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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mission d’évaluation et de contrôle

Mercredi 23 mars 2016

Séance de 14 heures

Compte rendu n° 25

Présidence de M. Michel Zumkeller

La formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique

– Audition de Mme Carine Soulay, directrice adjointe au directeur général de l’administration et de la fonction publique, Mme Stéphanie Seydoux, responsable du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes, M. Dominique Prince, délégué à la diversité et à l’égalité professionnelle au ministère des finances et des comptes publics, et Mme Sandrine Le Gall, adjointe au délégué à l’encadrement supérieur, sur la formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique.

M. Michel Zumkeller, rapporteur. Je souhaite la bienvenue aux quatre hauts fonctionnaires que nous allons entendre dans le cadre des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC).

Mme Carine Soulay, directrice adjointe au directeur général de l’administration et de la fonction publique. Je voudrais, si vous me le permettez, dire un mot préalable. Au cours des cinq dernières années, j’ai été experte nationale détachée à la Commission européenne à Bruxelles. Et je souhaite exprimer, en ces heures tragiques, mon soutien à tous les fonctionnaires en poste dans cette ville ainsi qu’à ceux des pays limitrophes qui travaillent avec eux.

Il faut conserver à l’esprit que la promotion de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes se situe au cœur des valeurs de la fonction publique – ses trois versants confondus – et de ses missions auprès du public. Le Gouvernement est très attaché à l’exemplarité de tous les employeurs publics dans ce domaine. Au demeurant, dans mon propos j’évoquerai principalement la fonction publique de l’État, eu égard aux compétences particulières de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP).

Le Gouvernement est très attentif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la haute fonction publique, car les enjeux sont considérables. En effet, au sein de la fonction publique d’État, en 2014, on comptait 54 % de femmes – 61 % dans la catégorie A, seulement 38 % dans la catégorie A +, et 28 % dans l’encadrement supérieur et de direction : sous-directeurs, chefs de service, directeurs d’administration centrale et experts de haut niveau.

Ces chiffres sont stables depuis plusieurs années. C’est la raison pour laquelle, à la suite de la révision constitutionnelle de 2008, le législateur et les partenaires sociaux ont adopté un certain nombre de textes visant à ancrer dans les faits la promotion de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment dans la haute fonction publique. Ces textes sont, notamment, la loi du 12 mars 2012 dite « loi Sauvadet », le protocole d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique adopté le 8 mars 2013 à l’unanimité des organisations syndicales et des employeurs publics et la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, qui a renforcé les dispositions de la loi Sauvadet.

En un laps de temps relativement court, ces textes ont d’ores et déjà produit des effets, et les comportements évoluent. En ce qui concerne les nominations dans l’encadrement supérieur, la marche à gravir avant le 1er janvier 2017 est de 40 % des primo-nominations dans les emplois de cadres supérieurs et de cadres dirigeants. Cet objectif ambitieux, qui poursuit une action relancée en 2012, a été fixé par la loi du 4 août 2014.

Mais, pour apprécier les éléments positifs de ce bilan, il faut connaître la situation de départ, ce qui exige une connaissance statistique plus fine que par le passé. La loi Sauvadet prévoit un rapport annuel obligatoire portant sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, qui concerne les trois fonctions publiques et doit comporter des statistiques de répartition des postes en fonction des sexes des intéressés. Ce document sera présenté mardi prochain par la ministre de la fonction publique au Conseil commun de la fonction publique (CCFP), aux employeurs publics ainsi qu’aux organisations syndicales ; il sera ensuite transmis au Parlement.

Cette connaissance de la situation procède aussi du bilan social que, depuis 2014, les ministères sont tenus d’établir chaque année et qui comporte des rapports de situation comparée. Avec peu de recul, on observe que cette démarche, hésitante en 2014, s’est généralisée en 2015.

Par ailleurs, des travaux ministériels et interministériels de recherche ont été lancés, qui ont notamment trait aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, sujet toujours urticant. Le ministère de la culture, avec l’appui de la DGAFP, a conduit une étude sur ce point et un travail de dimension interministérielle a par ailleurs été mené entre cette direction générale et le Défenseur des droits, au cours de l’année passée.

Les outils et les dispositifs figurant dans la loi Sauvadet et le protocole d’accord du 8 mars 2013 résultent de la préoccupation d’accroître la compétence des ministères – particulièrement celui de la fonction publique – dans le domaine de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. À cette fin a été bâtie une logique de réseaux et de pratiques d’échange d’expérience entre les ministères au sein de laquelle les rôles de la DGAFP – à l’échelon interministériel – et du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes (SDFE) ont été déterminants. Ces organismes ont animé les conférences de l’égalité et facilité les échanges entre pairs. Par ailleurs, des correspondants des ministères ont été désignés pour répondre du sujet.

Certains ministères, qui sont a priori les plus éloignés de l’égalité professionnelle, car leur population est plus largement masculine – c’est singulièrement le cas des ministères de l’intérieur, de la défense, ou des corps techniques du ministère de l’écologie – ont mené, pour pleinement mettre en œuvre les quatre axes du protocole d’accord du 8 mars 2013 et d’atteindre les objectifs définis, une action très volontariste en organisant des sessions de formation et de communication et en créant des cellules d’écoute afin de diversifier leurs viviers.

Pour leur part, les ministères les plus féminisés ne sont pas restés l’arme au pied : bien au contraire, ils ont utilisé la priorité politique donnée à l’égalité entre les femmes et les hommes comme levier de modernisation de l’action publique et l’ont mise à profit pour mieux connaître leurs agents et s’orienter vers une gestion humaine plus qualitative. Ces dernières préoccupations rejoignent les thèmes que vous avez abordés avec le directeur général de l’administration et de la fonction publique, M. Thierry Le Goff, et la déléguée aux cadres dirigeants, Mme Florence Méaux.

M. Jean Launay, rapporteur. Si j’entends bien, à l’occasion de la relance des actions conduites en faveur de la diversité, vous raisonnez en termes de viviers et agissez aussi dans les domaines des origines, du champ interministériel, etc. ?

Mme Carine Soulay. Nous souhaitons disposer, particulièrement pour l’encadrement supérieur et dirigeant, de viviers de recrutement correspondant davantage à la sociologie de la fonction publique en général. Pour ce faire, il convient d’établir un tableau précis de la situation des femmes dans les postes d’encadrement au sein des ministères où les femmes sont majoritaires, de connaître leurs parcours professionnels et de comprendre ce qui les empêche d’accéder aux échelons de cadres supérieurs et dirigeants. Cela implique une connaissance plus fine des publics concernés et des éventuels obstacles se dressant devant eux – qu’il s’agisse d’hommes ou de femmes – pour l’accession à ces postes. Dès lors peuvent être menées des actions de mentorat ou de « coaching » individualisé susceptible de leur permettre de franchir le plafond de verre si souvent évoqué.

La promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes fonctionne mieux si l’on prend en compte les compétences attendues pour l’accès à certaines fonctions, ce qui est le cas, par exemple, du vivier des cadres supérieurs et dirigeants de l’Etat : des évaluations de compétences sont pratiquées afin de garantir un haut niveau chez les candidats. À cet égard, l’appréciation des compétences pour occuper ces postes prime sur la préoccupation de l’égalité entre les femmes et les hommes ; en d’autres termes, une femme ne sera pas promue en qualité de femme, mais en fonction de ses aptitudes.

L’objectif du processus de nominations équilibrées dans les emplois de direction était, en 2013 et 2014, de 20 % de primo-nominations de femmes dans 6 000 emplois des trois fonctions publiques, dont 3 000 emplois de la fonction publique d’État. Ce taux a été fixé à 30 % pour la période 2015-2016, et à 40 % à partir du 1er janvier 2017. Cet objectif est à respecter au sein de chaque organisme, l’administration qui n’observerait pas ses quotas étant redevable d’une pénalité de 30 000 euros par emploi manquant, qui sera triplée à partir du 1er janvier de l’année prochaine.

La cible de 30 % était déjà atteinte en 2013-2014 et, au mois de janvier 2016, les femmes représentaient 35 % des primo-nominations de cadres dirigeants, et 40 % dans les emplois de sous-directeurs et chefs de service. Mais la marche qui reste à gravir est élevée, et il n’est pas certain, à ce stade, que les objectifs puissent être atteints.

Deux types de mesures sont envisagés pour l’année 2016.

La première porte sur l’intégration progressive des ministères dans le processus de labellisation « diversité » et « égalité professionnelle ». Ces labels datent de 2004 pour l’égalité et de 2008 pour la diversité. Il s’agit de disposer d’une évaluation des politiques de ressources humaines appliquées au sein des organismes publics comme privés qui souhaitent se voir décerner le label. Cette évaluation est réalisée sur la base d’une grille d’analyse très précise par l’Association française de normalisation (AFNOR), qui signale aux administrations leurs points faibles. Celles-ci adoptent alors un plan d’action afin de mettre en conformité leurs pratiques en matière de ressources humaines – recrutement, accompagnement personnalisé, formation, etc. Un cahier des charges a ainsi été établi par analogie avec les labellisations « égalité professionnelle » et « diversité ». La DGAFP appuie les ministères dans cette démarche et met à leur disposition, depuis le mois de mars, un outil d’autoévaluation de leur gestion des ressources humaines au regard des bonnes pratiques attendues dans les domaines de l’égalité et de la diversité.

La seconde mesure procède de la nécessité d’agir sur les viviers afin de remplir l’objectif des 40 % de primo-nominations de femmes dans les emplois de direction et de cadres dirigeants. Cela implique une politique volontariste, car un vivier ne peut pas être créé en un an, il s’agit d’une action de moyen terme. La mission cadres dirigeants (MCD), avec laquelle nous travaillons, a entrepris ce travail en conduisant une action d’objectivation des compétences requises pour ces postes : la question n’est pas de raisonner en termes de féminin ou de masculin, mais de faire l’inventaire des compétences professionnelles recherchées, pour, au sein du vivier, attribuer les fonctions, notamment les emplois techniques, lorsqu’il s’agit de femmes.

Avec l’appui du SDFE et de la DGAFP, la MCD va conduire une action d’accompagnement dans la carrière et d’établissement de plans managériaux de formation à l’intention des cadres supérieurs, et notamment des femmes cadres supérieurs. Des mentorats et des « coachings » personnalisés seront proposés afin que les femmes, qui sont parfois réticentes à prendre ces fonctions – soit parce qu’elles en surestiment la charge, soit parce qu’elles ne s’estiment pas compétentes –, puissent relativiser la difficulté du métier de cadre dirigeant et prendre confiance pour s’inscrire dans une démarche d’évaluation des compétences, afin d’entrer dans un vivier de cadres supérieurs ou dirigeants.

Mme Stéphanie Seydoux, responsable du service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes. J’exerce mes fonctions au sein de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), placée sous l’autorité de la ministre des familles, de l’enfance et des droits des femmes et appartenant à l’administration des ministères sociaux.

Je me propose d’intervenir sur quatre points qui sont les conférences de l’égalité, la formation au sein des fonctions publiques et territoriales, la situation dans le secteur privé ainsi qu’un bref rappel des dispositions de la loi du 4 août 2014 dans le contexte des administrations territoriales, désormais tenues d’établir un rapport de situation comparée.

Depuis 2012, le ministère chargé des droits des femmes anime un cycle de consultations avec l’ensemble des départements ministériels ; depuis trois ans, ces rencontres sont co-présidées avec la DGAFP au titre de ses responsabilités de gestion des ressources humaines. Il s’agit de répondre collectivement à la prescription de l’État exemplaire dans l’égalité entre les femmes et les hommes, que ce soit dans sa gestion ou de son action.

Les ministères se présentent devant l’administration et le cabinet du ministère aux droits des femmes, et en présence de la DGAFP, pour ce premier examen. La deuxième partie de la réunion est consacrée aux politiques publiques, exercice qui a pour objet d’échanger à partir d’un document engageant chaque ministère et qui constitue la feuille de route de l’égalité, elle-même portant sur les versants interne et externe. Un bilan des actions conduites au cours de l’année écoulée est établi et de nouvelles perspectives sont dégagées.

La DGAFP a constaté, pour l’année 2015, une progression qualitative dans l’ensemble des ministères. Un certain nombre de points sont désormais acquis en fonctionnement sur la façon d’aborder la question de l’égalité. Comme dans d’autres pays, il existe en France des quotas de nominations ; si cette orientation a fait débat, chacun s’accorde aujourd’hui à considérer qu’il serait préférable de ne pas devoir recourir à cette pratique, mais qu’un objectif chiffré de résultat entraîne une prise de conscience et, surtout, une action.

Ces réunions constituent aussi l’occasion de passer en revue les difficultés, mais aussi les bonnes pratiques dans le domaine de la conduite des carrières, les bilans sociaux, de la démarche vers le label égalité diversité, etc. C’est l’ensemble des mesures prévues par le protocole d’accord du 8 mars 2013 qui doit être mis en œuvre, y compris sa partie relative à la prévention du harcèlement et des violences sur le lieu de travail qui concerne également le secteur public.

Nous avons constaté qu’aucun ministère ne se trouve en défaut dans les obligations de moyens ; tous respectent les indicateurs de primo-nomination ; ils dispensent des formations et se trouvent à un certain stade d’avancement vers la labellisation. Tous les ministères, au moment de la mise en œuvre de la réforme territoriale dans leurs services déconcentrés ont eu à prêter une attention particulière à la situation des agents, singulièrement des femmes.

Les feuilles de route déterminées au cours des conférences annuelles font l’objet d’une publication sur internet, comme cela a été le cas le 8 mars dernier ; elles dressent le bilan et les perspectives des actions en cours.

Le service des droits des femmes est associé aux actions de formation continue pour lesquelles la DGAFP a établi un document donnant les grandes orientations relatives à la méthode ainsi qu’au contenu ; cet outil est largement utilisé par les ministères. Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), avec lequel nous construisons des modules pilotes portant sur les questions de l’égalité.

De notre point de vue, ces questions ne sont pas solubles dans celles, plus larges, qui ont trait à la diversité et à la discrimination, mais elles peuvent utilement s’articuler avec elles. Aussi, lorsqu’une administration consacre du temps aux problématiques de la diversité et de l’exclusion, veillons-nous à ce que l’égalité entre les femmes et les hommes ne soit pas oubliée. Les femmes et les hommes constituent deux groupes statistiques bien distincts, ce qui permet une approche comparée très efficace pour mesurer les progrès d’un groupe par rapport à un autre. De son côté, l’ENA propose des modules de formation constamment remis à jour. À l’occasion des bilans établis avec les ministères, nous récoltons des informations. Parmi les ministères appliquant bien les bonnes pratiques, peuvent être cités celui de l’équipement qui formera l’ensemble de ses cadres supérieurs – 700 personnes environ – d’ici la fin de l’année, et le ministère de la justice, qui forme les magistrats de façon systématique à tous les niveaux.

Sur l’impulsion de la DGAFP, les jurys sont systématiquement formés. Dans un premier temps, il a été jugé nécessaire qu’ils soient paritaires, mais cela ne suffit toutefois pas à garantir l’équité dans le choix des candidats : une prise de conscience demeure nécessaire pour éviter les disparités alors que la composition des groupes de candidats de départ permet d’assurer une meilleure représentation des femmes.

Par ailleurs les objectifs chiffrés de l’égalité entre les femmes et les hommes, s’appliquent aussi au secteur privé et un palmarès est réalisé par le ministère des droits des femmes. Une progression satisfaisante est constatée avec un pourcentage de femmes de 26 % en 2013, 29 % en 2014 et 33 % en 2015. Au sein des 120 premières entreprises de France, regroupées dans le SBF 120 (Société des bourses françaises), un tiers a déjà atteint le taux de 40 %. En revanche, parmi les entreprises du CAC 40, une seule femme a été PDG et une autre devrait l’être prochainement, ce qui constitue un résultat moins probant.

L’article 61 de la loi du 4 août 2014 fait obligation aux collectivités territoriales de plus de 20 000 habitants de produire, à l’occasion de la présentation de leur budget, un rapport de situation comparée portant sur la gestion des ressources humaines ainsi que les résultats des politiques publiques menées en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Le décret d’application du 24 juin 2015, prévoit l’entrée en vigueur de cette mesure à compter du 1er janvier 2017.

Avec le soutien méthodologique du centre francilien de ressources pour l’égalité femmes-hommes Hubertine-Auclert, la DGAFP, la direction générale des collectivités locales (DGCL) et les associations d’élus, travaillent à la rédaction d’un guide de bonnes pratiques à l’intention des collectivités territoriales. Cet outil devrait permettre à ces collectivités de s’engager, à l’instar de l’État, dans une démarche vers l’exemplarité.

M. Dominique Prince, délégué à la diversité et à l’égalité professionnelle au ministère des finances et des comptes publics. J’occupe la fonction de délégué à la diversité et à l’égalité professionnelle à Bercy depuis cinq ans et je suis le deuxième titulaire de ce poste, créé en 2009. Mon administration s’inscrit dans toutes les priorités des politiques de gestion des ressources humaines et des engagements ministériels dans le cadre des conférences de l’égalité.

Dès 2009, le ministère des finances et des comptes publics s’est résolument engagé dans les politiques en faveur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de lutte contre les discriminations. À cette fin, les outils ont été adoptés rapidement et la mobilisation des énergies et des compétences a été importante puisque, outre la création du poste de délégué, rattaché au secrétariat général des ministères – ce qui lui confère l’ensemble de la gestion des relations humaines des ministères économiques et financiers –, des mesures structurantes ont été adoptées. Un réseau de référents diversité a été implanté dans la totalité des directions du ministère. Il forme un comité de pilotage qui se réunit chaque mois. Par ailleurs, un plan de sensibilisation de la totalité de nos personnels à ces questions a été mis en œuvre par des actions de communication classiques et récurrentes.

Entre 2010 et 2013, nous avons formé 35 000 agents, dont la totalité des cadres de Bercy ainsi que l’ensemble des responsables de la gestion des ressources humaines. Les responsables de la gestion des ressources humaines ont deux jours obligatoires de formation, et l’ensemble des encadrants, quel que soit leur grade, une journée. Ce plan de formation, initialement destiné au « stock », concerne désormais tous les nouveaux entrants inscrits dans les programmes de formation, tant initiale que continue, de toutes nos écoles professionnelles. Nous formons par ailleurs tous nos jurys pour les concours externes, internes ou d’examens professionnels à la question de la lutte contre les discriminations, de la maîtrise des stéréotypes ainsi que de la traçabilité des décisions de ces jurys qui, dans leur quasi-totalité, sont paritaires.

Depuis 2012, nous établissons un rapport de situation comparée, présenté chaque année aux organisations syndicales dans le cadre d’un comité ministériel, et qui fait l’objet d’échanges. Ce document est mis à disposition de la totalité des personnels du ministère. Nous allons continuer à enrichir ce rapport : ainsi, dans le prolongement des travaux relatifs aux écarts de rémunération conduits avec le Défenseur des droits, nous allons conduire cette année au sein des administrations financières une étude consacrée à ce sujet, car il n’est pas douteux que de tels écarts sont susceptibles d’être constatés dans nos services.

Depuis 2010, nous avons mis en place une cellule de prévention des discriminations qui a traité un peu plus de 500 demandes. Nous continuons de nous conformer aux recommandations du Gouvernement et du ministère de la fonction publique en matière de gestion des ressources humaines. Par ailleurs, nous poursuivons notre travail interne ; aussi, en 2011, avons-nous appliqué un plan d’action adopté à l’unanimité des organisations syndicales. Ce plan venant à échéance en 2013, un nouveau plan portant sur la période 2015-2017 est en cours de déploiement.

M. Jean Launay, rapporteur. Pourriez-vous, monsieur Prince, détailler le rôle de l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE) en tant qu’outil de formation ?

Quelle est, d’autre part, la proportion de femmes dans le vivier des hauts potentiels ? Il semble que les ministères financiers soient en retrait dans leurs politiques de sélection.

Enfin, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCEFH) s’est substitué à l’Observatoire de la parité. Quel est son rôle au regard du travail accompli par la DGAFP ?

Mme Stéphanie Seydoux. Récemment installé par le Président de la République, le HCEFH est une instance consultative placée auprès du Premier ministre, compétente pour l’ensemble du champ de l’égalité entre les femmes et les hommes. En ce qui concerne plus particulièrement l’égalité professionnelle dans le secteur privé, il articule son action avec le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP) qui est une instance paritaire. Il rend des avis et peut se saisir de sujets sur lesquels il souhaite alerter les pouvoirs publics – ce qu’il a fait l’an dernier au sujet du harcèlement dans les transports publics. Il a également pour rôle d’évaluer les politiques publiques : à ce titre, il conduit actuellement un travail d’évaluation du quatrième plan interministériel contre les violences, et a rendu tout récemment un rapport d’évaluation de l’application des mesures prises en faveur de la représentation équilibrée au sein des instances de gouvernance.

Nous travaillons en étroite collaboration avec le HCEFH sans pour autant confondre les rôles ; dans le cadre des commissions thématiques, nous sommes associés pour avis technique à ses travaux. À côté de personnes qualifiées et d’élus, le directeur de la DGCS, comme d’autres directeurs de l’administration, siège au sein des instances du Haut Conseil, ainsi que les hauts fonctionnaires à l’égalité – dont M. Prince – qui sont aussi présents puisque l’administration est représentée de droit.

Mme Carine Soulay. Nous travaillons en bonne intelligence avec la mision cadres dirigeants (MCD). Le vivier des hauts potentiels, compte 29 % de femmes, l’objectif étant de 30 % en 2016 ; donc, a priori, même si l’homothétie n’est pas totale, les femmes sont suffisamment représentées pour que la cible puisse être atteinte.

Je ne dispose pas d’une ventilation du vivier par ministère d’origine. Cependant, pour ces cadres dirigeants, nous souhaitons développer une politique de carrières transversale afin d’éviter de devoir promouvoir les intéressés uniquement au sein de leur ministère d’origine ; c’est pourquoi nous n’avons pas besoin de telles statistiques.

M. Charles de Courson. Le quota de 40 % à atteindre en 2017 doit être apprécié, si j’ai bonne mémoire, ministère par ministère. Or les taux de féminisation et de masculinisation sont différents selon les ministères considérés. Quelle est, monsieur Prince, la proportion de femmes parmi les chefs de bureau de votre ministère ?

M. Dominique Prince. Je ne dispose pas du chiffre exact pour cette catégorie, mais j’estime cette proportion supérieure à 30 % pour l’administration centrale. À mes yeux, l’effort doit davantage porter sur les emplois de direction des services déconcentrés, car je pense que l’administration centrale est aujourd’hui assez bien féminisée, même si la parité n’est pas atteinte.

M. Charles de Courson. Certes, mais si 30 % des chefs de bureau sont des femmes, il faut ensuite les faire progresser vers les postes de sous-directeur puis de directeur : avez-vous, au sein de votre ministère, la ressource suffisante pour atteindre la cible de 40 % ? On sait, en effet, que la plupart des ministères gèrent leur personnel en interne. Si, depuis la création de l’ENA en 1946, la direction générale de la fonction publique tâche de mettre en œuvre une politique transversale, la réalité est que la mobilité entre ministères est très difficile ; il ne sera pas simple d’apporter des éléments féminins aux ministères trop « masculinisés ». L’expérience le montre, tous les ministères ont tendance à privilégier les fonctionnaires ayant fait carrière en leur sein.

Mme Stéphanie Seydoux. Je suis heureuse de constater que nos quotas constituent un outil de modernisation de la fonction publique dans la mesure où ils peuvent obliger les administrations à s’ouvrir, ce qui est singulièrement difficile. Si, en comptant seulement sur les ressources internes de Bercy, nous ne sommes pas certains d’atteindre les 30 %, d’autres ministères comptent plus de femmes et nous pouvons y trouver celles qui viendraient à nous manquer.

Le ministère des affaires étrangères, sous l’impulsion très volontariste de M. Fabius, a progressé à pas de géant. Des collègues nous ont cependant indiqué, à l’occasion de la conférence de l’égalité, que des réticences se faisaient jour face à cette évolution, surtout si elle doit conduire à ouvrir l’accès aux fonctions de chef de poste à des personnes provenant d’autres ministères.

Ces deux objectifs que constituent l’égalité entre les femmes et les hommes et l’ouverture ministérielle pourraient se conjuguer ensemble et gagner ainsi en efficacité.

Mme Carine Soulay. Mes collègues de la DGAFP et Florence Méaux vous ont exposé que la feuille de route de la DGAFP comme DRH de l’État, aux côtés des DRH des ministères, prescrit d’étendre la gestion interministérielle des personnels. C’est déjà une réalité pour le vivier des cadres dirigeants, qui est géré par la MCD, mais le vivier des cadres supérieurs, que la DGAFP commence à construire, nécessite une bonne connaissance des sous-directeurs et chefs de service – quel que soit leur ministère – de façon à améliorer la mobilité interministérielle pour les femmes comme pour les hommes. Ce sujet est ancien : aujourd’hui la volonté politique existe, nous nous engageons et nous donnons rendez-vous dans quelques années pour établir le bilan de cette politique.

M. Charles de Courson. Ne pensez-vous pas qu’il conviendrait de moduler ce taux uniforme de 40 % ministère par ministère ?

Mme Carine Soulay. Cela serait aller à l’encontre de l’objectif interministériel : une modulation ministère par ministère, signifierait que nous accepterions que l’objectif corresponde à la sociologie du ministère et renoncerions à une ambition intéressant les femmes comme les hommes.

Mme Sandrine Le Gall, adjointe au délégué à l’encadrement supérieur, sur la formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique. En matière de primo-nominations dans les postes de direction, alors que l’objectif fixé pour 2015 était de 30 %, les ministères économiques et financiers ont atteint près de 36 % ; en 2014, ce taux était proche de 25 % alors que l’objectif était de 20 %. Nous demeurons vigilants afin que cette progression perdure au cours des années à venir.

M. Michel Zumkeller, rapporteur. Merci pour vos propos.

——fpfp——