner confiance ? Actuellement, il y a beaucoup de friches. Lorsque nous essayons de convaincre les gens de replanter, ils nous répondent qu’il faut d’abord régler les problèmes liés aux maladies parce qu’ils n’ont pas envie d’investir dans un vignoble en souffrance.

M. Alain Suguenot. Sans rejoindre le bataillon des climato-sceptiques, je crois qu’il convient de parler davantage de dérèglement que de réchauffement climatique. J’en veux pour preuve que si 1976 et 2003 ont été des années de canicule, cette année les vignes ont plutôt souffert du gel un peu tardif que du réchauffement. C’est pourquoi il faut faire très attention et gérer le phénomène sur des périodes très longues. Les plus pessimistes annonçaient déjà en 2013 la fin du Bordelais et estimaient qu’il était préférable de planter de la vigne en Grande-Bretagne ou en Scandinavie que sur nos territoires…

La vraie question est celle de l’évolution générale du volume. Le vin deviendra-t-il demain un produit de luxe ? Plus on va monter vers les régions septentrionales, plus on va pouvoir planter de la vigne. Cela dit, la Bourgogne est encore protégée, y compris par rapport au pinot noir, même s’il fut un temps où l’on arrachait le gamay en raison du grand froid alors que l’on va peut-être maintenant en produire beaucoup plus au nord. Vous savez qu’aujourd’hui les maisons de négoce de Beaune pensent que l’avenir, aux États-Unis en matière viticole, c’est plutôt l’Oregon que la Californie. Constatez-vous un phénomène de ce type en France ? On parle de 2050. Mais ce changement n’interviendra-t-il pas plus tôt ?

M. Fabrice Verdier. Je partage l’analyse de MM. Kléber Mesquida, Frédéric Roig et de Mme Marie-Hélène Fabre. Nous sommes au cœur de la problématique et du défi à relever. M. Jean-Marc Touzard, a très bien exposé à la fois le diagnostic, les solutions et les scénarios. Il ne faut pas se limiter à ce que pourraient croire certains, à Paris ou ailleurs, c’est-à-dire à l’idée que les viticulteurs voudraient défendre leur pré carré. Nous sommes face à un enjeu d’aménagement du territoire, d’attractivité du territoire, d’emploi, ainsi que de prévention des incendies et des inondations. S’il y a un scénario que je ne défends pas, c’est celui de la disparition, à terme, du vignoble pour migrer beaucoup plus au Nord, car il existe un certain nombre de réponses que vous avez indiquées et sur lesquelles il faut se concentrer. Je me réjouis que des mesures opérationnelles soient bientôt mises en place pour accompagner nos viticulteurs vers cette mutation qu’ils sauront conduire – ils ont relevé d’autres défis.

Comment réagissent nos concurrents italiens et espagnols face à ce défi ? Je pense qu’ils se posent les mêmes questions. Lorsque je suis allé, il y a quelques années, en Andalousie, je me suis rendu compte que cette région subissait de plein fouet le dérèglement climatique.

Estimez-vous que la formation initiale et continue prend en compte l’évolution des pratiques culturales liées au changement climatique, ou sommes-nous encore sur de vieux modèles, ce qui voudrait dire que les futurs viticulteurs que l’on forme ne sont pas encore sensibilisés à cette question ?

Enfin, en matière d’irrigation il existe des solutions qui ont d’ailleurs été évoquées par M. Kléber Mesquida. Grâce à la Compagnie nationale du Rhône (CNR), nous avons un extraordinaire potentiel d’irrigation qu’il faut utiliser. Une autre solution est celle des retenues collinaires, encore peu utilisées. En matière d’irrigation, les techniques évoluent. Peut-on rassurer ceux qui nous disent qu’il ne faut pas utiliser l’eau, en leur montrant que l’on peut pratiquer une irrigation raisonnée au goutte-à-goutte, et que l’on peut tout à fait concilier les usages économiques ou viticoles avec celui du consommateur lambda ?

M. Jean-Marc Touzard. Je suis impressionné par la qualité des questions et par l’ampleur du champ qu’elles couvrent, si bien qu’il me faudrait bien deux ou trois heures pour répondre à toutes…

Je commencerai par le changement climatique. Il faut bien avoir en tête que, d’ici à 2050, quel que soit le scénario retenu, le réchauffement de l’atmosphère ne dépassera pas deux degrés centigrades, et que, dans ce contexte, à peu près tous les vignobles sont à même de s’y adapter en mobilisant et en combinant les solutions que j’ai évoquées dans mon intervention liminaire. Le problème se posera ensuite : soit nous parviendrons à stabiliser la situation, et il sera dès lors possible de reconstituer, sur des bases différentes, des vins, des marchés, des écosystèmes ; soit, si c’est la trajectoire exponentielle d’augmentation des températures qui s’avère effective, à savoir quatre ou cinq degrés Celsius supplémentaires, le problème posé sera celui de l’instabilité. Dans ce dernier cas, il s’agira, pour la viticulture, de changer de monde : on ne pourra plus raisonner à l’échelle de quarante, cinquante ou soixante ans mais, comme c’est le cas pour l’arboriculture, à l’échelle de quinze ou vingt ans. Les questions de risques, d’assurances seront plus pressantes, celles liées à la ressource en eau deviendront cruciales – avec la possibilité de conflits en plaine.

Ainsi, pour éviter tout effet de panique, nous avons fixé le terme de notre prospective à 2050, c’est-à-dire juste avant la bifurcation, en étant conscients des catastrophes qui pourraient survenir à cause de l’instabilité à laquelle je viens de faire allusion. Il faut en effet avoir également présent à l’esprit que la viticulture ne nécessite pas seulement des investissements techniques, mais aussi des investissements humains et culturels – elle implique en effet des secteurs comme la gastronomie –, qui relèvent du long terme. Et la France est le premier producteur de vin au monde, en valeur, et le premier exportateur en valeur. Or si l’on aime le vin, il faut tout faire pour s’inscrire dans un scénario vertueux tel celui défini par la COP 21, qui permettra de dégager des marges de manœuvre pour tous les vignobles.

Par ailleurs, et c’est une question qui n’a pas été évoquée, la viticulture peut jouer de manière positive dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, qu’il s’agisse de la bonne gestion des sols, des couverts, de l’écosystème, des formes de viticulture associées à l’agroforesterie… Il faut savoir que les sols viticoles, d’une manière générale, sont assez pauvres en matières organiques et ont donc un potentiel de capture de carbone non négligeable. Les interprofessions viticoles, en Champagne, dans le Bordelais, à Cognac et en Bourgogne, se sont lancées dans l’analyse du cycle de vie (ACV) pour connaître l’impact carbone sur les exploitations. Or, il s’avère que ce n’est pas la viticulture qui émet le plus de gaz carbonique, mais la logistique viticole. Aussi, pour réduire l’émission des gaz à effet de serre, convient-il d’améliorer la logistique – poids des bouteilles, redéfinition du vin en vrac… Cet aspect est devenu très important dans mon département à l’INRA. Quand on parle d’agro-écologie, on a plutôt une approche à travers laquelle on considère l’agronomie et la production agricole au regard du fonctionnement des écosystèmes.

Voilà qui renvoie à la question des maladies. Nos collègues qui y travaillent restent très prudents. On pense qu’il y aura des maladies, ou des insectes invasifs, ou bien des mutations – le changement climatique, j’y insiste, affecte les écosystèmes et permettra à des maladies, à des insectes, à des champignons nouveaux de se propager. Chaque espèce réagira de manière différente et certaines pourront muter ; certaines adaptations complexes vont modifier les écosystèmes, modifier le bio-agresseur, l’agresseur du bio-agresseur... Nous avons lancé un nouveau programme sur ces phénomènes qui restent des plus difficiles à étudier.

Dans cet ordre d’idée, je suis attentivement le projet des cépages résistants avec mes collègues de l’INRA. Les débats que nous menons sur le sujet sont constructifs. Appliquant le principe de précaution, l’Institut a décidé dans un premier temps, c’était il y a cinq ou six ans, de ne pas diffuser les cépages issus d’une première génération de recherche, résistant au mildiou et à l’oïdium, du fait d’une incertitude quant au risque de contournement. Il fallait en effet préserver un gène que nous considérions comme extraordinaire et qui, en complément avec d’autres gènes résistants, devait nous permettre d’obtenir des gènes « super résistants » – une expérience est en cours en la matière, à Colmar notamment. Nous pensons être désormais en mesure de maîtriser ce risque et la première génération de ces gènes est déjà en cours d’inscription, les suivantes devant voir le jour vers 2020-2023.

M. André Chassaigne. Nous avons été précédés par d’autres pays !

M. Jean-Marc Touzard. En effet, mais ces pays ont des cépages moins résistants. Nous pensons désormais, je l’ai dit, que nous pouvons courir le risque de diffuser les cépages résistants. Ce processus implique les viticulteurs, les politiques… Je le vois en tout cas de manière très positive. Nous en sommes à la recherche « post-normale » : à l’INRA, nous nous posons la question de savoir comment faire de la recherche dans un contexte de controverses et d’incertitudes et face à une question urgente – réduire les pesticides – qui est l’autre grand enjeu. La meilleure façon d’agir étant d’associer les parties prenantes, l’INRA s’est engagé dans cette voie en développant en particulier une section de science participative : pour avancer, il faut partager toutes les questions et de les soumettre au débat.

J’en viens à l’irrigation. La vigne est très bien adaptée à la sécheresse mais, pour produire du bon raisin et du bon vin, elle a besoin d’un minimum d’eau et, plus précisément, d’un stress hydrique : elle doit, à un moment donné, « souffrir » un peu. On dispose désormais de modèles permettant de bien suivre les trajectoires des besoins optimaux de la plante en eau, et ce en fonction des objectifs définis. On est donc capable de gérer l’eau dans la parcelle, l’irrigation étant, par exemple en plaine languedocienne, une option non pas incontournable mais importante. Mais, j’y insiste, il ne s’agit que d’une option parmi d’autres, comme la gestion du sol, ou la gestion du feuillage… Et nous travaillons, à l’INRA, avec les professionnels, avec les partenaires économiques, sur l’irrigation au goutte-à-goutte, mais aussi sur la ressource elle-même. Ainsi, avec Veolia et dans le cadre du projet de recherche collaboratif « IrriAlt’eau », nous travaillons sur le retraitement de l’eau provenant des stations d’épuration pour l’irrigation – et, en zone littorale, il s’agit d’eau destinée à se jeter en mer, avec un impact sur les rivières qui est donc nul. Car, je le répète, la vigne a besoin d’un peu d’eau – 20, 30, 50 ou 60 millimètres, soit quatre ou cinq fois moins que le maïs –, mais qu’on doit parfois obtenir par irrigation. Reste que la quantité est si faible que le vendeur d’eau ne sera guère intéressé, d’où l’importance de l’accompagnement public, de l’accompagnement professionnel et des solutions comme les retenues collinaires. Bref, nous sommes préoccupés par la question de la ressource.

Il est par ailleurs important de maintenir des vignes, je pense à la région de Montpellier, qui servent de coupe-feu et permettent par ailleurs de développer des fermes nourricières. Or l’eau est bien l’élément clé de ces deux entités complémentaires – vignes et fermes nourricières. Il s’agit donc de promouvoir une gestion concertée de l’eau.

On a souligné l’importance fondamentale de la recherche. En effet, d’un côté, nous avons besoin de connaissances pratiques : un grand nombre de viticulteurs expérimentent d’ores et déjà plusieurs options dans différentes zones et sous différents climats, des options qu’il s’agira ensuite de combiner. Et nous avons besoin également de connaissances scientifiques parce que les changements sont trop rapides – il faut en effet pouvoir tester rapidement de nouveaux cépages, notamment grâce à des outils de simulation qui permettent de mieux traiter l’information climatique. La nouvelle agro-écologie intègre la recherche y compris en matière de nouvelles technologies. Les travaux que nous avons menés montrent qu’un des niveaux importants de construction de ces réseaux de connaissance est le niveau régional, à savoir celui des interprofessions, des bassins. La Champagne est à ce titre le meilleur exemple : une interprofession gère un ensemble de vignobles avec des stratégies d’adaptation au changement climatique s’appuyant sur une recherche-développement très poussée. Ce sont les professionnels qui sont demandeurs de recherche. Le niveau régional est donc fondamental, j’y insiste, car c’est à cet échelon que vont s’organiser les coopérations futures en matière de recherche-développement, que se mesurent les phénomènes climatiques et que se distinguent les orientations viticoles en termes de produits, de marchés. Ce schéma n’est pas valable seulement pour la France : on ne parlera pas d’interprofession dans les autres pays, mais de consortium, d’association de producteurs, mais, partout dans le monde, on a conscience de l’importance des partenariats noués entre les viticulteurs et les universités, les centres de recherche, les centres techniques.

Mme Anne Haller. Pour répondre à une question sous-jacente à plusieurs interventions, je dirai que le changement climatique a certes un impact, mais qu’il faut également tenir compte de toutes les questions liées au marché. La production française tend à baisser, si bien que nous ne sommes plus, le premier producteur mondial ; en outre, nos installations sont faibles et ne permettent pas le renouvellement nécessaire ; enfin, nous perdons des parts de marché à l’international. Bref, nous ne sommes pas très bien placés dans le cadre de la compétition internationale.

Nous discutons beaucoup avec les professionnels pour savoir comment nous adapter et grâce à quels outils, tout en prenant en considération le changement climatique. Optimiste par nature, je me dis que cette prise de conscience va obliger les professionnels à changer leur raisonnement, à réfléchir à leur mode de fonctionnement. Je suis confiante en leur capacité à se maintenir, c’est-à-dire à s’adapter, grâce à l’innovation, à s’affranchir d’un certain nombre de carcans. Je suis optimiste quant au fait que les professionnels saisissent la chance qui leur est offerte et que vous, en tant que politiques, et nous, comme institution, parviendrons à les accompagner. Enfin, je suis optimiste car nous avons des leaders, aux niveaux national et régional, qui, j’y insiste, sont conscients du problème.

Reste que les autres pays ne sont pas moins capables que le nôtre de s’adapter au changement climatique. Eux aussi disposent d’atouts forts et s’en servent. Ni les Italiens, ni les Espagnols – ni non plus les pays du Nouveau Monde – n’ont peur de grand-chose. Mais nous avons nous aussi des atouts : notre notoriété, la qualité de nos produits, le lien entre la production et le terroir – on ne saurait délocaliser le Bordeaux en dehors du Bordelais ou le Champagne en dehors de la Champagne ! C’est un atout extraordinaire aussi bien du point de vue agricole que du point de vue économique. Même si l’on devait modifier les terroirs à la marge, cet atout demeurerait. Reste qu’il ne faut pas se reposer sur ce capital mais le revaloriser pour le faire fructifier.

En attendant, je n’ai pas de boule de cristal et ne peux répondre à la question de savoir si des vignes vont être développées ou non ailleurs qu’elles ne sont. C’est possible, pour peu que des opérateurs se mobilisent. En effet, depuis cette année, la production de VSIG est autorisée dans toutes les zones hors bassins, c’est-à-dire hors zones d’IGP et d’AOC. Pourquoi n’a-t-on pas davantage profité de cette possibilité ? Parce qu’il faut définir un projet économique, engager des investissements lourds en plants et en matériels. En outre, beaucoup ne savent pas qu’ils peuvent aujourd’hui planter des vignes. Enfin, de nombreux producteurs arrachent d’anciennes vignes et replantent grâce aux aides à la restructuration dont ils peuvent bénéficier ; or, les aides communautaires ne peuvent pas servir à la plantation de vignes nouvelles. Aussi un producteur a-t-il toujours intérêt, s’il le peut, à louer chez un voisin une parcelle qu’il va arracher et replanter, plutôt que de procéder à de nouvelles plantations. En effet, neuf fois sur dix, il pourra bénéficier d’une aide assez élevée et qui va le mobiliser au-delà du court terme.

On pourrait imaginer qu’on délivre des autorisations de plantations nouvelles à hauteur de 8 000 hectares par an – 1 % du potentiel – et que le vignoble français régresse parce qu’il suffit qu’on arrache plus que cela. Il s’agit par conséquent de considérer avant tout notre solde arrachage-plantation, et ensuite seulement les plantations nouvelles ; c’est le bilan de l’ensemble qui aura du sens, non celui des seules plantations nouvelles. De nombreux producteurs utilisent toujours ce qu’ils avaient en réserve sans avoir encore adopté complètement le nouveau système.

En ce qui concerne les autorisations de plantation, faut-il maintenir le critère du « nouvel entrant » ? Ce critère est clairement défini, mais une entreprise créée du jour au lendemain et qui n’a jamais planté de vignes y est éligible, ce qui peut conduire à des situations un peu perverses, certaines entreprises étant susceptibles de n’entamer cette démarche que pour profiter du système. Cela étant, celui qui crée une telle entreprise ne doit pas avoir exercé d’activité viticole, en tant qu’exploitant, au cours des trois dernières années pour être éligible au dispositif. D’ailleurs, sur quelque 500 candidatures de viticulteurs au statut de nouvel entrant, seules 168 ont été retenues. Il convient de noter une forte exigence de la part de la profession pour établir une limite au nombre de demandes ; nous attendons la réponse du Gouvernement, qui appuie ce souhait, et je ne désespère pas de l’obtenir avant la fin de l’année afin que nous puissions nous organiser pour l’année 2017.

J’en viens à l’assurance récolte. Il est vrai qu’elle ne fonctionne pas bien : les professionnels en sont conscients et ont fait des propositions au Gouvernement. Nous en avons parlé hier encore au cours de l’assemblée générale de la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à appellations d’origine contrôlées (CNAOC) : il conviendrait d’engager des discussions dans le dessein de faire évoluer le dispositif. Faut-il la rendre obligatoire ? C’est une vraie question. M. Jérôme Despey, président du conseil spécialisé dans les vins au sein de FranceAgriMer, pense fermement qu’il le faut. Je ne puis donc vous affirmer autre chose. Reste que la réglementation communautaire rendrait difficile l’articulation de ce dispositif avec les aides à la restructuration des vignobles.

Je terminerai en revenant sur la gouvernance et sur FranceAgriMer. Mon travail de déléguée est d’animer un conseil spécialisé avec son président. Il s’agit de chercher en permanence à convaincre les professionnels, de susciter leur motivation, bref, de faire en sorte que les décisions ne s’imposent pas à eux mais qu’ils y soient partie prenante. Ce procédé prend du temps mais il est à terme plus efficace. Nous disposons d’un conseil spécialisé constitué de vingt représentants nationaux et de vingt représentants des bassins, soit deux par bassin, afin d’assurer une vraie articulation avec les politiques régionales. Rien n’est parfait, certes, et ce système pourrait être sensiblement amélioré, mais pour l’heure il fonctionne bien et nous nous employons à créer un consensus, à emporter l’adhésion des professionnels même quand les sujets sont très difficiles.

M. Jérôme Gautier. Je commencerai par l’évolution de l’encépagement des AOC. Il existe une procédure pour introduire de nouveaux cépages, votée par le comité national de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) et diffusée aux organismes de défense et de gestion (ODG). Ainsi pour le madiran et plus encore pour le Saint-Mont, vignoble où l’on travaille sur l’introduction de cépages comme le tardif, le morenoa ou le manseng noir. La procédure en question doit, bien sûr, être précédée d’une demande officielle – ce que j’ai rappelé aux gens de Plaimont il y a deux mois – et implique une phase d’expérimentation ; les AOC ayant été reconnues sur la base de caractéristiques particulières des produits, il doit en effet y avoir, tout de même, un air de famille entre les nouveaux cépages et la typicité de l’appellation telle qu’elle a été définie au moment de la reconnaissance de l’AOC. Quand nous évoquons, l’adaptation au changement climatique, nous sommes bien conscients qu’il faudra sûrement avoir des cépages aux cycles végétatifs plus longs, permettant de reporter la date des vendanges, car à vendanger au 20 juillet on risque un gros coup de chaud, même en travaillant la nuit.

La question des cépages résistants préoccupe tous les vignobles, toutes les structures professionnelles. Nous devons en particulier analyser tout ce qui concerne les traitements – utilisation des pesticides et autres. L’INAO a signé un accord avec le ministère de l’agriculture pour favoriser l’introduction de mesures agro-écologiques dans tous les cahiers des charges. Hier, j’ai participé au comité national des appellations d’origine protégées (AOP), qui concerne surtout les fromages, et nous y avons proposé 65 mesures agro-écologiques qui pourraient être intégrées sur demande des ODG – car, encore une fois, l’initiative doit venir de la base et non de l’INAO.

Notre but est de proposer aux ODG un catalogue de mesures concernant, par exemple, dans le domaine viticole, l’enherbement, les tournières, l’utilisation des pulvérisateurs… Il s’agit de suggérer peu à peu d’utiliser des matériels plus efficaces, plus précis, ne serait-ce que pour éviter le gaspillage et la diffusion par dérive aérienne de tous les produits. Ces changements seraient intégrés dans leurs cahiers des charges et donc seraient par la suite obligatoires. Il s’agit notamment de limiter les discussions avec les riverains qui ne comptent pas que les écoles – si l’on prend l’exemple des 125 000 hectares de la métropole de Bordeaux, d’où je viens, forte d’un million d’habitants, tout est archi-imbriqué.

Toutes les campagnes de traitement contre le mildiou, l’oïdium, les tordeuses de la grappe vont augmenter les difficultés avec les autres utilisateurs du territoire. En somme, l’INAO a la très ferme volonté d’introduire des mesures agro-écologiques – autrement appelées « environnementales » – dans les cahiers des charges. Je rappelle que, pendant longtemps, une telle démarche n’a pas été favorisée par les institutions : nous avions tous très peur que l’Union européenne refuse des mesures qui n’influencent pas directement la qualité des produits.

Nous sommes confrontés à un autre problème au sujet des cépages résistants : aux termes de la réglementation européenne en vigueur, on ne peut pas avoir de cépages qui ne soient pas uniquement des vitis vinifera. Cette réglementation, qu’il convient de faire évoluer, a été mise en place dans les années 1970 sous l’influence de la France. Or on doit pouvoir introduire ces cépages dans la réglementation de l’appellation, encore une fois sur demande des ODG, et pour peu que les résultats des expérimentations soient conformes avec la typicité des produits.

Ces questions d’aménagement du territoire ne concernent pas que la vigne AOC. Et si certaines zones sont abandonnées et d’autres nouvellement conquises parce que plus facilement mécanisables, plus plates, il convient d’y réfléchir à une échelle très générale. La question de l’irrigation est certes importante, et je rappelle qu’elle n’est pas interdite en zone AOC. Cette possibilité a été donnée aux ODG sous réserve que l’irrigation ne soit pas systématique, l’irrigation au goutte-à-goutte se situant tout de même un peu à la limite. Quand autoriser l’irrigation ? Au moment de l’implantation du vignoble ? Dès la première année ? Certains experts considèrent qu’il convient d’attendre de cinq à sept ans, le temps que le système racinaire s’implante. En effet, si l’on donne de l’eau à la vigne immédiatement, elle restera à l’endroit où on l’irrigue. C’est un peu plus compliqué avec le concept d’AOC qu’avec celui d’IGP. Ensuite, les installations coûtent cher et sont plus ou moins nécessaires selon les régions.

Les cahiers des charges ne sont pas figés. Il y en a depuis quatre-vingts ans et ils évoluent à la demande des producteurs. L’instance décisionnelle de l’INAO, le comité national – composé en très grande majorité de producteurs et de négociants –, examine cette demande. Une commission d’enquête remet un rapport, après quoi la demande est entérinée, amendée ou refusée.

Je terminerai en indiquant que les choses bougent au sein de l’INAO : il s’agit d’une belle endormie, mais qui a quelques soubresauts nocturnes de temps en temps... (Sourires.)

Mme la présidente Frédérique Massat. Madame, Messieurs, nous vous remercions pour vos passionnantes interventions, qui nous ont permis d’enrichir notre réflexion. Vous avez pu constater que les députés sont très investis sur ces sujets et que la commission dans son ensemble suit vos travaux avec attention.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 16 novembre 2016 à 9 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bies, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Alain Calmette, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Jean-Michel Couve, Mme Karine Daniel, M. Yves Daniel, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Sophie Errante, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Laurent Furst, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Jean Grellier, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, M. Thierry Lazaro, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Marie Tétart, Mme Catherine Troallic, M. Fabrice Verdier

Excusés. - M. Denis Baupin, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Laure de La Raudière, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Armand Martin, Mme Josette Pons, M. Bernard Reynès

Assistait également à la réunion. - Mme Sophie Rohfritsch