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No 1203

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 juin 2013

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES(1)

sur
l’avis de la Commission européenne sur les programmes de stabilité et de réforme de la France,

ET PRÉSENTÉ

PAR MM. Christophe CARESCHE et Michel HERBILLON,

Députés

——

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Emeric BREHIER, Jean-Jacques BRIDEY, Mme Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, M. Yves DANIEL, MM. Charles de LA VERPILLIÈRE, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Marc LAFFINEUR, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Michel LIEBGOTT, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY, Mme Paola ZANETTI.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LES RECOMMANDATIONS PAR PAYS, CONCLUSION DU SEMESTRE EUROPÉEN ET FONDEMENT DE LA NOUVELLE PROCÉDURE DE SUIVI DES BUDGETS NATIONAUX INTRODUITE PAR LE « TWO-PACK » 7

A. L’ADOPTION DES RECOMMANDATIONS PAR PAYS, DERNIÈRE ÉTAPE DU SEMESTRE EUROPÉEN 7

1. La définition des grandes orientations de politique économique pour 2013 7

2. La présentation des programmes de stabilité et de réforme 10

B. LA PROCÉDURE DE SURVEILLANCE BUDGÉTAIRE INTRODUITE PAR LE « TWO-PACK » CONFÈRE UNE NOUVELLE DIMENSION AUX RECOMMANDATIONS PAR PAYS 12

II. APRÈS EXAMEN DES PROGRAMMES DE STABILITÉ ET DE RÉFORME FRANÇAIS, LA COMMISSION EUROPÉENNE ASSORTIT SA PROPOSITION DE REPORTER DE DEUX ANS L’OBJECTIF DE RETOUR DU DÉFICIT PUBLIC SOUS LE SEUIL DE 3 % DU PIB DE RECOMMANDATIONS PRÉCISES EN FAVEUR DE LA COMPÉTITIVITÉ ET DE L’EMPLOI 14

A. LA PROPOSITION DE REPORT DE LA PROCÉDURE POUR DÉFICIT EXCESSIF EST JUSTIFIÉE… 15

B. …ET DOIT ÊTRE MISE À PROFIT POUR CONDUIRE DES RÉFORMES STRUCTURELLES 20

1. Consolider la stratégie budgétaire et fiscale française 20

2. Favoriser la croissance, l’emploi et la compétitivité tout en veillant aux conséquences sociales des politiques économiques 23

TRAVAUX DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES 31

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE 33

ANNEXES 39

ANNEXE 1 : RÉSOLUTION NO 95 DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 15 MARS 2013 SUR LES ORIENTATIONS EUROPÉENNES DE POLITIQUE ÉCONOMIQUE 41

ANNEXE 2 : PROPOSITIONS DE RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE RELATIVES AUX PROGRAMMES DE STABILITÉ ET DE RÉFORME DE LA FRANCE 43

ANNEXE 3 : TABLEAU DE BORD UTILISÉ PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE DANS LE CADRE DE LA PROCÉDURE DE DÉSÉQUILIBRES MACROÉCONOMIQUES S’AGISSANT DE LA FRANCE 45

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent rapport d’information et la proposition de résolution européenne qui y est associée ont pour objet de permettre à l’Assemblée nationale de se prononcer sur les propositions de recommandations que la Commission européenne a formulées, le 29 mai 2013, à l’adresse du Conseil, sur les programmes de stabilité et de réforme français. Leur approbation est en effet inscrite à l’ordre du jour du Conseil européen des 27 et 28 juin 2013.

Ces travaux concluent la procédure dite du « semestre européen », qui a pour objet de coordonner les politiques économiques, en particulier leur volet budgétaire, préalablement aux procédures nationales d’adoption des budgets.

De même que la Commission des Affaires européennes avait formulé ses recommandations sur les grandes orientations européennes au début du semestre européen en adoptant, le 26 février 2013, une proposition de résolution européenne2, elle a souhaité se prononcer sur l’avis rendu par la Commission européenne sur les programmes de stabilité et de réforme français. Ainsi, pour la première fois depuis la mise en place du semestre européen – dont c’est la troisième année d’existence – la Commission des Affaires européennes sera intervenue tout au long de la procédure, ce qui permet à l’Assemblée – après l’examen par la Commission des Finances – de prendre position, sur les grandes étapes du semestre européen.

Il est d’autant plus important que l’Assemblée se prononce sur les propositions de recommandations adressées à la France, que celles-ci vont acquérir, à l’automne, une nouvelle portée. C’est en effet à leur lumière que le projet de loi de finances initiale sera dorénavant examiné par la Commission européenne. Le paquet législatif dit « two-pack », qui a pour objet de renforcer la coordination et la surveillance des politiques économiques, notamment leur volet budgétaire, et qui est entré en vigueur le 30 mai 2013, prévoit que l’échelon européen interviendra désormais au cours du second semestre de l’année, traditionnellement consacré au vote du budget. La Commission européenne pourra ainsi émettre un avis sur le projet de loi de finances initiale et en demander la révision en cas de manquement particulièrement grave aux obligations de politique budgétaire prévues dans le pacte de stabilité. Ce sera notamment le cas si une violation importante des recommandations adoptées par le Conseil est constatée.

Les propositions de recommandations formulées cette année par la Commission européenne pour l’ensemble des pays de l’Union, et plus particulièrement ceux de la zone euro, se caractérisent par l’importance accrue accordée à la dimension sociale des politiques économiques et la prise en compte de la nécessité de mener des politiques économiques équitables. Il s’agit ainsi de tenir compte du contexte économique difficile auquel est confrontée la zone euro mais également de la dimension sociale de l’Union économique et monétaire qui a été affirmée lors du Conseil européen de décembre dernier.

S’agissant plus particulièrement de la France, la Commission européenne suggère de repousser de deux ans le délai accordé pour ramener le déficit public sous la valeur référence de 3 % du PIB, et assortit ce report de propositions de réformes structurelles détaillées.

Si vos rapporteurs se retrouvent sur la nécessité de tirer parti du délai ainsi accordé pour mener des réformes structurelles, ils ont des analyses différentes de la situation de la France et de la politique économique qu’il convient d’y mener. Ils sont, par conséquent, en désaccord sur le contenu de la proposition de résolution.

I. LES RECOMMANDATIONS PAR PAYS, CONCLUSION DU SEMESTRE EUROPÉEN ET FONDEMENT DE LA NOUVELLE PROCÉDURE DE SUIVI DES BUDGETS NATIONAUX INTRODUITE PAR LE « TWO-PACK »

À la suite de l’entrée en vigueur, le 30 mai 2013, du « two-pack », c’est-à-dire du paquet législatif qui a pour objet de renforcer la gouvernance économique ainsi que la coordination et la surveillance des politiques économiques, les recommandations par pays, qui sont formulées par le Conseil sur proposition de la Commission européenne, vont acquérir une nouvelle dimension, puisque c’est à leur lumière que le projet de loi de finances initiale sera dorénavant examiné par la Commission européenne à l’automne.

A. L’adoption des recommandations par pays, dernière étape du semestre européen

Les présents rapport et proposition de résolution concluent les travaux relatifs au semestre européen que vos rapporteurs ont lancés, au sein de la Commission des affaires européennes, avec l’examen de la proposition de résolution relative à la fixation des grandes orientations de politique économique (cf. détail en annexe no 1). Votre co-rapporteur Michel Herbillon avait alors eu l’occasion d’indiquer son désaccord avec le texte voté3.

1. La définition des grandes orientations de politique économique pour 2013

La première étape du semestre européen a consisté, au premier trimestre 2013, à définir les grandes orientations de politique économique pour 2013, sur le fondement de l’examen annuel de la croissance pour 20134 mais également du rapport annuel sur le mécanisme d’alerte5, présentés par la Commission européenne le 28 novembre 2012.

► La Commission européenne proposait ainsi, dans son examen annuel de croissance, que les États membres et l’Union européenne concentrent, comme l’an dernier, leurs efforts sur les cinq priorités suivantes : un assainissement budgétaire différencié propice à la croissance ; la promotion de la croissance et de la compétitivité ; la lutte contre le chômage et les conséquences sociales de la crise, le rétablissement de conditions normales d’octroi de crédits à l’économie et, enfin, la modernisation de l’administration publique.

La Commission européenne proposait par ailleurs de mener une analyse approfondie des déséquilibres macroéconomiques et des mesures prises pour les corriger en France et dans treize autres États membres6.

► Le Parlement européen s’est prononcé sur les propositions de la Commission européenne dans ses résolutions du 7 février 2013 sur le semestre européen pour la coordination des politiques économiques, l’une consacrée à l’examen annuel de la croissance 2013, l’autre à l’emploi et aux aspects sociaux.

La présentation du rapport de la députée européenne Elisa Ferreira sur l’examen annuel de croissance pour 2013 a provoqué de vifs débats au sein de la commission des affaires économiques et monétaires, puis en séance plénière. La résolution finalement adoptée a été l’objet de nombreux amendements, conduisant à faire prévaloir une position dure sur le rythme des assainissements budgétaires.

En revanche, la résolution relative à l’emploi et au volet social a fait l’objet d’un large consensus. Le Parlement européen a ainsi demandé que soit rendue obligatoire la présentation de plans nationaux pour l’emploi et défendu une « consolidation compatible avec la croissance » et un « assainissement budgétaire proportionné et différencié ».

► Votre Commission des Affaires européennes s’est prononcée, pour la première fois depuis la mise en place du semestre européen, dès la première étape de la procédure.

Elle a ainsi voté, le 26 février 2013, une proposition de résolution sur les grandes orientations de politique économique (cf. version définitive en annexe n° 1), qui a été définitivement adoptée le 15 mars 2013.

Dans sa résolution, l’Assemblée nationale met l’accent sur l’importance qui doit être accordée au solde structurel et à son évolution dans l’appréciation du redressement des finances publiques, conformément au pacte de stabilité et de croissance révisé et au traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire. Elle a par conséquent considéré que le report de l’effort d’ajustement nécessaire pour ramener le déficit public français en-dessous de 3 % du PIB était justifié.

Elle appelle en outre, pour éviter une récession généralisée, à une coordination plus étroite des politiques économiques ayant pour objectifs un soutien à la demande intérieure dans les pays qui bénéficient de comptes courants excédentaires et un accroissement de la compétitivité dans les pays déficitaires.

L’Assemblée rappelle enfin la nécessité d’étudier toutes les pistes susceptibles de mieux prendre en considération les programmes d’investissement productif dans le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance.

► S’appuyant sur les travaux du Conseil7, le Conseil européen, réuni les 14 et 15 mars 2013, a évalué la mise en œuvre des recommandations faites à chaque État membre en 2012, défini les grandes lignes de politique économique pour 2013 et donné aux États membres des orientations pour l’élaboration de leurs programmes de stabilité et de convergence.

Le Conseil européen a souhaité mettre l’accent sur la croissance et l’emploi, s’inscrivant sur de nombreux points dans la lignée des orientations souhaitées par l’Assemblée nationale dans sa résolution européenne du 15 mars 2013.

Appelant à une action déterminée des États membres et de l’Union en faveur de la compétitivité, de la croissance et de l’emploi – en particulier celui des jeunes –, le Conseil européen a fait siennes les cinq priorités proposées par la Commission européenne pour les grandes orientations de politique économique pour 2013, à savoir :

– assurer un assainissement budgétaire différencié, axé sur la croissance ;

– rétablir des conditions normales d’octroi de crédits à l’économie ;

– promouvoir la croissance et la compétitivité ;

– lutter contre le chômage et les conséquences sociales de la crise ;

– moderniser les administrations publiques.

Les chefs d’État et de gouvernement ont plus particulièrement indiqué que les programmes de réforme et les programmes de stabilité (ou de convergence) devaient refléter l’action déterminée à mener afin de « promouvoir la croissance et l’emploi et de relever les défis qui se posent au plan budgétaire, macroéconomique et structurel. »

Le Conseil européen a également souligné « la nécessité d’assurer un assainissement budgétaire différencié, axé sur la croissance, tout en rappelant les possibilités offertes par les règles budgétaires actuelles du pacte de stabilité et de croissance (PSC) et du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) » et qu’« il conviendrait de prévoir, au niveau des États membres, une combinaison appropriée de mesures sur le plan des dépenses et sur celui des recettes, comprenant notamment des mesures ciblées à court terme destinées à stimuler la croissance et à favoriser la création d’emplois, en particulier pour les jeunes, et accordant la priorité aux investissements propices à la croissance. À cet égard, le Conseil européen rappelle que, dans le plein respect du PSC, les possibilités offertes par le cadre budgétaire existant de l’UE pour trouver un équilibre entre les besoins en investissements publics productifs et les objectifs de la discipline budgétaire peuvent être exploitées dans le cadre du volet préventif du PSC », rejoignant ainsi les recommandations de l’Assemblée nationale.

► La Commission européenne a ensuite conclu, le 10 avril 2013, les bilans approfondis des déséquilibres macroéconomiques de 13 États membres8, d’où il ressort que l’ajustement macroéconomique en Europe se poursuit9, mais que sa nature et son rythme varient d’un État membre à l’autre.

La Commission indique attendre des onze pays connaissant des déséquilibres non excessifs (Belgique, Bulgarie, Danemark, Finlande, France, Hongrie, Italie, Malte, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède) qu’ils tiennent compte des conclusions des bilans approfondis dans leurs programmes nationaux de réforme et leurs programmes de stabilité ou de convergence. Ceux en situation de déséquilibres excessifs (Espagne et Slovénie) font l’objet d’une surveillance plus étroite.

2. La présentation des programmes de stabilité et de réforme

► C’est dans le cadre défini par le Conseil européen en mars que les États membres ont élaboré leurs programmes de réforme et ceux de stabilité (ou de convergence), qu’ils ont transmis à la Commission européenne avant la fin du mois d’avril.

► Le Gouvernement français a ainsi présenté au Parlement son programme national de réforme pour 2013 et son programme de stabilité de pour la période 2013-2017, après avoir requis l’avis du Haut conseil des finances publiques.

Le 23 avril 2013, l’Assemblée nationale a, en application de l’article 50-1 de la Constitution, approuvé la déclaration du Gouvernement sur le programme de stabilité de la France pour 2013-2017.

► Après avoir étudié ces programmes, la Commission européenne a présenté, le 29 mai 2013, ses propositions de recommandations par pays10.

Force est de constater le changement de ton de la Commission européenne dans sa communication relative aux recommandations par pays. Elle met en effet davantage l’accent sur la dimension sociale des politiques économiques et la nécessité de mener des politiques économiques équitables. Elle souligne ainsi que « les inégalités et l’équité sont désormais au cœur du débat public, preuve que, pour être efficaces, les politiques doivent non seulement être bien conçues, mais également bénéficier d’un soutien politique et social ». C’est conforme aux conclusions du Conseil européen de décembre 2013, qui, à l’initiative de la France, a affirmé la dimension sociale de l’Union économique et monétaire.

La Commission européenne indique également à plusieurs reprises que l’ajustement ne doit pas concerner les seuls pays en déficit, mais également ceux qui enregistrent des excédents courants et ont des marges budgétaires, qui sont donc invités à prendre des mesures pour renforcer leur demande intérieure. C’était une des préconisations exprimées dans la résolution européenne de l’Assemblée nationale de mars dernier. L’Allemagne semble s’engager dans cette voie. Reste à voir si les annonces faites trouveront une concrétisation après les élections du mois de septembre.

Preuve des inflexions dans le discours de la Commission européenne, celle-ci a suggéré, au vu des mesures prises dans les États membres, d’accorder à six d’entre eux un délai supplémentaire pour ramener leurs déficits publics sous le seuil de 3 % du PIB. Il s’agit, outre la France, de l’Espagne, des Pays-Bas, de la Pologne, du Portugal et de la Slovénie. Cette évolution fait écho aux récentes analyses formulées par le Fonds monétaire internationale (FMI) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur le bon équilibre à trouver entre redressement des finances publiques et soutien à la croissance.

Enfin, il convient de relever dans l’analyse de la Commission européenne, le développement d’une forme de « benchmark » ou de comparaison des expériences. Elle présente ainsi, dans sa communication, les mesures prises par les États membres dans plusieurs domaines, comme l’accès au financement des entreprises. Cela devra être développé, car c’est essentiel pour la coordination des politiques économiques, et être davantage orienté vers une mise en valeur des meilleures pratiques.

Les propositions de recommandations de la Commission européenne ainsi que ses propositions de décisions relatives aux procédures pour déficit excessif ont été examinées par le Conseil Ecofin le 21 juin 2013 (cf. addendum infra). Inscrites à l’ordre du jour du Conseil européen des 27 et 28 juin 2013, elles seront formellement adoptées par le Conseil Ecofin du 9 juillet 2013.

B. La procédure de surveillance budgétaire introduite par le « two-pack » confère une nouvelle dimension aux recommandations par pays

La procédure de coordination des politiques économiques mise en place dans le cadre du semestre européen a été complétée par le paquet législatif dit du « two-pack », qui recouvre deux règlements destinés à renforcer, d’une part, le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires des États membres et, d’autre part, la surveillance des États confrontés à des difficultés financières11.

Entré en vigueur le 30 mai dernier, ce paquet législatif, et plus particulièrement le règlement relatif au renforcement du suivi des projets de budgets des États membres de la zone euro, va profondément modifier la procédure d’examen du projet de loi de finances initiale dès l’automne prochain.

Outre l’exigence faite aux États membres de présenter à l’avance à l’Eurogroupe et à la Commission européenne leurs plans d’émission de dette publique, ce règlement prévoit en effet la mise en place d’une surveillance des projets de budget nationaux. Pour la première fois, l’échelon européen interviendra au cours du second semestre de l’année, traditionnellement consacré au vote du budget.

Les États membres de la zone euro devront ainsi soumettre à la Commission européenne et à l’Eurogroupe, avant le 15 octobre, leur projet de budget, sur lequel la Commission pourra émettre, avant le 30 novembre, un avis, assorti d’une demande de révision en cas de manquement particulièrement grave aux obligations de politique budgétaire prévues dans le pacte de stabilité. Ce serait notamment le cas si le projet de loi de finances initiale faisait peser un risque sur la stabilité financière de la France, pouvait compromettre le bon fonctionnement de l’Union économique et monétaire ou constituait une violation « importante et manifeste » des recommandations adoptées par le Conseil.

Les recommandations par pays, qui font aujourd’hui l’objet d’un suivi plutôt faible – 15 recommandations sur 130 ont été mises en œuvre en 2012 –, vont en conséquence acquérir une nouvelle portée, puisque c’est notamment au regard de ces recommandations que la Commission européenne examinera le projet de loi de finances initiale.

Vos rapporteurs insistent sur le fait que, pour assurer la bonne information de l’Assemblée nationale en temps utile, la Commission européenne devra donner son avis avant le début de l’examen du projet de loi de finances par la commission des Finances, soit avant le deuxième mardi d’octobre.

II. APRÈS EXAMEN DES PROGRAMMES DE STABILITÉ ET DE RÉFORME FRANÇAIS, LA COMMISSION EUROPÉENNE ASSORTIT SA PROPOSITION DE REPORTER DE DEUX ANS L’OBJECTIF DE RETOUR DU DÉFICIT PUBLIC SOUS LE SEUIL DE 3 % DU PIB DE RECOMMANDATIONS PRÉCISES EN FAVEUR DE LA COMPÉTITIVITÉ ET DE L’EMPLOI

Dans ses propositions de recommandations, la Commission européenne suggère au Conseil de reporter de deux ans l’objectif de retour du déficit public sous le seuil des 3 % du PIB. Elle estime, en conséquence, devoir être beaucoup plus précise – presque prescriptive – que les années précédentes sur les réformes à mettre en œuvre en France.

S’agissant de la réforme des retraites, elle invite ainsi la France à « prendre des mesures d’ici à la fin de l’année 2013 pour équilibrer durablement le système de retraite en 2020 au plus tard, par exemple en adaptant les règles d’indexation, en augmentant encore l’âge légal de départ à la retraite et la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein et en réexaminant les régimes spéciaux, tout en évitant une augmentation des cotisations sociales patronales », ce qui revient à préempter l’ensemble des choix que le Gouvernement fera à l’issue de la période de consultation des partenaires sociaux qui va être menée cet été ainsi que la discussion au Parlement.

Si la France est soumise à une obligation de résultats, elle n’a en revanche aucune obligation de moyens, qu’il lui revient de définir. L’attitude de la Commission européenne est d’autant moins acceptable que la mise en œuvre de telles réformes exige qu’une place importante soit accordée au dialogue social.

Le commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires Olli Rehn s’est voulu à la fois ferme et rassurant lors de son audition à l’Assemblée nationale le 18 juin dernier. Il a ainsi affirmé qu’il appartient « au Gouvernement de dialoguer avec le Parlement et les partenaires sociaux, d’en tirer les conséquences et de formuler des propositions. La Commission européenne respecte pleinement ce processus tout en présentant ses propres suggestions, sachant d’ailleurs que cette question n’est récente ni dans le débat français ni parmi les recommandations européennes ».

En tout état de cause, il apparaît que la Commission européenne doit veiller à ce que la formulation même de ses propositions de recommandations respecte la liberté d’appréciation des États concernés, notamment s’agissant des moyens à mettre en œuvre, et favorise l’appropriation des réformes, en particulier lorsque celles-ci sont conduites dans le cadre du dialogue social.

Par ailleurs, il convient de souligner que, s’il est vrai que la Commission européenne accorde une attention accrue aux conséquences sociales des politiques économiques dans son analyse de la situation de l’Union, ses propositions de recommandations relatives à la France abordent peu les thématiques sociales, si ce n’est par le biais de la lutte contre le chômage, alors qu’il s’agit d’un volet essentiel des politiques économiques. En conséquence, vos rapporteurs insistent pour qu’il soit davantage tenu compte de la dimension sociale dans le cadre du semestre européen conformément aux conclusions du Conseil européen des 13 et 14 décembre 2012 qui ont affermi la dimension sociale de l’Union économique et monétaire.

A. La proposition de report de la procédure pour déficit excessif est justifiée…

Partant du constat que le redressement budgétaire progresse dans toute l’Europe (le déficit de l’Union devrait passer de 6,9 % en 2009 à 4 % en 2012 pour atteindre 3,4 % en 2013, ce qui atteste des efforts menés par les États membres), soulignant les faiblesses de la croissance dans l’Union et rappelant que la valeur de référence pour apprécier l’assainissement des finances publiques est le déficit structurel, la Commission européenne propose au Conseil de prolonger le délai accordé à six États membres, dont la France, pour atteindre leurs objectifs budgétaires.

Le tableau ci-dessous détaille la situation des différents États membres au regard du pacte de stabilité et de croissance, d’où il ressort que, si le déficit global de l’Union a reculé, 16 pays enregistrent encore un déficit public supérieur à 3 % du PIB, contre 21 à la fin de l’année 2012.

RÉCAPITULATIF AU 29 MAI 2013 DES RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION EUROPÉENNE AU REGARD DU PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE

Procédure pour déficit excessif

État membre

Absence de procédure

Allemagne, Bulgarie, Estonie, Finlande, Luxembourg, Suède

Abrogation de la procédure pour déficit excessif

Hongrie, Italie, Lituanie, Lettonie, Roumanie

Procédure en cours avec comme délai 2013

Autriche, Danemark, République tchèque, Slovaquie

Procédure en cours avec comme délai 2015 ou 2016

Grèce, Irlande, Chypre, Royaume-Uni

Proposition de prolongation des délais à 2014, 2015 ou 2016

Espagne, France, Pays-Bas, Pologne, Portugal, Slovénie

Première étape vers l’ouverture d’une procédure

Malte

Action insuffisante pour corriger le déficit au plus tard en 2012 – poursuite de la procédure

Belgique

Source : Commission européenne.

Dans le cas français, la proposition de la Commission européenne conduit à reporter de deux ans, soit en 2015 au plus tard, le délai accordé à la France pour ramener son déficit sous la valeur de référence de 3 % du PIB. Dans son programme de stabilité, le Gouvernement français visait, pour sa part, un retour sous le seuil des 3 % du PIB dès 2014.

LA PROCÉDURE POUR DÉFICIT EXCESSIF DONT LA FRANCE FAIT L’OBJET

Constatant que la France présentait un déficit excessif, le Conseil lui a recommandé, le 27 avril 2009, de le ramener sous la valeur de référence de 3 % du PIB en 2012 au plus tard.

Notant que les autorités françaises avaient engagé une action suivie d’effets mais qu’une dégradation de la situation économique était ensuite intervenue, le Conseil a reporté, le 2 décembre 2009, le délai accordé à la France pour corriger son déficit à 2013 au plus tard.

À cette fin, le Conseil a recommandé aux autorités françaises :

– de mettre en œuvre les mesures prévues pour réduire le déficit en 2010 et de renforcer l’effort budgétaire à partir de 2011 ;

– d’assurer un effort budgétaire annuel moyen supérieur à 1 % du PIB sur la période 2010-2013 ;

– de préciser les mesures nécessaires pour corriger le déficit excessif en 2013 au plus tard et d’accélérer la réduction du déficit si les circonstances économiques ou budgétaires s’avéraient plus favorables que prévu lors de la recommandation.

Le Conseil a également recommandé aux autorités françaises de veiller à accélérer la réduction du taux d’endettement brut. Il les a en outre invitées à poursuivre la mise en œuvre des réformes structurelles en vue d’améliorer l’efficience et la gouvernance des finances publiques et d’augmenter la croissance du PIB potentiel. Il a enfin appelé à rendre le contrôle des dépenses plus contraignant, notamment dans les domaines des soins de santé et des collectivités locales, et à réformer le système de retraite.

Votre co-rapporteur Christophe Caresche souligne que la proposition de la Commission européenne, qui s’inscrit pleinement dans la logique de la résolution européenne adoptée par l’Assemblée nationale le 15 mars dernier, est doublement justifiée.

D’une part, la France conduit un important effort d’ajustement de son solde structurel, avec une réduction de 1,2 point de PIB en 2012, qui devrait être porté à 3,9 points sur la période 2012-2014 afin de tendre vers l’équilibre en 2016, ainsi que l’indique le Gouvernement dans son programme de stabilité. Or, c’est le déficit structurel qui constitue la référence, prévue par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, au regard de laquelle doit s’apprécier le respect des engagements budgétaires. Les efforts menés par la France ont par ailleurs permis de réduire le déficit public de 7,5 % du PIB en 2009 à 4,8 % du PIB en 2012.

D’autre part, la France doit faire face à une situation économique particulièrement difficile, avec une croissance nulle en 2012, qui devrait devenir négative en 2013. Dans ses prévisions de printemps publiées le 3 mai dernier, la Commission européenne, plus pessimiste que le Gouvernement, prévoit ainsi, après une stagnation en 2012, un recul du PIB de 0,1 %.

Votre co-rapporteur Michel Herbillon ne partage pas cette analyse (cf. observations infra)

Relevant les efforts menés par la France, tant en matière de réduction du déficit nominal que du déficit structurel, et soulignant l’impact de la crise économique, la Commission européenne juge que la France remplit les conditions nécessaires à la prolongation du délai de correction du déficit public excessif prévues à l’article 3, paragraphe 5, du règlement (CE) no 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

À la lumière de ses prévisions de printemps, la Commission européenne juge que l’effort d’ajustement nécessaire pour ramener le déficit public sous le seuil des 3 % du PIB en 2013 n’est pas supportable et elle estime nécessaire d’accorder un délai de deux ans – un an n’y suffirait pas selon elle – pour permettre à la France d’atteindre cet objectif. Lors de son audition par les commissions des affaires européennes, des affaires étrangères et des finances, le 18 juin dernier, le commissaire européen chargé des affaires économiques et monétaires Olli Rehn a d’ailleurs été très clair : « n’étendre ce délai que d’une seule année aurait en revanche eu comme conséquence de prolonger la stagnation de l’économie française, c’est-à-dire de lui faire subir trois années de croissance nulle, entre 2012 et 2014 ».

Soulignant qu’« une prolongation de deux ans permettrait à la France de ramener son déficit nominal sous 3 % du PIB en 2015 tout en limitant les effets sur la croissance en 2014 et 2015 », la Commission européenne fixe donc, dans sa proposition de recommandation relative à la procédure pour déficit excessif, une nouvelle trajectoire de réduction des déficits nominaux et structurels d’ici à 2015, qui prévoit une évolution plus graduée.

COMPARAISON DES NOUVEAUX OBJECTIFS FIXÉS PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE ET DE CEUX INSCRITS DANS LE PROGRAMME DE STABILITÉ

 

2013

2014

2015

Objectifs fixés par la Commission européenne

Cible de déficit public (en % du PIB)

Effort structurel

Dette publique (en % du PIB)

3,9 %

1,3

94 %

3,6 %

0,8

96,2 %

2,8 %

0,8

Objectifs fixés dans le programme de stabilité

Cible de déficit public (en % du PIB)

Effort structurel

Dette publique (en % du PIB)

3,7 %

1,9

93,6 %

2,9 %

1

94,3 %

2 %

0,6

92,9 %

Source : Proposition de la Commission européenne de recommandation au Conseil de mettre fin à la situation de déficit public excessif en France et programme de stabilité pour 2012-2017.

La Commission européenne assortit toutefois sa proposition de plusieurs conditions. Elle précise en particulier qu’il est impératif, pour atteindre les objectifs budgétaires fixés, que la France, au-delà des décisions déjà prises pour 2013 (qui représenteraient 1,5 point de PIB), mette en œuvre des mesures de redressement à hauteur de plus d’un point de PIB par an en 2014 et en 2015. À cette fin, elle demande à la France de détailler les initiatives qui permettront d’atteindre cet objectif. Vos rapporteurs suggèrent que le débat d’orientation des finances publiques soit l’occasion, pour le Gouvernement, de préciser dès à présent l’effort en dépenses et en recettes qu’il envisage pour l’année 2014 ainsi que le détail des mesures nouvelles qui en découlent.

La Commission européenne insiste également sur le fait que la France doit consacrer toutes les recettes imprévues à la réduction du déficit, ce qui est déjà prévu dans la loi no 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, qui dispose que les éventuels surplus, constatés par rapport aux évaluations de la loi de finances ou de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année, du produit des impositions de toutes natures établies au profit de l’État ou des cotisations et contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base et aux organismes concourant à leur financement sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit public.

Elle propose enfin de fixer au 1er octobre 2013 l’échéance pour engager une action corrective et remettre, conformément à l’article 3, paragraphe 4 bis, du règlement (CE) no 1467/97 du Conseil, un rapport détaillé sur la stratégie d’assainissement budgétaire. La France est en outre invitée à dresser un bilan de la mise en œuvre des recommandations européennes au moins tous les six mois et à y consacrer un chapitre distinct dans les programmes de stabilité jusqu’à ce que le déficit ait été corrigé.

Au-delà des conclusions spécifiques à la procédure pour déficit excessif, la Commission européenne formule plusieurs propositions de recommandations sur les réformes structurelles.

B. …et doit être mise à profit pour conduire des réformes structurelles

Dans leur évaluation du programme national de réforme et du programme de stabilité de la France, les services de la Commission européenne dressent un bilan globalement positif de la mise en œuvre des cinq recommandations faites en 2012, en apportant toutefois quelques bémols.

Ils notent ainsi des progrès s’agissant de la stratégie budgétaire, de la réforme du marché du travail – avec en particulier l’accord national interprofessionnel conclu le 11 janvier 2013, les contrats de génération et le renforcement des effectifs de Pôle emploi – et de la modernisation du système fiscal – avec notamment la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et la baisse des dépenses fiscales. Ils sont en revanche plus critiques s’agissant du renforcement de la concurrence dans les professions réglementées et les industries de réseau, où ils estiment que peu de progrès ont été réalisés.

L’évaluation menée par la Commission européenne confirme ainsi, votre co-rapporteur Christophe Caresche tient à le souligner, la justesse des choix faits par le président de la République et le Gouvernement. Votre co-rapporteur Michel Herbillon ne partage pas cet avis (cf. observations infra).

S’appuyant sur ce premier bilan encourageant, la Commission européenne propose six recommandations pour 2013 portant, d’une part, sur consolidation de la stratégie budgétaire et fiscale et, d’autre part, sur la mise en place d’un environnement favorable à la croissance, la compétitivité et l’emploi (cf. détail en annexe no 2).

1. Consolider la stratégie budgétaire et fiscale française

La Commission européenne suggère au Conseil de recommander à la France de renforcer, en 2013 et 2014, sa stratégie budgétaire, afin de ramener son déficit public sous le seuil des 3 % du PIB d’ici à 2015 au plus tard, puis d’atteindre l’objectif de moyen terme, c’est-à-dire l’équilibre structurel, d’ici à 2016. Conformément aux conclusions du Conseil européen des 14 et 15 mars 2013 qui ont fixé les grandes orientations de politique économique pour 2013, elle invite le Gouvernement à maintenir le cap d’un assainissement budgétaire propice à la croissance.

À cet effet, la Commission européenne insiste sur la nécessité de consacrer à la réduction du déficit toutes les recettes non prévues. Même si les perspectives de recettes fiscales supérieures aux prévisions ne semblent pas avérées pour 2013, vos rapporteurs, qui défendent ce principe de bonne gestion, rappellent que la loi no 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 prévoit une disposition allant en ce sens.

La Commission européenne invite également le Gouvernement à procéder à la revue des dépenses des administrations publiques et à en renforcer l’efficacité.

Vos rapporteurs partagent cette analyse et insistent sur la nécessité de procéder, dans un contexte économique et financier difficile, à un rééquilibrage de l’effort d’assainissement budgétaire, en mettant davantage l’accent sur la baisse des dépenses plutôt que sur la hausse des prélèvements obligatoires. L’expérience montre en effet que, dans les pays où la part des dépenses publiques dans le PIB et les taux d’imposition sont relativement élevés, comme c’est le cas en France, le redressement des finances publiques réalisé grâce à une baisse des dépenses plutôt qu’à une augmentation des recettes fiscales soutient davantage la croissance sur le long terme.

Vos rapporteurs estiment en outre que les économies à réaliser doivent être avant tout de nature structurelle et préserver le potentiel de croissance et les filets de sécurité sociaux.

Vos rapporteurs divergent toutefois sur les moyens d’atteindre ces objectifs.

Votre co-rapporteur Christophe Caresche souligne que cet objectif est notamment poursuivi dans le cadre de la modernisation de l’action publique (MAP), dont l’objectif est d’évaluer, d’ici à 2017, l’intégralité des politiques publiques, en associant étroitement les usagers, les agents et les acteurs de ces politiques au diagnostic. Il s’agit ainsi de repenser les modes d’intervention publique afin d’engendrer des économies durables et structurelles. La première vague d’évaluations, lancée en janvier dernier, concerne vingt-sept politiques publiques, et la deuxième, engagée au printemps, vingt-deux.

Parmi les grandes politiques concernées figure celle relative aux aides aux entreprises, avec un objectif d’économie de 2 milliards d’euros d’ici à 2015. Le 18 juin 2013, MM. Jean-Jack Queyranne, Jean-Philippe Denaël et Philippe Jurgensen ont remis au Gouvernement un rapport à ce sujet, qui sera inscrit à l’ordre du jour du Comité interministériel de modernisation de l’action publique prévu le 17 juillet prochain. Une réforme de la politique familiale destinée à assurer davantage de justice a également été annoncée par le Premier ministre, avec un objectif d’économies à hauteur de 1,7 milliard d’euros d’ici à 2016.

En outre, chaque ministère a élaboré, en mars 2013, un programme de modernisation et de simplification dont la mise en œuvre sera complétée par des chantiers transversaux comme ceux de la rationalisation des opérateurs et de la réforme des fonctions support de l’État. Ainsi, la professionnalisation de la politique d’achats devrait permettre de réaliser 2 milliards d’euros d’économies d’ici à 2015.

Par ailleurs, le pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités locales devrait préciser le cadre financier dans lequel va s’inscrire la nouvelle organisation territoriale qui sera mise en place par les projets de loi relatifs aux métropoles, aux compétences économiques des régions et aux solidarités territoriales. Les transferts financiers de l’État aux collectivités locales devraient être réduits de 1,5 milliard d’euros en 2014 et de 3 milliards d’euros en 2015 par rapport à 2013.

Les projets de loi de finances et de financement pour 2014 devraient ainsi prévoir près de 14 milliards d’euros d’économies, reposant sur un gel en valeur des dépenses spontanées de l’État hors charge de la dette et des pensions (soit une économie de 7 milliards d’euros) et sur des économies supplémentaires d’environ 6 milliards d’euros (dont 750 millions sur les dépenses des ministères et de leurs opérateurs et 1,5 milliard sur les collectivités territoriales).

Votre co-rapporteur Michel Herbillon estime que la maîtrise des dépenses publiques doit notamment se fonder sur la poursuite du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite et partage les doutes exprimées par la Commission européenne quant aux économies que pourrait générer le projet de loi relatif à la modernisation de l’action publique territoriale et à l’affirmation des métropoles, qui prévoit de créer de nouveaux établissements publics et revient à complexifier l’organisation actuelle. La réforme de la politique familiale proposée par le Gouvernement par ailleurs surtout conduire à diminuer le pouvoir d’achat des familles (cf. observations infra).

Enfin, si vos rapporteurs appellent à amplifier le mouvement de réduction des niches fiscales et sociales en visant tout particulièrement les dépenses fiscales et sociales dont l’utilité n’est pas avérée, ils sont d’avis divergents sur la politique fiscale qui doit être menée, en particulier en ce qui concerne les mesures destinées à favoriser la compétitivité de la France.

Votre co-rapporteur Christophe Caresche estime que la mise en œuvre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, dans le cadre du « pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi » s’inscrit pleinement dans la logique prônée par la Commission européenne de transfert d’une part de la fiscalité pesant sur le travail vers d’autres types de fiscalité, en particulier la fiscalité écologique. Destiné à soutenir la compétitivité des entreprises à travers l’investissement, la recherche, l’innovation, la formation, le recrutement, la prospection de nouveaux marchés, la transition écologique et énergétique et la reconstitution des fonds de roulement, le crédit d’impôt, d’un montant estimé à 20 milliards d’euros, devrait en effet être financé pour moitié par une réduction des dépenses et pour moitié par une hausse de la TVA et de la fiscalité environnementale. Le transfert correspondrait ainsi à 1 point de PIB. Ce rééquilibrage est justifié : avec une fiscalité écologique représentant seulement 1,8 % du PIB, la France se situe en effet à l’antépénultième rang en Europe. Il conviendrait par ailleurs d’aller plus loin dans le renforcement de la compétitivité des entreprises françaises, qu’il s’agisse de la compétitivité prix ou hors prix.

Votre co-rapporteur Michel Herbillon ne partage pas cette analyse et rappelle que sa préférence va vers le dispositif de TVA antidélocalisation décidé par le gouvernement et la majorité précédents (cf. observations infra).

Enfin, si la Commission européenne conclut à l’absence de risque sur la viabilité des finances publiques, elle appelle à une réforme du système des retraites qui permette d’en assurer la pérennité.

Un premier pas a été effectué, s’agissant des régimes complémentaires de retraite (Agirc et Arcco), avec l’accord conclu, le 13 mars 2013, par les partenaires sociaux, qui vise à assurer l’équilibre financier de ces régimes.

Votre co-rapporteur Christophe Caresche tient par ailleurs à rappeler que le Gouvernement français, conscient des enjeux liés à la préservation du système des retraites, présentera un projet de loi relatif à la réforme du système des retraites à l’automne, après avoir consulté les partenaires sociaux. C’est au Gouvernement et au Parlement qu’il reviendra de décider des mesures à mettre en œuvre (cf. introduction du II.).

Votre co-rapporteur Michel Herbillon estime pour sa part nécessaire d’approfondir la piste du décalage de l’âge légal de départ en retraite et de veiller, compte tenu de situation économique actuelle et du déficit de compétitivité de la France, à ne pas alourdir les cotisations patronales et les charges déjà élevées qui pèsent sur les entreprises (cf. observations infra).

2. Favoriser la croissance, l’emploi et la compétitivité tout en veillant aux conséquences sociales des politiques économiques

Dans son bilan approfondi relatif à la France rendu public le 10 avril 2013, la Commission européenne conclut que la France se caractérise par des déséquilibres macroéconomiques qui requièrent une surveillance et l’adoption de mesures décisives12. Elle met notamment en garde devant la dégradation de la balance commerciale et de la compétitivité de la France, qu’elle analyse comme liée aux coûts mais aussi à d’autres facteurs plus structurels (cf. tableau de bord en annexe no 3).

Sur le fondement de ce constat et de son analyse du programme de réforme présenté par la France, la Commission européenne propose trois grands axes de réforme.

► Le premier axe concerne l’amélioration de l’environnement des entreprises, qui doit notamment reposer, selon la Commission européenne, sur la simplification du cadre règlementaire et la mise en place d’un cadre favorable à l’innovation.

Votre co-rapporteur Christophe Caresche rappelle à cet égard que le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi comporte de nombreuses mesures allant en ce sens, dont le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui devrait entraîner un relèvement de l’activité de 0,5 point de PIB ainsi que la création de 300 000 emplois d’ici à 2017. Il en va de même de la création de la Banque publique d’investissement (BPI) qui, dotée d’une capacité d’intervention de 42 milliards d’euros, doit permettre de rationaliser les dispositifs existants et de mutualiser les moyens publics, afin de rendre un meilleur service aux entreprises. Le financement en fonds propres des entreprises devrait par ailleurs être encouragé dans le cadre de la prochaine loi de finances.

Le Gouvernement a également engagé un vaste chantier de simplification de la vie des entreprises, lancé sur la base de sept actions prioritaires (comme celui relatif à la déclaration sociale nominative) et du moratoire sur les nouvelles normes (« pas de nouvelle norme sans suppression d’une norme existante ») annoncé par le Premier ministre le 4 avril dernier. Ce mouvement sera complété cet été sur le fondement des conclusions de la concertation engagée avec les entreprises. Il s’accompagne de la modernisation du fonctionnement de la justice commerciale.

De nouvelles mesures en faveur des entreprises et de l’entrepreneuriat ont par ailleurs été annoncées par le président de la République le 29 avril dernier, comme la réforme de la taxation des plus-values de cessions, la mise en place au niveau régional d’un interlocuteur unique destiné à faciliter l’accès des entreprises aux aides qui leur sont destinées, la levée des obligations de publications de comptes pour les PME et la création d’incubateurs pour les PME à l’international.

Votre co-rapporteur Michel Herbillon estime que le principal problème à régler est celui du coût du travail et que les mesures prises sont, à cet égard, insuffisantes (cf. observations infra).

► Le deuxième axe de réforme proposé par la Commission européenne concerne le marché du travail. Elle souligne ainsi la nécessité d’aller plus loin dans la lutte contre la segmentation du marché – ce qui suppose en particulier de traiter le cas des travailleurs intérimaires –, de réformer le système d’indemnisation du chômage, d’améliorer le taux d’emploi des travailleurs les plus âgés, d’accroître la participation des adultes aux dispositifs d’apprentissage tout au long de la vie, d’offrir un suivi personnalisé aux chômeurs et d’améliorer le passage de l’école au travail.

Votre co-rapporteur Christophe Caresche rappelle à cet égard que de nombreuses mesures en faveur de l’insertion sur le marché du travail des personnes qui en sont les plus éloignées, en particulier les jeunes, sont en phase de montée en puissance. Il en va notamment ainsi des emplois d’avenir, dont 150 000 devraient être créés d’ici à la fin de l’année 2014, et des contrats de génération, qui visent à favoriser l’accès des jeunes à un emploi durable, maintenir dans l’emploi les seniors et transmettre des savoirs et des compétences. La « garantie jeunes », qui a pour objet de proposer aux jeunes en situation de grande précarité un parcours contractualisé d’accès à l’emploi ou à la formation, sera développée à compter de septembre 2013 dans dix territoires pilotes, avant d’être généralisée. Les dispositifs d’alternance devraient en outre être renforcés, avec un objectif de 500 000 apprentis d’ici à 2017. Le projet de loi d’orientation sur l’enseignement supérieur et la recherche vise enfin à améliorer l’orientation des jeunes, élever leur niveau de qualification et favoriser leur insertion professionnelle.

Par ailleurs, la loi no 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, prise sur le fondement de l’accord national interprofessionnel sur la sécurisation de l’emploi du 11 janvier 2013, va contribuer à réduire la segmentation du marché du travail grâce à la « surcotisation » visant les contrats courts13, à la révision des procédures de licenciement et à la sécurisation des parcours professionnels, en particulier ceux des intérimaires et des intermittents. Pour ces derniers, des mesures ont été prises : le CDI d’intérim et l’expérimentation du recours direct au contrat de travail intermittent. Par ailleurs, la mise en place du compte personnel de formation ainsi que la réforme de la formation professionnelle, qui sera mise en place après concertation avec les partenaires sociaux, vont aller dans le sens d’une diminution de la segmentation du marché du travail.

Les moyens de Pôle emploi ont en outre été renforcés, avec 4 000 recrutements en CDI en octobre 2012 et en mars 2013. Le plan stratégique « Pôle emploi 2015 » pour la période 2012-2015 prévoit notamment un accompagnement différencié des personnes qui recherchent un emploi.

Enfin, la renégociation de la convention d’assurance-chômage devrait avoir lieu au second semestre 2013. Elle prendra en compte les éléments contenus dans l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 qui y renvoient.

Votre co-rapporteur Michel Herbillon estime que les mesures prises par l’actuel Gouvernement consistent, pour beaucoup, en de vieilles recettes, comme les emplois d’avenir, qui n’ont pas montré leur efficacité. L’inversion de la courbe du chômage viendra du retour de la croissance et de la création d’emplois par les entreprises, et non d’une injection massive d’emplois aidés qui ne modifie que de manière cosmétique les statistiques du chômage (cf. observations infra).

► Le troisième axe privilégié par la Commission européenne est celui relatif au renforcement de la concurrence dans le secteur des services. Elle suggère notamment d’éliminer les restrictions à l’accès et à l’exercice des services professionnels qui ne sont pas justifiées, de simplifier les ouvertures de commerces et de supprimer l’interdiction de la vente à perte, de mettre fin aux tarifs réglementés du gaz et de l’électricité pour les clients autres que les ménages et d’ouvrir le transport ferroviaire des passagers à la concurrence.

Sur ce point, votre co-rapporteur Christophe Caresche rappelle que plusieurs textes applicables aux professions règlementées sont en cours d’évolution. Par exemple, s’agissant de la profession de vétérinaire, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable modifie les dispositions du code rural et de la pêche maritime relatives à l’exercice de la profession vétérinaire au regard de la directive 2006/123/CE du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, tant du point de vue de la liberté d’établissement que de celui de la libre prestation de services. En particulier, il ouvre à toutes formes de société, y compris de droit étranger, la possibilité d’exercice à titre permanent, en France, de la profession de vétérinaire sous réserve du respect de certaines conditions garantissant l’indépendance des vétérinaires et le respect des règles de conduite professionnelles. Il prévoit par ailleurs expressément que les personnes morales ressortissantes d’autres États membre de l’Union peuvent exercer, à titre occasionnel et temporaire, la profession de vétérinaire sur le territoire national.

D’une manière générale, il convient de garantir, en Europe, un cadre favorable à la préservation et au financement des services d’intérêt économique général. Le libre établissement et la libre prestation de services dans le marché intérieur doivent en outre respecter des conditions de concurrence équitables à même d’éviter toute forme de dumping social.

Votre co-rapporteur Michel Herbillon estime que le renforcement de la concurrence dans le secteur des services peut être envisagé dès lors que la preuve de son intérêt a été faite et que les objectifs d’intérêt général sont préservés.

OBSERVATIONS DE M. MICHEL HERBILLON,

CO-RAPPORTEUR

Un premier constat doit d’abord être dressé : les prévisions économiques de la Commission européenne, qui apparaissent plus fiables que celles du Gouvernement, sont inquiétantes.

La Commission européenne, tout comme le Haut conseil des finances publiques, souligne ainsi que le scénario macroéconomique sur lequel repose le programme de stabilité présenté par le Gouvernement français est trop optimiste.

Il en résulte que les prévisions de déficits publics faites par la Commission européenne (3,9 % du PIB pour 2013 et 3,6 % du PIB pour 2014) apparaissent plus crédibles que celles du Gouvernement. L’analyse de la Commission européenne réalisée en mai 2013 apparaît d’autant plus juste depuis la publication des premières estimations relatives à l’exécution du budget en 2013. Le déficit nominal devrait en effet être plus proche des 4 % du PIB que des 3 % que nous avons votés et des 3,7 % avancés par le Gouvernement dans son programme de stabilité. Le dérapage s’élèverait ainsi en 2013 à 20 milliards d’euros, 15 milliards sur les recettes, 4 à 5 milliards sur les dépenses, portant ainsi le déficit prévu de 60 à 80 milliards d’euros.

Ce déficit public sera, ainsi que le souligne la Commission européenne, l’un des plus élevés parmi les pays de la zone euro qui ne font pas l’objet d’un programme d’assistance financière. Si ce déficit public devrait, sous réserve de prendre les mesures nécessaires, baisser en 2014 dans le scénario de la Commission européenne, la dette publique dépasserait 96 % du PIB et le taux de chômage atteindrait 10,9 % de la population active en 2014.

Il existe non seulement des divergences entre la Commission européenne et le Gouvernement sur le scénario macroéconomique et les prévisions de déficits publics, mais également sur l’estimation relative au solde structurel en 2015. Les autorités françaises tiennent ainsi compte d’un effort structurel de 1 % en 2014, alors que la Commission prévoit une légère dégradation du solde structurel.

Ces prévisions inquiétantes appellent des réactions rapides et adaptées, ainsi que le souligne la Commission européenne. Nous devons profiter du délai de deux ans accordé pour ramener le déficit public sous le seuil de 3 % de PIB pour mener des réformes ambitieuses.

Le nécessaire rééquilibrage de l’effort de redressement des finances publiques doit avoir comme objectifs de mettre davantage l’accent sur les dépenses, d’alléger le coût du travail et de réduire les niches fiscales et sociales. À titre d’exemple, trois axes d’action doivent être privilégiés.

Le premier concerne la réforme des retraites. Certes, le projet du Gouvernement n’est pas connu à ce stade, mais plusieurs pistes ont été présentées le 14 juin 2013 par la Commission sur l’avenir des retraites présidée par Mme Yannick Moreau. Alors qu’il ressort très clairement de la communication de la Commission européenne sur les recommandations par pays que la France est le pays de l’Union européenne qui propose l’âge de départ à la retraite le plus bas aujourd’hui mais également à l’horizon 2020, un décalage de l’âge légal de départ en retraite est probablement incontournable. Une telle piste ne semble pourtant pas figurer parmi les options envisagées par le Gouvernement actuel. Le précédent Gouvernement avait fait un premier pas en portant cette limite à 62 ans, ce qui était justifié, compte tenu de l’évolution de l’espérance de vie. Au regard des comparaisons européennes, où la moyenne s’établirait plutôt à 65 ans, la piste du décalage de l’âge du départ en retraite ne semble donc pouvoir être écartée. Il convient par ailleurs, dans la situation économique actuelle et dans le souci d’assurer la compétitivité de nos entreprises, de ne pas alourdir les cotisations patronales, ni les charges pesant sur les entreprises.

Le deuxième axe d’action vise la compétitivité de la France, qu’il convient de renforcer de manière impérative, ainsi que le souligne à juste titre la Commission européenne. La précédente majorité avait voté une TVA anti-délocalisation qui allait dans le bon sens, alors que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi adopté par l’actuelle majorité n’est pas à la hauteur des défis auxquels notre économie est confrontée et s’apparente à une « usine à gaz » délicate à mettre en œuvre. La Commission européenne prévoit d’ailleurs que l’impact de cette mesure ne sera pas aussi fort que l’avance le Gouvernement français.

Enfin, la situation très inquiétante de l’emploi en France appelle des mesures supplémentaires pour lutter contre la segmentation du marché du travail et il convient de lancer sans tarder une réforme du système d’indemnisation du chômage et de faire de l’emploi des jeunes une priorité, en particulier l’apprentissage, qui relève, à ce stade, de l’incantation, et non du résultat.

Je voterai donc contre la proposition de résolution présentée à la Commission des Affaires européennes, en particulier son point 12, qui apparaît comme un satisfecit adressé à la politique du Gouvernement, alors que la Commission européenne appelle à des réformes plus ambitieuses.

ADDENDUM

En amont du Conseil européen des 27 et 28 juin 2013, la proposition de recommandation formulée par la Commission européenne au sujet des programmes de réforme et de stabilité de la France a été amendée par le Conseil afin, d’une part, de remplacer, parmi les pistes de réforme du système de retraite mentionnées, le relèvement de l’âge légal de départ en retraite par celui de l’âge effectif de départ en retraite et, d’autre part, de préciser que l’adoption de nouvelles mesures en faveur de la réduction du coût du travail doit être réalisée « en collaboration avec les partenaires sociaux ».

Le Conseil européen a conclu le semestre européen 2013 « en approuvant, dans l’ensemble, les recommandations par pays », ce qui vise notamment la recommandation adressée à la France dans sa rédaction issue du Conseil.

Le Conseil européen a ajouté que « les États membres vont à présent traduire ces recommandations dans les décisions qu’ils prendront sur les budgets, les réformes structurelles et les politiques sociales et de l’emploi, tout en favorisant l’adhésion pleine et entière à ce processus au niveau national et en préservant le dialogue social. Le Conseil et la Commission suivront de près leur mise en œuvre. Le Conseil procédera régulièrement à un examen et à une évaluation de la situation économique en Europe ».

TRAVAUX DE LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

La Commission s’est réunie le 26 juin 2013, sous la présidence de Madame Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé des rapporteurs, au cours duquel M. Michel Herbillon, co-rapporteur, a fait part de son profond désaccord avec M. Christophe Caresche, co-rapporteur, sur l’analyse de la situation de la France et a souligné que le groupe UMP et lui-même ne pourraient voter en faveur de la proposition de résolution, a été suivi d’un débat.

« Mme Marietta Karamanli. Je veux me féliciter de l’équilibre atteint sur la proposition de résolution, en particulier sur deux points importants. D’abord, la question des dumpings fiscaux et sociaux, par lesquels certaines multinationales parviennent à échapper purement et simplement à l’impôt, c’est-à-dire à la contribution loyale aux charges communes, est clairement abordée. Il est bon que nous insistions sur cet enjeu décisif, d’autant plus prégnant que de très nombreux pays ont été contraints d’augmenter les impôts, notamment la TVA. Ensuite, je suis satisfaite que la proposition rappelle qu’il est essentiel de sauvegarder l’investissement dans le contexte difficile de l’assainissement budgétaire, et par conséquent d’en tenir compte dans l’appréciation des efforts nationaux au niveau européen. Il est en effet important d’inverser cette tendance qui a fait décroître les investissements publics de près de 4 % du PIB dans les années 80 à seulement 2,1 % aujourd’hui.

M. Yves Daniel. Il demeure quand même un conflit entre l’assainissement budgétaire, surtout s’il est brutal, et la nécessité de soutenir les indispensables investissements pour lutter contre la croissance. Je ne conteste pas qu’il soit important de reprendre en main nos finances, mais il faut veiller à ne pas étouffer définitivement la croissance. La question est donc de bien placer le curseur, et j’ai souvent le sentiment qu’on le cale souvent un peu trop près du désendettement public. J’approuve ensuite les propositions, en particulier invitant la Commission à rester dans son rôle de proposition et de conseil, pas de donneuse de leçon. Je regrette toutefois que l’on ne fasse aucun lien avec l’accord de libre-échange négocié avec les États-Unis, dans les questions qu’il pose certes, mais aussi dans les plus-values qu’il pourrait apporter pour la croissance. Deux autres enjeux pourraient utilement être enfin soulevés : celui de la formation, décisive pour la croissance et celui de la fraude fiscale.

La présidente Mme Danielle Auroi. La proposition de résolution me semble satisfaisante, à deux nuances près. Je regrette en effet qui ni la fraude fiscale, ni l’impératif écologique ne soient mentionnés, ni par la Commission européenne dans sa proposition de recommandation ni par notre commission. Je vous soumets en conséquence deux amendements, l’un appelant à accélérer la lutte contre la fraude fiscale et la mise en place d’une fiscalité écologique et l’autre de compléter les priorités que nous énonçons par la mention des efforts nécessaires pour avancer dans la transition écologique et énergétique.

M. Christophe Caresche. Les investissements sont en effet un point majeur, et je veux signaler à cet égard que la Banque européenne d’investissement a considérablement accéléré son travail, ce qui est très positif pour les programmes notamment du pacte pour la croissance et pour l’emploi. S’agissant de l’écologie, il faut reconnaître que la Commission européenne propose de transférer une part des charges qui pèsent aujourd’hui sur le travail vers une fiscalité écologique et les taxes sur la consommation. Je n’ai néanmoins aucune objection à ce que la proposition soit complétée selon les suggestions que vous préconisez. »

La Commission a donc adopté la proposition de résolution dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en particulier le titre VIII relatif à la politique économique et monétaire de sa troisième partie,

Vu le règlement (CE) no 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, modifié par le règlement (CE) no 1056/2005 du Conseil du 27 juin 2005 et par le règlement (UE) no 1175/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011,

Vu le règlement (UE) no 1176/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques,

Vu les conclusions du Conseil européen des 14 et 15 mars 2013,

Vu la communication de la Commission européenne, du 29 mai 2013, au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée « Semestre européen 2013 : recommandations par pays. Sortir l’Europe de la crise » (COM (2013) 350 final),

Vu la recommandation de la Commission européenne, du 29 mai 2013, de recommandation du Conseil concernant la mise en œuvre des grandes orientations des politiques économiques des États membres dont la monnaie est l’euro (COM (2013) 379),

Vu la recommandation de la Commission européenne, du 29 mai 2013, de recommandation du Conseil pour qu’il soit mis fin à la situation de déficit public excessif en France (COM (2013) 384 final),

Vu la recommandation de la Commission européenne, du 29 mai 2013, de recommandation du Conseil concernant le programme national de réforme de la France pour 2013 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité de la France pour la période 2012-2017 ainsi que l’évaluation des services de la Commission européenne relative au programme national de réforme et au programme de stabilité 2013 de la France (COM (2013) 360 final),

Vu le programme national de réforme de la France pour 2013,

Vu le programme de stabilité de la France pour la période 2012-2017,

1. Se félicite que, dans le contexte de récession auquel l’Union européenne et la zone euro doivent faire face depuis 2012, la Commission européenne considère que le principal défi est de créer les conditions propices à une accélération de la croissance économique et propose, compte tenu des efforts d’ajustement structurel engagés, d’adapter en conséquence le rythme de redressement des finances publiques ;

2. Rappelle que, en application du pacte de stabilité et de croissance révisé et du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, l’objectif de solde structurel constitue la référence au regard de laquelle doit s’apprécier le respect des engagements budgétaires ; souligne la nécessité que la politique de redressement des finances publiques garantisse le soutien à la croissance, préserve l’investissement, dont certaines dépenses devraient être exclues du calcul des déficits publics, et maintienne l’équité sociale ;

3. Note que la Commission européenne, dans son analyse de la situation économique de l’Union, accorde une attention accrue aux conséquences sociales des politiques économiques ; insiste pour qu’il soit davantage encore tenu compte de la dimension sociale à chacune des étapes du semestre européen conformément aux conclusions du Conseil européen des 13 et 14 décembre 2012 ; appelle à de nouvelles initiatives en Europe dans ce domaine ;

4. Réaffirme l’absolue nécessité d’une coordination plus étroite des politiques économiques, ayant pour objectifs un soutien à la demande intérieure dans les pays qui bénéficient de balances courantes excédentaires et un accroissement de la compétitivité dans les pays déficitaires ;

5. Invite la Commission européenne à veiller à ce que la formulation même des propositions de recommandations respecte la liberté souveraine d’appréciation des États concernés quant au calendrier et aux moyens à mettre en œuvre et favorise l’appropriation des réformes, en particulier lorsque celles-ci sont conduites dans le cadre du dialogue social ;

6. Prend acte, dans ce contexte, des propositions de recommandations de politique économique formulées par la Commission européenne à l’égard de la France ;

7. Souligne que le solde structurel français pour 2012 s’est amélioré de 1,2 point par rapport à 2011, conformément à l’évolution prévue dans la loi de programmation des finances publiques, pour s’établir en définitive à 3,9 % du produit intérieur brut (PIB) ; considère que, compte tenu des efforts d’ajustement structurel engagés et du contexte économique, la proposition de report à 2015 du délai de correction du déficit excessif est justifiée et conforme aux dispositions du pacte de stabilité et de croissance révisé ;

8. Estime que le délai qui devrait être accordé à la France pour ramener son déficit public en dessous de 3 % du PIB doit être mis à profit pour engager les réformes ambitieuses à même de permettre à la France de retrouver une trajectoire de croissance durable, soutenue en cela par une réorientation des politiques européennes favorable à l’investissement ;

9. Insiste sur la nécessité de procéder, dans un contexte économique et financier difficile, à un rééquilibrage de l’effort de redressement des finances publiques ; estime en outre que les économies à réaliser doivent être avant tout de nature structurelle et préserver le potentiel de croissance et les filets de sécurité sociaux ; appelle par ailleurs à amplifier le mouvement de réduction des niches fiscales et sociales, à renforcer la fiscalité écologique et à accélérer la lutte contre la fraude fiscale ;

10. Demande, en conséquence, au Gouvernement de préciser, dès le débat d’orientation des finances publiques, l’effort en dépenses et en recettes qu’il envisage pour l’année 2014, ainsi que le détail des mesures nouvelles qui en découlent ;

11. Rappelle que, conformément à la loi no 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, les éventuels surplus, constatés par rapport aux évaluations de la loi de finances ou de la loi de financement de la sécurité sociale de l’année, du produit des impositions de toutes natures établies au profit de l’État ou des cotisations et contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base et aux organismes concourant à leur financement sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit public ;

12. Se félicite que la Commission européenne soutienne, sur le principe, l’ensemble des grandes réformes engagées par le Gouvernement français depuis mai 2012 et celles en cours d’élaboration, notamment le pacte pour la compétitivité, la croissance et l’emploi, la réforme du marché du travail, la modernisation de l’action publique, la réforme des retraites, la réforme du financement de l’économie, la simplification et l’amélioration de l’environnement des entreprises, la transition écologique et énergétique, les actions en faveur de l’emploi des jeunes et la réforme de la formation professionnelle ; souligne la nécessité de poursuivre les efforts de compétitivité orientés vers la qualité et l’innovation ;

13. Appelle la Commission européenne à garantir un cadre favorable à la préservation et au financement des services d’intérêt économique général et à favoriser le développement en Europe de l’économie sociale et solidaire dont le potentiel en matière d’emplois, d’innovation sociale et de gouvernance démocratique devrait être valorisé ; souligne en tout état de cause que le libre établissement et la libre prestation de services dans le marché intérieur doivent respecter des conditions de concurrence équitables à même d’éviter le « dumping social » ; appelle dans ce cadre à une révision de la directive relative au détachement des travailleurs et de la directive relative au temps de travail ;

14. Invite la Commission européenne et le Conseil de l’Union, afin de lutter contre la planification fiscale agressive, à réviser la directive « sociétés mères et filiales » ainsi qu’à envisager toutes les options possibles pour parvenir rapidement à une harmonisation de l’assiette de l’impôt sur les sociétés ainsi que de leurs taux, y compris à travers la mise en œuvre d’une coopération renforcée.

ANNEXES

Annexe 1 : résolution no 95 de l’Assemblée nationale du 15 mars 2013 sur les orientations européennes de politique économique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur l’Union européenne, notamment son titre II relatif aux principes démocratiques,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en particulier le titre VIII de la troisième partie relatif à la politique économique et monétaire,

Vu le protocole no 1 sur le rôle des parlements nationaux dans l’Union européenne annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

Vu le règlement (CE) no 1466/97 du Conseil, du 7 juillet 1997, relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques,

Vu le règlement (UE) no 1176/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2011, sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques,

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil, du 23 novembre 2011, établissant des dispositions communes pour le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro (COM [2011] 821),

Vu le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, signé à Bruxelles le 2 mars 2012,

Vu la communication de la Commission européenne, du 28 novembre 2012, sur l’examen annuel de croissance 2013 (COM [2012] 750) et le projet de rapport conjoint sur l’emploi qui lui est annexé,

Vu le rapport de la Commission, du 28 novembre 2012, au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d’investissement sur l’état 2013 de l’intégration du marché unique (COM [2012] 752 final),

Vu le rapport de la Commission, du 28 novembre 2012, au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d’investissement sur le mécanisme d’alerte 2013 (COM [2012] 751),

Vu la communication de la Commission européenne, du 30 novembre 2012, « Projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie. Lancer un débat européen » (COM [2012] 777 final/2),

Vu les résolutions du Parlement européen, du 7 février 2013, sur le semestre européen pour la coordination des politiques économiques consacrées, d’une part, à l’examen annuel de la croissance 2013 et, d’autre part, à l’emploi et aux aspects sociaux dans le cadre de l’examen annuel de la croissance 2013,

1. S’inquiète de la dégradation générale des perspectives de croissance au sein de l’Union européenne mise en évidence par les prévisions économiques d’hiver de la Commission européenne le 22 février 2013 et appelle, pour éviter une récession généralisée, à une coordination plus étroite des politiques économiques ayant pour objectifs un soutien à la demande intérieure dans les pays qui bénéficient de comptes courants excédentaires et un accroissement de la compétitivité dans les pays déficitaires ; invite la Commission européenne à tenir compte de cet impératif dans la proposition qu’elle doit formuler sur la coordination préalable des grandes réformes de politique économique dans le cadre du semestre européen, notamment en privilégiant le respect d’objectifs de soldes structurels ;

2. Se félicite de l’effort d’ajustement structurel mené par la France, qui devrait s’élever à 4,1 points de produit intérieur brut (PIB) sur la période 2010–2013 et être réalisé à hauteur des deux tiers sur les exercices 2012 et 2013 ; souligne, à cet égard, que la Cour des comptes juge qu’un effort structurel de l’ampleur de celui mené en 2012, soit 1,4 point de PIB, n’avait plus été réalisé en France depuis 1996 et que celui prévu pour 2013, soit 1,9 point de PIB, est inédit ;

3. Estime que la France mène des réformes structurelles importantes et respecte ses objectifs d’amélioration du solde structurel, qui constitue la référence, prévue par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire précité, au regard de laquelle doit s’apprécier le respect des engagements budgétaires ; considère, par conséquent, que le report de l’effort d’ajustement nécessaire pour ramener le déficit public français en dessous de 3 % du PIB est justifié et conforme aux dispositions du pacte de stabilité et de croissance révisé ;

4. Appuie la proposition faite par la Commission européenne, dans sa communication, du 28 novembre 2012, précitée présentant un projet détaillé pour une Union économique et monétaire véritable et approfondie, d’étudier toutes les pistes susceptibles de mieux prendre en considération les programmes d’investissement productif dans le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance ;

5. Demande à la Commission européenne de mettre davantage en évidence, dans son examen annuel de croissance, l’articulation entre les actions menées au niveau européen et celles entreprises par les États membres ; suggère, par conséquent, que l’examen annuel de croissance comporte un rapport sur l’état d’avancement de la stratégie Europe 2020, un bilan de la mise en œuvre du pacte pour la croissance et l’emploi décidé lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012 et une analyse du rôle du budget de l’Union dans le processus du semestre européen qui mette en évidence ses effets multiplicateurs et complémentaires par rapport aux politiques et investissements développés aux échelons local, régional et national.

Annexe 2 : propositions de recommandations de la Commission européenne relatives aux programmes de stabilité et de réforme de la France

RECOMMANDE que la France s’attache, au cours de la période 2013-2014 :

1. à renforcer et poursuivre la stratégie budgétaire en 2013 ; à renforcer la crédibilité de l’ajustement en précisant, d’ici à l’automne 2013, et en mettant en œuvre les mesures nécessaires en 2014 et au-delà pour assurer la correction du déficit excessif de manière durable en 2015 au plus tard et la réalisation de l’effort d’ajustement structurel spécifié dans les recommandations émises par le Conseil dans le cadre de la PDE ; à consacrer toutes les recettes imprévues à la réduction du déficit ; une correction durable des déséquilibres budgétaires requiert la mise en œuvre crédible de réformes structurelles ambitieuses pour accroître la capacité d’ajustement et stimuler la croissance et l’emploi ; à maintenir le cap d’un assainissement budgétaire propice à la croissance et à renforcer encore l’efficacité des dépenses publiques, notamment en procédant comme prévu à un réexamen des postes de dépenses dans tous les sous-secteurs des administrations publiques ; à prendre, dans le cadre de la prochaine loi de décentralisation, des mesures destinées à améliorer les synergies et les économies entre les différents niveaux de l’administration, central, régional et local ; une fois le déficit excessif corrigé, à poursuivre l’effort d’ajustement structurel à un rythme approprié de manière à atteindre l’OMT d’ici à 2016 ; à prendre des mesures d’ici à la fin de l’année 2013 pour équilibrer durablement le système de retraite en 2020 au plus tard, par exemple en adaptant les règles d’indexation, en augmentant encore l’âge légal de départ à la retraite et la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein et en réexaminant les régimes spéciaux, tout en évitant une augmentation des cotisations sociales patronales, et à améliorer le rapport coût-efficacité des dépenses de santé, notamment dans les domaines des dépenses pharmaceutiques ;

2. à s’assurer que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi réduit bien du montant envisagé le coût du travail et qu’aucune autre mesure n’annulera ses effets ; à poursuivre la réduction du coût du travail, notamment en adoptant d’autres mesures pour réduire les cotisations sociales patronales ; à faire en sorte que le salaire minimum évolue d’une manière propice à la compétitivité et à la création d’emplois, compte tenu de l’existence de dispositifs de soutien des salaires et d’exonérations sociales ;

3. à prendre des mesures pour améliorer l’environnement des entreprises et à développer la capacité d’innovation et d’exportation des entreprises, notamment des PME et des entreprises de taille intermédiaire ; en particulier, à lancer l’initiative annoncée de simplification du cadre réglementaire, et à améliorer les conditions générales propices à l’innovation, en renforçant les transferts de technologie et l’exploitation commerciale des résultats de la recherche, notamment par une réorientation des pôles de compétitivité ;

4. à prendre des mesures pour renforcer la concurrence dans le secteur des services ; à éliminer les restrictions injustifiées à l’accès aux services professionnels et à leur exercice, notamment en ce qui concerne la forme juridique, la structure d’actionnariat, les quotas et les restrictions territoriales ; à prendre des mesures pour simplifier l’autorisation des ouvertures de commerces et supprimer l’interdiction de la vente à perte ; à mettre fin aux tarifs réglementés du gaz et de l’électricité pour les clients autres que les ménages et à renforcer la capacité d’interconnexion avec les pays voisins ; dans le secteur ferroviaire, à ouvrir le transport intérieur de passagers à la concurrence ;

5. à poursuivre les efforts de simplification du système fiscal et à améliorer son efficacité, tout en garantissant la continuité de la règle fiscale dans le temps ; à prendre des mesures pour supprimer les incitations fiscales favorisant l’endettement des entreprises ; à intensifier les efforts pour réduire et rationaliser les dépenses fiscales relatives à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés, tout en réduisant le taux de ces impôts ; à rapprocher les taux réduits du taux normal de TVA et à supprimer les taux réduits inefficaces ; à prendre des mesures supplémentaires déplaçant la charge fiscale sur le travail vers les taxes environnementales ou la consommation ;

6. à mettre en œuvre intégralement et sans délai l’accord interprofessionnel de janvier 2013, en concertation avec les partenaires sociaux ; à prendre des mesures supplémentaires pour lutter contre la segmentation du marché, notamment pour apporter une solution au cas des travailleurs intérimaires ; à lancer sans tarder une réforme du système d’indemnisation du chômage, en association avec les partenaires sociaux pour garantir la viabilité du système tout en faisant en sorte que celui-ci encourage de manière adéquate le retour à l’emploi ; à améliorer le taux d’emploi des travailleurs plus âgés et à stimuler leur participation au marché du travail ; à prendre des mesures spécifiques pour améliorer les perspectives d’emploi des chômeurs plus âgés, notamment par un accompagnement et une formation spécifiques ; à accroître la participation des adultes aux actions d’apprentissage tout au long de la vie, notamment des adultes les moins qualifiés et des chômeurs ; à faire en sorte que les services publics de l’emploi offrent effectivement un appui personnalisé aux chômeurs et que les politiques actives de l’emploi ciblent effectivement les plus défavorisés ; à prendre des mesures supplémentaires pour améliorer le passage de l’école au travail par l’intermédiaire, par exemple, d’une garantie pour la jeunesse et de la promotion de l’apprentissage.

Annexe 3 : tableau de bord utilisé par la Commission européenne dans le cadre de la procédure de déséquilibres macroéconomiques s’agissant de la France

 

Indicateurs

Seuils

Situation française 2011

Balance courante
en % du PIB, moyenne mobile sur 3 ans

seuils de + 6 %/- 4 %

– 1,6 %

Position extérieure nette
en % du PIB

seuil à – 35 %

– 15,9 %

Taux de change effectif réel
taux de croissance sur 3 ans

seuils à +/– 5 % pour les pays de la zone euro, +/– 11 % pour les pays hors zone euro

– 3,2 %

Parts de marché à l'exportation
en valeur, taux de croissance sur 5 ans

seuil à – 6 %

– 11,2 %

Coût unitaire nominal du travail
croissance sur 3 ans

seuil à 9 % pour les pays de la zone euro, 12 % pour les pays hors zone euro

– 6 %

Prix de l'immobilier
taux de croissance annuel

seuil à 6 %

3,8 %

Flux de crédit au secteur privé
en % du PIB

seuil à 15 %

4 %

Dette privée
en % du PIB

seuil à 160 %

160 %

Dette publique
en % du PIB

seuil à 60 %

86 %

Taux de chômage
moyenne mobile sur 3 ans

seuil à 10 %

9,6 %

Passif total du secteur financier
croissance annuelle

seuil à 16,5 %

7,3 %

Source : Commission européenne.

1 () La composition de cette Commission figure au verso de la présente page.

2  Résolution no 95 sur les orientations européennes de politique économique adoptée par l’Assemblée nationale le 15 mars 2013.

3  Rapport d’information no 742 fait au nom de la Commission des Affaires européennes sur les orientations européennes de politique économique par MM. Christophe Caresche et Michel Herbillon, La définition des orientations européennes de politique économique pour 2013, première étape du semestre européen, Assemblée nationale, XIVe législature, 26 février 2013.

4  L’examen annuel de croissance a pour objet de déterminer les priorités économiques et sociales de l’Union européenne pour 2013, en indiquant aux États membres et à l’Union la voie à suivre pour mener leurs politiques.

5  Le rapport annuel sur le mécanisme d’alerte a pour objet d’identifier, sur la base d’un tableau de bord de onze indicateurs macroéconomiques assortis de seuils d’alerte, les déséquilibres macroéconomiques au sein de l’Union européenne et de déterminer les États membres dont la situation doit, en conséquence, faire l’objet d’un examen approfondi, puis, le cas échéant, de mesures correctives, dans le cadre de la procédure de surveillance des déséquilibres macroéconomiques.

6  Belgique, Bulgarie, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, Hongrie, Italie, Malte, Pays-Bas, Royaume-Uni, Slovénie et Suède.

7  Conclusions du Conseil du 12 février 2013 concernant l’examen annuel de la croissance et le rapport sur le mécanisme d’alerte, conclusions du Conseil du 15 février 2013 sur l’éducation, conclusions du Conseil du 28 février 2013 sur les orientations politiques pour les politiques sociales et de l’emploi et conclusions du Conseil du 5 mars 2013 sur la qualité des dépenses publiques.

8  Chypre, placé sous programme d’ajustement macroéconomique depuis la mise en œuvre de son assistance financière, n’est plus concerné par la procédure de surveillance des déséquilibres macroéconomiques.

9  La Commission européenne relève ainsi une diminution du déficit des comptes courants, une convergence des coûts salariaux unitaires, une correction des prix excessifs de l’immobilier et une réduction de l’endettement du secteur privé.

10  Les documents présentés sont : une communication qui reprend les principales conclusions des analyses par pays effectuées par la Commission européenne et explique comment, sur cette base, elle propose de stimuler la croissance et la création d’emplois dans l’Union européenne ; vingt-quatre recommandations (une pour l’ensemble de la zone euro et une pour chaque État membre – à l’exception de la Grèce, de l’Irlande, du Portugal et de Chypre) qui contiennent des orientations de politique budgétaire, économique et sociale propres à chaque pays ; les analyses détaillées qui sous-tendent les recommandations, présentées dans vingt-neuf documents de travail des services de la Commission (un document pour la zone euro, un pour chaque État membre de l’Union et un pour la Croatie).

11  Règlement no 473/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro et règlement no 472/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au renforcement de la surveillance économique et budgétaire des États membres de la zone euro connaissant ou risquant de connaître de sérieuses difficultés du point de vue de leur stabilité financière.

12  La France dépasse le seuil d’alerte pour trois indicateurs : l’évolution des parts de marché à l’exportation sur cinq ans (– 11,2 % pour un seuil fixé à – 6 %), la dette publique (86 % du PIB pour un seuil fixé à 60 %) et la dette privée (160,4 % du PIB pour un seuil fixé à 160 %). S’agissant du premier indicateur, il convient de souligner que celui-ci est nette amélioration par rapport à l’exercice précédent, où il s’établissait à – 19,4 %. Par ailleurs, en ce qui concerne les deux derniers indicateurs, la France se situe nettement en-dessous de la moyenne européenne.

13  Majoration des cotisations patronales d’assurance-chômage pour les CDD inférieurs à 3 mois et exonération durant trois mois des cotisations patronales d’assurance-chômage.