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No 1398

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er octobre 2013

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

sur la proposition de directive relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente du tabac et de ses produits

ET PRÉSENTÉ

PAR Mme Chantal GUITTET

Députée

——

La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; Mmes Annick GIRARDIN, Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; MM. Christophe CARESCHE, Philip CORDERY, Mme Estelle GRELIER, M. André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mme Isabelle BRUNEAU, Mme Nathalie CHABANNE, M. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, M. Yves DANIEL, MM. Charles de LA VERPILLIÈRE, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sandrine DOUCET, M. William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, M. Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, M. Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Mme Axelle LEMAIRE, MM. Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Arnaud LEROY, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY.

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I. UNE LEGISLATION EUROPEENNE INADAPTEE AUX NOUVELLES DONNEES DU MARCHE DU TABAC 13

A. UNE LEGISLATION EUROPEENNE CADUQUE 13

1. Les dispositions de la directive 2001/37/CE : un outil de lutte contre le tabagisme qui doit évoluer 13

2. Le nouveau cadre juridique international : la convention-cadre pour la lutte anti-tabac de l’OMS 14

B. UN ÉTAT DES LIEUX PREOCCUPANT : UNE EVOLUTION DU MARCHE DES PRODUITS DU TABAC A PRENDRE EN COMPTE 16

1. Le tabagisme, un enjeu de santé qui reste de premier ordre 16

2. Les effets du tabac sur la santé des consommateurs 19

3. Un marché de plus en plus compétitif 20

a. Les cigarettes « slim » et les cigarettes aromatisées 20

b. Les cigarettes électroniques 20

C. UN MARCHÉ CONCURRENTIEL ET TRANSFRONTALIER 27

II. LA PROPOSITION DE REVISION DE DIRECTIVE : UN TEXTE RESTRICTIF QUI DIVISE LES ACTEURS 31

A. DE NOUVELLES DISPOSITIONS PLUS CIBLEES… 31

1. Une révision restrictive 31

2. Des dispositions qui visent toutes les étapes de la commercialisation du produit 32

a. Mesures relatives aux ingrédients des produits du tabac 32

b. Mesures relatives à l’étiquetage et au conditionnement 32

c. Mesures relatives à la traçabilité des produits 33

d. Mesures relatives à la vente à distance transfrontalière 34

e. Mesures relatives aux nouveaux produits du tabac 34

B. …QUI NE FONT PAS TOTALEMENT CONSENSUS 35

1. Les divergences au sein des institutions européennes 35

a. La question de la taille des avertissements combinés 35

b. L’interdiction de cigarettes « slim » 36

c. L’interdiction des arômes 36

d. La vente par internet 36

e. La classification des cigarettes électroniques en tant que médicament 36

2. Exemples de politiques publiques efficaces de lutte contre le tabagisme 37

a. La force des politiques publiques : le cas français 37

b. L’adoption des paquets neutres standardisés : l’innovation australienne 39

c. Les effets des politiques publiques de long terme : le cas canadien 41

III. UN TEXTE ENCORE PERFECTIBLE DANS SES EQUILIBRES ET SES PRECISIONS 42

A. MIEUX APPRÉHENDER LE CONTEXTE D’APPLICATION DE LA DIRECTIVE 42

1. Une proposition de directive qui n’a pas l’accord des industriels 42

2. Mieux encadrer la distribution des cigarettes électroniques 43

B. UN BESOIN D’EFFECTIVITÉ QUI FAIT DÉFAUT 44

1. Un suivi nécessaire de l’effectivité des dispositions pour contrer les mythes 44

a. Les mesures proposées dans cette proposition de directive n’auraient pas l’effet escompté 45

b. L’application de la proposition de directive ferait augmenter le commerce illicite du tabac 45

c. La proposition de directive nuirait à l’économie réelle de l’Union Européenne 45

2. La mise en place d’une forte politique de prevention 46

CONCLUSION 47

TRAVAUX DE LA COMMISSION 49

CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION 51

ANNEXES 55

ANNEXE NO 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE 57

ANNEXE NO 2 : PAQUETS SLIM 59

ANNEXE NO 3 : PAQUETS NEUTRES STANDARDISES 60

ANNEXE NO 4 : PAQUETS NEUTRES STANDARDISES EN AUSTRALIE 61

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Première cause de maladie et de mortalité prématurée évitable, le tabac tue environ 700 000 personnes par an dans l’Union Européenne.

La consommation des produits du tabac crée non seulement une dépendance mais provoque également des maladies, des décès et participe à des maux sociaux tels que la paupérisation.

Les risques liés au tabagisme constituent de très loin, avec 73 000 décès par an soit 200 morts par jour, la première cause de mortalité évitable en France. Le tabac est de loin la première cause de décès évitable, bien plus que l’alcool (environ 30 000 décès), les suicides (10 000 décès) et les accidents de la route (4 000 décès).

Le tabac est le seul produit de consommation légale qui devient mortel lorsqu’il est utilisé conformément aux préconisations du fabricant.

Malgré les effets nocifs de la consommation du tabac, connus du grand public, la cigarette, parmi d’autres produits du tabac, fait aujourd’hui partie de notre quotidien.

Ce phénomène social est la conséquence d’une histoire particulière. En 1560, le tabac arrive en France dans les poches d’un moine qui le rapporte du Brésil, mais aussi par le biais d’un diplomate en poste à Lisbonne, Jean Nicot. Le tabac (appelé « nicotiane » en l’honneur de son découvreur) est utilisé à la cour pour guérir toutes sortes de maux. Rapidement, on s’élève contre son usage : en Angleterre, dans les pays musulmans, en Russie où l’on risquait alors la peine de mort pour ce "vice" nouveau. En France, taxé par Richelieu, le tabac devient une source de revenu et, en 1674, Colbert instaure le monopole des ventes. Prisé ou chiqué, sa consommation se répand dans les milieux populaires comme chez les bourgeois.

C’est en 1825 que la cigarette arrive en France. Son succès est immense et sa production s’industrialise. À partir de 1840, l’industrialisation de la production divise les prix par dix, ce qui génère une consommation de masse. Après la Première Guerre mondiale, la cigarette devient un objet populaire et se répand dans toutes les classes sociales, notamment chez les femmes. On s’inquiète en parallèle des conséquences néfastes et, en 1868, apparaît l’Association française contre l’abus du tabac. Elle aura notamment pour membre Louis Pasteur.

Entre protection des consommateurs et libertés individuelles, les politiques publiques de lutte contre le tabac ont marqué une avancée sans précédent, avec la loi Veil du 9 juillet 1976, la loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme dite « loi Évin » et le décret no 2006-1386 du 15 novembre 2006 fixant les conditions d’application de l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif pour lutter contre le tabagisme passif.

Ces textes marquent une prise de conscience des dangers de la consommation excessive du tabac. Fumer n’est plus la « norme » comme l’indiquent les mentions « Fumer nuit gravement à votre santé et celle de votre entourage », « Fumer tue », ou autres, portées sur les paquets de cigarettes.

Le dispositif législatif français, et notamment la loi Évin, ont inspiré les politiques communautaires et permis par effet d’imitation le développement des initiatives internationales (cf. les directives sur l’étiquetage des produits de tabac de l’Union Européenne ou la convention cadre de lutte contre le tabagisme de l’OMS). Malgré ces avancées dans la réglementation de la production et de la commercialisation des produits du tabac, la consommation des produits du tabac reste conséquente. Les industriels du tabac contournent cette interdiction en élaborant des stratégies de marketing plus cachées mais non moins efficaces, et continuent d’alimenter les représentations positives de la cigarette en y associant des valeurs telles que la liberté, la séduction ou encore la transgression. Selon l’Institut National de Prévention et d’Éducation pour la Santé (INPES), chaque jour, 20 milliards de cigarettes sont fumées par 1,1 milliard de fumeurs. Face à un marché rentable, le chiffre d’affaire annuel des industries du tabac ne cesse d’augmenter. Les six principaux fabricants de tabac (Altadis, Gallaher, Philip Morris, British American Tobacco, Japon Tobacco International et Imperial Tobacco) se partagent 99 % du marché des cigarettes. Les bénéfices des quatre principales industries du tabac ont augmenté de 14 % depuis 2010 pour atteindre plus de 16,65 milliards de dollars en 20111.

En France, l’État ne détient plus d’intérêts dans les sociétés de tabac. Il est vrai que l’État a longtemps siégé au sein du conseil d’administration de la Société d’Exploitation Industrielle du Tabac et des Allumettes (Seita), qui détenait le monopole national de fabrication et de distribution des produits du tabac. La Seita a été privatisée en 1995 et l’État a cédé sa participation au capital de la société en octobre 2000.

La tabaculture française est aujourd’hui résiduelle, et la fabrication de produits du tabac n’est plus assurée en France que par quatre usines comptant environ 700 salariés, ce secteur industriel étant désormais complètement internationalisé. Le tabagisme est avant tout un problème de santé publique qui engendre une diminution de la qualité de vie, de la souffrance, et induit un coût extrêmement élevé à la collectivité. Évaluer les coûts du tabagisme n’est pas chose aisée, dès lors que des facteurs variés, en l’absence de données ou du fait de données partielles, viennent participer à la complexité du problème.

Les économistes distinguent les coûts directs, qui sont généralement les coûts liés aux soins du tabagisme, des coûts indirects, qui comptabilisent les journées de travail perdues et l’indemnisation des arrêts maladies.

La CNAMTS estime la part attribuable au tabac des dépenses de soins remboursées en 2010 par le régime général au titre de certaines affectations de longue durée (ALD) : cancers, maladies cardiovasculaires et respiratoires. Ces dépenses ont été évaluées à environ 5,6 milliards d’euros, soit plus de 3 % des dépenses en 2010. La prise en charge des cancers en représentait cette même année plus de 60 %, soit 3,4 milliards d’euros (dont 1,1 milliard d’euros pour les seuls cancers du poumon, de la trachée et des bronches), celle des pathologies cardio-vasculaires et respiratoires (hors asthme) respectivement 1,7 milliard d’euros et 0,5 milliard d’euros.

L’industrie du tabac ne génère pas de richesse réelle en tant que telle si ce n’est les taxes qu’elle rapporte à l’État. Pour autant, même en prenant en compte les taxes (13 milliards d’euros) ainsi que les retraites non versées du fait des décès prématurés (environ 5 milliards), le coût net du tabagisme en 2005 représentait en France plus de 47 milliards d’euros soit 3 % du PIB. En définitive, le tabac coûte l’équivalent d’un impôt indirect annuel de 772 euros à chaque citoyen.2 Ces chiffres démontrent clairement une contradiction entre les enjeux économiques et de santé publique.

COÛT GLOBAL DU TABAGISME POUR LA SOCIÉTÉ (2006)

Type de dépense

Montant (en millions d’euros)

Sphère publique

Dépense de santé

- dont soins hospitaliers

- dont soins de ville

18 254

8 732

9 522

Dépenses de prévention

2,82

Fiscalité

3 737,8

Incendies

1,78

Sphère privée

 

Particuliers

7 658

Entreprises

18 085

Total

47 739

Source : OFDT, 2006.

DÉPENSES DE SOINS REMBOURSÉS DE LA DERNIÈRE ANNÉE DE VIE POUR LES PRINCIPALES MALADIES LIÉES AU TABAC,
FRANCE

 

Hommes

Femmes

Total nombre de décès liés au tabac

Coût moyen dernière année de vie (en euros)

Coût total (en millions d’euros)

Causes de décès

Nombre de décès liés au tabac

Fraction attribuable au tabac

(en  %)

Nombre de décès liés au tabac

Fraction attribuable au tabac

(en  %)

Cavité buccale

823

63

70

17

893

35 600

32

Pharynx

1 589

76

136

73

1 725

35 600

61

Oesophage

1 594

51

242

48

1 836

39 300

72

Larynx

963

76

98

75

1 061

33 300

35

Rachée, bronches, poumons

18 290

83

4 355

81

22 644

35 260

798

Foie

2 096

38

329

33

2 426

28 000

68

Pancréas

1 065

25

681

21

1 745

38 000

66

Estomac

945

31

240

25

1 185

35 000

41

Reins

639

26

156

21

795

38000

30

Col de l’utérus

   

355

23

355

37700

13

Vessie

1 879

73

446

51

2 325

35000

81

Tous cancers*

29 883

34

7 107

12

36 991

 

1 300

Maladies cardio-vasculaires

10 500

14

1400

2

11 900

25000

298

Maladies de l’appareil respiratoire

8 300

37

2 200

10

10 500

28500

299

Aures

8 300

9

1 300

3

9 600

24000

230

Total

56 983

21

12 008

3

68 991

 

2 127

Source : CNAMTS.

* Cancer données 2000 actualisées pour 2006. Autres maladies, données 2000.

D’après C. Hill, Laplanche A., Tabagisme et mortalité : aspects épidémiologique. BEH 22-23, 2003 ; C. Hill, Doyon F., Mousannif A., Évolution de la mortalité par cancer en France de 1950 à 2006. Institut de veille sanitaire, mai 2009.

** Données 2008.

Enjeu majeur de santé publique, la lutte contre le tabagisme est nécessaire pour le respect fondamental du droit à la meilleure santé possible pour notre génération mais également pour les générations futures. À cette fin, les autorités publiques se doivent de protéger la population des effets sanitaires, sociaux et économiques nocifs de la consommation du tabac et de l’exposition à la fumée du tabac.

Le tabagisme est aujourd’hui considéré par les instances internationales telles que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) comme une épidémie généralisée favorisée par des phénomènes complexes et transfrontaliers tels que la suppression des barrières douanières, l’internationalisation des échanges commerciaux et des campagnes publicitaires, l’augmentation des investissements directs étrangers ou encore le mouvement international des cigarettes de contrebande.

Dès la fin des années 1980, l’Union Européenne s’est mobilisée pour contrer cette épidémie. Une première directive a été adoptée le 13 novembre 1989, la directive 89/622/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière d’étiquetage des produits du tabac ainsi que l’interdiction de certains tabacs à usage oral.

Cette directive a ensuite été amendée plusieurs fois à la suite de l’évolution du marché international du tabac et des progrès scientifiques. La directive 90/239/CEE du Conseil du 17 mai 1990 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant la teneur maximale en goudron des cigarettes avait également encadré la fabrication des cigarettes afin de lutter contre les effets du tabagisme. Ces directives ont toutes été abrogées à la suite de l’adoption de la directive 2001/37/CE qui constitue l’actuelle législation sur les produits du tabac.

L’adoption de cette directive a été le résultat de plusieurs années de lobbyisme de la part des associations anti-tabac, afin que la protection des consommateurs soit prise en compte et qu’une plus grande régulation du marché des produits du tabac soit mise en œuvre.

La révision de cette directive fait actuellement l’objet de plusieurs polémiques au sein même des institutions européennes. Après la démission en octobre 2012 du Commissaire européen de la Santé, M. John Dalli, favorable à une révision de la directive et accusé de corruption, le vote au Parlement Européen prévu pour le 10 septembre dernier a été reporté pour le 9 octobre 2013. Cette directive représente pour les industries concernées un cheval de bataille afin de préserver leurs intérêts économiques.

Votre rapporteure aimerait rappeler que les enjeux économiques de cette directive n’équivalent en rien les enjeux de santé publique qu’elle recouvre pour tous les citoyens de l’Union Européenne. C’est pourquoi il est nécessaire aujourd’hui que cette directive soit révisée afin qu’elle prenne en compte les dernières évolutions du contexte économique, scientifique et juridique.

I. UNE LEGISLATION EUROPEENNE INADAPTEE AUX NOUVELLES DONNEES DU MARCHE DU TABAC

À l’issue des auditions auxquelles elle a procédé, marquées par le souci de rencontrer la diversité des professionnels concernés par la révision de la directive « tabac », votre rapporteure a acquis la conviction que la présente révision constitue un avancement notable pour la lutte contre le tabagisme. Cependant, au vu de la complexité du marché international des produits du tabac, des rapports de force entre les professionnels et des enjeux extrêmement importants de santé publique, la rapporteure estime que les mesures de cette révision ne sont pas suffisantes à elles seules pour parvenir à une lutte efficace contre le tabagisme.

A. UNE LEGISLATION EUROPEENNE CADUQUE

La législation européenne actuelle relative au rapprochement des dispositions législatives, règlementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente du tabac et de ses produits est régie par la directive 2001/37/CE. Or, cette directive doit aujourd’hui être révisée afin d’être adaptée aux évolutions du marché, aux progrès scientifiques et aux normes internationales.

1. Les dispositions de la directive 2001/37/CE : un outil de lutte contre le tabagisme qui doit évoluer

Lors de l’adoption de la directive 2001/37/CE en juin 2001, la Commission évoquait le nombre de 500 000 décès évitables. Aujourd’hui, le tabagisme est toujours la première cause de décès évitable tuant plus de 700 000 personnes chaque année en Europe.

La directive 2001/37/CE a été conçue comme un outil de lutte efficace contre le tabagisme. L’adoption de cette directive a été le résultat d’une persévérance de longue date des associations européennes luttant contre les effets du tabagisme. Cette dernière introduit une harmonisation des réglementations au sujet de la production, de la présentation et de la vente des produits du tabac, à savoir les cigarettes, le tabac à rouler, le tabac pour pipe, les cigares, les cigarillos et d’autres formes de tabac sans combustion telles que le tabac à priser, le tabac à chiquer et le snus (poudre de tabac humide).

L’Union Européenne avait déjà appréhendé le problème avec les directives 89/622/CEE du 13 novembre 1989 et 90/239/CEE mais les divergences entre les dispositions législatives, réglementaires et administratives faisaient encore obstacle au bon fonctionnement du marché intérieur.

La directive de 2001 limite la teneur maximale des cigarettes en goudron, monoxyde de carbone et nicotine. Les cigarettes fabriquées mises en libre circulation, commercialisées ou fabriquées dans les États membres ne peuvent donc avoir des teneurs supérieures à 10 mg de goudron par cigarette, 1 mg de nicotine par cigarette et 10 mg de monoxyde de carbone par cigarette.

Dès lors, les cigarettiers sont obligés de mentionner aux États membres les ingrédients utilisés dans leurs produits ainsi que leurs fonctions dans la fabrication des cigarettes. Chaque ingrédient est également accompagné de données toxicologiques et de leurs effets sur la santé des consommateurs.

La directive impose également l’obligation d’apposition d’avertissements relatifs à la santé sur l’emballage des produits du tabac composés de textes et d’une image. L’avertissement général exigé doit couvrir au moins 30 % de la superficie externe de la surface correspondante de l’unité de conditionnement sur laquelle il est imprimé et l’avertissement complémentaire 40 % de la partie externe de la surface correspondante de l’unité de conditionnement sur laquelle il est imprimé. Ce pourcentage peut varier jusqu’à 50 % et 35 % pour la surface externe pour les États membres qui détiennent trois langues officielles. Les textes des avertissements sont tous imprimés avec la même police et selon des indications très précises. Un ensemble commun d’images de mise en garde a également été validé. Les États membres doivent choisir parmi ces images pour les apposer sur les emballages. À titre d’information, cette mesure n’a été appliquée en France qu’à partir du 20 avril 2011 pour les cigarettes et du 20 avril 2012 pour les autres produits du tabac.

Enfin, la directive précise qu’il est interdit « d’utiliser sur l’emballage des produits du tabac, des textes, dénominations, marques et signes figuratifs ou autres indiquant qu’un produit du tabac particulier est moins nocif que les autres. » Des indications telles que « légères » sont donc proscrites.

La directive actuelle a été attaquée en justice par les producteurs de tabac mais les tribunaux ont maintenu la validité de ses dispositions.

En vertu de son article 11, cette directive était appelée à être modifiée « en vue de son adaptation aux évolutions intervenues dans le domaine des produits du tabac, dans la mesure où cela s’avère nécessaire pour l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur, et compte tenu de toute nouvelle évolution basée sur des faits scientifiques et des évolutions quant aux normes agrées sur le plan international pour les produits. »

2. Le nouveau cadre juridique international : la convention-cadre pour la lutte anti-tabac de l’OMS

Depuis l’adoption de la directive 2001/37/CE, le cadre juridique international en matière de produits du tabac a évolué, rendant cette dernière caduque. La convention cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac (CCLAT), adoptée à l’unanimité par les membres de l’OMS le 21 mai 2003, constitue le premier traité multilatéral correspondant à un objectif de santé publique. La France a été le premier État européen à le ratifier en octobre 2004. On compte aujourd’hui 176 signataires dont la France et l’Union Européenne, pour lesquelles l’entrée en vigueur date respectivement du 27 février 2005 et du 28 septembre 2005.

Premier traité négocié sous les auspices de l’OMS, il réaffirme le droit fondamental de tous les peuples au niveau de santé le plus élevé. Face à la mondialisation de l’épidémie du tabagisme, l’OMS a voulu réagir fortement afin de limiter les effets nocifs des produits du tabac. Cette convention-cadre représente une avancée majeure dans la stratégie de lutte contre le tabagisme puisqu’elle vise à réglementer les substances qui engendrent une dépendance. Contrairement aux autres traités de lutte contre la drogue, ce dernier dispose d’une stratégie de lutte pour réduire tant la demande que l’offre des produits du tabac.

Pour réduire la demande des produits du tabac, la convention-cadre dispose de :

- mesures financières et fiscales : les États parties à la convention-cadre doivent mettre en œuvre des politiques fiscales et des politiques de prix concernant les produits du tabac en vue de réduire la demande. Ils doivent également interdire ou restreindre la vente aux voyageurs internationaux et/ou l’importation par eux de produits du tabac en franchise de droits et de taxes. Les mesures financières et fiscales visent particulièrement les populations jeunes.

- mesures autres que financières : les États parties à la convention-cadre doivent appliquer et adopter des mesures législatives, exécutives, administratives et/ou autres mesures efficaces pour assurer une protection contre l’exposition à la fumée du tabac dans les lieux de travail intérieurs, les transports publics, les lieux publics intérieurs ou le cas échéant d’autres lieux publics.

Les États parties doivent également réglementer la composition des produits du tabac en les soumettant à des tests et à des analyses scientifiques. Les fabricants et les importateurs des produits du tabac doivent transmettre aux autorités gouvernementales les informations relatives à la composition et aux émissions des produits du tabac. Les autorités, quant à elles, doivent informer le public des constituants toxiques des produits du tabac et des émissions qu’ils sont susceptibles de produire.

En ce qui concerne l’étiquetage et le conditionnement des produits du tabac, ceux-ci « ne doivent pas contribuer à la promotion d’un produit du tabac par des moyens fallacieux, tendancieux ou trompeurs, ou susceptibles de donner une impression erronée quant aux caractéristiques, effets sur la santé, risques ou émissions du produit, y compris des termes, descriptifs, marques commerciales, signes figuratifs ou autres qui donnent directement ou indirectement l’impression erronée qu’un produit du tabac particulier est moins nocif que d’autres, comme par exemple, des termes tels que « à faible teneur en goudrons », « légère », « ultra-légère » ou « douce ».3

Le conditionnement doit porter des mises en garde sanitaires décrivant les effets nocifs de la consommation du tabac. Ces mises en garde doivent être de grandes dimensions et couvrir 50 % ou plus des faces principales mais pas moins de 30 %.

La convention-cadre invite les États parties à adopter des politiques de prévention à l’égard de la population. Les États parties doivent également interdire voire restreindre le cas échéant la publicité, la promotion et le parrainage des produits du tabac.

Pour réduire l’offre des produits du tabac, les États parties doivent :

- lutter contre le commerce illicite des produits du tabac et assurer un système de traçabilité ;

- interdire la vente aux mineurs et par les mineurs ;

- fournir un appui à des activités de remplacement économiquement viables.

Face à ce nouveau cadre juridique contraignant pour les parties signataires, la directive 2001/37/CE devait être révisée à la lumière des nouvelles obligations de l’Union Européenne.

B. UN ÉTAT DES LIEUX PREOCCUPANT : UNE EVOLUTION DU MARCHE DES PRODUITS DU TABAC A PRENDRE EN COMPTE

Depuis 2001, le marché des produits du tabac mais également l’épidémie du tabagisme ont connu des évolutions majeures face auxquelles l’Union Européenne se doit de réagir.

1. Le tabagisme, un enjeu de santé qui reste de premier ordre

Les politiques publiques de l’Union Européenne en matière de lutte contre le tabagisme durant ces douze dernières années ont porté leurs fruits puisque le nombre de fumeurs est passé de 40 % (dans l’Union Européenne des 15) à 28 % (dans l’Union Européenne des 27) en 2012. Cependant, le taux de prévalence chez les jeunes (de 15 à 25 ans) en Europe, qui s’élève à 29 %, est supérieur à celui de la population générale.

Malgré cette évolution, le tabagisme reste la principale cause de maladie et de mortalité prématurée évitable, tuant 700 000 personnes chaque année dans les pays de l’Union, c’est-à-dire plus que les six autres causes de mortalité réunies (accidents de la route, drogues illicites, suicides, meurtres, SIDA et accidents de travail).

Selon l’OMS, malgré une baisse de la consommation du tabac dans la majorité des États membres entre 2001 et 2005, le taux de prévalence du tabagisme est reparti à la hausse chez les garçons dans 14 pays et chez les filles dans 9 pays.

Or, selon l’Eurobaromètre 2012, 70 % des fumeurs commencent à fumer avant d’avoir 18 ans et 94 % d’entre eux commencent avant d’avoir 25 ans. Selon l’enquête ESPAD4 2011, la France se situe au 6ème rang des pays avec le plus fort taux de prévalence chez les jeunes après les pays de l’Europe de l’Est. En 2007, la France n’était qu’au 17e rang. Or, c’est en commençant jeune à consommer du tabac que le risque d’addiction est le plus fort.

C’est pourquoi la Commission Européenne a voulu, dans cette directive, prendre des mesures spécifiques qui ciblent l’entrée des jeunes dans le tabagisme afin de limiter au maximum ce phénomène et favoriser la baisse de leur consommation.

Taux de prévalence chez les jeunes âgés de 16 ans en Europe.

Source : Enquête European School Survey Project on Alcohol and other Drugs (ESPAD) 2011.

L’augmentation de la prévalence chez les femmes en Europe est impressionnante. On dénote aujourd’hui quatre fois plus de cancers du poumon chez les femmes de moins de 45 ans dû à l’augmentation de consommation du tabac. La mortalité chez les femmes est en constante augmentation alors que celle-ci est en baisse chez les hommes.

Source : OCDE et Eurostat, Haut conseil de la santé publique (mars 2012).

Selon l’OMS, sur le milliard de fumeurs dans le monde, près de deux cent millions sont des femmes. Les femmes sont moins nombreuses à fumer mais l’épidémie du tabagisme est en nette augmentation chez celles-ci. Les filles commencent à fumer pour des raisons différentes que les hommes, l’OMS estimant que nombre d’entre elles commencent à fumer avec l’idée fausse que le tabac les aide à rester mince. Les femmes sont l’une des principales cibles des industries du tabac et font l’objet de campagnes de publicité agressives dans certains pays puisque bon nombre d’entre elles ne fument pas encore mais ont les moyens de le faire. Elles sont ainsi plus nombreuses à consommer des cigarettes légères croyant que les effets sur leur santé seront moindres.

2. Les effets du tabac sur la santé des consommateurs

Selon l’Institut National de Prévention et d’Éducation pour la Santé (INPES), la nicotine a des effets psychoactifs mais également de dépendance. Si la nicotine est l’élément actif qui crée les effets de dépendance sur les consommateurs, ce n’est pas l’élément le plus dangereux. Ce sont les 4 000 composants chimiques qui accompagnent la nicotine qui ont des effets dévastateurs.

• La nicotine a des effets sur les récepteurs des neurones et dégage une sensation plaisante qui est associée par le fumeur à un moyen de gestion du stress ou de mieux-être.

• Les goudrons, mélanges de particules solides formées par la combustion du tabac, jouent un rôle prépondérant dans l’apparition des cancers liés au tabagisme et ont un effet sur les tissus et les muqueuses.

• Le monoxyde de carbone est un gaz toxique formé par la combustion incomplète du carbone. Ce dernier se fixe sur l’hémoglobine à la place de l’oxygène, et entraîne un faible taux d’oxygène dans le sang ; ingérer du monoxyde de carbone augmente donc les risques pour le cœur et les vaisseaux.

• Les additifs quant à eux sont variés et leurs compositions sont souvent gardées secrètes par les industriels du tabac. Les additifs augmentent les effets de dépendance chez les jeunes fumeurs mais également les effets toxiques. Le génol et le menthol, par exemple, ont des effets adoucissants sur les voies respiratoires et masquent les effets irritants de la fumée. Le cacao permettrait de dilater les voies respiratoires pour permettre l’accès de la fumée aux poumons.

3. Un marché de plus en plus compétitif

a. Les cigarettes « slim » et les cigarettes aromatisées

Le marché des produits du tabac n’est plus le même qu’il y a douze ans. Ces dernières années, de nouvelles formes de produits sont apparues tels que les cigarettes « slim », les cigarettes aromatisées ou encore les cigarettes électroniques.

Les cigarettes fines ou cigarettes « slim » font référence aux cigarettes d’un diamètre inférieur à 7,5 mm. Ce nouveau type de cigarette a fait son apparition en même temps que les nouveaux paquets « slim »5 ou en forme de rouge à lèvres. Ces cigarettes attirent principalement les femmes et les jeunes filles qui pensent qu’elles auront moins d’effets nocifs sur leur santé. Or, ce genre de cigarettes contient exactement les mêmes ingrédients que les cigarettes classiques. Les effets sur la santé sont donc totalement identiques.

Le marché des cigarettes aromatisées de son côté, a connu une évolution explosive ces dernières années. L’utilisation d’arômes et d’additifs inciteraient les jeunes à consommer. Il existe des centaines d’arômes (menthe, fruits rouges, …). Ces arômes adoucissent le goût à la bouche des cigarettes, facilitent l’inhalation notamment pour les jeunes qui commencent tout juste à fumer. Les jeunes sont très friands des cigarettes aromatisées.

b. Les cigarettes électroniques

Les cigarettes électroniques connaissent un succès sans précédent depuis quelques années partout dans le monde. Le terme de « cigarette électronique » ou « e-cigarette » désigne un produit fonctionnant à l’électricité sans combustion, destiné à simuler l’acte de fumer. Il produit une vapeur qui ressemble visuellement à la fumée de la combustion du tabac.

Le premier prototype de cigarette électronique, qui date de 1963, est conçu par l’inventeur Herbert A. Gilbert, qui en a déposé le brevet, mais la technologie de l’époque n’est pas suffisamment avancée pour permettre sa concrétisation. Ce n’est qu’en 2003 que M. Hon Lik, pharmacien chinois, conçoit un nouveau système pour simuler l’action de fumer en émettant une vapeur nicotinique mais pas de fumée. Un an plus tard, la cigarette électronique est mise sur le marché chinois. Depuis, plusieurs versions de cette invention ont été créées, ce qui explique qu’il n’y a pas une « cigarette électronique », stricto sensu, mais des « cigarettes électroniques ». La proposition de révision de directive de la Commission Européenne a choisi d’utiliser le terme de « produits contenant de la nicotine autres que les produits du tabac » (PCN) pour désigner les cigarettes électroniques.

Selon le rapport de l’Office Français Contre le Tabagisme6, une cigarette électronique comporte trois parties distinctes contenues dans une enveloppe plastique ou métallique :

- une pile ;

- une cartouche qui stocke l’e-liquide ;

- un microprocesseur ou atomiseur.

En inspirant, l’utilisateur déclenche le processus. La pile ou la batterie allume la diode bleue ou rouge et chauffe instantanément le filament du microprocesseur. La température du filament monte de 50 à 200 et transforme en gaz l’« e-liquide » absorbé sur les fils de textile. La diode s’allume quelques secondes sous l’impulsion électrique reçue de la pile. Le gaz formé par l’atomiseur se refroidit et forme de très fines gouttelettes qui constituent le brouillard, ou « vapeur », simulant la fumée d’une cigarette. La vapeur produite est inhalée par le consommateur. Le brouillard de fines particules émis par les « e-cigarettes » a donné naissance au terme « vapoter ».


Description : http://www.davidas.fr/blog/wp-content/uploads/2013/03/Anatomie-de-la-cigarette-%C3%A9lectronique.jpg

Source : www.davidas.fr.

Le terme de « cigarette électronique » désigne des produits variés. Certaines d’entre elles ne contiennent ni de microprocesseur ni d’éléments électroniques. Le principe de fonctionnement est simple : une pile ou une batterie alimente ou non une résistance et éventuellement une lampe diode Qu’elles soient jetables ou rechargeables, elles comprennent toujours des flacons d’« e-liquides » qui contiennent du propylène glycol ou du glycérol, divers arômes et, éventuellement, de la nicotine. On trouve ainsi des cigarettes électroniques avec ou sans nicotine.

Les cigarettes électroniques ne contenant ni nicotine ni tabac ne sont pas des produits du tabac mais elles ont une forme voisine de celle de la cigarette et leur utilisation est similaire à l’acte de fumer. Certains pays ont choisi de les considérer comme « produits évoquant le tabagisme » (PET).

En France, la quasi-totalité des cigarettes électroniques sont importées, le matériel étant principalement fabriqué en Chine, même si certains vendeurs cherchent à maitriser la production et, ainsi, à augmenter leurs marges. Les marges réalisées sur ces produits par les vendeurs sont, en outre, déjà très élevées (de l’ordre de 50 %). Aussi le marché est-il en pleine expansion.

Ø Données chiffrées

Le nombre de magasins spécialisés en France ne cesse de croitre. On trouve plus de 300 boutiques dédiées (deux marques de distribution ont un important réseau : « Clopinette » et « Cigavette »), qui répondent à une forte demande, principalement exprimées par des fumeurs à la recherche de nouvelles expériences ou de substituts nicotiniques. Selon l’Eurobaromètre de mai 2012, 6 % des français déclarent avoir déjà utilisé la cigarette électronique et 1 % en faire usage régulièrement. Ainsi 500 000 français « vapotent » quotidiennement.

Selon une étude de l’Office français de protection du tabagisme (OFT)7, le taux d’expérimentation chez les collégiens et les lycéens a presque doublé entre 2012 et 2013, passant de 8,1 % à 18,3 %. Toutefois, cette expérimentation concerne principalement des jeunes ayant déjà consommé du tabac. En 2013, seul 1,6 % des jeunes qui déclarent avoir expérimenté un produit du tabac précisent que la cigarette électronique a été le premier produit consommé.

Selon l’OFT, aucune étude ne démontre à l’heure actuelle qu’il existerait une entrée en dépendance nicotinique par la cigarette électronique. Si le pouvoir addictif de l’« e-cigarette » chez les non-fumeurs n’est pas démontré, le scénario d’une entrée en dépendance nicotinique par la cigarette électronique ne saurait être exclu, au regard de l’expérience du « snus »8 en Suède.

Le succès fulgurant de la cigarette électronique s’explique en raison de son faible coût, sa consommation coûtant deux fois moins cher que la cigarette classique (le prix d’achat de l’appareil varie de 40 à 250 euros, une recharge coûte 6 euros environ les 10 ml ce qui correspond au « vapotage » de 3 paquets de cigarettes)9. Par ailleurs, la vente des e-cigarettes dans des boutiques spécialisées au design étudié n’est pas sans lien avec l’effet de mode que constitue la cigarette électronique (modèle marketing type « Nespresso »). L’« e-cigarette » répond à une volonté de certains fumeurs de diminuer leur consommation tout en conservant le plaisir lié à l’acte en lui-même et le sentiment d’appartenance à une communauté de fumeurs. Enfin, il n’est pas non plus à exclure que l’interdiction de fumer dans les lieux publics10 ait constitué un facteur incitatif à l’achat de ce produit.

Ø Les risques liés à la cigarette électronique

La cigarette électronique étant un produit relativement nouveau, il n’existe pas aujourd’hui de données fiables concernant ses effets à long terme.

Les études existantes soulignent que si la cigarette électronique n’est pas un produit inoffensif, son degré de toxicité demeure moins important que celui d’une cigarette traditionnelle tant pour le fumeur que pour le consommateur passif11. En effet, si la consommation de cigarette électronique peut induire une dépendance chez le fumeur, dans la mesure où elle contient de la nicotine12, le taux de nicotine présent dans les cigarettes électroniques est en moyenne deux fois inférieur à la norme admise pour le tabac (20 mg contre 10 mg pour les « e-cigarettes »). Néanmoins, il arrive parfois que la quantité de nicotine présente dans les solutions d’« e-liquides » soit bien supérieure à cette moyenne, sans toutefois que cela ne soit clairement indiqué sur l’emballage.

Les « e-cigarettes » contiennent, par ailleurs, des solvants notamment du propylène glycol qui peuvent s’avérer nocif pour certains consommateurs. Ce dernier produit est, en effet, connu pour être irritant lorsqu’il est inhalé. Enfin, les effets de l’inhalation après chauffe des nombreux produits chimiques, arômes et exhausteurs de goûts, présents dans les cigarettes électroniques demeurent inconnus.

Dans ces conditions, il apparait normal que l’OMS conserve une position ferme à l’égard des cigarettes électroniques.

Dans un avis publié en juillet 2013, elle rappelle que « tant que les systèmes électroniques délivrant de la nicotine ne sont pas considérés comme sans danger, efficaces et de qualité par un organe compétent de régulation national, les consommateurs ne devraient pas utiliser ces produits, y compris les cigarettes électroniques ». À l’heure actuelle, l’OMS ne considère pas la cigarette électronique comme une thérapie appropriée de remplacement de la nicotine.

Ø Règlementation applicable en France et dans le monde

Plusieurs pays du monde ont banni la cigarette électronique parmi lesquels le Bhoutan (qui a interdit le tabac), l’Afrique du Sud, l’Arabie saoudite, l’Argentine, l’Australie, le Brésil, la Colombie, Hong Kong, l’Islande, Israël, le Mexique, le Panama, le Qatar, Singapour, la Suisse, la Thaïlande, l’Uruguay et le Venezuela. Elle est en revanche autorisée aux États-Unis et au Japon, ces pays disposant d’une réglementation spécifique.

En Europe, les réglementations diffèrent d’un pays à l’autre sans qu’aucun des pays de l’Union européenne ne dispose réellement d’une politique claire et argumentée. Les options choisies sont les suivantes :

Ø Absence de réglementation spécifique (Allemagne, Italie, Espagne). L’« e-cigarette » est considérée comme un produit de consommation courante. Il n’y a pas de restriction à la vente ou aux importations de ce produit.

Ø Définition en tant que médicament (Royaume-Uni, Autriche, Hongrie, Portugal, Roumanie, Suède). La mise sur le marché est soumise à une autorisation de mise sur le marché.

Ø Assimilation comme produit du tabac : commercialisation interdite (Belgique), commercialisation interdite des cartouches avec nicotine sur le territoire national mais importations autorisées (Finlande), interdiction de « vapoter » dans les endroits où il est interdit de fumer (Luxembourg, Malte et Slovénie), publicité interdite (Pays Bas).

Ø Interdiction  (Grèce, Lituanie).

Malte est, en Europe, le pays ayant la réglementation la plus élaborée.

Si longtemps la France n’a pas clairement tranché entre produit de consommation courante et dispositif médical, elle tend aujourd’hui à assimiler la cigarette électronique à un produit du tabac devant disposer d’une réglementation spécifique.

A l’heure actuelle, la règlementation applicable aux « e-cigarettes » dépend de l’objectif revendiqué et de la concentration en nicotine des cartouches.

Selon l’Afssaps, les cigarettes électroniques répondent à la réglementation du médicament si elles revendiquent l’aide au sevrage tabagique, si la quantité de nicotine est supérieure ou égale à 10 mg ou si la concentration de nicotine présente de la recharge d’e-liquide est supérieure ou égale à 20 mg/ml. À ce jour, aucun fabriquant n’a déposé de demande en vue de l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché en tant que médicament.

En tout état de cause, en l’état actuel de la législation, aucune cigarette électronique ne pourrait être vendue en pharmacie dans la mesure où elles ne sont pas inscrites sur la liste fixée par arrêté des produits dont les pharmaciens peuvent faire le commerce.

Les « e-cigarettes » ou solutions de recharge qui n’entrent pas dans les critères définis par l’Afssaps sont donc considérées comme des produits de consommation courante. Dès lors, elles répondent à des obligations générales de sécurité définies par le code de la consommation et sont taxées comme tous les produits de consommation courante (TVA à 19,6 %). Aucune restriction n’est imposée à leur vente ou à leur importation.

La définition des « e-cigarettes » en tant que produit de consommation courante étant inadaptée au vu du caractère potentiellement nocif de ce produit, les autorités ont pris, ces derniers mois, plusieurs mesures afin de bâtir un cadre réglementaire idoine. En ce sens, l’assemblée nationale a voté, le 27 juin dernier, l’interdiction de publicité et de vente aux mineurs des « e-cigarettes ».

L’interdiction de fumer dans les lieux publics pourrait être étendue aux « vapoteurs » dès l’an prochain, suivant le souhait de la ministre des affaires sociales et de la santé13. D’ores et déjà, certaines entreprises ont banni l’usage de la cigarette électronique comme la RATP (la SNCF le tolère)14. L’association internationale du transport aérien (IATA) a pris des recommandations afin que l’« e-cigarette » soit interdite à bord des avions, ces dispositifs incitant à fumer et étant susceptibles de créer des incidents entre passagers (il ne s’agit donc pas de raisons sanitaires).

La directive de 2001 sur les produits du tabac ne comportait aucune disposition relative aux cigarettes électroniques. La diversité des règlementations actuellement en vigueur en Europe et l’absence de tout cadre légal au niveau communautaire ont conduit la Commission à proposer l’instauration d’un cadre règlementaire commun dans sa nouvelle directive sur les produits du tabac (article 18).

Dans cette directive, la Commission propose une double approche pour la réglementation des produits contenant de la nicotine (PCN) : les PCN au-delà d’un certain seuil (2 mg ou 4 mg/m) devront obligatoirement être autorisés comme médicaments, alors que ceux qui ne dépassent pas ce seuil pourront être commercialisés moyennant l’apposition d’avertissements sanitaires. Vu les taux limites de nicotine proposés, le texte de la Commission reviendrait au passage à mettre sous règlement pharmaceutique presque toutes les « e-cigarettes » (aucune « e-cigarette » n’a des taux si bas, sauf si elle est « sans nicotine », la forme commercialisée contenant 10 mg de nicotine).

On notera d’abord que la proposition de la Commission ne s’intéresse qu’aux produits contenant de la nicotine, omettant par la même les produits exempts de cette substance mais ayant un usage assimilé au tabagisme. En ne réglementant que les seuls produits contenant de la nicotine, la Commission a fait le choix d’une approche particulièrement restrictive qui ne comblera pas le vide juridique existant pour certains types de produits déjà présents sur le marché européen (les « e-cigarettes » sans nicotine resteraient non réglementées en dépit des composants potentiellement nocifs qu’elles contiennent et de la transition vers le tabac qu’elles peuvent induire – on pense aussi aux cigarettes en chocolat, interdites en France) et s’avérera sans doute rapidement dépassée par les évolutions des produits dérivés du tabac.

Le choix de la qualification comme médicament des PCN au-delà d’un certain seuil nicotinique et le mode de vente en pharmacie éviterait que la cigarette électronique ne devienne un produit d’initiation au tabac. Toutefois, cette approche de la Commission soulève, là encore, un grand nombre de questions. La qualification en tant que médicament peut (cf. recommandation de l’OMS sur la nicotine) apparaitre contre-productive et aboutir à la restriction de l’accès à ce produit comme produit de substitution pour les fumeurs, alors que celui-ci est bien moins nocif que la cigarette traditionnelle.

Deux solutions apparaissent possibles à ce stade :

Ø Amender l’article 18 de la directive : le rapporteur du texte a proposé un amendement destiné à encadrer les produits délivrant de la nicotine (suppression des seuils) et a lancé une réflexion sur la nécessité que les « e-cigarettes » puissent être proposées en dehors des pharmacies. La position de la Commission concernant le passage en médicament parait soutenue tant par le Conseil15 ainsi que par le rapporteur du texte au Parlement européen. Cette proposition ne semble pas devoir évoluer, en dépit des réserves exprimées par la France.

Ø Supprimer cet article et proposer une alternative : une réglementation européenne qui prendrait en compte les produits assimilés au tabac, qu’ils contiennent ou non de la nicotine, serait sans doute préférable. Car de fait, il apparait absolument impossible de dissocier totalement les produits contenant de la nicotine de ceux qui n’en contiennent pas (comment réaliser des contrôles dans les lieux non-fumeurs alors qu’il n’est pas possible de différencier une cigarette électronique avec ou sans nicotine ?). Une nouvelle classification des produits évoquant le tabac qui concernerait tout ce qui n’est pas tabac, médicament ou dispositif médical, mais qui soit contient de la nicotine, soit ressemble à un produit du tabac ou encore à une utilisation assimilée au tabagisme, pourrait être proposée.

C. UN MARCHÉ CONCURRENTIEL ET TRANSFRONTALIER

Selon l’OMS, le tabac est la première cause de mortalité évitable. Chaque année, il tue plus de 5 millions de personnes. D’ici 2030, il causera 8 millions de morts par an.

L’ampleur de la consommation du tabac dans le monde et en Europe s’explique par tant par l’importance des industries du tabac que par l’évolution du marché. Le marché des produits du tabac est un marché transfrontalier qui a su profiter de l’ouverture des frontières européennes et d’un contexte de concurrence importante.

Les politiques fiscales ou de prix établies par les États membres au niveau national pour lutter contre le tabagisme ne sont plus assez efficaces face à un phénomène mondial et transfrontalier.

L’ouverture des frontières européennes a entraîné une concurrence des prix importante, comme l’indique le tableau ci-dessous. En juillet 2013, un paquet de cigarettes en Croatie coûtait 3,06 euros contre 6,60 euros en France.

Comparaison des prix d’un paquet de 20 cigarettes en Europe en juillet 2013

Source : Irish Tobacco Manufacturers’Advisory Committee.

Les ventes à distance via internet ont également explosées. De surcroît, un important marché informel attire les vendeurs et consommateurs réguliers.

Selon l’Observatoire du Marché Parallèle du Tabac en France, le phénomène du commerce illicite s’est largement développé à partir de 2003, suite à la hausse des taxes de 40 %. Le commerce illicite du tabac fait référence à la production, l’expédition, la distribution, la réception, l’achat et la vente de produits du tabac qui échappent aux taxes applicables ou aux contrôles sanitaires imposés par la réglementation communautaire. Les principaux types de commerce illicite incluent notamment la contrebande, les achats transfrontaliers, et la contrefaçon.

La contrebande constitue le transport de produits (légitimes et contrefaits) d’une juridiction à une autre, sans le paiement des taxes applicables. La valeur marchande des cigarettes étant élevée par rapport à ses coûts de transports, les contrebandiers à grande échelle peuvent réaliser des profits considérables.

Les achats transfrontaliers, ou trafic transfrontalier, correspondent à des actions de contrebande à petite échelle, souvent par des individus ou des petits groupes de personnes.

Selon l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies, pour la période de 2004 à 2007, les achats transfrontaliers équivalent à une cigarette sur cinq consommée en France, soit 22 %.

La contrefaçon peut se définir comme le fait, pour un autre que le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle ou son licencié, d’exploiter ce monopole, portant ainsi atteinte aux droits de son titulaire. En matière de tabac, cette action prend une dimension plus grave : celle de se faire également « au préjudice de son consommateur » car plus rien ne garantit alors la nature et l’origine des produits.

Selon l’Observatoire du Marché Parallèle du Tabac en France, 13 % de la consommation annuelle en Europe, soit plus de 75 milliards de cigarettes, dont près de 12 % en Europe de l’Ouest, sont des cigarettes contrefaites.

II. LA PROPOSITION DE REVISION DE DIRECTIVE : UN TEXTE RESTRICTIF QUI DIVISE LES ACTEURS

La proposition de directive a été adoptée suite à un vaste processus de consultations publiques qui a recueilli 85 000 réponses. Une étude d’impact a été menée de front pour évaluer les incidences économiques, sociales et sanitaires pouvant résulter des différentes options stratégiques envisagées.

La directive devrait entrer en vigueur à partir de 2015 ou de 2016.

A. DE NOUVELLES DISPOSITIONS PLUS CIBLEES…

La proposition de révision de directive de la Commission Européenne16 veut s’adapter à l’évolution du marché des produits du tabac, aux nouvelles exigences internationales et à l’évolution de la consommation du tabac.

1. Une révision restrictive

Depuis l’adoption de la directive 2001/37/CE le 5 juin 2001, plus de dix années se sont écoulées. Une révision de cette dernière en vertu de son article 11, qui prévoit explicitement une révision, a été demandée plusieurs fois par le Conseil et le Parlement dès 2009. Cela fait maintenant plusieurs années que la Commission européenne travaille de concert avec l’avis d’experts pour modifier au mieux cette directive.

Cette révision tend à améliorer le marché intérieur et à répondre à plusieurs objectifs :

- mettre à jour les domaines déjà harmonisés afin d’adapter les législations des États membres aux progrès techniques, au cadre juridique international et aux évolutions récentes du marché ;

- inclure certaines dispositions liées aux produits qui ne figurent pas encore dans la directive ;

- veiller à ce que les dispositions de la directive ne puissent pas être contournées en mettant sur le marché des produits non-conformes à celles-ci.

Face à l’augmentation du taux de prévalence en Europe chez les jeunes et chez les femmes depuis 2001, la Commission souhaite agir sur l’entrée dans le tabagisme, notamment des jeunes. Cette priorité se retrouve dans le choix et l’orientation des domaines proposés et dans les produits ciblés. Pour rappel, les statistiques ont montré une augmentation de la consommation des produits de tabac chez les jeunes européens. Le taux de prévalence chez les jeunes (de 15 à 25 ans), de 29 %, est supérieur à celui de la population générale. Selon l’OMS, de 2005 à 2010, la prévalence du tabagisme est repartie à la hausse chez les garçons dans 14 pays et chez les filles dans 9 pays.

La Commission Européenne a donc voulu prendre des mesures restrictives pour dissuader les jeunes de fumer par des avertissements plus choquants et par l’interdiction d’emballages et d’arômes susceptibles de plus attirer les jeunes.

Cette proposition a suscité beaucoup de controverses et d’attaques de la part des lobbies des industriels du tabac mais également des consommateurs.

2. Des dispositions qui visent toutes les étapes de la commercialisation du produit

Les principales modifications du projet de révision de directive portent sur toutes les étapes de la commercialisation des produits du tabac, de la fabrication à la vente à distance.

a. Mesures relatives aux ingrédients des produits du tabac

La proposition interdit tous les arômes caractérisants contenus dans les cigarettes, le tabac à rouler et le tabac sans combustion tels que le chocolat, les fruits et le menthol. La proposition interdit également d’autres additifs tels que les vitamines qui pourraient montrer que le produit ne constitue pas un danger pour la santé. La proposition de directive exempte les cigares, cigarillos, le tabac pour pipe et le tabac pour pipe à eau de l’interdiction d’utiliser les aromes étant donné que ces produits sont utilisés par les fumeurs plus âgés. Enfin, le texte interdit les additifs amplifiant de façon sensible les effets toxiques ou de dépendance. Les États membres doivent mettre en place un système électronique de déclaration des ingrédients et des émissions.

b. Mesures relatives à l’étiquetage et au conditionnement

La proposition instaure l’obligation d’apposer des avertissements sous forme d’image et de texte sur 75 % de l’avant et de l’arrière de tous les paquets de cigarettes et de tabac à rouler. Les descriptions telles que « cigarettes fines », « naturel » ou « bio » ainsi que les couleurs trompeuses ne sont pas acceptées par la Commission. Une harmonisation de l’emballage n’a pas été envisagée par la Commission mais les États membres sont libres d’adopter des paquets de cigarettes neutres à l’instar de l’Australie, premier pays à l’avoir adopté au monde.

Une unité de conditionnement doit contenir au minimum 20 cigarettes, ce qui empêche les conditionnements fantaisistes tels que les paquets de cigarettes de style rouge à lèvres ou parfum. Pour les paquets de tabac à rouler, le texte propose un conditionnement minimum de 40 grammes.

En revanche, dans son article 7, paragraphe 6, la proposition de directive dispose que les États membres ne peuvent augmenter les dimensions des avertissements sanitaires.

c. Mesures relatives à la traçabilité des produits

Pour lutter contre la contrebande de cigarettes, une série de mesures de traçabilité et de sécurité ont été évoquées dans la proposition telles que l’instauration d’un identifiant unique sur chaque paquet ainsi qu’un système de suivi des ventes et des dispositifs de sécurité (avec l’instauration notamment d’hologrammes) pour assurer que seuls les produits conformes à la directive sont écoulés sur le marché européen.

L’identifiant unique doit être apposé de façon inamovible et indélébile et ne peut être dissimulé ou interrompu. Cette obligation s’applique uniquement aux produits destinés au marché de l’Union ou mis sur le marché de l’Union. L’identifiant unique permet de déterminer :

- la date et le lieu de fabrication ;

- l’installation de production ;

- la machine utilisée pour la fabrication des produits ;

- le créneau de production ou l’heure de fabrication ;

- la dénomination du produit ;

- le marché de vente au détail de destination ;

- l’itinéraire d’acheminement prévu ;

- si nécessaire, l’importateur dans l’Union Européenne ;

- l’itinéraire d’acheminement effectif, depuis le lieu de fabrication jusqu’au premier détaillant, y compris l’ensemble des entrepôts utilisés ;

- l’identité de tous les acheteurs, depuis le lieu de fabrication jusqu’au premier détaillant ;

- la facture, le numéro de commande et la preuve de paiement de tous les acheteurs, depuis le lieu de fabrication jusqu’au premier détaillant.

Ce système d’identification permet de retracer le circuit des produits du tabac de la fabrication à la vente détaillée.

La directive dispose que les États membres veillent à ce que les fabricants et importateurs de produits du tabac concluent un contrat de stockage de données avec un tiers indépendant, lequel doit héberger l’installation de stockage destinée aux données relatives au fabricant et à l’importateur concerné.

d. Mesures relatives à la vente à distance transfrontalière

La Commission envisage un nouveau cadre réglementaire plus restrictif pour la vente de produits du tabac transfrontalière sur internet. À cet effet, un régime de notification pour les détaillants en ligne et un mécanisme de contrôle de l’âge sont mis en place pour garantir que les produits du tabac ne sont pas vendus à des enfants ou à des adolescents.

Les détaillants en ligne doivent donc s’enregistrer auprès des autorités compétentes de l’État membre dans lequel ils sont établis et dans l’État membre de leurs consommateurs réels ou potentiels. Les détaillants situés dans des pays tiers doivent s’enregistrer auprès des autorités compétences dans l’État membre de leurs consommateurs réels ou potentiels. Les détaillants doivent également renseigner le nom ou la raison sociale et l’adresse permanente du lieu d’activité à partir duquel les produits du tabac sont fournis, la date de début de l’activité de mise en vente à distance transfrontalière ainsi que l’adresse du ou des sites internet utilisés à cette fin et toutes les informations nécessaires pour identifier ce ou ces sites internet. Les États membres doivent ensuite publier une liste des sites internet.

La vente par internet n’est donc pas interdite mais les États membres peuvent librement décider de l’interdire. En échange, les États membres doivent garantir une coopération transfrontalière sans faille.

e. Mesures relatives aux nouveaux produits du tabac

La Commission envisage un système de déclaration afin que tout nouveau produit du tabac respecte intégralement la directive, mais elle laisse aux États membres la possibilité de mettre en place un système d’autorisation préalable.

- tabac à usage oral : l’interdiction de la vente sur le marché de produits de tabac à usage oral est toujours maintenue par la proposition sauf pour la Suède qui dispose d’une dérogation.

- cigarettes électroniques : la proposition inclut (à la différence de la première directive) les produits contenant de la nicotine. Dans la moitié des États membres, la nicotine est considérée comme faisant office de médicament, comme les autres produits permettant d’arrêter de fumer. La Commission propose une double mesure pour la réglementation des cigarettes électroniques et des autres produits contenants de la nicotine. Les produits contenant de la nicotine au-delà de 2 mg/unité (c’est-à-dire la majorité des cigarettes électroniques) devront obligatoirement être autorisés comme médicament. Ceux qui ne dépassent pas ce seuil devront être commercialisés moyennant l’apposition d’avertissements sanitaires.

- produits à fumer à base de plantes : ces produits sont réputés pour être moins nocifs mais leur utilisation n’est pas sans risque. La Commission propose donc un système d’étiquetage de ces produits.

B. …QUI NE FONT PAS TOTALEMENT CONSENSUS

Les dispositions de la proposition de directive sont à l’origine de controverses et de désaccords importants au sein des institutions européennes mais également parmi les parties prenantes et acteurs civils.

1. Les divergences au sein des institutions européennes

Le Conseil de l’Union a adopté un accord politique sur le texte en juin 2013. Cet accord est révélateur des principaux points de désaccords à savoir la taille des avertissements sanitaires combinés et l’interdiction des arômes.

Suite à des désaccords politiques importants et notamment aux stratégies de lobbying des industries du tabac, les eurodéputés ont décidé de reporter le vote de la proposition de révision de la directive du 10 septembre 2013 au 8 octobre 2013.

Les différents points de divergences sont des enjeux importants non seulement pour la pérennité du commerce du tabac mais également pour la santé des consommateurs.

a. La question de la taille des avertissements combinés

La proposition de directive augmente la taille des avertissements sanitaires combinés de 30 % à 75 % de la taille des paquets. Le Conseil de l’Union a émis un accord à 66 %, à l’instar de la réglementation belge. Or, le Parlement Européen semble reprendre l’obligation des 75 %.

Les industries du tabac évoquent le fait que les avertissements sanitaires combinés, c’est-à-dire les avertissements qui indiquent les effets sur la santé de la consommation du tabac mais également les recommandations pour arrêter le tabagisme, ne sont pas efficaces sur les consommateurs. Or, les études d’impact démontrent une efficacité prouvée de ces avertissements. En effet, les avertissements sanitaires inclus sur les paquets de tabac empêchent les jeunes de commencer à fumer et incitent les fumeurs à envisager l’arrêt. Selon la Fondation contre le Cancer Belge, le nombre d’appels reçus par le service téléphonique d’aide à l’arrêt du tabac a augmenté de plus de deux tiers l’année où les avertissements visuels contenant le numéro d’appel ont été imprimés sur tous les paquets.

Les effets des avertissements sanitaires à grande échelle ne se font pas immédiatement ressentir, notamment du fait que l’adoption d’avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes se fait généralement dans le cadre de stratégies antitabac complètes. Il est donc difficile de mesurer le lien de cause à effet sur le court terme. Pour autant, on peut noter que l’adoption de ce genre d’avertissements a participé à une réduction du taux de tabagisme et a augmenté le nombre de tentatives d’arrêt. Au Canada, le tabagisme chez les jeunes de 15 à 19 ans est passé de 25 % à 22 % l’année où les avertissements visuels ont été introduits. Ce taux a continué à baisser pour atteindre 12 % en 2011.

b. L’interdiction de cigarettes « slim »

Lors de la procédure législative, le Conseil a montré son désaccord sur le fait d’interdire les cigarettes fines de la vente. Le Parlement a tout de même maintenu cette disposition. Par conséquent, le Conseil a demandé un rapport à la Commission sur le développement de ce marché particulier.

c. L’interdiction des arômes

En ce qui concerne l’interdiction des arômes, le Conseil de l’Union a exprimé son accord sur ce point mais a demandé une période de transition de trois années après la transposition de la directive pour que les industriels s’adaptent aux changements de législation.

d. La vente par internet

Le Conseil a rejeté la possibilité d’interdiction totale de la vente transfrontalière et a laissé le soin aux États membres de choisir par eux-mêmes leur politique à ce sujet. Cependant, une obligation de coopération administrative est nécessaire pour que les différentes options choisies par les États membres puissent coexister et qu’aucun État ne soit lésé.

e. La classification des cigarettes électroniques en tant que médicament

La proposition de révision de la directive en son article 18 dispose que les produits dont le niveau de nicotine excédant 2 mg/unité ou dont la concentration en nicotine excède 4 mg/ml ou dont l’usage prévu entraîne une concentration plasmatique maximale moyenne supérieure à 4 mg de nicotine/ml doivent être autorisés sur le marché conformément à la directive 2001/83/CE relative aux médicaments à usage humain. Cette directive vise expressément les cigarettes électroniques qui ont des concentrations de nicotine supérieures à 2 mg par unité. Le Conseil a suivi cette disposition en baissant le seuil à 1 mg/unité. La Commission Européenne voudrait donc considérer les cigarettes électroniques comme des médicaments qui, seraient donc en France, délivrés par les autorités compétentes à savoir en pharmacie.

Or, cette disposition est à l’origine de nombreuses polémiques, notamment entre les États membres. La majorité des États membres sont favorables à cette disposition, sauf la France qui, a demandé un rapport d’évaluation à la Commission sur ces nouveaux produits. La France ne s’est pas encore dotée de réglementation spécifique sur les cigarettes électroniques. Il est donc difficile d’évaluer les conséquences de cette mesure sur le terrain.

De surcroît, les acteurs de la lutte contre le tabagisme ne partagent pas le même avis sur la question. Lors des auditions auxquelles votre rapporteure a procédé, le Comité National Contre le Tabagisme semblait en accord avec la reconnaissance des cigarettes électroniques en tant que médicament alors que le Professeur Dautzenberg, Président de l’Office Français de Prévention du Tabagisme, exprimant beaucoup plus ses réticences, notamment à cause du manque de recul sur l’efficacité de ce produit, préférerait que l’Union européenne ne se précipite pas sur ce sujet. Si cette législation était adoptée, les cigarettes électroniques, en France, seraient vendues en pharmacie.

Ainsi, l’article 18 fait-il débat dans tous les pays européens ; il semble ainsi nécessaire d’appréhender ce phénomène avec beaucoup de prudence.

2. Exemples de politiques publiques efficaces de lutte contre le tabagisme

a. La force des politiques publiques : le cas français

Pour contrer une épidémie internationale, les autorités publiques se doivent de s’armer des outils les plus efficaces et restrictifs. Face à l’idée reçue que les politiques publiques sont dénuées de moyens face aux industries du tabac, votre rapporteure aimerait ici rappeler que la volonté politique est à l’origine des profonds changements sociaux et économiques des pays.

Lors de l’audition du Professeur Dautzenberg, président de l’Office Français Contre le Tabagisme et auteur du rapport sur les cigarettes électroniques commandé par Mme Marisol Touraine, ministre de la Santé, celui-ci a rappelé que le tabac n’est pas une question de taxe ni de commerce mais une question de santé publique. Les politiques publiques en la matière peuvent être très efficaces si elles sont accompagnées de moyens humains et financiers réels.

En France, la politique de lutte contre le tabac n’a pas été un processus continu dans le temps et les objectifs. En revanche, on peut rappeler les quatre grandes décisions en la matière qui ont bouleversé les tendances évolutives du tabagisme : la loi du 9 juillet 1976 relative à la lutte contre le tabagisme, dite la « loi Veil », la loi du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme dite « loi Évin », le plan Cancer I sous la présidence de Jacques Chirac en 2003, le gel des taxes qui ont suivi après 2004 ainsi que le décret du 15 novembre 2006 fixant les conditions d’application de l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif.

En 1976, la loi Veil crée les avertissements sanitaires sur les paquets, encadre la publicité et le parrainage d’évènements sportifs et interdit de fumer dans les hôpitaux et les ascenseurs. Suite à cette loi, les ventes baissent jusqu’en 1991 ce qui sauve 17 000 vies sur la période. L’effet de cette première loi a été limité du fait des contournements des dispositions juridiques par les industries du tabac et la stagnation des prix des produits du tabac.

En 1991, la loi Évin interdit toute publicité sauf sur les lieux de vente, sépare les fumeurs des non-fumeurs dans les lieux publics et retire le tabac du calcul de l’indice des prix. Pendant six ans, les prix augmentent régulièrement ce qui provoque pour la première fois une baisse des ventes des paquets de cigarettes, ce qui sauve 14 000 vies sur la période. Pendant les cinq années qui suivent, les ventes restent stables car les prix n’augmentent pas assez pour être dissuasifs. Selon la Banque Mondiale, il faut une augmentation des prix de 10 % pour entraîner une baisse de 4 % du nombre des fumeurs dans les pays développés17.

À l’automne 2002, le président Chirac inaugure le Plan Cancer I en proclamant : « je déclare la guerre contre le tabac ». À la suite de ce plan, on assiste à trois hausses de taxe en douze mois qui augmentent les prix de 39 %. Les ventes chutent de 34 % : on passe de 82 milliards de cigarettes vendues à 54 milliards en un an, sauvant 25 000 vies sur cette période. Ces mesures promeuvent le sevrage et limitent l’initiation chez les jeunes.

Depuis 2007, les politiques de lutte anti-tabac ont connu des échecs. Les mesures ont été limitées et vidées de leur substance par les contournements des industries du tabac.

L’interdiction de fumer dans les lieux publics est obtenue seulement en 2006 après deux années d’actions publiques intenses. Sa mise en œuvre commence en 2007 mais pour les cafés, hôtels, restaurants et dancings il faut attendre 2008.

Les images d’avertissements sanitaires sur les paquets n’ont été appliquées qu’à partir d’avril 2011, après deux ans de discussions et un an de délai d’application. Il faut savoir que la France n’est que le 39e pays au monde à appliquer cette mesure et impose 30 % de la face et 45 % du verso, loin des 85 % de l’Uruguay.

De 2004 à 2007, les taxes du tabac ont été gelées. Les augmentations du prix de 6 % sont trop faibles pour avoir une conséquence sur les ventes, raison pour laquelle la Cour des Comptes a publié un rapport selon lequel les augmentations des prix du tabac n’ont eu aucune incidence sur la consommation des fumeurs18. Les ventes de cigarettes sont donc restées stables de 2005 à 2011 et aucune vie humaine n’a été sauvée. L’augmentation de la TVA au 1er octobre 2012 de 1,6 point aurait pu avoir un effet sur le prix des cigarettes mais les cigarettiers et les buralistes ont obtenu une mesure d’exception qui a limité cette hausse.

La France connaît un ralentissement des effets des stratégies de lutte anti-tabac de par les contournements des législations par les industries et le manque de volonté politique. La prévalence au tabagisme, déjà élevée, a augmenté de 26,9 % à 28,7 % pour les 15 à 75 ans pour les cinq dernières années. La prévalence du tabagisme quotidien, des jeunes de 17 ans est passée de 28,9 % en 2008 à 31,5 % en 2011. La France fait figure d’exception parmi les pays développés.

Évolution des ventes de cigarettes en milliard de cigarettes ligne pleine (axe des ordonnées gauche) et prix relatif des cigarettes ligne pointillée
(axe des ordonnées droit, référence 100 en 1970).

Source : Elsevier Masson Consult.

b. L’adoption des paquets neutres standardisés : l’innovation australienne

L’Australie détient l’un des dispositifs anti-tabac les plus stricts au monde. Le tabagisme couterait 31,5 milliards de dollars australiens à l’économie australienne c’est-à-dire 2 % du PIB (base 2012) et tuerait 15 000 australiens chaque année sur une population de 23 millions d’habitants. Face à l’importance de l’épidémie du tabagisme, les autorités publiques se sont fixé comme objectif d’atteindre un ratio de 10 % de fumeurs adultes au quotidien d’ici 2018, sachant que le taux de prévalence au tabagisme est déjà l’un des plus bas au monde (20 % chez les hommes et 16 % chez les femmes).

En décembre 2011, le parlement australien a adopté le Tobacco Plain Packaging Act qui interdit pour la première fois au monde toute forme de motif promotionnel sur les paquets de tabac. Les restrictions sont très précises : les paquets de tabac doivent avoir une couleur générique marron-olive unie19 et 75 % de la surface du recto et 90 % du verso doivent être recouverts d’avertissements graphiques choquants. L’impression de la marque est autorisée dans un format et une police standardisés.

Les fabricants ont obtenu le report de l’entrée en vigueur de la loi du 1er juillet 2012 au 1er octobre 2012 pour la production de paquets conformes et au 1er décembre 2012 pour la vente, afin de leur permettre de se mettre en conformité avec ces nouvelles dispositions.

Par la suite, le législateur a également décidé de réguler l’uniformité des cigarettes afin d’éviter la vente de cigarettes slim ou avec du papier plus raffiné. La loi a également été étendue à tous types de produits du tabac (cigarettes, cigarillos, tabac à rouler…).

Les paquets et les cigarettes qui ne sont pas conformes à cette réglementation peuvent être importés, mais uniquement à des fins non commerciales, dans la limite de 50 cigarettes ou de 50 grammes de tabac. Les cigarettes importées commercialisées doivent être rempaquetées dans des paquets standardisés.

Augmentations des taxes sur les cigarettes, pénalités exemplaires pour trafic de cigarettes non-conformes, réduction du plafond des importations hors taxes, interdiction de fumer dans certains lieux publics et renforcement de l’encadrement des promotions publicitaires, notamment sur internet, ont été les principales mesures de l’État australien. L’augmentation prochaine des taxes prévue pour 2013-2014 ramènerait le prix moyen d’un paquet de cigarettes à 15,7 euros.

Ce dispositif anti-tabac est complété par une politique active de prévention et d’aide à la désintoxication tabagique via la mise en place de sites officiels gouvernementaux dédiés uniquement au sevrage tabagique, le remboursement des médicaments qui aident à arrêter de fumer, des thérapies de substitution de la nicotine et d’importantes campagnes de prévention.

Il est trop tôt aujourd’hui pour évaluer concrètement les effets de cette politique sur le taux de prévalence au tabagisme chez les jeunes australiens. Pourtant, le nombre d’appels enregistrés sur le service téléphonique australien sur le sevrage tabagique a augmenté depuis la mise en application de ces dispositions. De nombreuses personnes indiquent qu’ils n’aiment pas les nouveaux paquets et que de surcroît le goût des cigarettes est moins bon. Ceci démontre l’impact visuel que peut avoir le conditionnement des cigarettes. Aujourd’hui, l’Australie enregistre le plus faible taux de prévalence au monde, ce qui est une conséquence des différentes politiques publiques adoptées depuis 2011.

c. Les effets des politiques publiques de long terme : le cas canadien

Le Canada fait figure de chef de file en matière de politiques de lutte anti-tabac. En 50 ans, le taux de prévalence au tabagisme est passé de plus de 50 % à 17 % de la population entre 1960 et 2010. Cette baisse spectaculaire est expliquée par une volonté politique forte à atteindre des objectifs de santé publique.

Pour rappel historique, en 1981, le Canada détenait le triste record mondial de la plus forte consommation de tabac par habitant au monde. Information, restrictions, prévention, et aide à la recherche ont été les piliers des politiques publiques en la matière pour contrer cette tendance. Le Canada a donc adopté une politique antitabac complète sur douze années en mettant en œuvre une mesure à la fois. Les augmentations de taxe ont été suivies de restrictions concernant l’usage du tabac dans les lieux publics. En 1989, les publicités ont été progressivement interdites et les avertissements sur les paquets de cigarette ont été apposés. Depuis le printemps 2012, le Canada a adopté les mises en garde sanitaires qui couvrent 75 % des paquets de cigarettes et de cigarillos.

Les politiques anti-tabac au Canada ont connu des soubresauts et des périodes moins favorables. Pourtant, le Canada a joué un rôle clé dans les négociations de la convention-cadre anti-tabac de l’OMS ainsi que dans l’entente ayant permis l’interdiction de fumer sur les vols internationaux.

Aujourd’hui, avec un taux de 17 %, le Canada est le pays qui affiche l’un des plus faibles taux de prévalence au tabagisme. Des efforts restent à fournir mais ce pays a su contrer fortement les tendances effrayantes de l’épidémie du tabagisme en faisant preuve d’une volonté politique sans précédent, à une époque où les politiques anti-tabac n’étaient pas à l’ordre du jour dans les agendas des autres États.

III. UN TEXTE ENCORE PERFECTIBLE DANS SES EQUILIBRES ET SES PRECISIONS

Votre rapporteure estime que la proposition de directive de la Commission est un texte d’adaptation aux évolutions technologiques et aux nouveaux produits du marché du tabac. Cependant, dans la perspective de lutter efficacement contre le tabagisme mais également de respecter les libertés individuelles, votre rapporteure aimerait souligner les manquements du texte qui est encore perfectible.

A. MIEUX APPRÉHENDER LE CONTEXTE D’APPLICATION DE LA DIRECTIVE

1. Une proposition de directive qui n’a pas l’accord des industriels

Il est clair que cette proposition de directive ne permettra pas de faire face à l’étendue des fraudes du commerce illicite, les contrefaçons, les achats transfrontaliers ou encore la contrebande à grande échelle. L’ouverture des frontières européennes a participé au développement d’une économie parallèle qu’il est nécessaire de combattre pour le bien de nos économies mais également pour la santé des consommateurs, qui sont tentés de s’approvisionner via des fournisseurs illégaux à moindre coût.

En particulier, votre rapporteure estime que deux mesures devront faire l’objet d’un suivi particulier pour s’assurer qu’elles soient mises en place conformément aux dispositions de la directive, à savoir l’efficacité du contrôle ainsi que la sincérité et la fiabilité de la coopération entre États.

Concernant l’efficacité du contrôle de la proposition de directive dispose d’un système de traçabilité établi par les États membres. La directive prévoit un délai de vingt-quatre mois pour les cigarettes et le tabac à rouler et de cinq mois pour les autres produits, complété d’une période de transition de douze mois pour les industries. Étant donné les changements techniques que ce processus impliquerait pour les agents économiques, et dans un souci de rendre efficace le système de traçabilité, il est nécessaire de s’assurer que les objectifs techniques soient réalisables.

Deuxièmement, la proposition de directive dispose d’un périmètre d’obligation de traçabilité plus large que l’article 8 du Protocole additionnel de la convention-cadre de lutte anti-tabac de l’OMS. Ce dernier arrête le processus de traçabilité au « premier opérateur économique indépendant du fabricant ». Or il faudra se donner les moyens pour s’assurer que cette mesure s’applique dans tous les États membres

En ce qui concerne le rôle des industries du tabac dans l’alimentation et la gestion du système d’authentification et de traçabilité, l’article 8 du Protocole de l’OMS prévoit la participation de l’industrie du tabac dans le processus d’alimentation du système de traçabilité pour des raisons logistiques. En effet, il dispose que « Chaque Partie fait en sorte que ses autorités compétentes, dans le cadre de leur participation au régime de suivi et de traçabilité, n’aient des relations avec l’industrie du tabac et ceux qui représentent les intérêts de l’industrie du tabac que dans la mesure strictement nécessaire pour mettre en œuvre le présent article. » La proposition de directive de la Commission européenne ainsi que les propositions d’amendements du Parlement Européen et la position du Conseil disposent que le gestionnaire du système d’authentification n’ait aucun lien avec les fabricants des produits du tabac.

L’article 4 de la directive dispose des mesures concernant les méthodes de mesure des taux de goudron, nicotine et monoxyde de carbone. Ces mesures doivent être réalisées par des laboratoires d’essais agrées. Or, suite à la directive 2001/37/CE, un guide d’interprétation de ladite directive a été publié en 2007 précisant que les tests doivent être réalisés par des laboratoires, indépendants des industries.

La Commission veillera à publier sur son site uniquement la liste des laboratoires agréés. Cette mesure n’empêche aucunement les industries d’avoir leur propre laboratoire de test.

Concernant la sincérité et la fiabilité de la coopération entre États, la Commission Européenne laisse le choix aux États membres d’interdire ou non la vente des produits du tabac via internet. En échange, elle demande aux États membres de coopérer entre eux. Ces mesures sont importantes pour lutter efficacement contre le tabagisme. Or, elles sont basées uniquement sur la bonne volonté d’administrations nationales très différentes, n’ayant pas les mêmes principes de fonctionnement.

Par conséquent, votre rapporteure estime que ces dispositions doivent être précisées et que des sanctions doivent être mises en place pour que la traçabilité soit efficacement contrôlée. Elle invite également la Commission à reconsidérer le problème de la vente par internet. L’interdiction de la vente par internet est incontournable pour éviter des contournements du marché et favoriser l’effectivité des plans anti-tabagisme qui ont été adoptés par les États membres.

2. Mieux encadrer la distribution des cigarettes électroniques

L’apparition des cigarettes électroniques sur le marché européen est relativement nouvelle. La complexité d’identification des ingrédients contenus dans les e-liquides des cigarettes électroniques laisse les scientifiques perplexes. Les scientifiques s’accordent à dire que la nouveauté du phénomène ne permet pas de connaître les effets réels que ce produit peut avoir sur la santé des consommateurs. Il est évident que les cigarettes électroniques contiennent moins de contenus nocifs et toxiques. Pour autant, les effets sur la santé sont avérés.

Aujourd’hui, les cigarettes électroniques ne font en France, l’objet d’aucune réglementation. Face au développement spectaculaire des magasins spécialisés dans la vente de cigarettes électroniques partout en France et en Europe, il est extrêmement urgent que les autorités publiques se prononcent sur le cadre réglementaire de la vente de ces produits au niveau national. À cette fin, des études scientifiques devraient être faites sur les effets de ce produit. À cet égard, la France n’étant pas en faveur de l’incorporation de l’article 18 dans la proposition de directive, a d’ailleurs demandé un rapport à la Commission Européenne à ce sujet.

La proposition de révision de directive en son article 18 vise les cigarettes électroniques. La Commission Européenne aimerait que les cigarettes électroniques soient considérées comme des médicaments au-delà de 2 mg/unité. Or, l’accès aux médicaments est totalement différent d’un État membre à un autre. Au Royaume-Uni, les médicaments peuvent être vendus dans des centres commerciaux ou dans des espaces de libre-service sans qu’une ordonnance soit obligatoirement nécessaire. En France, les médicaments sont vendus uniquement en pharmacie. Le fait que les cigarettes électroniques soient vendues en pharmacie peut directement décourager les fumeurs qui aimeraient passer aux cigarettes électroniques pour entamer un processus de sevrage. Ces derniers n’ont pas le réflexe d’aller se fournir dans une pharmacie mais dans un bureau de tabac. Votre rapporteure exprime donc son inquiétude pour la population des fumeurs qui pourraient avoir accès plus librement aux cigarettes électroniques.

Cette disposition peut se mettre en œuvre si l’Europe prend exemple sur le système français et interdit la vente des cigarettes dans les grandes surfaces et les distributeurs automatiques accessibles à tous.

B. UN BESOIN D’EFFECTIVITÉ QUI FAIT DÉFAUT

1. Un suivi nécessaire de l’effectivité des dispositions pour contrer les mythes

Au vu de la complexité du marché des produits du tabac et des contournements possibles des législations, il est nécessaire que des moyens plus importants soient accordés au contrôle du respect de la législation.

Une véritable coopération entre États membres basée sur des résultats communs à atteindre est nécessaire. Des sanctions fortes doivent être décidées pour les industries du tabac ou les États qui ne respecteront pas ces dispositions.

Il est d’autant plus important que ces dispositions soient suivies d’effets concrets que des idées fausses sur les conséquences de cette législation circulent dans les médias et les institutions. Votre rapporteure aimerait contrer quelques mythes qui circulent au sujet de cette directive.

a. Les mesures proposées dans cette proposition de directive n’auraient pas l’effet escompté

En ce qui concerne les avertissements graphiques et textuels couvrant 75 % de l’avant et de l’arrière du paquet, des études évoquées dans ce rapport prouvent que les avertissements ont des effets à long terme sur les tentatives d’arrêts du tabac et l’arrêt du tabagisme.

Selon une étude d’Euromonitor International, les cigarettes fines, la petite taille des paquets et l’utilisation de couleurs rosées sont beaucoup plus appréciés par les femmes. Ces paquets peuvent influencer la croyance selon laquelle le fait de fumer coupe l’appétit et empêche de prendre du poids et peuvent sembler moins dangereux. Selon la même étude, il est prévu que la part de marché des cigarettes fines vendues dans le monde entier qui ciblent explicitement les femmes augmente de 4 % à 13 % entre 2011 et 2016.

La hausse du prix moyen d’un paquet de cigarettes permet de réduire le nombre de jeunes qui commence à fumer et qui n’ont pas forcément les moyens de s’acheter un paquet à des prix plus élevés.

b. L’application de la proposition de directive ferait augmenter le commerce illicite du tabac

Les industries du tabac avancent l’argument du commerce illicite pour empêcher l’adoption de restrictions réglementaires. Or, l’étude d’impact de la Commission Européenne n’a fourni aucune donnée factuelle convaincante qui prouve que l’adoption de plus gros avertissements de plus grandes tailles et l’adoption de paquets standardisés augmentent le commerce illicite. Par ailleurs, les États membres qui ont introduit des avertissements visuels n’ont pas enregistré d’augmentation du commerce illicite. Au Royaume-Uni, depuis l’introduction des avertissements visuels en 2008, le commerce de cigarettes illicite a diminué de 14 % à 9 % du marché.

Pour ce qui a trait aux contrefaçons, les industries du tabac incorporent déjà des marques invisibles afin de faire la différence entre des paquets authentiques et des contrefaits. La directive actuelle ne fera donc aucunement la donne pour la contrefaçon.

c. La proposition de directive nuirait à l’économie réelle de l’Union Européenne

Selon l’étude d’impact, on estime que les mesures proposées réduiront le tabagisme de 2 % sur cinq ans. La baisse des ventes provoquera une légère baisse des emplois dans le secteur du tabac. Cependant, l’industrie du tabac n’emploie pas beaucoup de main-d’œuvre en Europe. En 2008, elle comptait 34 000 employés, soit 0,015 % de l’effectif total des 27 États membres. Il faut savoir que la baisse des dépenses en produits du tabac entrainera une augmentation des dépenses dans les secteurs des produits et services autres que le tabac qui demandent plus de main-d’œuvre. Au cours des cinq prochaines années, 2 234 emplois devraient être ainsi créés dans l’Union Européenne après l’adoption de cette directive.

2. La mise en place d’une forte politique de prevention

La directive 2001/37/CE et sa proposition de révision sont fondées sur l’article 1145 relatif au marché intérieur. Cette directive vise donc à réguler la fabrication et la commercialisation des produits du tabac afin de permettre une harmonisation des législations des États membres. Les enjeux sont donc, au premier abord, économiques.

Or, étant donné que cette directive traite de produits uniques en leur genre, puisque ce sont les seuls produits commercialisés qui correctement utilisés provoquent la mort, les enjeux sanitaires sont bien plus importants que les enjeux économiques.

Sans la mise en place d’une politique de prévention forte et d’une volonté politique déterminée, ces dispositions n’auront pas l’effet escompté contre le tabagisme.

Les pouvoirs publics sont aptes à mettre en place des politiques de prévention et aide à l’arrêt du tabac, il est temps qu’elles deviennent effectives.

CONCLUSION

Dotés d’une histoire particulière, les produits du marché du tabac font aujourd’hui partie intégrante de notre quotidien. Pourtant, si ces produits étaient commercialisés pour la première fois à notre époque, les autorités et la population n’accepteraient pas qu’ils soient autorisés à la vente de par leurs effets néfastes sur la santé des consommateurs. Il est donc essentiel que les autorités publiques s’emparent de ce sujet.

Du fait de la disparité des économies, des standards sociaux et des législations relatives à la commercialisation des produits du tabac, l’Union Européenne a voulu dès 1989 réguler les échanges transfrontaliers entre les États membres. La directive 2001/37/CE a été pendant longtemps un gage d’harmonisation des législations et de protection de la santé des consommateurs. Cependant, les progrès scientifiques, l’évolution du cadre juridique international et les échecs des politiques publiques de santé anti-tabac au sein des États membres participent à la nécessité d’une révision de cette directive.

Les contradictions entre les enjeux de santé publique et économiques que revêt cette directive sont difficiles à appréhender et à concilier. Il est évident qu’aucune partie prenante ne peut nier les enjeux de santé publique de cette directive. Loin de votre rapporteure également l’idée de stigmatiser les consommateurs des produits du tabac et les réseaux de distribution.

Pour autant, malgré les nombreux efforts des acteurs de la société civile et du monde médical, force est de constater que les politiques publiques de lutte contre le tabagisme connaissent en Europe un recul depuis le début des années 2000 et qu’elles vivent une période cruciale. L’adoption de législations en la matière peut soit conforter le marché des produits du tabac dans son évolution exponentielle soit marquer un tournant pour donner à notre génération et les générations futures un droit à une meilleure santé possible tout en préservant les libertés individuelles.

Avec l’apparition de nouveaux produits, de nouvelles techniques de marketing et du développement des achats transfrontaliers, l’Union Européenne se doit de réagir face à un phénomène qui prend de l’ampleur. C’est pourquoi votre rapporteure se félicite de la proposition de directive de la Commission Européenne.

Cependant, les dispositions de cette proposition doivent être précisées et clarifiées afin d’avoir une effectivité réelle sur l’économie des États membres et l’épidémie du tabagisme.

Aussi, afin de respecter les recommandations internationales de lutte contre le tabagisme, les États membres doivent tout mettre en œuvre pour que les intérêts économiques des industriels du tabac ne mettent à mal les objectifs de santé publique.

Enfin, les politiques de lutte antitabac sont populaires parmi les citoyens de l’Union Européenne : 76 % d’entre eux sont favorables à l’inclusion d’avertissements graphiques sur les paquets, 63 % d’entre eux sont favorables à l’interdiction des produits aromatisés et 57 % d’entre eux sont favorables à l’introduction de paquets unis standardisés. Les États membres devraient donc être libres d’opter pour des politiques publiques plus restrictives envers les produits du marché du tabac afin de protéger la santé de leur population si tel est leur volonté politique.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La Commission s’est réunie le 1er octobre, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.

L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.

La Présidente Danielle Auroi. Merci pour cette présentation et cet excellent travail. Je n’ai rien à ajouter aux propositions de conclusions proposées. Qu’en pensent mes collègues ?

M. Gilles Savary. Je suis dubitatif concernant la question de l’interdiction de la vente transfrontalière. Comment la mettre en œuvre ? Je vous rappelle que nous n’avons pas de frontières !

Mme Chantal Guittet, rapporteure. Nous pouvons rédiger différemment ce point-là ; par exemple en prenant exemple sur ce qui se pratique concernant l’alcool, limitant les quantités transportées.

M. Yves Daniel. Il n’est question que de la consommation. Qu’en est-il de la production ?

Mme Chantal Guittet, rapporteure. La production en France et en Europe est résiduelle.

La Présidente Danielle Auroi. Tout à fait ; cela a même été un axe fort de la politique communautaire, qui a visé à mettre fin à toute production de tabac en Union Européenne.

Puis la Commission a adopté les conclusions dont le texte figure ci-après. 

CONCLUSIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION

La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires, et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente du tabac et de ses produits (COM (2012) 788 final),

Vu le rapport de la Commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente du tabac et de ses produits (COM(2012) 788 – C7-0420/2012 – 2012/0366(COD)),

Vu la directive 2001/37/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2001 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de fabrication, de présentation et de vente des produits du tabac,

Vu la Convention-cadre anti-tabac de l’Organisation Mondiale de la Santé,

Considérant que les produits du tabac sont les seuls produits à être commercialisés légalement sur le marché dont l’utilisation conforme aux préconisations du fabricant entraîne le décès ;

Considérant que le tabagisme est une épidémie internationale contre laquelle seuls les pouvoirs publics peuvent lutter ;

Considérant que les enjeux de santé publique de cette proposition de directive priment sur les enjeux économiques ;

Considérant que la directive 2001/37/CE a été le résultat de plusieurs années d’actions de sensibilisation de la part des professionnels médicaux et des associations civiles de lutte contre le tabagisme ;

Considérant qu’un nouveau texte européen plus adapté aux évolutions du marché peut néanmoins être envisagé pour parvenir à un accord entre le Conseil et le Parlement européen ;

1. Constate que les dispositions de la directive 2001/37/CE ne sont plus conformes au cadre juridique international, notamment à la convention-cadre anti-tabac de l’Organisation Mondiale de la Santé ratifiée par l’Union Européenne le 16 juin 2003 ;

2. Constate que cette directive, dépassée par les progrès scientifiques et l’internationalisation du marché des produits du tabac, ne permet pas une harmonisation du marché intérieur efficace et une lutte effective contre l’épidémie du tabagisme ;

3. Se réjouit de la volonté de l’Union Européenne de mieux encadrer la fabrication, la présentation et la vente du tabac et de ses produits ;

4. Approuve cette proposition de directive, en ce qu’elle :

a) vise à mettre à jour les domaines déjà harmonisés pour adapter les législations des États membres aux progrès techniques, au cadre juridique international et aux évolutions récentes du marché ;

b) vise à lutter contre l’entrée des jeunes dans le tabagisme ;

c) augmente les tailles des avertissements sanitaires combinés ;

d) encadre la vente transfrontalière à distance ;

e) dispose d’un processus de traçabilité et de sécurité ;

f) interdit l’ajout des arômes dans les cigarettes ;

5. Estime néanmoins qu’un certain nombre de précisions et d’améliorations permettrait d’atteindre plus efficacement les objectifs fixés ;

6. Considère que le paragraphe 6 de l’article 7 de la proposition de directive doit être modifié en vertu des recommandations internationales et que la proposition de directive ne doit pas limiter toute possibilité pour les États d’apposer des avertissements au-delà de la taille fixée par la directive qui est de 75 % et que l’Union Européenne devrait laisser aux États la possibilité d’augmenter les dimensions des avertissements sanitaires combinés si telle est leur volonté ;

7. Demande à ce que l’article 4 de la proposition de directive respecte la distinction actuellement en vigueur entre laboratoires de certification indépendants des industriels et laboratoires de test ;

8. Exige que le tiers qui doit s’assurer de la traçabilité des produits du tabac en vertu du paragraphe 6 de l’article 14 de la proposition de directive soit complètement indépendant des industries du tabac ;

9. Estime que le système de suivi et de traçabilité prévu dans le protocole doit permettre le contrôle systématique et la reconstitution par les autorités compétentes du parcours ou des mouvements des articles tout le long de la chaine logistique selon les modalités cité à l’article 8,4 ;

10. Demande, afin de limiter la vente transfrontalière, que la quantité de tabac transportée soit limitée, à l’instar de ce qui se pratique pour l’alcool ;

11. Regrette que toutes les ventes transfrontalières ne soient pas concernées par la proposition de directive ;

12. Concernant l’article 18, se félicite que l’Union Européenne tente d’encadrer ces nouveaux produits mais estime que le recul est insuffisant pour pouvoir considérer les cigarettes électroniques comme médicaments et préconise de se donner du temps pour qualifier la cigarette électronique ;

13 Regrette que depuis la loi « Veil » de 1974, la lutte contre le tabagisme n’ait plus jamais fait l’objet d’un plan de santé publique spécifique et, au vu de la proposition de directive, estime indispensable que la France lance à nouveau une grande campagne de lutte anti-tabac, adaptée aux enjeux en termes de santé publique et à l’ampleur de l’épidémie ;

14. Demande que l’implantation des boutiques de cigarettes électroniques soit réglementée et interdite aux abords des écoles ;

15. Demande que des campagnes d’information, à l’instar de ce qui se fait pour la sécurité routière, soient mises en place et financées par une fraction forfaitaire de l’augmentation des recettes liées au tabac ;

16. Considère que le plan cancer 2009-2013, actuellement le seul plan de santé publique à traiter de la lutte contre le tabagisme, est très insuffisant ;

17. Demande à ce que les contrôles soient renforcés et que les préfets veillent à l’application de la règlementation et fassent remonter au ministère de l’Intérieur le bilan de l’application de l’interdiction de fumer dans les lieux publics ;

18. Souhaite que le vote final sur la proposition de directive soit guidé par l’intérêt supérieur de protection de la santé publique, et non par des intérêts économiques ou financiers.

ANNEXES

ANNEXE NO 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE

- Mme Emmanuelle BEGUINOT, directrice du Comité National de Lutte Contre le Tabagisme

- Pr Bertrand DAUTZENBERG, Président de l’Office Français de Prévention Contre le Tabagisme, Pneumologue

- Mme Caroline FERRARI, Secrétaire Général Adjointe du Secrétariat Général des Affaires Européennes (SGAE)

- M. Jean François BOURDAIS, Chef du département Travail, Emploi, Politique Sociale, Santé, Education, Culture, Audiovisuel, Sport du SGAE

- Mme Julia CARRATI, Adjointe au chef du secteur Travail, Emploi, Politique Sociale, Santé, Education, Culture, Audiovisuel, Sport, chargée des questions Santé du SGAE

- M. Guillaume FUCHS, Adjoint au secteur Parlement du SGAE

- M. Vincent HOUDRY, Conseiller santé, Représentation permanente de la France auprès de l'Union Européenne

- M. Pascal MONTREDON, Secrétaire Général de la Confédération des Buralistes

- M. Jean Michel PILLON, Administrateur supérieur des douanes

- M. Jean Paul VASLIN, Directeur Général de la Confédération des Buralistes

- M. Eric SENSI, Directeur Général de la Société d’Exploitation Industriel du Tabac et des Allumettes

- M. Morgan CAUVIN, Responsable des affaires publiques de la Société d’Exploitation Industriel du Tabac et des Allumettes

ANNEXE NO 2 : PAQUETS SLIM

ANNEXE NO 3 : PAQUETS NEUTRES STANDARDISES

ANNEXE NO 4 : PAQUETS NEUTRES STANDARDISES EN AUSTRALIE

1 Source :Institut National de Prévention e–d’Éducation pour la Santé, chiffres disponibles sur http ://www.inpes.sante.fr/CFESBases/catalogue/pdf/623.pdf

2 Comité National Contre le Tabagisme, http ://www.cnct.fr/combien-ca-coute-77/le-tabac-coute-cher-a-la-societe-1-24.html

3 Article 11 de la Convention-cadre pour la lutte anti-tabac de l’Organisation Mondiale de la Santé

4 European School Survey Project on Alcohol and other Drugs

5 Cf. Annexe 2

6 Rapport disponible sur http ://cigaretteelectronique.org/wp-content/uploads/2013/05/Rapport_e-cigarette_mai_2013.pdf

7 Rapport et avis des experts sur l’e–cigarette, mai 2013.

8 Il s’agit d’une pâte à mâcher à base de tabac, interdite depuis 1992 dans toute l’UE, à l’exception de la Suède.

9 Le prix du paquet de Marlboro est passé de 3,6 euros en 2002 à 6,6 euros en 2012.

10 En vigueur depuis le 1er janvier 2008 dans tous les lieux publics.

11 Le rapport de l’OFT est clair sur un point : que ce soit sur la consommation passive ou active, la cigarette électronique est moins nocive que la cigarette classique. Il indique que sa vapeur n’a pas de potentiel cancérogène contrairement à la fumée du tabac. Le CO et les particules solides, vecteurs majeurs de la toxicité cardio vasculaire, en sont absents.

12 La nicotine est classée substance « très dangereuse » par l’OMS car elle implique une forte addiction (plus importante que le cannabis ou certaines drogues de synthèse).

13 Cette solution est en cours d’études par les services du ministère des affaires sociales.

14 Certaines entreprises ont également adoptées des règlements intérieurs prévoyant l’interdiction des e-cigarettes sur le lieu de travail ou dans les lieux fermés accueillant du public

15 Communiqué de presse du conseil du 21 juin 2013.

16 COM (2012) 788.

17 Académie Nationale de Médecine, Rapport contre le tabagisme. Disponible sur http ://www.academie-medecine.fr/sites_thematiques/tabac/TUBIANA_RAPP_25mai_2009_TABAC.htm.

18 Rapport d’évaluation, Les politiques de lutte contre le tabagisme. Disponible sur http ://www.ccomptes.fr/Actualites/A-la-une/Les-politiques-de-lutte-contre-le-tabagisme.

19 Cf. annexe 4.